L' événement
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En l'an 2000, dans le monde :
50 % de Chinois et d'Indiens,
10 % d'Européens.
Un cri d'alarme : la population
du globe augmente
deux fois plus vite
que la production agricole.
Un danger permanent :
les pays trop peuplés sont
condamnés au sous-développement.
L'avortement légal en U.R.S.S.,
la chasteté obligatoire en Chine.
la chasteté obligatoire en Chine.
Peut-on à la fois étendre
le progrès social
dans les nations riches
et augmenter les ressources
dans les pays arriérés ?
Une solution impérative :
harmoniser
harmoniser
la croissance démographique
avec celle de l'économie.
avec celle de l'économie.
Edouard
Bonnefous
Bonnefous
Membre de l'Institut,
Sénateur, ancien Ministre,
Sénateur, ancien Ministre,
donne l'alarme :
LE MONDE EST-IL
LE MONDE EST-IL
SURPEUPLÉ ?
Un livre clair et objectif
{ paru dans la collection
{ paru dans la collection
I ON EN PARLE J
HACHETTE
L'événement
25, boulevard Saint-Martin
Paris-lll"
TUR. 37-97 +
C.C.P. Paris 22 905-90
Directeur :
Emmanuel d'Astier
Emmanuel d'Astier
CHRONOLOGIE DE L'ÉVÉNEMENT Juin 1968
REGARD SUR L'ÉVÉNEMENT Emmanuel d'Astier
REGARD SUR L'ÉVÉNEMENT Emmanuel d'Astier
V ,
' ,,:^t,41 , t~^'
' ,,:^t,41 , t~^'
8
O.R.T.F.
La grève incomprise
22
La grève incomprise
22
ÉLECTIONS
Décadence du suffrage universel
30
Décadence du suffrage universel
30
ÉLECTIONS
Les urnes aux champs
36
Les urnes aux champs
36
AFFICHES
Sur les murs de Paris
40
Sur les murs de Paris
40
GRÈVE
Les mécontents
48
Les mécontents
48
MÉDECINE
A l'assaut des féodalités
54
A l'assaut des féodalités
54
CADRES
Le début d'un conflit
59
Le début d'un conflit
59
ÉCONOMIE
Les conséquences
64
Les conséquences
64
DANS LE MONDE
L'internationale étudiante
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70
L'internationale étudiante
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70
ENTRETIEN
f-f-F' tV- » "«<'„' ,'
Wilfred Burchett
SAIGON
La pourriture
RÉDACTION EN CHEF : Michel-Antoine Burnier,
Danielle Corbel, Christian Jelen. ADMINISTRA-
TION : Robert Strauss. PROMOTION : Jacques
Quoirez. RELATIONS EXTÉRIEURES : Janine Ma-
rignac. ABONNEMENTS : André Renaudin. PHOTO-
COMPOSITION, TIRAGE OFFSET : Imprimerie
La Haye, Les Mureaux. DIRECTEUR DE LA PUBLI-
CATION : Emmanuel d'Astier.
Danielle Corbel, Christian Jelen. ADMINISTRA-
TION : Robert Strauss. PROMOTION : Jacques
Quoirez. RELATIONS EXTÉRIEURES : Janine Ma-
rignac. ABONNEMENTS : André Renaudin. PHOTO-
COMPOSITION, TIRAGE OFFSET : Imprimerie
La Haye, Les Mureaux. DIRECTEUR DE LA PUBLI-
CATION : Emmanuel d'Astier.
© Reproduction interdite de
tous articles sauf accord avec
l'administration.
tous articles sauf accord avec
l'administration.
ONT PARTICIPÉ A CE NUMÉRO : Thomas Bucha-
nan - Wilfred Burchett - Julien Fanjeaux - Michel
Fansten - Philippe Gavi - Annette Lena - Albert-
Paul Lentin - Georges Marin - Charles Morand -
Pierre-Charles Pathé - Olivier Oudiette - Simon
Notte - Roger-Jean Ségalat - Bertrand Soyer.
nan - Wilfred Burchett - Julien Fanjeaux - Michel
Fansten - Philippe Gavi - Annette Lena - Albert-
Paul Lentin - Georges Marin - Charles Morand -
Pierre-Charles Pathé - Olivier Oudiette - Simon
Notte - Roger-Jean Ségalat - Bertrand Soyer.
Photo de couverture : Henri Hudrisier.
juin
CHRONOLOGIE
DE
L'EVENEMENT
L'EVENEMENT
1968
france
pays développés
tiers-monde
Le gouvernement refuse de réviser les
listes électorales : plus de 200000
jeunes ont atteint depuis le 29 février
l'âge de la majorité légale. Conseil des
Ministres : de Gaulle souhaite qu'une
« majorité indiscutable et homogène se
dégage des élections ». Fédérés et
communistes reconduisent leur accord
électoral de décembre 1966. «Elec-
tions trahison » scandent 35 000 étu-
diants de Montparnasse à la gare d'Aus-
terlitz.
listes électorales : plus de 200000
jeunes ont atteint depuis le 29 février
l'âge de la majorité légale. Conseil des
Ministres : de Gaulle souhaite qu'une
« majorité indiscutable et homogène se
dégage des élections ». Fédérés et
communistes reconduisent leur accord
électoral de décembre 1966. «Elec-
tions trahison » scandent 35 000 étu-
diants de Montparnasse à la gare d'Aus-
terlitz.
Les socialistes nenniens se retirent de
la coalition gouvernementale de centre
gauche. La démocratie chrétienne de-
vra désormais négocier, cas par cas.
un soutien parlementaire. Yougoslavie :
fin des entretiens Tito-Ceausescu. Rou-
mains et Yougoslaves sont décidés à
lutter contre « les institutions périmées
devenues une entrave au progrès».
Grande-Bretagne : M. Wilson invite les
syndicats à collaborer avec son gouver-
nement.
la coalition gouvernementale de centre
gauche. La démocratie chrétienne de-
vra désormais négocier, cas par cas.
un soutien parlementaire. Yougoslavie :
fin des entretiens Tito-Ceausescu. Rou-
mains et Yougoslaves sont décidés à
lutter contre « les institutions périmées
devenues une entrave au progrès».
Grande-Bretagne : M. Wilson invite les
syndicats à collaborer avec son gouver-
nement.
Sénégal : retour au calme. 36 condam-
nations allant de 18 mois à 3 ans de
prison sont prononcées par le tribunal
des flagrants délits. Haïti : exécution
de rebelles par le président Duvalier
en personne pour intimider les guéril-
leros qui ont débarqué en mai dans
l'île.
nations allant de 18 mois à 3 ans de
prison sont prononcées par le tribunal
des flagrants délits. Haïti : exécution
de rebelles par le président Duvalier
en personne pour intimider les guéril-
leros qui ont débarqué en mai dans
l'île.
Les gares de Strasbourg et de Mu-
lhouse sont réoccupées par les gré-
vistes. Les positions syndicales se dur-
cissent après l'allocution de de Gaulle.
La C.F.D.T. : « Le mouvement syndical
aborde une autre phase ; celle des élec-
tions. Nous tenterons de briser le di-
lemme des deux blocs gaulliste et
communiste». La C.G.T. : «La reprise
du travail aura lieu en bon ordre là où
les revendications auront reçu des sa-
tisfactions suffisantes ».
lhouse sont réoccupées par les gré-
vistes. Les positions syndicales se dur-
cissent après l'allocution de de Gaulle.
La C.F.D.T. : « Le mouvement syndical
aborde une autre phase ; celle des élec-
tions. Nous tenterons de briser le di-
lemme des deux blocs gaulliste et
communiste». La C.G.T. : «La reprise
du travail aura lieu en bon ordre là où
les revendications auront reçu des sa-
tisfactions suffisantes ».
Etats-Unis : McCarthy rejette l'alliance
que lui propose Robert Kennedy. You-
goslavie : échauffourée entre miliciens
et étudiants. Allemagne fédérale : les
que lui propose Robert Kennedy. You-
goslavie : échauffourée entre miliciens
et étudiants. Allemagne fédérale : les
étudiants repeignent le nom de Karl
Marx sur la façade de l'université de
Francfort. Khroutchev à l'exposition
d'arts ménagers de Moscou. Moscou :
les Etats-Unis et l'U.R.S.S. négocient
le renouvellement de leurs accords
culturels et scientifiques.
Marx sur la façade de l'université de
Francfort. Khroutchev à l'exposition
d'arts ménagers de Moscou. Moscou :
les Etats-Unis et l'U.R.S.S. négocient
le renouvellement de leurs accords
culturels et scientifiques.
Turquie : 14 morts et 37 blessés à
l'occasion des élections. Le Biafra re-
jette sur Lagos la responsabilité de la
rupture des négociations de Kampala.
Proche-Orient : reprise des livraisons
d'armes américaines à la Jordanie :
118 avions F. 104 et 100 chars Pat-
ton. Viêt-nam : six officiers gouverne-
mentaux sont tués par une roquette
américaine.
l'occasion des élections. Le Biafra re-
jette sur Lagos la responsabilité de la
rupture des négociations de Kampala.
Proche-Orient : reprise des livraisons
d'armes américaines à la Jordanie :
118 avions F. 104 et 100 chars Pat-
ton. Viêt-nam : six officiers gouverne-
mentaux sont tués par une roquette
américaine.
Aucun signe de reprise dans les
services publics, P. et T., transports,
mines, métallurgie... O.R.T.F. : rup-
ture entre l'Intersyndicale et le ministre
à propos de l'office. Départ des direc-
teurs de la Radio (M. de Boisdeffre),
de la Télévision (M. Biasini) et du jour-
nal télévisé (M. Sablier). Les gaullistes
du comité d'action civique de l'O.R.T. F.
demandent momentanément la suspen-
sion de certains grévistes. Ceux-ci por-
tent plainte en diffamation. Le salaire
minimum agricole est majoré de
56,2 %.
services publics, P. et T., transports,
mines, métallurgie... O.R.T.F. : rup-
ture entre l'Intersyndicale et le ministre
à propos de l'office. Départ des direc-
teurs de la Radio (M. de Boisdeffre),
de la Télévision (M. Biasini) et du jour-
nal télévisé (M. Sablier). Les gaullistes
du comité d'action civique de l'O.R.T. F.
demandent momentanément la suspen-
sion de certains grévistes. Ceux-ci por-
tent plainte en diffamation. Le salaire
minimum agricole est majoré de
56,2 %.
Yougoslavie : nouveaux heurts entre
étudiants et policiers. Des comités
d'action organisent la révolte des étu-
diants contre « la bourgeoisie rouge ».
Les étudiants demandent la révocation
des directeurs et des rédacteurs de tous
les journaux de Belgrade, celle du com-
mandant de la milice. Oxford : deux
cents étudiants demandent et obtien-
nent la libre diffusion de leurs tracts.
Commentaire des manifestants : « Nous
avons gagné une escarmouche, la ba-
taille continue. »
étudiants et policiers. Des comités
d'action organisent la révolte des étu-
diants contre « la bourgeoisie rouge ».
Les étudiants demandent la révocation
des directeurs et des rédacteurs de tous
les journaux de Belgrade, celle du com-
mandant de la milice. Oxford : deux
cents étudiants demandent et obtien-
nent la libre diffusion de leurs tracts.
Commentaire des manifestants : « Nous
avons gagné une escarmouche, la ba-
taille continue. »
Viêt-nam : le F.N.L. oombarde Saigon
pour la dix-huitième fois en un mois.
Argentine : les milieux ouvriers durcis-
sent leur attitude à l'égard du régime
du général Ongania. Brésil : conflit
entre 23 prêtres et la hiérarchie catho-
lique dans l'Etat de Sao-Paulo. Les
prêtres abandonnent leur paroisse et
déclarent que «leur attitude est
conforme à la vision de l'Eglise que pré-
sente le Vatican ». Equateur : Velasco
Ibarra serait élu, pour la cinquième
fois, président de la République.
pour la dix-huitième fois en un mois.
Argentine : les milieux ouvriers durcis-
sent leur attitude à l'égard du régime
du général Ongania. Brésil : conflit
entre 23 prêtres et la hiérarchie catho-
lique dans l'Etat de Sao-Paulo. Les
prêtres abandonnent leur paroisse et
déclarent que «leur attitude est
conforme à la vision de l'Eglise que pré-
sente le Vatican ». Equateur : Velasco
Ibarra serait élu, pour la cinquième
fois, président de la République.
1er JUIN. — Le président de Haïti, le docteur Duvalier,
a annoncé que l'invasion lancée fin mai par un groupe de
rebelles avait été définitivement liquidée. C'était la huitième
tentative de ce genre depuis la venue au pouvoir de Duva-
lier en 1957.
a annoncé que l'invasion lancée fin mai par un groupe de
rebelles avait été définitivement liquidée. C'était la huitième
tentative de ce genre depuis la venue au pouvoir de Duva-
lier en 1957.
L'affaire semble avoir été montée par des exilés installés
à New York dont le chef est l'ex-président Magloire. Leur
base de départ était aux îles Bahamas. Les rebelles dispo-
saient d'avions et quelques bombes furent lancées un peu
hasard autour du palais présidentiel. Il y eut aussi quelques
escarmouches dans le maquis. L'entreprise n'alla pas plus
loin.
à New York dont le chef est l'ex-président Magloire. Leur
base de départ était aux îles Bahamas. Les rebelles dispo-
saient d'avions et quelques bombes furent lancées un peu
hasard autour du palais présidentiel. Il y eut aussi quelques
escarmouches dans le maquis. L'entreprise n'alla pas plus
loin.
Duvalier reste en selle, mais la situation n'en est pas
meilleure pour cela. La république d'Haïti résulte de la divi-
sion de l'île d'Haïti (anciennement Hispaniola) en deux Etats
distincts : Haïti et Saint Domingue. La séparation a eu lijeu
en 1844. La république d'Haïti a 28000 km2 et cinq mil-
lions d'habitants qui descendent en grande majorité des
esclaves noirs amenés par les colons européens aux seizième
et dix-septième siècles. Ils parlent un français plus ou moins
déformé.
meilleure pour cela. La république d'Haïti résulte de la divi-
sion de l'île d'Haïti (anciennement Hispaniola) en deux Etats
distincts : Haïti et Saint Domingue. La séparation a eu lijeu
en 1844. La république d'Haïti a 28000 km2 et cinq mil-
lions d'habitants qui descendent en grande majorité des
esclaves noirs amenés par les colons européens aux seizième
et dix-septième siècles. Ils parlent un français plus ou moins
déformé.
Il n'y a pratiquement ni industrie, ni infrastructure mo-
derne. Le pays exporte du café et du sucre, mais il est inca-
pable de nourrir une population beaucoup trop nombreuse
et en pleine expansion.
derne. Le pays exporte du café et du sucre, mais il est inca-
pable de nourrir une population beaucoup trop nombreuse
et en pleine expansion.
Duvalier règne par la terreur, grâce à une bonne organi-
sation policière, les Tontons Macoutes. Il est sans scrupules
et tous les moyens lui sont bons pour se maintenir au pou-
voir. Il ne craint pas de favoriser le culte de la sorcellerie qui
domine de beaucoup le christianisme nominal des Haïtiens.
sation policière, les Tontons Macoutes. Il est sans scrupules
et tous les moyens lui sont bons pour se maintenir au pou-
voir. Il ne craint pas de favoriser le culte de la sorcellerie qui
domine de beaucoup le christianisme nominal des Haïtiens.
Son régime est celui de l'immobilisme, et on ne voit pas
très bien ce que le pays pourrait devenir, à moins d'une
révolution totale accompagnée d'un puissant appui écono-
mique extérieur. Duvalier s'est toujours défié des Etats-Unis
trop envahissants, et le gouvernement de Washington le
tolère parce qu'il a peur de ce qui pourrait lui succéder.
très bien ce que le pays pourrait devenir, à moins d'une
révolution totale accompagnée d'un puissant appui écono-
mique extérieur. Duvalier s'est toujours défié des Etats-Unis
trop envahissants, et le gouvernement de Washington le
tolère parce qu'il a peur de ce qui pourrait lui succéder.
C'est ainsi que se maintient la situation. La population vit
dans l'ignorance et le dénuement. La grande majorité est
illettrée et n'a ni toit ni travail régulier. La nature du climat
permet cette existence.
dans l'ignorance et le dénuement. La grande majorité est
illettrée et n'a ni toit ni travail régulier. La nature du climat
permet cette existence.
Le réveil viendra sûrement. La population haïtienne est
exubérante de vie et fourmille d'artistes en puissance. Elle
est disponible pour n'importe quelle activité, le jour où les
possibilités se présenteront.
exubérante de vie et fourmille d'artistes en puissance. Elle
est disponible pour n'importe quelle activité, le jour où les
possibilités se présenteront.
3 JUIN. — La petite planète Icare est passée à un peu plus
de 6 millions de km de nous. Les risques de collision étaient
nuls, mais l'astéroïde repassera dans notre voisinage en
1987 et 2006. Nous ne connaissons pas suffisamment
les perturbations que subira d'ici là son orbite pour savoir
s'il s'approchera davantage de la Terre lors de ses nouveaux
passages.
de 6 millions de km de nous. Les risques de collision étaient
nuls, mais l'astéroïde repassera dans notre voisinage en
1987 et 2006. Nous ne connaissons pas suffisamment
les perturbations que subira d'ici là son orbite pour savoir
s'il s'approchera davantage de la Terre lors de ses nouveaux
passages.
Icare est un bloc rocheux de 1 500 mètres de diamètre et
pèse 5 milliards de tonnes. Son impact serait une catas-
trophe, mais seulement une catastrophe locale. Sur la terre
ferme il creuserait un cratère de quelques dizaines de kilo-
mètres de diamètre et quelques kilomètres de profondeur. Le
choc sur l'océan serait le plus probable, ce serait aussi le plus
désastreux car il provoquerait des vagues monstres se dépla-
pèse 5 milliards de tonnes. Son impact serait une catas-
trophe, mais seulement une catastrophe locale. Sur la terre
ferme il creuserait un cratère de quelques dizaines de kilo-
mètres de diamètre et quelques kilomètres de profondeur. Le
choc sur l'océan serait le plus probable, ce serait aussi le plus
désastreux car il provoquerait des vagues monstres se dépla-
m
çant à 700 ou 800 km/heure et qui pénétreraient loin à
l'intérieur des terres.
l'intérieur des terres.
Le monde solaire renferme quelques milliers de petites
planètes, mais la plupart gravitent entre Mars et Jupiter.
Très peu s'approchent de l'orbite terrestre. Cependant, le
31 octobre 1937, la petite planète Hermès a traversé
l'écliptique exactement sur la trajectoire de notre globe.
Celui-ci était passé depuis un peu plus de six heures et se
trouvait à 730 000 km. Mais six heures sur une année ce
n'est pas grand-chose et Hermès est plus massive qu'Icare.
planètes, mais la plupart gravitent entre Mars et Jupiter.
Très peu s'approchent de l'orbite terrestre. Cependant, le
31 octobre 1937, la petite planète Hermès a traversé
l'écliptique exactement sur la trajectoire de notre globe.
Celui-ci était passé depuis un peu plus de six heures et se
trouvait à 730 000 km. Mais six heures sur une année ce
n'est pas grand-chose et Hermès est plus massive qu'Icare.
Le passage d'Icare a donné lieu à de multiples observa-
tions et mesures. Ce n'est pas que les astronomes s'in-
quiètent beaucoup des collisions possibles, mais ils
comptent sur cet astéroïde pour effectuer de nouvelles
vérifications concernant la relativité générale. Cette gran-
diose théorie a le défaut de ne se prêter que très difficilement
à des contrôles. C'est ainsi qu'en mécanique céleste, il faut
qu'un astre s'approche très près du soleil pour que les diffé-
rences avec la loi de Newton deviennent appréciables.
Jusqu'ici seule la planète Mercure était dans ce cas. Son
mouvement était conforme aux calculs d'Einstein, mais cette
vérification est peut-être moins rigoureuse qu'on ne l'avait
cru. Comme Icare s'approche à 27 millions de kilomètres du
soleil, il apporte une occasion de contrôle encore plus
précise. D'ici quelques semaines nous saurons à quoi nous
en tenir.
tions et mesures. Ce n'est pas que les astronomes s'in-
quiètent beaucoup des collisions possibles, mais ils
comptent sur cet astéroïde pour effectuer de nouvelles
vérifications concernant la relativité générale. Cette gran-
diose théorie a le défaut de ne se prêter que très difficilement
à des contrôles. C'est ainsi qu'en mécanique céleste, il faut
qu'un astre s'approche très près du soleil pour que les diffé-
rences avec la loi de Newton deviennent appréciables.
Jusqu'ici seule la planète Mercure était dans ce cas. Son
mouvement était conforme aux calculs d'Einstein, mais cette
vérification est peut-être moins rigoureuse qu'on ne l'avait
cru. Comme Icare s'approche à 27 millions de kilomètres du
soleil, il apporte une occasion de contrôle encore plus
précise. D'ici quelques semaines nous saurons à quoi nous
en tenir.
3 JUIN — Depuis 1950, on utilise couramment les anti-
biotiques dans l'élevage. Généralement mélangés à la nour-
riture, ils augmentent sensiblement le rendement des éle-
vages de porcs, de poulets, etc...
biotiques dans l'élevage. Généralement mélangés à la nour-
riture, ils augmentent sensiblement le rendement des éle-
vages de porcs, de poulets, etc...
C'est seulement vers 1959 qu'on a commencé a expéri-
menter systématiquement sur les abeilles. C'est en U.R.S.S.
que ces expériences ont été le plus poussées. On sait que
l'élevage des abeilles constitue une activité traditionnelle
dans les campagnes russes.
menter systématiquement sur les abeilles. C'est en U.R.S.S.
que ces expériences ont été le plus poussées. On sait que
l'élevage des abeilles constitue une activité traditionnelle
dans les campagnes russes.
En introduisant dans des ruches normales de petites quan-
tités d'antibiotiques, on a immédiatement obtenu un
accroissement de la production de miel. La pénicilline et la
biomycine ont donné constamment de bons résultats ;
d'autres produits, comme la terramycine, ont eu une action
irrégulière et ont été abandonnés.
tités d'antibiotiques, on a immédiatement obtenu un
accroissement de la production de miel. La pénicilline et la
biomycine ont donné constamment de bons résultats ;
d'autres produits, comme la terramycine, ont eu une action
irrégulière et ont été abandonnés.
Les expériences effectuées sur plusieurs années en Mol-
davie, dans la zone de Krasnoiarsk, en Kasakie, etc., permet-
tent d'évaluer à 20 % l'accroissement de production de miel
dans les ruches traitées par rapport à celles de contrôle.
davie, dans la zone de Krasnoiarsk, en Kasakie, etc., permet-
tent d'évaluer à 20 % l'accroissement de production de miel
dans les ruches traitées par rapport à celles de contrôle.
L'observation a montré que l'absorption d'antibiotiques
augmentait l'appétit des at>eilles, puis leur activité, si bien
que l'accroissement de production dépassait sensiblement
l'élévation de consommation.
augmentait l'appétit des at>eilles, puis leur activité, si bien
que l'accroissement de production dépassait sensiblement
l'élévation de consommation.
france
monde
tiers-monde
Mardi 4 juin
Le travail reprend à la Banque de
France, dans les arsenaux, à l'E.D.F.
et aux charbonnages où l'activité atteint
40 à 80 % de la normale. Incidents
aux Galeries Lafayette et au Printemps
entre partisans et adversaires de la
reprise. O.P.T.F. : la direction générale
fait appel aux techniciens de l'armée.
U.IM.E.F. : une commission d'enquête
dénonce les brutalités qui furent com-
mises hors des affrontements dans la
rue (voir L'Evénement n° 29, p. 42,
43).
France, dans les arsenaux, à l'E.D.F.
et aux charbonnages où l'activité atteint
40 à 80 % de la normale. Incidents
aux Galeries Lafayette et au Printemps
entre partisans et adversaires de la
reprise. O.P.T.F. : la direction générale
fait appel aux techniciens de l'armée.
U.IM.E.F. : une commission d'enquête
dénonce les brutalités qui furent com-
mises hors des affrontements dans la
rue (voir L'Evénement n° 29, p. 42,
43).
Yougoslavie : des étudiants se décla-
rent décidés à occuper l'Université
aussi longtemps que leurs revendica-
tions ne seront pas satisfaites. La Ligue
des communistes promet des réformes.
U.R.S.S. : pour la première fois depuis
le début des grèves, la « Pravda »
condamne la politique intérieure gaul-
liste. Robert Kennedy est grièvement
blessé dans un attentat à Los Angeles
après son succès aux « primaires » de
Californie.
rent décidés à occuper l'Université
aussi longtemps que leurs revendica-
tions ne seront pas satisfaites. La Ligue
des communistes promet des réformes.
U.R.S.S. : pour la première fois depuis
le début des grèves, la « Pravda »
condamne la politique intérieure gaul-
liste. Robert Kennedy est grièvement
blessé dans un attentat à Los Angeles
après son succès aux « primaires » de
Californie.
Tunisie : le colonel Zbiri, animateur il
y a six mois d'un mouvement de sédi-
tion en Algérie, se voit accorder le
droit d'asile. Viêt-nam : les combats de
rue se poursuivent à Saigon. Cent
quinze mille nouveaux sans abri.
Proche-Orient : violente bataille entre
Israéliens et Jordaniens au sud du lac
de Tibériade. C'est le trentième inci-
dent de frontière qui oppose les deux
pays depuis le 26 mai 1967. La radio
du Caire appelle au soulèvement géné-
ralisé dans les territoires occupés.
y a six mois d'un mouvement de sédi-
tion en Algérie, se voit accorder le
droit d'asile. Viêt-nam : les combats de
rue se poursuivent à Saigon. Cent
quinze mille nouveaux sans abri.
Proche-Orient : violente bataille entre
Israéliens et Jordaniens au sud du lac
de Tibériade. C'est le trentième inci-
dent de frontière qui oppose les deux
pays depuis le 26 mai 1967. La radio
du Caire appelle au soulèvement géné-
ralisé dans les territoires occupés.
Mercredi 5 juin
Grèves : le trafic reprend progressive-
ment à la S.N.C.F., à la R.A.T.P. et
dans les P. et T. Le conflit se poursuit
dans la métallurgie. L'usine de Flins de
la régie Renault est dégagée par la
police. Vigilence titre l'Humanité : « Les
groupes gauchistes calomnient le parti
communiste... Ils rendent ainsi service
au pouvoir gaulliste et au patronat le
plus rapace » O.R.T.F. désir de négo-
ciation manifesté par M. Guéna et
l'Intersyndicale.
ment à la S.N.C.F., à la R.A.T.P. et
dans les P. et T. Le conflit se poursuit
dans la métallurgie. L'usine de Flins de
la régie Renault est dégagée par la
police. Vigilence titre l'Humanité : « Les
groupes gauchistes calomnient le parti
communiste... Ils rendent ainsi service
au pouvoir gaulliste et au patronat le
plus rapace » O.R.T.F. désir de négo-
ciation manifesté par M. Guéna et
l'Intersyndicale.
Après le meurtre de Robert Kennedy.
Lyndon Johnson : « ces terribles évé-
nements nous donnent un sérieux aver-
tissement ». Moscou : « L'assassinat
fait partie du mode de vie américain ».
Londres : « Les Anglais ont perdu leur
meilleur champion ». Madrid : « le plus
grand devoir politique se trouve dans le
maintien de l'ordre. » La Grande-Bre-
tagne tire 1,4 milliard de dollars sur
le Fonds monétaire. Les Etats-Unis ont
converti 916 millions de dollars en or
du 1er octobre 1967 au 30 avril 1968.
nements nous donnent un sérieux aver-
tissement ». Moscou : « L'assassinat
fait partie du mode de vie américain ».
Londres : « Les Anglais ont perdu leur
meilleur champion ». Madrid : « le plus
grand devoir politique se trouve dans le
maintien de l'ordre. » La Grande-Bre-
tagne tire 1,4 milliard de dollars sur
le Fonds monétaire. Les Etats-Unis ont
converti 916 millions de dollars en or
du 1er octobre 1967 au 30 avril 1968.
Viêt-nam : accalmie à Saigon. Proche-
Orient : diverses manifestations mar-
quent le premier anniversaire de la
guerre des six jours. Le président Nas-
ser rend hommage à la résistance pa-
lestinienne. Le roi Hussein : « Qu'Israël
nous dise quelles sont les frontières de
paix qu'il cherche et quelle solution il
souhaite». La Syrie : «II n'y a devant
les Arabes que la lutte armée. Elle est
la voie de la liberté aussi longue et
pénible soit-elle ».
Orient : diverses manifestations mar-
quent le premier anniversaire de la
guerre des six jours. Le président Nas-
ser rend hommage à la résistance pa-
lestinienne. Le roi Hussein : « Qu'Israël
nous dise quelles sont les frontières de
paix qu'il cherche et quelle solution il
souhaite». La Syrie : «II n'y a devant
les Arabes que la lutte armée. Elle est
la voie de la liberté aussi longue et
pénible soit-elle ».
Jeuys 6 Juin
S.N.C.F. et R.A.T.P. : reprise du trafic.
Automobile : point mort. Incidents à
Flins où les C.R.S. qui ont réoccupé
l'usine Renault matraquent les ouvriers
et des étudiants venus de Paris. L'Hu-
manité : « les commandos de Geismar,
militairement organisés sont passés
désormais à la provocation contre le
mouvement ouvrier». O.R.T.F. : gala-
meeting des grévistes dans la région
parisienne. Pierre Dumayet : « les étu-
diants nous ont appris que «l'impossi-
ble » cessait de l'être ».
Automobile : point mort. Incidents à
Flins où les C.R.S. qui ont réoccupé
l'usine Renault matraquent les ouvriers
et des étudiants venus de Paris. L'Hu-
manité : « les commandos de Geismar,
militairement organisés sont passés
désormais à la provocation contre le
mouvement ouvrier». O.R.T.F. : gala-
meeting des grévistes dans la région
parisienne. Pierre Dumayet : « les étu-
diants nous ont appris que «l'impossi-
ble » cessait de l'être ».
Yougoslavie : les négociations sont en-
gagées entre les autorités et les repré-
sentants des étudiants dont l'objectif
est « de faire revenir le régime au véri-
table esprit marxiste et non de détruire
le capitalisme ou une classe comme en
Occident». Suisse : des étudiants ge-
nevois réclament la démocratisation de
l'Université. Allemagne fédérale : le fils
de Willy Brandt est condamné à 15
jours de prison pour « refus de cir-
culer» au cours de manifestations étu-
diantes.
gagées entre les autorités et les repré-
sentants des étudiants dont l'objectif
est « de faire revenir le régime au véri-
table esprit marxiste et non de détruire
le capitalisme ou une classe comme en
Occident». Suisse : des étudiants ge-
nevois réclament la démocratisation de
l'Université. Allemagne fédérale : le fils
de Willy Brandt est condamné à 15
jours de prison pour « refus de cir-
culer» au cours de manifestations étu-
diantes.
Sénégal : M. Senghor, chef de l'Etat,
prend personnellement le portefeuille
de la Défense nationale. Nouveaux pi-
quets de grève devant l'université de
Dakar où les étudiants protestent
contre la réduction de leurs bourses.
Brésil : 16 000 étudiants en grève.
Turquie : les résultats des élections
sénatoriales confirment la stabilité du
corps électoral : 38 des 53 sièges re-
nouvelés vont au Parti de la justice du
président du Conseil, M. Demirel.
prend personnellement le portefeuille
de la Défense nationale. Nouveaux pi-
quets de grève devant l'université de
Dakar où les étudiants protestent
contre la réduction de leurs bourses.
Brésil : 16 000 étudiants en grève.
Turquie : les résultats des élections
sénatoriales confirment la stabilité du
corps électoral : 38 des 53 sièges re-
nouvelés vont au Parti de la justice du
président du Conseil, M. Demirel.
Vendredi 7 Juin
Show de Gaulle à la Télévision : un
«ange solitaire» qui arrache aux dé-
mons « totalitaires » l'ingrate multitude ;
« un révolutionnaire » qui désire par la
participation changer la condition de
l'homme dans la « société mécanique ».
La clé du renouveau : élections et anti-
communisme. L'Humanité et les ba-
garres de Flins : « le pouvoir gaulliste
a trouvé des auxiliaires précieux parmi
certains groupes gauchistes qui jouent
à la Révolution comme Marie-Antoi-
nette jouait à la bergère ».
mons « totalitaires » l'ingrate multitude ;
« un révolutionnaire » qui désire par la
participation changer la condition de
l'homme dans la « société mécanique ».
La clé du renouveau : élections et anti-
communisme. L'Humanité et les ba-
garres de Flins : « le pouvoir gaulliste
a trouvé des auxiliaires précieux parmi
certains groupes gauchistes qui jouent
à la Révolution comme Marie-Antoi-
nette jouait à la bergère ».
Yougoslavie : le comité d'action de
l'université de Belgrade rejette un com-
promis conclu entre les représentants
du gouvernement et des étudiants. Ita-
lie : heurts violents à Milan entre poli-
ciers et étudiants qui voulaient empê-
cher la sortie du quotidien libéral Cor-
riere délia Sera. Japon : les étudiants
de Tokyo manifestent contre les bases
américaines. U.R.S.S. : « Les Trois
Sœurs de Tchékhov sont retirées de
l'affiche à Moscou à cause de leur mise
en scène hérétique.
l'université de Belgrade rejette un com-
promis conclu entre les représentants
du gouvernement et des étudiants. Ita-
lie : heurts violents à Milan entre poli-
ciers et étudiants qui voulaient empê-
cher la sortie du quotidien libéral Cor-
riere délia Sera. Japon : les étudiants
de Tokyo manifestent contre les bases
américaines. U.R.S.S. : « Les Trois
Sœurs de Tchékhov sont retirées de
l'affiche à Moscou à cause de leur mise
en scène hérétique.
Viêt-nam : Washington qualifie d'« in-
téressante » une remarque du général
Giap selon laquelle «l'armée de libé-
ration et le peuple viêt-namien combat-
tent sur tous les champs de bataille ».
Les Américains publient le dernier bi-
lan de leurs pertes aériennes qui depuis
le début du conflit s'élèvent à 3 900
appareils dont 1719 hélicoptères.
Haïti : Le président Duvalier aurait fait
exécuter tous les prisonniers politiques
incarcérés à Port au Prince.
téressante » une remarque du général
Giap selon laquelle «l'armée de libé-
ration et le peuple viêt-namien combat-
tent sur tous les champs de bataille ».
Les Américains publient le dernier bi-
lan de leurs pertes aériennes qui depuis
le début du conflit s'élèvent à 3 900
appareils dont 1719 hélicoptères.
Haïti : Le président Duvalier aurait fait
exécuter tous les prisonniers politiques
incarcérés à Port au Prince.
Thomas Buchariân : Qui a tus Kennedy ?
4 JUIN. — II est terrifiant de voir se reproduire des évé-
nements que nous connaissons et dont nous savons l'issue.
Un autre Kennedy a rencontré un autre Oswald. L'histoire
des Etats-Unis est à nouveau bouleversée.
nements que nous connaissons et dont nous savons l'issue.
Un autre Kennedy a rencontré un autre Oswald. L'histoire
des Etats-Unis est à nouveau bouleversée.
Les autorités de Los Angeles comme celles de Dallas
imputent déjà l'assassinat de Robert Kennedy aux « commu-
nistes ». Pourtant, les groupes d'extrême-droite qui soutien-
nent l'intervention américaine au Viêt-nam et s'opposent à
l'intégration des Noirs ont toujours accusé Robert et John
Kennedy de se ranger du côté des pro-communistes.
imputent déjà l'assassinat de Robert Kennedy aux « commu-
nistes ». Pourtant, les groupes d'extrême-droite qui soutien-
nent l'intervention américaine au Viêt-nam et s'opposent à
l'intégration des Noirs ont toujours accusé Robert et John
Kennedy de se ranger du côté des pro-communistes.
Le ministre de la Justice, M. Clark — un ancien de Dallas
nommé par Lyndon Johnson — a déjà rejette l'hypothèse du
complot avant même que l'assassin présumé ait avoué.
Les porte-paroles du Département d'Etat sont arrivés à
une conclusion similaire. De John à Robert Kennedy, le
scénario est resté le même.
nommé par Lyndon Johnson — a déjà rejette l'hypothèse du
complot avant même que l'assassin présumé ait avoué.
Les porte-paroles du Département d'Etat sont arrivés à
une conclusion similaire. De John à Robert Kennedy, le
scénario est resté le même.
Acte 1 : Les autorités locales qui représentent l'extrême
droite accusent les « rouges », ce qui laisse supposer qu'il
y a eu conspiration.
droite accusent les « rouges », ce qui laisse supposer qu'il
y a eu conspiration.
Acte 2 : L'administration fédérale inquiète des réper-
cussions diplomatiques des assassinats des frères Kennedy
dénie ces allégations. Elle suggère que l'assassin était fou
et a agi pour son compte sous l'influence d'une idéologie
étrangère.
cussions diplomatiques des assassinats des frères Kennedy
dénie ces allégations. Elle suggère que l'assassin était fou
et a agi pour son compte sous l'influence d'une idéologie
étrangère.
Acte 3 : Le président nomme une commission d'enquête
pour rassurer le public. La commission aboutira à deux
conclusions : il n'existe . pas de preuve tangible d'un
complot ; les Américains se procurent trop d'armes à feu.
pour rassurer le public. La commission aboutira à deux
conclusions : il n'existe . pas de preuve tangible d'un
complot ; les Américains se procurent trop d'armes à feu.
Le gouvernement américain devrait commencer à se poser
la question de savoir pourquoi de tels assassinats se multi-
plient. De Dallas à Los Angeles, il y a eu beaucoup
d'autres meurtres dont les mobiles sont politiques.
la question de savoir pourquoi de tels assassinats se multi-
plient. De Dallas à Los Angeles, il y a eu beaucoup
d'autres meurtres dont les mobiles sont politiques.
Août 1964 : découverte au Mississipi des cadavres de
deux Blancs et d'un Noir qui militaient activement pour
l'émancipation des Noirs. Les assassins présumés : un
groupe de fanatiques d'extrême-droite.
deux Blancs et d'un Noir qui militaient activement pour
l'émancipation des Noirs. Les assassins présumés : un
groupe de fanatiques d'extrême-droite.
Février 1965 : assassinat par des Noirs de Malcom X,
leader des musulmans Noirs. Les amis de Malcom X
accusent la C.I.A.
leader des musulmans Noirs. Les amis de Malcom X
accusent la C.I.A.
Août 1965 : assassinat de Jonathan Daniels, avocat
blanc et défenseur des Noirs. Assassin présumé : un fana-
tique d'extrême-droite. En 1965 toujours, d'autres Blancs
d'extrême-droite attaquent et battent à mort un pasteur
protestant James Rééd. blessent Morrisroe un prêtre catho-
lique et tuent Viola Gregg Luizzo une mère de cinq enfants.
La liste du nom des Noirs assassinés cette année-là serait
trop longue à établir. La plupart des assassins, fanatiques
d'extrême-droite, sont en liberté.
blanc et défenseur des Noirs. Assassin présumé : un fana-
tique d'extrême-droite. En 1965 toujours, d'autres Blancs
d'extrême-droite attaquent et battent à mort un pasteur
protestant James Rééd. blessent Morrisroe un prêtre catho-
lique et tuent Viola Gregg Luizzo une mère de cinq enfants.
La liste du nom des Noirs assassinés cette année-là serait
trop longue à établir. La plupart des assassins, fanatiques
d'extrême-droite, sont en liberté.
Août 1967 : Lincoln Rockwell, le chef du parti nazi amé-
ricain est assassiné par un rival.
ricain est assassiné par un rival.
Avril 1968 : assassinat de Martin Luther King dont le
meurtrier reçoit l'aide de comploteurs grâce auxquels il a
pu quitter le pays.
meurtrier reçoit l'aide de comploteurs grâce auxquels il a
pu quitter le pays.
Tous ces exemples le montrent : le problème fondamental
n'est pas que les Américains détiennent trop d'armes. Les
assassinat de Robert Kennedy ou de Luther King ne sont pas
des crimes ordinaires. On ne les explique pas par référence
aux statistiques criminelles. Les leaders politiques d'un pays
n'est pas que les Américains détiennent trop d'armes. Les
assassinat de Robert Kennedy ou de Luther King ne sont pas
des crimes ordinaires. On ne les explique pas par référence
aux statistiques criminelles. Les leaders politiques d'un pays
'ï ;
.
BREF
meurent rarement dans des querelles de tripots. Ils ne sont
pas tués par des maris jaloux ou par des cambrioleurs. La
politique est par définition une affaire collective.
pas tués par des maris jaloux ou par des cambrioleurs. La
politique est par définition une affaire collective.
L'attentat contre Robert Kennedy a, dit-on, été organisé
et exécuté par un sympathisant des pays arabes. Et l'on
rappelle que le sénateur s'était récemment présenté comme
un fervent défenseur d'Israël et que le crime a eu lieu à la
veille du premier anniversaire de la guerre des Six Jours.
Avant d'accepter cette hypothèse, on devrait se souvenir
des hypothèses émises par le gouvernement américain après
le meurtre de Dallas. Selon Henri Wade, chef de la
police, Oswald avait agi pour défendre Fidel Castro. La
commission d'enquête dirigée par le juge Warren avait
accepté cette hypothèse. Celle-ci s'est avérée fausse en
1967 après l'enquête du juge Garrison. On sait aujourd'hui
que Oswald n'a jamais été un admirateur de Castro.
et exécuté par un sympathisant des pays arabes. Et l'on
rappelle que le sénateur s'était récemment présenté comme
un fervent défenseur d'Israël et que le crime a eu lieu à la
veille du premier anniversaire de la guerre des Six Jours.
Avant d'accepter cette hypothèse, on devrait se souvenir
des hypothèses émises par le gouvernement américain après
le meurtre de Dallas. Selon Henri Wade, chef de la
police, Oswald avait agi pour défendre Fidel Castro. La
commission d'enquête dirigée par le juge Warren avait
accepté cette hypothèse. Celle-ci s'est avérée fausse en
1967 après l'enquête du juge Garrison. On sait aujourd'hui
que Oswald n'a jamais été un admirateur de Castro.
La première fois qu'il montra de l'intérêt pour Cuba,
ce fut, après avoir été muté le 22 décembre 1958 à la
base de radars de El Toro en Californie par les Marines.
Là il reçut mission de surveiller l'approche des avions. Il
eut connaissance du code qu'utilisaient les avions amis
qui s'approchaient des côtes américaines. Comme ses col-
lègues, il était l'objet d'attention permanente des services de
renseignements américains.
ce fut, après avoir été muté le 22 décembre 1958 à la
base de radars de El Toro en Californie par les Marines.
Là il reçut mission de surveiller l'approche des avions. Il
eut connaissance du code qu'utilisaient les avions amis
qui s'approchaient des côtes américaines. Comme ses col-
lègues, il était l'objet d'attention permanente des services de
renseignements américains.
Le chef d'Oswald était un lieutenant, John Donavan,
que son éducation orientait davantage vers la diplomatie
que vers les radars. Il raconta au juge Warren qu'il avait eu
de longues discussions avec Oswald sur les questions inter-
nationales et notamment sur l'Amérique latine et Cuba. Il y
avait aussi dans le groupe Donavan un jeune Latino-
Américain du nom de Nelson Delgado qui avait porté
certains jugements favorables sur Castro. Donavan demanda
à Oswald de savoir ce que Delgado pensait vraiment de
Fidel Castro. Oswald accepta, et pris contact avec Del-
gado. Il demanda à celui-ci s'il voulait quitter les Marines
et rejoindre l'armée cubaine qui se préparait à libérer les
autres îles des Caraïbes. Quand Delgado indiqua que le
projet l'intéressait, Oswald lui fit savoir qu'il était en contact
avec des représentants de Castro et qu'il pourrait l'aider à
rejoindre l'armée cubaine. Delgado se méfia alors d'Oswald.
Plus tard, Oswald réapparu avec un prétendu document
cubain qui sembla authentique à Delgado. Lorsque le.Juge
Warren demanda à Donavan pourquoi il n'avait pas plus
tôt rapporté cette discussion, le lieutenant répondit : « Ce
qu'Oswald a dit à propos de Castro était un sentiment par-
tagé par la majorité des Américains. »
que son éducation orientait davantage vers la diplomatie
que vers les radars. Il raconta au juge Warren qu'il avait eu
de longues discussions avec Oswald sur les questions inter-
nationales et notamment sur l'Amérique latine et Cuba. Il y
avait aussi dans le groupe Donavan un jeune Latino-
Américain du nom de Nelson Delgado qui avait porté
certains jugements favorables sur Castro. Donavan demanda
à Oswald de savoir ce que Delgado pensait vraiment de
Fidel Castro. Oswald accepta, et pris contact avec Del-
gado. Il demanda à celui-ci s'il voulait quitter les Marines
et rejoindre l'armée cubaine qui se préparait à libérer les
autres îles des Caraïbes. Quand Delgado indiqua que le
projet l'intéressait, Oswald lui fit savoir qu'il était en contact
avec des représentants de Castro et qu'il pourrait l'aider à
rejoindre l'armée cubaine. Delgado se méfia alors d'Oswald.
Plus tard, Oswald réapparu avec un prétendu document
cubain qui sembla authentique à Delgado. Lorsque le.Juge
Warren demanda à Donavan pourquoi il n'avait pas plus
tôt rapporté cette discussion, le lieutenant répondit : « Ce
qu'Oswald a dit à propos de Castro était un sentiment par-
tagé par la majorité des Américains. »
Après la réussite de sa mission, Oswald fut recruté par
une agence privée qui l'envoya en U.R.S.S. Là on se méfia
une agence privée qui l'envoya en U.R.S.S. Là on se méfia
france
monde
tiers-monde
Après les déclarations du général de
Gaulle les gaullistes louent « le vision-
naire de l'histoire », les giscardiens
demandent des actes, les centristes
s'interrogent sur le sens des « bonnes
élections » souhaitées, la Fédération
parle du régime « à bout de souffle » et
les communistes s'élèvent contre les
« calomnies » visant leur parti. Geor-
ges Bidault est de retour en France :
Gaulle les gaullistes louent « le vision-
naire de l'histoire », les giscardiens
demandent des actes, les centristes
s'interrogent sur le sens des « bonnes
élections » souhaitées, la Fédération
parle du régime « à bout de souffle » et
les communistes s'élèvent contre les
« calomnies » visant leur parti. Geor-
ges Bidault est de retour en France :
Belgique : chrétiens et socialistes
publient un projet d'accord qui servira
de base à l'élaboration du programme
gouvernemental. C'est un compromis
entre défenseurs de l'initiative privée
et partisans du dirigisme économique,
entre Wallons redoutant la minorisa-
tion. Flamands soucieux d'autonomie
culturelle et Bruxellois, craignant
d'être étouffés par une pression conju-
guée Nord-Sud.
publient un projet d'accord qui servira
de base à l'élaboration du programme
gouvernemental. C'est un compromis
entre défenseurs de l'initiative privée
et partisans du dirigisme économique,
entre Wallons redoutant la minorisa-
tion. Flamands soucieux d'autonomie
culturelle et Bruxellois, craignant
d'être étouffés par une pression conju-
guée Nord-Sud.
Proche-Orient : Israël offrirait un
« plan de paix » au roi Hussein : restitu-
tion à la Jordanie des territoires occu-
pés à l'exception de Jérusalem et de
deux bandes de sécurité de 15 kilo-
mètres de large. Viêt-nam : 2215
américains tués en mai révèle l'état-
major. Ces pertes sont les plus élevées
jamais enregistrées en un mois. Les
bombardements de Saigon se pour-
suivent.
« plan de paix » au roi Hussein : restitu-
tion à la Jordanie des territoires occu-
pés à l'exception de Jérusalem et de
deux bandes de sécurité de 15 kilo-
mètres de large. Viêt-nam : 2215
américains tués en mai révèle l'état-
major. Ces pertes sont les plus élevées
jamais enregistrées en un mois. Les
bombardements de Saigon se pour-
suivent.
« Au travail ! : ce doit être la devise de
la France » affirme Pompidou — René
Capitant voudrait voir les salariés se
grouper sous forme de coopératives
ouvrières dans chaque entreprise :
« Ils ne seraient plus subordonnés
d'un patron, ils seraient leurs propres
patrons». O.R.T.F. : nouveau
durcissement. L'intersyndicale ,tient
pour capitale la nécessité de mettre
en place un organisme intérimaire
assurant la gestion de l'office jusqu'au
vote par le Parlement d'un nouveau
statut.
la France » affirme Pompidou — René
Capitant voudrait voir les salariés se
grouper sous forme de coopératives
ouvrières dans chaque entreprise :
« Ils ne seraient plus subordonnés
d'un patron, ils seraient leurs propres
patrons». O.R.T.F. : nouveau
durcissement. L'intersyndicale ,tient
pour capitale la nécessité de mettre
en place un organisme intérimaire
assurant la gestion de l'office jusqu'au
vote par le Parlement d'un nouveau
statut.
Yougoslavie : le maréchal Tito s'engage
à satisfaire les revendications des
étudiants ou à se démettre : «Je
comprends bien le mécontentement des
étudiants. Je ne leur fais pas de
reproches et considère que nous
réglerons leurs problèmes selon les
moyens de notre communauté socia-
liste ». La Nouvelle-Zélande adresse à
la France une nouvelle note de protes-
tation contre les essais nucléaires
dans le Pacifique.
à satisfaire les revendications des
étudiants ou à se démettre : «Je
comprends bien le mécontentement des
étudiants. Je ne leur fais pas de
reproches et considère que nous
réglerons leurs problèmes selon les
moyens de notre communauté socia-
liste ». La Nouvelle-Zélande adresse à
la France une nouvelle note de protes-
tation contre les essais nucléaires
dans le Pacifique.
Israël : ouverture du vingt-septième
Congrès sioniste mondial. Le Dr Na-
hum Goldmann affirme qu'Israël a
perdu l'amitié de beaucoup de mou-
vements libéraux, progressistes et
révolutionnaires. Haïti : le gouver-
nement annonce l'échec du débarque-
ment des rebelles à Cap-Haïtien.
Maroc : l'Istiqlal réclame la fin de
l'état d'exception instauré le 7 juin
1965 et demande des élections «li-
bres ». Indes : important engage-
ment entre Nagas et forces de l'ordre.
Congrès sioniste mondial. Le Dr Na-
hum Goldmann affirme qu'Israël a
perdu l'amitié de beaucoup de mou-
vements libéraux, progressistes et
révolutionnaires. Haïti : le gouver-
nement annonce l'échec du débarque-
ment des rebelles à Cap-Haïtien.
Maroc : l'Istiqlal réclame la fin de
l'état d'exception instauré le 7 juin
1965 et demande des élections «li-
bres ». Indes : important engage-
ment entre Nagas et forces de l'ordre.
Nouvelles scènes d'émeutes au quar-
tier Latin après l'annonce de la mort
par noyade à Flins du jeune lycéen
Gilles Tautin. Selon certains témoins
l'adolescent aurait été jeté à l'eau par
les policiers. Peugeot - Montbéliard :
un jeune travailleur est tué par balle au
cours d'un affrontement entre C.R.S.
et grévistes. Répression : trente jeu-
nes étrangers sont expulsés de France.
Elections : Etienne Fajon, directeur de
l'Humanité : «le parti communiste ne
revendique pas le pouvoir».
tier Latin après l'annonce de la mort
par noyade à Flins du jeune lycéen
Gilles Tautin. Selon certains témoins
l'adolescent aurait été jeté à l'eau par
les policiers. Peugeot - Montbéliard :
un jeune travailleur est tué par balle au
cours d'un affrontement entre C.R.S.
et grévistes. Répression : trente jeu-
nes étrangers sont expulsés de France.
Elections : Etienne Fajon, directeur de
l'Humanité : «le parti communiste ne
revendique pas le pouvoir».
Nations-Unies : la commission poli-
tique ' adopte la résolution sur le
traité de non-prolifération des armes
nucléaires par 92 voix contre 4
et 22 abstentions. Londres : le mi-
nistre d'Etat du Commonwer'lth de
relancer les négociations Nigéria-Biafra
à Kampala (Ouganda). U.R.S.S. :
disgrâce de M. Pavlov premier secré-
taire du comité central des jeunesses
communistes. Madrid : « La partici-
pation est un thème phalangiste »
écrit le quotidien S. P.
tique ' adopte la résolution sur le
traité de non-prolifération des armes
nucléaires par 92 voix contre 4
et 22 abstentions. Londres : le mi-
nistre d'Etat du Commonwer'lth de
relancer les négociations Nigéria-Biafra
à Kampala (Ouganda). U.R.S.S. :
disgrâce de M. Pavlov premier secré-
taire du comité central des jeunesses
communistes. Madrid : « La partici-
pation est un thème phalangiste »
écrit le quotidien S. P.
Viêt-nam : les combats prennent fin
à Cholbn. 14 roquettes et 4 obus sont
tirés sur Saigon. 35 obus de mortier
sur la base américaine de Bien-Hoa.
Hanoi : « le combat du peuple vietna-
mien sur tout le territoire est une obli-
gation et un droit sacré. » Général
Westmorelançl : « Les victoires du Têt
ont donné à l'armée sud-vietnamienne
un moral qui lui manquait jusqu'à ce
jour. L'ennemi est militairement
faible et s'affaiblit un peu plus chaque
jour ». Turquie : 20 000 étudiants en
grève. Occupation des facultés.
à Cholbn. 14 roquettes et 4 obus sont
tirés sur Saigon. 35 obus de mortier
sur la base américaine de Bien-Hoa.
Hanoi : « le combat du peuple vietna-
mien sur tout le territoire est une obli-
gation et un droit sacré. » Général
Westmorelançl : « Les victoires du Têt
ont donné à l'armée sud-vietnamienne
un moral qui lui manquait jusqu'à ce
jour. L'ennemi est militairement
faible et s'affaiblit un peu plus chaque
jour ». Turquie : 20 000 étudiants en
grève. Occupation des facultés.
Flambée de violence à rans après l'in-
terdiction d'une manifestation organi-
sée par l'U.N.E.F. et l'intervention
brutale de la police : 1 500 interpella-
tions, 72 barricades, 5 commissariats
attaqués. Peugeot - Montbéliard :
mort d'un second manifestant. Les
C.R.S. évacuent les usines Peugeot
fermées par la direction. La C.G.T.
et la C.F.D.T. lancent des consi-
gnes d'arrêt de travail pour réclamer
partout le retrait des C.R.S
terdiction d'une manifestation organi-
sée par l'U.N.E.F. et l'intervention
brutale de la police : 1 500 interpella-
tions, 72 barricades, 5 commissariats
attaqués. Peugeot - Montbéliard :
mort d'un second manifestant. Les
C.R.S. évacuent les usines Peugeot
fermées par la direction. La C.G.T.
et la C.F.D.T. lancent des consi-
gnes d'arrêt de travail pour réclamer
partout le retrait des C.R.S
Yougoslavie : le comité d'action des
«philosophes» envoie une délégation
au « cher et grand camarade Tito » pour
établir « un contact direct » avec lui.
Italie : échec des démarches de
M. Rumor auprès du parti socialiste
unifié pour la formation d'un Cabinet
tripartite. U.R.S.S. : protestation
contre un article paru dans la presse
tchécoslovaque sur l'octroi d'un passe-
port par un haut-officier soviétique au
général Sejna
«philosophes» envoie une délégation
au « cher et grand camarade Tito » pour
établir « un contact direct » avec lui.
Italie : échec des démarches de
M. Rumor auprès du parti socialiste
unifié pour la formation d'un Cabinet
tripartite. U.R.S.S. : protestation
contre un article paru dans la presse
tchécoslovaque sur l'octroi d'un passe-
port par un haut-officier soviétique au
général Sejna
Viêt-nam : l'aéroport de Tan-Son-
Nhut est bombardé. Le quartier géné-
ral du général Abrams nouveau com-
mandant en chef des forces américai-
caines n'est pas atteint. Pour la pre-
mière fois depuis dix jours, Saigon
n'est pas bombardé. Les autorités
estiment qu'il faudrait 100 000 hom-
mes de plus pour la défense de la ville.
Combats à Khe-Sanh, à Dalat sur les
Hauts Plateaux et à Gio-Linh près de
la zone démilitarisée.
Nhut est bombardé. Le quartier géné-
ral du général Abrams nouveau com-
mandant en chef des forces américai-
caines n'est pas atteint. Pour la pre-
mière fois depuis dix jours, Saigon
n'est pas bombardé. Les autorités
estiment qu'il faudrait 100 000 hom-
mes de plus pour la défense de la ville.
Combats à Khe-Sanh, à Dalat sur les
Hauts Plateaux et à Gio-Linh près de
la zone démilitarisée.
de lui. Après son retour, il resta en contact avec la C.I.A.
par l'intermédiaire de Georges de Mohrenschildt, son meil-
leur ami à Dallas, et David Ferrie à la Nouvelle Orléans.
Ferrie, on s'en souvient, est l'ancien pilote de ligne que l'on
trouva mort l'an dernier après que le juge Garrison ait décidé
de l'inculper. On sait aujourd'hui que Ferrie était le leader
d'un petit commando spécialisé dans les opérations menées
contre Fidel Castro. Ce groupe était armé et financé par la
C.I.A. Oswald appartenait à ce groupe. Son rôle était d'appa-
raître en public comme un défenseur de Castro puis de se
rendre à Mexico pour obtenir un visa, de là partir pour
La Havane et aider les autres membres du groupe que Ferrie
transporterait secrètement à Cuba. Les objectifs étaient le
sabotage et l'assassinat du Premier ministre.
par l'intermédiaire de Georges de Mohrenschildt, son meil-
leur ami à Dallas, et David Ferrie à la Nouvelle Orléans.
Ferrie, on s'en souvient, est l'ancien pilote de ligne que l'on
trouva mort l'an dernier après que le juge Garrison ait décidé
de l'inculper. On sait aujourd'hui que Ferrie était le leader
d'un petit commando spécialisé dans les opérations menées
contre Fidel Castro. Ce groupe était armé et financé par la
C.I.A. Oswald appartenait à ce groupe. Son rôle était d'appa-
raître en public comme un défenseur de Castro puis de se
rendre à Mexico pour obtenir un visa, de là partir pour
La Havane et aider les autres membres du groupe que Ferrie
transporterait secrètement à Cuba. Les objectifs étaient le
sabotage et l'assassinat du Premier ministre.
Un fait imprévu se produisit alors : John Kennedy avait
entamé des négociations secrètes avec Fidel Castro. Was-
hington et La Havane avaient décidé de liquider la guerre
froide. Quatre mois avant son assassinat, John Kennedy
donna l'ordre à son frère, ministre de la Justice, d'arrêter
les préparatifs d'invasion de l'île. John Kennedy alla même
plus loin. Une rencontre préliminaire entre Robert Kennedy
et Che Guevara serait tentée à Mexico. Si elle réussissait,
Kennedy et Castro se rencontreraient.
entamé des négociations secrètes avec Fidel Castro. Was-
hington et La Havane avaient décidé de liquider la guerre
froide. Quatre mois avant son assassinat, John Kennedy
donna l'ordre à son frère, ministre de la Justice, d'arrêter
les préparatifs d'invasion de l'île. John Kennedy alla même
plus loin. Une rencontre préliminaire entre Robert Kennedy
et Che Guevara serait tentée à Mexico. Si elle réussissait,
Kennedy et Castro se rencontreraient.
On ne sait pas encore à quel niveau de la C.I.A., l'oppo-
sition à la nouvelle politique étrangère du président s'est
manifestée. Le voyage d'Oswald à Mexico eut lieu un mois
après le changement de politique de Kennedy. Une photo
prise au consulat cubain montre qu'Oswald était accompa-
gné par un agent de la C.I.A. Il est clair que Ferrie décida
alors d'abandonner les objectifs de son commando et de
frapper Kennedy.
sition à la nouvelle politique étrangère du président s'est
manifestée. Le voyage d'Oswald à Mexico eut lieu un mois
après le changement de politique de Kennedy. Une photo
prise au consulat cubain montre qu'Oswald était accompa-
gné par un agent de la C.I.A. Il est clair que Ferrie décida
alors d'abandonner les objectifs de son commando et de
frapper Kennedy.
A Dallas, le rôle d'Oswald était de discréditer les Cubains
en prétendant sympathiser avec un régime qu'en fait il
détestait. Les objectifs politiques des assassins de Kennedy
étaient de renverser la nouvelle diplomatie américaine et
la coexistence avec Cuba, d'exciter l'opinion publique contre
Castro et de justifier un débarquement américain. Les deux
premiers objectifs ont été accomplis. Le troisième a échoué.
en prétendant sympathiser avec un régime qu'en fait il
détestait. Les objectifs politiques des assassins de Kennedy
étaient de renverser la nouvelle diplomatie américaine et
la coexistence avec Cuba, d'exciter l'opinion publique contre
Castro et de justifier un débarquement américain. Les deux
premiers objectifs ont été accomplis. Le troisième a échoué.
L'assassinat de Robert Kennedy par un Arabe développera
la haine de l'opinion publique à l'égard des pays arabes au
moment où de nouvelles hostilités menacent au Moyen-
Orien.. Cela ne doit pas déplaire à la C.I.A. inquiète de la
position modérée du gouvernement fédéral en juin 1967.
la haine de l'opinion publique à l'égard des pays arabes au
moment où de nouvelles hostilités menacent au Moyen-
Orien.. Cela ne doit pas déplaire à la C.I.A. inquiète de la
position modérée du gouvernement fédéral en juin 1967.
En tout état de cause, nous devons poser en 1968 la
même question que nous posions en 1963 : quels intérêts
servent les assassins des Kennedy ?
même question que nous posions en 1963 : quels intérêts
servent les assassins des Kennedy ?
BREF
des années. Le territoire naga se trouve à la frontière
birmane dans la partie orientale de l'Inde et l'armée indienne
ne l'occupe que très partiellement.
birmane dans la partie orientale de l'Inde et l'armée indienne
ne l'occupe que très partiellement.
En 1964, il y a bien eu un accord de cessez-le-feu, mais il
ne touchait pas au différend politique. Tôt ou tard, les hos-
tilités étaient appelées à reprendre, et c'est ce qui est arrivé
cette année.
ne touchait pas au différend politique. Tôt ou tard, les hos-
tilités étaient appelées à reprendre, et c'est ce qui est arrivé
cette année.
Il est étonnant que les Chinois ne soient pas intervenus
plus tôt pour aider les Nagas. Ceux-ci sont un allié idéal
contre l'Inde. Ils sont admirablement placés pour la harceler.
En 1962, Nehru avait été pris de panique en apprenant
que les troupes chinoises avaient fait jonction avec les
Nagas. En fait les Chinois se retirèrent rapidement et sem-
blèrent se désintéresser de la question.
plus tôt pour aider les Nagas. Ceux-ci sont un allié idéal
contre l'Inde. Ils sont admirablement placés pour la harceler.
En 1962, Nehru avait été pris de panique en apprenant
que les troupes chinoises avaient fait jonction avec les
Nagas. En fait les Chinois se retirèrent rapidement et sem-
blèrent se désintéresser de la question.
Cette modération ne pouvait résister à l'agitation qui se
manifeste depuis 1967 dans toute cette partie du monde.
Les différents territoires sur la frontière orientale de l'Inde,
la Birmanie et jusqu'aux marches de la Thaïlande fourmillent
maintenant de mouvements nationalistes. La Chine
a commencé à les soutenir. Elle n'est d'ailleurs pas seule.
Par hostilité à l'égard de l'Inde, le Pakistan pourrait bien
s'en mêler.
manifeste depuis 1967 dans toute cette partie du monde.
Les différents territoires sur la frontière orientale de l'Inde,
la Birmanie et jusqu'aux marches de la Thaïlande fourmillent
maintenant de mouvements nationalistes. La Chine
a commencé à les soutenir. Elle n'est d'ailleurs pas seule.
Par hostilité à l'égard de l'Inde, le Pakistan pourrait bien
s'en mêler.
Nous sommes trop mal renseignés sur l'activité des
Nagas et leurs rapports avec la Chine pour savoir si la
prochaine guerre d'Asie se prépare dans cette région, mais
la situation y est des plus troubles.
Nagas et leurs rapports avec la Chine pour savoir si la
prochaine guerre d'Asie se prépare dans cette région, mais
la situation y est des plus troubles.
En principe les grandes puissances soutiennent les
gouvernements légaux contre tous les mouvements auto-
nomistes ou dissidents. Le fait est particulièrement net en
Birmanie. Le gouvernement de Rangoon qui doit faire face
à de graves rébellions intérieures reçoit maintenant des
armes et munitions des Etats-Unis et de l'U.R.S.S.
gouvernements légaux contre tous les mouvements auto-
nomistes ou dissidents. Le fait est particulièrement net en
Birmanie. Le gouvernement de Rangoon qui doit faire face
à de graves rébellions intérieures reçoit maintenant des
armes et munitions des Etats-Unis et de l'U.R.S.S.
9 JUIN. — Le gouvernement indien a adressé une protes-
tation à Pékin. Les Chinois armeraient des dissidents
Nagas qui depuis quelque temps se livrent à des attaques
répétées contre les forces régulières indiennes.
tation à Pékin. Les Chinois armeraient des dissidents
Nagas qui depuis quelque temps se livrent à des attaques
répétées contre les forces régulières indiennes.
Le problème naga existe depuis la proclamation de
l'indépendance de l'Inde. Les Nagas sont un petit peuple
relativement évolué, ils sont plus éduqués que la moyenne
des Indiens. Ils ont une vieille tradition d'indépendance.
Ils n'ont jamais accepté l'autorité de New-Delhi. Tous
les efforts de conciliation ont échoué, et le gouvernement
indien n'a jamais voulu reconnaître l'autonomie réclamée
par les Nagas. Une guerre larvée s'est poursuivie pendant
l'indépendance de l'Inde. Les Nagas sont un petit peuple
relativement évolué, ils sont plus éduqués que la moyenne
des Indiens. Ils ont une vieille tradition d'indépendance.
Ils n'ont jamais accepté l'autorité de New-Delhi. Tous
les efforts de conciliation ont échoué, et le gouvernement
indien n'a jamais voulu reconnaître l'autonomie réclamée
par les Nagas. Une guerre larvée s'est poursuivie pendant
1 1 JUIN. — La Fondation des recherches sur la surdité,
aux Etats-Unis, a entrepris une étude systématique des
défectuosité de l'oreille interne. Dans ce but elle a demandé
à toutes les personnes qui souffrent de quelque lésion de
ce genre de permettre qu'après leur mort on leur extraie
l'os temporal dont la partie inférieure constitue le rocher.
C'est dans le rocher qu'est située l'oreille interne.
aux Etats-Unis, a entrepris une étude systématique des
défectuosité de l'oreille interne. Dans ce but elle a demandé
à toutes les personnes qui souffrent de quelque lésion de
ce genre de permettre qu'après leur mort on leur extraie
l'os temporal dont la partie inférieure constitue le rocher.
C'est dans le rocher qu'est située l'oreille interne.
En étudiant soigneusement toutes les oreilles internes
défectueuses, l'équipe de la Fondation espère trouver au
bout de quelques années les moyens de remédier à ces
défauts qui semblent multiplent. Il n'y a pas deux oreilles
internes défectueuses qui se ressemblent.
défectueuses, l'équipe de la Fondation espère trouver au
bout de quelques années les moyens de remédier à ces
défauts qui semblent multiplent. Il n'y a pas deux oreilles
internes défectueuses qui se ressemblent.
Jusqu'ici en effet le fonctionnement ou le malfonctionne-
france
monde
tiers-monde
Mercredi 12 juin
Répression : le gouvernement dissout
les groupuscules d'extrême-gauche,
trotskistes, anarchistes ou pro-chinois.
Des dizaines d'étrangers font l'objet
d'un ordre d'expulsion. Toutes les mani-
festations sont interdites sur l'ensem-
ble du territoire. Elections : premières
interventions télévisées sur fond trico-
lore de MM. Pompidou, Duhamel et
Waldeck-Rochet. De Gaulle : « Pro-
duction, productivité, travail. »
les groupuscules d'extrême-gauche,
trotskistes, anarchistes ou pro-chinois.
Des dizaines d'étrangers font l'objet
d'un ordre d'expulsion. Toutes les mani-
festations sont interdites sur l'ensem-
ble du territoire. Elections : premières
interventions télévisées sur fond trico-
lore de MM. Pompidou, Duhamel et
Waldeck-Rochet. De Gaulle : « Pro-
duction, productivité, travail. »
La Haye : les Dix (Etats-Unis, Grande-
Bretagne, France, Allemagne, Italie,
Belgique, Pays-Bas, Canada, Suède,
Japon) se mettent d'accord sur la ré-
partition du financement des crédits
ouverts "par le Fonds monétaire à la
France et à la Grande-Bretagne. Angle-
terre : une prolongation de séjour de
deux semaines est accordée à Daniel
Cohn-Bendit.
Bretagne, France, Allemagne, Italie,
Belgique, Pays-Bas, Canada, Suède,
Japon) se mettent d'accord sur la ré-
partition du financement des crédits
ouverts "par le Fonds monétaire à la
France et à la Grande-Bretagne. Angle-
terre : une prolongation de séjour de
deux semaines est accordée à Daniel
Cohn-Bendit.
Le Sénat sud-vietnamien suggère :
« reprise des bombardements au-delà
du 20e parallèle si les attaques viet-
congs contre Saigon se poursuivent.
Israël : le général Allon serait nommé
vice-président du Conseil par M. Levi
Eshkol et remplacerait Moshé Dayan
comme « dauphin » possible. Colombie :
le Sénat refuse la démission du prési-
dent Lieras Restrepo. Liban : voitures
incendiées, barricades, grève générale
à la suite de l'incendie d'une église par
des inconnus.
« reprise des bombardements au-delà
du 20e parallèle si les attaques viet-
congs contre Saigon se poursuivent.
Israël : le général Allon serait nommé
vice-président du Conseil par M. Levi
Eshkol et remplacerait Moshé Dayan
comme « dauphin » possible. Colombie :
le Sénat refuse la démission du prési-
dent Lieras Restrepo. Liban : voitures
incendiées, barricades, grève générale
à la suite de l'incendie d'une église par
des inconnus.
Jeudi 13 juin
La Sorbonne est fermée par les étu-
diants qui entament des opérations de
nettoyage et de réorganisation, après
avoir expulsé les « Katangais ». Le pa-
tronat réclame des mesures d'urgence
pour éviter la propagation du chômage.
Le colonel Lacheroy condamné à mort
par contumace rentre en France et est
mis en liberté provisoire. Georges Bi-
dault annonce la création d'un « Mou-
vement pour la justice et la liberté ».
Médecine : l'étape de la cogestion est
franchie par plusieurs facultés de pro-
vince.
diants qui entament des opérations de
nettoyage et de réorganisation, après
avoir expulsé les « Katangais ». Le pa-
tronat réclame des mesures d'urgence
pour éviter la propagation du chômage.
Le colonel Lacheroy condamné à mort
par contumace rentre en France et est
mis en liberté provisoire. Georges Bi-
dault annonce la création d'un « Mou-
vement pour la justice et la liberté ».
Médecine : l'étape de la cogestion est
franchie par plusieurs facultés de pro-
vince.
Etats-Unis : la campagne électorale
reprend. Me Carthy face à Rockefeller
à New York. Tchécoslovaquie : départ
de M. Dubcek pour Budapest. M. Kadar
chef du gouvernement hongrois souhai-
te le succès de l'expérience tchécoslo-
vaque. L'église gréco-catholique est au-
torisée à reprendre ses activités. Gran-
de-Bretagne : deux nouveaux échecs
aux élections partielles pour les travail-
listes. Révolte étudiante. Occupations
pacifiques et silencieuses de l'université
d'Oxford.
reprend. Me Carthy face à Rockefeller
à New York. Tchécoslovaquie : départ
de M. Dubcek pour Budapest. M. Kadar
chef du gouvernement hongrois souhai-
te le succès de l'expérience tchécoslo-
vaque. L'église gréco-catholique est au-
torisée à reprendre ses activités. Gran-
de-Bretagne : deux nouveaux échecs
aux élections partielles pour les travail-
listes. Révolte étudiante. Occupations
pacifiques et silencieuses de l'université
d'Oxford.
Viêt-nam : le F.N.L. fait sauter le dépôt
de munitions de Go-Vap à 6 kilomètres
de Saigon, et donne ordre à ses trou-
pes «de lancer des attaques conti-
nuelles et de provoquer des soulève-
ments généralisés ». Uruguay : face à
l'agitation universitaire le gouverne-
ment de Montevideo décrète l'état de
siège. Venezuela : grève des étudiants
à l'université centrale de Caracas. Bré-
sil : grève illimitée dans plusieurs fa-
cultés : Rio, Sao-Paulo. Sénégal :
M. Senghor annonce un relèvement
général des bas salaires.
de munitions de Go-Vap à 6 kilomètres
de Saigon, et donne ordre à ses trou-
pes «de lancer des attaques conti-
nuelles et de provoquer des soulève-
ments généralisés ». Uruguay : face à
l'agitation universitaire le gouverne-
ment de Montevideo décrète l'état de
siège. Venezuela : grève des étudiants
à l'université centrale de Caracas. Bré-
sil : grève illimitée dans plusieurs fa-
cultés : Rio, Sao-Paulo. Sénégal :
M. Senghor annonce un relèvement
général des bas salaires.
Vendredi 14 juin
L'Odéon est investi par la police et
évacué sans incidents. Répression :
dix-sept militants des mouvements
d'extrême-gauche dissous sont arrêtés
par la police. Seize manifestants sont
inculpés à Paris après les échauffourées
de mercredi. Renault : les négociations
engagées entre la direction et les syn-
dicats seront soumises le 17 juin à
bulletin secret au personnel. Consé-
quences financières de la crise : l'armée
devra étaler ses dépenses pour l'arme-
ment nucléaire.
évacué sans incidents. Répression :
dix-sept militants des mouvements
d'extrême-gauche dissous sont arrêtés
par la police. Seize manifestants sont
inculpés à Paris après les échauffourées
de mercredi. Renault : les négociations
engagées entre la direction et les syn-
dicats seront soumises le 17 juin à
bulletin secret au personnel. Consé-
quences financières de la crise : l'armée
devra étaler ses dépenses pour l'arme-
ment nucléaire.
Belgrade : installation de comités d'ac-
tion à l'université. New York : impor-
tant entretien entre Dean Rusk et
Kouznetsov, ministre soviétique des
Affaires étrangères. Boston : le pédia-
tre Spock est condamné pour hostilité
à la guerre du Viêt-nam. U.R.S.S. : La
« Pravda » accuse M. Cisar (secrétaire
de comité central du parti tchécoslo-
vaque) de défendre des idées « men-
chéviks ». Budapest : fin de la rencon-
tre Dubcek-Kadar, signature d'un traité
d'amitié
tion à l'université. New York : impor-
tant entretien entre Dean Rusk et
Kouznetsov, ministre soviétique des
Affaires étrangères. Boston : le pédia-
tre Spock est condamné pour hostilité
à la guerre du Viêt-nam. U.R.S.S. : La
« Pravda » accuse M. Cisar (secrétaire
de comité central du parti tchécoslo-
vaque) de défendre des idées « men-
chéviks ». Budapest : fin de la rencon-
tre Dubcek-Kadar, signature d'un traité
d'amitié
Viêt-nam : la radio F.N.L. invite la
population à évacuer Saigon et an-
nonce un bombardement intense de
la ville pour 100 jours. Argentine : les
étudiants revendiquent l'autonomie des
universités. Congo-Kinshasa : annula-
tion des examens après des manifes-
tations de lycéens. Israël : sondage.
62 % des israéliens en faveur du géné-
ral Dayan. Algérie : le gouvernement
nationalise 17 sociétés françaises.
population à évacuer Saigon et an-
nonce un bombardement intense de
la ville pour 100 jours. Argentine : les
étudiants revendiquent l'autonomie des
universités. Congo-Kinshasa : annula-
tion des examens après des manifes-
tations de lycéens. Israël : sondage.
62 % des israéliens en faveur du géné-
ral Dayan. Algérie : le gouvernement
nationalise 17 sociétés françaises.
Samedi 1 5 juin
Le général Salan et dix autres condam-
nés pour subversion sont graciés et
libérés. Jacques Fauvet « Le Monde » :
«Cette libération des chefs militaires
révoltés est une victoire sans doute
amère des étudiants révoltés. » Mar-
cellin : « Le sabotage des élections peut
entraîner une peine de vingt ans de ré-
clusion criminelle. » Pompidou : « Pour
que le gouvernement puisse agir, il lui
faut une majorité large et solide. »
nés pour subversion sont graciés et
libérés. Jacques Fauvet « Le Monde » :
«Cette libération des chefs militaires
révoltés est une victoire sans doute
amère des étudiants révoltés. » Mar-
cellin : « Le sabotage des élections peut
entraîner une peine de vingt ans de ré-
clusion criminelle. » Pompidou : « Pour
que le gouvernement puisse agir, il lui
faut une majorité large et solide. »
Japon : importantes manifestations
étudiants-ouvriers à Tokyo et Osaka.
Plusieurs centaines de blessés, nom-
breuses arrestations. Madrid : la presse
espagnole écrit à propos de la libération
de Salan et des membres de l'O.A.S. :
« l'amnistie accordée à ces illustres sol-
dats de la France impériale est le prix
que, le général de Gaulle a dû payer
pour que l'armée l'aide à sauver la
France du communisme. »
étudiants-ouvriers à Tokyo et Osaka.
Plusieurs centaines de blessés, nom-
breuses arrestations. Madrid : la presse
espagnole écrit à propos de la libération
de Salan et des membres de l'O.A.S. :
« l'amnistie accordée à ces illustres sol-
dats de la France impériale est le prix
que, le général de Gaulle a dû payer
pour que l'armée l'aide à sauver la
France du communisme. »
Viêt-nam : violents accrochages dans
le secteur de Khe-Sanh. Les combats
reprennent dans la banlieue de Saigon.
Les B 52 bombardent à huit reprises
des unités du Front se dirigeant vers
la capitale. Turquie : extension du
mouvement de contestation à plusieurs
universités. Uruguay : les fonctionnai-
res de l'administration centrale votent
la grève illimitée.
le secteur de Khe-Sanh. Les combats
reprennent dans la banlieue de Saigon.
Les B 52 bombardent à huit reprises
des unités du Front se dirigeant vers
la capitale. Turquie : extension du
mouvement de contestation à plusieurs
universités. Uruguay : les fonctionnai-
res de l'administration centrale votent
la grève illimitée.
8
ment de l'oreille interne restent quelque peu mystérieux.
C'est pourquoi on peut si rarement remédier à la surdité.
Les chirurgiens spécialistes réparent assez facilement les
défauts de l'oreille moyenne qui est une sorte de caisse
de résonance. Mais l'essentiel de l'organe auditif est l'oreille
interne. Celle-ci se compose d'une série de cavités osseuses
et membraneuses contenant des liquides. La plupart des cas
de surdité viennent de là et le chirurgien n'y peut générale-
ment pas grand chose.
C'est pourquoi on peut si rarement remédier à la surdité.
Les chirurgiens spécialistes réparent assez facilement les
défauts de l'oreille moyenne qui est une sorte de caisse
de résonance. Mais l'essentiel de l'organe auditif est l'oreille
interne. Celle-ci se compose d'une série de cavités osseuses
et membraneuses contenant des liquides. La plupart des cas
de surdité viennent de là et le chirurgien n'y peut générale-
ment pas grand chose.
On estime qu'une personne sur dix souffre de quelque
défaut de l'ouïe et que deux pour mille sont profondément
sourdes, ce qui est une calamité.
défaut de l'ouïe et que deux pour mille sont profondément
sourdes, ce qui est une calamité.
L'assassin de Martin Luther King ?
12 JUIN. — James Earl Ray, alias Ramon George Sneyd,
suspecté d'avoir assassiné le pasteur Luther King, a comparu
devant le tribunal londonien qui doit délibérer sur la demande
d'extradition présentée par le ministre de la Justice des
Etats Unis.
suspecté d'avoir assassiné le pasteur Luther King, a comparu
devant le tribunal londonien qui doit délibérer sur la demande
d'extradition présentée par le ministre de la Justice des
Etats Unis.
L'avocat de l'autorité judiciaire américaine a affirmé que
Ray alias Sneyd était bien l'homme responsable du meurtre
de King, perpétré il y a trois mois à Birmingham (Alabama).
Il a ajouté que le meurtrier avait agi seul. Ce qui est la thèse
officielle aux Etats-Unis.
Ray alias Sneyd était bien l'homme responsable du meurtre
de King, perpétré il y a trois mois à Birmingham (Alabama).
Il a ajouté que le meurtrier avait agi seul. Ce qui est la thèse
officielle aux Etats-Unis.
Le prévenu a purement et simplement nié toute partici-
pation au crime. Il a déclaré n'avoir jamais eu aucun grief
contre Luther King et ne l'avoir jamais rencontré de sa vie.
pation au crime. Il a déclaré n'avoir jamais eu aucun grief
contre Luther King et ne l'avoir jamais rencontré de sa vie.
Les arguments de la justice américaine sont centrés au-
tour de la carabine du crime. Celle-ci aurait été achetée par
le prévenu et porterait ses empreintes digitales. Ce sont là
des indices très sérieux, mais l'identification de l'arme se
prête à bien des contestations devant un tribunal.
tour de la carabine du crime. Celle-ci aurait été achetée par
le prévenu et porterait ses empreintes digitales. Ce sont là
des indices très sérieux, mais l'identification de l'arme se
prête à bien des contestations devant un tribunal.
En l'absence de mobiles, il y aurait là de quoi faire hésiter
les juges anglais.
les juges anglais.
Ray alias Sneyd apparaît bien comme un personnage
douteux au casier judiciaire chargé, et l'extradition pourrait
se justifier sur d'autres terrains. Mais, suivant la loi anglaise,
un extradé ne peut être jugé que pour le motif qui a entraîné
son extradition. Les autorités américaines n'avaient donc pas
le choix.
douteux au casier judiciaire chargé, et l'extradition pourrait
se justifier sur d'autres terrains. Mais, suivant la loi anglaise,
un extradé ne peut être jugé que pour le motif qui a entraîné
son extradition. Les autorités américaines n'avaient donc pas
le choix.
Cependant, la thèse officielle semble bien étrange. Le
prévenu n'était pas un gangster de grande envergure.
D'après les renseignements de la justice américaine elle-
même, c'était un malfaiteur spécialisé dans les larcins et
opérations médiocres. Or, d'après le récit officiel, depuis
plusieurs mois il n'a fait que voyager, changer d'identité,
et dépenser largement. Ce comportement ne cadre pas du
tout avec la thèse du tueur isolé, agissant pour son propre
compte.
prévenu n'était pas un gangster de grande envergure.
D'après les renseignements de la justice américaine elle-
même, c'était un malfaiteur spécialisé dans les larcins et
opérations médiocres. Or, d'après le récit officiel, depuis
plusieurs mois il n'a fait que voyager, changer d'identité,
et dépenser largement. Ce comportement ne cadre pas du
tout avec la thèse du tueur isolé, agissant pour son propre
compte.
Comme pour l'assassinat du président Kennedy, la justice
américaine semble s'être engagée dans une voie où elle
ne convaincra que ceux qui le veulent bien.
américaine semble s'être engagée dans une voie où elle
ne convaincra que ceux qui le veulent bien.
L'Angleterre et les arrnes chimiques
13 JUIN. — De nombreuses personnalités britanniques, y
compris des prix Nobel comme Cyril Powell, M.H.F. Wilkins,
F. Sanger, ont demandé la « déclassification » des établis-
sements de Porton. Il s'agit de deux centres consacrés aux
recherches sur les armes bactériologiques et chimiques.
compris des prix Nobel comme Cyril Powell, M.H.F. Wilkins,
F. Sanger, ont demandé la « déclassification » des établis-
sements de Porton. Il s'agit de deux centres consacrés aux
recherches sur les armes bactériologiques et chimiques.
Le gouvernement britannique a toujours soutenu que les
activités de Porton ne visaient que la recherche des anti-
activités de Porton ne visaient que la recherche des anti-
dotes, que les gaz de combat et les moyens bactériologiques
n'étaient étudiés que dans un but défensif. Les protes-
tataires l'ont pris au mot. La «déclassification» réclamée
comporte une mesure précise : le transfert de la responsa-
bilité des centres de Porton tiu ministère de la Guerre à
celui de la Santé.
n'étaient étudiés que dans un but défensif. Les protes-
tataires l'ont pris au mot. La «déclassification» réclamée
comporte une mesure précise : le transfert de la responsa-
bilité des centres de Porton tiu ministère de la Guerre à
celui de la Santé.
Le gouvernement ne semble pas prêt à accéder à ces ,
demandes. Les travaux de Porton ne concernent pas que la
protection. La collaboration technique de Porton avec les
services américains correspondants est bien connue. Or,
les Etats-Unis préparent ouvertement les armes chimiques
et bactériologiques. Ils n'ont jamais ratifié la convention de
Genève de 1925 sur l'interdiction de ces armes. Ils estiment
que celles-ci peuvent être moins inhumaines que les autres.
La question est purement subjective.
demandes. Les travaux de Porton ne concernent pas que la
protection. La collaboration technique de Porton avec les
services américains correspondants est bien connue. Or,
les Etats-Unis préparent ouvertement les armes chimiques
et bactériologiques. Ils n'ont jamais ratifié la convention de
Genève de 1925 sur l'interdiction de ces armes. Ils estiment
que celles-ci peuvent être moins inhumaines que les autres.
La question est purement subjective.
Cependant les moyens chimiques et bactériologiques
font beaucoup plus peur que les autres armes. C'est à cause
du mystère qui les entoure. Que ce soit en Angleterre, aux
U.S.A., en France, pour ne parler que des pays'occidentaux.
Le secret le plus sévère couvre l'activité de tous les centres
de recherche et de fabrication des armes bactériologiques
et chimiques.
font beaucoup plus peur que les autres armes. C'est à cause
du mystère qui les entoure. Que ce soit en Angleterre, aux
U.S.A., en France, pour ne parler que des pays'occidentaux.
Le secret le plus sévère couvre l'activité de tous les centres
de recherche et de fabrication des armes bactériologiques
et chimiques.
Or, nous savons que les progrès de la biochimie ont révélé
des possibilités insoupçonnées pour tuer, paralyser, estro-
pier instantanément et en masse.
des possibilités insoupçonnées pour tuer, paralyser, estro-
pier instantanément et en masse.
A la fin de la dernière guerre, les éthers de l'acide phos-
phorique semblaient représenter le summum. Le tabun
allemand et le sarin américain, employés à très faible dose,
provoquent des convulsions mortelles en quelques minutes,
et ils sont incolores et inodores. Depuis, on a fait mieux.
Certains gaz paralysent le système nerveux presque instan-
tanément, par simple contact. Un centigramme par personne
suffit.
phorique semblaient représenter le summum. Le tabun
allemand et le sarin américain, employés à très faible dose,
provoquent des convulsions mortelles en quelques minutes,
et ils sont incolores et inodores. Depuis, on a fait mieux.
Certains gaz paralysent le système nerveux presque instan-
tanément, par simple contact. Un centigramme par personne
suffit.
Les services américains se livrent à de fréquentes expé-
riences dans ce domaine. Au mois de mars dernier, le centre
de Fort Detrick, situé dans l'Utah et spécialisé dans les
armes chimiques, provoqua la mort accidentelle de
6 000 moutons : un gaz spécifique du système nerveux avait
été essayé et le vent en avait transporté des résidus à
30 ou 40 km.
riences dans ce domaine. Au mois de mars dernier, le centre
de Fort Detrick, situé dans l'Utah et spécialisé dans les
armes chimiques, provoqua la mort accidentelle de
6 000 moutons : un gaz spécifique du système nerveux avait
été essayé et le vent en avait transporté des résidus à
30 ou 40 km.
Les armes bactériologiques sont peut-être encore plus
effrayantes. Mais heureusement il existe un frein. Personne
ne peut assurer que l'épidémie foudroyante déclenchée chez
l'adversaire ne s'étendra pas au camp ami.
effrayantes. Mais heureusement il existe un frein. Personne
ne peut assurer que l'épidémie foudroyante déclenchée chez
l'adversaire ne s'étendra pas au camp ami.
L'agitation déclenchée en Angleterre autour de Porton
se calmera, mais l'affaire reviendra sur la scène. Tôt ou tard
on sera amené à abandonner le secret et à renseigner le
public sur ce qui se prépare dans les laboratoires de guerre
chimique et bactériologique. C'est l'ignorance qui est res-
ponsable des paniques les plus graves.
se calmera, mais l'affaire reviendra sur la scène. Tôt ou tard
on sera amené à abandonner le secret et à renseigner le
public sur ce qui se prépare dans les laboratoires de guerre
chimique et bactériologique. C'est l'ignorance qui est res-
ponsable des paniques les plus graves.
france
pays développés
tiers-monde
La Sorbonne est occupée par la police.
Orléans : matraques et pistolets au
poing, un commando d'Occident, le
seul groupuscule non interdit, attaque
le campus universitaire. Communistes :
Pierre Juquin, député sortant de l'Es-
sonne : « Le problème se serait posé
autrement après les barricades si... »
Orléans : matraques et pistolets au
poing, un commando d'Occident, le
seul groupuscule non interdit, attaque
le campus universitaire. Communistes :
Pierre Juquin, député sortant de l'Es-
sonne : « Le problème se serait posé
autrement après les barricades si... »
Etats-Unis : cent cinquante étudiants et
professeurs : « Notre combat contre la
guerre au Viêt-nam, la répression et
l'injustice aux Etats-Unis n'est pas dif-
férent de celui des étudiants et intel-
lectuels français. » Suisse : occupation
par quelques centaines de manifes-
tants d'un immeuble vide à Zurich
professeurs : « Notre combat contre la
guerre au Viêt-nam, la répression et
l'injustice aux Etats-Unis n'est pas dif-
férent de celui des étudiants et intel-
lectuels français. » Suisse : occupation
par quelques centaines de manifes-
tants d'un immeuble vide à Zurich
Nigeria : M. Eke membre au gouverne-
ment biafrais accuse : « Le Nigeria a
étendu sa guerre de génocide en met-
tant du poison dans les aliments des-
tinés au Biafra ». Il rappelle : «4,5
millions de Biafrais se trouvent dans
une situation désespérée »
ment biafrais accuse : « Le Nigeria a
étendu sa guerre de génocide en met-
tant du poison dans les aliments des-
tinés au Biafra ». Il rappelle : «4,5
millions de Biafrais se trouvent dans
une situation désespérée »
Métallurgie : plus de cent mille travail-
leurs reprennent le travail notamment
chez Renault. Peugeot : la direction
reste sur ses positions. Citroën : « Rien
ne peut justifier qu'on nous refuse ce
qui a été obtenu chez Renault » affir-
ment la C.G.T. et la C.F.D.T. Le gou-
vernement mobilise les cent quarante
millions de dollars que lui devait encore
le Fonds monétaire.
leurs reprennent le travail notamment
chez Renault. Peugeot : la direction
reste sur ses positions. Citroën : « Rien
ne peut justifier qu'on nous refuse ce
qui a été obtenu chez Renault » affir-
ment la C.G.T. et la C.F.D.T. Le gou-
vernement mobilise les cent quarante
millions de dollars que lui devait encore
le Fonds monétaire.
Belgique : constitution au nouveau
gouvernement. Allemagne fédérale :
gouvernement. Allemagne fédérale :
Johnson assure Bonn de son appui
dans l'affaire des visas exigés par
Berlin - Est. Grande - Bretagne : la
Chambre des Lords s'insurge contre le
cabinet Wilson en votant contre les
sanctions appliquées à la Rhodésie.
Moscou : trois jeunes anglais sont
arrêtés pour avoir distribué des tracts
en faveur d'intellectuels incarcérés.
dans l'affaire des visas exigés par
Berlin - Est. Grande - Bretagne : la
Chambre des Lords s'insurge contre le
cabinet Wilson en votant contre les
sanctions appliquées à la Rhodésie.
Moscou : trois jeunes anglais sont
arrêtés pour avoir distribué des tracts
en faveur d'intellectuels incarcérés.
Viêt-nam : crise larvée du gouverne-
ment sud vietnamien. Le général Ky
dément songer à un coup d'Etat :
« Nous ne pouvons accepter un coup
d'Etat en ce moment car cela revien-
drait à se rendre sans combat aux
communistes ». Malaisie : 50 poli-
ciers tombent dans une embuscade
tendue par des maquisards commu-
nistes. Tiers-Monde à Washington :
La « marche des pauvres » se termine
dans la désillusion.
ment sud vietnamien. Le général Ky
dément songer à un coup d'Etat :
« Nous ne pouvons accepter un coup
d'Etat en ce moment car cela revien-
drait à se rendre sans combat aux
communistes ». Malaisie : 50 poli-
ciers tombent dans une embuscade
tendue par des maquisards commu-
nistes. Tiers-Monde à Washington :
La « marche des pauvres » se termine
dans la désillusion.
Métallurgie : 200 000 ouvriers sont
encore en grève. Chez Citroën le
conflit est porté devant une commis-
sion paritaire. Premiers sondages à
quatre jours des élections : légers gains
des gaullistes et giscardiens, progrès
du P.S.U., recul du centre, de la
F.G.D.S. et du P.C. Faculté de Droit
de Paris : le comité de grève obtient
la majorité aux élections.
encore en grève. Chez Citroën le
conflit est porté devant une commis-
sion paritaire. Premiers sondages à
quatre jours des élections : légers gains
des gaullistes et giscardiens, progrès
du P.S.U., recul du centre, de la
F.G.D.S. et du P.C. Faculté de Droit
de Paris : le comité de grève obtient
la majorité aux élections.
Nations unies : U. Thant déclare que
l'arrêt des bombardements et l'abandon
des espoirs de victoire militaire au
Viêt-nam constituent le préalable à
toutes négociations de paix. Washing-
ton : les républicains reprochent aux
démocrates une politique d'armement
trop timorée. Budapest : réunion de la
commission chargée de préparer la
conférence communiste mondiale.
l'arrêt des bombardements et l'abandon
des espoirs de victoire militaire au
Viêt-nam constituent le préalable à
toutes négociations de paix. Washing-
ton : les républicains reprochent aux
démocrates une politique d'armement
trop timorée. Budapest : réunion de la
commission chargée de préparer la
conférence communiste mondiale.
Viêt-nam : les Américains mettent en
place un dispositif électronique « ultra-
secret » autour de Saigon pour la dé-
tection des bases de lancement du
F.N.L. La crise du gouvernement de
Saigon : nombreux changements dans
la direction de l'armée et la police.
Chine : Pékin dénonce les th'éories cas-
tristes sur la guérilla et la révolution
place un dispositif électronique « ultra-
secret » autour de Saigon pour la dé-
tection des bases de lancement du
F.N.L. La crise du gouvernement de
Saigon : nombreux changements dans
la direction de l'armée et la police.
Chine : Pékin dénonce les th'éories cas-
tristes sur la guérilla et la révolution
Peugeot : le personnel vote la reprise
du travail. Renault-Flins : débrayage
surprise devant la décision de la direc-
tion de ne pas renouveler le contrat de
quatre ouvriers. O.R.T.F. : la C.G.T.
invite certaines catégories de personnel
à se prononcer sur une « suspension de
la grève ». Le C.N.P.F. s'élève vigoureu-
sement contre la réforme des entrepri-
ses suggérée par M. Capitant.
du travail. Renault-Flins : débrayage
surprise devant la décision de la direc-
tion de ne pas renouveler le contrat de
quatre ouvriers. O.R.T.F. : la C.G.T.
invite certaines catégories de personnel
à se prononcer sur une « suspension de
la grève ». Le C.N.P.F. s'élève vigoureu-
sement contre la réforme des entrepri-
ses suggérée par M. Capitant.
Nations unies : le conseil de sécurité
vote l'« assistance immédiate » aux vic-
times d'une agression nucléaire. Was-
hington : Johnson signe la loi « anti-
crime » parce qu'elle contient « plus de
bonnes que de mauvaises choses ».
Prague : s'adressant aux dix mille
délégués des milices ouvrières M. Dub-
cek déclare : « le parti est décidé à
combattre l'anticommunisme ».
vote l'« assistance immédiate » aux vic-
times d'une agression nucléaire. Was-
hington : Johnson signe la loi « anti-
crime » parce qu'elle contient « plus de
bonnes que de mauvaises choses ».
Prague : s'adressant aux dix mille
délégués des milices ouvrières M. Dub-
cek déclare : « le parti est décidé à
combattre l'anticommunisme ».
Viêt-nam : sérieuse attaque d'un avant-
poste américain près de Khe Sanh par
les Nord Vietnamiens. Brésil : vio-
lentes échauffourées entre policiers et
étudiants à Rio : 22 blessés graves.
Slogans : « On ne veut pas d'une
culture aliénée ». « Le Brésil aux Bré-
siliens ». « Policiers assassins ». « A bas
la dictature ».
poste américain près de Khe Sanh par
les Nord Vietnamiens. Brésil : vio-
lentes échauffourées entre policiers et
étudiants à Rio : 22 blessés graves.
Slogans : « On ne veut pas d'une
culture aliénée ». « Le Brésil aux Bré-
siliens ». « Policiers assassins ». « A bas
la dictature ».
La campagne électorale reste centrée
sur la «subversion » et le communisme
totalitaire. Marseillaise le bras droit
levé, les doigts en forme de « V » au
meeting gaulliste de la Porte de Ver-
sailles. Radio-Télévision scolaire : le
personnel réclame l'autonomie de l'éta-
blissement. Le capitaine Sergent, an-
cien O.A.S. à l'Hôtel Hilton : «Moi
aussi, je viens participer. »
sur la «subversion » et le communisme
totalitaire. Marseillaise le bras droit
levé, les doigts en forme de « V » au
meeting gaulliste de la Porte de Ver-
sailles. Radio-Télévision scolaire : le
personnel réclame l'autonomie de l'éta-
blissement. Le capitaine Sergent, an-
cien O.A.S. à l'Hôtel Hilton : «Moi
aussi, je viens participer. »
La Grande-Bretagne renonce à parti-
ciper au projet de grand accélérateur
de particules. Suisse : les autorités
refusent de faire aux étudiants des
concessions « à la française ». Italie :
des étudiants dressent une barricade
par solidarité avec des employés en
grève. Menaces sur la biennale de
Venise
ciper au projet de grand accélérateur
de particules. Suisse : les autorités
refusent de faire aux étudiants des
concessions « à la française ». Italie :
des étudiants dressent une barricade
par solidarité avec des employés en
grève. Menaces sur la biennale de
Venise
Viêt-nam : vingt-huitième bombarde-
ment sur la région saigonnaise. Brésil :
l'ancien président Janio Quadros dé-
nonce le régime militaire. Nigeria :
«une douzaine d'enfants malades hos-
pitalisés dans un hôpital du Biafra ont
été mangés au cours des combats qui
ont opposé récemment les forces fédé-
rales aux Biafrais » déclare l'organisa-
tion humanitaire suisse Caritas.
ment sur la région saigonnaise. Brésil :
l'ancien président Janio Quadros dé-
nonce le régime militaire. Nigeria :
«une douzaine d'enfants malades hos-
pitalisés dans un hôpital du Biafra ont
été mangés au cours des combats qui
ont opposé récemment les forces fédé-
rales aux Biafrais » déclare l'organisa-
tion humanitaire suisse Caritas.
10
17 JUIN — Aucune explication écologique n'est acceptable,
car on n'a jamais relevé chez les animaux supérieurs de
caractère de ce genre ; les singes anthropoïdes sont toujours
ambidextres, sauf dressage spécial par l'homme. Par ailleurs,
on n'a jamais pu déceler d'assymétrie morphologique chez
l'homme à sa naissance.
car on n'a jamais relevé chez les animaux supérieurs de
caractère de ce genre ; les singes anthropoïdes sont toujours
ambidextres, sauf dressage spécial par l'homme. Par ailleurs,
on n'a jamais pu déceler d'assymétrie morphologique chez
l'homme à sa naissance.
Pour Roujeinikov et Zoubrjitski, le caractère droitier de
l'homme s'est affirmé à l'époque où les groupes humains
ont commencé à se faire la guerre en utilisant à la fois une
arme défensive (genre bouclier) et une arme offensive (mas-
sue, épée, etc.).
l'homme s'est affirmé à l'époque où les groupes humains
ont commencé à se faire la guerre en utilisant à la fois une
arme défensive (genre bouclier) et une arme offensive (mas-
sue, épée, etc.).
Dès la plus haute antiquité, l'homme avait constaté que
les blessures au cœur étaient mortelles, alors que celles
infligées au côté droit guérissaient très souvent. Il est pro-
bable que, chez les guerriers primitifs, l'habitude fut prise
de se protéger du côté du cœur avec un bouclier quelconque
(bois, cuir et plus tard métal), tenu bien entendu par la main
gauche. Ainsi le guerrier s'accoutuma à manipuler la massue,
la lance ou l'épée avec la main droite.
les blessures au cœur étaient mortelles, alors que celles
infligées au côté droit guérissaient très souvent. Il est pro-
bable que, chez les guerriers primitifs, l'habitude fut prise
de se protéger du côté du cœur avec un bouclier quelconque
(bois, cuir et plus tard métal), tenu bien entendu par la main
gauche. Ainsi le guerrier s'accoutuma à manipuler la massue,
la lance ou l'épée avec la main droite.
Il ne faut pas s'étonner si cette pratique devint un
modèle pour la collectivité, modèle généralement sacralisé
par les prêtres.
modèle pour la collectivité, modèle généralement sacralisé
par les prêtres.
Ainsi le caractère droitier serait un simple héritage des
sociétés anciennes où la classe des guerriers occupait le
premier rang. Un aiguillage a été pris et l'habitude a conso-
lidé cette situation. Suivant les auteurs soviétiques, il est
facile d'enseigner l'usage contraire aux petits enfants. Mais,
dans une société de droitiers, il n'y a guère que des inconvé-
nients à être gaucher.
sociétés anciennes où la classe des guerriers occupait le
premier rang. Un aiguillage a été pris et l'habitude a conso-
lidé cette situation. Suivant les auteurs soviétiques, il est
facile d'enseigner l'usage contraire aux petits enfants. Mais,
dans une société de droitiers, il n'y a guère que des inconvé-
nients à être gaucher.
Roujeinikov et Zoubrjitski ont poursuivi pendant deux
ans l'éducation de l'ambidextrie, à l'école expérimentale
n° 32 d'Odessa. La grande majorité des enfants éduqués
comme droitiers ont appris à écrire de la main gauche en
moins de cinq mois, tout en continuant à améliorer l'écri-
ture de la main droite.
ans l'éducation de l'ambidextrie, à l'école expérimentale
n° 32 d'Odessa. La grande majorité des enfants éduqués
comme droitiers ont appris à écrire de la main gauche en
moins de cinq mois, tout en continuant à améliorer l'écri-
ture de la main droite.
Cet entraînement n'a eu aucun effet fâcheux sur l'orga-
nisme, et, en particulier, sur le système cardio-vasculaire.
Les auteurs ont noté au contraire que les exercices avec les
deux mains favorisaient le développement du caractère chez
les enfants.
nisme, et, en particulier, sur le système cardio-vasculaire.
Les auteurs ont noté au contraire que les exercices avec les
deux mains favorisaient le développement du caractère chez
les enfants.
La classe expérimentale était une classe de huitième. Les
élèves ont progressé beaucoup plus vite que ceux de la
classe normale et se sont même montrés capables de riva-
liser avec les élèves de sixième,
élèves ont progressé beaucoup plus vite que ceux de la
classe normale et se sont même montrés capables de riva-
liser avec les élèves de sixième,
L'observation a prouvé que les élèves éduqués à l'ambi-
dextrie se fatiguaient intellectuellement bien moins vite.
On peut donc en déduire que l'alternance dans l'usage des
mains constitue une forme de repos pour les parties consi-
dérées du cerveau.
dextrie se fatiguaient intellectuellement bien moins vite.
On peut donc en déduire que l'alternance dans l'usage des
mains constitue une forme de repos pour les parties consi-
dérées du cerveau.
La formation des connexions neuroniques du système
nerveux central se réalise durant les jeunes années et on sait
depuis longtemps que l'usage de la main, organe extrême-
ment complexe de préhension et de toucher, joue un rôle
très important dans cette formation. La preuve est apportée
par l'emplacement de centres cérébraux essentiels comme
celui du langage qui, chez les droitiers, se trouvent dans
l'hémisphère cérébral gauche (on sait qu'il y a croisement du
réseau nerveux, le bras gauche étant relié à l'hémisphère
droit, et inversement). Par contre, chez les gauchers, ces
centres se trouvent dans l'hémisphère droit.
nerveux central se réalise durant les jeunes années et on sait
depuis longtemps que l'usage de la main, organe extrême-
ment complexe de préhension et de toucher, joue un rôle
très important dans cette formation. La preuve est apportée
par l'emplacement de centres cérébraux essentiels comme
celui du langage qui, chez les droitiers, se trouvent dans
l'hémisphère cérébral gauche (on sait qu'il y a croisement du
réseau nerveux, le bras gauche étant relié à l'hémisphère
droit, et inversement). Par contre, chez les gauchers, ces
centres se trouvent dans l'hémisphère droit.
BREF
Le cerveau de l'enfant qui vient de naître est une masse
vierge. Ses éléments sont déterminés pour toute la vie (les
douze milliards de neurones que nous avons à la naissance
ne se renouvellent jamais) : mais les connexions sont à faire
et les possibilités sont infinies. Un très grand nombre se
réalisent dès les toutes premières années, quand l'enfant
imite inconsciemment ce qui l'entoure, puis l'éducation fait
le reste.
vierge. Ses éléments sont déterminés pour toute la vie (les
douze milliards de neurones que nous avons à la naissance
ne se renouvellent jamais) : mais les connexions sont à faire
et les possibilités sont infinies. Un très grand nombre se
réalisent dès les toutes premières années, quand l'enfant
imite inconsciemment ce qui l'entoure, puis l'éducation fait
le reste.
Pourquoi nos ancêtres ont-ils rejeté l'ambidextrie ? C'est
probablement qu'ils n'en avaient pas besoin. D'abord
l'homme primitif n'avait pas d'appareillages complexes à
manipuler. Dans le combat avec un homme ou un animal
il fallait de toute façon conserver un bras pour la défense ;
la dextérité indispensable à l'attaque n'était utile que pour
une main.
probablement qu'ils n'en avaient pas besoin. D'abord
l'homme primitif n'avait pas d'appareillages complexes à
manipuler. Dans le combat avec un homme ou un animal
il fallait de toute façon conserver un bras pour la défense ;
la dextérité indispensable à l'attaque n'était utile que pour
une main.
La solution inconsciemment réalisée était une solution de
facilité ; elle était alors bien suffisante, mais elle a contribué
à laisser en friche la moitié du cerveau. L'homme primitif
n'avait certes besoin que d'une faible partie de son cerveau.
La preuve est que l'homme modem» le plus évolué est
encore loin de l'utiliser en totalité.
facilité ; elle était alors bien suffisante, mais elle a contribué
à laisser en friche la moitié du cerveau. L'homme primitif
n'avait certes besoin que d'une faible partie de son cerveau.
La preuve est que l'homme modem» le plus évolué est
encore loin de l'utiliser en totalité.
Aujourd'hui la situation s'est considérablement modifiée.
Dans l'industrie il existe de nombreuses manipulations où il
serait très avantageux pour l'homme d'être ambidextre. Il en
est de même pour le pilotage des avions de chasse et celui
des véhicules spatiaux, lors des manœuvres de retour.
Dans l'industrie il existe de nombreuses manipulations où il
serait très avantageux pour l'homme d'être ambidextre. Il en
est de même pour le pilotage des avions de chasse et celui
des véhicules spatiaux, lors des manœuvres de retour.
Mais, surtout, il est très probable que l'ambidextrie déve-
loppe le système des connexions neuroniques et permet fina-
lement l'usage d'une plus grande partie du cerveau.
loppe le système des connexions neuroniques et permet fina-
lement l'usage d'une plus grande partie du cerveau.
Roujeinikov et Zoubrjitski considèrent que leurs expé-
riences ne sont qu'un début. Mais les résultats déjà obtenus,
s'ils se confirment, peuvent conduire à une révolution dans
l'éducation des enfants et à la généralisation de l'ambi-
dextrie comme moyen de franchir une nouvelle étape de
révolution humaine.
riences ne sont qu'un début. Mais les résultats déjà obtenus,
s'ils se confirment, peuvent conduire à une révolution dans
l'éducation des enfants et à la généralisation de l'ambi-
dextrie comme moyen de franchir une nouvelle étape de
révolution humaine.
L'évolution des êtres vivants n'est pas arrêtée, comme on
le dit parfois, mais elle a trouvé une voie incomparablement
plus rapide ; elle porte maintenant sur la structure céré-
brale de l'homme. Les hommes se civilisent en apprenant à
mieux utiliser leur cerveau : tel est le point fondamental. Il
est probable que pendant très longtemps la monodextrie a
eu ses raisons d'être. Elle a facilité chez les primitifs la forma-
tion de structures denses dans les connexions cérébrales.
le dit parfois, mais elle a trouvé une voie incomparablement
plus rapide ; elle porte maintenant sur la structure céré-
brale de l'homme. Les hommes se civilisent en apprenant à
mieux utiliser leur cerveau : tel est le point fondamental. Il
est probable que pendant très longtemps la monodextrie a
eu ses raisons d'être. Elle a facilité chez les primitifs la forma-
tion de structures denses dans les connexions cérébrales.
Il est possible qu'après l'avoir longtemps servie la mono-
dextrie soit devenue pour l'humanité une chaîne lourde à
porter. L'heure semble venue de tenter le retour à l'ambi-
dextrie préhominienne. C'est peut-être la clé vers une nou-
velle étape de l'aventure humaine, celle d'une super-homo-
nisation.
dextrie soit devenue pour l'humanité une chaîne lourde à
porter. L'heure semble venue de tenter le retour à l'ambi-
dextrie préhominienne. C'est peut-être la clé vers une nou-
velle étape de l'aventure humaine, celle d'une super-homo-
nisation.
11
france
monde
tiers-monde
Malraux : « Ce qui commence avec les
étudiants, c'est la conséquence de la
grande crise de la civilisation occiden-
tale. » Giscard d'Estaing : « Qui paiera
les hausses de salaires ? » Mitterrand :
« Nous n'avons songé qu'à l'unité de la
patrie. » Waldeck-Rochet : «Le P.C.F.
s'est conduit comme un grand parti de
progrès. » Duhamel : « Le changement
pour éviter l'aventure. »
étudiants, c'est la conséquence de la
grande crise de la civilisation occiden-
tale. » Giscard d'Estaing : « Qui paiera
les hausses de salaires ? » Mitterrand :
« Nous n'avons songé qu'à l'unité de la
patrie. » Waldeck-Rochet : «Le P.C.F.
s'est conduit comme un grand parti de
progrès. » Duhamel : « Le changement
pour éviter l'aventure. »
U.R.S.S. : la Pravda recommande la
lutte contre le groupe de Mao Tsé-
Toung. Allemagne fédérale : l'accès de
la Bavière est refusé à une délégation
est-allemande jugée trop importante.
Etats-Unis : M. Earl Warren, président
de la Cour Suprême démissionne.
Athlétisme : trois Noirs américains
courent le 100 mètres en 9" 9 : record
du monde
lutte contre le groupe de Mao Tsé-
Toung. Allemagne fédérale : l'accès de
la Bavière est refusé à une délégation
est-allemande jugée trop importante.
Etats-Unis : M. Earl Warren, président
de la Cour Suprême démissionne.
Athlétisme : trois Noirs américains
courent le 100 mètres en 9" 9 : record
du monde
Corée : tension. Radio Pyong-yang
annonce que des patrouilleurs nord
coréens ont coulé « un bateau-espion
des forces impérialistes américaines ».
Washington dément. Viêt-nam : les
Américains bombardent par erreur le
port de Saigon. Brésil : quatre morts
et cinquante blessés au cours de vio-
lents affrontements entre policiers et
étudiants.
annonce que des patrouilleurs nord
coréens ont coulé « un bateau-espion
des forces impérialistes américaines ».
Washington dément. Viêt-nam : les
Américains bombardent par erreur le
port de Saigon. Brésil : quatre morts
et cinquante blessés au cours de vio-
lents affrontements entre policiers et
étudiants.
Les ouvriers de chez Citroën refusent
la proposition de la direction de voter
sur la reprise du travail. O.R.T.F. :
l'Intersyndicale appelle les personnels
à voter « la reprise du travail à bref
délai ». Les journalistes poursuivent la
grève. Bang : victimes du bruit des
avions à réaction, onze communes voi-
! sines d'Orly intentent un procès à trois
compagnies aériennes.
la proposition de la direction de voter
sur la reprise du travail. O.R.T.F. :
l'Intersyndicale appelle les personnels
à voter « la reprise du travail à bref
délai ». Les journalistes poursuivent la
grève. Bang : victimes du bruit des
avions à réaction, onze communes voi-
! sines d'Orly intentent un procès à trois
compagnies aériennes.
Moscou : durcissement du ton des
commentaires sur la politique fran-
çaise. La Pravda loue le parti commu-
niste « avant-garde combattante de la
classe ouvrière ». Italie : manifestation
à l'inauguration de la Biennale de Ve-
nise. Un écriteau : « Inauguration de la
première Biennale d'art de police ».
Etats-Unis : selon un sondage « Gal-
lup », M. McCarthy serait un candidat
démocrate idéal.
commentaires sur la politique fran-
çaise. La Pravda loue le parti commu-
niste « avant-garde combattante de la
classe ouvrière ». Italie : manifestation
à l'inauguration de la Biennale de Ve-
nise. Un écriteau : « Inauguration de la
première Biennale d'art de police ».
Etats-Unis : selon un sondage « Gal-
lup », M. McCarthy serait un candidat
démocrate idéal.
Brésil : les étudiants occupent le Par-
lement de Brasilia pour protester contre
l'arrestation de deux cents de leurs ca-
marades. Laos : le général Kong-Le
accuse le prince Souvana Phouma
d'avoir soumis son pays à la «domina-
tion américaine ». Argentine : panique
dans un stade à Buenos Aires : 80
morts et 1 50 blessés.
lement de Brasilia pour protester contre
l'arrestation de deux cents de leurs ca-
marades. Laos : le général Kong-Le
accuse le prince Souvana Phouma
d'avoir soumis son pays à la «domina-
tion américaine ». Argentine : panique
dans un stade à Buenos Aires : 80
morts et 1 50 blessés.
Premier tour des législatives : forte
poussée des gaullistes. Recul sensible
des communistes et de la F.G.O.S.
Progrès du P.S.U. Tassement des cen-
tristes. 142 des 154 élus du premier
tour en métropole reviennent à la ma-
jorité. Tous les leaders de la F.G.O.S.
(Mollet, Mitterrand, Billières...) sont en
ballotage. Pompidou : « Les électeurs
ont compris la leçon »
poussée des gaullistes. Recul sensible
des communistes et de la F.G.O.S.
Progrès du P.S.U. Tassement des cen-
tristes. 142 des 154 élus du premier
tour en métropole reviennent à la ma-
jorité. Tous les leaders de la F.G.O.S.
(Mollet, Mitterrand, Billières...) sont en
ballotage. Pompidou : « Les électeurs
ont compris la leçon »
Etats-Unis : M. Humphrey se prononce
pour un cessez-le-feu immédiat au
Viêt-nam et pour la levée de l'embargo,
au moins en ce qui concerne les pro-
duits alimentaires et non stratégiques
contre la Chine. Les citoyens tchécos-
lovaques pourront résider à l'étranger.
Grande-Bretagne : les chemins de
fer sont perturbés par la grève du zèle
des cheminots.
pour un cessez-le-feu immédiat au
Viêt-nam et pour la levée de l'embargo,
au moins en ce qui concerne les pro-
duits alimentaires et non stratégiques
contre la Chine. Les citoyens tchécos-
lovaques pourront résider à l'étranger.
Grande-Bretagne : les chemins de
fer sont perturbés par la grève du zèle
des cheminots.
Biafra : cinq millions de personnes
déplacées. Proche-Orient : le gouverne-
ment israélien se préoccupe de la recru-
descence des actes de sabotage. Arri-
vée à Jérusalem de M. Macovescu,
chef de la diplomatie roumaine, qui
après être passé au Caire, a emporté
l'impression que les Egyptiens sont dé-
sireux de parvenir à un règlement paci-
fique du conflit.
déplacées. Proche-Orient : le gouverne-
ment israélien se préoccupe de la recru-
descence des actes de sabotage. Arri-
vée à Jérusalem de M. Macovescu,
chef de la diplomatie roumaine, qui
après être passé au Caire, a emporté
l'impression que les Egyptiens sont dé-
sireux de parvenir à un règlement paci-
fique du conflit.
Répression : les autorités religieuses
françaises protestent contre l'expulsion
de ressortissants étrangers : « La pro-
cédure d'urgence réveille des attitudes
latentes de xénophobie. « Citroën : les
ouvriers reprennent le travail. O.R.T.F.
reprise du travail sauf pour les journa-
listes parisiens et les collaborateurs
hors statut.
françaises protestent contre l'expulsion
de ressortissants étrangers : « La pro-
cédure d'urgence réveille des attitudes
latentes de xénophobie. « Citroën : les
ouvriers reprennent le travail. O.R.T.F.
reprise du travail sauf pour les journa-
listes parisiens et les collaborateurs
hors statut.
Etats-Unis : début d'émeute raciale à
Washington après l'arrestation du pas-
teur Abernathy. Canada : violentes ma-
nifestations des séparatistes contre
M. Pierre-Elliot Trudeau, Premier mi-
nistre, opposé à toute réforme qui ac-
corderait plus d'autonomie à la pro-
vince francophone. Italie : M. Leone
forme un cabinet « monocolore » démo-
crate chrétien.
Washington après l'arrestation du pas-
teur Abernathy. Canada : violentes ma-
nifestations des séparatistes contre
M. Pierre-Elliot Trudeau, Premier mi-
nistre, opposé à toute réforme qui ac-
corderait plus d'autonomie à la pro-
vince francophone. Italie : M. Leone
forme un cabinet « monocolore » démo-
crate chrétien.
Turquie : l'université d'Istambul est
fermée « sine-die ». Brésil : quinze mille
étudiants manifestent à Sao Paulo
« contre le régime d'oppression » et ré-
clament « la réforme de l'Université. »
Nigeria : Lagos se dit prêt à reprendre
les négociations avec le Biafra. Grèce :
le général Patakos annonce que le sort
des détenus sera amélioré. En atten-
dant, les arrestations se multiplient.
fermée « sine-die ». Brésil : quinze mille
étudiants manifestent à Sao Paulo
« contre le régime d'oppression » et ré-
clament « la réforme de l'Université. »
Nigeria : Lagos se dit prêt à reprendre
les négociations avec le Biafra. Grèce :
le général Patakos annonce que le sort
des détenus sera amélioré. En atten-
dant, les arrestations se multiplient.
Hausse de 5 à 12 % des loyers régle-
mentés dès le 1er juillet. Trafic inter-
rompu pendant six heures à Saint-
Lazare après l'attentat commis par des
commandos gaullistes contre des che-
minots. Le tribunal de Lyon ordonne
l'expulsion d'un piquet
mentés dès le 1er juillet. Trafic inter-
rompu pendant six heures à Saint-
Lazare après l'attentat commis par des
commandos gaullistes contre des che-
minots. Le tribunal de Lyon ordonne
l'expulsion d'un piquet
Canada : le parti de M. Pierre Trudeau
obtient la majorité absolue aux Com-
munes. Grande-Bretagne : le gouver-
nement Wilson frôle la défaite lors d'un
débat sur le contrôle des prix et des
revenus. Etats-Unis : le pasteur Aber-
nathy est condamné à 20 jours de pri-
son.
obtient la majorité absolue aux Com-
munes. Grande-Bretagne : le gouver-
nement Wilson frôle la défaite lors d'un
débat sur le contrôle des prix et des
revenus. Etats-Unis : le pasteur Aber-
nathy est condamné à 20 jours de pri-
son.
Turquie : M. Demirel, président du
conseil se prononce contre la partici-
pation des étudiants à la gestion des
universités. Viêt-nam : nette régres-
sion des combats dans le Sud. Des
émigrés cubains demandent la rupture
des relations entre la France et Cuba.
conseil se prononce contre la partici-
pation des étudiants à la gestion des
universités. Viêt-nam : nette régres-
sion des combats dans le Sud. Des
émigrés cubains demandent la rupture
des relations entre la France et Cuba.
12
Le Viêt-nam et le docteur Spock
14 JUIN — Le tribunal fédéral de Boston a déclaré coupables
le Docteur Spock, pédiatre réputé, W.S. Coffin, pasteur,
M. Ferber, étudiant à Harvard et Goodam, écrivain. Le
cinquième accusé, Marcus Raskin, ancien employé de la
Présidence, a été acquitté.
le Docteur Spock, pédiatre réputé, W.S. Coffin, pasteur,
M. Ferber, étudiant à Harvard et Goodam, écrivain. Le
cinquième accusé, Marcus Raskin, ancien employé de la
Présidence, a été acquitté.
Il a fallu plus de sept heures de délibération au jury pour
arriver à cette décision. Les cinq hommes étaient accusés
d'avoir conspiré pour aider des jeunes gens à éviter la
conscription.
arriver à cette décision. Les cinq hommes étaient accusés
d'avoir conspiré pour aider des jeunes gens à éviter la
conscription.
En réalité, Spock et ses amis s'étaient bornés à conseiller
les jeunes menacés par l'appel sous les drapeaux, ce qui
n'est pas forcément illégal. Le ministère public avait donc
retenu l'élément « conspiration » qui rendait l'acte punis-
sable.
les jeunes menacés par l'appel sous les drapeaux, ce qui
n'est pas forcément illégal. Le ministère public avait donc
retenu l'élément « conspiration » qui rendait l'acte punis-
sable.
Le mot était bien gros. Spock et ses coaccusés se flattent
d'être les « Cinq de Boston », unis seulement par leur
commune opposition à la guerre du Viêt-nam. Les quatre
condamnés ont accueilli le verdict avec un certain enthou-
siasme. Il peut leur valoir jusqu'à cinq ans de prison s'il est
confirmé en appel mais précisément il leur permettra de
soutenir leur cause devant les cours d'appels fédérales et
peut-être jusque devant la Cour Suprême.
d'être les « Cinq de Boston », unis seulement par leur
commune opposition à la guerre du Viêt-nam. Les quatre
condamnés ont accueilli le verdict avec un certain enthou-
siasme. Il peut leur valoir jusqu'à cinq ans de prison s'il est
confirmé en appel mais précisément il leur permettra de
soutenir leur cause devant les cours d'appels fédérales et
peut-être jusque devant la Cour Suprême.
Spock n'a pas caché son intention de lutter jusqu'au bout
contre une guerre qu'il considère contraire aux lois inter-
nationales, y compris la jurisprudence du tribunal de
Nuremberg.
contre une guerre qu'il considère contraire aux lois inter-
nationales, y compris la jurisprudence du tribunal de
Nuremberg.
Du point de vue du gouvernement fédéral son action est
certainement condamnable. Grâce à lui de nombreux jeunes
gens sont parvenus à passer à travers les mailles des
règlements de la conscription. D'autres ont finalement choisi
l'insoummission. Mais les poursuites contre ce grand
médecin ont un retentissement qui n'a fait que renforcer sa
cause. Le fait qu'un homme de haute réputation et qui gagne
beaucoup d'argent, s'engage dans l'illégalité impressionne
toujours les Américains. Les «cinq de Boston » n'étaient pas
un cas isolé. Après le verdict et en attendant l'appel, les
imitateurs pourraient bien se multiplier. C'est là-dessus que
compte le docteur Spock.
certainement condamnable. Grâce à lui de nombreux jeunes
gens sont parvenus à passer à travers les mailles des
règlements de la conscription. D'autres ont finalement choisi
l'insoummission. Mais les poursuites contre ce grand
médecin ont un retentissement qui n'a fait que renforcer sa
cause. Le fait qu'un homme de haute réputation et qui gagne
beaucoup d'argent, s'engage dans l'illégalité impressionne
toujours les Américains. Les «cinq de Boston » n'étaient pas
un cas isolé. Après le verdict et en attendant l'appel, les
imitateurs pourraient bien se multiplier. C'est là-dessus que
compte le docteur Spock.
Si l'affaire va jusqu'à la Cour Suprême, elle posera un
problème juridique délicat. Spock contestera en effet le droit
du président d'utiliser des conscrits dans une guerre qui n'a
pas été déclarée dans les formes constitutionnelles. D'après
les juristes le point est discutable. En effet, le Sénat a bien
autorisé globalement certaines opérations de police. Mais
cela donne-t-il le droit au gouvernement de les mener avec
les hommes fournis par la conscription, comme l'a fait
Johnson depuis plus de trois ans ?
problème juridique délicat. Spock contestera en effet le droit
du président d'utiliser des conscrits dans une guerre qui n'a
pas été déclarée dans les formes constitutionnelles. D'après
les juristes le point est discutable. En effet, le Sénat a bien
autorisé globalement certaines opérations de police. Mais
cela donne-t-il le droit au gouvernement de les mener avec
les hommes fournis par la conscription, comme l'a fait
Johnson depuis plus de trois ans ?
Canada : la victoire rie Pierre Trudeau.
25 JUIN. — Le parti libéral canadien, sous la direction de
Pierre Trudeau, Premier Ministre, a remporté un brillant
succès aux élections législatives. Avec 1 55 élus, il aura la
majorité absolue à la chambre des communes. C'est une
nouveauté dans un pays voué depuis 15 ans aux gouverne-
ments minoritaires.
Pierre Trudeau, Premier Ministre, a remporté un brillant
succès aux élections législatives. Avec 1 55 élus, il aura la
majorité absolue à la chambre des communes. C'est une
nouveauté dans un pays voué depuis 15 ans aux gouverne-
ments minoritaires.
Ce succès ne doit pas faire illusion. Le programme
de Pierre Trudeau ne sera pas facile à réaliser. Il vise à
faire du Canada un seul état, une seule nation bilingue
à double culture. Il a promis aux Québécois de réparer
de Pierre Trudeau ne sera pas facile à réaliser. Il vise à
faire du Canada un seul état, une seule nation bilingue
à double culture. Il a promis aux Québécois de réparer
les injustices du passé en leur assurant l'égalité de droits
dans toute la Fédération. Il veut faire de tous les anglo-
phones des Canadiens bilingues, donc leur faire apprendre
le français dès l'enfance. Il compte créer un mouvement
de snobisme en faveur de la culture française.
dans toute la Fédération. Il veut faire de tous les anglo-
phones des Canadiens bilingues, donc leur faire apprendre
le français dès l'enfance. Il compte créer un mouvement
de snobisme en faveur de la culture française.
En attendant très peu d'anglophones sont bilingues,
alors que les francophones le sont en grande majorité.
Ces derniers vont donc se trouver singulièrement avantagés
pour le recrutement dans les administrations et entreprises
fédérales ou à caractère fédéral.
alors que les francophones le sont en grande majorité.
Ces derniers vont donc se trouver singulièrement avantagés
pour le recrutement dans les administrations et entreprises
fédérales ou à caractère fédéral.
Il est bien possible que cette situation ne soit pas au goût
des Canadiens anglophones. Ceux-ci pourraient bien alors
prêter l'oreille aux projets de certains conservateurs. Ces
projets comportent le relâchement des liens fédéraux et la
reconnaissance des deux nations. Chacun resterait chez soi.
Les extrémistes de l'Ontario qui, au cours de la campagne
électorale, ont couvert d'insultes le Premier ministre, n'igno-
rent pas l'attrait que pourrait avoir la formule des deux
nations.
des Canadiens anglophones. Ceux-ci pourraient bien alors
prêter l'oreille aux projets de certains conservateurs. Ces
projets comportent le relâchement des liens fédéraux et la
reconnaissance des deux nations. Chacun resterait chez soi.
Les extrémistes de l'Ontario qui, au cours de la campagne
électorale, ont couvert d'insultes le Premier ministre, n'igno-
rent pas l'attrait que pourrait avoir la formule des deux
nations.
Trudeau a clairement annoncé qu'il jouait l'autre carte.
Il estime en effet que si les pouvoirs de l'Etat fédéral étaient
sérieusement réduits pour accorder une véritable autonomie
au Québec, on irait très vite à la sécession et à la-disparition
du Canada. Le Canada anglophone isolé serait fatalement
absorbé par les Etats-Unis. C'est un Canada original à
double culture qui a une chance de survie.
Il estime en effet que si les pouvoirs de l'Etat fédéral étaient
sérieusement réduits pour accorder une véritable autonomie
au Québec, on irait très vite à la sécession et à la-disparition
du Canada. Le Canada anglophone isolé serait fatalement
absorbé par les Etats-Unis. C'est un Canada original à
double culture qui a une chance de survie.
Si, au cours des prochaines années, le programme
de Trudeau se heurtait à une trop grande opposition et
devait être abandonné, la sécession suivrait à bref délai.
de Trudeau se heurtait à une trop grande opposition et
devait être abandonné, la sécession suivrait à bref délai.
Le Premier ministre le sait et il a besoin de mettre le
maximum de chances de son côté. C'est pourquoi il fait
de discrètes ouvertures à Paris. La bonne volonté française
pourrait l'aider beaucoup. Par contre un harcellement mal-
veillant de Paris compliquerait sérieusement sa tâche.
maximum de chances de son côté. C'est pourquoi il fait
de discrètes ouvertures à Paris. La bonne volonté française
pourrait l'aider beaucoup. Par contre un harcellement mal-
veillant de Paris compliquerait sérieusement sa tâche.
Athlétisme : ie mur des 10 secondes
21 JUIN. — Huit ans après que l'Allemand de l'Ouest
Armin Hary l'eut établi le 21 juin 1960 à Zurich, le fameux
record des 10 secondes aux 100 mètres a été battu à
Sacramento en Californie. Les trois Noirs américains Jimmy
Hines, Charlie Greene et Ray Smith ont réalisé 9 secondes
9/10. Dans le sillage de ces phénomènes Roger Bambuck
est entré dans le club des 10 secondes. Ainsi, alors qu'il avait
fallu attendre vingt et un ans pour qu'un coureur abaisse
le record du monde du 100 mètres de 10 secondes 2/10 à
10 secondes 1/10, n'aura-t-on patienté que quatre ans
pour qu'un autre dizième soit gagné. Or. un dixième de
Armin Hary l'eut établi le 21 juin 1960 à Zurich, le fameux
record des 10 secondes aux 100 mètres a été battu à
Sacramento en Californie. Les trois Noirs américains Jimmy
Hines, Charlie Greene et Ray Smith ont réalisé 9 secondes
9/10. Dans le sillage de ces phénomènes Roger Bambuck
est entré dans le club des 10 secondes. Ainsi, alors qu'il avait
fallu attendre vingt et un ans pour qu'un coureur abaisse
le record du monde du 100 mètres de 10 secondes 2/10 à
10 secondes 1/10, n'aura-t-on patienté que quatre ans
pour qu'un autre dizième soit gagné. Or. un dixième de
13
france
monde
tiers-monde
Conseil des Ministres : hausse des prix
industriels limités à 3 % ; pas d'aug-
mentation des tarifs publics pour les
entreprises ; subvention temporaire aux
exportateurs : 6 % puis 3 % des charges
salariales nouvelles. Les journalistes de
France-lnter qui avaient décidé de re-
prendre le travail apprennent qu'ils
seront convoqués par lettre individuelle.
industriels limités à 3 % ; pas d'aug-
mentation des tarifs publics pour les
entreprises ; subvention temporaire aux
exportateurs : 6 % puis 3 % des charges
salariales nouvelles. Les journalistes de
France-lnter qui avaient décidé de re-
prendre le travail apprennent qu'ils
seront convoqués par lettre individuelle.
Yougoslavie : le maréchal Tito annonce
qu'à la suite des manifestations étu-
diantes des changements auront lieu à
la direction du parti. Etats-Unis : M. Earl
Warren est remplacé par M. Abe Portas
à la présidence de la Cour suprême.
U.R.S.S. : M. Gromyko déclare que
son pays est disposé à étudier avec les
Etats-Unis la limitation du système des
fusées.
qu'à la suite des manifestations étu-
diantes des changements auront lieu à
la direction du parti. Etats-Unis : M. Earl
Warren est remplacé par M. Abe Portas
à la présidence de la Cour suprême.
U.R.S.S. : M. Gromyko déclare que
son pays est disposé à étudier avec les
Etats-Unis la limitation du système des
fusées.
Viêt-nam : le commandement améri-
cain décide l'évacuation de Khe-Sanh.
Pour prévenir une nouvelle offensive du
F.N.L. contre Saigon, les B 52 multi-
plient les raids autour de la capitale.
Brésil : cent mille personnes défilent
dans le centre de la ville aux cris de
« A bas la dictature ». Liban : un diri-
geant politique propose le stationne-
ment d'une force de l'O.N.U. le long
de la frontière israélienne.
cain décide l'évacuation de Khe-Sanh.
Pour prévenir une nouvelle offensive du
F.N.L. contre Saigon, les B 52 multi-
plient les raids autour de la capitale.
Brésil : cent mille personnes défilent
dans le centre de la ville aux cris de
« A bas la dictature ». Liban : un diri-
geant politique propose le stationne-
ment d'une force de l'O.N.U. le long
de la frontière israélienne.
Croisade électorale : M. Marcelin
(U.D.R.) « Des mots d'ordre annoncent
la nouvelle « révolution d'Octobre ».
J.C. Servan-Schreiber (U.D.R.) : «La
véritable gauche de progrès doit avoir
sa place au gouvernement». M. Rocard
(P.S.U.) : «Limiter la toute puissance
gaulliste ».
(U.D.R.) « Des mots d'ordre annoncent
la nouvelle « révolution d'Octobre ».
J.C. Servan-Schreiber (U.D.R.) : «La
véritable gauche de progrès doit avoir
sa place au gouvernement». M. Rocard
(P.S.U.) : «Limiter la toute puissance
gaulliste ».
Berlin-Ouest : les étudiants occupent
le bureau du recteur de l'Université
libre. Etats-Unis : le président Johnson
demande au Congrès d'abaisser à dix-
huit ans l'âge du droit de vote. Grande-
Bretagne : M. Wilson approuve un
important rapport sur la modernisation
et la démocratisation de la fonction
publique.
le bureau du recteur de l'Université
libre. Etats-Unis : le président Johnson
demande au Congrès d'abaisser à dix-
huit ans l'âge du droit de vote. Grande-
Bretagne : M. Wilson approuve un
important rapport sur la modernisation
et la démocratisation de la fonction
publique.
Proche-Orient : le roi Hussein affirme
qu'une « paix juste et durable » est pos-
sible si la résolution du 22 novembre
est appliquée « entièrement ». Hanoi :
réjouissances pour le « 3 000e avions
abattu ». Washington affirme n'avoir
perdu au Nord que 850 appareils.
Viêt-nam du Sud : l'évacuation de Khe
Sanh se poursuit.
qu'une « paix juste et durable » est pos-
sible si la résolution du 22 novembre
est appliquée « entièrement ». Hanoi :
réjouissances pour le « 3 000e avions
abattu ». Washington affirme n'avoir
perdu au Nord que 850 appareils.
Viêt-nam du Sud : l'évacuation de Khe
Sanh se poursuit.
Dernières déclarations politiques. Pou-
jade (U.D.R.) : « II y a eu complot.»
Duhamel (P.D.M.) : «Nous resterons
nous-mêmes. » Giscard : « Le dialogue
toujours.» Defferre (F.G.O.S.) : «La
grande Fédération est dépassée. » De-
bré (U.D.R.) : «Le gouvernement c'est
l'autorité. » 679 candidats se disputent
les 316 sièges. 270 duels et 45 élec-
tions triangulaires.
jade (U.D.R.) : « II y a eu complot.»
Duhamel (P.D.M.) : «Nous resterons
nous-mêmes. » Giscard : « Le dialogue
toujours.» Defferre (F.G.O.S.) : «La
grande Fédération est dépassée. » De-
bré (U.D.R.) : «Le gouvernement c'est
l'autorité. » 679 candidats se disputent
les 316 sièges. 270 duels et 45 élec-
tions triangulaires.
Marché commun : mise en garde à la
France. «Vous ne pouvez décider seule
de mesures de protection qui dérogent
au Traité de Rome », dit la Commission
de Bruxelles après le «plan de sauve-
garde » adopté par Paris. Yougoslavie :
séance houleuse au congrès des syndi-
cats. « Nous ne pouvons plus supporter
la bureaucratie » déclarent les ouvriers
révoltés.
France. «Vous ne pouvez décider seule
de mesures de protection qui dérogent
au Traité de Rome », dit la Commission
de Bruxelles après le «plan de sauve-
garde » adopté par Paris. Yougoslavie :
séance houleuse au congrès des syndi-
cats. « Nous ne pouvons plus supporter
la bureaucratie » déclarent les ouvriers
révoltés.
Viêt-nam du Sud : la plupart des mai-
sons de Saigon possèdent une pièce
fortifiée. Le gouvernement durcit sa
position face aux « neutralistes » et aux
« pacifistes ». Un décret permettra de
juger en vingt-quatre heures ceux qui
«défendent des positions pro-commu-
nistes. » Le trafic ferroviaire entre la
Chine et le Viêt-nam du Nord est inter-
rompu.
sons de Saigon possèdent une pièce
fortifiée. Le gouvernement durcit sa
position face aux « neutralistes » et aux
« pacifistes ». Un décret permettra de
juger en vingt-quatre heures ceux qui
«défendent des positions pro-commu-
nistes. » Le trafic ferroviaire entre la
Chine et le Viêt-nam du Nord est inter-
rompu.
Meurtre électoral commis par des comi-
tés de Défense de la République à
Arras : un jeune communiste de 1 8 ans
est abattu. Cinq à six cents jeunes
manifestent au Quartier Latin. De
Gaulle : appel à l'unité. Radio-télévision
scolaire : fin de la grève. L'intersyndi-
cale dénonce l'attitude du ministère
qui n'a donné aucune réponse aux re-
vendications des personnels.
tés de Défense de la République à
Arras : un jeune communiste de 1 8 ans
est abattu. Cinq à six cents jeunes
manifestent au Quartier Latin. De
Gaulle : appel à l'unité. Radio-télévision
scolaire : fin de la grève. L'intersyndi-
cale dénonce l'attitude du ministère
qui n'a donné aucune réponse aux re-
vendications des personnels.
Etats-Unis : état d'urgence à l'univer-
sité de Berkeley après une deuxième
nuit de violence au cours de laquelle la
police emploie des grenades lacrymo-
gènes. Suisse : les autonomistes juras-
siens occupent la préfecture de Délé-
mont. Heurts entre jeunes manifestants
et policiers à Zurich : une cinquantaine
de blessés, 163 arrestations.
sité de Berkeley après une deuxième
nuit de violence au cours de laquelle la
police emploie des grenades lacrymo-
gènes. Suisse : les autonomistes juras-
siens occupent la préfecture de Délé-
mont. Heurts entre jeunes manifestants
et policiers à Zurich : une cinquantaine
de blessés, 163 arrestations.
Brésil : manifestations antigouverne-
mentales à Brasilia, Recife, Bahia et
Porto-Alegre. Dans les milieux mili-
taires, on met en cause des « comman-
dos subversifs cherchant à organiser la
guérilla urbaine. » Uruguay : renforts
militaires à la veille de la grève géné-
rale. Argentine : un millier d'arresta-
tions pour le second anniversaire du
coup d'Etat de juin 1966.
mentales à Brasilia, Recife, Bahia et
Porto-Alegre. Dans les milieux mili-
taires, on met en cause des « comman-
dos subversifs cherchant à organiser la
guérilla urbaine. » Uruguay : renforts
militaires à la veille de la grève géné-
rale. Argentine : un millier d'arresta-
tions pour le second anniversaire du
coup d'Etat de juin 1966.
Les gaullistes enlèvent 358 des 485
sièges de la nouvelle Assemblée. Ils
gagnent 97 sièges et les Républicains
indépendants 21. La Fédération de la
Gauche perd 61 sièges et le Parti
Communiste 39. Mendes France est
battu de 122 voix à Grenoble par Jean-
neney.
sièges de la nouvelle Assemblée. Ils
gagnent 97 sièges et les Républicains
indépendants 21. La Fédération de la
Gauche perd 61 sièges et le Parti
Communiste 39. Mendes France est
battu de 122 voix à Grenoble par Jean-
neney.
Grande-Bretagne : démission de
M. Ray Gunter, ministre de l'Energie,
en désaccord personnel avec M. Wil-
son. Yougoslavie : fin du congrès des
syndicats. Les délégués exigent un vote
au scrutin secret. Etats-Unis : destiné
à l'armée de l'air, le plus gros avion du
monde effectue son premier vol .
M. Ray Gunter, ministre de l'Energie,
en désaccord personnel avec M. Wil-
son. Yougoslavie : fin du congrès des
syndicats. Les délégués exigent un vote
au scrutin secret. Etats-Unis : destiné
à l'armée de l'air, le plus gros avion du
monde effectue son premier vol .
Hanoi : arrivée de M. Le Duc Tho qui
vient rendre compte de l'évolution des
conversations de Paris. Le F.N.L.
affirme dans un communiqué son « droit
sacré et inviolable d'intensifier la lutte, »
Nigeria : Londres prépare un pont
aérien pour sauver les victimes de la
famine.
vient rendre compte de l'évolution des
conversations de Paris. Le F.N.L.
affirme dans un communiqué son « droit
sacré et inviolable d'intensifier la lutte, »
Nigeria : Londres prépare un pont
aérien pour sauver les victimes de la
famine.
14
gagné sur cent mètres, c'est comme si le record du monde
du 1 500 mètres était amélioré de 15 mètres soit de
2 secondes. Les trois flèches américaines ont atteint la
vitesse record de 36,363 km/h jamais réalisée par un être
humain dans une ligne droite.
du 1 500 mètres était amélioré de 15 mètres soit de
2 secondes. Les trois flèches américaines ont atteint la
vitesse record de 36,363 km/h jamais réalisée par un être
humain dans une ligne droite.
Selon Bud Winter, l'entraîneur de Ray Smith, les 9 se-
condes 8/10 seront atteintes à Mexico : les athlètes béné-
ficieront à la fois de l'altitude (moindre densité de l'atmos-
phère) et d'une piste en tartan. Mais, toujours selon Winter,
les 9 secondes 8/10 sont également possibles ailleurs.
«C'est la mise en condition physique et psychologique qui
a fait des progrès ainsi que l'équipement » souligne-t-il.
condes 8/10 seront atteintes à Mexico : les athlètes béné-
ficieront à la fois de l'altitude (moindre densité de l'atmos-
phère) et d'une piste en tartan. Mais, toujours selon Winter,
les 9 secondes 8/10 sont également possibles ailleurs.
«C'est la mise en condition physique et psychologique qui
a fait des progrès ainsi que l'équipement » souligne-t-il.
A ce sujet, Winter utilise pour ses élèves des méthodes
de relaxation identiques à celles des aviateurs militaires.
Chacun de ses sprinters subit des tests dont les résultats
sont comparés à un profil de champion-type.
de relaxation identiques à celles des aviateurs militaires.
Chacun de ses sprinters subit des tests dont les résultats
sont comparés à un profil de champion-type.
28 JUIN. — Le Président Johnson s'est empressé de répon-
dre à l'ouverture faite par M. Gromyko concernant une
limitation éventuelle des armements. En effet, le traité de
non diffusion des armes nucléaires que ses promoteurs
espèrent faire ratifier par les principales puissances non-
nucléaires ne comporte aucune restriction dans l'armement
des pays pourvus. Il vise simplement à consolider le mono-
pole de ces derniers.
dre à l'ouverture faite par M. Gromyko concernant une
limitation éventuelle des armements. En effet, le traité de
non diffusion des armes nucléaires que ses promoteurs
espèrent faire ratifier par les principales puissances non-
nucléaires ne comporte aucune restriction dans l'armement
des pays pourvus. Il vise simplement à consolider le mono-
pole de ces derniers.
Si l'U.R.S.S. et les U.S.A. tiennent à ce monopole, ils
se rendent compte aussi des inconvénients d'une course
illimitée. Chacun des deux a les moyens de détruire plusieurs
fois le reste du monde. Ils viennent d'aborder une nouvelle
étape, celle de la défense anti-missile. Elle menace d'être
encore beaucoup plus coûteuse que la précédente.
se rendent compte aussi des inconvénients d'une course
illimitée. Chacun des deux a les moyens de détruire plusieurs
fois le reste du monde. Ils viennent d'aborder une nouvelle
étape, celle de la défense anti-missile. Elle menace d'être
encore beaucoup plus coûteuse que la précédente.
Il n'y aura jamais de défense absolue contre les missiles
à tête nucléaire et un seul d'entre-eux suffit à détruire tota-
lement une agglomération comme Paris ou New York. Si
une percée technologique apportait un système de défense
entièrement nouveau et efficace, un progrès ultérieur per-
mettrait rapidement de surmonter cette percée.
à tête nucléaire et un seul d'entre-eux suffit à détruire tota-
lement une agglomération comme Paris ou New York. Si
une percée technologique apportait un système de défense
entièrement nouveau et efficace, un progrès ultérieur per-
mettrait rapidement de surmonter cette percée.
Il est logique que l'U.R.S.S. et les Etats-Unis cherchent
des accommodements pour ménager leurs ressources.
Depuis deux ans, le Président Johnson multiplie les appels
discrets en ce sens. Le Kremlin faisait la sourde oreille.
Il semble maintenant avoir changé d'avis. Il pense proba-
blement que les difficultés financières des Etats-Unis sont
devenues assez sérieuses pour les rendre accommodants.
des accommodements pour ménager leurs ressources.
Depuis deux ans, le Président Johnson multiplie les appels
discrets en ce sens. Le Kremlin faisait la sourde oreille.
Il semble maintenant avoir changé d'avis. Il pense proba-
blement que les difficultés financières des Etats-Unis sont
devenues assez sérieuses pour les rendre accommodants.
Ceci dit, même si les conversations s'engagent immédia-
tement, elles ne sont pas près de donner des résultats tan-
gibles. Le premier obstacle et le plus grave concerne l'état
exact des armements des deux parties, y compris les moyens
antimissiles. Malgré divers recoupements, malgré des
satellites-espions, les Américains connaissent mal l'ar-
mement soviétique. L'U.R.S.S. a effectivement des moyens
militaires secrets et elle tient à ses secrets. Elle estime qu'il
ne font que compenser son infériorité industrielle par
rapport aux Etats-Unis.
tement, elles ne sont pas près de donner des résultats tan-
gibles. Le premier obstacle et le plus grave concerne l'état
exact des armements des deux parties, y compris les moyens
antimissiles. Malgré divers recoupements, malgré des
satellites-espions, les Américains connaissent mal l'ar-
mement soviétique. L'U.R.S.S. a effectivement des moyens
militaires secrets et elle tient à ses secrets. Elle estime qu'il
ne font que compenser son infériorité industrielle par
rapport aux Etats-Unis.
Cette situation ne facilitera pas les conversations, Les
Soviétiques s'efforceront d'obtenir un ralentissement de
l'effort américain. Les Américains ne demandent pas mieux
mais ils veulent surtout en connaître davantage sur l'ar-
mement offensif et défensif de l'U.R.S.S.
Soviétiques s'efforceront d'obtenir un ralentissement de
l'effort américain. Les Américains ne demandent pas mieux
mais ils veulent surtout en connaître davantage sur l'ar-
mement offensif et défensif de l'U.R.S.S.
Les pourparlers sont donc appelés à se prolonger sans
résultats très précis. Mais il est possible que pendant ces
résultats très précis. Mais il est possible que pendant ces
m
négociations la course aux armements des deux grands soit
quelque peu ralentie.
quelque peu ralentie.
27 JUIN. — La nouvelle « crise » de Berlin n'est pas pour ce
mois-ci, en dépit des rumeurs alarmantes qui ont circulé
depuis deux semaines. L'affaire avait commencé au milieu
du mois. Le gouvernement est-allemand avait imposé de
nouvelles restrictions aux voyages des Allemands occi-
dentaux vers Berlin, ainsi qu'au transport de marchandises.
Ce n'était pas grand chose mais on se rappelait que les
grandes crises de Berlin avaient commencé de la même
façon.
mois-ci, en dépit des rumeurs alarmantes qui ont circulé
depuis deux semaines. L'affaire avait commencé au milieu
du mois. Le gouvernement est-allemand avait imposé de
nouvelles restrictions aux voyages des Allemands occi-
dentaux vers Berlin, ainsi qu'au transport de marchandises.
Ce n'était pas grand chose mais on se rappelait que les
grandes crises de Berlin avaient commencé de la même
façon.
L'O.T.A.N. a protesté officiellement auprès de l'U.R.S.S.
Puis Willy Brandt, ministre des Affaires étrangères de
Bonn, a discrètement rencontré Abrasimov, l'ambassadeur
soviétique en Allemagne de l'Est. Rien n'a transpiré de
cette entrevue, mais très visiblement l'atmosphère n'était
pas au drame.
Puis Willy Brandt, ministre des Affaires étrangères de
Bonn, a discrètement rencontré Abrasimov, l'ambassadeur
soviétique en Allemagne de l'Est. Rien n'a transpiré de
cette entrevue, mais très visiblement l'atmosphère n'était
pas au drame.
Personne ne veut pousser bien loin l'affaire et surtout
pas le Président Johnson. Celui-ci compte toujours sur les
bons offices de Moscou pour liquider l'aventure vietna-
mienne et espère terminer son mandat sur une détente
américano-soviétique.
pas le Président Johnson. Celui-ci compte toujours sur les
bons offices de Moscou pour liquider l'aventure vietna-
mienne et espère terminer son mandat sur une détente
américano-soviétique.
L'initiative prise par le chef du gouvernement est-
allemand Walter Ulbricht était un coup de semonce à l'égard
de l'Allemagne Occidentale qui, depuis quelques temps,
se montre particulièrement active en Europe orientale.
allemand Walter Ulbricht était un coup de semonce à l'égard
de l'Allemagne Occidentale qui, depuis quelques temps,
se montre particulièrement active en Europe orientale.
La situation de Berlin-Ouest, simple enclave en territoire
est-allemand, se prêtera toujours à des harcèlements de ce
genre. Berlin-Ouest ne subsiste que grâce à des subventions
massives de l'Allemagne Occidentale. Elle devient de plus
en plus une ville de rentiers et de pensionnés qui y trouvent
une vie relativement luxueuse pour un coût assez modeste.
Mais les jeunes la désertent de plus en plus.
est-allemand, se prêtera toujours à des harcèlements de ce
genre. Berlin-Ouest ne subsiste que grâce à des subventions
massives de l'Allemagne Occidentale. Elle devient de plus
en plus une ville de rentiers et de pensionnés qui y trouvent
une vie relativement luxueuse pour un coût assez modeste.
Mais les jeunes la désertent de plus en plus.
Walter Ulbricht n'a évidemment pas agi sans l'accord de
Moscou. L'U.R.S.S. maintient sa suzeraineté sur l'Alle-
magne orientale et ne s'en cache pas. Cependant Ulbricht
est beaucoup plus qu'un pion soviétique. C'est un vieux
communiste de soixante-quinze ans. Depuis la division du
pays, il mène son Allemagne avec dureté et efficacité.
Celle-ci était beaucoup plus détruite que l'Ouest. Elle était
privée de sa région silésienne et de la Prusse orientale.
Elle n'avait que dix-sept millions d'habitants et presque pas
de ressources naturelles. Elle a dû se reconstruire sans aide
extérieure. Cependant sa production industrielle par tête
d'habitant est aujourd'hui supérieure à celle de la France.
Les Allemands de l'Est ont peu de voitures mais ils sont
bien nourris et en moyenne beaucoup mieux logés que les
Français.
Moscou. L'U.R.S.S. maintient sa suzeraineté sur l'Alle-
magne orientale et ne s'en cache pas. Cependant Ulbricht
est beaucoup plus qu'un pion soviétique. C'est un vieux
communiste de soixante-quinze ans. Depuis la division du
pays, il mène son Allemagne avec dureté et efficacité.
Celle-ci était beaucoup plus détruite que l'Ouest. Elle était
privée de sa région silésienne et de la Prusse orientale.
Elle n'avait que dix-sept millions d'habitants et presque pas
de ressources naturelles. Elle a dû se reconstruire sans aide
extérieure. Cependant sa production industrielle par tête
d'habitant est aujourd'hui supérieure à celle de la France.
Les Allemands de l'Est ont peu de voitures mais ils sont
bien nourris et en moyenne beaucoup mieux logés que les
Français.
15
lettres
à
l'événement
Je suis perplexe...
L'Evénement du mois de juin
laisse perplexe un de vos lec-
teurs qui appréciait votre revue
pour son originalité et son indé-
pendance d'esprit. Il faut être
bien naïf, en effet, pour vou-
loir faire- la révolution, pro-
mulguer le pouvoir dans la
rue, détruire le gouvernement,
renverser l'Etat sans recevoir
de coups : incendier, démolir,
arracher des pavés, attaquer
les forces de l'ordre en ne
recevant en échange que des
bonbons à la menthe...
laisse perplexe un de vos lec-
teurs qui appréciait votre revue
pour son originalité et son indé-
pendance d'esprit. Il faut être
bien naïf, en effet, pour vou-
loir faire- la révolution, pro-
mulguer le pouvoir dans la
rue, détruire le gouvernement,
renverser l'Etat sans recevoir
de coups : incendier, démolir,
arracher des pavés, attaquer
les forces de l'ordre en ne
recevant en échange que des
bonbons à la menthe...
Il fallait bien être naïf aussi
pour penser qu'un gouverne-
ment, quel qu'il soit, et fût-il
de gauche, pourrait tolérer des
barricades dans la capitale. Il
faut être bien naïf pour dire :
« Les forces de l'ordre n'au-
raient pas dû aller au quartier
Latin » car la rue n'appartient
pas aux étudiants, pas plus
qu'elle n'appartient aux bour-
geois dans le 16e, aux prosti-
tuées à Pigalle. aux Arabes et
aux Israélites à Belleville. La
rue appartient à tous les ci-
toyens et aucun gouvernement,
quel qu'il soit et fût-il de gau-
che, ne pourrait admettre de
laisser aux émeutiers qui pro-
clamaient vouloir sa perte,
deux arrondissements de la
capitale...
pour penser qu'un gouverne-
ment, quel qu'il soit, et fût-il
de gauche, pourrait tolérer des
barricades dans la capitale. Il
faut être bien naïf pour dire :
« Les forces de l'ordre n'au-
raient pas dû aller au quartier
Latin » car la rue n'appartient
pas aux étudiants, pas plus
qu'elle n'appartient aux bour-
geois dans le 16e, aux prosti-
tuées à Pigalle. aux Arabes et
aux Israélites à Belleville. La
rue appartient à tous les ci-
toyens et aucun gouvernement,
quel qu'il soit et fût-il de gau-
che, ne pourrait admettre de
laisser aux émeutiers qui pro-
clamaient vouloir sa perte,
deux arrondissements de la
capitale...
Les étudiants qui protes-
taient « calmement » à la Sor-
bonne (page 27), je puis vous
dire (je les ai vus) qu'ils étaient
armés de bâtons et barres de
fer ainsi que de morceaux de
mobilier. L'arrivée de la police
à l'Université c'était l'entrée de
la violence (page 47) phrase
équivoque car l'évacuation de
la Sorbonne s'est faite sans
taient « calmement » à la Sor-
bonne (page 27), je puis vous
dire (je les ai vus) qu'ils étaient
armés de bâtons et barres de
fer ainsi que de morceaux de
mobilier. L'arrivée de la police
à l'Université c'était l'entrée de
la violence (page 47) phrase
équivoque car l'évacuation de
la Sorbonne s'est faite sans
aucun heurt. Les gaz au chlore
(page 39) qualifiés de dange-
reux, pas une photo, pas un
témoignage ne rapporte que les
forces de l'ordre aient utilisé
des masques à gaz : elles ont
respiré autant de gaz que les
manifestants, est-il de meil-
leure preuve que ceux-ci n'é-
taient pas vraiment dangereux ?
Les C.R.S. qui refusent le pas-
sage aux secouristes (page
39) vérité truquée et fragmen-
taire. Il faut préciser que la
plupart du temps, les forces de
l'ordre ont laissé circuler libre-
ment les ambulances (je l'ai
vu près du Panthéon) alors
que les émeutiers ont toujours
refusé de ménager des chi-
canes dans les barricades pour
leur livrer passage. Il faut dire
aussi que l'on a vu tellement de
faux secouristes que la Croix-
Rouge Française a fait le len-
demain une mise au point (n'a-
t-on pas trouvé des cocktails
molotov dans une prétendue
voiture de secouristes).
(page 39) qualifiés de dange-
reux, pas une photo, pas un
témoignage ne rapporte que les
forces de l'ordre aient utilisé
des masques à gaz : elles ont
respiré autant de gaz que les
manifestants, est-il de meil-
leure preuve que ceux-ci n'é-
taient pas vraiment dangereux ?
Les C.R.S. qui refusent le pas-
sage aux secouristes (page
39) vérité truquée et fragmen-
taire. Il faut préciser que la
plupart du temps, les forces de
l'ordre ont laissé circuler libre-
ment les ambulances (je l'ai
vu près du Panthéon) alors
que les émeutiers ont toujours
refusé de ménager des chi-
canes dans les barricades pour
leur livrer passage. Il faut dire
aussi que l'on a vu tellement de
faux secouristes que la Croix-
Rouge Française a fait le len-
demain une mise au point (n'a-
t-on pas trouvé des cocktails
molotov dans une prétendue
voiture de secouristes).
Vous aviez l'indépendance
d'esprit nécessaire pour dénon-
cer à la fois ce qui a constitué
un terrain favorable (c'est-à-
dire les insuffisances de notre
système social et universi-
taire), les illusions dangereu-
ses (qui veut en France un
régime maoïste ou cubain ?)
et la scandaleuse exploitation
du mécontentement de la jeu-
nesse et du monde ouvrier.
Vous ne l'avez pas fait. Vous
avec perdu un lecteur et l'es-
time d'un de vos concitoyens.
d'esprit nécessaire pour dénon-
cer à la fois ce qui a constitué
un terrain favorable (c'est-à-
dire les insuffisances de notre
système social et universi-
taire), les illusions dangereu-
ses (qui veut en France un
régime maoïste ou cubain ?)
et la scandaleuse exploitation
du mécontentement de la jeu-
nesse et du monde ouvrier.
Vous ne l'avez pas fait. Vous
avec perdu un lecteur et l'es-
time d'un de vos concitoyens.
M. Moulin
83 - Toulon
83 - Toulon
Des «contre-vérités»...
Je suis abonnée à votre jour-
nal. Je proteste, vous racon-
tez des « contre-vérités » fla-
grantes. Je suis allée à la ma-
nifestation gaulliste : par fidé-
lité, reconnaissance et admi-
ration pour cet homme hors-
pair. Je me suis trouvée au
milieu de jeunes, d'ouvriers, de
gens modestes (d'ailleurs, j'en
suis désolée pour vous, mais
nous étions un million et non
cinq cent mille)...
nal. Je proteste, vous racon-
tez des « contre-vérités » fla-
grantes. Je suis allée à la ma-
nifestation gaulliste : par fidé-
lité, reconnaissance et admi-
ration pour cet homme hors-
pair. Je me suis trouvée au
milieu de jeunes, d'ouvriers, de
gens modestes (d'ailleurs, j'en
suis désolée pour vous, mais
nous étions un million et non
cinq cent mille)...
J'ai entendu et dit « Le rou-
quin à Pékin » et « Les cocos
quin à Pékin » et « Les cocos
chez Mao » (pas méchant) et
jamais «Cohn-Bendit à Da-
chau ».
jamais «Cohn-Bendit à Da-
chau ».
J'ai pleinement confiance en
de Gaulle, aucunement en
Cohn-Bendit. Ce gars veut tout
détruire. Il n'est aucunement
capable de construire quelque
chose. Que voulez-vous, j'ai
la faiblesse d'aimer et d'admi-
rer mon pays !
de Gaulle, aucunement en
Cohn-Bendit. Ce gars veut tout
détruire. Il n'est aucunement
capable de construire quelque
chose. Que voulez-vous, j'ai
la faiblesse d'aimer et d'admi-
rer mon pays !
Le résultat de l'occupation
de la Sorbonne par ces « révo-
lutionnaires » (pensez ! quel
beau qualificatif pour ces
petits types !) a été une inva-
sion de puces, de poux, de
maladies vénériennes ; la des-
truction de l'Odéon.
de la Sorbonne par ces « révo-
lutionnaires » (pensez ! quel
beau qualificatif pour ces
petits types !) a été une inva-
sion de puces, de poux, de
maladies vénériennes ; la des-
truction de l'Odéon.
Sachez que Robespierre était
d'une rectitude rriorale abso-
lue.
d'une rectitude rriorale abso-
lue.
Sachez aussi que beaucoup
de gens, de gaullistes, détes-
tent R. Cartier, l'O.A.S.. etc. et
Vichy avec lesquels vous osez
nous comparer. Permettez que
nous soyons vos ennemis com-
me nous sommes les ennemis
convaincus et ardents de ces
gens-là (cités plus haut).
de gens, de gaullistes, détes-
tent R. Cartier, l'O.A.S.. etc. et
Vichy avec lesquels vous osez
nous comparer. Permettez que
nous soyons vos ennemis com-
me nous sommes les ennemis
convaincus et ardents de ces
gens-là (cités plus haut).
N'abîmez pas la Révolution
française en parlant de ces
événements. Enflammés en
faveur du Viêt-nam, nous nous
française en parlant de ces
événements. Enflammés en
faveur du Viêt-nam, nous nous
demandons maintenant que
nous vous avons lu et entendu
un Cohn-Bendit « Nous serions-
nous lourdement trompés ' »
nous vous avons lu et entendu
un Cohn-Bendit « Nous serions-
nous lourdement trompés ' »
Mme Berger
Paris
Paris
Les « marginaux »
du mois de mai
du mois de mai
Evénement juin 1968 — une
fois de plus, mes idées cou-
chées par vous sur le papier.
Nombreux sont, sans doute,
« les marginaux «qui voudraient
que ce mois de mai ne s'oublie
pas complètement, qui dési-
rent encore redonner vie aux
espoirs déçus de leur propre
jeunesse : /
fois de plus, mes idées cou-
chées par vous sur le papier.
Nombreux sont, sans doute,
« les marginaux «qui voudraient
que ce mois de mai ne s'oublie
pas complètement, qui dési-
rent encore redonner vie aux
espoirs déçus de leur propre
jeunesse : /
— par le maintien du « débat
permanent » — liberté de for-
mation et d'information de
discussion — tous réunis,
jeunes et moins jeunes, intel-
lectuels, ouvriers et paysans.
permanent » — liberté de for-
mation et d'information de
discussion — tous réunis,
jeunes et moins jeunes, intel-
lectuels, ouvriers et paysans.
— pour la promotion, la
récrimination, la définition de
nouvelles formes d'une vie cul-
turelle véritable et populaire
pour faire apparaître par l'élé-
vation du niveau général un ter-
rain ferme et sain qui a donné
et donnera toujours naissance
à des forces plus saines, iné-
récrimination, la définition de
nouvelles formes d'une vie cul-
turelle véritable et populaire
pour faire apparaître par l'élé-
vation du niveau général un ter-
rain ferme et sain qui a donné
et donnera toujours naissance
à des forces plus saines, iné-
Etes-vous une personne cultivée ?
Chaque mois paraissent dans
l'Evénement des chroniques sur
la politique, l'économie poli-
tique, la littérature, le théâtre,
le cinéma, la musique, les
arts, les sciences, etc. Les sui-
vez-vous toutes aussi facile-
ment ? N'y en a-t-il pas que
vous négligez systématique-
ment parce qu'elles traitent de
sujets sur lesquels vos connais-
sances sont insuffisantes ?
Gare aux lacunes qui vous
cachent le véritable sens d'un
livre, d'un spectacle, d'un dis-
cours, d'une œuvre d'art, qui
vous gênent lorsque vous par-
ticipez à des conversations
intéressantes, qui vous font
apparaître comme une «per-
sonne qui ne se tient pas au
l'Evénement des chroniques sur
la politique, l'économie poli-
tique, la littérature, le théâtre,
le cinéma, la musique, les
arts, les sciences, etc. Les sui-
vez-vous toutes aussi facile-
ment ? N'y en a-t-il pas que
vous négligez systématique-
ment parce qu'elles traitent de
sujets sur lesquels vos connais-
sances sont insuffisantes ?
Gare aux lacunes qui vous
cachent le véritable sens d'un
livre, d'un spectacle, d'un dis-
cours, d'une œuvre d'art, qui
vous gênent lorsque vous par-
ticipez à des conversations
intéressantes, qui vous font
apparaître comme une «per-
sonne qui ne se tient pas au
courant », aux horizons bornés,
avec laquelle on s'ennuie.
avec laquelle on s'ennuie.
Si vous voulez mettre à jour
vos connaissances, actualiser
votre culture, être au courant
de tout, être « à la page »,
l'I.C.F. a mis au point une
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ple, joignant l'utile à l'agréable,
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rapide et le plus pratique d'ac-
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Institut culturel français
35, rue Collange - 92-Paris-
Levallois.
Levallois.
16
puisables, créatrices de progrès
politique, social et écono-
mique — l'édification d'une
société nouvelle ne peut se
concevoir sans un niveau cul-
turel et intellectuel élevé des
masses.
politique, social et écono-
mique — l'édification d'une
société nouvelle ne peut se
concevoir sans un niveau cul-
turel et intellectuel élevé des
masses.
— par le comblement des
fossés qui séparent savants,
intellectuels, ouvriers et pay-
sans — compréhension et con-
naissances mutuelles — prises
de conscience « des mentali-
tés » réciproques — pour de
nouveaux rapports, de nou-
velles définitions.
fossés qui séparent savants,
intellectuels, ouvriers et pay-
sans — compréhension et con-
naissances mutuelles — prises
de conscience « des mentali-
tés » réciproques — pour de
nouveaux rapports, de nou-
velles définitions.
— pour la proposition de ré-
ponses pratiques aux questions
que vous posez, et que nous
nous posons, chacun en nos
« bastilles ».
ponses pratiques aux questions
que vous posez, et que nous
nous posons, chacun en nos
« bastilles ».
Puisse votre nouvelle tâche,
être de réunir, d'où qu'ils vien-
nent et quels qu'ils soient, en
dehors des formations tradi-
tionnelles, ceux qui confusé-
ment espéraient ce mois de
mai dans leur propre vouloir
de ne pas accepter la destinée
imposée. Vous en avez l'esprit
et le désir, l'autorité et la
compétence, les possibilités et
les moyens.
être de réunir, d'où qu'ils vien-
nent et quels qu'ils soient, en
dehors des formations tradi-
tionnelles, ceux qui confusé-
ment espéraient ce mois de
mai dans leur propre vouloir
de ne pas accepter la destinée
imposée. Vous en avez l'esprit
et le désir, l'autorité et la
compétence, les possibilités et
les moyens.
Docteur Rocherenil
53 - Laval
53 - Laval
PO U R AIDER
LE PEUPLE VIETNAMIEN QUI
LUTTE CONTRE L'AGRESSION AMÉRICAINE
UN MILLIARD
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le 10 août
Numéro spécial le 10 septembre
Numéro spécial le 10 septembre
17
Regard
sur
sur
F événement
L
! E soleil s'est conjugué avec la lune.
La grande marée est là. Le 1er juillet, Georges Pompidou
était aussi surpris que Cohn-Bendit l'avait été le 13 mai.
Cohn-Bendit a déclaré : « Le pouvoir corrompt, je suis
sans doute corrompu. Je ne suis pas nécessaire, dans deux
mois on ne me connaîtra plus. » Ce ne sera pas le langage
de Georges Pompidou.
La grande marée est là. Le 1er juillet, Georges Pompidou
était aussi surpris que Cohn-Bendit l'avait été le 13 mai.
Cohn-Bendit a déclaré : « Le pouvoir corrompt, je suis
sans doute corrompu. Je ne suis pas nécessaire, dans deux
mois on ne me connaîtra plus. » Ce ne sera pas le langage
de Georges Pompidou.
Le 30 mai, ce que l'on a appelé la Révolution de mai
est déclarée close par le général de Gaulle : « J'ai pris
mes résolutions. » II appelle aux urnes : dix jours de
malaise et de. soubresauts. Dans une petite assemblée,
un communiste me dit : « C'est tout de même un homme
très fort. » Dans les propos, il v a une nuance de soula-
gement. Syndicats et partis battent en retraite. La C.G.T.
frappe du poing sur la table, arrache encore quelques
bribes, et appelle à la reprise du travail.
est déclarée close par le général de Gaulle : « J'ai pris
mes résolutions. » II appelle aux urnes : dix jours de
malaise et de. soubresauts. Dans une petite assemblée,
un communiste me dit : « C'est tout de même un homme
très fort. » Dans les propos, il v a une nuance de soula-
gement. Syndicats et partis battent en retraite. La C.G.T.
frappe du poing sur la table, arrache encore quelques
bribes, et appelle à la reprise du travail.
Depuis le 1er juin, les Français ont de nouveau de
l'essence, et leur jouet favori l'automobile. Les journaux
peuvent faire un titre sur les quatre-vingts morts de la
Pentecôte, chez les anthropomobiles. La révolte de mai
a fait une demi-douzaine de victimes. Les actes de violence
sont spectaculaires, et soulèvent des milliers de mots et
des milliers d'hommes quand le mort est désigné, la bles-
sure racontée. Les états de violence et leurs conséquences
mortelles sont acceptés ou inaperçus : guerres, génocides,
bidonvilles, conditions du travail, l'automobile, la mala-
die, la faim.
l'essence, et leur jouet favori l'automobile. Les journaux
peuvent faire un titre sur les quatre-vingts morts de la
Pentecôte, chez les anthropomobiles. La révolte de mai
a fait une demi-douzaine de victimes. Les actes de violence
sont spectaculaires, et soulèvent des milliers de mots et
des milliers d'hommes quand le mort est désigné, la bles-
sure racontée. Les états de violence et leurs conséquences
mortelles sont acceptés ou inaperçus : guerres, génocides,
bidonvilles, conditions du travail, l'automobile, la mala-
die, la faim.
En France chacun a sa façon, de la gauche à la droite,
avant de chercher le bâillon, salue la jeunesse protesta-
taire, s'en écarte, la gourmande paternellement, et l'accu-
se d'être aux mains des provocateurs étrangers. La C.G.T.
et la C.F.D.T. se querellent. A Nice, Roger Garaudy,
membre du bureau politique, le plus nuancé des com-
munistes, déclarera : « La Sorbonne n'est pas le Quartier
latin, le Quartier latin n'est pas Paris, Paris n'est pas la
France... Une révolution véritable ne peut être octroyée à
avant de chercher le bâillon, salue la jeunesse protesta-
taire, s'en écarte, la gourmande paternellement, et l'accu-
se d'être aux mains des provocateurs étrangers. La C.G.T.
et la C.F.D.T. se querellent. A Nice, Roger Garaudy,
membre du bureau politique, le plus nuancé des com-
munistes, déclarera : « La Sorbonne n'est pas le Quartier
latin, le Quartier latin n'est pas Paris, Paris n'est pas la
France... Une révolution véritable ne peut être octroyée à
18
tout un peuple par une minorité agissante, prétendant
agir en son nom... » A la veille de la consultation élec-
torale, chacun pense d'abord à la population qui fait la
masse, plutôt qu'à une jeunesse étudiante qui ne vote pas
et à une fraction restreinte de la jeunesse ouvrière. Pour
la plupart, il s'agit de savoir si l'opposition traditionnelle
peut devenir une majorité traditionnelle, si Mitterrand
peut remplacer de Gaulle, Guy Mollet ou Mendès France
remplacer Georges Pompidou.
agir en son nom... » A la veille de la consultation élec-
torale, chacun pense d'abord à la population qui fait la
masse, plutôt qu'à une jeunesse étudiante qui ne vote pas
et à une fraction restreinte de la jeunesse ouvrière. Pour
la plupart, il s'agit de savoir si l'opposition traditionnelle
peut devenir une majorité traditionnelle, si Mitterrand
peut remplacer de Gaulle, Guy Mollet ou Mendès France
remplacer Georges Pompidou.
Pause. Ce n'est pas fini : tout est reporté vaille que
vaille à octobre. Après la tournée rituelle des urnes de
juin, les loisirs conditionnés, les vacances feront taire les
hommes.
vaille à octobre. Après la tournée rituelle des urnes de
juin, les loisirs conditionnés, les vacances feront taire les
hommes.
L
I A fraction de la France qui s'est ré-
voltée en mai n'est pas la France pauvre, les retraités, les
vieux, les travailleurs à moins de quatre cents francs par
mois, les chômeurs, trop fatigués pour se soulever, aban-
donnés par le système, par l'opposition aussi bien que la
majorité. Cette fraction de la France n'est pas la France
communiste ou dite de gauche, maintenue par les vieux
appareils, ni la France de droite, conditionnée par un
de Gaulle historique, par l'homme fort qu'elle appelle,
acclame et réprouve à la fois, quitte à se mordre les doigts
et à se retourner s'il trahit les privilégiés. La révolte est
celle d'une minorité agissante et jeune qui a manifesté par
une action éclatante son désir de jeter bas une société
voltée en mai n'est pas la France pauvre, les retraités, les
vieux, les travailleurs à moins de quatre cents francs par
mois, les chômeurs, trop fatigués pour se soulever, aban-
donnés par le système, par l'opposition aussi bien que la
majorité. Cette fraction de la France n'est pas la France
communiste ou dite de gauche, maintenue par les vieux
appareils, ni la France de droite, conditionnée par un
de Gaulle historique, par l'homme fort qu'elle appelle,
acclame et réprouve à la fois, quitte à se mordre les doigts
et à se retourner s'il trahit les privilégiés. La révolte est
celle d'une minorité agissante et jeune qui a manifesté par
une action éclatante son désir de jeter bas une société
Emmanuel d'Astier
anachronique : marche révolutionnaire plutôt que mar-
che socialiste. Pour cette minorité, les conditions du socia-
lisme (de son accès et de son usage) ne sont pas déter-
minées face à la civilisation de consommation et aux
monstrueux développement industriel.
che socialiste. Pour cette minorité, les conditions du socia-
lisme (de son accès et de son usage) ne sont pas déter-
minées face à la civilisation de consommation et aux
monstrueux développement industriel.
Voilà quatre années, un philosophe, dépassant le mar-
xisme, a jeté des lumières singulières sur les problèmes
de cette civilisation et de son enseignement qui a conduit
dans le monde entier les jeunesses à une révolte en chaîne.
Dans son ouvrage qui vient d'être traduit en France,
L'Homme unidimensionnel (1), Herbert Marcuse montre
comment l'homme a été réduit à une seule dimension
dans notre société sans opposition. Après avoir évoqué
la menace d'une catastrophe atomique, le besoin de vivre
au bord d'un gouffre et de défier le danger, Marcuse dit :
<r Nous acceptons que le gaspillage atteigne à la perfection, nous
nous résignons à produire pacifiquement des moyens de destruction,
à être préparés pour une défense qui pervertirait les défenseurs et
ce qu'ils défendent. Si nous cherchons à tracer un lien entre les
causes du danger et l'organisation de la société, il nous faut bien
reconnaître que la société industrielle avancée, tout en entrete-
nant le danger, n'en devient pas moins plus riche, plus vaste,
plus agréable. L'économie adaptée aux exigences militaires rend
la vie plus aisée pour un nombre toujours plus grand de pers-
sonnes et elle étend la maîtrise de l'homme sur la nature... Cette
société dans son ensemble est irrationnelle. Sa productivité détruit
le libre développement des besoins et des facultés humaines, sa
paix n 'est maintenue que par la constante menace de la guerre :
si elle s'accroît, c'est en réprimant les possibilités qui permet-
traient de pacifier la lutte pour l'existence — individuelle, natio-
nale et internationale. »
xisme, a jeté des lumières singulières sur les problèmes
de cette civilisation et de son enseignement qui a conduit
dans le monde entier les jeunesses à une révolte en chaîne.
Dans son ouvrage qui vient d'être traduit en France,
L'Homme unidimensionnel (1), Herbert Marcuse montre
comment l'homme a été réduit à une seule dimension
dans notre société sans opposition. Après avoir évoqué
la menace d'une catastrophe atomique, le besoin de vivre
au bord d'un gouffre et de défier le danger, Marcuse dit :
<r Nous acceptons que le gaspillage atteigne à la perfection, nous
nous résignons à produire pacifiquement des moyens de destruction,
à être préparés pour une défense qui pervertirait les défenseurs et
ce qu'ils défendent. Si nous cherchons à tracer un lien entre les
causes du danger et l'organisation de la société, il nous faut bien
reconnaître que la société industrielle avancée, tout en entrete-
nant le danger, n'en devient pas moins plus riche, plus vaste,
plus agréable. L'économie adaptée aux exigences militaires rend
la vie plus aisée pour un nombre toujours plus grand de pers-
sonnes et elle étend la maîtrise de l'homme sur la nature... Cette
société dans son ensemble est irrationnelle. Sa productivité détruit
le libre développement des besoins et des facultés humaines, sa
paix n 'est maintenue que par la constante menace de la guerre :
si elle s'accroît, c'est en réprimant les possibilités qui permet-
traient de pacifier la lutte pour l'existence — individuelle, natio-
nale et internationale. »
Le livre de Marcuse rejoint sur certains points l'ouvrage
truculent de John Kennett Galbraith, La Paix indésirable (2).
truculent de John Kennett Galbraith, La Paix indésirable (2).
(1) Herbert Marcuse, L'Homme unidimensionnel, Editions de minuit.
(2) La Paix indésirable, John Kennett Galbraith, Editions Colmanuley.
Il va bien plus loin quand il décrit <r l'unification des oppo-
sés qui pèse sur les possibilités mêmes du changement social. »
En Amérique collusion des démocrates, des républicains
et des syndicats, en Europe collusions ici du capitalisme
et du communisme, là du socialisme, des partis chrétiens
et des syndicats : « Le parti travailliste anglais, dont les leaders
rivalisent d'ardeur avec leurs collègues du Parti conservateur
pour faire avancer les intérêts nationaux, a de la peine à sauver
un modeste programme de nationalisation partielle. En Allemagne
de l'Ouest où le Parti communiste est mis hors la loi, le Parti
social démocrate a officiellement rejeté ses programmes marxistes
pour prouver sa respectabilité de façon convaincante. Telle est
la situation dans les premiers pays industriels du monde occi-
dental. A l'Est la réduction graduelle des contrôles politiques
directs prouve la confiance progressive accordée aux contrôles
technologiques pour exercer la domination. Quant aux partis
communistes puissants de France et d'Italie, ils ne font que
confirmer la tendance générale des événements, avec leur pro-
gramme restreint qui écarte la prise de pouvoir par la révolution
et qui se plie aux règles du jeu parlementaire. »
sés qui pèse sur les possibilités mêmes du changement social. »
En Amérique collusion des démocrates, des républicains
et des syndicats, en Europe collusions ici du capitalisme
et du communisme, là du socialisme, des partis chrétiens
et des syndicats : « Le parti travailliste anglais, dont les leaders
rivalisent d'ardeur avec leurs collègues du Parti conservateur
pour faire avancer les intérêts nationaux, a de la peine à sauver
un modeste programme de nationalisation partielle. En Allemagne
de l'Ouest où le Parti communiste est mis hors la loi, le Parti
social démocrate a officiellement rejeté ses programmes marxistes
pour prouver sa respectabilité de façon convaincante. Telle est
la situation dans les premiers pays industriels du monde occi-
dental. A l'Est la réduction graduelle des contrôles politiques
directs prouve la confiance progressive accordée aux contrôles
technologiques pour exercer la domination. Quant aux partis
communistes puissants de France et d'Italie, ils ne font que
confirmer la tendance générale des événements, avec leur pro-
gramme restreint qui écarte la prise de pouvoir par la révolution
et qui se plie aux règles du jeu parlementaire. »
En France, au mois de mai, la jeunesse étudiante a
signifié que sa révolution se faisait au-delà des classes
et des nations. Trouvera-t-elle, sinon une assise interna-
tionale, au moins une assise européenne pour échapper
au conservatisme communiste comme au conservatisme
anglo-saxon. C'est un espoir seulement : il n'est pas vrai
de dire que le printemps 1968 nous a prouvés que l'Euro-
pe occidentale était apte à une révolution sociale (3), en-
fermée qu'elle est entre l'Allemagne, l'Italie et l'Améri-
que. Le mouvement français, isolé dans les plis d'un dra-
peau tricolore désuet ou d'un drapeau rouge contesté par
la population, n'aboutirait qu'à une caricature de front
populaire, à ce chemin solitaire qui nous a conduit des
beaux jours de juin 1936 au cataclysme de 1940.
signifié que sa révolution se faisait au-delà des classes
et des nations. Trouvera-t-elle, sinon une assise interna-
tionale, au moins une assise européenne pour échapper
au conservatisme communiste comme au conservatisme
anglo-saxon. C'est un espoir seulement : il n'est pas vrai
de dire que le printemps 1968 nous a prouvés que l'Euro-
pe occidentale était apte à une révolution sociale (3), en-
fermée qu'elle est entre l'Allemagne, l'Italie et l'Améri-
que. Le mouvement français, isolé dans les plis d'un dra-
peau tricolore désuet ou d'un drapeau rouge contesté par
la population, n'aboutirait qu'à une caricature de front
populaire, à ce chemin solitaire qui nous a conduit des
beaux jours de juin 1936 au cataclysme de 1940.
(3) Temps modernes.
19
Regard
sur
sur
révénement
L
10 JUIN 1968, la campagne, les
bourgs et la population disaient : c'est fini. Ce n'est pas
fini : il n'y a qu'un entracte. Les journaux de ce lundi
10 juin, un peu pourri au ciel et sur terre, titraient : « La
campagne électorale est ouverte : deux mille trois cents
candidats pour quatre cent quatre-vingt-sept sièges ». On
a quelque chose à se mettre sous la dent. Approuvé par la
population, clans les dernières petites flambées, le gouver-
nement dissout « les groupuscules d'extrême-gauche,
trotskvstes, anarchistes, pro-chinois, vingt-deux mars ».
On expulse les étrangers, suspects d'avoir approuvé le
mouvement ou d'avoir traversé à une mauvaise heure le
boulevard Saint-Germain. Les citadelles occupées au mois
de mai sont investies par la police et évacuées : le petit
monde de l'Odéon, que personne ne regrettera, le monde
clé la Sorbonne, qui se liquéfiait avec ses clubs et ses
Katangais. La Faculté de médecine tient bon. La Tour de
Babel-Kenncdv et l'intersyndicale de l'O.R.T.F. font
face. Monsieur Guéna, ministre de l'Information, déclare :
« Excusez-moi si je ne puis élever la voix, je me suis
enroué hier à la manifestation pour le général de Gaulle, n
bourgs et la population disaient : c'est fini. Ce n'est pas
fini : il n'y a qu'un entracte. Les journaux de ce lundi
10 juin, un peu pourri au ciel et sur terre, titraient : « La
campagne électorale est ouverte : deux mille trois cents
candidats pour quatre cent quatre-vingt-sept sièges ». On
a quelque chose à se mettre sous la dent. Approuvé par la
population, clans les dernières petites flambées, le gouver-
nement dissout « les groupuscules d'extrême-gauche,
trotskvstes, anarchistes, pro-chinois, vingt-deux mars ».
On expulse les étrangers, suspects d'avoir approuvé le
mouvement ou d'avoir traversé à une mauvaise heure le
boulevard Saint-Germain. Les citadelles occupées au mois
de mai sont investies par la police et évacuées : le petit
monde de l'Odéon, que personne ne regrettera, le monde
clé la Sorbonne, qui se liquéfiait avec ses clubs et ses
Katangais. La Faculté de médecine tient bon. La Tour de
Babel-Kenncdv et l'intersyndicale de l'O.R.T.F. font
face. Monsieur Guéna, ministre de l'Information, déclare :
« Excusez-moi si je ne puis élever la voix, je me suis
enroué hier à la manifestation pour le général de Gaulle, n
Le samedi 13 juin, de Gaulle gracie le général Salan et
les dix condamnés de l'O.A.S... Que ne l'a-t-il fait six
semaines plus tôt : le geste eut paru moins intéressé. Le
moineau Bidault — ni gaulliste, ni communiste — piaille
à nouveau. Ces grâces sont à l'occasion d'un dix-huit juin
qui se déroulera traditionnellement au Mont Valérien,
avec un grand concours de population rassurée et moins
de compagnons. Vieillissement ou perplexité?
les dix condamnés de l'O.A.S... Que ne l'a-t-il fait six
semaines plus tôt : le geste eut paru moins intéressé. Le
moineau Bidault — ni gaulliste, ni communiste — piaille
à nouveau. Ces grâces sont à l'occasion d'un dix-huit juin
qui se déroulera traditionnellement au Mont Valérien,
avec un grand concours de population rassurée et moins
de compagnons. Vieillissement ou perplexité?
Les candidatures, les querelles d'une gauche déjà un
peu en miettes, l'unité d'un centre et d'une droite qui se
réfugient dans le vote pour se protéger du pavé, la sur-
prise de la répression l'emportent sur les faits d'un monde
anxieux et d'un pays en désarroi. On se promène sans
passion de circonscription en circonscription, de Brive en
Corse, de Toulouse à Arras. Au dernier conseil des mi-
nistres, Pompidou rabroue Capitant qui s'est mis à dos
le C.N.P.F., le patronat divin, les petites et moyennes
entreprises avec ses coopératives de production et ses
peu en miettes, l'unité d'un centre et d'une droite qui se
réfugient dans le vote pour se protéger du pavé, la sur-
prise de la répression l'emportent sur les faits d'un monde
anxieux et d'un pays en désarroi. On se promène sans
passion de circonscription en circonscription, de Brive en
Corse, de Toulouse à Arras. Au dernier conseil des mi-
nistres, Pompidou rabroue Capitant qui s'est mis à dos
le C.N.P.F., le patronat divin, les petites et moyennes
entreprises avec ses coopératives de production et ses
actions de travail : « Vous me laites perdre à droite, et
vous ne gagnerez pas à gauche ».
vous ne gagnerez pas à gauche ».
Premier tour : on vote à Arronville dans le Val-d'Oise :
quatre cents habitants, deux cents votants, cinquante kilo-
mètres de Paris. Fleurs, foire et falbalas : fleurs, c'est la
semaine des seringas et des sauges ; foire, il y a sur la
place triangulaire du Carrouge le manège et les chevaux
dressés, bleus, blancs et or, la tente foraine pour le tir aux
carabines ; falbalas, tout le monde est sur son trente et un
pour aller danser, baguenauder et voter. Quelques jeunes
à cravates viennent s'asseoir un bout clé temps, dans la
salle de classe à l'école, pour regarder le défilé et le sys-
tème : « Madame Vatrin... a voté ». Elle ne trouve pas
l'enveloppe, s'empêtre. Beaucoup ignorent l'isoloir.
L'instituteur est à son plus beau. Chacun manifeste une
gentillesse retenue, une curiosité sournoise. C'est à l'autre
bout de la terre, pour ceux qui ont connu, dans les gran-
des villes, la fureur et la réflexion, l'affabulation dialec-
tique, l'injure, les phrases scandées (dépaveurs de rues,
incendiaires de minuit, provocateurs apatrides, de Gaulle
assassin, C.R.S.S. S.S...) toutes aussi stupides.
quatre cents habitants, deux cents votants, cinquante kilo-
mètres de Paris. Fleurs, foire et falbalas : fleurs, c'est la
semaine des seringas et des sauges ; foire, il y a sur la
place triangulaire du Carrouge le manège et les chevaux
dressés, bleus, blancs et or, la tente foraine pour le tir aux
carabines ; falbalas, tout le monde est sur son trente et un
pour aller danser, baguenauder et voter. Quelques jeunes
à cravates viennent s'asseoir un bout clé temps, dans la
salle de classe à l'école, pour regarder le défilé et le sys-
tème : « Madame Vatrin... a voté ». Elle ne trouve pas
l'enveloppe, s'empêtre. Beaucoup ignorent l'isoloir.
L'instituteur est à son plus beau. Chacun manifeste une
gentillesse retenue, une curiosité sournoise. C'est à l'autre
bout de la terre, pour ceux qui ont connu, dans les gran-
des villes, la fureur et la réflexion, l'affabulation dialec-
tique, l'injure, les phrases scandées (dépaveurs de rues,
incendiaires de minuit, provocateurs apatrides, de Gaulle
assassin, C.R.S.S. S.S...) toutes aussi stupides.
L'épicier de Méru me dit : « Hein, ce n'est pas fini ? ».
1,'ne anxiété lui reste. Chacun sent que la société est ma-
lade et que les cataplasmes ne suffiront pas.
1,'ne anxiété lui reste. Chacun sent que la société est ma-
lade et que les cataplasmes ne suffiront pas.
V,
ALELIR ? Deux hommes de gouver-
nement, deux hommes du régime, et gaullistes, se sont
exprimés à quelques jours d'intervalle. Il s'agit d'André
Malraux, ministre des Affaires culturelles, auteur de La
Condition Humaine, l'un des grands écrivains du siècle,
apologiste de Mao Tsé Toung, de Nehru et de Charles
de Gaulle, dont le visage pathétique et syncopé nous
avait surpris en tête de la foule tricolore qui marchait
de la Concorde à l'Etoile. Il s'agit aussi de Raymond
nement, deux hommes du régime, et gaullistes, se sont
exprimés à quelques jours d'intervalle. Il s'agit d'André
Malraux, ministre des Affaires culturelles, auteur de La
Condition Humaine, l'un des grands écrivains du siècle,
apologiste de Mao Tsé Toung, de Nehru et de Charles
de Gaulle, dont le visage pathétique et syncopé nous
avait surpris en tête de la foule tricolore qui marchait
de la Concorde à l'Etoile. Il s'agit aussi de Raymond
20
Marcellin, maire, conseiller général, député et ministre
de l'Intérieur, après avoir été un gentil ministre de la
Santé, puis de l'Industrie.
de l'Intérieur, après avoir été un gentil ministre de la
Santé, puis de l'Industrie.
Dans un entretien, au poste Europe n° 1, Malraux disait,
évoquant le drame français du mois de mai : «Je vois un
drame mondial qui est à peu près celui-ci : une civilisation qui est
la plus puissante de toute, et la seule après tout qui ait le pouvoir
de se détruire elle-même, arrive à un moment de son développe-
ment, le moment dont elle n'a pas conscience parce que jusque
là les civilisations étaient à l'intérieur d'une conscience... Aujour-
d'hui, la civilisation, en quelque sorte, se développe à vide... Ce
qui commence avec les étudiants ici, et qui a été arrêté, telle est
la conséquence de la grande crise de la civilisation occidentale
qui commence... Il me semble que l'on doit avoir une rencontre
de l'élément prolétarien et de l'élément jeunesse qui est sans pré-
cédent. On ne peut rien faire pour les étudiants, si on ne leur
donne pas l'espoir. » Interrompu, interrogé, « peut-on don-
ner l'espoir aux étudiants ? », Malraux répondait : et C'est
le problème. En ce moment à mon avis, la réponse est négative,
c'est pour cela qu'il y a la crise... Ce qui est écrit sur les murs est
extrêmement significatif... Alors que mes amis sont pleins d'affir-
mations, je serais au contraire plein de recherches... »
évoquant le drame français du mois de mai : «Je vois un
drame mondial qui est à peu près celui-ci : une civilisation qui est
la plus puissante de toute, et la seule après tout qui ait le pouvoir
de se détruire elle-même, arrive à un moment de son développe-
ment, le moment dont elle n'a pas conscience parce que jusque
là les civilisations étaient à l'intérieur d'une conscience... Aujour-
d'hui, la civilisation, en quelque sorte, se développe à vide... Ce
qui commence avec les étudiants ici, et qui a été arrêté, telle est
la conséquence de la grande crise de la civilisation occidentale
qui commence... Il me semble que l'on doit avoir une rencontre
de l'élément prolétarien et de l'élément jeunesse qui est sans pré-
cédent. On ne peut rien faire pour les étudiants, si on ne leur
donne pas l'espoir. » Interrompu, interrogé, « peut-on don-
ner l'espoir aux étudiants ? », Malraux répondait : et C'est
le problème. En ce moment à mon avis, la réponse est négative,
c'est pour cela qu'il y a la crise... Ce qui est écrit sur les murs est
extrêmement significatif... Alors que mes amis sont pleins d'affir-
mations, je serais au contraire plein de recherches... »
Quelques jours plus tard, Raymond Marcellin disait :
if Des groupes révolutionnaires se sont constitués au cours de ces
dernières années dans notre pays. Leurs objectifs : renverser les
institutions républicaines et y substituer un gouvernement collec-
tiviste, totalitaire, qui nous priverait de toutes nos libertés...
Au nom de quelle doctrine ces révolutionnaires viennent-ils
commettre toutes ces aggressions et troubler l'ordre public f Ils
admirent particulièrement les héros des pays sous-développés,
Mao T.sé Toung, Fidel Castro... Ces révolutionnaires nous parlent
également de l'émancipation humaine, de la liberté du peuple,
alors qu'ils veulent instaurer une tyrannie. »... Concédons :
Monsieur Marcellin a dû parler comme un conservateur,
un ministre de la Police, André Malraux comme un poète.
Pour le premier rien n'a commencé, pour le second rien
n'est fini. Les visions, les républiques et les mondes, les
espoirs de ces deux ministres ne sont pas les mêmes. Vers
lesquels ira de Gaulle ?
if Des groupes révolutionnaires se sont constitués au cours de ces
dernières années dans notre pays. Leurs objectifs : renverser les
institutions républicaines et y substituer un gouvernement collec-
tiviste, totalitaire, qui nous priverait de toutes nos libertés...
Au nom de quelle doctrine ces révolutionnaires viennent-ils
commettre toutes ces aggressions et troubler l'ordre public f Ils
admirent particulièrement les héros des pays sous-développés,
Mao T.sé Toung, Fidel Castro... Ces révolutionnaires nous parlent
également de l'émancipation humaine, de la liberté du peuple,
alors qu'ils veulent instaurer une tyrannie. »... Concédons :
Monsieur Marcellin a dû parler comme un conservateur,
un ministre de la Police, André Malraux comme un poète.
Pour le premier rien n'a commencé, pour le second rien
n'est fini. Les visions, les républiques et les mondes, les
espoirs de ces deux ministres ne sont pas les mêmes. Vers
lesquels ira de Gaulle ?
L
I E premier juillet il y a le moment de
stupeur. Les vainqueurs portés par une vague sans précé-
dent sont surpris. Cette victoire ils ne la doivent pas à
eux-mêmes, ils la doivent à de Gaulle. Qui sont-ils ?
Comment se fera le partage, la participation, au besoin
la contestation. A côté des Poujade, des Marcellin, des
Guena, il y a les Capitant, les Capelle, les Malraux. Pour
la troisième fois dans l'histoire le mythe Gaullien reparaît
avec son équivoque : après 1940, après 1958, 1968.
stupeur. Les vainqueurs portés par une vague sans précé-
dent sont surpris. Cette victoire ils ne la doivent pas à
eux-mêmes, ils la doivent à de Gaulle. Qui sont-ils ?
Comment se fera le partage, la participation, au besoin
la contestation. A côté des Poujade, des Marcellin, des
Guena, il y a les Capitant, les Capelle, les Malraux. Pour
la troisième fois dans l'histoire le mythe Gaullien reparaît
avec son équivoque : après 1940, après 1958, 1968.
On s'interroge sur les mobiles de ceux qui ont quitté le
communisme, la Fédération, le centre pour investir de
Gaulle. La population française est individuelle, âgée,
féminine : elle s'est jetée dans les bras de l'homme fort
pour la tirer d'un mauvais pas, le mauvais pas de la
jeunesse et du mouvement. Ce feu qui couve, cette scarla-
tine gagne partout. Voilà qu'au pays le plus sage d'Euro-
pe, où pouvaient se réfugier les capitaux du monde et les
apatrides, cela bouge aussi : l'adolescence suisse dans la
rue, à Zurich. Un enfant mort. A Genève, le conseil
fédéral interpellé.
communisme, la Fédération, le centre pour investir de
Gaulle. La population française est individuelle, âgée,
féminine : elle s'est jetée dans les bras de l'homme fort
pour la tirer d'un mauvais pas, le mauvais pas de la
jeunesse et du mouvement. Ce feu qui couve, cette scarla-
tine gagne partout. Voilà qu'au pays le plus sage d'Euro-
pe, où pouvaient se réfugier les capitaux du monde et les
apatrides, cela bouge aussi : l'adolescence suisse dans la
rue, à Zurich. Un enfant mort. A Genève, le conseil
fédéral interpellé.
En France, les gens qui possèdent ne veulent pas
risquer de perdre ce qu'ils possèdent, les femmes ne
veulent pas voir leur mari dans la rue. Cœur chaud, tête
froide, on salue les révolutions du passé — que l'on tra-
vestit —, les révolutions de l'avenir qui sont un jouet
romantique. Il y a tant de petites choses à conquérir ou
à conserver, l'automobile, le frigidaire, la télévision,
l'appartement, le foyer, les loisirs. Doucement : la révolu-
tion, c'est encore un aléa.
risquer de perdre ce qu'ils possèdent, les femmes ne
veulent pas voir leur mari dans la rue. Cœur chaud, tête
froide, on salue les révolutions du passé — que l'on tra-
vestit —, les révolutions de l'avenir qui sont un jouet
romantique. Il y a tant de petites choses à conquérir ou
à conserver, l'automobile, le frigidaire, la télévision,
l'appartement, le foyer, les loisirs. Doucement : la révolu-
tion, c'est encore un aléa.
La plupart des pays et des gouvernements ont salué
l'essai du Général de Gaulle... même les gouvernements
que de Gaulle a provoqués. Transformera-t-il son essai ?
De Moscou à Washington, de Madrid à Londres, on
perçoit un soupir de soulagement. La scarlatine est conta-
gieuse. Il court, il court le furet de la jeunesse. Ce n'est
pas fini.
l'essai du Général de Gaulle... même les gouvernements
que de Gaulle a provoqués. Transformera-t-il son essai ?
De Moscou à Washington, de Madrid à Londres, on
perçoit un soupir de soulagement. La scarlatine est conta-
gieuse. Il court, il court le furet de la jeunesse. Ce n'est
pas fini.
7er juillet 1968
Emmanuel d'Astier
Emmanuel d'Astier
21
O.R.T.F. :
LA GRÈVE
INCOMPRISE
Olivier Oudiette
A VO.R.T.F., le travail a repris
dans le désordre et la dispersion.
Pour n'avoir su, ni faire de la grève un combat
véritable, ni Jouer le jeu de la négociation,
l'intersyndicale a perdu sur les deux tableaux.
Assemblée du personnel dans un studio de la maison de l'O.R.T.F.
22
A la Maison de l'O.R.T.F., quai Kennedy, la grande
kermesse a pris fin. Les affiches et proclamations
qui couvraient les murs ont disparu. Les halls et couloirs
ont retrouvé leur aspect impersonnel et froid. Sur la
porte d'un studio, une inscription demeure : Poursuivons
le combat. Graffiti dérisoire : depuis le lundi 25 juin, dans
le désordre et la dispersion, le travail a repris.
kermesse a pris fin. Les affiches et proclamations
qui couvraient les murs ont disparu. Les halls et couloirs
ont retrouvé leur aspect impersonnel et froid. Sur la
porte d'un studio, une inscription demeure : Poursuivons
le combat. Graffiti dérisoire : depuis le lundi 25 juin, dans
le désordre et la dispersion, le travail a repris.
Une assistante de réalisation explique : « Samedi, nous
nous étions réunis en section. Nous avions décidé de
poursuivre et de durcir la grève. Dimanche, je suis partie
pour aller voter en province. C'est par la radio et de la
voix de M. Guéna que j'ai appris la reprise du travail.
Les camarades que j'ai retrouvés lundi étaient furieux.
Ils avaient le sentiment d'avoir été joués. Ils ne compre-
naient plus : cinq semaines de grève pour terminer dans
l'anarchie, sans avoir rien obtenu ! »
nous étions réunis en section. Nous avions décidé de
poursuivre et de durcir la grève. Dimanche, je suis partie
pour aller voter en province. C'est par la radio et de la
voix de M. Guéna que j'ai appris la reprise du travail.
Les camarades que j'ai retrouvés lundi étaient furieux.
Ils avaient le sentiment d'avoir été joués. Ils ne compre-
naient plus : cinq semaines de grève pour terminer dans
l'anarchie, sans avoir rien obtenu ! »
Aucune des deux revendications qui étaient à la base
de la grève n'a été satisfaite. Le gouvernement ne parle
plus de la création d'un Comité des Sages chargé de veiller
à l'objectivité de l'information. Il n'a pris aucun enga-
gement quant à la présentation, à la future Assemblée
nationale, d'un nouveau statut garantissant l'indépen-
dance politique et financière de l'Office.
de la grève n'a été satisfaite. Le gouvernement ne parle
plus de la création d'un Comité des Sages chargé de veiller
à l'objectivité de l'information. Il n'a pris aucun enga-
gement quant à la présentation, à la future Assemblée
nationale, d'un nouveau statut garantissant l'indépen-
dance politique et financière de l'Office.
Il était clair depuis plusieurs jours que la grève était
condamnée. Face à un gouvernement à qui le discours
du général de Gaulle avait redonné vigueur et confiance,
le mouvement de révolte s'effilochait. Les techniciens ne
suivaient plus et déjà, sans consulter personne, certains
reprenaient le travail aux studios des Buttes-Chaumont.
En décidant la reprise, l'intersyndicale a essayé de main-
tenir une façade d'unité. Pour la même raison elle a
couvert les journalistes, producteurs et réalisateurs qui
décidaient de poursuivre la grève pendant une semaine.
condamnée. Face à un gouvernement à qui le discours
du général de Gaulle avait redonné vigueur et confiance,
le mouvement de révolte s'effilochait. Les techniciens ne
suivaient plus et déjà, sans consulter personne, certains
reprenaient le travail aux studios des Buttes-Chaumont.
En décidant la reprise, l'intersyndicale a essayé de main-
tenir une façade d'unité. Pour la même raison elle a
couvert les journalistes, producteurs et réalisateurs qui
décidaient de poursuivre la grève pendant une semaine.
Pour comprendre les raisons du pourrissement et de
l'échec de la grève, il faut remonter en arrière, aux condi-
tions dans lesquelles le mouvement s'est déclenché. La
grève est partie par à-coups souS la poussée de sentiments
de frustration accumulés depuis des années. D'abord fut
voté le principe de la grève, puis la grève elle-même,
l'échec de la grève, il faut remonter en arrière, aux condi-
tions dans lesquelles le mouvement s'est déclenché. La
grève est partie par à-coups souS la poussée de sentiments
de frustration accumulés depuis des années. D'abord fut
voté le principe de la grève, puis la grève elle-même,
reconductible de vingt-quatre heures en vingt-quatre
heures. Parti des producteurs et des réalisateurs, le mou-
vement s'étendait à l'ensemble du personnel. Dans l'en-
thousiasme des premiers jours, une plate-forme très
dure fut votée, qui réclamait non pas un aménagement
mais une transformation radicale de l'organisation et de
la destination de l'Office. Par là, sans que l'ensemble
du personnel s'en rende compte, la grève changeait
radicalement de caractère. Grève spontanée, grève d'indi-
gnation au départ, elle devenait dès lors grève politique.
Et les déclarations réitérées de l'intersyndicale sur
l'apolitisme du mouvement ne changeaient rien à cet
état de fait.
heures. Parti des producteurs et des réalisateurs, le mou-
vement s'étendait à l'ensemble du personnel. Dans l'en-
thousiasme des premiers jours, une plate-forme très
dure fut votée, qui réclamait non pas un aménagement
mais une transformation radicale de l'organisation et de
la destination de l'Office. Par là, sans que l'ensemble
du personnel s'en rende compte, la grève changeait
radicalement de caractère. Grève spontanée, grève d'indi-
gnation au départ, elle devenait dès lors grève politique.
Et les déclarations réitérées de l'intersyndicale sur
l'apolitisme du mouvement ne changeaient rien à cet
état de fait.
Une façade fragile
Pour atteindre les objectifs fixés, il aurait fallu faire
de la grève un véritable combat. L'indépendance de
l'O.R.T.F. intéresse la nation tout entière, il fallait donc
mobiliser l'opinion, relier cette lutte particulière à la
grande bataille qui se déroulait partout dans le pays,
dans les usines et dans les facultés. A rester isolé, face
au gouvernement, le personnel de l'Office était certain
d'être battu. Le Pouvoir avait pu, un moment, donner
l'impression de céder à la pression de la rue, il n'y avait
aucune chance pour qu'il se laissât déposséder sans
combat de l'Office, de sa « chose », de sa « voix », surtout
en période de crise.
de la grève un véritable combat. L'indépendance de
l'O.R.T.F. intéresse la nation tout entière, il fallait donc
mobiliser l'opinion, relier cette lutte particulière à la
grande bataille qui se déroulait partout dans le pays,
dans les usines et dans les facultés. A rester isolé, face
au gouvernement, le personnel de l'Office était certain
d'être battu. Le Pouvoir avait pu, un moment, donner
l'impression de céder à la pression de la rue, il n'y avait
aucune chance pour qu'il se laissât déposséder sans
combat de l'Office, de sa « chose », de sa « voix », surtout
en période de crise.
On ne satisfait pas des objectifs durs avec une tactique
molle. L'intersyndicale n'a pas su ou pas pu faire de la
grève un combat, tout au plus l'a-t-elle gérée au jour le
jour comme on gère une administration. Deux semaines
après le début du mouvement, les responsables en
étaient encore à s'émerveiller de leur unité. Et c'est vrai
qu'il était quasi-miraculeux de voir les cent soixante-
treize catégories de personnel lutter ensemble pour la
première fois de leur histoire. Mais cette unité n'était
que fragile façade puisqu'à aucun moment elle ne put
déboucher sur une action.
molle. L'intersyndicale n'a pas su ou pas pu faire de la
grève un combat, tout au plus l'a-t-elle gérée au jour le
jour comme on gère une administration. Deux semaines
après le début du mouvement, les responsables en
étaient encore à s'émerveiller de leur unité. Et c'est vrai
qu'il était quasi-miraculeux de voir les cent soixante-
treize catégories de personnel lutter ensemble pour la
première fois de leur histoire. Mais cette unité n'était
que fragile façade puisqu'à aucun moment elle ne put
déboucher sur une action.
opinion
Nous avons posé trois questions à des
personnalités de la télévision : Roger
Louis, grand reporter à Cinq colonnes à la
une, Pierre Simonetti, technicien, secré-
taire de la F.S.U. (Fédération Syndicale
Unifiée), Emmanuel de la Taille, journa-
liste du Journal télévisé et Henri de Tu-
renne, producteur de Caméra 3.
personnalités de la télévision : Roger
Louis, grand reporter à Cinq colonnes à la
une, Pierre Simonetti, technicien, secré-
taire de la F.S.U. (Fédération Syndicale
Unifiée), Emmanuel de la Taille, journa-
liste du Journal télévisé et Henri de Tu-
renne, producteur de Caméra 3.
Le travail reprend à l'O.R.T.F. sans que vous
ayez eu satisfaction sur l'essentiel. Pourquoi
avez-vous perdu la grève ? La partie est-elle
définitivement jouée ?
ayez eu satisfaction sur l'essentiel. Pourquoi
avez-vous perdu la grève ? La partie est-elle
définitivement jouée ?
ROGER LOUIS : Le travail reprend sans
que nous ayons eu satisfaction sur l'essen-
tiel. Personnellement, je ne reprendrai
pas le travail.
que nous ayons eu satisfaction sur l'essen-
tiel. Personnellement, je ne reprendrai
pas le travail.
Au delà du problème des revendica-
tions, il y a celui de la dignité : c'est ce
sentiment de dignité qui a donné à la
grève sa cohésion et qui lui a permis de
se poursuivre aussi longtemps. La grève
ne l'a pas emporté parce que les structures
syndicales existantes — ce conglomérat
de syndicats verticaux — sont calquées sur
les structures de l'O.R.T.F. que nous
condamnons par ailleurs. L'inter-syndi-
cale a fait ce qu'elle a pu, coincée entre
des préoccupations différentes : l'unité au
sommet n'était qu'apparente.
tions, il y a celui de la dignité : c'est ce
sentiment de dignité qui a donné à la
grève sa cohésion et qui lui a permis de
se poursuivre aussi longtemps. La grève
ne l'a pas emporté parce que les structures
syndicales existantes — ce conglomérat
de syndicats verticaux — sont calquées sur
les structures de l'O.R.T.F. que nous
condamnons par ailleurs. L'inter-syndi-
cale a fait ce qu'elle a pu, coincée entre
des préoccupations différentes : l'unité au
sommet n'était qu'apparente.
Je ne crois pas que la partie soit défi-
nitivement jouée. Je crois qu'il y a une
autre unité, celle qui se fait à la base. Il
faudra du temps pour que cela se réper-
cute au sommet. Mais des actions auront
lieu. On fera tout pour qu'elles aient
lieu.
nitivement jouée. Je crois qu'il y a une
autre unité, celle qui se fait à la base. Il
faudra du temps pour que cela se réper-
cute au sommet. Mais des actions auront
lieu. On fera tout pour qu'elles aient
lieu.
PIERRE SIMONETTI : II est vrai que nous
n'avons pas obtenu satisfaction sur
l'essentiel, c'est-à-dire l'abrogation de la
loi de 1964. Toutefois la question se po-
sait au Parlement, celui-ci ayant été dis-
sous, elle reste posée devant le nouveau
Parlement, dans les mêmes termes. En
revanches, nous avons eu des assurances
formelles concernant le Comité des
Sages.
n'avons pas obtenu satisfaction sur
l'essentiel, c'est-à-dire l'abrogation de la
loi de 1964. Toutefois la question se po-
sait au Parlement, celui-ci ayant été dis-
sous, elle reste posée devant le nouveau
Parlement, dans les mêmes termes. En
revanches, nous avons eu des assurances
formelles concernant le Comité des
Sages.
Cette grève était une grève essentielle-
ment civique, les aspects matériels n'ont
pas été mis au premier plan. Il faut pour-
tant souligner un certain nombre de résul-
tats, et notamment l'alignement des
salaires et traitements sur ceux de la fonc-
tion publique, avec des augmentations à
peu près identiques. Enfin nous avons
ontenu un comité d'entreprise, chose qui
n'existait pas à l'O.R.T.F.
ment civique, les aspects matériels n'ont
pas été mis au premier plan. Il faut pour-
tant souligner un certain nombre de résul-
tats, et notamment l'alignement des
salaires et traitements sur ceux de la fonc-
tion publique, avec des augmentations à
peu près identiques. Enfin nous avons
ontenu un comité d'entreprise, chose qui
n'existait pas à l'O.R.T.F.
24
A partir du moment où les responsables estimaient
que l'unité ne résisterait pas au combat, il fallait négocier,
avec réalisme. Les propositions que M. Guéna fit le
mercredi 12 juin à l'intersyndicale restaient bien en-deçà
des objectifs que les grévistes s'étaient fixés, elles n'en
contenaient pas moins des points positifs. Le ministre
était prêt à accepter la création d'un Comité des Sages,
non pas nommé par le gouvernement, ce qui est contraire
au statut, mais nommé par le conseil d'administration et
comprenant aussi bien des personnalités de ce conseil que
des personnalités de l'extérieur. Il était prêt à s'engager
à ce qu'un nouveau statut soit déposé devant la future
Assemblée nationale et à ce que le personnel puisse faire
ses propositions^ au sein d'une commission consultative.
L'intersyndicale fit des contre-propositions : le gou-
vernement, étant ce qu'il est, ne pouvait accepter. En
refusant de se battre vraiment, en refusant de jouer le
jeu de la négociation, l'intersyndicale perdait sur les
deux tableaux et condamnait le mouvement à l'échec.
que l'unité ne résisterait pas au combat, il fallait négocier,
avec réalisme. Les propositions que M. Guéna fit le
mercredi 12 juin à l'intersyndicale restaient bien en-deçà
des objectifs que les grévistes s'étaient fixés, elles n'en
contenaient pas moins des points positifs. Le ministre
était prêt à accepter la création d'un Comité des Sages,
non pas nommé par le gouvernement, ce qui est contraire
au statut, mais nommé par le conseil d'administration et
comprenant aussi bien des personnalités de ce conseil que
des personnalités de l'extérieur. Il était prêt à s'engager
à ce qu'un nouveau statut soit déposé devant la future
Assemblée nationale et à ce que le personnel puisse faire
ses propositions^ au sein d'une commission consultative.
L'intersyndicale fit des contre-propositions : le gou-
vernement, étant ce qu'il est, ne pouvait accepter. En
refusant de se battre vraiment, en refusant de jouer le
jeu de la négociation, l'intersyndicale perdait sur les
deux tableaux et condamnait le mouvement à l'échec.
Aujourd'hui le travail a repris dans les pires conditions.
Le gouvernement est à nouveau dans une position de
force, et il n'est pas certain qu'il accepte les réformes
qu'il avait un temps proposées. Les journalistes, produc-
teurs et réalisateurs peuvent continuer la grève : cela ne
gêne guère le Pouvoir qui souhaiterait plutôt que certains
ne reviennent jamais.
Le gouvernement est à nouveau dans une position de
force, et il n'est pas certain qu'il accepte les réformes
qu'il avait un temps proposées. Les journalistes, produc-
teurs et réalisateurs peuvent continuer la grève : cela ne
gêne guère le Pouvoir qui souhaiterait plutôt que certains
ne reviennent jamais.
Un corporatisme étroit
« Vous êtes tous concernés ! » : c'était le slogan que
criaient les manifestants aux riverains qui les regardaient
défiler du haut de leur balcon. Il semble qu'une bien
mince partie de la population se soit sentie concernée par
la grève de l'O.R.T.F. et en ait compris le véritable enjeu.
Pour beaucoup, la grève de la télévision était comparable
à celle des P.T.T. ou des taxis. Certains ont regretté les
criaient les manifestants aux riverains qui les regardaient
défiler du haut de leur balcon. Il semble qu'une bien
mince partie de la population se soit sentie concernée par
la grève de l'O.R.T.F. et en ait compris le véritable enjeu.
Pour beaucoup, la grève de la télévision était comparable
à celle des P.T.T. ou des taxis. Certains ont regretté les
émissions qu'ils aimaient bien, mais en définitive le
silence de leur poste les affectait moins que l'arrêt du
métro.
silence de leur poste les affectait moins que l'arrêt du
métro.
Alors que l'objectivité de l'information était le cheval
de bataille de l'intersyndicale, il est triste de voir qu'elle
n'a pas fait le minimum de travail d'explication qui
aurait permis au public de comprendre le sens de son
combat. Au début de la grève, lorsque cela avait encore
un sens, quelques jeunes grévistes avaient proposé
d'organiser un grand meeting d'information semblable
à celui qui s'est déroulé au stade Charléty. L'intersyn-
dicale a refusé sous prétexte que certains pourraient
profiter de l'occasion pour politiser le mouvement. Elle
a consenti à organiser une petite réunion au théâtre du
Tertre, où l'on ne pouvait entrer que sur invitation.
Quant au défilé de quelques centaines d'acteurs et de
journalistes autour de la Maison de l'O.R.T.F., en plein
XVIe arrondissement, même décoré du nom ronflant
d'« opération Jéricho », il fallait être quelque peu naïf
pour croire qu'il suffirait à faire tomber les murailles.
de bataille de l'intersyndicale, il est triste de voir qu'elle
n'a pas fait le minimum de travail d'explication qui
aurait permis au public de comprendre le sens de son
combat. Au début de la grève, lorsque cela avait encore
un sens, quelques jeunes grévistes avaient proposé
d'organiser un grand meeting d'information semblable
à celui qui s'est déroulé au stade Charléty. L'intersyn-
dicale a refusé sous prétexte que certains pourraient
profiter de l'occasion pour politiser le mouvement. Elle
a consenti à organiser une petite réunion au théâtre du
Tertre, où l'on ne pouvait entrer que sur invitation.
Quant au défilé de quelques centaines d'acteurs et de
journalistes autour de la Maison de l'O.R.T.F., en plein
XVIe arrondissement, même décoré du nom ronflant
d'« opération Jéricho », il fallait être quelque peu naïf
pour croire qu'il suffirait à faire tomber les murailles.
Jamais l'intersyndicale n'a essayé d'organiser de
débats, ni dans les usines, ni dans les facultés occupées.
Ceci est d'autant plus grave que dès le début, au sein
du personnel, des commissions se sont réunies pour
travailler à l'élaboration d'un nouveau statut, il est
curieux qu'au moment où le personnel proclame que la
Télévision ne doit plus être la « chose » du gouverne-
ment mais appartenir à la nation tout entière, il s'en-
ferme dans un ghetto pour proposer sa révolution.
Les ouvriers de chez Renault, les étudiants qui ont
lancé le mouvement avaient sûrement beaucoup de
choses à dire sur le rôle que devait jouer la Télévision :
leurs propositions auraient pu être singulièrement
enrichissantes. On l'a vien vu d'ailleurs à l'« atelier
populaire » que l'ex-école des Beaux-Arts avait créé
pour la réalisation d'affiches. Une assemblée se réunis-
sait chaque soir, ouverte aux étudiants et aux ouvriers :
chacun pouvait lancer une idée, discuter les projets en
débats, ni dans les usines, ni dans les facultés occupées.
Ceci est d'autant plus grave que dès le début, au sein
du personnel, des commissions se sont réunies pour
travailler à l'élaboration d'un nouveau statut, il est
curieux qu'au moment où le personnel proclame que la
Télévision ne doit plus être la « chose » du gouverne-
ment mais appartenir à la nation tout entière, il s'en-
ferme dans un ghetto pour proposer sa révolution.
Les ouvriers de chez Renault, les étudiants qui ont
lancé le mouvement avaient sûrement beaucoup de
choses à dire sur le rôle que devait jouer la Télévision :
leurs propositions auraient pu être singulièrement
enrichissantes. On l'a vien vu d'ailleurs à l'« atelier
populaire » que l'ex-école des Beaux-Arts avait créé
pour la réalisation d'affiches. Une assemblée se réunis-
sait chaque soir, ouverte aux étudiants et aux ouvriers :
chacun pouvait lancer une idée, discuter les projets en
Dernier aspect et non le moindre :
cette grève a été une remarquable dé-
monstration de force et d'unité. Du point
de vue syndical, quelque chose a changé.
Le personnel n oubliera pas ces six
semaines : une rencontre a eu Heu.
cette grève a été une remarquable dé-
monstration de force et d'unité. Du point
de vue syndical, quelque chose a changé.
Le personnel n oubliera pas ces six
semaines : une rencontre a eu Heu.
Les organisations syndicales ne sortent
pas épuisées de cette grève, au contraire
elles se sont renforcées, elles ont trouvé
des appuis nouveaux. Nous pouvons
reprendre l'action quand nous le voulons
et le gouvernement lui-même devra en
tenir compte.
pas épuisées de cette grève, au contraire
elles se sont renforcées, elles ont trouvé
des appuis nouveaux. Nous pouvons
reprendre l'action quand nous le voulons
et le gouvernement lui-même devra en
tenir compte.
EMMANUEL DE LA TAILLE : Les journa-
listes, à l'heure où vous mettez sous
presse, n'ont pas repris le travail, et cela
pour bien montrer que la crise avait
soulevé un problème de fond. Il s'agit de
listes, à l'heure où vous mettez sous
presse, n'ont pas repris le travail, et cela
pour bien montrer que la crise avait
soulevé un problème de fond. Il s'agit de
la mise en question du système d'infor-
mation. Cette grève n'a pas éclaté par
hasard, et le fait que nous n'ayons tou-
jours pas repris le travail montre bien,
contrairement à un certain procès d'inten-
tion qui nous a été fait, que nous n'avions
aucune préoccupation électorale. Le
problème qui se pose pourrait se poser
a tout gouvernement : comment sortir
d'un système de sous-information volon-
taire qui imprègne toute la politique du
pouvoir et la mentalité française dans
une certaine mesure. C'est une sorte de
cercle vicieux dans le rapport pouvoir —
opinion : du côté du pouvoir on craint
que toute relation d'une difficulté même
nationale soit portée à son discrédit, —
du côté de l'opinion on aura donc ten-
dance à rejeter sur l'Etat la totalité de
ses revendications.
mation. Cette grève n'a pas éclaté par
hasard, et le fait que nous n'ayons tou-
jours pas repris le travail montre bien,
contrairement à un certain procès d'inten-
tion qui nous a été fait, que nous n'avions
aucune préoccupation électorale. Le
problème qui se pose pourrait se poser
a tout gouvernement : comment sortir
d'un système de sous-information volon-
taire qui imprègne toute la politique du
pouvoir et la mentalité française dans
une certaine mesure. C'est une sorte de
cercle vicieux dans le rapport pouvoir —
opinion : du côté du pouvoir on craint
que toute relation d'une difficulté même
nationale soit portée à son discrédit, —
du côté de l'opinion on aura donc ten-
dance à rejeter sur l'Etat la totalité de
ses revendications.
Nous pensons que pour en sortir il est
nécessaire que le gouvernement s'engage
vers une évolution libérale et qu'un corps
de journalistes responsables qui ne soit
pas entravé par un système de sous-infor-
mation fasse l'éducation du public et sus-
cite en lui une exigence d'information.
nécessaire que le gouvernement s'engage
vers une évolution libérale et qu'un corps
de journalistes responsables qui ne soit
pas entravé par un système de sous-infor-
mation fasse l'éducation du public et sus-
cite en lui une exigence d'information.
HENRI DE TVRENXE : C'est une ques-
tion de rapport des forces : la grève a été
perdue car le gouvernement, qui a le
contrôle absolu de la télévision, disposait
d'une force politique suffisante pour ne
pas céder. C'est aussi simple que cela.
Sur un plan plus général, elle a été perdue
car l'opinion publique et les partis poli-
tiques en France ne sont pas assez infor-
mes et conscients du problème de la liber-
té d'information et de création à la
télévision.
tion de rapport des forces : la grève a été
perdue car le gouvernement, qui a le
contrôle absolu de la télévision, disposait
d'une force politique suffisante pour ne
pas céder. C'est aussi simple que cela.
Sur un plan plus général, elle a été perdue
car l'opinion publique et les partis poli-
tiques en France ne sont pas assez infor-
mes et conscients du problème de la liber-
té d'information et de création à la
télévision.
25
cours de réalisation. Cet appel à la « créativité des
masses » explique en partie l'originalité, la verve, et le
pouvoir de suggestion de beaucoup d'affiches.
masses » explique en partie l'originalité, la verve, et le
pouvoir de suggestion de beaucoup d'affiches.
Au nom de quoi, sinon d'un corporatisme étroit,
d'une conception aristocratique dépassée, s'est-on refusé
à consulter l'ensemble de ceux qui menaient le combat
pour la transformation de la société ? En agissant ainsi,
l'intersyndicale a d'ailleurs commis sa faute tactique
majeure : elle s'est isolée de l'ensemble du courant de
renouveau, elle est restée seule face au gouvernement.
d'une conception aristocratique dépassée, s'est-on refusé
à consulter l'ensemble de ceux qui menaient le combat
pour la transformation de la société ? En agissant ainsi,
l'intersyndicale a d'ailleurs commis sa faute tactique
majeure : elle s'est isolée de l'ensemble du courant de
renouveau, elle est restée seule face au gouvernement.
Des outils passifs
Emerveillée par l'unité apparente du mouvement de
révolte, l'intersyndicale n'a rien fait pour combler le
fossé entre techniciens et personnel artistique. Pourtant
cette coupure, un instant masquée, est la cause directe de
l'échec de la grève. Et certains réalisateurs ont beau jeu
de déplorer aujourd'hui le « lâchage » des techniciens,
alors qu'ils n'ont rien fait pour les intégrer solidement.
révolte, l'intersyndicale n'a rien fait pour combler le
fossé entre techniciens et personnel artistique. Pourtant
cette coupure, un instant masquée, est la cause directe de
l'échec de la grève. Et certains réalisateurs ont beau jeu
de déplorer aujourd'hui le « lâchage » des techniciens,
alors qu'ils n'ont rien fait pour les intégrer solidement.
A la sortie d'une assemblée de techniciens, un menui-
sier qui travaille aux Buttes -Chaumont répond : « j'ai
voté la reprise. Sur le plan des salaires, nous avons pres-
que obtenu' ce que nous demandions. Cela n'avait plus
de sens de continuer.
sier qui travaille aux Buttes -Chaumont répond : « j'ai
voté la reprise. Sur le plan des salaires, nous avons pres-
que obtenu' ce que nous demandions. Cela n'avait plus
de sens de continuer.
— Mais sur la liberté d'expression à la Télévision,
vous n'avez toujours aucune garantie ?
vous n'avez toujours aucune garantie ?
— Je suis d'accord, c'était un point important. Mais il
ne me concerne pas directement. Moi, je suis menuisier.
D'accord, je travaille à la Télévision, mais l'information
ce n'est pas moi qui la fait. Si elle est truquée, cela ne
me touche pas plus qu'un fraiseur de chez Citroen ou
qu'un gars quelconque du bâtiment. Pas plus et pas
moins. La liberté d'information cela concerne tout le
pays. Qu'il y ait un mouvement général et je suivrai.
ne me concerne pas directement. Moi, je suis menuisier.
D'accord, je travaille à la Télévision, mais l'information
ce n'est pas moi qui la fait. Si elle est truquée, cela ne
me touche pas plus qu'un fraiseur de chez Citroen ou
qu'un gars quelconque du bâtiment. Pas plus et pas
moins. La liberté d'information cela concerne tout le
pays. Qu'il y ait un mouvement général et je suivrai.
Mais ce n'est pas juste que nous portions le mouvement
à nous tout seuls. Et puis nous ne pouvions plus tenir.
Pour continuer il aurait fallu un soutien de l'extérieur
qui n'est pas venu.
à nous tout seuls. Et puis nous ne pouvions plus tenir.
Pour continuer il aurait fallu un soutien de l'extérieur
qui n'est pas venu.
— Alors, vous vous désolidarisez des journalistes,
réalisateurs et producteurs qui continuent la lutte ?
réalisateurs et producteurs qui continuent la lutte ?
— Et eux, est-ce qu'ils ne se foutent pas de nous. Nous
leur sommes utiles en ce moment, comme masse de
manœuvre. Mais qui a-t-on entendu parler pendant la
grève ? Messieurs les réalisateurs et journalistes, la crème
quoi ! Nous, on était juste bon à ne pas toucher la paye
et à se taire. Parce que je vais vous dire, la liberté, on en a
pas plus que les autres ouvriers. Vous croyez qu'on me
demande mon avis pour bâtir un décor ? Non, voilà le
plan et débrouille-toi pour que ça tienne. Si les réalisa-
teurs sont emmerdés* par la direction ou par le gouver-
nement, c'est leur affaire. Ils n'ont qu'à changer de
métier. Avant, je travaillais dans le bâtiment. Vous avez
déjà vu des maçons faire grève pour que les chefs de tra-
vaux aient leur mot à dire sur les plans de l'architecte ? »
leur sommes utiles en ce moment, comme masse de
manœuvre. Mais qui a-t-on entendu parler pendant la
grève ? Messieurs les réalisateurs et journalistes, la crème
quoi ! Nous, on était juste bon à ne pas toucher la paye
et à se taire. Parce que je vais vous dire, la liberté, on en a
pas plus que les autres ouvriers. Vous croyez qu'on me
demande mon avis pour bâtir un décor ? Non, voilà le
plan et débrouille-toi pour que ça tienne. Si les réalisa-
teurs sont emmerdés* par la direction ou par le gouver-
nement, c'est leur affaire. Ils n'ont qu'à changer de
métier. Avant, je travaillais dans le bâtiment. Vous avez
déjà vu des maçons faire grève pour que les chefs de tra-
vaux aient leur mot à dire sur les plans de l'architecte ? »
Promotion et participation
A la télévision la coupure a toujours été très nette entre
« créateurs » et ce personnel d'exécution », la grève ne l'a
pas supprimée, le dialogue est toujours aussi difficile. Les
réalisateurs reprochent aux techniciens de ne voir dans la
télévision qu'un simple système de transmission d'ondes
et de ne pas les aider dans leur rôle de ce créateur ». Les
techniciens de leur côté ont le sentiment d'être utilisés
comme de purs outils d'autant plus appréciés qu'ils sont
plus passifs et précis.
« créateurs » et ce personnel d'exécution », la grève ne l'a
pas supprimée, le dialogue est toujours aussi difficile. Les
réalisateurs reprochent aux techniciens de ne voir dans la
télévision qu'un simple système de transmission d'ondes
et de ne pas les aider dans leur rôle de ce créateur ». Les
techniciens de leur côté ont le sentiment d'être utilisés
comme de purs outils d'autant plus appréciés qu'ils sont
plus passifs et précis.
En réalité, le fossé n'est pas infranchissable et une
l'opinion
Qiic ferez-vous si le gouvernement refuse le
« comité des sages » et ne présente aucun projet
de réforme devant la future Assemblée na-
tionale ?
« comité des sages » et ne présente aucun projet
de réforme devant la future Assemblée na-
tionale ?
ROGER LOUIS : Le Comité des Sages
n'est qu'un épisode, ce n'est pas l'essentiel
du combat. Le problème est celui des
réformes profondes, et celui des paranties
minima que les journalistes exigent pour
garder une dignité.
n'est qu'un épisode, ce n'est pas l'essentiel
du combat. Le problème est celui des
réformes profondes, et celui des paranties
minima que les journalistes exigent pour
garder une dignité.
Le projet de réforme présenté à l'As-
semblée nationale ne sera probablement
pas celui que nous souhaitons. Je crois
qu'il consistera à détruire l'O.R.T.F., à
la déstructurer. Le problème de l'objecti-
vité sera posé sur un autre plan, celui de
la concurrence entre les chaînes. Çt les
syndicats seront désemparés, puisque
cette réponse ne se situera pas sur le
terrain sur lequel ils ont voulu se battre.
Les syndicats ont manqué d'imagination.
Je le répète : l'inter-syndicale combattait
une organisation de l'O.R.T.F. dont elle
semblée nationale ne sera probablement
pas celui que nous souhaitons. Je crois
qu'il consistera à détruire l'O.R.T.F., à
la déstructurer. Le problème de l'objecti-
vité sera posé sur un autre plan, celui de
la concurrence entre les chaînes. Çt les
syndicats seront désemparés, puisque
cette réponse ne se situera pas sur le
terrain sur lequel ils ont voulu se battre.
Les syndicats ont manqué d'imagination.
Je le répète : l'inter-syndicale combattait
une organisation de l'O.R.T.F. dont elle
reproduisait les compartiments en son
propre sein. Ou nous sommes capables de
Faire nous-mêmes nos propres réformes,
en contestant les vieilles structures syndi-
cales et leur appareils, ou nous serons
placés sur un terrain de combat que
l'inter-syndicale n'a pas prévu et sur le-
quel elle est incapable de répondre.
propre sein. Ou nous sommes capables de
Faire nous-mêmes nos propres réformes,
en contestant les vieilles structures syndi-
cales et leur appareils, ou nous serons
placés sur un terrain de combat que
l'inter-syndicale n'a pas prévu et sur le-
quel elle est incapable de répondre.
PIERRE SIMONETTI : Nous ne savons
pas ce que sera ce ce Comité des Sages »
que le gouvernement appellera sans doute
autrement. Nous ne savons pas si le gou-
vernement y mettra ses hommes de
confiance ou si on s'efforcera de donner
une autorité réelle à l'organisme en assu-
rant son objectivité. Ce que nous savons,
c'est qu'une promesse formelle a été
faite et qu'elle doit être tenue.
pas ce que sera ce ce Comité des Sages »
que le gouvernement appellera sans doute
autrement. Nous ne savons pas si le gou-
vernement y mettra ses hommes de
confiance ou si on s'efforcera de donner
une autorité réelle à l'organisme en assu-
rant son objectivité. Ce que nous savons,
c'est qu'une promesse formelle a été
faite et qu'elle doit être tenue.
Quant à l'abrogation de la loi de 1964,
le problème a été maintenant posé devant
l'opinion toute entière. Le problème sera
de toute façon reposé dès la rentrée
le problème a été maintenant posé devant
l'opinion toute entière. Le problème sera
de toute façon reposé dès la rentrée
parlementaire, à l'opposition comme à la
majorité. Deux raisons principales exigent
que cette loi disparaisse. La première,
c'est bien sûr la nécessité d'une informa-
tion objective, que cette loi ne garantit
pas, la seconde c'est le fonctionnement
même du service public que cette loi
n'organise pas. Sur le plan professionnel
comme sur le plan social, nous continue-
rons' donc à réclamer son abrogation.
Cela donnera-t-il lieu à des mouvements
aussi spectaculaires ? Nous ne le savons
pas. En ce qui concerne tous les militants
syndicaux, en tout cas, le combat conti-
majorité. Deux raisons principales exigent
que cette loi disparaisse. La première,
c'est bien sûr la nécessité d'une informa-
tion objective, que cette loi ne garantit
pas, la seconde c'est le fonctionnement
même du service public que cette loi
n'organise pas. Sur le plan professionnel
comme sur le plan social, nous continue-
rons' donc à réclamer son abrogation.
Cela donnera-t-il lieu à des mouvements
aussi spectaculaires ? Nous ne le savons
pas. En ce qui concerne tous les militants
syndicaux, en tout cas, le combat conti-
EMMAXUEL DE LA TAILLE : Démission-
ner de l'O.R.T.F. dans des conditions
telles que cela n'apparaisse pas comme un
engagement politique mais comme une
position professionnelle.
ner de l'O.R.T.F. dans des conditions
telles que cela n'apparaisse pas comme un
engagement politique mais comme une
position professionnelle.
HENRI DE TVRENNE .-Personnellement,
je ne crois pas que le Comité des Sages
je ne crois pas que le Comité des Sages
26
participation du personnel technique au travail créateur
est possible. Non pas au niveau du tournage, où les jeux
sont faits et où le réalisateur responsable de l'émission
doit être « seul chef à bord », mais au niveau de la concep-
tion. Actuellement cette collaboration n'a pas lieu. Un
caméraman ne peut même pas assister à la projection des
images qu'il a filmées car il est déjà appelé sur un nouveau
tournage. Un assistant n'a pas le droit de participer au
montage et le réalisateur se retrouve avec un monteur qui
n'était pas là lors des prises de vues et qui n'est au cou-
rant de rien. C'est absurde. Il faudrait qu'au moment où
l'on bâtit l'émission toute l'équipe appelée à y travailler
puisse se réunir et faire des suggestions. La collaboration
de plusieurs spécialités, de plusieurs techniques, de plu-
sieurs sensibilités serait enrichissante pour le réalisateur
qui n'en resterait pas moins responsable de son idée. De
plus parce qu'il serait mieux informé, chacun travaillerait
plus intelligemment.
est possible. Non pas au niveau du tournage, où les jeux
sont faits et où le réalisateur responsable de l'émission
doit être « seul chef à bord », mais au niveau de la concep-
tion. Actuellement cette collaboration n'a pas lieu. Un
caméraman ne peut même pas assister à la projection des
images qu'il a filmées car il est déjà appelé sur un nouveau
tournage. Un assistant n'a pas le droit de participer au
montage et le réalisateur se retrouve avec un monteur qui
n'était pas là lors des prises de vues et qui n'est au cou-
rant de rien. C'est absurde. Il faudrait qu'au moment où
l'on bâtit l'émission toute l'équipe appelée à y travailler
puisse se réunir et faire des suggestions. La collaboration
de plusieurs spécialités, de plusieurs techniques, de plu-
sieurs sensibilités serait enrichissante pour le réalisateur
qui n'en resterait pas moins responsable de son idée. De
plus parce qu'il serait mieux informé, chacun travaillerait
plus intelligemment.
Une autre réforme qui contribuerait à abattre les
barrières entre diverses catégories du personnel serait
l'aménagement de la proposition à l'intérieur de la télé-
vision. Actuellement celle-ci est souvent bloquée ou se fait
suivant des chemins aberrant. Un caméraman peut deve-
nir chef de photographie mais il ne peut pas accéder à la
responsabilité de réalisateur ; en revanche, on lui offre
la possibilité de devenir chef de production. Un monteur
ne peut pas devenir réalisateur sans passer par l'assis-
tanat. Or un monteur qui a dix années de travail derrière
lui n'a nul besoin de ce stage.
barrières entre diverses catégories du personnel serait
l'aménagement de la proposition à l'intérieur de la télé-
vision. Actuellement celle-ci est souvent bloquée ou se fait
suivant des chemins aberrant. Un caméraman peut deve-
nir chef de photographie mais il ne peut pas accéder à la
responsabilité de réalisateur ; en revanche, on lui offre
la possibilité de devenir chef de production. Un monteur
ne peut pas devenir réalisateur sans passer par l'assis-
tanat. Or un monteur qui a dix années de travail derrière
lui n'a nul besoin de ce stage.
Abattre les cloisons, assurer une meilleure collaboration
du personnel technique à l'œuvre de création, ce sont là
deux réformes qui ne constituent en rien une révolution
mais dont l'impact sur le climat de travail et sur le fonc-
tionnement de la télévision aurait été considérable. Elles
ne figuraient dans aucune des propositions étudiées par
les diverses commissions.
du personnel technique à l'œuvre de création, ce sont là
deux réformes qui ne constituent en rien une révolution
mais dont l'impact sur le climat de travail et sur le fonc-
tionnement de la télévision aurait été considérable. Elles
ne figuraient dans aucune des propositions étudiées par
les diverses commissions.
Si le bilan de la grève est maigre, il n'est pas nul. Au
cours des cinq semaines passées des discussions multipks
ont éclaté dans la grande Maison autrefois silencieuse
Et même si entre les différentes catégories de personnel
la méfiance demeure, au moins, pour la première fois,
on s'est parlé. D'autre part, bien que les syndicats n'aient
pas fait preuve d'une grande efficacité, de nombreux
membres du personnel ont compris que la faiblesse de la
grève venait de son inorganisation, qu'il fallait intensifier
la pression syndicale pour surmonter la période de reflux
qui se dissinait aujourd'hui.
cours des cinq semaines passées des discussions multipks
ont éclaté dans la grande Maison autrefois silencieuse
Et même si entre les différentes catégories de personnel
la méfiance demeure, au moins, pour la première fois,
on s'est parlé. D'autre part, bien que les syndicats n'aient
pas fait preuve d'une grande efficacité, de nombreux
membres du personnel ont compris que la faiblesse de la
grève venait de son inorganisation, qu'il fallait intensifier
la pression syndicale pour surmonter la période de reflux
qui se dissinait aujourd'hui.
Au cours des deux dimanches électoraux, pour distraire
le téléspectateur avant de connaître les résultats, au stu-
dio 3, on comblait les silences avec quelques variétés.
Comme il n'v avait pas de Français pour « servir », on
faisait appel aux spectacles étrangers : l'Allemagne,
l'Angleterre, la Hollande y passaient. On pouvait même
entendre, malgré ses protestations, de vieilles chansons
de Bécaud en Allemand ou en Anglais. Vive la France.
le téléspectateur avant de connaître les résultats, au stu-
dio 3, on comblait les silences avec quelques variétés.
Comme il n'v avait pas de Français pour « servir », on
faisait appel aux spectacles étrangers : l'Allemagne,
l'Angleterre, la Hollande y passaient. On pouvait même
entendre, malgré ses protestations, de vieilles chansons
de Bécaud en Allemand ou en Anglais. Vive la France.
Les représailles ont commencé : pour l'été, tous les
magazines d'information sont suspendus. On a pensé
(aire une exception pour le plus servile et pour le plus
libre, Panorama et Cinq colonnes à la une. On y a renoncé.
M. François, directeur fantôme, s'en est expliqué à France-
Soir : « Je veux trouver des jaillissements nouveaux. Les
émissions ne sont pas supprimées mais elles ne sont pas
programmées. (...) Je vais faire appel à des hommes
nouveaux. »
magazines d'information sont suspendus. On a pensé
(aire une exception pour le plus servile et pour le plus
libre, Panorama et Cinq colonnes à la une. On y a renoncé.
M. François, directeur fantôme, s'en est expliqué à France-
Soir : « Je veux trouver des jaillissements nouveaux. Les
émissions ne sont pas supprimées mais elles ne sont pas
programmées. (...) Je vais faire appel à des hommes
nouveaux. »
Pour l'instant, les premières victimes seraient Guy Lux,
Pierre Bellemare, interdits, l'émission Femmes aussi d'Elia-
ne Victor, Discorama de Denise Glaser. A Télé-dimanche,
Joséphine Baker distribue des bouquets tricolores aux
« Enfants terribles ». L'un d'eux refuse les fleurs. Les
« Enfants terribles » sont interdits.
Pierre Bellemare, interdits, l'émission Femmes aussi d'Elia-
ne Victor, Discorama de Denise Glaser. A Télé-dimanche,
Joséphine Baker distribue des bouquets tricolores aux
« Enfants terribles ». L'un d'eux refuse les fleurs. Les
« Enfants terribles » sont interdits.
Olivier Oudiette
soit une solution très satisfaisante. Notre
action collective ayant échoué, il me reste
à négocier, à titre individuel, avec la
Direction les conditions et les garanties
minima qui m'apparaissent indispensa-
bles pour reprendre mon activité dans le
domaine de 1information. Si je les obtiens
pas, j'abandonnerai mon émission.
action collective ayant échoué, il me reste
à négocier, à titre individuel, avec la
Direction les conditions et les garanties
minima qui m'apparaissent indispensa-
bles pour reprendre mon activité dans le
domaine de 1information. Si je les obtiens
pas, j'abandonnerai mon émission.
Si /(' Gouvernement prend des salifiions contre
le personnel gréviste et licencie certains journa-
listes, réalisateurs on producteurs, quelle sera
votre riposte ?
le personnel gréviste et licencie certains journa-
listes, réalisateurs on producteurs, quelle sera
votre riposte ?
ROGER LOL'IS : Les sanctions, ça ne veut
rien dire. Prenons l'exemple de France-
Inter. Lorsque les journalistes ont décidé
de reprendre le travail, la direction géné-
rale leur a dit : « Vous continuerez à être
payés, mais vous ne pouvez pas reprendre
le travail maintenant. Vous le ferez indi-
viduellement, selon les lettres que nous
vous enverrons. Partez en vacances, nous
rien dire. Prenons l'exemple de France-
Inter. Lorsque les journalistes ont décidé
de reprendre le travail, la direction géné-
rale leur a dit : « Vous continuerez à être
payés, mais vous ne pouvez pas reprendre
le travail maintenant. Vous le ferez indi-
viduellement, selon les lettres que nous
vous enverrons. Partez en vacances, nous
verrons à la rentrée. »
Alors, sanction ou pas ? A Limoges, la
direction a notifié à trois journalistes
grévistes qu'elle les reprenait, mais qu'elle
les interdisait sur les ondes et à l'image.
L'ensemble du personnel a considéré
que c'était une sanction et s'est immédia-
tement mis en grève.
direction a notifié à trois journalistes
grévistes qu'elle les reprenait, mais qu'elle
les interdisait sur les ondes et à l'image.
L'ensemble du personnel a considéré
que c'était une sanction et s'est immédia-
tement mis en grève.
F.t pour tous les hors-statuts, les pigis-
tes : si on leur dit simplement : « II n'y
a pas d'émission pour vous », c'est une
sanction ou pas ? Juridiquement, il n'y
a pas de sanction.
tes : si on leur dit simplement : « II n'y
a pas d'émission pour vous », c'est une
sanction ou pas ? Juridiquement, il n'y
a pas de sanction.
Il y a deux solutions : riposter à chaque
fois, comme à Limoges, ou tout accepter.
fois, comme à Limoges, ou tout accepter.
Pif KHI- SIMOXETT1 : L'unanimité s'est
faite sur ce point. Nous ne laisserons pas
passer une seule sanction pour fait de
grève sans réagir immédiatement et
vigoureusement, avec tous les moyens
dont nous disposons, y compris la grève.
faite sur ce point. Nous ne laisserons pas
passer une seule sanction pour fait de
grève sans réagir immédiatement et
vigoureusement, avec tous les moyens
dont nous disposons, y compris la grève.
EMMA \l'ET. DE LA TAILLE .-Personnel-
lement je crois à l'action collective pour
une opération positive et claire. En revan-
che, je doute fort de l'action collective
anti-sanction du fait que la sanction n'est
jamais nette. Si la sanction était incontes-
table et spectaculaire, je croirais à l'effi-
cacité d'une action collective mais bien
folle serait la direction qui prendrait
une sanction de ce genre !
une opération positive et claire. En revan-
che, je doute fort de l'action collective
anti-sanction du fait que la sanction n'est
jamais nette. Si la sanction était incontes-
table et spectaculaire, je croirais à l'effi-
cacité d'une action collective mais bien
folle serait la direction qui prendrait
une sanction de ce genre !
Il faut souligner l'unité qui s'est créée
à PO.R.T.F. Les journalistes de la télévi-
sion qui, jusqu'ici, étaient victimes d'une
certaine suspicion de la part du personnel
ont obtenu sa confiance et son estime.
C'est là un bilan très positif.
à PO.R.T.F. Les journalistes de la télévi-
sion qui, jusqu'ici, étaient victimes d'une
certaine suspicion de la part du personnel
ont obtenu sa confiance et son estime.
C'est là un bilan très positif.
HE\RI DE Tl'RE\\E : S'il y a des sanc-
tions contre les grévistes, malgré les pro-
messses formelles faites par le ministre et
par le directeur général, je pense que la
solidarité syndicale devrait jouer instanta-
nément.
tions contre les grévistes, malgré les pro-
messses formelles faites par le ministre et
par le directeur général, je pense que la
solidarité syndicale devrait jouer instanta-
nément.
27
Débat
EMMANUEL D'ASTJER. Dans les
projets de réforme de la Télévision
que vous avez étudiés, vous prévoyez
la création d'un conseil d'administra-
tion tripartite. Un tiers des membres
représenterait l'Etat, un tiers le per-
sonnel de l'Office, un tiers le public.
Je voudrais poser deux questions.
Comment les représentants du public
seront-ils désignés ? Que ferez-vous
de la Télévision devenue indépen-
dante ?
projets de réforme de la Télévision
que vous avez étudiés, vous prévoyez
la création d'un conseil d'administra-
tion tripartite. Un tiers des membres
représenterait l'Etat, un tiers le per-
sonnel de l'Office, un tiers le public.
Je voudrais poser deux questions.
Comment les représentants du public
seront-ils désignés ? Que ferez-vous
de la Télévision devenue indépen-
dante ?
MICHEL MITRANI (1) Le problème
de la représentation du public, est ce-
lui de la démocratisation de la Télévi-
sion. Il est clair aujourd'hui que la
Télévision possède le privilège d'en-
trer à tout moment chez quiconque.
Elle a donc un pouvoir. C'est le qua-
trième pouvoir. Dans les pays occi-
dentaux, à la suite d'une série de lut-
tes, les trois autres pouvoirs, le
législatif, l'exécutif et le judiciaire, se
sont peu à peu démocratisés. Mais
quand la Télévision s'est créée, elle
ignorait encore sa puissance. En
France le gouvernement du général
de Gaulle l'a parfaitement découvert
et il se l'est annexée. D'ailleurs le
processus a débuté avant de Gaulle,
dans les deux dernières années de la
IVe République. Il faut créer un
conseil démocratique à la tête de la
Télévision. Les partis politiques de
l'opposition eux-mêmes ne voient le
problème que de façon limitée. Il
s'agit simplement pour eux de pou-
voir s'exprimer au même titre que le
gouvernement. C'est insuffisant, il y
a d'autres forces dans le pays que
celles des partis et les événements
du mois de mai l'ont bien montré.
Démocratique, il faut aussi que la
Télévision soit critique. Il faut qu'elle
soit une tribune permanente ouverte
à la contestation.
de la représentation du public, est ce-
lui de la démocratisation de la Télévi-
sion. Il est clair aujourd'hui que la
Télévision possède le privilège d'en-
trer à tout moment chez quiconque.
Elle a donc un pouvoir. C'est le qua-
trième pouvoir. Dans les pays occi-
dentaux, à la suite d'une série de lut-
tes, les trois autres pouvoirs, le
législatif, l'exécutif et le judiciaire, se
sont peu à peu démocratisés. Mais
quand la Télévision s'est créée, elle
ignorait encore sa puissance. En
France le gouvernement du général
de Gaulle l'a parfaitement découvert
et il se l'est annexée. D'ailleurs le
processus a débuté avant de Gaulle,
dans les deux dernières années de la
IVe République. Il faut créer un
conseil démocratique à la tête de la
Télévision. Les partis politiques de
l'opposition eux-mêmes ne voient le
problème que de façon limitée. Il
s'agit simplement pour eux de pou-
voir s'exprimer au même titre que le
gouvernement. C'est insuffisant, il y
a d'autres forces dans le pays que
celles des partis et les événements
du mois de mai l'ont bien montré.
Démocratique, il faut aussi que la
Télévision soit critique. Il faut qu'elle
soit une tribune permanente ouverte
à la contestation.
HENRI DE TURENNE. J'irai encore
plus loin : la Télévision est le pouvoir
plus loin : la Télévision est le pouvoir
(1) Henri de Turenne est producteur de Camé-
ra 3.
ra 3.
Michel Mitrani est réalisateur (Tous ceux qui
tombent, Huis clos, Les anges exterminés).
Roger Kahane est réalisateur (Jeanne au bû-
cher, Quatre savants, une science).
tombent, Huis clos, Les anges exterminés).
Roger Kahane est réalisateur (Jeanne au bû-
cher, Quatre savants, une science).
des pouvoirs, elle est l'arme absolue.
Jusque-là elle s'est développée de
façon pragmatique et aujourd'hui on
se fait à son sujet un grand nombre
d'idées fausses, d'idées correspondant
à un stade de développement d'ores
et déjà dépassé. On parle du téléspec-
tateur comme -du monsieur qui va
une fois par semaine au cinéma. Mais
on ne peut déjà plus raisonner ainsi.
Bientôt tout le monde sera soumis
à la Télévision et la qualité de télé-
spectateur se confondra avec celle de
citoyen.
Jusque-là elle s'est développée de
façon pragmatique et aujourd'hui on
se fait à son sujet un grand nombre
d'idées fausses, d'idées correspondant
à un stade de développement d'ores
et déjà dépassé. On parle du téléspec-
tateur comme -du monsieur qui va
une fois par semaine au cinéma. Mais
on ne peut déjà plus raisonner ainsi.
Bientôt tout le monde sera soumis
à la Télévision et la qualité de télé-
spectateur se confondra avec celle de
citoyen.
Par ailleurs, on parle toujours de
l'information au sens restrictif du
mot, mais l'information à la Télé-
vision, c'est la vie, c'est tout. La Télé-
vision peut refléter la vie globale
d'une nation. A côté de l'information
politique, il y a l'information éco-
nomique, culturelle, scientifique, trop
souvent absentes jusqu'ici.
l'information au sens restrictif du
mot, mais l'information à la Télé-
vision, c'est la vie, c'est tout. La Télé-
vision peut refléter la vie globale
d'une nation. A côté de l'information
politique, il y a l'information éco-
nomique, culturelle, scientifique, trop
souvent absentes jusqu'ici.
Je voudrais enfin développer un
troisième point : nos idées sur la
Télévision datent de l'époque où il
n'y avait qu'une seule chaîne, qu'un
plat unique imposé à tous. Il y a
déjà deux chaînes aujourd'hui, il y
en aura d'autres demain. La Télé-
vision ne doit plus être un journal,
elle doit être un véritable kiosque à
journaux.
troisième point : nos idées sur la
Télévision datent de l'époque où il
n'y avait qu'une seule chaîne, qu'un
plat unique imposé à tous. Il y a
déjà deux chaînes aujourd'hui, il y
en aura d'autres demain. La Télé-
vision ne doit plus être un journal,
elle doit être un véritable kiosque à
journaux.
MICHEL MITRANI. Un kiosque à
journaux, ce n'est pas suffisant. Dans
une société aliénée comme la nôtre,
présenter sur le même plan cinq opi-
nions différentes, cela ne sert pas à
grand chose, l'homme étant condi-
tionné de toute manière par cette
société.
journaux, ce n'est pas suffisant. Dans
une société aliénée comme la nôtre,
présenter sur le même plan cinq opi-
nions différentes, cela ne sert pas à
grand chose, l'homme étant condi-
tionné de toute manière par cette
société.
HENRI DE TURENNE. L'objectivité
est une chimère. Mais il est impor-
tant de pouvoir aller dans un kiosque
et de disposer de tous les journaux
représentant toutes les tendances et
courants de pensées. Tant que la
Télévision n'a qu'une seule chaîne
elle ne peut qu'être l'organe du gou-
vernement. A partir du moment où
il y a plusieurs chaînes, l'information
peut être sinon objective, du moins
honnête et complète, ce qu'elle n'a
jamais été à l'O.R.T.F.
est une chimère. Mais il est impor-
tant de pouvoir aller dans un kiosque
et de disposer de tous les journaux
représentant toutes les tendances et
courants de pensées. Tant que la
Télévision n'a qu'une seule chaîne
elle ne peut qu'être l'organe du gou-
vernement. A partir du moment où
il y a plusieurs chaînes, l'information
peut être sinon objective, du moins
honnête et complète, ce qu'elle n'a
jamais été à l'O.R.T.F.
ROGER KAHANE. C'est bien pour la
bonne conscience de ceux qui font
la Télévision. Reste à savoir comment
on va donner au public le désir de se
guider, comment on va lui donner le
mode d'emploi de cette Télévision
diversifiée.
bonne conscience de ceux qui font
la Télévision. Reste à savoir comment
on va donner au public le désir de se
guider, comment on va lui donner le
mode d'emploi de cette Télévision
diversifiée.
EMMANUEL D 'ASTIER. Il faut don-
ner au public les éléments de chaque
problème, tous les éléments.
ner au public les éléments de chaque
problème, tous les éléments.
HENRI DE Tl'RENNE. Oui, la Télé-
vision doit être le reflet fidèle et
complet de tout ce qui se passe. Et si
l'objectivité n'existe pas, on peut faire
en sorte, tout au moins que la sub-
jectivité soit présentée en tant que
telle. Que le point de vue du gouver-
nement ne soit pas présenté comme
une vérité absolue mais comme la
vérité du gouvernement, ce qui est
parfaitement admissible. Et ensuite,
on présentera la vérité des étudiants
et celle des professeurs. Et si le jour-
naliste a une opinion personnelle,
libre à lui de la donner comme telle.
vision doit être le reflet fidèle et
complet de tout ce qui se passe. Et si
l'objectivité n'existe pas, on peut faire
en sorte, tout au moins que la sub-
jectivité soit présentée en tant que
telle. Que le point de vue du gouver-
nement ne soit pas présenté comme
une vérité absolue mais comme la
vérité du gouvernement, ce qui est
parfaitement admissible. Et ensuite,
on présentera la vérité des étudiants
et celle des professeurs. Et si le jour-
naliste a une opinion personnelle,
libre à lui de la donner comme telle.
EMMANUEL D'ASTIER. Je vais me
faire l'avocat du diable. Votre sys-
tème de conseil d'administration, ou
de « petit parlement », ne peut pas
ne pas tenir compte des responsabi-
lités particulières du gouvernement.
Prenons le cas de la politique étran-
gère. Je comprends, qu'un gouverne-
ment quel qu'il soit, aussi bien com-
muniste que gaulliste, cherche à
entraîner la nation dans la politique
étrangère à laquelle elle a elle-même
souscrite par des élections ou par un
référendum. Il est normal qu'il utilise
la télévision comme courroie d'en-
traînement.
faire l'avocat du diable. Votre sys-
tème de conseil d'administration, ou
de « petit parlement », ne peut pas
ne pas tenir compte des responsabi-
lités particulières du gouvernement.
Prenons le cas de la politique étran-
gère. Je comprends, qu'un gouverne-
ment quel qu'il soit, aussi bien com-
muniste que gaulliste, cherche à
entraîner la nation dans la politique
étrangère à laquelle elle a elle-même
souscrite par des élections ou par un
référendum. Il est normal qu'il utilise
la télévision comme courroie d'en-
traînement.
ROGER KAHANE. Cela ne me paraît
pas contredire nos projets. Un gou-
vernement a parfaitement le droit de
dire : « Voilà, dans la situation ac-
tuelle de notre politique étrangère,
nous voulons vous faire connaître et
vous expliquer notre décision et nous
estimons nécessaire de donner la
priorité à cet exposé ». Ce qui est
inadmissible, c'est le caractère insi-
dieux d'une pression. Le gouverne-
ment doit agir à jeu découvert. C'est
cela la démocratie, avant d'être un
système reposant sur des élections.
Pourquoi un gouvernement qui esti-
merait juste la politique qu'il mène
craindrait-il la concurrence des idées ?
Dans le conseil, le « petit parle-
ment » de la Télévision, ce qui est
important, ce n'est pas tant la ma-
nière dont il est désigné que son rôle
exact et les procédures d'appel qu'il
autorise. Il faut que je sois sûr qu'il
y ait quelqu'un à qui je puisse me
plaindre, que je sache qu'il me rece-
vra parce que c'est son travail. Ça
pas contredire nos projets. Un gou-
vernement a parfaitement le droit de
dire : « Voilà, dans la situation ac-
tuelle de notre politique étrangère,
nous voulons vous faire connaître et
vous expliquer notre décision et nous
estimons nécessaire de donner la
priorité à cet exposé ». Ce qui est
inadmissible, c'est le caractère insi-
dieux d'une pression. Le gouverne-
ment doit agir à jeu découvert. C'est
cela la démocratie, avant d'être un
système reposant sur des élections.
Pourquoi un gouvernement qui esti-
merait juste la politique qu'il mène
craindrait-il la concurrence des idées ?
Dans le conseil, le « petit parle-
ment » de la Télévision, ce qui est
important, ce n'est pas tant la ma-
nière dont il est désigné que son rôle
exact et les procédures d'appel qu'il
autorise. Il faut que je sois sûr qu'il
y ait quelqu'un à qui je puisse me
plaindre, que je sache qu'il me rece-
vra parce que c'est son travail. Ça
28
De gauche à droite : Rager Kahane, Henri de Turerme, Emmanuel rl'Astier, Michel Mitrani.
Henri Hudrisier
aussi, c'est une autre forme de démo-
cratie.
cratie.
HENRI DE Tl.'RENNE. Il y a un
choix qu'on ne peut éviter : ou l'on
sert une idéologie, on veut transfor-
mer la société et se servir de la Télé-
vision comme moyen de cette trans-
formation ; ou au contraire on consi-
dère, comme je le fais, que la Télévi-
sion est l'arme absolue et qu'on n'a
pas le droit de s'en servir à des lins
partisanes qu'on doit en faire simple-
ment un moyen de rendre chaque
citoyen témoin et juge de l'action du
gouvernement.
choix qu'on ne peut éviter : ou l'on
sert une idéologie, on veut transfor-
mer la société et se servir de la Télé-
vision comme moyen de cette trans-
formation ; ou au contraire on consi-
dère, comme je le fais, que la Télévi-
sion est l'arme absolue et qu'on n'a
pas le droit de s'en servir à des lins
partisanes qu'on doit en faire simple-
ment un moyen de rendre chaque
citoyen témoin et juge de l'action du
gouvernement.
EMMANUEL D'ASTJER. Je suis d'ac-
cord avec Turenne et je voudrais
apporter ici mon expérience person-
nelle. Je crois profondément au dan-
ger de l'hégémonie américaine et j'ai
souvent exprimé à la Télévision des
sentiments anti-américains — il y a eu
quatre protestations officielles de
l'ambassade des Etats-Unis à ce sujet.
Mais je ne trouve pas juste que quel-
qu'un n'ait pas eu la possibilité de
présenter une délense et illustration
de l'Amérique. La Télévision doit of-
frir un échantillon d'opinions très
large, qui aille des courants réac-
tionnaires jusqu'à l'extrême gau-
chisme.
cord avec Turenne et je voudrais
apporter ici mon expérience person-
nelle. Je crois profondément au dan-
ger de l'hégémonie américaine et j'ai
souvent exprimé à la Télévision des
sentiments anti-américains — il y a eu
quatre protestations officielles de
l'ambassade des Etats-Unis à ce sujet.
Mais je ne trouve pas juste que quel-
qu'un n'ait pas eu la possibilité de
présenter une délense et illustration
de l'Amérique. La Télévision doit of-
frir un échantillon d'opinions très
large, qui aille des courants réac-
tionnaires jusqu'à l'extrême gau-
chisme.
HENRI DE TURENNE. Il faut faire
attention, cette notion d'équilibre a
été une plaie dans nos émissions d'in-
formation : on ne pouvait plus don-
ner la parole à qui que ce soit sans la
donner aussitôt à son adversaire. Or
il se trouve qu'il y a des gens qui ont
des choses à dire et d'autres, rien.
attention, cette notion d'équilibre a
été une plaie dans nos émissions d'in-
formation : on ne pouvait plus don-
ner la parole à qui que ce soit sans la
donner aussitôt à son adversaire. Or
il se trouve qu'il y a des gens qui ont
des choses à dire et d'autres, rien.
MICHEL MITRANI. Il ne peut y avoir
d'équilibre véritable à un moment ou
à un autre, il faut un arbitrage. Qui
d'équilibre véritable à un moment ou
à un autre, il faut un arbitrage. Qui
parlera le dernier ? On a vu ce qui
s'est passé avec les étudiants dont les
interventions lurent suivies par le dis-
cours du Premier ministre. Pour être
véritablement objectif, un cvcle d'in-
formation aurait dû recommencer le
lendemain et ainsi de suite.
s'est passé avec les étudiants dont les
interventions lurent suivies par le dis-
cours du Premier ministre. Pour être
véritablement objectif, un cvcle d'in-
formation aurait dû recommencer le
lendemain et ainsi de suite.
EMMANUEL D'ASTIER. Là, je trouve
que vous allez un peu loin. Le pro-
blème de savoir si le Premier ministre
parlera oti ne parlera pas le dernier,
c'est quand même secondaire !
que vous allez un peu loin. Le pro-
blème de savoir si le Premier ministre
parlera oti ne parlera pas le dernier,
c'est quand même secondaire !
HENRI DE TURENNE. Ça devrait
l'être, mais tout est faussé quand la
liberté n'existe pas. Je me suis souvent
demandé si mon émission, que je
voulais libre, ne servait pas d'alibi
au pouvoir. Et on vous a assez sou-
vent fait le même reproche pour votre
« Quart d'heure ».
l'être, mais tout est faussé quand la
liberté n'existe pas. Je me suis souvent
demandé si mon émission, que je
voulais libre, ne servait pas d'alibi
au pouvoir. Et on vous a assez sou-
vent fait le même reproche pour votre
« Quart d'heure ».
EMMANUEL D'ASTIER. Revenons au
conseil d'administration qui doit être
une instance relativement libre à
l'égard du gouvernement : on ne peut
plus concevoir que le directeur géné-
ral déc io( lie son téléphone pour
appeler le ministre de l'Information.
C'est une chose monstrueuse. Ceci
dit, il laut que ce conseil ait des
pouvoirs lorts pour coordonner l'ac-
tivité des différentes unités de pro-
duction et établir un équilibre entre
les émissions.
conseil d'administration qui doit être
une instance relativement libre à
l'égard du gouvernement : on ne peut
plus concevoir que le directeur géné-
ral déc io( lie son téléphone pour
appeler le ministre de l'Information.
C'est une chose monstrueuse. Ceci
dit, il laut que ce conseil ait des
pouvoirs lorts pour coordonner l'ac-
tivité des différentes unités de pro-
duction et établir un équilibre entre
les émissions.
ROGER KAHANE. Un équilibre, ça
ne se fabrique pas, c'est quelque
chose de spontané : vous jetez ce filet
qu'on appelle épervier sur un rocher,
c'est très beau, le filet s'accroche très
bien ; vous voulez accrochez maille
après maille, vous faites un monstre.
ne se fabrique pas, c'est quelque
chose de spontané : vous jetez ce filet
qu'on appelle épervier sur un rocher,
c'est très beau, le filet s'accroche très
bien ; vous voulez accrochez maille
après maille, vous faites un monstre.
MICHEL MITRANI. Nous avons pré-
vu un comité de coordination qui
vu un comité de coordination qui
serait chargé d'élaborer un plan géné-
ral : à l'intérieur de ce cadre de pro-
grammes, chaque unité de produc-
tion choisirait ses émissions et la
forme qu'elle veut leur donner. Mais
il ne s'agil pas du tout d'un dosage.
Je voudrais revenir à la notion de tri-
bune permanente. L'évolution des
techniques va beaucoup nous aider.
Le phénomène important qui peut se
passer dans les années à venir, c'est la
multiplication des petits émetteurs de
magnétoscope, leur dissémination sur
le territoire. Si la faculté de Nanterre
avait eu un émetteur, la chaîne natio-
nale aurait pu décider brusquement
de se brancher dessus et d'envover les
images de Nanterre à tout le pavs. Ça
n'aurait pas manqué de cocasserie.
ral : à l'intérieur de ce cadre de pro-
grammes, chaque unité de produc-
tion choisirait ses émissions et la
forme qu'elle veut leur donner. Mais
il ne s'agil pas du tout d'un dosage.
Je voudrais revenir à la notion de tri-
bune permanente. L'évolution des
techniques va beaucoup nous aider.
Le phénomène important qui peut se
passer dans les années à venir, c'est la
multiplication des petits émetteurs de
magnétoscope, leur dissémination sur
le territoire. Si la faculté de Nanterre
avait eu un émetteur, la chaîne natio-
nale aurait pu décider brusquement
de se brancher dessus et d'envover les
images de Nanterre à tout le pavs. Ça
n'aurait pas manqué de cocasserie.
HENRI DE Tl^RENNE. On ne réalise
pas assez aujourd'hui comment la
Télévision, en devenant un instru-
ment courant, pourra transformer la
vie en société. Aujourd'hui, par exem-
ple, il v a l'heure religieuse, le di-
manche. On peut parfaitement ima-
giner qu'il y ait aussi l'heure des
cheminots, l'heure des paysans,
l'heure clé qui on voudra. Dans un
autre domaine, la Télévision peut de-
venir un instrument d'éducation pri-
vilégié. On expérimente aux Etats-
Unis un système qui permettrait à
chacun de téléphoner à un certain
numéro et de faire apparaître sur son
appareil de télé, un cours de chimie,
de mécanique... Enfin, avec le déve-
loppement des techniques et la mise
au point de petites caméras d'usage
simple, chacun devrait pouvoir deve-
nir un fabricant d'images utilisables
par la Télévision.
pas assez aujourd'hui comment la
Télévision, en devenant un instru-
ment courant, pourra transformer la
vie en société. Aujourd'hui, par exem-
ple, il v a l'heure religieuse, le di-
manche. On peut parfaitement ima-
giner qu'il y ait aussi l'heure des
cheminots, l'heure des paysans,
l'heure clé qui on voudra. Dans un
autre domaine, la Télévision peut de-
venir un instrument d'éducation pri-
vilégié. On expérimente aux Etats-
Unis un système qui permettrait à
chacun de téléphoner à un certain
numéro et de faire apparaître sur son
appareil de télé, un cours de chimie,
de mécanique... Enfin, avec le déve-
loppement des techniques et la mise
au point de petites caméras d'usage
simple, chacun devrait pouvoir deve-
nir un fabricant d'images utilisables
par la Télévision.
29
DE LA DECADENCE
DU SUFFRAGE
UNIVERSEL
«Élections, trahison» :
le slogan des étudiants recouvre une grande part de vérité.
61 % des électeurs ont plus de quarante ans
61 % des électeurs ont plus de quarante ans
et la majorité d'entre eux sont inactifs.
L'électorat français est numériquement dominé par ceux qui tremblent
devant le changement.
Pierre-Charles Pathé
LES élections législatives françaises ont confirmé une
fois de plus un fait capital de notre temps : la majo-
rité des électeurs des sociétés avancées est devenue fon-
damentalement conservatrice. Partout les assemblées
élues au suffrage universel, c'est-à-dire par les citoyens
de plus de 21 ans, se comportent à l'image de leurs
électeurs, en organes conservateurs ou même réaction-
naires. Elles ont cessé d'être ce moteur politico-social
qu'elles ont souvent été au xixe siècle et au début du
fois de plus un fait capital de notre temps : la majo-
rité des électeurs des sociétés avancées est devenue fon-
damentalement conservatrice. Partout les assemblées
élues au suffrage universel, c'est-à-dire par les citoyens
de plus de 21 ans, se comportent à l'image de leurs
électeurs, en organes conservateurs ou même réaction-
naires. Elles ont cessé d'être ce moteur politico-social
qu'elles ont souvent été au xixe siècle et au début du
XXe.
Dans tous les pays avancés l'initiative est passée aux
agents exécutifs, présidents, ministres et autres. Placés
devant les réalités d'une vie changeante, ceux-ci sont bien
obligés d'agir et de suppléer aux parlements inertes ou
récalcitrants. Une grande partie de la législation est
devenue désuète, très en deçà des besoins d'un pays
moderne. De vastes secteurs de l'activité sociale se trou-
agents exécutifs, présidents, ministres et autres. Placés
devant les réalités d'une vie changeante, ceux-ci sont bien
obligés d'agir et de suppléer aux parlements inertes ou
récalcitrants. Une grande partie de la législation est
devenue désuète, très en deçà des besoins d'un pays
moderne. De vastes secteurs de l'activité sociale se trou-
30
vent en marge de cette législation. En Grande-Bretagne
et aux Etats-Unis, pays de vieille tradition représentative,
les parlements ne sont plus que l'ombre de ce qu'ils ont
été.
et aux Etats-Unis, pays de vieille tradition représentative,
les parlements ne sont plus que l'ombre de ce qu'ils ont
été.
Comment expliquer ce bouleversement ? Pourquoi le
corps électoral des nations avancées est-il devenu en
majorité conservateur, alors que l'évolution réelle des
sociétés s'accélère sans cesse ?
corps électoral des nations avancées est-il devenu en
majorité conservateur, alors que l'évolution réelle des
sociétés s'accélère sans cesse ?
C'est une véritable rupture qui est intervenue depuis
la dernière guerre. La grande majorité des adultes a été
débordée par le mouvement de plus en plus rapide du
complexe technico-économique qui conditionne la
société. Elle le comprend mal. Elle sent surtout qu'il
menace les positions acquises. A l'approche de la quaran-
taine, la plupart sont pris de peur devant le changement.
la dernière guerre. La grande majorité des adultes a été
débordée par le mouvement de plus en plus rapide du
complexe technico-économique qui conditionne la
société. Elle le comprend mal. Elle sent surtout qu'il
menace les positions acquises. A l'approche de la quaran-
taine, la plupart sont pris de peur devant le changement.
Le changement est de tous les temps, mais il s'est
constamment accéléré. L'homo sapiens est apparu il y a
constamment accéléré. L'homo sapiens est apparu il y a
nombre de suffrages au 1er tour en 1958, 1962, 1967,
1968 (en millions de voix).
1968 (en millions de voix).
répartition des députés en 1958, 1968, 1967 et 1968.
1962
1967
1968
PC r
PSUCrtl
PSUCrtl
1967 1968
• (1) en 1958, Union des Forces Démocratiques • (2) U.N.R.-U.D.T. et républicains indépendants en 1962, V République en 1967, U.D.R. et répu-
blicains indépendant en 1968 • (3) en 1958, S.F.I.O., radicaux et centre gauche • (4) M.R.P., Centre National des Indépendants et divers modérés er
1958 et 1962, Centre Démocrate en 1967.
blicains indépendant en 1968 • (3) en 1958, S.F.I.O., radicaux et centre gauche • (4) M.R.P., Centre National des Indépendants et divers modérés er
1958 et 1962, Centre Démocrate en 1967.
Majorité dans la majorité
Après une guerre de position entre la majorité et l'opposition et les
élections fraîches et joyeuses de 1967, voici celles de la guerre
de mouvement : une majorité absolue pour l'U.D.R. (294 députés
gaullistes orthodoxes), une majorité sans précédent pour une majo-
rité (358 U.D.R. et Républicains Indépendants).
élections fraîches et joyeuses de 1967, voici celles de la guerre
de mouvement : une majorité absolue pour l'U.D.R. (294 députés
gaullistes orthodoxes), une majorité sans précédent pour une majo-
rité (358 U.D.R. et Républicains Indépendants).
Pendant la campagne électorale, menaçants ou inquiets, les
Partis sont crispés : l'U.D.R. tendue dans son anticommunisme, le
Centre plus mesuré dans ses condamnations que dans ses rallie-
ments, une Fédération toute préoccupée à persuader que des
ministres S.F.I.O., radicaux et conventionnels auraient su éviter
le surgissement des barricades, un Parti Communiste qui vante les
accords de Grenelle et qui distribue ses coups au « pouvoir totali-
taire du gaullisme» comme au P.S.U. et aux «groupes gau-
chistes manipulés par le ministère de l'Intérieur», le P.S.U. enfin,
Janus au double visage, mendésiste pour la province et « révolu-
tionnaire » pour le quartier Latin.
Partis sont crispés : l'U.D.R. tendue dans son anticommunisme, le
Centre plus mesuré dans ses condamnations que dans ses rallie-
ments, une Fédération toute préoccupée à persuader que des
ministres S.F.I.O., radicaux et conventionnels auraient su éviter
le surgissement des barricades, un Parti Communiste qui vante les
accords de Grenelle et qui distribue ses coups au « pouvoir totali-
taire du gaullisme» comme au P.S.U. et aux «groupes gau-
chistes manipulés par le ministère de l'Intérieur», le P.S.U. enfin,
Janus au double visage, mendésiste pour la province et « révolu-
tionnaire » pour le quartier Latin.
Au premier tour, la Ve République gagne des voix (9 663 605
suffrages contre 8448982 en 1967) et accroît son pourcentage
par rapport aux suffrages exprimés (43,6 % contre 37,7 % en 1967
et 36,3 %en 1962). Le P.S.U. progresse (874212 - 3,9%- contre
495412 - 2,2 % - en 1962), sans connaître le succès prédit : les
étudiants révolutionnaires, écartés des urnes par leur âge ou leur
dégoût, les ouvriers déçus par l'attitude du Parti communiste ne lui
ont pas fourni la clientèle qu'il recherchait. La Fédération de la
Gauche, absente de la crise de mai, perd en voix (3 654 003 en
1968, 4224110 en 1967) et en pourcentage (16,5 % contre
18,9 %). Le Parti Communiste, sans retomber au niveau de
1962, (3 992 431 suffrages) ne retrouve pas une part du gain de
1967 (4435357 voix en 1968 - 20 % - contre 5039032 en
suffrages contre 8448982 en 1967) et accroît son pourcentage
par rapport aux suffrages exprimés (43,6 % contre 37,7 % en 1967
et 36,3 %en 1962). Le P.S.U. progresse (874212 - 3,9%- contre
495412 - 2,2 % - en 1962), sans connaître le succès prédit : les
étudiants révolutionnaires, écartés des urnes par leur âge ou leur
dégoût, les ouvriers déçus par l'attitude du Parti communiste ne lui
ont pas fourni la clientèle qu'il recherchait. La Fédération de la
Gauche, absente de la crise de mai, perd en voix (3 654 003 en
1968, 4224110 en 1967) et en pourcentage (16,5 % contre
18,9 %). Le Parti Communiste, sans retomber au niveau de
1962, (3 992 431 suffrages) ne retrouve pas une part du gain de
1967 (4435357 voix en 1968 - 20 % - contre 5039032 en
1967 - 22.5 %). Mais d'ordinaire les reflux du P.C.F. se font
autrement : en 1958. lorsque le Parti perd 1 600 000 suffrages, les
bastions tiennent, les électeurs ralliés de fraîche date abandonnent.
En 1968, c'est au cœur même des concentrations ouvrières que le
Parti perd le maximum de suffrages, alors que s'accroissent l'abs-
tention et parfois le vote P.S.U. Quant au Centre P.D.M., formé de
partis qui totalisaient en 1958 près de six millions de voix, il passe
de 2 829 998 suffrages en 1967 (12,6 %) à 2 290 165 (10,34 %)
en 1968.
autrement : en 1958. lorsque le Parti perd 1 600 000 suffrages, les
bastions tiennent, les électeurs ralliés de fraîche date abandonnent.
En 1968, c'est au cœur même des concentrations ouvrières que le
Parti perd le maximum de suffrages, alors que s'accroissent l'abs-
tention et parfois le vote P.S.U. Quant au Centre P.D.M., formé de
partis qui totalisaient en 1958 près de six millions de voix, il passe
de 2 829 998 suffrages en 1967 (12,6 %) à 2 290 165 (10,34 %)
en 1968.
Partout, la poussée de l'U.D.R. est nette. Les droites se regrou-
pent sous son égide et entraînant une fraction de la gauche :
droite non-gaulliste et gauche perdent chacune plus de six cent mille
voix au profit de l'U.D.R. et les candidats gaullistes ont aisément
enlevé au premier tour des sièges chèrement disputés au deuxième
tour de 1967.
pent sous son égide et entraînant une fraction de la gauche :
droite non-gaulliste et gauche perdent chacune plus de six cent mille
voix au profit de l'U.D.R. et les candidats gaullistes ont aisément
enlevé au premier tour des sièges chèrement disputés au deuxième
tour de 1967.
A la veille du deuxième tour, la gauche espère un «sursaut
républicain», l'U.D.R. craint une démobilisation qui, comme en
1967. aurait transformé son premier succès en une victoire incer-
taine. Au contraire, le scrutin consacre la défaite des anti-gaullistes :
les candidatures uniques de la gauche ne retrouvent pas l'efficacité
de 1967 et ne réunissent pas l'ensemble des voix réparties au pre-
mier tour entre fédérés, P.S.U. et communistes. Une clientèle
radicale et socialiste s'écarte du communisme au profit de l'U.D.R.
D'un autre côté une fraction de l'électoral du P.C.F. et du P.S.U.
refuse de cautionner l'alliance avec la gauche modérée, lui préfé-
rant l'abstention, voire même, dans certains cas, le gaullisme.
républicain», l'U.D.R. craint une démobilisation qui, comme en
1967. aurait transformé son premier succès en une victoire incer-
taine. Au contraire, le scrutin consacre la défaite des anti-gaullistes :
les candidatures uniques de la gauche ne retrouvent pas l'efficacité
de 1967 et ne réunissent pas l'ensemble des voix réparties au pre-
mier tour entre fédérés, P.S.U. et communistes. Une clientèle
radicale et socialiste s'écarte du communisme au profit de l'U.D.R.
D'un autre côté une fraction de l'électoral du P.C.F. et du P.S.U.
refuse de cautionner l'alliance avec la gauche modérée, lui préfé-
rant l'abstention, voire même, dans certains cas, le gaullisme.
Le mode de scrutin, le découpage électoral, le jeu des
désistements ont considérablement amplifié le mouvement : ai.
premier tour, les Républicains indépendants totalisent sensible-
ment le même nombre de voix que le P.S.U. ; ils trouvent 64 sièges
au deuxième tour, le P.S.U. n'a pas d'élu. Avec 48 % des suffrages,
la majorité a emporté 75 % des mandats.
désistements ont considérablement amplifié le mouvement : ai.
premier tour, les Républicains indépendants totalisent sensible-
ment le même nombre de voix que le P.S.U. ; ils trouvent 64 sièges
au deuxième tour, le P.S.U. n'a pas d'élu. Avec 48 % des suffrages,
la majorité a emporté 75 % des mandats.
3?
1an:40F-Étranger:45F(1)
Étudiants : 30 F
Étudiants : 30 F
6 mois : 22 F Étudiants : 18 F
33
Veuillez adresser à M.
Profession
Demeurant
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Règlement effectué ce jour par (2)
Règlement effectué ce jour par (2)
D C.C.P. (3) D Chèque D Mandat
de la somme de F.
de la somme de F.
( 1 ) Pour l'étranger, nous consulter pour les envois
par avion.
par avion.
(2) Cochez la case correspondante.
(3) C.C.P. 22.905-90 - Paris.
universel.
Les étudiants qui ont crié « élections-trahison » à
Nom et adresse de votre
marchand de journaux
ou son cachet
ies entoure, ns paraiyseroi
suffrage universel.
suffrage universel.
34
à découper
(Service Abonnements)
25, boulevard Saint-Martin
75-PARiS 3*
ie ga
7) ei
13.6
esse
:onn
les u
jde fi
hère
7) ei
13.6
esse
:onn
les u
jde fi
hère
i, pe-------.....-------
pourcentage (16,5
premier tour, les Républicains indépendants totalisent sensible-
cinq cents siècles, Archimède vivait il y a vingt-deux
siècles, la révolution galiléenne date de trois siècles, la
radio est vieille de 70 ans, l'ère atomique de 25 ans et
l'astronautique de 11 ans.
siècles, la révolution galiléenne date de trois siècles, la
radio est vieille de 70 ans, l'ère atomique de 25 ans et
l'astronautique de 11 ans.
Pendant longtemps cette évolution accélérée n'a
eu que des conséquences quantitatives. Elle n'était pas
assez rapide pour qu'au cours d'une vie adulte (50 ans
au maximum) la valeur de l'expérience accumulée soit
remise en question. Cette expérience restait l'arme imbat-
table des aînés dans la vie sociale.
eu que des conséquences quantitatives. Elle n'était pas
assez rapide pour qu'au cours d'une vie adulte (50 ans
au maximum) la valeur de l'expérience accumulée soit
remise en question. Cette expérience restait l'arme imbat-
table des aînés dans la vie sociale.
Puis la vitesse d'évolution a franchi un seuil à partir
duquel la société subit une véritable mutation. C'est le
seuil que fixent les rythmes de croissance et de vieillis-
sement de l'être humain. Aujourd'hui, comme au temps
des pharaons, il faut vingt ans pour former un homme
et celui-ci perd ensuite sa malléabilité spirituelle à un
rythme rapide. Quand son acquit intellectuel se périme,
il a beaucoup de peine à le renouveler. A l'époque de la
deuxième guerre mondiale, il est apparu que l'acquit
technologique se périmait en beaucoup moins de 50 ans.
La supériorité de l'âge a commencé à s'amenuiser.
L'expérience acquise ne gardait sa pleine valeur que sur
le plan des relations humaines.
duquel la société subit une véritable mutation. C'est le
seuil que fixent les rythmes de croissance et de vieillis-
sement de l'être humain. Aujourd'hui, comme au temps
des pharaons, il faut vingt ans pour former un homme
et celui-ci perd ensuite sa malléabilité spirituelle à un
rythme rapide. Quand son acquit intellectuel se périme,
il a beaucoup de peine à le renouveler. A l'époque de la
deuxième guerre mondiale, il est apparu que l'acquit
technologique se périmait en beaucoup moins de 50 ans.
La supériorité de l'âge a commencé à s'amenuiser.
L'expérience acquise ne gardait sa pleine valeur que sur
le plan des relations humaines.
Elections, trahison ?
Depuis une dizaine d'années, l'évolution de la base
technico-économique est devenue si rapide qu'elle
entraine en quelques années la transformation de rap-
ports sociaux séculaires. Les pratiques traditionnelles du
commandement deviennent impossibles. L'autorité des
aînés en est ébranlée et, si leur expérience humaine reste
précieuse dans beaucoup de cas, elle a définitivement
perdu la suprématie qui a été la sienne pendant des millé-
naires. Dès l'âge de 35 ans ou 40 ans, la plupart des indi-
vidus ont l'impression que leur situation à peine acquise
est menacée par l'évolution. Ils réagissent en conserva-
teurs et votent dans ce sens.
technico-économique est devenue si rapide qu'elle
entraine en quelques années la transformation de rap-
ports sociaux séculaires. Les pratiques traditionnelles du
commandement deviennent impossibles. L'autorité des
aînés en est ébranlée et, si leur expérience humaine reste
précieuse dans beaucoup de cas, elle a définitivement
perdu la suprématie qui a été la sienne pendant des millé-
naires. Dès l'âge de 35 ans ou 40 ans, la plupart des indi-
vidus ont l'impression que leur situation à peine acquise
est menacée par l'évolution. Ils réagissent en conserva-
teurs et votent dans ce sens.
Il ne s'agit donc pas du classique conflit de générations.
Pour la première fois dans l'histoire, la société doit subir
une transformation radicale en un temps bien plus court
que celui de la vie active des individus.
Pour la première fois dans l'histoire, la société doit subir
une transformation radicale en un temps bien plus court
que celui de la vie active des individus.
Pour la première fois, la jeunesse est réellement appelée
à gagner. Les vieilles générations le sentent confusément
et, prises de panique devant cette chute prochaine de
statut, elles se réfugient dans tous les conservatismes, y
compris le chauvinisme le plus étroit.
à gagner. Les vieilles générations le sentent confusément
et, prises de panique devant cette chute prochaine de
statut, elles se réfugient dans tous les conservatismes, y
compris le chauvinisme le plus étroit.
Le phénomène a de graves implications. Il remet en
question la valeur du suffrage universel tel qu'il est pra-
tiqué jusqu'ici. La composition d'âge des populations
avancées accorde une très forte majorité aux électeurs
de plus de 40 ans. La baisse constante de la mortalité
depuis un siècle a sensiblement renforcé les cohortes
âgées de plus de 60 ans, aggravant ainsi la crise du suffrage
universel.
question la valeur du suffrage universel tel qu'il est pra-
tiqué jusqu'ici. La composition d'âge des populations
avancées accorde une très forte majorité aux électeurs
de plus de 40 ans. La baisse constante de la mortalité
depuis un siècle a sensiblement renforcé les cohortes
âgées de plus de 60 ans, aggravant ainsi la crise du suffrage
universel.
Les étudiants qui ont crié « élections-trahison » à
l'annonce de la dissolution de l'Assemblée nationale
n'avaient pas tort de leur point de vue. L'électoral fran-
l'annonce de la dissolution de l'Assemblée nationale
n'avaient pas tort de leur point de vue. L'électoral fran-
çais est numériquement dominé par ceux qui tremblent
devant le changement. Soixante et un pour cent des élec-
teurs ont plus de 40 ans et la majorité d'entre eux sont
inactifs.
devant le changement. Soixante et un pour cent des élec-
teurs ont plus de 40 ans et la majorité d'entre eux sont
inactifs.
Chez certains peuples, les Anglo-saxons par exemple,
cette contradiction fondamentale peut ne pas aller
jusqu'au drame. Leur organisation sociale est suffisam-
ment décentralisée et morcelée pour que les conflits soient
atomisés et que les adaptations les plus urgentes se fassent
empiriquement sur le plan local. Par contre, dans le
cadre unitaire et hiérarchisé de la France, la non-repré-
sentativité des assemblées conduit le pavs à s'en remettre
à quelque despote éclairé, capable de rassurer le
parti de la peur tout en effectuant le minimum de
réformes indispensable à la marche de l'Etat. Mais cette
personnalisation du pouvoir, survivance des institutions
primitives, n'est plus qu'un expédient dangereux pour
les sociétés avancées.
cette contradiction fondamentale peut ne pas aller
jusqu'au drame. Leur organisation sociale est suffisam-
ment décentralisée et morcelée pour que les conflits soient
atomisés et que les adaptations les plus urgentes se fassent
empiriquement sur le plan local. Par contre, dans le
cadre unitaire et hiérarchisé de la France, la non-repré-
sentativité des assemblées conduit le pavs à s'en remettre
à quelque despote éclairé, capable de rassurer le
parti de la peur tout en effectuant le minimum de
réformes indispensable à la marche de l'Etat. Mais cette
personnalisation du pouvoir, survivance des institutions
primitives, n'est plus qu'un expédient dangereux pour
les sociétés avancées.
Un déséquilibre fondamental
Nous devons faire face à un phénomène sans précédent.
Dès sa maturité, l'individu se sent maintenant étranger
au monde qui se façonne sans cesse autour de lui. Pour
s'y maintenir, il lui faudrait renouveler ses idées et
connaissances plusieurs fois au cours de sa vie consciente.
Or, très peu y parviennent actuellement. Le jeune homme
assimile facilement des notions que ses ancêtres avaient
eu beaucoup de mal à acquérir parce que, dès son ber-
ceau, il a trouvé la culture de son temps et l'a intégrée
naturellement, en formant son organisation cérébrale.
Mais le système de connexions neuroniques est fixé avant
l'âge de vingt ans. Il devient ensuite de plus en plus diffi-
cile de renouveler des connaissances et des idées dont la
plupart pourtant se périment en dix ou quinze ans.
Dès sa maturité, l'individu se sent maintenant étranger
au monde qui se façonne sans cesse autour de lui. Pour
s'y maintenir, il lui faudrait renouveler ses idées et
connaissances plusieurs fois au cours de sa vie consciente.
Or, très peu y parviennent actuellement. Le jeune homme
assimile facilement des notions que ses ancêtres avaient
eu beaucoup de mal à acquérir parce que, dès son ber-
ceau, il a trouvé la culture de son temps et l'a intégrée
naturellement, en formant son organisation cérébrale.
Mais le système de connexions neuroniques est fixé avant
l'âge de vingt ans. Il devient ensuite de plus en plus diffi-
cile de renouveler des connaissances et des idées dont la
plupart pourtant se périment en dix ou quinze ans.
Pour pallier à cette inadaptation, il faudrait avant
tout transformer la conception même de l'éducation.
L'éducation permanente jusqu'à la vieillesse devrait
devenir la règle, et elle ne devrait pas se borner aux
techniques. Il s'agit là d'une révolution formidable dans
un monde où l'autorité des titres et des statuts garde un
caractère sacré. Elle ne se fera pas en un jour.
tout transformer la conception même de l'éducation.
L'éducation permanente jusqu'à la vieillesse devrait
devenir la règle, et elle ne devrait pas se borner aux
techniques. Il s'agit là d'une révolution formidable dans
un monde où l'autorité des titres et des statuts garde un
caractère sacré. Elle ne se fera pas en un jour.
En attendant, pour atténuer le déséquilibre fonda-
mental du suffrage universel actuel, il conviendrait
d'abaisser sensiblement l'âge électoral, le ramener à
18 ans ou mieux à 16 ans. Une telle proposition a de
quoi effrayer les traditionnalistes. Faut-il cependant
rappeler que 27 % des électeurs français ont plus de
60 ans et qu'ils sont sensiblement plus nombreux que
les électeurs de moins de 30 ans. Au début de ce siècle
c'était l'inverse. Même avec l'âge électoral à 16 ans, les
électeurs de 40 ans et au-dessus conserveront la majorité
absolue. Tant que durera leur inadaptation au monde qui
les entoure, ils paralyseront dans une large mesure le
suffrage universel.
mental du suffrage universel actuel, il conviendrait
d'abaisser sensiblement l'âge électoral, le ramener à
18 ans ou mieux à 16 ans. Une telle proposition a de
quoi effrayer les traditionnalistes. Faut-il cependant
rappeler que 27 % des électeurs français ont plus de
60 ans et qu'ils sont sensiblement plus nombreux que
les électeurs de moins de 30 ans. Au début de ce siècle
c'était l'inverse. Même avec l'âge électoral à 16 ans, les
électeurs de 40 ans et au-dessus conserveront la majorité
absolue. Tant que durera leur inadaptation au monde qui
les entoure, ils paralyseront dans une large mesure le
suffrage universel.
Pierre-Charles Pathé
H i '
35
Les urnes aux champs
Le grand espoir du inois de mai
n'a pas bouleversé l'Essonne.
Dans cette petite circonscription rurale des environs de Paris,
Dans cette petite circonscription rurale des environs de Paris,
indifférente ou grincheuse,
la vieille France est allée aux urnes.
la vieille France est allée aux urnes.
Philippe Gavi
L'ESSONNE. Circonscription rurale. Préau d'une
école. Séance électorale UD.R. France. France.
France. Un film commenté par Michel Droit. Premier
temps : ce joli mai qui avait si bien commencé : champs,
petits villages, tracteurs. La France prospère au travail.
Tout n'allait pas si mal quand...
école. Séance électorale UD.R. France. France.
France. Un film commenté par Michel Droit. Premier
temps : ce joli mai qui avait si bien commencé : champs,
petits villages, tracteurs. La France prospère au travail.
Tout n'allait pas si mal quand...
Deuxième temps : des provocateurs étrangers. Gros
plan sur un barbu hirsute. Gros plan sur de jeunes
« dévoyés » qui lancent des cailloux. Les forces de l'ordre
accablées devant ce déferlement.
plan sur un barbu hirsute. Gros plan sur de jeunes
« dévoyés » qui lancent des cailloux. Les forces de l'ordre
accablées devant ce déferlement.
Troisième temps : « Le discours du général de Gaulle,
la manifestation de la Concorde à l'Etoile. La France
se ressaisit. Haro sur le totalitarisme. La France va se
prononcer. Aux urnes citoyens ».
la manifestation de la Concorde à l'Etoile. La France
se ressaisit. Haro sur le totalitarisme. La France va se
prononcer. Aux urnes citoyens ».
Jamais l'Essonne n'a été aussi tranquille. A cinq jours
des élections', pas un attroupement dans les rues, pas une
pancarte, pas un orateur dans la rue. Les vieux paysans
continuent à bêcher. Ils ont 75 ans, deux guerres mon-
diales et un Front populaire derrière eux : ils continuent
à bêcher.
des élections', pas un attroupement dans les rues, pas une
pancarte, pas un orateur dans la rue. Les vieux paysans
continuent à bêcher. Ils ont 75 ans, deux guerres mon-
diales et un Front populaire derrière eux : ils continuent
à bêcher.
Mardi 18 juin : Réunion électorale communiste à
Etampes, au théâtre municipal. Age moyen : le demi-
siècle. On parle de « drapeau rouge fraternellement
croisé avec le drapeau tricolore». On agite les thèmes
classiques : la collusion entre les ministres gaullistes et
Etampes, au théâtre municipal. Age moyen : le demi-
siècle. On parle de « drapeau rouge fraternellement
croisé avec le drapeau tricolore». On agite les thèmes
classiques : la collusion entre les ministres gaullistes et
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les banques d'affaires, le pouvoir personnel. Quelqu'un
pose une question. « Attends, camarade, on te prépare la
réponse ».
pose une question. « Attends, camarade, on te prépare la
réponse ».
Mercredi 19 juin. Un ouvrier agricole en rase cam-
pagne.
pagne.
— Que pensez-vous des élections ?
— Moi, tout ce que je demande c'est que de Gaulle
reste. De Gaulle ne fait pas de politique, lui ! Et moi,
je ne suis qu'un ouvrier agricole. Je suis logé par la
patronne. Je gagne 2,45 F de l'heure. Par mois, ça me fait
550 F à peine. Je paye mon loyer, ma lumière, mon eau.
Assurances sociales évidemment. Il me reste 42 000 F.
Il paraît qu'à cause des événements que nous serons
augmentés : 3 F de l'heure.
reste. De Gaulle ne fait pas de politique, lui ! Et moi,
je ne suis qu'un ouvrier agricole. Je suis logé par la
patronne. Je gagne 2,45 F de l'heure. Par mois, ça me fait
550 F à peine. Je paye mon loyer, ma lumière, mon eau.
Assurances sociales évidemment. Il me reste 42 000 F.
Il paraît qu'à cause des événements que nous serons
augmentés : 3 F de l'heure.
— Si les prix augmentent ?
— Ce sera la faute de ceux qui ont fait du grabuge.
— Que représente de Gaulle pour vous ?
— De Gaulle, c'est un ancien combattant, comme moi.
Et puis, je n'ai pas à me plaindre de lui.
Et puis, je n'ai pas à me plaindre de lui.
— Que pensez-vous des grévistes ?
— Ils ont fait du grabuge. C'est inadmissible.
— La politique ?
— Moi, je ne suis pas politicien pour quatre sous.
Je fais mon boulot. Je pars le matin. Je vais à la soupe
à midi, je reprends à 13 h 30, je reviens le soir à 18 h 30.
Je fais mon boulot. Je pars le matin. Je vais à la soupe
à midi, je reprends à 13 h 30, je reviens le soir à 18 h 30.
Je suis tranquille. J'ai mon jardin et tout ça. Ce n'est pas
comme en ville. Ici je lais mes légumes.
comme en ville. Ici je lais mes légumes.
— Allez-vous au cinéma ?
— Jamais. Il faudrait aller à 7 ou 8 km d'ici à
Millv ou à Corbeil. J'ai 43 ans. Eh bien ! Sans vous
mentir, ça fait 25 ans que je ne suis pas entré dans une salle
de spectacle.
Millv ou à Corbeil. J'ai 43 ans. Eh bien ! Sans vous
mentir, ça fait 25 ans que je ne suis pas entré dans une salle
de spectacle.
— Connaisse/-vous les candidats qui se présentent dans
votre circonscription ?
votre circonscription ?
— Non. Tous les partis se ressemblent. La politique,
c'est mon porte-monnaie, un point c'est tout.
c'est mon porte-monnaie, un point c'est tout.
Un petit monsieur
Vendredi 20 juin. La Ferté-Alais. Un petit monsieur
descend la grand'rue, une valise à la main. Il monte dans
descend la grand'rue, une valise à la main. Il monte dans
ma voiture. Il vient de passer le week-end clans sa bicoque
après une semaine passée dans son magasin de quincail-
lerie.
après une semaine passée dans son magasin de quincail-
lerie.
— Oh ! les élections, je ne sais pas ce que ça va donner.
D'ailleurs, moi, je viens ici dans ma maison pour passer
le week-end. Je ne vais pas m'enfermer trois jours à
Colombes pour voter. Au deuxième tour peut-être. Parce
que moi, voyez-vous je suis communiste et en même temps
gaulliste. Mais cette fois-ci, je donne raison à de Gaulle.
On peut faire des manifestations, des petites manifesta-
tions, mais pas plus. On rie gagne rien à être violent. Moi,
par exemple, je me suis formé tout seul. J'ai perdu mes
parents à l'âge de 9 ans, et vous savez, j'ai fait un drôle
de chemin. Doucement. Sans brutalité. Non vraiment,
les étudiants et les ouvriers, je ne les comprends pas.
D'ailleurs, moi, je viens ici dans ma maison pour passer
le week-end. Je ne vais pas m'enfermer trois jours à
Colombes pour voter. Au deuxième tour peut-être. Parce
que moi, voyez-vous je suis communiste et en même temps
gaulliste. Mais cette fois-ci, je donne raison à de Gaulle.
On peut faire des manifestations, des petites manifesta-
tions, mais pas plus. On rie gagne rien à être violent. Moi,
par exemple, je me suis formé tout seul. J'ai perdu mes
parents à l'âge de 9 ans, et vous savez, j'ai fait un drôle
de chemin. Doucement. Sans brutalité. Non vraiment,
les étudiants et les ouvriers, je ne les comprends pas.
— Vous n'aimeriez pas une société socialiste où l'on
ne paye pas le logement ?
ne paye pas le logement ?
— ' Vous savez j'ai une vieille baraque, je paye 100 F
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tous les trimestres et elle ne tait pas de réparations.
— Combien gagnez-vous ?
— Aux alentours de 700 F par mois. Mais j'ai perdu ma
femme, je suis tout seul. J'ai hérité de cette baraque à la
Ferté-Alais. Il ne me faut pas grand-chose pour vivre.
femme, je suis tout seul. J'ai hérité de cette baraque à la
Ferté-Alais. Il ne me faut pas grand-chose pour vivre.
Un lycéen
Vendredi 20 juin, 15 heures. Dans un café de la Ferté-
Alais. Un lycéen de 17 ans.
Alais. Un lycéen de 17 ans.
— Que pensez-vous de ce qui se passe à Paris ?
— Que voulez-vous qu'on en pense ici ?
— Vous sentez-vous solidaire des étudiants du Quartier
Latin ?
Latin ?
— A mon âge, il n'y a pas d'autre façon de revendiquer.
— Qu'en disent-ils à la Ferté-Alais ?
— Ici, les gens vivent éloignés de tout. Ce qu'ils voient
c'est qu'ils ne trouvent plus de marchandises dans les
épiceries.
c'est qu'ils ne trouvent plus de marchandises dans les
épiceries.
— Vous connaissez les candidats à la députation ?
— Oui, le P.S.U. Je suis allé à une de ses réunions.
Ça ne m'a pas tellement intéressé : il a simplement sur-
volé les problèmes de la commune.
Ça ne m'a pas tellement intéressé : il a simplement sur-
volé les problèmes de la commune.
Survient la mère du lycéen alors que nous parlions de
Cohn Bendit. Réaction immédiate de la dame :
Cohn Bendit. Réaction immédiate de la dame :
— L'Allemand ! on aurait pu le mettre plus tôt aux
frontières.
frontières.
— On dit qu'il était Juif ?
— Pour moi, Monsieur, il v a des bons Juifs. Ce n'est
pas le problème. Cohn Bendit, c'est une affaire de valeurs
morales. On ne brûle pas les monuments. Et regardez les
augmentations ! Vous trouvez cela moral que les gens
simples paient les pots cassés. Crovez-moi, vu mon âge,
j'ai les idées justes. J'en ai vu des guerres... Ça profite
aux malins.
pas le problème. Cohn Bendit, c'est une affaire de valeurs
morales. On ne brûle pas les monuments. Et regardez les
augmentations ! Vous trouvez cela moral que les gens
simples paient les pots cassés. Crovez-moi, vu mon âge,
j'ai les idées justes. J'en ai vu des guerres... Ça profite
aux malins.
— Que pensez-vous du communisme ?
— Avant mai, je trouvais que c'était bien. Maintenant
non, c'est totalitaire. Les Français n'ont pas besoin de
ça. Ils sont éduqués, eux.
non, c'est totalitaire. Les Français n'ont pas besoin de
ça. Ils sont éduqués, eux.
Un peintre ouvrier
Samedi 22 juin 1968, 21 heures, la grande nuit de Viry-
Châtillon dans le cadre féerique du parc nautique. Bal-
lets avec un orchestre et les majorettes de Paris. Défilé
de bateaux illuminés, ski nautique. Les élections ? Per-
sonne ne veut en parler. Pourtant un quadragénaire qui
se dit peintre-ouvri,er...
Châtillon dans le cadre féerique du parc nautique. Bal-
lets avec un orchestre et les majorettes de Paris. Défilé
de bateaux illuminés, ski nautique. Les élections ? Per-
sonne ne veut en parler. Pourtant un quadragénaire qui
se dit peintre-ouvri,er...
— Les Parisiens sont tous des fainéants. Si j'avais été
au Quartier Latin, j'aurais foutu de la mort aux rats.
J'aurais éliminé tout le monde. Je les aurais mis sur un
bateau. J'aurais fait sauter le bateau.
au Quartier Latin, j'aurais foutu de la mort aux rats.
J'aurais éliminé tout le monde. Je les aurais mis sur un
bateau. J'aurais fait sauter le bateau.
— Et les grévistes ?
— C'est un Allemand qui a tout déclenché. S'il n'était
pas venu, les ouvriers n'auraient pas bougé. Parce
qu'avant de se mettre en grève, on demande une augmen-
tation à son patron.
pas venu, les ouvriers n'auraient pas bougé. Parce
qu'avant de se mettre en grève, on demande une augmen-
tation à son patron.
— Y a t-il des grèves ici ?
— Ici, il n'y a que des Français. Des vrais Français. Les
vrais Français, quand ils sont mécontents ils revendiquent
correctement.
vrais Français, quand ils sont mécontents ils revendiquent
correctement.
— Voterez-vous dimanche ?
— Ah ! je pense bien !
— Vous voterez pour un parti politique ?
— Je voterai pour qui me plaît mais sans idée réelle-
ment politique. Attention : je voterai Français, j'ai mon
idée là-dessus. En tout cas, je peux vous dire que je
ne voterai pas pour les grévistes. Parce que la grève, moi,
je ne l'ai jamais faite.
ment politique. Attention : je voterai Français, j'ai mon
idée là-dessus. En tout cas, je peux vous dire que je
ne voterai pas pour les grévistes. Parce que la grève, moi,
je ne l'ai jamais faite.
— >Que pensez-vous du socialisme ?
Des curieux s'approchent. L'un d'eux, le visage creusé,
ancien sapeur-pompier intervient :
ancien sapeur-pompier intervient :
— Le socialisme ? Ah ! ça c'est une idéologie qui devrait
avoir un grand succès. Malheureusement, on se sert du
socialisme. Je ne pense pas du tout que les gens qui se
disent socialistes le soient. Les socialistes sont souvent
ceux qui ne le disent pas.
avoir un grand succès. Malheureusement, on se sert du
socialisme. Je ne pense pas du tout que les gens qui se
disent socialistes le soient. Les socialistes sont souvent
ceux qui ne le disent pas.
— Le socialisme est-il possible avec de Gaulle ?
— Pourquoi pas. Il est bien plus coco que les cocos.
C'est certain. La participation, ils en rigolent mais ce
n'est pas si bête que cela. Pour l'instant, ça va détruire
un grand nombre de petits patrons. Les petits vont être
lésés une fois encore.
C'est certain. La participation, ils en rigolent mais ce
n'est pas si bête que cela. Pour l'instant, ça va détruire
un grand nombre de petits patrons. Les petits vont être
lésés une fois encore.
Une femme au foyer
Dimanche matin, Mennecy, un immeuble de bon stan-
ding. Le studio, 600 F clés en main. Bon emplacement.
Dans le hall, la femme d'un ingénieur.
ding. Le studio, 600 F clés en main. Bon emplacement.
Dans le hall, la femme d'un ingénieur.
— Je syis une femme au foyer. J'élève mes enfants.
— Les événements de mai ?
— Il y a du pour et du contre. Des réformes sont
indispensables. Mais il y a les extrémistes. Les élections
sont prématurées. Il aurait fallu attendre un peu que
l'ordre revienne, que les gens sachent exactement pour-
quoi ils revendiquent. La Télé par exemple. Je ne sais
pas exactement ce que les journalistes revendiquent. De
toute façon, je suis assez mal placée pour juger. Mon
mari et moi, nous n'avons jamais eu de problèmes. Mon
mari est cadre dans un centre atomique. Pour nous, la vie,
c'est notre petit horizon et puis c'est tout. Tant que le
bâtiment va, tout va. Pourtant, tous ces problèmes, ça
m'intrigue. On parle de socialisme, de révolution. J'ai
l'impression que c'est bien.
indispensables. Mais il y a les extrémistes. Les élections
sont prématurées. Il aurait fallu attendre un peu que
l'ordre revienne, que les gens sachent exactement pour-
quoi ils revendiquent. La Télé par exemple. Je ne sais
pas exactement ce que les journalistes revendiquent. De
toute façon, je suis assez mal placée pour juger. Mon
mari et moi, nous n'avons jamais eu de problèmes. Mon
mari est cadre dans un centre atomique. Pour nous, la vie,
c'est notre petit horizon et puis c'est tout. Tant que le
bâtiment va, tout va. Pourtant, tous ces problèmes, ça
m'intrigue. On parle de socialisme, de révolution. J'ai
l'impression que c'est bien.
— Avant les événements, vous préoccupiez-vous des
problèmes ouvriers ?
problèmes ouvriers ?
— Pas vraiment. Mais en tant que cadre dans une
usine, mon mari me parlait de ses rapports avec les
ouvriers. Il faut d'avantage d'entente, cette fameuse
cogestion...
usine, mon mari me parlait de ses rapports avec les
ouvriers. Il faut d'avantage d'entente, cette fameuse
cogestion...
38
Dessiîi à la plume de Jules
— Connaissez-vous le candidat P.S.U. de votre cir-
conscription ?
conscription ?
— Absolument pas. Et d'ailleurs je n'irais pas voter
dimanche. Je vous l'ai dit, ces élections arrivent trop tôt.
Mon mari a ramené de Paris l'autre soir « Action » le
journal des étudiants. Excusez-moi d'être grossière, mais
je suis d'accord avec les étudiants, ces élections sont un
« piège à cons ».
dimanche. Je vous l'ai dit, ces élections arrivent trop tôt.
Mon mari a ramené de Paris l'autre soir « Action » le
journal des étudiants. Excusez-moi d'être grossière, mais
je suis d'accord avec les étudiants, ces élections sont un
« piège à cons ».
Dimanche 23 |uin. L'agriculteur, le commerçant, la
mère du lycéen, le peintre et tous ceux qui ne font pas
de politique ou la laissent aux politiciens, tous ceux-là
se dirigent vers les urnes. Essonne. Premier tour. Arpajon.
mère du lycéen, le peintre et tous ceux qui ne font pas
de politique ou la laissent aux politiciens, tous ceux-là
se dirigent vers les urnes. Essonne. Premier tour. Arpajon.
Etampes. U.D.R. : 29931 voix; Parti Communiste :
19784; P.D.M. : 7896; Fédération : 4508; P.S.U. :
3354 ; Technique et Démocratie : 1 195. Ballotage. Sur
le devant d'un bureau de vote, un étudiant qui a vécu les
barricades crie sa rancoeur : « Ils gagnent, les vieillards,
les médaillés, les anciens combattants, les rhumatisants,
les combinards, les trafiquants, les menteurs, les vendeurs
de promesses, la canaille marchande, la vieille France,
ceux qui ont un fusil à la place du cœur ». « Tu es jeune »,
lui jette un témoin. Comme s'il y avait fierté à ne plus
l'être.
19784; P.D.M. : 7896; Fédération : 4508; P.S.U. :
3354 ; Technique et Démocratie : 1 195. Ballotage. Sur
le devant d'un bureau de vote, un étudiant qui a vécu les
barricades crie sa rancoeur : « Ils gagnent, les vieillards,
les médaillés, les anciens combattants, les rhumatisants,
les combinards, les trafiquants, les menteurs, les vendeurs
de promesses, la canaille marchande, la vieille France,
ceux qui ont un fusil à la place du cœur ». « Tu es jeune »,
lui jette un témoin. Comme s'il y avait fierté à ne plus
l'être.
Philippe Gavi
39
39
LES MURS
DE
PARIS
PARIS
Sur les murs de Paris et de sa banlieue, les
affiches ont fleuri. Dans l'ex-école des Beaux-
Arts, transformée en «atelier populaire» des
peintres célèbres, des étudiants travaillent sur
des idées qui leur sont le plus souvent données
par des ouvriers en grève. Les projets sont
discutés par tous et exécutés en commun. Le
procédé technique est très simple : la sérigra-
phie. Aujourd'hui « Vatelier populaire » des
Beaux-Arts est investi par la police. D'autres
ateliers ont pris le relais. A New York les col-
lectionneurs ont ouvert (tune bourse aux
affiches. »
affiches ont fleuri. Dans l'ex-école des Beaux-
Arts, transformée en «atelier populaire» des
peintres célèbres, des étudiants travaillent sur
des idées qui leur sont le plus souvent données
par des ouvriers en grève. Les projets sont
discutés par tous et exécutés en commun. Le
procédé technique est très simple : la sérigra-
phie. Aujourd'hui « Vatelier populaire » des
Beaux-Arts est investi par la police. D'autres
ateliers ont pris le relais. A New York les col-
lectionneurs ont ouvert (tune bourse aux
affiches. »
40
v-?.
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21 ANS
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S. foliatchek
Les grévistes
Julien Fanjeaux
La grève est finie. La majorité des travailleurs
en a décidé ainsi au cours de votes à bulletin
secret. Pour beaucoup, le combat était déjà
terminé avec le «protocole de Grenelle». Per-
sonne ne se déclare vraiment satisfait des résul-
tats de la grève pourtant, tout le monde recon-
naît qu'elle fut la plus importante que la France
ait connue. Julien Fanjeaux, au cours de son
enquête dans quelques grandes entreprises
parisiennes, a rencontré les mécontents. Il
rapporte leur point de vue.
en a décidé ainsi au cours de votes à bulletin
secret. Pour beaucoup, le combat était déjà
terminé avec le «protocole de Grenelle». Per-
sonne ne se déclare vraiment satisfait des résul-
tats de la grève pourtant, tout le monde recon-
naît qu'elle fut la plus importante que la France
ait connue. Julien Fanjeaux, au cours de son
enquête dans quelques grandes entreprises
parisiennes, a rencontré les mécontents. Il
rapporte leur point de vue.
Chez Renault un vote au cours de la grève
- - —
48
1
8
S
m
8
S
m
.9
3
ILS étaient dix millions de grévistes. C'est le plus
puissant mouvement de lutte sociale — sous cette
(orme — que la France ait connu. On s'accorde géné-
ralement là-dessus, en rappelant qu'il n'y eut, en
1936, que 3 millions de grévistes, et qu'en 47, 51 ou 55
les mouvements de grèves — importants — restèrent assez
dispersés. Ils occupaient les usines, peignant sur les murs :
« Nous irons jusqu'au bout », hissaient sur les toits des
drapeaux rouges. Ils se sentaient forts, maîtres du terrain.
Et puis au moment de livrer bataille, leurs chefs, leurs
généraux, leurs responsables leur ont dit : « Rentrez chez
vous, nous avons arrangé les choses avec l'adversaire,
l'ordre doit revenir ». Certains sont rentrés, sans très
bien comprendre, confiants. D'autres ont voulu protester :
on les a fait taire, on les a insultés, exclus. D'autres enfin
ont voulu se battre, on les a laissés seuls, le patronat les
a encerclés, les a lorcés à se rendre. Trois fois les C.R.S.
puissant mouvement de lutte sociale — sous cette
(orme — que la France ait connu. On s'accorde géné-
ralement là-dessus, en rappelant qu'il n'y eut, en
1936, que 3 millions de grévistes, et qu'en 47, 51 ou 55
les mouvements de grèves — importants — restèrent assez
dispersés. Ils occupaient les usines, peignant sur les murs :
« Nous irons jusqu'au bout », hissaient sur les toits des
drapeaux rouges. Ils se sentaient forts, maîtres du terrain.
Et puis au moment de livrer bataille, leurs chefs, leurs
généraux, leurs responsables leur ont dit : « Rentrez chez
vous, nous avons arrangé les choses avec l'adversaire,
l'ordre doit revenir ». Certains sont rentrés, sans très
bien comprendre, confiants. D'autres ont voulu protester :
on les a fait taire, on les a insultés, exclus. D'autres enfin
ont voulu se battre, on les a laissés seuls, le patronat les
a encerclés, les a lorcés à se rendre. Trois fois les C.R.S.
ont tue.
Que reste-t-il de la grève ? d'abord un lourd sentiment
de tristesse, d'amertume, qui chez certains engendre la
colère, la révolte ; chez d'autres l'indifférence, l'éloi-
gnement. Les résultats ? « II n'y a que les journalistes de
l'Humanité qui trouvent que c'est une grande victoire !
Pour nous c'est pas grand-chose. Bien sûr on a fait céder
les patrons sur quelques points : le S.M.I.C., les augmen-
tations, un peu plus de liberté pour le syndicat — et encore
sur le papier. Par rapport à ce qu'on demandait c'est
une aumône ». Cette phrase, des centaines, des milliers de
travailleurs l'ont dite. Je n'ai pas trouvé, durant tous les
jours de grève, un seul travailleur qui défende ou qui sim-
plement justifie les « accords de Grenelle ». Or, à regarder
de près, pour la majorité des grévistes, ce sont les accords
clé Grenelle à peine amendés qui ont servi de base à la
reprise du travail.
de tristesse, d'amertume, qui chez certains engendre la
colère, la révolte ; chez d'autres l'indifférence, l'éloi-
gnement. Les résultats ? « II n'y a que les journalistes de
l'Humanité qui trouvent que c'est une grande victoire !
Pour nous c'est pas grand-chose. Bien sûr on a fait céder
les patrons sur quelques points : le S.M.I.C., les augmen-
tations, un peu plus de liberté pour le syndicat — et encore
sur le papier. Par rapport à ce qu'on demandait c'est
une aumône ». Cette phrase, des centaines, des milliers de
travailleurs l'ont dite. Je n'ai pas trouvé, durant tous les
jours de grève, un seul travailleur qui défende ou qui sim-
plement justifie les « accords de Grenelle ». Or, à regarder
de près, pour la majorité des grévistes, ce sont les accords
clé Grenelle à peine amendés qui ont servi de base à la
reprise du travail.
Le 27 mai au matin, MM. Seguy et Frachon, fatigués
après une nuit de discussions, mais souriants, déclaraient
aux journalistes présents rue de Grenelle qu'ils estimaient
avoir fait « du bon travail ». Ils venaient de signer l'ordre
d'arrêt de la grève, en acceptant, face au patronat, de
limiter les revendications des travailleurs à quelques
objectifs purement quantitatifs. Certes, dans les revendi-
cations avancées par la majorité des travailleurs et à la
différence de ce qui s'était passé en 1936, il y avait peu
d'exigences, peu d'objectifs ayant un contenu qualitati-
vement nouveau. Toutefois, il est bien évident que
l'ensemble des revendications, par leur importance,
par leur caractère inadmissible pour le patronat,
incompatible avec le maintien de la structure économique
actuelle, étaient au fond une contestation fondamentale —
économique, sociale et en définitive politique — du
système. Réclamer 1 000 F de salaire minimum dans la
métallurgie, réclamer le retour aux 40 heures, réclamer
la retraite à 60 ans, réclamer un statut nouveau pour les
travailleurs immigrés, réclamer enfin des garanties pour
l'exercice d'une véritable liberté syndicale, c'était mettre
le pouvoir dans une situation intenable. Il ne pouvait
céder sur aucune de ces revendications. Céder, c'était
remettre fondamentalement en cause toute sa politique
après une nuit de discussions, mais souriants, déclaraient
aux journalistes présents rue de Grenelle qu'ils estimaient
avoir fait « du bon travail ». Ils venaient de signer l'ordre
d'arrêt de la grève, en acceptant, face au patronat, de
limiter les revendications des travailleurs à quelques
objectifs purement quantitatifs. Certes, dans les revendi-
cations avancées par la majorité des travailleurs et à la
différence de ce qui s'était passé en 1936, il y avait peu
d'exigences, peu d'objectifs ayant un contenu qualitati-
vement nouveau. Toutefois, il est bien évident que
l'ensemble des revendications, par leur importance,
par leur caractère inadmissible pour le patronat,
incompatible avec le maintien de la structure économique
actuelle, étaient au fond une contestation fondamentale —
économique, sociale et en définitive politique — du
système. Réclamer 1 000 F de salaire minimum dans la
métallurgie, réclamer le retour aux 40 heures, réclamer
la retraite à 60 ans, réclamer un statut nouveau pour les
travailleurs immigrés, réclamer enfin des garanties pour
l'exercice d'une véritable liberté syndicale, c'était mettre
le pouvoir dans une situation intenable. Il ne pouvait
céder sur aucune de ces revendications. Céder, c'était
remettre fondamentalement en cause toute sa politique
économique et sa base de classe, c'était briser le système
capitaliste.
capitaliste.
, La grande majorité des grévistes ne s'y est pas trompée,
qui savait très bien qu'en défendant fermement ses
revendications — et sans avoir à sortir du terrain reven-
dicatif qui pouvait faire l'unanimité des travailleurs — elle
avait le moyen de mettre fin à un système qui bouche tout
avenir de progrès. En temporisant, après à peine 10 jours
de lutte, les dirigeants syndicaux ont dénaturé le sens
profond de la lutte : ils ont offert une porte de sortie au
pouvoir en place, ils ont paradoxalement, « dépolitisé »
le mouvement pour ensuite le « repolitiser », mais stric-
tement au niveau électoral.
qui savait très bien qu'en défendant fermement ses
revendications — et sans avoir à sortir du terrain reven-
dicatif qui pouvait faire l'unanimité des travailleurs — elle
avait le moyen de mettre fin à un système qui bouche tout
avenir de progrès. En temporisant, après à peine 10 jours
de lutte, les dirigeants syndicaux ont dénaturé le sens
profond de la lutte : ils ont offert une porte de sortie au
pouvoir en place, ils ont paradoxalement, « dépolitisé »
le mouvement pour ensuite le « repolitiser », mais stric-
tement au niveau électoral.
Malgré le refus clairement exprimé des travailleurs
de Renault, de Citroën et d'autres grandes entreprises,
les accords de Grenelle resteront le bastion dans lequel
les forces patronales vont pouvoir s'enfermer. Quitte à
accepter quelques augmentations supplémentaires au
cours des discussions par branche : ils savent déjà — et
avant le discours du président de la République — que la
grève est « récupérable » puisque n'y figure plus aucune
des revendications qui mettent en cause directement leur
autorité ou leur pouvoir.
de Renault, de Citroën et d'autres grandes entreprises,
les accords de Grenelle resteront le bastion dans lequel
les forces patronales vont pouvoir s'enfermer. Quitte à
accepter quelques augmentations supplémentaires au
cours des discussions par branche : ils savent déjà — et
avant le discours du président de la République — que la
grève est « récupérable » puisque n'y figure plus aucune
des revendications qui mettent en cause directement leur
autorité ou leur pouvoir.
De maigres concessions
On acceptera donc la majoration substantielle du
S.M.I.C. et du S.M.A.G. (35 et 59 %) et une augmentation
de 10 % des autres salaires en deux temps, avec « ratis-
sage », c'est-à-dire décompte des hausses déjà inter-
venues depuis janvier ou déjà prévues pour les mois à
venir. En réalité, la moyenne des augmentations sera
légèrement supérieure : après des discussions acharnées,
branche pas branche, elle atteint environ 12 % dans le
secteur privé et 13 à 14 % dans le secteur public (13,77 %
dans la fonction publique, 1396 à la S.N.C.F., 12,8%
à la R.A.T.P., 14,35 % aux charbonnages...). D'autres
branches obtiendront moins : 10% dans les banques,
12% dans les assurances, 10% dans les pétroles. En
revanche, on sera beaucoup moins net sur la diminution
des heures de travail : on pave l'accord de bonnes inten-
tions... pour 1970 : les travailleurs arracheront de maigres
concessions : une demi-heure au mois d'octobre, une
autre au 1er janvier. On est loin des 40 heures. Quand on
sait que l'horaire « normal » est de 48 heures dans la
majorité des entreprises, quand il n'atteint pas 50, voire
60 heures dans l'alimentation ou la presse. En ce qui
concerne la liberté syndicale on s'en tient le plus souvent
à des promesses : il faut attendre une loi-cadre. La
composition bleu horizon de la future Chambre incitera-
t-elle le gouvernement à tenir ses promesses jusqu'au
bout ?
S.M.I.C. et du S.M.A.G. (35 et 59 %) et une augmentation
de 10 % des autres salaires en deux temps, avec « ratis-
sage », c'est-à-dire décompte des hausses déjà inter-
venues depuis janvier ou déjà prévues pour les mois à
venir. En réalité, la moyenne des augmentations sera
légèrement supérieure : après des discussions acharnées,
branche pas branche, elle atteint environ 12 % dans le
secteur privé et 13 à 14 % dans le secteur public (13,77 %
dans la fonction publique, 1396 à la S.N.C.F., 12,8%
à la R.A.T.P., 14,35 % aux charbonnages...). D'autres
branches obtiendront moins : 10% dans les banques,
12% dans les assurances, 10% dans les pétroles. En
revanche, on sera beaucoup moins net sur la diminution
des heures de travail : on pave l'accord de bonnes inten-
tions... pour 1970 : les travailleurs arracheront de maigres
concessions : une demi-heure au mois d'octobre, une
autre au 1er janvier. On est loin des 40 heures. Quand on
sait que l'horaire « normal » est de 48 heures dans la
majorité des entreprises, quand il n'atteint pas 50, voire
60 heures dans l'alimentation ou la presse. En ce qui
concerne la liberté syndicale on s'en tient le plus souvent
à des promesses : il faut attendre une loi-cadre. La
composition bleu horizon de la future Chambre incitera-
t-elle le gouvernement à tenir ses promesses jusqu'au
bout ?
Ce qui est admis ne dépasse pas en général la réaffir-
mation de principes légaux mais non appliqués, on
accorde en plus un bureau pour le délégué du personnel,
le droit de vendre un journal aux vestiaires. C'est maigre.
Quant aux autres revendications avancées au niveau
national, elles se sont toutes évanouies : l'abaissement
mation de principes légaux mais non appliqués, on
accorde en plus un bureau pour le délégué du personnel,
le droit de vendre un journal aux vestiaires. C'est maigre.
Quant aux autres revendications avancées au niveau
national, elles se sont toutes évanouies : l'abaissement
50
de l'âge de la retraite, l'abrogation des ordonnances
(on se contente d'abaisser de 5 96 le ticket modérateur),
la garantie de l'emploi, la situation inhumaine des tra-
vailleurs immigrés, la cinquième semaine de congés payés
pour les jeunes, etc.
(on se contente d'abaisser de 5 96 le ticket modérateur),
la garantie de l'emploi, la situation inhumaine des tra-
vailleurs immigrés, la cinquième semaine de congés payés
pour les jeunes, etc.
L'immense mouvement a donc mis au monde un souri-
ceau, l'augmentation même de la masse salariale concé-
dée, pour importante qu'elle soit — 15 à 20 milliards —
reste dans des limites acceptables. L'inflation, le déficit
budgétaire, le chômage, permettront probablement à
l'Etat et au patronat de reprendre l'essentiel de ce que
les travailleurs ont acquis. Déjà des augmentations de
prix viennent grignoter sérieusement les hausses de
salaires. Comme en 1950, 1956-58, le dispositif de récupé-
ration est prêt. Le général de Gaulle a parlé d'amélio-
rations « apparentes », l'hebdomadaire du grand capital,
La vie française, appelle déjà le mois de mai « le mois des
dupes ».
ceau, l'augmentation même de la masse salariale concé-
dée, pour importante qu'elle soit — 15 à 20 milliards —
reste dans des limites acceptables. L'inflation, le déficit
budgétaire, le chômage, permettront probablement à
l'Etat et au patronat de reprendre l'essentiel de ce que
les travailleurs ont acquis. Déjà des augmentations de
prix viennent grignoter sérieusement les hausses de
salaires. Comme en 1950, 1956-58, le dispositif de récupé-
ration est prêt. Le général de Gaulle a parlé d'amélio-
rations « apparentes », l'hebdomadaire du grand capital,
La vie française, appelle déjà le mois de mai « le mois des
dupes ».
Les travailleurs ont repris le chemin des usines et des
bureaux ; et il faut bien expliquer ce paradoxe : comment
ceux qui, souvent dans l'enthousiasme, décidèrent la
grève sur la base de revendications clairement exprimées,
ont-ils pu après trois, quatre, cinq semaines de grève,
voter pour la reprise alors que les avantages accordés sont
sans commune mesure avec les revendications avancées ?
bureaux ; et il faut bien expliquer ce paradoxe : comment
ceux qui, souvent dans l'enthousiasme, décidèrent la
grève sur la base de revendications clairement exprimées,
ont-ils pu après trois, quatre, cinq semaines de grève,
voter pour la reprise alors que les avantages accordés sont
sans commune mesure avec les revendications avancées ?
points de repère
Deux grandes idées peuvent essentiellement se dégager
des réponses généralement fournies par les travailleurs.
des réponses généralement fournies par les travailleurs.
La stratégie syndicale d'ensemble a divisé les tra-
vailleurs, les a égarés. La précipitation mise par Séguv et
Descamps à aller négocier a brisé le front uni qui se for-
mait, les mots d'ordre de reprise ont brisé le moral des
travailleurs. Lorsqu'il a été évident que les directions svn-
dicales refuseraient d'organiser le combat sur les objectifs
de départ, mais se contenteraient de miettes, mieux valait
reprendre le travail et perdre un peu moins d'argent. Plus
conscients, mieux organisés, comme à Flins, à Sochaux ou
à Citroen, les travailleurs ont pu tenir plus longtemps.
Pourtant ils ont dy céder eux aussi aux pressions
conjointes du patronat et de la direction de la C.G.T.
vailleurs, les a égarés. La précipitation mise par Séguv et
Descamps à aller négocier a brisé le front uni qui se for-
mait, les mots d'ordre de reprise ont brisé le moral des
travailleurs. Lorsqu'il a été évident que les directions svn-
dicales refuseraient d'organiser le combat sur les objectifs
de départ, mais se contenteraient de miettes, mieux valait
reprendre le travail et perdre un peu moins d'argent. Plus
conscients, mieux organisés, comme à Flins, à Sochaux ou
à Citroen, les travailleurs ont pu tenir plus longtemps.
Pourtant ils ont dy céder eux aussi aux pressions
conjointes du patronat et de la direction de la C.G.T.
C'est peut-être la deuxième raison de l'échec du mou-
vement : la « politisation ». Il faut entendre par là le
transfert sur le terrain électoral, sur le terrain des vieilles
formations politiques, des clochers, d'un mouvement
dont le sens profond était la remise en cause radicale de
l'ordre économique et politique, mais qui, pour s'expri-
mer, devait garder à tout prix son caractère de masse.
En jouant le jeu électoral, qui exigeait que « l'ordre soit
revenu », les formations « de gauche » ont quitté un bon
terrain pour un terrain miné. Plus à l'aise dans les préaux
d'écoles ou au Parlement que dans les usines, les cadres
du P.C.F., avec une myopie politique trop forte pour
vement : la « politisation ». Il faut entendre par là le
transfert sur le terrain électoral, sur le terrain des vieilles
formations politiques, des clochers, d'un mouvement
dont le sens profond était la remise en cause radicale de
l'ordre économique et politique, mais qui, pour s'expri-
mer, devait garder à tout prix son caractère de masse.
En jouant le jeu électoral, qui exigeait que « l'ordre soit
revenu », les formations « de gauche » ont quitté un bon
terrain pour un terrain miné. Plus à l'aise dans les préaux
d'écoles ou au Parlement que dans les usines, les cadres
du P.C.F., avec une myopie politique trop forte pour
LE COMITE D'ENTREPRISE
Fonctions : a) économique : il est en prin-
cipe informé de la politique financière,
technique et économique suivie par la di-
rection. Il peut donner un avis sur les
mesures envisagées par le chef d'entre-
prise qui ont des incidences sur les condi-
tions de travail et sur l'emploi. Sur ce
second point les chefs d'entreprise — mal-
gré la loi — négligent souvent d'informer
le Comité de certaines mesures, ou le font
en des termes si vagues qu'aucune dis-
cussion ne peut avoir lieu, qu'aucune me-
sure concrète ne peut être prise,
b) sociale : il coopère avec la direction à
l'amélioration des conditions de travail et
de vie du personnel. En réalité, la direc-
tion préfère souvent — aux ternies de la
loi — concéder au Comité d'entreprise la
gestion de certaines œuvres sociales, telles
que colonies de vacances, cantine, etc., ce
qui fait dire à certains militants syndicaux
que les membres du C.E. deviennent de
petits patrons dans l'usine.
Formation : obligatoire dans les entreprises
ayant au moins cinquante salariés. Les
membres sont élus pour deux ans par les
salariés ayant plus de six mois dans l'en-
treprise. Le nombre de sièges dépend du
nombre de salariés : de un pour cin-
quante employés à onze pour dix mille
plus le même nombre de suppléants).
cipe informé de la politique financière,
technique et économique suivie par la di-
rection. Il peut donner un avis sur les
mesures envisagées par le chef d'entre-
prise qui ont des incidences sur les condi-
tions de travail et sur l'emploi. Sur ce
second point les chefs d'entreprise — mal-
gré la loi — négligent souvent d'informer
le Comité de certaines mesures, ou le font
en des termes si vagues qu'aucune dis-
cussion ne peut avoir lieu, qu'aucune me-
sure concrète ne peut être prise,
b) sociale : il coopère avec la direction à
l'amélioration des conditions de travail et
de vie du personnel. En réalité, la direc-
tion préfère souvent — aux ternies de la
loi — concéder au Comité d'entreprise la
gestion de certaines œuvres sociales, telles
que colonies de vacances, cantine, etc., ce
qui fait dire à certains militants syndicaux
que les membres du C.E. deviennent de
petits patrons dans l'usine.
Formation : obligatoire dans les entreprises
ayant au moins cinquante salariés. Les
membres sont élus pour deux ans par les
salariés ayant plus de six mois dans l'en-
treprise. Le nombre de sièges dépend du
nombre de salariés : de un pour cin-
quante employés à onze pour dix mille
plus le même nombre de suppléants).
Les titulaires disposent de vingt heures
de délégation payées pour l'exercice de
leur fonction.
de délégation payées pour l'exercice de
leur fonction.
Le C.E. se réunit au moins une fois
par mois sous la présidence du chef d'en-
treprise ou de son représentant. Les délè-
gues des organisations syndicales repré-
sentatives siègent avec voix consultative.
par mois sous la présidence du chef d'en-
treprise ou de son représentant. Les délè-
gues des organisations syndicales repré-
sentatives siègent avec voix consultative.
Le secrétaire est choisi parmi les titu-
laires élus. C'est sur lui que repose la
marche de l'institution.
laires élus. C'est sur lui que repose la
marche de l'institution.
Textes : ordonnance du 22 février 1945,
décret du 2 novembre 1945,
loi du 18 juin 1966.
décret du 2 novembre 1945,
loi du 18 juin 1966.
LES DELEGUES DU PERSONNEL
Mission : présenter aux employeurs toutes
les réclamations individuelles et collecti-
ves, saisir l'Inspection du Travail de toutes
plaintes ou observations relatives à l'ap-
plication des prescriptions légales et régle-
mentaires.
les réclamations individuelles et collecti-
ves, saisir l'Inspection du Travail de toutes
plaintes ou observations relatives à l'ap-
plication des prescriptions légales et régle-
mentaires.
Elections : obligatoires dans les entreprises
occupant habituellement plus de dix sala-
riés. Les délégués sont élus pour un an
par tous les salariés ayant plus de six mois
dans l'entreprise, suivant deux collèges :
occupant habituellement plus de dix sala-
riés. Les délégués sont élus pour un an
par tous les salariés ayant plus de six mois
dans l'entreprise, suivant deux collèges :
— ouvriers et employés,
— cadres, techniciens, agents de maî-
trise.
trise.
Au premier tour, seules les organisations
syndicales représentatives dans l'entre-
prise peuvent présenter des candidats. Les
candidats disposent de quinze heures de
délégation payées, pour l'exercice de leur
fonction. L'employeur doit les recevoir
au moins une fois par mois.
syndicales représentatives dans l'entre-
prise peuvent présenter des candidats. Les
candidats disposent de quinze heures de
délégation payées, pour l'exercice de leur
fonction. L'employeur doit les recevoir
au moins une fois par mois.
Le délégué bénéficie en principe d'une
protection légale : il ne peut être licencié
sans accord du CE. ou à défaut de l'Ins-
pection du travail. Cette protection s'étend
aux candidats pour une durée de trois
mois après la publication de leur candi-
dature.
Texte : loi du 16 avril 1946.
protection légale : il ne peut être licencié
sans accord du CE. ou à défaut de l'Ins-
pection du travail. Cette protection s'étend
aux candidats pour une durée de trois
mois après la publication de leur candi-
dature.
Texte : loi du 16 avril 1946.
LE DELEGUE SYNDICAL
Le délégué syndical n'a pas de fonction
juridiquement définie. Il assure en prin-
cipe la représentation de la section auprès
de l'employeur et tient son mandat des
seules instances délibérantes du syndicat.
Depuis la loi du 18 juin 1946, il bénéficie
du régime de protection des délégués
élus. Les dispositions sur le libre exercice
du droit syndical sont en général fort peu
respectées par les employeurs.
juridiquement définie. Il assure en prin-
cipe la représentation de la section auprès
de l'employeur et tient son mandat des
seules instances délibérantes du syndicat.
Depuis la loi du 18 juin 1946, il bénéficie
du régime de protection des délégués
élus. Les dispositions sur le libre exercice
du droit syndical sont en général fort peu
respectées par les employeurs.
LA SECTION SYNDICALE
La section syndicale d'entreprise regroupe
les militants syndicalistes à l'échelon de
l'entreprise. Elle n'a pas de personnalité
juridique et n'est pas reconnue par les
employeurs. Elle constitue cependant un
centre extrêmement important de la vie
dans l'entreprise. C'est pour qu'elle
puisse librement exercer son activité que
les grévistes de Mai réclamaient la re-
connaissance légale de la section syndi-
cale.
les militants syndicalistes à l'échelon de
l'entreprise. Elle n'a pas de personnalité
juridique et n'est pas reconnue par les
employeurs. Elle constitue cependant un
centre extrêmement important de la vie
dans l'entreprise. C'est pour qu'elle
puisse librement exercer son activité que
les grévistes de Mai réclamaient la re-
connaissance légale de la section syndi-
cale.
51
qu'elle ne soit pas consciente, ont accepté d'abandonner
en vrac l'espoir immense qu'avait fait naître le mois
de mai, les occupations d'usines, les larges manifesta-
tions de masses, le bouillonnement d'idées, la formation
dans la lutte de centaines de cadres prolétariens, pour
1'hvpothétique espoir d'un strapontin dans un gouver-
nement « démocratique » né d'élections précipitées. Ils
ont oublié au passage le million de travailleurs étrangers
et le million de jeunes, non électeurs, et pourtant présents
dans la grève, ils ont oublié la répression.
en vrac l'espoir immense qu'avait fait naître le mois
de mai, les occupations d'usines, les larges manifesta-
tions de masses, le bouillonnement d'idées, la formation
dans la lutte de centaines de cadres prolétariens, pour
1'hvpothétique espoir d'un strapontin dans un gouver-
nement « démocratique » né d'élections précipitées. Ils
ont oublié au passage le million de travailleurs étrangers
et le million de jeunes, non électeurs, et pourtant présents
dans la grève, ils ont oublié la répression.
Bien des militants disent que le Parti a « préféré cinq
millions de voix incertaines à dix millions de grévistes »
millions de voix incertaines à dix millions de grévistes »
La force de la classe ouvrière, c'est son unité
« Ils ont passé un accord avec le gouvernement : il ne
devait plus y avoir un seul gréviste pour le jour des élec-
tions. Les patrons lâchaient quelques miettes, Séguy
donnait l'ordre de reprise du travail et puis tous aux
urnes »... Chaque jour, sur une place du 15e arrondis-
sement, les ouvriers des usines proches, les habitants du
quartier se retrouvent vers six heures du soir, avec quel-
ques militants des mouvements de soutien aux travail-
leurs pour échanger des idées, pour s'organiser aussi.
Cela dure depuis un mois. Depuis un mois l'assistance
ne faiblit pas. C'est devenu une habitude, on vient même
des quartiers voisins.
devait plus y avoir un seul gréviste pour le jour des élec-
tions. Les patrons lâchaient quelques miettes, Séguy
donnait l'ordre de reprise du travail et puis tous aux
urnes »... Chaque jour, sur une place du 15e arrondis-
sement, les ouvriers des usines proches, les habitants du
quartier se retrouvent vers six heures du soir, avec quel-
ques militants des mouvements de soutien aux travail-
leurs pour échanger des idées, pour s'organiser aussi.
Cela dure depuis un mois. Depuis un mois l'assistance
ne faiblit pas. C'est devenu une habitude, on vient même
des quartiers voisins.
Un ouvrier de Citroen parle, coupé parfois par un
jeune de Renault qui renchérit. Tous deux sont militants
C.G.T., ils n'appartiennent à aucun groupement politi-
que. « Autrefois, on disait au syndicat : tous pour un,
un pour tous. Cette fois on nous a dit « chacun pour soi ».
C'était foutu. La discussion est souvent vive. Un membre
du P.C.F., à cheveux blancs, attaque les « gauchistes »
et pour finir, leur lance l'injure suprême : « Etudiants ! »
jeune de Renault qui renchérit. Tous deux sont militants
C.G.T., ils n'appartiennent à aucun groupement politi-
que. « Autrefois, on disait au syndicat : tous pour un,
un pour tous. Cette fois on nous a dit « chacun pour soi ».
C'était foutu. La discussion est souvent vive. Un membre
du P.C.F., à cheveux blancs, attaque les « gauchistes »
et pour finir, leur lance l'injure suprême : « Etudiants ! »
« Alors je vais vous dire moi, je ne suis pas étudiant,
comment on nous a fait reprendre le travail », celui qui
parle porte l'uniforme de la R.A.T.P. — « Je travaille au
dépôt Lebrun, dans le XIIIe, nous en étions au vingtième
jour de la grève, le 4 juin, lorsque la direction C.G.T. a
donné l'ordre de reprendre le travail. Aucune revendi-
cation essentielle n'était satisfaite, et, même si c'était
le cas, nous, en tant que transport, on ne devait pas
reprendre le travail avant les autres, pour les aider à
continuer la lutte. Voyant qu'on était à 90 % pour la
grève — un vote l'a d'ailleurs confirmé — vous savez ce
qu'ont fait les responsables C.G.T. ? Ils sont allés voir
les gars un par un pour leur dire que tous les dépôts
avaient déjà repris, ils ont inventé des résultats de vote
alors que personne n'avait encore voté. Et ils ont fait ça
dans chaque dépôt racontant partout que les autres
étaient d'accord pour la reprise. On est allé à la Bourse
du travail demander des explications. Malheureusement
on n'était pas assez nombreux : les camarades se sont fait
taper dessus par les permanents ! Le 5, nous maintenions
les piquets, mais comme par hasard six grands cars de
flics étaient là dès le matin, police parisienne et gardes
mobiles avec leurs fusils. Nous étions prêts à tenir. Des
comment on nous a fait reprendre le travail », celui qui
parle porte l'uniforme de la R.A.T.P. — « Je travaille au
dépôt Lebrun, dans le XIIIe, nous en étions au vingtième
jour de la grève, le 4 juin, lorsque la direction C.G.T. a
donné l'ordre de reprendre le travail. Aucune revendi-
cation essentielle n'était satisfaite, et, même si c'était
le cas, nous, en tant que transport, on ne devait pas
reprendre le travail avant les autres, pour les aider à
continuer la lutte. Voyant qu'on était à 90 % pour la
grève — un vote l'a d'ailleurs confirmé — vous savez ce
qu'ont fait les responsables C.G.T. ? Ils sont allés voir
les gars un par un pour leur dire que tous les dépôts
avaient déjà repris, ils ont inventé des résultats de vote
alors que personne n'avait encore voté. Et ils ont fait ça
dans chaque dépôt racontant partout que les autres
étaient d'accord pour la reprise. On est allé à la Bourse
du travail demander des explications. Malheureusement
on n'était pas assez nombreux : les camarades se sont fait
taper dessus par les permanents ! Le 5, nous maintenions
les piquets, mais comme par hasard six grands cars de
flics étaient là dès le matin, police parisienne et gardes
mobiles avec leurs fusils. Nous étions prêts à tenir. Des
habitants du quartier, et des étudiants étaient avec nous
devant le dépôt. Mais les permanents C.G.T. ont à nou-
veau mis le paquet à coup de promesses démagogiques,
de mensonges. Après avoir bien divisé le mouvement, ils
ont fait reprendre le travail aux autres dépôts, ils nous ont
démoralisés. On n'avait plus le choix, les larmes aux
yeux, on est rentré. Alors, après ça, quand un gars déchire
sa carte, va l'en empêcher ? Moi je l'ai gardée, mais pas
pour rien. On a quelques comptes à régler à la R.A.T.P. »
On parle aussi du vote à bulletin secret. Chez Reynaud,
une entreprise du XVe, les ouvriers ont affiché sur la
porte une grande pancarte : « Un ouvrier qui n'ose pas
exprimer son opinion devant ses camarades, n'a pas le
droit au nom d'homme. Le vote à bulletin secret est une
lâcheté et une trahison ». Pour d'autres, le bulletin secret,
c'est le respect de la démocratie. On débat : « Quelle
démocratie ? La force de la classe ouvrière c'est son
unité. En te plaçant tout seul au moment du vote, on
cherche à te faire oublier les camarades, à ne plus penser
qu'à toi, et puis ça permet tous les truquages. Un homme,
ça dit son opinion en face ». On raconte comment à Flins,
les travailleurs firent un feu de joie avec les urnes et les
bulletins et décidèrent à main levée la poursuite de la
grève.
devant le dépôt. Mais les permanents C.G.T. ont à nou-
veau mis le paquet à coup de promesses démagogiques,
de mensonges. Après avoir bien divisé le mouvement, ils
ont fait reprendre le travail aux autres dépôts, ils nous ont
démoralisés. On n'avait plus le choix, les larmes aux
yeux, on est rentré. Alors, après ça, quand un gars déchire
sa carte, va l'en empêcher ? Moi je l'ai gardée, mais pas
pour rien. On a quelques comptes à régler à la R.A.T.P. »
On parle aussi du vote à bulletin secret. Chez Reynaud,
une entreprise du XVe, les ouvriers ont affiché sur la
porte une grande pancarte : « Un ouvrier qui n'ose pas
exprimer son opinion devant ses camarades, n'a pas le
droit au nom d'homme. Le vote à bulletin secret est une
lâcheté et une trahison ». Pour d'autres, le bulletin secret,
c'est le respect de la démocratie. On débat : « Quelle
démocratie ? La force de la classe ouvrière c'est son
unité. En te plaçant tout seul au moment du vote, on
cherche à te faire oublier les camarades, à ne plus penser
qu'à toi, et puis ça permet tous les truquages. Un homme,
ça dit son opinion en face ». On raconte comment à Flins,
les travailleurs firent un feu de joie avec les urnes et les
bulletins et décidèrent à main levée la poursuite de la
grève.
Il faut continuer
Chaque jour, on fait le point des informations.
« Aujourd'hui chez Citroën les agents de secteur ont
tenté de faire reprendre le travail, ils se promenaient
dans la rue avec des petits papiers qu'ils faisaient signer
en douce aux ouvriers, surtout aux étrangers, en leur
racontant que c'était pour la prime de fin d'année, quand
ils ne savaient pas lire. En réalité, c'était des pétitions
pour la reprise du travail ! Ça aussi c'est la démocratie ?
Et le vote organisé par le patron au palais des Sports !
même pas un quart de votants. Tous contremaîtres ou
employés ! C'est dur, mais nous tiendrons ! ». Un habi-
tant du quartier suggère alors de faire « une journée
Citroën » dans le XVe. Tout le monde est d'accord. Le
soir on se réunit pour organiser, sortir des tracts, faire des
affiches, préparer des itinéraires de collectes. Le lende-
main un demi-million sera collecté pour les grévistes,
des dizaines d'affiches collées avec le mot d'ordre
« le XVe avec Citroën ». Des commerçants viendront
d'eux-mêmes proposer de la nourriture pour les grévistes.
Le soir deux cents personnes se rassemblent sur la place
pour dire leur solidarité à « leur usine ».
« Aujourd'hui chez Citroën les agents de secteur ont
tenté de faire reprendre le travail, ils se promenaient
dans la rue avec des petits papiers qu'ils faisaient signer
en douce aux ouvriers, surtout aux étrangers, en leur
racontant que c'était pour la prime de fin d'année, quand
ils ne savaient pas lire. En réalité, c'était des pétitions
pour la reprise du travail ! Ça aussi c'est la démocratie ?
Et le vote organisé par le patron au palais des Sports !
même pas un quart de votants. Tous contremaîtres ou
employés ! C'est dur, mais nous tiendrons ! ». Un habi-
tant du quartier suggère alors de faire « une journée
Citroën » dans le XVe. Tout le monde est d'accord. Le
soir on se réunit pour organiser, sortir des tracts, faire des
affiches, préparer des itinéraires de collectes. Le lende-
main un demi-million sera collecté pour les grévistes,
des dizaines d'affiches collées avec le mot d'ordre
« le XVe avec Citroën ». Des commerçants viendront
d'eux-mêmes proposer de la nourriture pour les grévistes.
Le soir deux cents personnes se rassemblent sur la place
pour dire leur solidarité à « leur usine ».
Chaque jour aussi on fait le compte des augmentations
du coût de la vie. « Dans mon usine, nous avons pris un
cahier : sur la page de gauche on a marqué ce qui avait
été obtenu : tant de plus à l'heure, une demi-heure de
réduction d'horaire. En gros 15 % d'augmentation. Sur
la page de droite chacun inscrit les hausses de prix qu'il
a pu constater : le pain, le lait, les chambres d'hôtel, le
journal, etc.,et quand ça sera plein, on fera l'addition. Et
croyez-moi, le jour où à gauche et à droite, ça sera le
même chiffre, on reprendra la grève. »
du coût de la vie. « Dans mon usine, nous avons pris un
cahier : sur la page de gauche on a marqué ce qui avait
été obtenu : tant de plus à l'heure, une demi-heure de
réduction d'horaire. En gros 15 % d'augmentation. Sur
la page de droite chacun inscrit les hausses de prix qu'il
a pu constater : le pain, le lait, les chambres d'hôtel, le
journal, etc.,et quand ça sera plein, on fera l'addition. Et
croyez-moi, le jour où à gauche et à droite, ça sera le
même chiffre, on reprendra la grève. »
52
Mil
La reprise du travail
A 9 heures les discussions vont encore bon train.
« Jamais on ne s'était parlé comme ça, dans la rue. Jamais
on n'avait eu tant d'idées à échanger. Il faut continuer.
A demain ». Cette démocratie réelle, qui est en train de
naître, en est encore à ses balbutiements. Mais c'est là
que le bilan d'un mois de grève, de « désordre » devient
positif. Malgré l'amertume qui a fait déchirer bon nombre
de cartes du syndicat, l'explosion de mai a permis de poser
devant des milliers de travailleurs, qui refusaient de s'y
intéresser, les véritables problèmes. D'une défaite peut
souvent sortir une victoire : pour beaucoup le combat
commence. 400 000 ouvriers et employés ont adhéré au
syndicat C.G.T., et ils ont adhéré au début de la grève,
pour participer à la lutte. Ils n'ont pas admis qu'on fasse
si peu compte de leur adhésion. A Citroën, quand le
24 juin M. Krasucki est venu demander au nom de la
direction confédérale C.G.T., la reprise du travail sur
les maigres propositions patronales — l'accord étant déjà
signé — tous ces nouveaux adhérents ont crié leur indi-
gnation : « A quoi sert de se syndiquer si on n'a pas
droit à la parole ! ». Il faudra désormais compter avec
cette nouvelle vague, dont 80 %, selon le rapport de
M. Séguy à la commission executive de la C.G.T., a
moins de 25 ans, qui n'accorde pas grand crédit aux
élections, et pour qui le terrain de la lutte se situe bien
clairement à l'usine, et au sein même du syndicat.
« Jamais on ne s'était parlé comme ça, dans la rue. Jamais
on n'avait eu tant d'idées à échanger. Il faut continuer.
A demain ». Cette démocratie réelle, qui est en train de
naître, en est encore à ses balbutiements. Mais c'est là
que le bilan d'un mois de grève, de « désordre » devient
positif. Malgré l'amertume qui a fait déchirer bon nombre
de cartes du syndicat, l'explosion de mai a permis de poser
devant des milliers de travailleurs, qui refusaient de s'y
intéresser, les véritables problèmes. D'une défaite peut
souvent sortir une victoire : pour beaucoup le combat
commence. 400 000 ouvriers et employés ont adhéré au
syndicat C.G.T., et ils ont adhéré au début de la grève,
pour participer à la lutte. Ils n'ont pas admis qu'on fasse
si peu compte de leur adhésion. A Citroën, quand le
24 juin M. Krasucki est venu demander au nom de la
direction confédérale C.G.T., la reprise du travail sur
les maigres propositions patronales — l'accord étant déjà
signé — tous ces nouveaux adhérents ont crié leur indi-
gnation : « A quoi sert de se syndiquer si on n'a pas
droit à la parole ! ». Il faudra désormais compter avec
cette nouvelle vague, dont 80 %, selon le rapport de
M. Séguy à la commission executive de la C.G.T., a
moins de 25 ans, qui n'accorde pas grand crédit aux
élections, et pour qui le terrain de la lutte se situe bien
clairement à l'usine, et au sein même du syndicat.
Dans plusieurs usines se sont constitués des groupes
de « syndicalistes prolétariens » qui critiquent durement
la direction confédérale de la C.G.T., tout en incitant
au renforcement à la base du syndicat. Une dizaine de
de « syndicalistes prolétariens » qui critiquent durement
la direction confédérale de la C.G.T., tout en incitant
au renforcement à la base du syndicat. Une dizaine de
Riboud-Magnum
nouveaux journaux syndicaux expriment leurs idées —
Unité ouvrière à Renault, Debout postiers aux P. et T.,
Ligne Rouge à la R.A.T.P., etc. Que disent-ils ?
Unité ouvrière à Renault, Debout postiers aux P. et T.,
Ligne Rouge à la R.A.T.P., etc. Que disent-ils ?
« II y a dans les statuts de la C.G.T. un article qui dit :
la C.G.T. regroupe tous les travailleurs conscients de la
lutte à mener pour la disparition du salariat et du patro-
nat. Pour nous cet article est toujours valable, même s'il
n'est plus jamais cité par les Séguy et les Krasucki. Les
grèves de mai ont montré nettement qu'il y avait deux
tendances au syndicat : les uns veulent à tout prix négo-
cier, sans se préoccuper d'organiser la lutte à la base.
Pour eux — et c'est le cas de la direction — on peut tout
régler par des négociations par branches. Profondément
ils ne voulaient pas de ce grand mouvement de mai, qui
leur échappait, qui leur faisait peur. Chaque fois qu'une
usine reprenait le travail ils poussaient un ouf de soula-
gement. Nous, nous serrions les poings. Car nous pen-
sons que la grève, l'occupation des usines c'est notre
arme. Pas le tapis vert. Et quand il faut discuter avec un
patron nous préférons être une vingtaine dans son
bureau, au cœur de l'usine occupée plutôt que de mettre
une cravate, de prendre une grosse serviette et d'aller
parader sous les plafonds dorés des ministères. Parce que
ceux-là, depuis le temps qu'ils y vont, ils ont oublié à
quoi ça ressemblait, une usine. Nous, nous luttons dans
l'usine, pour l'unité syndicale à la base. Nous n'avons
pas peur de la révolte : la révolte naît directement de
l'exploitation. De la révolte lorsqu'elle s'organise, s'uni-
he, naît la véritable lutte de classe, une lutte révolu-
tionnaire. »
la C.G.T. regroupe tous les travailleurs conscients de la
lutte à mener pour la disparition du salariat et du patro-
nat. Pour nous cet article est toujours valable, même s'il
n'est plus jamais cité par les Séguy et les Krasucki. Les
grèves de mai ont montré nettement qu'il y avait deux
tendances au syndicat : les uns veulent à tout prix négo-
cier, sans se préoccuper d'organiser la lutte à la base.
Pour eux — et c'est le cas de la direction — on peut tout
régler par des négociations par branches. Profondément
ils ne voulaient pas de ce grand mouvement de mai, qui
leur échappait, qui leur faisait peur. Chaque fois qu'une
usine reprenait le travail ils poussaient un ouf de soula-
gement. Nous, nous serrions les poings. Car nous pen-
sons que la grève, l'occupation des usines c'est notre
arme. Pas le tapis vert. Et quand il faut discuter avec un
patron nous préférons être une vingtaine dans son
bureau, au cœur de l'usine occupée plutôt que de mettre
une cravate, de prendre une grosse serviette et d'aller
parader sous les plafonds dorés des ministères. Parce que
ceux-là, depuis le temps qu'ils y vont, ils ont oublié à
quoi ça ressemblait, une usine. Nous, nous luttons dans
l'usine, pour l'unité syndicale à la base. Nous n'avons
pas peur de la révolte : la révolte naît directement de
l'exploitation. De la révolte lorsqu'elle s'organise, s'uni-
he, naît la véritable lutte de classe, une lutte révolu-
tionnaire. »
53
Médecine :
à Pas saut des féodalités
à Pas saut des féodalités
Coupés de l'hôpital, isolés les uns des autres,
privés d'enseignement post-universitaire,
les médecins français assuraient passivement leur rôle d'officiers de santé.
Parce qu'ils sont placés au carrefour des souffrances
Parce qu'ils sont placés au carrefour des souffrances
et des troubles de la société,
leur rébellion prend aujourd'hui une singulière importance.
leur rébellion prend aujourd'hui une singulière importance.
Georges Marin
1 i~\ MAI 1968, 12 h 30 : le grand amphithéâtre est
_I_ \J ouvert aux étudiants par le professeur Barge-
ton, vice-doyen. 14 heures : la grève est décidée. 16 heures
« Médecine solidaire », 1 500 étudiants en médecine arri-
vent en cortège place Denfert-Rochereau criant la haine
des violences policières. Pour qui connaît leur corpora-
tisme habituel, c'est déjà la révolution. On prend le
mouvement en marche, mais le démarrage est politique.
C'est la nuit des barricades. Rue Gay-Lussac, après avoir
rapidement organisé un service de soins d'urgence, les
futurs médecins choisissent de se battre.
ton, vice-doyen. 14 heures : la grève est décidée. 16 heures
« Médecine solidaire », 1 500 étudiants en médecine arri-
vent en cortège place Denfert-Rochereau criant la haine
des violences policières. Pour qui connaît leur corpora-
tisme habituel, c'est déjà la révolution. On prend le
mouvement en marche, mais le démarrage est politique.
C'est la nuit des barricades. Rue Gay-Lussac, après avoir
rapidement organisé un service de soins d'urgence, les
futurs médecins choisissent de se battre.
Lundi 13 mai : après la manifestation inter-syndicale,
les étudiants en médecine occupent la Faculté. Un Comité
d'action provisoire est élu, le service d'ordre s'organise,
on explore les innombrables salles de la rue des Saints-
Pères. Revenus sur leur lieu de travail, les étudiants s'atta-
quent à la vie quotidienne. Nées de la rue, les Commis-
sions s'organisent avec l'appui prudent de nombreux
enseignants. On démantèle, on piétine le vieux système.
Le sombre blockaus de la rue des Saint-Pères qu'un archi-
tecte de hasard destinait à l'austérité perpétuelle devient
ruche, mouvement, dialogue. On s'y côtoyait parfois, on
s'y parle à présent. Un journal quotidien d'information
est publié, on s'assemble par année, on élit ses repré-
sentants.
les étudiants en médecine occupent la Faculté. Un Comité
d'action provisoire est élu, le service d'ordre s'organise,
on explore les innombrables salles de la rue des Saints-
Pères. Revenus sur leur lieu de travail, les étudiants s'atta-
quent à la vie quotidienne. Nées de la rue, les Commis-
sions s'organisent avec l'appui prudent de nombreux
enseignants. On démantèle, on piétine le vieux système.
Le sombre blockaus de la rue des Saint-Pères qu'un archi-
tecte de hasard destinait à l'austérité perpétuelle devient
ruche, mouvement, dialogue. On s'y côtoyait parfois, on
s'y parle à présent. Un journal quotidien d'information
est publié, on s'assemble par année, on élit ses repré-
sentants.
Les étudiants privilégiés des Centres hospitaliers uni-
versitaires (Saint-Antoine, Pitié-Sallepétrière, Cochin)
décrètent l'occupation des locaux et contestent à leur tour.
versitaires (Saint-Antoine, Pitié-Sallepétrière, Cochin)
décrètent l'occupation des locaux et contestent à leur tour.
La hiérarchie, en cohorte, se rue par la brèche. C'est à
qui placera le plus vite ses revendications, criera le plus
fort à l'incurie de l'ordre ancien. Chefs de clinique, inter-
nes, attachés, d'abord timides puis résolus, se précipitent
on stigmatise les mandarins. Oubli pudique, la politique
est mise au rencart par la majorité qui commence sans
qui placera le plus vite ses revendications, criera le plus
fort à l'incurie de l'ordre ancien. Chefs de clinique, inter-
nes, attachés, d'abord timides puis résolus, se précipitent
on stigmatise les mandarins. Oubli pudique, la politique
est mise au rencart par la majorité qui commence sans
le savoir à en faire tous les jours. L'Assistance publique,
vieille dame respectable, voit, toute héberluée, la sacro-
sainte ordonnance des services hospitaliers vaciller. Les
Patrons s'informent auprès des externes des progrès de
la rébellion, le corps médical tente le dialogue avec le
personnel hospitalier et ouvrier en grève. On parle de
consulter les malades sur l'organisation de la santé :
c'est l'hérésie. Le château féodal de la médecine fran-
çaise s'effrite. On destitue le professeur Soulié qui régnait
en maître depuis vingt ans sur la cardiologie française
pour s'être rendu coupable à l'égard de son assistant d'un
écart de langage, d'une brutalité et d'un arbitraire dont
il usait, semble-t-il quotidiennement. On remplace un
mandarin par une direction collégiale. Ce crime de lèse-
majesté sonne-t-il le glas des structures oppressives de
la médecine ? On le pense en haut lieu et les Patrons
s'ébrouent, se téléphonent, se concertent. Certains, pour
l'avoir attendu longtemps, vivent tardivement une seconde
jeunesse dans ces heures exaltantes. D'autres préparent
la contre-attaque. Que s'est-il passé ?
vieille dame respectable, voit, toute héberluée, la sacro-
sainte ordonnance des services hospitaliers vaciller. Les
Patrons s'informent auprès des externes des progrès de
la rébellion, le corps médical tente le dialogue avec le
personnel hospitalier et ouvrier en grève. On parle de
consulter les malades sur l'organisation de la santé :
c'est l'hérésie. Le château féodal de la médecine fran-
çaise s'effrite. On destitue le professeur Soulié qui régnait
en maître depuis vingt ans sur la cardiologie française
pour s'être rendu coupable à l'égard de son assistant d'un
écart de langage, d'une brutalité et d'un arbitraire dont
il usait, semble-t-il quotidiennement. On remplace un
mandarin par une direction collégiale. Ce crime de lèse-
majesté sonne-t-il le glas des structures oppressives de
la médecine ? On le pense en haut lieu et les Patrons
s'ébrouent, se téléphonent, se concertent. Certains, pour
l'avoir attendu longtemps, vivent tardivement une seconde
jeunesse dans ces heures exaltantes. D'autres préparent
la contre-attaque. Que s'est-il passé ?
La faillite d'une organisation
La médecine française : cinquante huit mille diplômés
dont quarante cinq mille exercent suivant le mode libé-
ral, mettent avec un médecin pour mille habitants la
France au vingt-deuxième rang dans le monde. Sur cent
jeunes médecins français, quarante-six n'ont jamais assuré
une fonction hospitalière. La moitié des étudiants en fin
d'études à la Faculté de Paris n'ont jamais pratiqué les
gestes médicaux élémentaires (piqûres intra-veineuse ou
prise de la tension artérielle) (1). Un mode de sélection
antique, seul au monde de son espèce, chargé de recruter
l'élite médicale, externes puis internes qui formeront les
dont quarante cinq mille exercent suivant le mode libé-
ral, mettent avec un médecin pour mille habitants la
France au vingt-deuxième rang dans le monde. Sur cent
jeunes médecins français, quarante-six n'ont jamais assuré
une fonction hospitalière. La moitié des étudiants en fin
d'études à la Faculté de Paris n'ont jamais pratiqué les
gestes médicaux élémentaires (piqûres intra-veineuse ou
prise de la tension artérielle) (1). Un mode de sélection
antique, seul au monde de son espèce, chargé de recruter
l'élite médicale, externes puis internes qui formeront les
55
cadres hospitaliers et qui seuls ont accès aux malades au
cours de leurs études. Concours aberrant fondé sur la
seule mémoire, corrigé à l'aide d'une « grille »'', où le
moindre mot oublié suffit à juger des compétences d'un
praticien et à l'écarter définitivement des responsabilités
hospitalières. Concours où les intriguent et les relations
jouent un rôle aussi grand que l'accumulation passive
des connaissances. Nul ne peut se présenter au concours
de l'Internat s'il n'a été admis au concours de l'Externat,
le nombre des places variant en fonction du nombre des
lits, ce qui désavantage outrageusement la province.
cours de leurs études. Concours aberrant fondé sur la
seule mémoire, corrigé à l'aide d'une « grille »'', où le
moindre mot oublié suffit à juger des compétences d'un
praticien et à l'écarter définitivement des responsabilités
hospitalières. Concours où les intriguent et les relations
jouent un rôle aussi grand que l'accumulation passive
des connaissances. Nul ne peut se présenter au concours
de l'Internat s'il n'a été admis au concours de l'Externat,
le nombre des places variant en fonction du nombre des
lits, ce qui désavantage outrageusement la province.
Au-dessus, inamovibles, nommés à vie, les chefs de
service, ces « grands Patrons » du siècle passé voyaient
couler sous eux les réformes successives. Arrivés à leur
poste à l'ancienneté, à force d'intrigues et l'échiné cour-
bée, ils entendaient bien y rester, et leur service vieillis-
sait avec eux. La réforme Debré instituait le plein temps
hospitalier. Actuellement, 37 96 des chefs de service pari-
siens se plient à cette discipline.
service, ces « grands Patrons » du siècle passé voyaient
couler sous eux les réformes successives. Arrivés à leur
poste à l'ancienneté, à force d'intrigues et l'échiné cour-
bée, ils entendaient bien y rester, et leur service vieillis-
sait avec eux. La réforme Debré instituait le plein temps
hospitalier. Actuellement, 37 96 des chefs de service pari-
siens se plient à cette discipline.
Entre les deux, piaffant d'impatience, les médecins des
hôpitaux agrégés attendent, en vain pour la plupart, la
responsabilité d'un Service, se chargeant à la place du
Patron de l'organisation du plein temps puisqu'ils l'ont
adopté pour 68 % d'entre-eux. Les assistants attendent la
retraite. Les chefs de clinique enseignent discrètement le
troupeau des stagiaires, préoccupés par le concours
d'agrégation où bien peu seront nommés et par l'instal-
lation en ville à laquelle la majorité sera contrainte.
Quant aux attachés, médecins de ville assurant une
consultation, ils n'ont aucun statut et dépendent entiè-
rement de la complaisance des Patrons. Ce tableau de
la « bonne » médecine hospitalière contraste avec celui
de la « mauvaise » médecine praticienne pour illustrer
la faillite de l'organisation de la santé en France dont
l'usager fait seul les frais.
hôpitaux agrégés attendent, en vain pour la plupart, la
responsabilité d'un Service, se chargeant à la place du
Patron de l'organisation du plein temps puisqu'ils l'ont
adopté pour 68 % d'entre-eux. Les assistants attendent la
retraite. Les chefs de clinique enseignent discrètement le
troupeau des stagiaires, préoccupés par le concours
d'agrégation où bien peu seront nommés et par l'instal-
lation en ville à laquelle la majorité sera contrainte.
Quant aux attachés, médecins de ville assurant une
consultation, ils n'ont aucun statut et dépendent entiè-
rement de la complaisance des Patrons. Ce tableau de
la « bonne » médecine hospitalière contraste avec celui
de la « mauvaise » médecine praticienne pour illustrer
la faillite de l'organisation de la santé en France dont
l'usager fait seul les frais.
Un médecin peut donc s'installer sans être parvenu à
approcher un malade, sinon par dessus l'épaule du
Patron. Les spécialistes sont formés suivant la méthode,
avec trois ou quatre ans d'études supplémentaires, sans
plus de responsabilité. Coupés de l'hôpital, isolés les
uns des autres, sans enseignement post-universitaire, les
médecins français assuraient passivement leur rôle d'offi-
ciers de santé, harassés pour la plupart, toujours dévoues,
toujours soumis à un système sur lequel ils n'avaient pas
prise. Leur rôle d'observateur privilégié de la société,
au carrefour des souffrances et des troubles, donne à leur
rébellion une singulière puissance.
approcher un malade, sinon par dessus l'épaule du
Patron. Les spécialistes sont formés suivant la méthode,
avec trois ou quatre ans d'études supplémentaires, sans
plus de responsabilité. Coupés de l'hôpital, isolés les
uns des autres, sans enseignement post-universitaire, les
médecins français assuraient passivement leur rôle d'offi-
ciers de santé, harassés pour la plupart, toujours dévoues,
toujours soumis à un système sur lequel ils n'avaient pas
prise. Leur rôle d'observateur privilégié de la société,
au carrefour des souffrances et des troubles, donne à leur
rébellion une singulière puissance.
L'enjeu
Face à cet ensemble de complicités, d'intérêts person-
nels et de bureaucratie désuète, le « pouvoir étudiant »,
conçu comme la possibilité permanente d'une contesta-
nels et de bureaucratie désuète, le « pouvoir étudiant »,
conçu comme la possibilité permanente d'une contesta-
(1) Etude réalisée par Odile Bouthreul et Paul Wiener du Laboratoire
de psychologie clinique de la Sorbonne, dans le cadre de la clinique
urologique du professeur Aboulker.
de psychologie clinique de la Sorbonne, dans le cadre de la clinique
urologique du professeur Aboulker.
tion constructive, s'affirme comme une nécessité absolue.
Contre les réformes bâclées, abâtardies ou dépassées,
contre l'intégration de leur propre réforme par un sys-
tème qu'ils rejettent, les étudiants brandissent l'arme à
longue portée de l'imagination. L'irrespect nécessaire des
structures débouche sur le grand chambardement. Remet-
tre en question la formation médicale c'est démolir la
structure sanitaire française, c'est voir dans la maladie
non plus la conséquence fatale des hasards malencon-
treux mais l'expression particulière de l'organisation
sociale. Ce que n'a peut-être pas compris la « frange poli-
tisée » des étudiants et des enseignants c'est que la réfor-
me de la santé en France va sans doute plus loin qu'une
barricade supplémentaire. Mais que proposent les étu-
diants ?
Contre les réformes bâclées, abâtardies ou dépassées,
contre l'intégration de leur propre réforme par un sys-
tème qu'ils rejettent, les étudiants brandissent l'arme à
longue portée de l'imagination. L'irrespect nécessaire des
structures débouche sur le grand chambardement. Remet-
tre en question la formation médicale c'est démolir la
structure sanitaire française, c'est voir dans la maladie
non plus la conséquence fatale des hasards malencon-
treux mais l'expression particulière de l'organisation
sociale. Ce que n'a peut-être pas compris la « frange poli-
tisée » des étudiants et des enseignants c'est que la réfor-
me de la santé en France va sans doute plus loin qu'une
barricade supplémentaire. Mais que proposent les étu-
diants ?
Une réforme née dans la rue. Fière de ses origines,
elle est l'expression d'un désir passionné de vie nouvelle.
Elle est volonté d'une alliance plus vraie entre nos études
et notre métier, entre nous et nos professeurs, entre
l'Université et la société.
elle est l'expression d'un désir passionné de vie nouvelle.
Elle est volonté d'une alliance plus vraie entre nos études
et notre métier, entre nous et nos professeurs, entre
l'Université et la société.
Notre réforme est aussi volonté de participer active-
ment à l'élaboration de notre présent et de notre futur.
Selon la qualité de cette participation, nous vivrons acti-
vement ce présent et ce futur quel qu'il soit, ou au contrai-
re, nous le subirons. Or, le subir ce serait mourir et non
pas nous seulement mais toute notre société. Voilà pour-
quoi nous nous tenons debout face au gouvernement quel
qu'il soit, prêts à défendre un tel enjeu.
ment à l'élaboration de notre présent et de notre futur.
Selon la qualité de cette participation, nous vivrons acti-
vement ce présent et ce futur quel qu'il soit, ou au contrai-
re, nous le subirons. Or, le subir ce serait mourir et non
pas nous seulement mais toute notre société. Voilà pour-
quoi nous nous tenons debout face au gouvernement quel
qu'il soit, prêts à défendre un tel enjeu.
C'est clans cette volonté de participation que s'inscrit
le « Pouvoir étudiant », c'est-à-dire la responsabilité
vraie des étudiants. Ce pouvoir existe, ce pouvoir doit
croître de plus en plus, afin que nous accédions à cet
apprentissage des responsabilités nécessaire à la sécurité
de nos malades, à notre épanouissement, à la santé de
notre société.
le « Pouvoir étudiant », c'est-à-dire la responsabilité
vraie des étudiants. Ce pouvoir existe, ce pouvoir doit
croître de plus en plus, afin que nous accédions à cet
apprentissage des responsabilités nécessaire à la sécurité
de nos malades, à notre épanouissement, à la santé de
notre société.
Or, combien notre Faculté a-t-elle été jusqu'ici vide
de responsables et trop pleine de bonnes volontés impuis-
santes. Ce texte n'est pas, c'est trop évident, un texte déh-
nitif. Ce texte est base de dialogue. »
de responsables et trop pleine de bonnes volontés impuis-
santes. Ce texte n'est pas, c'est trop évident, un texte déh-
nitif. Ce texte est base de dialogue. »
Ainsi s'ouvre le Livre blanc de la réforme des études
médicales. Ainsi les étudiants s'affirment conscients de
leurs responsabilités, à l'égard de l'esprit du mouvement
sans cesse menacé de trahison, à l'égard d'eux-mêmes
pour sacrifier leur intérêt immédiat au bien de tous, à
l'égard d'une société qu'ils ont entrepris rie bouleverser.
médicales. Ainsi les étudiants s'affirment conscients de
leurs responsabilités, à l'égard de l'esprit du mouvement
sans cesse menacé de trahison, à l'égard d'eux-mêmes
pour sacrifier leur intérêt immédiat au bien de tous, à
l'égard d'une société qu'ils ont entrepris rie bouleverser.
Les grandes options de la réforme proposées à la dis-
cussion sont claires :
cussion sont claires :
A. — Création de centres hospitaliers universitaires
autonomes avant un programme de base commun sans
qu'il existe une étanchcité absolue de chaque C.H.U. :
autonomes avant un programme de base commun sans
qu'il existe une étanchcité absolue de chaque C.H.U. :
— vis à vis des autres C.H.U.
— vis à vis des facultés dispensant l'enseignement de
disciplines nécessaires à la compréhension des études
médicales (sciences fondamentales, sciences humaines).
disciplines nécessaires à la compréhension des études
médicales (sciences fondamentales, sciences humaines).
Cela implique la suppression des chaires actuelles, rem-
56
Rapho
placées par des départements dont nous verrons l'esprit
plus bas.
plus bas.
B. — Suppression du mandarinat sur lequel reposent
actuellement les services hospitaliers et son remplace-
ment par des équipes hospitalo-universitaires dont les
membres sont élus sur un ensemble de qualités médicales,
pédagogiques et d'esprit de recherche. Ces équipes sont
dirigées par un co-ordinateur rééligible périodiquement
comme tous ses membres par une commission mixte.
actuellement les services hospitaliers et son remplace-
ment par des équipes hospitalo-universitaires dont les
membres sont élus sur un ensemble de qualités médicales,
pédagogiques et d'esprit de recherche. Ces équipes sont
dirigées par un co-ordinateur rééligible périodiquement
comme tous ses membres par une commission mixte.
C. — Nécessité absolue d'une fonction hospitalière
pour tous à responsabilité graduelle se terminant par
une responsabilité thérapeutique comprenant les soins
d'urgence, dans le cadre d'une intégration progressive
de l'étudiant dans ces équipes hospitalo-universitaires,
avant l'exercice éventuel d'une médecine praticienne. Une
formation clinique et thérapeutique pour tous les étu-
diants est le seul garant de la sécurité du malade et d'une
médecine de qualité.
pour tous à responsabilité graduelle se terminant par
une responsabilité thérapeutique comprenant les soins
d'urgence, dans le cadre d'une intégration progressive
de l'étudiant dans ces équipes hospitalo-universitaires,
avant l'exercice éventuel d'une médecine praticienne. Une
formation clinique et thérapeutique pour tous les étu-
diants est le seul garant de la sécurité du malade et d'une
médecine de qualité.
D. — Pour les étudiants désireux de poursuivre une
carrière hospitalo-universitaire ou de recherche, une sé-
lection est indispensable. Elle interviendra à l'issue de la
carrière hospitalo-universitaire ou de recherche, une sé-
lection est indispensable. Elle interviendra à l'issue de la
période de responsabilité thérapeutique obligatoire. Celte
sélection ne se fera pas sur le mode du concours de
l'Internat, mais en fonction d'un bilan des résultats des
examens théoriques, pratiques, et du travail
dans le cadre des fonctions exercées antérieurement.
Ceci implique une amélioration du contenu clé rensei-
gnement, et des modalités de l'exercice des fonctions
dans les unités hospitalo-universitaires.
sélection ne se fera pas sur le mode du concours de
l'Internat, mais en fonction d'un bilan des résultats des
examens théoriques, pratiques, et du travail
dans le cadre des fonctions exercées antérieurement.
Ceci implique une amélioration du contenu clé rensei-
gnement, et des modalités de l'exercice des fonctions
dans les unités hospitalo-universitaires.
E. — La composition de ces équipes n'est en rien
limitative, ce qui pose le problème de renseignement
post-universitaire et de la collaboration des praticiens de
ville avec ces équipes.
limitative, ce qui pose le problème de renseignement
post-universitaire et de la collaboration des praticiens de
ville avec ces équipes.
Apprendre à apprendre
Ces grandes options impliquent un bouleversement
complet des principes pédagogiques et une rénovation
de l'esprit qui va animer ce système pédagogique. L'en-
seignement sera de type « réflexif ». C'en est lini
de l'acquisition passive et purement mémorielle des
connaissances. L'apprentissage doit être actif, « on doit
complet des principes pédagogiques et une rénovation
de l'esprit qui va animer ce système pédagogique. L'en-
seignement sera de type « réflexif ». C'en est lini
de l'acquisition passive et purement mémorielle des
connaissances. L'apprentissage doit être actif, « on doit
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actif, « on doit apprendre à apprendre ». L'important
est la compréhension et l'assimilation des mécanismes et
chemins de la pensée qui conduisent à cette connaissance
élaborée. On ne doit plus savoir par cœur, l'on doit saisir
l'enchaînement logique des divers mécanismes physio-
pathologiques qui conduisent à la notion de maladie.
L'enseignement doit mettre l'étudiant en situation active,
à l'égard de lui-même et de ce qu'il doit apprendre :
c'est-à-dire expliquer aux autres étudiants. Pour cela,
des groupes de travail réunissant quatre à cinq étu-
diants sont indispensables. La tâche de l'enseignant
devient à la fois moins directive, plus active que par
le passé. C'est lui qui après avoir reçu une formation
psycho-pédagogique appropriée encadrera le groupe.
Dans ce nouveau système, l'enseignant et l'enseigné
se situent dans une relation qui permet le dialogue,
une aide efficace, un jugement de valeur. L'examen
traditionnel est ainsi supprimé, remplacé par l'explora-
tion répétée des connaissances. Cette méthode d'en-
seignement intégré » sans que l'on puisse ici s'çtendre sur
son fonctionnement exact, se déroulera à l'hôpital, au
sein du service où l'étudiant aura rerrrpli chaque
matin des responsabilités au chevet du malade. La
même formation est ainsi assurée pour tous.
est la compréhension et l'assimilation des mécanismes et
chemins de la pensée qui conduisent à cette connaissance
élaborée. On ne doit plus savoir par cœur, l'on doit saisir
l'enchaînement logique des divers mécanismes physio-
pathologiques qui conduisent à la notion de maladie.
L'enseignement doit mettre l'étudiant en situation active,
à l'égard de lui-même et de ce qu'il doit apprendre :
c'est-à-dire expliquer aux autres étudiants. Pour cela,
des groupes de travail réunissant quatre à cinq étu-
diants sont indispensables. La tâche de l'enseignant
devient à la fois moins directive, plus active que par
le passé. C'est lui qui après avoir reçu une formation
psycho-pédagogique appropriée encadrera le groupe.
Dans ce nouveau système, l'enseignant et l'enseigné
se situent dans une relation qui permet le dialogue,
une aide efficace, un jugement de valeur. L'examen
traditionnel est ainsi supprimé, remplacé par l'explora-
tion répétée des connaissances. Cette méthode d'en-
seignement intégré » sans que l'on puisse ici s'çtendre sur
son fonctionnement exact, se déroulera à l'hôpital, au
sein du service où l'étudiant aura rerrrpli chaque
matin des responsabilités au chevet du malade. La
même formation est ainsi assurée pour tous.
Les trois cycles
Quant au schéma d'enseignement, on peut le résu-
mer en trois cycles. Le premier cycle d'un an
minimum, se déroulant en faculté, doit permettre à
l'étudiant d'acquérir les bases fondamentales préparant
à la bonne compréhension de l'enseignement intégré du
deuxième cycle, d'aborder le langage médical, le malade
et le milieu hospitalier. Il doit permettre aussi une ini-
tiation élémentaire au problème de la relation médecin-
malade. Des sciences humaines y seront incluses. Un stage
pratique de type infirmier sera accompli à ce niveau per-
mettant la pratique des soins courants et la prise de
contact avec le personnel médical, hospitalier, et avec
l'homme malade.
mer en trois cycles. Le premier cycle d'un an
minimum, se déroulant en faculté, doit permettre à
l'étudiant d'acquérir les bases fondamentales préparant
à la bonne compréhension de l'enseignement intégré du
deuxième cycle, d'aborder le langage médical, le malade
et le milieu hospitalier. Il doit permettre aussi une ini-
tiation élémentaire au problème de la relation médecin-
malade. Des sciences humaines y seront incluses. Un stage
pratique de type infirmier sera accompli à ce niveau per-
mettant la pratique des soins courants et la prise de
contact avec le personnel médical, hospitalier, et avec
l'homme malade.
Le deuxième cycle de trois ans minimum verra
l'étudiant accomplir une fonction hospitalière par-
tielle. Il sera responsable d'un nombre précis de lits de
malades sous la direction d'un étudiant du troisième
cycle. A cette phrase des études médicales, la sélection
cède le pas à l'orientation progressive dans le cadre des
certificats de sciences intégrées. Chaque certificat vise à
l'étude concertée des différentes sciences intéressant un
même système. Le certificat de « maladies
cardio-vasculaires », par exemple, conduira l'étudiant
à une. étude coordonnée de l'anatomie, de la ra-
diologie, de la physiologie du cœur, ainsi que de l'ana-
tome-pathologie, de la physiopathologie, de la clinique
et de la thérapeutique des principales maladies cardio-
vasculaires permettant ainsi l'acquisition de leurs connais-
sances de façon cohérente. La validation, selon un mode
à définir, des douze certificats serait nécessaire pour accé-
l'étudiant accomplir une fonction hospitalière par-
tielle. Il sera responsable d'un nombre précis de lits de
malades sous la direction d'un étudiant du troisième
cycle. A cette phrase des études médicales, la sélection
cède le pas à l'orientation progressive dans le cadre des
certificats de sciences intégrées. Chaque certificat vise à
l'étude concertée des différentes sciences intéressant un
même système. Le certificat de « maladies
cardio-vasculaires », par exemple, conduira l'étudiant
à une. étude coordonnée de l'anatomie, de la ra-
diologie, de la physiologie du cœur, ainsi que de l'ana-
tome-pathologie, de la physiopathologie, de la clinique
et de la thérapeutique des principales maladies cardio-
vasculaires permettant ainsi l'acquisition de leurs connais-
sances de façon cohérente. La validation, selon un mode
à définir, des douze certificats serait nécessaire pour accé-
der au troisième cycle. C'est ici que le travail en petits
groupes prend toute sa valeur. L'étudiant, rémunéré, tra-
vaille à plein temps dans le cadre du C.H.U.
groupes prend toute sa valeur. L'étudiant, rémunéré, tra-
vaille à plein temps dans le cadre du C.H.U.
Le troisième cycle, d'une durée minimum de trois
années universitaires, sera un cycle de responsabilités
diagnostiques et thérapeutiques à temps complet. Tous
les étudiants en médecine assureront ainsi des fonctions
d'internes. Au delà d'une année d'internat obligatoire en
médecine générale, les futurs généralistes devront valider
quatre options de six mois au choix. Quant aux futurs
spécialistes ils devront valider au moins six options de
six mois concernant leur spécialité. Ainsi seront aplanies,
tant au point de vue de la durée des études que de leurs
compétences respectives, les différences criantes entre le
généraliste et le spécialiste. En fin de troisième cycle,
trois possibilités sont offertes aux médecins : médecine
de ville, poste hospitalier à plein temps, poste hospitalier
à fréquentation discontinue. Les futurs cadres hospitaliers
seront recrutés et jugés par l'ensemble de l'équipe hospi-
talo-universitaire au terme d'un bilan comprenant :
années universitaires, sera un cycle de responsabilités
diagnostiques et thérapeutiques à temps complet. Tous
les étudiants en médecine assureront ainsi des fonctions
d'internes. Au delà d'une année d'internat obligatoire en
médecine générale, les futurs généralistes devront valider
quatre options de six mois au choix. Quant aux futurs
spécialistes ils devront valider au moins six options de
six mois concernant leur spécialité. Ainsi seront aplanies,
tant au point de vue de la durée des études que de leurs
compétences respectives, les différences criantes entre le
généraliste et le spécialiste. En fin de troisième cycle,
trois possibilités sont offertes aux médecins : médecine
de ville, poste hospitalier à plein temps, poste hospitalier
à fréquentation discontinue. Les futurs cadres hospitaliers
seront recrutés et jugés par l'ensemble de l'équipe hospi-
talo-universitaire au terme d'un bilan comprenant :
1) les qualités cliniques manifestée au cours du troi-
sième cycle (travail quotidien, rapports humains, sens
clinique) ;
sième cycle (travail quotidien, rapports humains, sens
clinique) ;
2) les qualités pédagogiques (travail d'encadrement des
groupes du deuxième cycle) ;
groupes du deuxième cycle) ;
3) les travaux personnels (cliniques, de recherche, éla-
boration de cahier de programme).
boration de cahier de programme).
4) les connaissances théoriques.
Un contrôle étudiant s'exercera à tous les niveaux.
Notons que ce schéma fonctionne de façon satisfaisante
dans divers pavs.
Notons que ce schéma fonctionne de façon satisfaisante
dans divers pavs.
Il n'est pas possible de rendre compte de tous les tra-
vaux de la Faculté de médecine de Paris. Nous avons
voulu en donner l'esprit et en tracer les grandes lignes.
Des colloques réunissent chaque semaine les diverses fa-
cultés de médecine de France, et harmonisent la progres-
sion. Ceux des enseignants qui ne préparent pas la contre-
attaque gouvernementale sont intégrés aux travaux des
Commissions, et apportent à la fougue étudiante un
contrepoint pratique nécessaire.
vaux de la Faculté de médecine de Paris. Nous avons
voulu en donner l'esprit et en tracer les grandes lignes.
Des colloques réunissent chaque semaine les diverses fa-
cultés de médecine de France, et harmonisent la progres-
sion. Ceux des enseignants qui ne préparent pas la contre-
attaque gouvernementale sont intégrés aux travaux des
Commissions, et apportent à la fougue étudiante un
contrepoint pratique nécessaire.
Quelques points de cette réforme seront sans doute
obtenus. Il aura fallu pour cela plusieurs milliers de
blessés et le drapeau rouge — bien symbolique — sur la
Faculté. Plus personne ne s'en offusque, on juge les étu-
diants sur leur travail. Les forces de police viennent
occuper la Faculté, le mouvement ne sera pas brisé ; ce
sera un témoignage supplémentaire de bêtise politique.
obtenus. Il aura fallu pour cela plusieurs milliers de
blessés et le drapeau rouge — bien symbolique — sur la
Faculté. Plus personne ne s'en offusque, on juge les étu-
diants sur leur travail. Les forces de police viennent
occuper la Faculté, le mouvement ne sera pas brisé ; ce
sera un témoignage supplémentaire de bêtise politique.
Déjà dans l'immense hall de la rue des Saints-Pères les
banderoles donnent le ton :
banderoles donnent le ton :
— Débats sur le contrôle des naissances,
— Luttes étudiantes, Luttes ouvrières,
— Médecine et bidonvilles,
— Médecin dans la société.
Après un mois et demi de travail acharné sur leurs pro-
blèmes quotidiens, les étudiants ont découvert l'ennemi
prioritaire : cette société qui rend l'homme malade.
blèmes quotidiens, les étudiants ont découvert l'ennemi
prioritaire : cette société qui rend l'homme malade.
Georges Marin
58
La lutte des cadres
De très nombreux cadres se sont engagés en mai
auprès de la classe ouvrière.
Les futurs cadres ne veulent plus vendre leur âme au patronat.
Les cadres conservateurs restent encore majoritaires.
Mais Vautorité ne pourra plus jamais s'exercer
comme avant.
Philippe Gavi Christian Jelen
L'EPOQUE où les patrons stockaient les cadres dès la
sortie des écoles de peur d'en manquer est révolue.
Le chômage opère des coupes sombres chez ces Français
dont le nombre varie de 750 000 à 1 300 000 selon le
mode d'évaluation et qui gagnent entre 1 800 et 10 000 F
par mois. Aux « vieux », les plus de quarante ans, on fait
le « coup » de l'organigramme. Aux jeunes, on offre
des postes raréfiés. Telle est la situation des cadres au
niveau de l'économie globale.
sortie des écoles de peur d'en manquer est révolue.
Le chômage opère des coupes sombres chez ces Français
dont le nombre varie de 750 000 à 1 300 000 selon le
mode d'évaluation et qui gagnent entre 1 800 et 10 000 F
par mois. Aux « vieux », les plus de quarante ans, on fait
le « coup » de l'organigramme. Aux jeunes, on offre
des postes raréfiés. Telle est la situation des cadres au
niveau de l'économie globale.
La révolte des étudiants a joué un rôle de détonateur.
Certains cadres ont « contesté », à la Sorbonne comme au
Centre du Patronat Français qu'un commando a investi
pendant quelques heures, le 21 mai. Ils ont mis en cause
l'avenir qu'on leur prépare comme leur aliénation dans
la société industrielle, aliénation qui a certains. traits
communs avec celle de l'ensemble des travailleurs : on
refuse aux cadres toute autonomie de jugement, tout
pouvoir de décision et, bien souvent, on les considère
comme les agents d'exécution d'une politique élaborée
en dehors d'eux. Le pouvoir monarchique des patrons
et leur mode de cooptation est mis en question.
Certains cadres ont « contesté », à la Sorbonne comme au
Centre du Patronat Français qu'un commando a investi
pendant quelques heures, le 21 mai. Ils ont mis en cause
l'avenir qu'on leur prépare comme leur aliénation dans
la société industrielle, aliénation qui a certains. traits
communs avec celle de l'ensemble des travailleurs : on
refuse aux cadres toute autonomie de jugement, tout
pouvoir de décision et, bien souvent, on les considère
comme les agents d'exécution d'une politique élaborée
en dehors d'eux. Le pouvoir monarchique des patrons
et leur mode de cooptation est mis en question.
De très nombreux cadres se sont engagés aux côtés
de la classe ouvrière. En tête du mouvement : les cadres
du Gaz et de l'Electricité de France, ceux de la métallurgie,
les cadres de recherche de l'industrie électrique et électro-
nique à la C.S.F. et Thomson, à la C.G.E. aussi. Qu'il
de la classe ouvrière. En tête du mouvement : les cadres
du Gaz et de l'Electricité de France, ceux de la métallurgie,
les cadres de recherche de l'industrie électrique et électro-
nique à la C.S.F. et Thomson, à la C.G.E. aussi. Qu'il
s'agisse de l'embauche, du licenciement, de la promotion,
de l'information, de la gestion financière et de la politique
d'investissement, les « cadres travailleurs » souhaitaient
des commissions paritaires, o Nous tenons à mettre au
point un organe en mesure de prendre les importantes
décisions qui jusqu'alors étaient du ressort du conseil
d'administration ou des- banques » ont décrété les gré-
vistes de la C.S.F. de Brest. Un ingénieur de la Thomson
a dit : « Avant la grève, on ne se connaissait pas. On ne se
mélangeait pas. Aucun ingénieur n'acceptait d'être
contesté par ses subordonnés. Depuis qu'on occupe
l'entreprise, on a discuté tous ensemble ce qui ne nous
était jamais arrivé. Les cadres se sont mouillés. Ils -se
sont engagés auprès de la classe ouvrière. L'autorité ne
pourra plus jamais s'exercer comme avant. »
de l'information, de la gestion financière et de la politique
d'investissement, les « cadres travailleurs » souhaitaient
des commissions paritaires, o Nous tenons à mettre au
point un organe en mesure de prendre les importantes
décisions qui jusqu'alors étaient du ressort du conseil
d'administration ou des- banques » ont décrété les gré-
vistes de la C.S.F. de Brest. Un ingénieur de la Thomson
a dit : « Avant la grève, on ne se connaissait pas. On ne se
mélangeait pas. Aucun ingénieur n'acceptait d'être
contesté par ses subordonnés. Depuis qu'on occupe
l'entreprise, on a discuté tous ensemble ce qui ne nous
était jamais arrivé. Les cadres se sont mouillés. Ils -se
sont engagés auprès de la classe ouvrière. L'autorité ne
pourra plus jamais s'exercer comme avant. »
Cette contestation s'est retrouvée chez les futurs cadres
et plus particulièrement à l'école des Hautes Etudes
Commerciales, où désormais une minorité des étudiants
se désolidarise du capital. Cette révolte est d'autant
plus remarquable qu'H.E.C. ressemble aux plus mo-
dernes Universités américaines : neuf cents étudiants
résident dans un luxueux campus de cent quarante hec-
tares, l'emploi des élèves est pratiquement assuré à la
sortie de l'école, l'enseignement très moderne repose
sur des séminaires en petits groupes et ne comporte
à peu près pas de cours magistraux anachroniques.
et plus particulièrement à l'école des Hautes Etudes
Commerciales, où désormais une minorité des étudiants
se désolidarise du capital. Cette révolte est d'autant
plus remarquable qu'H.E.C. ressemble aux plus mo-
dernes Universités américaines : neuf cents étudiants
résident dans un luxueux campus de cent quarante hec-
tares, l'emploi des élèves est pratiquement assuré à la
sortie de l'école, l'enseignement très moderne repose
sur des séminaires en petits groupes et ne comporte
à peu près pas de cours magistraux anachroniques.
59
M*
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Devant les usines Ford, la direction passe en revue l'armée des cadres
Les journées de mai ont bouleversé la vie tranquille
de 1 école des H.E.C. où chaque année la chambre de
commerce de Paris « achète l'âme » de neuf cents « futurs
- jeunes - cadres - dynamiques - destinés - à - un - avenir -
inévitablement - brillant » : le drapeau rouge a flotté
sur H.E.C. Groupés en comités d'action, deux cents
élevés ont été chargés de représenter leurs camarades
et de remplacer un bureau « apolitique » et incapable
dont la seule ambition consistait, selon les meilleures
traditions de l'école, à favoriser « le droit à l'humour
la bonne humeur et la débrouillardise». Le comité
d action a profité de la pression des événements pour
dénoncer l'idéologie patronale inoculée unilatéralement
aux étudiants depuis des années par la chambre de
commerce de Paris.
Les marionnettes inventées pour les besoins de la cause
Cette idéologie patronale s'exerce au niveau de ren-
seignement et de l'environnement politique, économique
et social. Elle a pour but d'intégrer les étudiants dans le
cadre du système économique actuel. Elle perpétue par
ailleurs le pouvoir arbitraire du patron et ces entreprises
seignement et de l'environnement politique, économique
et social. Elle a pour but d'intégrer les étudiants dans le
cadre du système économique actuel. Elle perpétue par
ailleurs le pouvoir arbitraire du patron et ces entreprises
60
monarchiques dans lesquelles les cadres et les travailleurs
se voient refuser toute autonomie de jugement et toute
participation réelle à l'élaboration des' décisions. Or,
la crise de mai le prouve, les cadres se situent au confluent
des différents courants qui animent l'entreprise : monde
du travail, de l'épargne, de l'administration et de l'Uni-
versité. Il est donc logique que l'enseignement des affaires
soit la synthèse d'un dialogue et que toutes les parties
prenantes à l'économie se substituent à la dictature
patronale à la tête de l'école des H.E.C. Les revendica-
tions des étudiants H.E.C. passent donc par la suppres-
sion de la tutelle de la chambre de commerce de Paris.
Les étudiants du comité d'action conteste encore la
dictature de la direction; Celle-ci refuse d'ouvrir l'ensei-
gnement à tout système économique qui pourrait s'écarter
du pur modèle libéral. Elle met au « rencart » la liberté
d'expression. L'école est si peu sûre d'elle-même que
toute pensée située à la gauche du centre recèle selon elle
un pouvoir subversif. Chaque année, à l'approche de
1 élection du bureau des élèves, les étudiants apolitiques
reçoivent des garanties sur leur classement, ceux de
gauche des mises en garde. La venue à l'école de Claude
Estier (F.G.D.S.), de Michel Rocard (P.S.U.) et de Pierre
Juqum (P.C.F.) a été précédée d'une longue épreuve de
force entre tes élèves et la direction. Les propos de ces
se voient refuser toute autonomie de jugement et toute
participation réelle à l'élaboration des' décisions. Or,
la crise de mai le prouve, les cadres se situent au confluent
des différents courants qui animent l'entreprise : monde
du travail, de l'épargne, de l'administration et de l'Uni-
versité. Il est donc logique que l'enseignement des affaires
soit la synthèse d'un dialogue et que toutes les parties
prenantes à l'économie se substituent à la dictature
patronale à la tête de l'école des H.E.C. Les revendica-
tions des étudiants H.E.C. passent donc par la suppres-
sion de la tutelle de la chambre de commerce de Paris.
Les étudiants du comité d'action conteste encore la
dictature de la direction; Celle-ci refuse d'ouvrir l'ensei-
gnement à tout système économique qui pourrait s'écarter
du pur modèle libéral. Elle met au « rencart » la liberté
d'expression. L'école est si peu sûre d'elle-même que
toute pensée située à la gauche du centre recèle selon elle
un pouvoir subversif. Chaque année, à l'approche de
1 élection du bureau des élèves, les étudiants apolitiques
reçoivent des garanties sur leur classement, ceux de
gauche des mises en garde. La venue à l'école de Claude
Estier (F.G.D.S.), de Michel Rocard (P.S.U.) et de Pierre
Juqum (P.C.F.) a été précédée d'une longue épreuve de
force entre tes élèves et la direction. Les propos de ces
trois personnalités politiques ne risqueraient-ils pas de
ternir cet « esprit H.E.C. » auquel la direction tient tant
et qui contribue « à donner aux élèves le moyen de résis-
ter à une force d'absorption qui est dans la nature même
des masses » (Société des Amis d'H.E.C.).
ternir cet « esprit H.E.C. » auquel la direction tient tant
et qui contribue « à donner aux élèves le moyen de résis-
ter à une force d'absorption qui est dans la nature même
des masses » (Société des Amis d'H.E.C.).
L'enseignement de la psycho-sociologie est l'un de
ces bons moyens fournis aux élèves pour résister à l'ab-
sorption des masses. Ils rejettent cet enseignement. Les
cas concrets qui leur sont soumis se bornent à décrire les
relations des différents groupes professionnels dans l'en-
treprise sans jamais expliquer que ce qui est en cause
c'est la condition économique et sociale du travailleur
salarié dans la société dont il est membre. La psycho-
sociologie d'entreprise se contente de leur présenter des
individus schématiques qui expriment quelques besoins
élémentaires. Il y a malheureusement loin du sujet
social réel à la marionnette inventée pour les besoins de
la cause. Il est assez significatif à cet égard de tracer les
portraits du patron et des ouvriers tels qu'ils sont soumis
au jugement des élèves.
ces bons moyens fournis aux élèves pour résister à l'ab-
sorption des masses. Ils rejettent cet enseignement. Les
cas concrets qui leur sont soumis se bornent à décrire les
relations des différents groupes professionnels dans l'en-
treprise sans jamais expliquer que ce qui est en cause
c'est la condition économique et sociale du travailleur
salarié dans la société dont il est membre. La psycho-
sociologie d'entreprise se contente de leur présenter des
individus schématiques qui expriment quelques besoins
élémentaires. Il y a malheureusement loin du sujet
social réel à la marionnette inventée pour les besoins de
la cause. Il est assez significatif à cet égard de tracer les
portraits du patron et des ouvriers tels qu'ils sont soumis
au jugement des élèves.
Le patron, vieux P.D.G., bienveillant et estimé a tou-
jours d'excellentes relations avec ses subordonnés même
s'il n'a que trop rarement l'occasion d'avoir des contacts
avec la base. M. de Montour*, par exemple, « maire de
Maçon », est très absorbé par les intérêts de sa famille
jours d'excellentes relations avec ses subordonnés même
s'il n'a que trop rarement l'occasion d'avoir des contacts
avec la base. M. de Montour*, par exemple, « maire de
Maçon », est très absorbé par les intérêts de sa famille
Cornell Capa - Magnum
qui sont dispersés dans de nombreux secteurs et en parti-
culier dans les textiles, les pneumatiques et les eaux
minérales». D'où ses rencontres trop peu fréquentes à
son gré avec le personnel.
culier dans les textiles, les pneumatiques et les eaux
minérales». D'où ses rencontres trop peu fréquentes à
son gré avec le personnel.
La psychologie au service de l'exploitation
Le patron sait encore s'adapter aux événements. « Par
sa neutralité politique de 1940 à 1945, M. Watteau, impor-
tant P.D.G. belge, a conservé des relations dans le nou-
veau gouvernement belge à la Libération ce qui lui a
permis de pousser le développement de sa firme ». M. de
Montour, lui, doit sa réussite à ses relations : « après
vingt ans d'Indochine où il était parti exploiter une
plantation d'hévéas, M. de Montour revient en France.
Il a de nombreuses relations dans le domaine bancaire
à Paris où il se rendait très souvent car sa fille avait
épousé un jeune administrateur civil du ministère de
l'Agriculture ».
sa neutralité politique de 1940 à 1945, M. Watteau, impor-
tant P.D.G. belge, a conservé des relations dans le nou-
veau gouvernement belge à la Libération ce qui lui a
permis de pousser le développement de sa firme ». M. de
Montour, lui, doit sa réussite à ses relations : « après
vingt ans d'Indochine où il était parti exploiter une
plantation d'hévéas, M. de Montour revient en France.
Il a de nombreuses relations dans le domaine bancaire
à Paris où il se rendait très souvent car sa fille avait
épousé un jeune administrateur civil du ministère de
l'Agriculture ».
Quand un conflit éclate au sein de l'entreprise, on met
à H.E.C. l'accent sur une incompréhension psychologique
à H.E.C. l'accent sur une incompréhension psychologique
61
plutôt que sur les méthodes d'appropriation des biens
de production. Les ouvriers forment dans les cas proposés
aux élèves une masse indistincte que l'on va même
jusqu'à caractériser par des formules comme : « les
ouvriers sont assez paresseux, ils viennent de tous les
pays, ils cherchent à éviter les travaux pénibles, ils sont
sales ou négligents, ils ne comprennent que la menace
ou l'ordre sans réplique ». Il s'agit certes de critiquer
ces jugements au nom d'une certaine bienveillance pas-
torale, ce qui permet de ne jamais aborder les problèmes
fondamentaux de la vie du travail, les cadences infernales
et les salaires. Dans une telle optique, les grèves quand
elles éclatent sont souvent imprévues. Il y a parfois des
« meneurs », ce qui explique tout. Il y a aussi des « ru-
meurs ». En supprimant les « rumeurs »etles« meneurs »,
on diminuera donc fortement les risques de grève. Pour
cela, il sera évidemment conseillé de faire appel à un
psycho-sociologue d'entreprise. Une minorité d'étudiants
H.E.C. conteste désormais ce type d'enseignement qui
a pour résultat de former des cadres à la traîne de l'évo-
lution sociale. Le fossé semble s'être désormais agrandi
entre cadres contestataires et cadres conservateurs. Cet
antagonisme préfigure sans doute la nature des conflits
de demain. On s'en rendra mieux compte, à travers
l'interview de deux jeunes cadres de 28 ans de chez
Renault, deux anciens H.E.C. types, épris de technique
et de rentabilité et dont l'imagination, l'enthousiasme
et l'idéalisme sont déjà étouffés par le poids des « res-
ponsabilités. »
de production. Les ouvriers forment dans les cas proposés
aux élèves une masse indistincte que l'on va même
jusqu'à caractériser par des formules comme : « les
ouvriers sont assez paresseux, ils viennent de tous les
pays, ils cherchent à éviter les travaux pénibles, ils sont
sales ou négligents, ils ne comprennent que la menace
ou l'ordre sans réplique ». Il s'agit certes de critiquer
ces jugements au nom d'une certaine bienveillance pas-
torale, ce qui permet de ne jamais aborder les problèmes
fondamentaux de la vie du travail, les cadences infernales
et les salaires. Dans une telle optique, les grèves quand
elles éclatent sont souvent imprévues. Il y a parfois des
« meneurs », ce qui explique tout. Il y a aussi des « ru-
meurs ». En supprimant les « rumeurs »etles« meneurs »,
on diminuera donc fortement les risques de grève. Pour
cela, il sera évidemment conseillé de faire appel à un
psycho-sociologue d'entreprise. Une minorité d'étudiants
H.E.C. conteste désormais ce type d'enseignement qui
a pour résultat de former des cadres à la traîne de l'évo-
lution sociale. Le fossé semble s'être désormais agrandi
entre cadres contestataires et cadres conservateurs. Cet
antagonisme préfigure sans doute la nature des conflits
de demain. On s'en rendra mieux compte, à travers
l'interview de deux jeunes cadres de 28 ans de chez
Renault, deux anciens H.E.C. types, épris de technique
et de rentabilité et dont l'imagination, l'enthousiasme
et l'idéalisme sont déjà étouffés par le poids des « res-
ponsabilités. »
Le critère de la production
Cadre I : « Quand on sort de H.E.C., on n'a aucune
notion de ce qu'on est capable de faire sauf si l'on pos-
sède une entreprise familiale. Je suis rentré à la Régie
Renault sur un coup de hasard. J'étais un peu réticent
parce que c'était une entreprise de construction automo-
bile et parce qu'elle était nationalisée. D'une part, je ne
comprenais rien à la voiture et je n'étais pas mécanicien'
pour deux sous. D'autre part, mes conceptions politiques
m'empêchaient d'adhérer au concept d'entreprise pu-
blique. Mais il fallait travailler.
notion de ce qu'on est capable de faire sauf si l'on pos-
sède une entreprise familiale. Je suis rentré à la Régie
Renault sur un coup de hasard. J'étais un peu réticent
parce que c'était une entreprise de construction automo-
bile et parce qu'elle était nationalisée. D'une part, je ne
comprenais rien à la voiture et je n'étais pas mécanicien'
pour deux sous. D'autre part, mes conceptions politiques
m'empêchaient d'adhérer au concept d'entreprise pu-
blique. Mais il fallait travailler.
J'ai commencé avec 1 600 F par mois plus 200 F de
prime. Aujourd'hui je touche 2 500 F. Après mes trois
semaines de stage ouvrier, je suis allé à la direction
juridique. Depuis janvier, je suis chargé des problèmes
financiers des treize filiales de la Régie.
prime. Aujourd'hui je touche 2 500 F. Après mes trois
semaines de stage ouvrier, je suis allé à la direction
juridique. Depuis janvier, je suis chargé des problèmes
financiers des treize filiales de la Régie.
Mon stage à la chaîne a été le premier contact avec la
Régie. Sur le moment j'étais complètement déprimé.
L'expérience au début m'a déçu. Il n'y a pas beaucoup
de Français : des Espagnols, des Portugais, des Italiens,
quelques Noirs, pas beaucoup de Noirs. Les communica-
tions ne sont pas faciles avec ces gens-là. J'étais assez
surpris au début de voir la façon dont ces gens arrivaient à
ne plus penser. Parce qu'ils font leur travail.
Régie. Sur le moment j'étais complètement déprimé.
L'expérience au début m'a déçu. Il n'y a pas beaucoup
de Français : des Espagnols, des Portugais, des Italiens,
quelques Noirs, pas beaucoup de Noirs. Les communica-
tions ne sont pas faciles avec ces gens-là. J'étais assez
surpris au début de voir la façon dont ces gens arrivaient à
ne plus penser. Parce qu'ils font leur travail.
Mon instructeur était un Polonais qui depuis vingt ans
faisait le même travail. Il recouvrait les toits. Il a com-
mencé avec les 4 CV, il a fait les Dauphine et maintenant
faisait le même travail. Il recouvrait les toits. Il a com-
mencé avec les 4 CV, il a fait les Dauphine et maintenant
il fait les R4. Il couvre cinq voitures à l'heure. Son tra-
vail est très pénible. Pendant dix heures par jour il a les
bras en l'air. Il s'y est habitué. Heureusement pour lui.
Et il arrive à ne plus penser. D'ailleurs les ouvriers qui
effectuent un travail pénible ne peuvent plus penser à
rien quand ils sortent de leur usine. Donc, ce sont des gens
toujours très sensibles aux mots d'ordre et à l'embrigadement.
Je pense que leur condition ne serait pas meilleure si le
régime changeait. Le travail à la chaîne resterait le même.
Pour la plupart de ces gens il est impensable qu'ils fassent
autre chose. »
vail est très pénible. Pendant dix heures par jour il a les
bras en l'air. Il s'y est habitué. Heureusement pour lui.
Et il arrive à ne plus penser. D'ailleurs les ouvriers qui
effectuent un travail pénible ne peuvent plus penser à
rien quand ils sortent de leur usine. Donc, ce sont des gens
toujours très sensibles aux mots d'ordre et à l'embrigadement.
Je pense que leur condition ne serait pas meilleure si le
régime changeait. Le travail à la chaîne resterait le même.
Pour la plupart de ces gens il est impensable qu'ils fassent
autre chose. »
Des gens qui pensent
— Pourrait-on aménager le travail ?
Cadre I : « Non. Il y a du point de vue économique des
critères dont il faut tenir compte. Il y a le critère important
de la production. Il faut quand même sortir un certain
nombre de voitures par jour. A l'extrême, il faudrait
supprimer la main-d'œuvre et automatiser tout l'en-
semble. Est-ce possible ? C'est aux techniciens de répondre.
Pas à moi.
critères dont il faut tenir compte. Il y a le critère important
de la production. Il faut quand même sortir un certain
nombre de voitures par jour. A l'extrême, il faudrait
supprimer la main-d'œuvre et automatiser tout l'en-
semble. Est-ce possible ? C'est aux techniciens de répondre.
Pas à moi.
— Etait-ce vos premiers rapports avec les ouvriers ?
Cadre I : « Oui, c'est un monde que j'ignorais complè-
tement. Mes habitudes, mon éducation, la grande école...
j'étais un peu dansTiréel. C'est pourtant des gens qui pensent,
des gens qui réfléchissent, des gens qu'il faut sauver de leur
état. Comment faire? C'est difficile : on ne peut pas faire
la révolution tous les jours. L'évolution doit être progres-
sive. Il faut éviter les heurts, le chaos. Il faut prendre
des précautions avec ces gens qui ne réagissent pas de la
même manière quand on les prend seul à seul ou en bloc.
La solidarité doit exister chez eux.
tement. Mes habitudes, mon éducation, la grande école...
j'étais un peu dansTiréel. C'est pourtant des gens qui pensent,
des gens qui réfléchissent, des gens qu'il faut sauver de leur
état. Comment faire? C'est difficile : on ne peut pas faire
la révolution tous les jours. L'évolution doit être progres-
sive. Il faut éviter les heurts, le chaos. Il faut prendre
des précautions avec ces gens qui ne réagissent pas de la
même manière quand on les prend seul à seul ou en bloc.
La solidarité doit exister chez eux.
— Une conscience de classe ?
Cadre I : « Je ne sais pas si ce n'est pas une conscience
de travail plutôt qu'une conscience de classe. Je dirais
que sur une chaîne de montage l'O.S. 2 est privilégié par
rapport aux autres ouvriers parce qu'il voit la carcasse
de la voiture arriver. Il a l'impression de faire quelque
chose. Ce qui est très grave, c'est de demander à ces gens
de faire quelque chose alors qu'ils ne savent pas pourquoi
et à quoi ça sert. »
de travail plutôt qu'une conscience de classe. Je dirais
que sur une chaîne de montage l'O.S. 2 est privilégié par
rapport aux autres ouvriers parce qu'il voit la carcasse
de la voiture arriver. Il a l'impression de faire quelque
chose. Ce qui est très grave, c'est de demander à ces gens
de faire quelque chose alors qu'ils ne savent pas pourquoi
et à quoi ça sert. »
Cadre II : « Pendant un mois, j'ai monté les feux
arrières sur la chaîne d'assemblage de la R4. J'ai eu peu
de contacts avec les ouvriers. J'en ai surtout avec les
étrangers : ils sont moins entourés par les syndicats.
C'est extrêmement difficile de connaître l'ouvrier français.
D'autant que les étrangers considèrent le Français de
45 ans qui travaille encore à la chaîne comme un parfait
crétin. J'estime quant à moi que le type qui commence à 18 ans
est tellement abruti par son travail qu'il n'a aucune possibilité
morale et physique de s'en sortir. L'ouvrier étranger lui tra-
vaille quatre à cinq ans, il se constitue un pécule puis il
retourne chez lui. Certains ouvriers français dont la femme
était restée à la ferme cherchaient eux aussi à se constituer
un pécule pour acheter quelques vaches. Ils estimaient
qu'ils étaient au bagne mais que ce bagne ne durerait pas
plus de deux à trois ans. »
arrières sur la chaîne d'assemblage de la R4. J'ai eu peu
de contacts avec les ouvriers. J'en ai surtout avec les
étrangers : ils sont moins entourés par les syndicats.
C'est extrêmement difficile de connaître l'ouvrier français.
D'autant que les étrangers considèrent le Français de
45 ans qui travaille encore à la chaîne comme un parfait
crétin. J'estime quant à moi que le type qui commence à 18 ans
est tellement abruti par son travail qu'il n'a aucune possibilité
morale et physique de s'en sortir. L'ouvrier étranger lui tra-
vaille quatre à cinq ans, il se constitue un pécule puis il
retourne chez lui. Certains ouvriers français dont la femme
était restée à la ferme cherchaient eux aussi à se constituer
un pécule pour acheter quelques vaches. Ils estimaient
qu'ils étaient au bagne mais que ce bagne ne durerait pas
plus de deux à trois ans. »
62
— Les grèves étaient-elles inopportunes ?
Cadre I : « Elles l'étaient. Ces grèves n'ont pas été le
lait de l'ensemble mais plus spécialement celui des jeunes.
Les événements de mai n'ont pas posé le problème du
monde du travail mais celui de la jeunesse. A Nantes
(Sud Aviation) et à Cléon ce sont les jeunes qui ont
commencé le mouvement. Les syndicats traditionnels ont
rapidement été submergés par cette lame de fond dont ils
n'avaient pas soupçonné l'ampleur. Au début, on (la
direction) ne croyait pas que cela durerait longtemps.
Et puis, il }' a des limites qu'on ne peut pas dépasser. Ce que
la direction a donné correspond à ce qu'elle pouvait
donner. »
lait de l'ensemble mais plus spécialement celui des jeunes.
Les événements de mai n'ont pas posé le problème du
monde du travail mais celui de la jeunesse. A Nantes
(Sud Aviation) et à Cléon ce sont les jeunes qui ont
commencé le mouvement. Les syndicats traditionnels ont
rapidement été submergés par cette lame de fond dont ils
n'avaient pas soupçonné l'ampleur. Au début, on (la
direction) ne croyait pas que cela durerait longtemps.
Et puis, il }' a des limites qu'on ne peut pas dépasser. Ce que
la direction a donné correspond à ce qu'elle pouvait
donner. »
— Qu'avez-vous pensé de l'intervention des C.R.S.
à Flins ?
à Flins ?
Cadre I : « Pour être franc, je pense qu'on pouvait
envoyer les C.R.S. Il y avait une chance que ça marche,
une chance que ça ne marche pas. Ça n'a pas marché. »
envoyer les C.R.S. Il y avait une chance que ça marche,
une chance que ça ne marche pas. Ça n'a pas marché. »
— Avez-vous senti une certaine solidarité, une com-
préhension vis-à-vis des jeunes travailleurs ?
préhension vis-à-vis des jeunes travailleurs ?
Cadre I : « Des groupes extrémistes ont voulu renverser
les structures de la société. La réforme, l'évolution,
je n'en conteste pas l'intérêt. Mais il faut bien avouer que
l'ordre établi n'est pas plus mauvais qu'un autre. »
les structures de la société. La réforme, l'évolution,
je n'en conteste pas l'intérêt. Mais il faut bien avouer que
l'ordre établi n'est pas plus mauvais qu'un autre. »
Cadre II : ce Le cadre sait comment fonctionne une'
entreprise, quelle' est sa marge de profit et son avenir.
Il connaît donc bien les conséquences clé la grève et
l'impossibilité de satisfaire certaines revendications. »
entreprise, quelle' est sa marge de profit et son avenir.
Il connaît donc bien les conséquences clé la grève et
l'impossibilité de satisfaire certaines revendications. »
L'ordre et la direction
— Que pense-t-on chez Renault de l'autogestion ?
Cadre I : ce Elle existe à la Régie puisque le conseil
Cadre I : ce Elle existe à la Régie puisque le conseil
d'administration comprend quatorze membres : sept
nommés par l'Etat, deux par les usagers, cinq par le
personnel (deux caches, un agent de maîtrise et dcu\
ouvriers naturellement syndiqués). »
nommés par l'Etat, deux par les usagers, cinq par le
personnel (deux caches, un agent de maîtrise et dcu\
ouvriers naturellement syndiqués). »
— Pourquoi l'ouvrier n'a-t-il pas le sentiment de par-
ticiper ?
ticiper ?
Cadre II : c< Encore faut-il que l'ouvrier ait le moven
de participer. Les responsables de la C.G.T., delà C F.O.T.
et de F.O. ne donnent pas une culture économique suf-
fisante à leurs adhérents. Le délégué syndical ne l'ait pas
de cours d'économie. Ceux qui ont un niveau économique
suffisant ne le montrent pas, ils veulent conserver cette
sorte de sous-prolétariat pour conserver leur autorité. »
de participer. Les responsables de la C.G.T., delà C F.O.T.
et de F.O. ne donnent pas une culture économique suf-
fisante à leurs adhérents. Le délégué syndical ne l'ait pas
de cours d'économie. Ceux qui ont un niveau économique
suffisant ne le montrent pas, ils veulent conserver cette
sorte de sous-prolétariat pour conserver leur autorité. »
— Y a-t-il une barrière sociale entre les cadres et les
ouvriers ?
ouvriers ?
Cadre I : ce Non, pas du tout. Je connais mal les ouvriers,
mais je ne pense pas que la barrière c'xiste. En tout cas,
dans les bureaux la barrière entre les agents de maîtrise
et les cadres n'existe pas. »
mais je ne pense pas que la barrière c'xiste. En tout cas,
dans les bureaux la barrière entre les agents de maîtrise
et les cadres n'existe pas. »
— Pourquoi les travailleurs de Renault parlent-ils de
hiérarchie écrasante et de caserne?
hiérarchie écrasante et de caserne?
Cadre II : ee Billancouri emploie trente mille personnes,
il est à peu près obligatoire que la direction impose un
certain ordre. S'il n'y a pas d'ordre, il n'y a plus de pro-
duction et s'il n'y a plus de production c'est le chômage.
il est à peu près obligatoire que la direction impose un
certain ordre. S'il n'y a pas d'ordre, il n'y a plus de pro-
duction et s'il n'y a plus de production c'est le chômage.
Cadre I : ce Je voudrais revenir à la barrière entre cadres
et ouvriers. En y réfléchissant bien je n'en vois pas. Nous
mangeons dans les mêmes cantines. Evidemment nous
déjeunons entre cadres. C'est une simple différence de
condition. Le cadre qui sort d'une grande école est
assuré de vivre avec aisance. Il touchera rapidement
plus de quatre cent mille francs par mois. L'ouvrier
platonnera à cent cinquante mille Irancs.
et ouvriers. En y réfléchissant bien je n'en vois pas. Nous
mangeons dans les mêmes cantines. Evidemment nous
déjeunons entre cadres. C'est une simple différence de
condition. Le cadre qui sort d'une grande école est
assuré de vivre avec aisance. Il touchera rapidement
plus de quatre cent mille francs par mois. L'ouvrier
platonnera à cent cinquante mille Irancs.
Oui, mais...
— H.E.C. forme-t-il des cadres de répression?
Cadre I : ec Le patronat, c'est une chose, les salariés,
Cadre I : ec Le patronat, c'est une chose, les salariés,
une autre. Il y a tfes salariés qui commandent, d'autres
qui exécutent. Les cadres ont autant ele problèmes que les
ouvriers. Je dirais même qu'ils en ont plus. Salariés,
ils sont proches des ouvriers, ils connaissent leurs problèmes.
Cadres, ils sont obligés de montrer une certaine faveur envers
le patronat. C'est un dilemme duquel il est difficile de sortir.
Le cadre est un animal hybride c^ui est pris entre deux
feux. »
qui exécutent. Les cadres ont autant ele problèmes que les
ouvriers. Je dirais même qu'ils en ont plus. Salariés,
ils sont proches des ouvriers, ils connaissent leurs problèmes.
Cadres, ils sont obligés de montrer une certaine faveur envers
le patronat. C'est un dilemme duquel il est difficile de sortir.
Le cadre est un animal hybride c^ui est pris entre deux
feux. »
— Le socialisme ?
Cadre II : ce Cela n'amènera rien. Surtout sur le plan
de la condition du travail. »
de la condition du travail. »
Cadre I : ec Avec le Marché commun il faut être compé-
titif : les entreprises françaises devront continuer à pro-
duire de plus en plus. Il ne faut pas s'en cacher. Quel que
soit celui qui possède le capital, l'Etat ou le particulier.
A moins que le socialisme ne veuille tout abdiquer. Quant
à moi, je pense que nejus devrons mettre sur pied un
nouveau type d'économie libérale où les cadres auront un
rôle considérable à jouer. Quant au socialisme rigide à la
Cohn-Bendit, c'est bon pour les pays sous-développcs. »
titif : les entreprises françaises devront continuer à pro-
duire de plus en plus. Il ne faut pas s'en cacher. Quel que
soit celui qui possède le capital, l'Etat ou le particulier.
A moins que le socialisme ne veuille tout abdiquer. Quant
à moi, je pense que nejus devrons mettre sur pied un
nouveau type d'économie libérale où les cadres auront un
rôle considérable à jouer. Quant au socialisme rigide à la
Cohn-Bendit, c'est bon pour les pays sous-développcs. »
— Qu'avez-vous pensé de Cohn-Bendit?
Cadre I : ce Du bien quand il est retourné chez lui. Il
n'avait pas à semer la pagaille dans son pays d'adoption. »
n'avait pas à semer la pagaille dans son pays d'adoption. »
— N'y a-t-il pas contradiction entre votre ec chez lui »
et votre vocation européenne ?
et votre vocation européenne ?
Cadre I : ce Oui mais... il y a quand même deux Europe.
L'Europe supranationale qui a mon sens est irréalisable,
celle1 de Lecanuet, Maurice Faure et consort. Il y a aussi
l'Europe du général de Gaulle qui ferme les frontières
au moment où il faut les ouvrir. L'Europe ne sera ni l'une
ni l'autre. Elle sera ce qu'on voudra qu'elle soit et ce sera
une Europe existentielle.
L'Europe supranationale qui a mon sens est irréalisable,
celle1 de Lecanuet, Maurice Faure et consort. Il y a aussi
l'Europe du général de Gaulle qui ferme les frontières
au moment où il faut les ouvrir. L'Europe ne sera ni l'une
ni l'autre. Elle sera ce qu'on voudra qu'elle soit et ce sera
une Europe existentielle.
Pour en revenir à Cohn-Bendit, j'espère que les jeunes
Allemands ne sont pas tous comme lui et qu'ils ne des-
cendent pas dans la rue avec un drapeau noir. »
Allemands ne sont pas tous comme lui et qu'ils ne des-
cendent pas dans la rue avec un drapeau noir. »
— Que représente pour vous le drapeau tricolore ?
Cadre II : <e Pas grand chose en France. Mais j'ai eu la
Cadre II : <e Pas grand chose en France. Mais j'ai eu la
chance de vivre aux colonies et le jour du 14 juillet, on a
été reçus à l'Ambassade de France1. En entendant la
Marseillaise, en voyant le drapeau bleu - blanc - rouge, on
était fier d'être Français. »
été reçus à l'Ambassade de France1. En entendant la
Marseillaise, en voyant le drapeau bleu - blanc - rouge, on
était fier d'être Français. »
Christian Jelc-n Philippe (ravi
* Les citations entre1 guillemets sont extraires de-s cas soumis aux élè\es.
63
£|S
INCIDENCES
ÉCONOMIQUES
ÉCONOMIQUES
Le Gouvernement se retrouve
au pied du mur.
au pied du mur.
En rétablissant les contingentements
il tourne le dos au Marché commun.
Derrière les accords de Grenelle se profilent
la hausse des prix, le chômage
et la dévaluation.
Michel Fansten
LUNDI 27 MAI : syndicat, patronat et gouvernement
dressent à Grenelle le procès-verbal de leurs points
d'accord et de désaccord. Le procès-verbal de Grenelle
sonne le glas d'une politique économique — « l'expansion1
dans la stabilité » — qui reposait sur la concentration
industrielle et la stabilité monétaire. Elle visait à « assurer
la capacité concurrentielle de notre économie en vue de
préserver son indépendance, d'assurer son expansion
dans l'équilibre et de faire d'elle le support d'un progrès
social réel et durable » (Présentation du Ve plan). Les
moyens de cette politique économique reposaient sur des
dressent à Grenelle le procès-verbal de leurs points
d'accord et de désaccord. Le procès-verbal de Grenelle
sonne le glas d'une politique économique — « l'expansion1
dans la stabilité » — qui reposait sur la concentration
industrielle et la stabilité monétaire. Elle visait à « assurer
la capacité concurrentielle de notre économie en vue de
préserver son indépendance, d'assurer son expansion
dans l'équilibre et de faire d'elle le support d'un progrès
social réel et durable » (Présentation du Ve plan). Les
moyens de cette politique économique reposaient sur des
64
£
oo
oo
.2
3
3
avantages fiscaux destinés à favoriser les concentrations,
les accords de coopération ou les augmentations de
capital ; sur la surveillance des salaires et des prix, la
réduction de l'impasse budgétaire, l'équilibre de la
balance commerciale.
les accords de coopération ou les augmentations de
capital ; sur la surveillance des salaires et des prix, la
réduction de l'impasse budgétaire, l'équilibre de la
balance commerciale.
A ces principes libéraux, s'ajoutaient quelques touches
de dirigisme : contrôle de la liberté des prix par le jeu des
contrats de programme (1), aide à la modernisation dans
la sidérurgie, crédits débloqués en faveur du plan Calcul.
Le tout était corrigé à court terme par la relance de la
consommation : report des recouvrements fiscaux,
de dirigisme : contrôle de la liberté des prix par le jeu des
contrats de programme (1), aide à la modernisation dans
la sidérurgie, crédits débloqués en faveur du plan Calcul.
Le tout était corrigé à court terme par la relance de la
consommation : report des recouvrements fiscaux,
DEMI
U|
cadeau de 15 % sur le premier tiers provisionnel de
1968.
1968.
Cette politique avait connu un certain succès : la
stagnation de 1967 avait contrasté avec la récession de
nos voisins, de l'Allemagne notamment.
stagnation de 1967 avait contrasté avec la récession de
nos voisins, de l'Allemagne notamment.
En fait, les résultats favorisaient les bénéfices des entre-
prises au détriment des salaires et l'expansion au détri-
ment de l'emploi. La population active occupée dans
l'industrie à l'exception du bâtiment passait seulement
de 5791000 personnes en 1962 à 5952000 en 1967.
Dans le même intervalle, la population active occupée
prises au détriment des salaires et l'expansion au détri-
ment de l'emploi. La population active occupée dans
l'industrie à l'exception du bâtiment passait seulement
de 5791000 personnes en 1962 à 5952000 en 1967.
Dans le même intervalle, la population active occupée
dans l'agriculture diminuait de 613 000 unités. L'industrie
apparaissait donc incapable d'offrir dvi travail à ceux qui
l'avaient perdu. En 1968, le nombre des chômeurs attei-
gnait 500000.
apparaissait donc incapable d'offrir dvi travail à ceux qui
l'avaient perdu. En 1968, le nombre des chômeurs attei-
gnait 500000.
C'est dans cette conjoncture qu'intervicnnent les évé-
nements de mai et les accords de Grenelle :
nements de mai et les accords de Grenelle :
- Hausse du S.M.I.C. de 35 %.
— Réduction de la durée du travail de 2 heures pour les
horaires supérieurs à 48 heures et de 1 heure pour les
horaires de 45 à 48 heures d'ici la fin du Ve plan (1970).
horaires supérieurs à 48 heures et de 1 heure pour les
horaires de 45 à 48 heures d'ici la fin du Ve plan (1970).
— Salaires réels augmentés de 7 % en juin (compte
65
tenu des augmentations intervenues depuis le 1er janvier
1968) et de 3 % en octobre.
1968) et de 3 % en octobre.
— Ticket modérateur de la Sécurité sociale ramené de
30 à 25 %.
30 à 25 %.
— Projet d'aménagement des allocations familiales en
faveur des familles de plus de trois enfants.
faveur des familles de plus de trois enfants.
— Augmentation envisagée dès octobre 1968 de l'allo-
cation pour personnes âgées.
cation pour personnes âgées.
— Indemnisation des jours de grèves à 50 % et récupé-
ration éventuelle du reste sous forme d'heures supplé-
mentaires.
ration éventuelle du reste sous forme d'heures supplé-
mentaires.
Les accords de Grenelle
La généralisation de ces accords aux différents secteurs
de l'économie a été assez variable mais il ne semble pas
que les décisions de Grenelle en ce qui concerne les
salaires du secteur privé aient été sensiblement dépassées.
Les avantages les plus marquants concernent les bas
salaires :
de l'économie a été assez variable mais il ne semble pas
que les décisions de Grenelle en ce qui concerne les
salaires du secteur privé aient été sensiblement dépassées.
Les avantages les plus marquants concernent les bas
salaires :
S.M.A.G. 4-62%.
Fonctionnaires bas salaire +17%.
Textiles » » + 22 %.
Pétrole » » +16 %.
S.N.C.F. » » +16%.
E.D.F.-G.D.F. » » +17%.
Résultats : la masse salariale augmente environ de
12 % en 1968 contre les 6 à 7 % prévus dans le cadre
de la politique économique antérieure.
12 % en 1968 contre les 6 à 7 % prévus dans le cadre
de la politique économique antérieure.
Une telle hausse peut sembler forte ; mais dans le passé
on avait déjà vu des augmentations de salaire supérieures
à 10% : 14,7% en 1958, 11,696 en 1961 et 14,5% en
1963.
on avait déjà vu des augmentations de salaire supérieures
à 10% : 14,7% en 1958, 11,696 en 1961 et 14,5% en
1963.
De tels chiffres peuvent surprendre. En fait, ces aug-
mentations qui portent sur l'ensemble de l'année consi-
dérée par rapport à l'année précédente sont intervenues
dans des situations économiques très différentes de celle
que nous connaissons actuellement. Elles ont été carac-
térisées par l'absence de chômage, une demande très
soutenue et la hausse des prix. En 1958, la conjoncture
était caractérisée par une forte activité : guerre d'Algérie,
suremploi du fait de la mobilisation de cinq cent mille
jeunes gens, inflation ponctuée en décembre 1958 par
une dévaluation. De 1962 à 1964 l'arrivée des capitaux
algériens avait entretenu l'activité et assuré le plein
emploi. De telles situations permettaient alors à la classe
ouvrière de revendiquer plus facilement des augmenta-
tions de salaires qu'on lui accordait plus aisément. Mais
en raison de la hausse des prix, le pouvoir d'achat des
travailleurs n'avait pas été sensiblement amélioré.
mentations qui portent sur l'ensemble de l'année consi-
dérée par rapport à l'année précédente sont intervenues
dans des situations économiques très différentes de celle
que nous connaissons actuellement. Elles ont été carac-
térisées par l'absence de chômage, une demande très
soutenue et la hausse des prix. En 1958, la conjoncture
était caractérisée par une forte activité : guerre d'Algérie,
suremploi du fait de la mobilisation de cinq cent mille
jeunes gens, inflation ponctuée en décembre 1958 par
une dévaluation. De 1962 à 1964 l'arrivée des capitaux
algériens avait entretenu l'activité et assuré le plein
emploi. De telles situations permettaient alors à la classe
ouvrière de revendiquer plus facilement des augmenta-
tions de salaires qu'on lui accordait plus aisément. Mais
en raison de la hausse des prix, le pouvoir d'achat des
travailleurs n'avait pas été sensiblement amélioré.
Aujourd'hui, c'est moins le taux des augmentations
que le moment où elles interviennent — après trois
semaines de paralysie générale et dans une conjoncture
économique serrée — qui risquent de provoquer une
série de tensions. Ces tensions ne peuvent pas encore
être mesurées ; elles dépendront des décisions prises par
l'Etat, de la liberté qui sera laissée aux entrepreneurs
de « pénaliser » les salariés après leur avoir cédé. Il s'agit
que le moment où elles interviennent — après trois
semaines de paralysie générale et dans une conjoncture
économique serrée — qui risquent de provoquer une
série de tensions. Ces tensions ne peuvent pas encore
être mesurées ; elles dépendront des décisions prises par
l'Etat, de la liberté qui sera laissée aux entrepreneurs
de « pénaliser » les salariés après leur avoir cédé. Il s'agit
là d'une question politique. Une chose est certaine : les
«trois inquiétudes» de l'économie capitaliste moderne
qui entretiennent chez les salariés le sentiment de « culpa-
bilité économique » se profilent déjà : la hausse des prix,
le chômage, la dévaluation.
«trois inquiétudes» de l'économie capitaliste moderne
qui entretiennent chez les salariés le sentiment de « culpa-
bilité économique » se profilent déjà : la hausse des prix,
le chômage, la dévaluation.
La hausse des prix
Dans certains secteurs, comme la boulangerie et
l'automobile, les augmentations de prix ont suivi immé-
diatement les augmentations de salaire. Partout où cela
sera possible, le patronat cherchera à maintenir ses marges
en augmentant ses prix, même si cela doit aboutir à une
diminution du volume des ventes, donc à un ralentisse-
ment de la production.
l'automobile, les augmentations de prix ont suivi immé-
diatement les augmentations de salaire. Partout où cela
sera possible, le patronat cherchera à maintenir ses marges
en augmentant ses prix, même si cela doit aboutir à une
diminution du volume des ventes, donc à un ralentisse-
ment de la production.
Pourtant les charges salariales ne représentent qu'une
fraction des coûts. L'augmentation de ces charges ne
devrait donc affecter qu'une fraction du prix de vente.
On peut se reporter à l'exemple donné par Michel
Bosquet dans le Nouvel Observateur du 12 juin : dans
l'automobile où les salaires interviennent pour 30 à
40 % du coût, une augmentation de 11 % de la masse
salariale conduirait à une augmentation apparente du
coût, à productivité constante, de moins de 4 %. Dans
d'autres secteurs industriels comme la chimie où les
salaires représentent 20 % du coût total, l'augmentation
est plus faible encore. La concurrence — et en particulier
la concurrence étrangère — vient modifier sensiblement
ces calculs. Les prix en régime capitaliste ne se forment
pas uniquement en regard des coûts mais également en
fonction de la demande et de la stratégie fixées par les
grandes firmes. Certaines augmentations ne seront donc
pas possibles. L'industriel cherchera alors à gagner sur
la productivité du travail en augmentant les cadences et
en supprimant les postes les moins productifs. Une bonne
partie des augmentations obtenues se trouvera ainsi
« récupérée » à l'intérieur même de l'entreprise. Par
ailleurs, les patrons du secteur privé disposent d'une
autorité suffisante et de moyens nombreux pour tourner
les accords de Grenelle : suppressions d'emplois sous
prétexte d'innovations techniques, réductions d'horaires
et même travail « noir ». Autre élément de la hausse des
prix : l'augmentation du revenu des salariés. Là encore,
il faut préciser les choses. Ces augmentations n'excéderont
pas neuf milliards de francs, soit en moyenne soixante
francs par mois et par salaire. Elles se répercuteront sur le
revenu des consommateurs avec un retard d'autant plus
grand que ce revenu aura été diminué pendant la grève.
Et la part d'augmentation du revenu affectée à la consom-
mation sera réduite : les incertitudes du marché de
l'emploi incitent les salariés à mobiliser une épargne de
précaution déjà très entamée par les grèves.
fraction des coûts. L'augmentation de ces charges ne
devrait donc affecter qu'une fraction du prix de vente.
On peut se reporter à l'exemple donné par Michel
Bosquet dans le Nouvel Observateur du 12 juin : dans
l'automobile où les salaires interviennent pour 30 à
40 % du coût, une augmentation de 11 % de la masse
salariale conduirait à une augmentation apparente du
coût, à productivité constante, de moins de 4 %. Dans
d'autres secteurs industriels comme la chimie où les
salaires représentent 20 % du coût total, l'augmentation
est plus faible encore. La concurrence — et en particulier
la concurrence étrangère — vient modifier sensiblement
ces calculs. Les prix en régime capitaliste ne se forment
pas uniquement en regard des coûts mais également en
fonction de la demande et de la stratégie fixées par les
grandes firmes. Certaines augmentations ne seront donc
pas possibles. L'industriel cherchera alors à gagner sur
la productivité du travail en augmentant les cadences et
en supprimant les postes les moins productifs. Une bonne
partie des augmentations obtenues se trouvera ainsi
« récupérée » à l'intérieur même de l'entreprise. Par
ailleurs, les patrons du secteur privé disposent d'une
autorité suffisante et de moyens nombreux pour tourner
les accords de Grenelle : suppressions d'emplois sous
prétexte d'innovations techniques, réductions d'horaires
et même travail « noir ». Autre élément de la hausse des
prix : l'augmentation du revenu des salariés. Là encore,
il faut préciser les choses. Ces augmentations n'excéderont
pas neuf milliards de francs, soit en moyenne soixante
francs par mois et par salaire. Elles se répercuteront sur le
revenu des consommateurs avec un retard d'autant plus
grand que ce revenu aura été diminué pendant la grève.
Et la part d'augmentation du revenu affectée à la consom-
mation sera réduite : les incertitudes du marché de
l'emploi incitent les salariés à mobiliser une épargne de
précaution déjà très entamée par les grèves.
Il faut enfin compter avec les hausses spéculatives là
où les affaires sont faciles, le marché protégé, la demande
importante. Certains commerçants, restaurateurs, coif-
feurs, garagistes sont déjà tentés de profiter du climat
actuel pour augmenter leurs prix sans justification parti-
culière. On ne voit guère non plus de justification aux
où les affaires sont faciles, le marché protégé, la demande
importante. Certains commerçants, restaurateurs, coif-
feurs, garagistes sont déjà tentés de profiter du climat
actuel pour augmenter leurs prix sans justification parti-
culière. On ne voit guère non plus de justification aux
66
hausses des loyers (5 à 12%) et des chambres d'hôtels
de petit standing (.5 %). Par conséquent, la hausse globale
des prix devrait tourner en 1968 autour de 6 % au lieu
des 3,5 % prévus avant la crise. Ces hausses porteront
principalement sur les secteurs à fort pourcentage de
main-d'œuvre, là où les gains de productivité sont dif-
ficiles (bâtiment, transports), là où la demande est solide
et la concurrence sans effet (services et consommation
de luxe). Dans les secteurs soumis à une forte concurrence
étrangère (électro ménager, ameublement) les prix ne
devraient pas augmenter de façon sensible. Pour certains
produits, on pourrait même assister à des politiques de
prix assez différentes de celles qui avaient cours : les
fabricants de postes de télévision en couleurs, par
exemple, imiteraient leurs collègues allemands et dimi-
nueraient leurs prix pour élargir leurs marchés.
de petit standing (.5 %). Par conséquent, la hausse globale
des prix devrait tourner en 1968 autour de 6 % au lieu
des 3,5 % prévus avant la crise. Ces hausses porteront
principalement sur les secteurs à fort pourcentage de
main-d'œuvre, là où les gains de productivité sont dif-
ficiles (bâtiment, transports), là où la demande est solide
et la concurrence sans effet (services et consommation
de luxe). Dans les secteurs soumis à une forte concurrence
étrangère (électro ménager, ameublement) les prix ne
devraient pas augmenter de façon sensible. Pour certains
produits, on pourrait même assister à des politiques de
prix assez différentes de celles qui avaient cours : les
fabricants de postes de télévision en couleurs, par
exemple, imiteraient leurs collègues allemands et dimi-
nueraient leurs prix pour élargir leurs marchés.
Chômage et dévaluation
Le problème de l'emploi hypothèque l'avenir. Les
accords de Grenelle, l'aiguillon de la concurrence inter-
nationale et de la concentration vont porter un coup
mortel aux entreprises qui subsistaient en versant de bas
salaires à leurs employés. Ces entreprises seront inca-
pables de compenser la hausse de leurs coûts par une
augmentation équivalente des prix de vente.
accords de Grenelle, l'aiguillon de la concurrence inter-
nationale et de la concentration vont porter un coup
mortel aux entreprises qui subsistaient en versant de bas
salaires à leurs employés. Ces entreprises seront inca-
pables de compenser la hausse de leurs coûts par une
augmentation équivalente des prix de vente.
Trois secteurs sont particulièrement menacés : l'agri-
culture et les industries agricoles et alimentaires ; le
textile, l'habillement et la chaussure ; la sidérurgie.
culture et les industries agricoles et alimentaires ; le
textile, l'habillement et la chaussure ; la sidérurgie.
Néanmoins, les experts notaient en avril les signes
avant-coureurs d'une reprise de l'emploi. Si les raisons
de cette reprise — niveau soutenu de la demande inté-
rieure et extérieure — subsistent, le rattrapage de l'éco-
nomie pour satisfaire cette demande pourrait, après
trois semaines de grève, imposer un rythme soutenu de
la production et favoriser l'emploi.
avant-coureurs d'une reprise de l'emploi. Si les raisons
de cette reprise — niveau soutenu de la demande inté-
rieure et extérieure — subsistent, le rattrapage de l'éco-
nomie pour satisfaire cette demande pourrait, après
trois semaines de grève, imposer un rythme soutenu de
la production et favoriser l'emploi.
Entre ces deux tendances opposées, du chômage ou
du plein emploi, le choix dépendra de l'importance des
fermetures d'usines, de la reprise de la demande inté-
rieure et de l'évolution de la demande extérieure.
du plein emploi, le choix dépendra de l'importance des
fermetures d'usines, de la reprise de la demande inté-
rieure et de l'évolution de la demande extérieure.
L'augmentation des salaires, celle des prix et des coûts,
la perte de confiance dans le franc et la fuite des capitaux
déboucheraient, selon certain, sur une dévaluation pour
rétablir notre équilibre extérieur. En fait, cette dévalua-
tion entraînerait celle de la livre et du dollar sans modifier
la situation. La seule dévaluation possible serait celle qui
parachèverait des réformes de structures qui nous auraient
mis au même niveau que nos partenaires européens.
Nos réserves en devises permettent sans dévaluation de
combler aisément le déficit éventuel de notre commerce
extérieur pendant plusieurs mois : ce serait un juste
retour des choses que l'importance de ces réserves, consé-
quence d'une politique de stabilité et de contrôle des
salaires, serve à régler la note de ceux qui en avaient
jusqu'ici fait les frais : les salariés.
la perte de confiance dans le franc et la fuite des capitaux
déboucheraient, selon certain, sur une dévaluation pour
rétablir notre équilibre extérieur. En fait, cette dévalua-
tion entraînerait celle de la livre et du dollar sans modifier
la situation. La seule dévaluation possible serait celle qui
parachèverait des réformes de structures qui nous auraient
mis au même niveau que nos partenaires européens.
Nos réserves en devises permettent sans dévaluation de
combler aisément le déficit éventuel de notre commerce
extérieur pendant plusieurs mois : ce serait un juste
retour des choses que l'importance de ces réserves, consé-
quence d'une politique de stabilité et de contrôle des
salaires, serve à régler la note de ceux qui en avaient
jusqu'ici fait les frais : les salariés.
Les événements que la France vient de traverser, même
s'ils ont mis l'accent sur des problèmes pressants et des
distorsions flagrantes, n'ont pas créé de situation nouvelle
sur le plan économique. La politique gouvernementale
devrait, dans ses grandes lignes, rester identique à ce
s'ils ont mis l'accent sur des problèmes pressants et des
distorsions flagrantes, n'ont pas créé de situation nouvelle
sur le plan économique. La politique gouvernementale
devrait, dans ses grandes lignes, rester identique à ce
qu'elle était avant le mois de mai : ouverture vers l'exté-
rieur, maintien de la parité du franc (à moins de modi-
fication sensible de la conjoncture internationale en parti-
culier après les élections américaines).
rieur, maintien de la parité du franc (à moins de modi-
fication sensible de la conjoncture internationale en parti-
culier après les élections américaines).
L'avenir
A court terme, le gouvernement cherchera à maintenir
ses objectifs en évitant surtout le ralentissement de
l'économie et l'extension brutale du chômage. Il limitera
les effets des derniers événements ou les étalera dans le
temps. Il peut utiliser pour cela soit des mesures fiscales
sélectives, soit des formules d'aide plus ou moins directe
à la trésorerie des entreprises, destinées à éviter les fer-
metures ou les licenciements éventuels dans les secteurs
les plus menacés. Au niveau des prix, l'ouverture des
frontières devrait exercer un effet modérateur qui pourrait
s'accompagner si besoin était d'un contrôle plus ou
moins sévère. Quant aux risques de déséquilibre exté-
rieur, on peut penser qu'ils diminueront au fur et à
mesure du raffermissement de l'économie française.
ses objectifs en évitant surtout le ralentissement de
l'économie et l'extension brutale du chômage. Il limitera
les effets des derniers événements ou les étalera dans le
temps. Il peut utiliser pour cela soit des mesures fiscales
sélectives, soit des formules d'aide plus ou moins directe
à la trésorerie des entreprises, destinées à éviter les fer-
metures ou les licenciements éventuels dans les secteurs
les plus menacés. Au niveau des prix, l'ouverture des
frontières devrait exercer un effet modérateur qui pourrait
s'accompagner si besoin était d'un contrôle plus ou
moins sévère. Quant aux risques de déséquilibre exté-
rieur, on peut penser qu'ils diminueront au fur et à
mesure du raffermissement de l'économie française.
A moyen terme, le gouvernement qui, malgré ses enga-
gements constants de procéder à des réformes de struc-
tures (rapport Rueff-Armand de 1959) s'était contenté
d'interventions limitées destinées à parer aux situations
les plus dangereuses, va se trouver au pied du mur :
ou bien il laisse la situation se détériorer à nouveau et
il intervient avec autorité pour en combattre les effets ;
ou bien il profite de la situation de force actuelle pour
mettre en place et imposer des réformes dans trois direc-
tions essentielles : la formation professionnelle et l'Uni-
versité, la gestion des entreprises et la politique du finan-
cement, les revenus et la politique fiscale.
gements constants de procéder à des réformes de struc-
tures (rapport Rueff-Armand de 1959) s'était contenté
d'interventions limitées destinées à parer aux situations
les plus dangereuses, va se trouver au pied du mur :
ou bien il laisse la situation se détériorer à nouveau et
il intervient avec autorité pour en combattre les effets ;
ou bien il profite de la situation de force actuelle pour
mettre en place et imposer des réformes dans trois direc-
tions essentielles : la formation professionnelle et l'Uni-
versité, la gestion des entreprises et la politique du finan-
cement, les revenus et la politique fiscale.
Un gouvernement de droite axerait ces réformes sur les
points forts de notre économie, en accélérant la concen-
tration industrielle et en favorisant les monopoles — tout
en accentuant son propre pouvoir et en sauvegardant
celui du patronat. En fait, il n'est pas impossible que la
nécessité d'une politique industrielle, rendue encore plus
urgente en cas de développement rapide du chômage,
oblige le gouvernement à s'appuyer délibérément sur les
éléments dynamiques de ce patronat et à sacrifier les
éléments les plus rétrogrades. Il relaierait son autorité
par des structures permettant de peser sur l'organisation
des entreprises. La « participation » gaulliste serait ainsi
un élément privilégié de cette stratégie. Les hésitations
économiques du pouvoir ne permettent pas de dire lequel
des deux plans sera choisi : l'un et l'autre risquent d'en-
traîner des contradictions politiques importantes — et
qui se sont déjà manifestées, au sein même du régime
gaulliste. De plus, et quels que soient les résultats élec-
toraux — l'idée gaulliste de « participation » n'entraîne
guère d'écho favorable, ni chez les travailleurs ni chez les
patrons.
points forts de notre économie, en accélérant la concen-
tration industrielle et en favorisant les monopoles — tout
en accentuant son propre pouvoir et en sauvegardant
celui du patronat. En fait, il n'est pas impossible que la
nécessité d'une politique industrielle, rendue encore plus
urgente en cas de développement rapide du chômage,
oblige le gouvernement à s'appuyer délibérément sur les
éléments dynamiques de ce patronat et à sacrifier les
éléments les plus rétrogrades. Il relaierait son autorité
par des structures permettant de peser sur l'organisation
des entreprises. La « participation » gaulliste serait ainsi
un élément privilégié de cette stratégie. Les hésitations
économiques du pouvoir ne permettent pas de dire lequel
des deux plans sera choisi : l'un et l'autre risquent d'en-
traîner des contradictions politiques importantes — et
qui se sont déjà manifestées, au sein même du régime
gaulliste. De plus, et quels que soient les résultats élec-
toraux — l'idée gaulliste de « participation » n'entraîne
guère d'écho favorable, ni chez les travailleurs ni chez les
patrons.
Michel Fansten
(1) Contrats signés entre le gouvernement et des industriels aux
termes desquels ces derniers sont autorisés à augmenter leurs
prix dans des limites bien définies à condition de procéder à
des investissements.
termes desquels ces derniers sont autorisés à augmenter leurs
prix dans des limites bien définies à condition de procéder à
des investissements.
67
L'Ancien et le Nouveau
Le franc, le dollar et le
Marché commun
Marché commun
LES grèves de mai et l'accroissement des charges sala-
riales qui ont suivi n'ont pas fondamentalement
attaibli la monnaie française. Si la situation se stabilise,
si le gouvernement utilise judicieusement une partie de
ses réserves de change pour favoriser l'expansion, la
hausse des prix ne devrait pas dépasser 6 % étalés sur
12 mois, ce qui n'a rien de catastrophique. Les prix amé-
ricains montent actuellement au rythme de 4 % par an.
riales qui ont suivi n'ont pas fondamentalement
attaibli la monnaie française. Si la situation se stabilise,
si le gouvernement utilise judicieusement une partie de
ses réserves de change pour favoriser l'expansion, la
hausse des prix ne devrait pas dépasser 6 % étalés sur
12 mois, ce qui n'a rien de catastrophique. Les prix amé-
ricains montent actuellement au rythme de 4 % par an.
La fuite devant le franc qui s'est manifestée depuis
mai a été un réflexe de peur, très classique dans la société
capitaliste. Les résultats des élections sont excellents,
toujours du point de vue capitaliste. Ils vont mettre fin à
cette fuite et même amorcer un reflux. La situation moné-
taire française pourrait donc se retrouver à la rentrée
assez semblable à celle d'avant les événements. Mais les
facteurs purement monétaires ne sont qu'un aspect du
problème du franc.
mai a été un réflexe de peur, très classique dans la société
capitaliste. Les résultats des élections sont excellents,
toujours du point de vue capitaliste. Ils vont mettre fin à
cette fuite et même amorcer un reflux. La situation moné-
taire française pourrait donc se retrouver à la rentrée
assez semblable à celle d'avant les événements. Mais les
facteurs purement monétaires ne sont qu'un aspect du
problème du franc.
Il n'est en effet pas certain que la situation économico-
68
sociale se stabilise rapidement. La secousse de ce prin-
temps a été forte et ses racines semblent profondes. Elle
s'est produite dans une économie très mal équilibrée.
Les répercussions peuvent se prolonger et entraîner une
détérioration de la situation.
temps a été forte et ses racines semblent profondes. Elle
s'est produite dans une économie très mal équilibrée.
Les répercussions peuvent se prolonger et entraîner une
détérioration de la situation.
Mais, dans ce cas encore, la monnaie française béné-
ficierait du soutien des Anglo-Saxons. L'affaiblissement
du franc ne renforce nullement les monnaies de réserve,
dollar et livre, au contraire. Les propos et gestes du géné-
ral de Gaulle n'ont joué qu'un rôle très marginal dans les
difficultés de ces monnaies. Ils n'ont fait que dramatiser
une situation que les spécialistes internationaux connais-
sent bien. Depuis quinze ans l'Angleterre utilise la position
de monnaie de réserve de la livre pour vivre au-dessus
de ses moyens. Depuis près de dix ans les Etats-Unis
soutiennent leur expansion interne par un déficit perma-
nent de leur balance des comptes. C'est pourquoi ces
monnaies sont tellement affaiblies.
ficierait du soutien des Anglo-Saxons. L'affaiblissement
du franc ne renforce nullement les monnaies de réserve,
dollar et livre, au contraire. Les propos et gestes du géné-
ral de Gaulle n'ont joué qu'un rôle très marginal dans les
difficultés de ces monnaies. Ils n'ont fait que dramatiser
une situation que les spécialistes internationaux connais-
sent bien. Depuis quinze ans l'Angleterre utilise la position
de monnaie de réserve de la livre pour vivre au-dessus
de ses moyens. Depuis près de dix ans les Etats-Unis
soutiennent leur expansion interne par un déficit perma-
nent de leur balance des comptes. C'est pourquoi ces
monnaies sont tellement affaiblies.
L'affaiblissement du franc français peut renforcer le
franc suisse et les autres monnaies du Marché commun
qui n'en ont pas besoin, mais il ne jouera pas en faveur
du dollar ou de la livre. C'est même l'inverse qui se
produirait si le gouvernement français décidait subitement
de* dévaluer. Du coup la livre serait acculée à une seconde
dévaluation et la situation du dollar deviendrait drama-
tique.
franc suisse et les autres monnaies du Marché commun
qui n'en ont pas besoin, mais il ne jouera pas en faveur
du dollar ou de la livre. C'est même l'inverse qui se
produirait si le gouvernement français décidait subitement
de* dévaluer. Du coup la livre serait acculée à une seconde
dévaluation et la situation du dollar deviendrait drama-
tique.
Les Etats-Unis viennent peu à peu à l'idée d'une rééva-
luation de l'or, mais ils ont très peur d'une opération à
chaud. Ils ne tiennent pas rancune à de Gaulle de son
attitude passée et ils faciliteront au maximum le soutien
du franc, jusqu'au jour où ils seront prêts pour un grand
remaniement monétaire international. Il est généralement
admis que ce remaniement devra attendre l'installation du
nouveau président, à moins que Johnson, qui ne se repré-
sente pas, décide d'attacher son nom à cette grande-
réforme.
luation de l'or, mais ils ont très peur d'une opération à
chaud. Ils ne tiennent pas rancune à de Gaulle de son
attitude passée et ils faciliteront au maximum le soutien
du franc, jusqu'au jour où ils seront prêts pour un grand
remaniement monétaire international. Il est généralement
admis que ce remaniement devra attendre l'installation du
nouveau président, à moins que Johnson, qui ne se repré-
sente pas, décide d'attacher son nom à cette grande-
réforme.
La concurrence internationale
L'accroissement de la masse salariale pose le problème
de l'équilibre du commerce extérieur. Mais ce ne sont
pas les exportations qui sont menacées. La majeure partie
des exportations françaises provient d'entreprises de
pointe dont la productivité est fort élevée et qui offrent
des produits de qualité internationale. Une hausse de
salaires de 12 ou 15% ne les met nullement en danger
et les plaintes qu'elles font entendre sont excessives.
de l'équilibre du commerce extérieur. Mais ce ne sont
pas les exportations qui sont menacées. La majeure partie
des exportations françaises provient d'entreprises de
pointe dont la productivité est fort élevée et qui offrent
des produits de qualité internationale. Une hausse de
salaires de 12 ou 15% ne les met nullement en danger
et les plaintes qu'elles font entendre sont excessives.
Il ne faut pas s'étonner de cette situation. La produc-
tivité moyenne de l'économie française ne dépasse certai-
nement pas celle de l'Allemagne ou de l'Angleterre, elle
lui est plutôt inférieure. Mais cette moyenne recouvre
un déséquilibre profond. La plus grande partie des forces
de travail se trouve dans des unités de production
archaïques et très peu efficientes, que ce soit dans l'agri-
culture, le textile, la métallurgie et bien d'autres petits
secteurs traditionnels. La majorité des entreprises fran-
çaises retarde ainsi de beaucoup sur les entreprises cor-
respondantes d'Allemagne par exemple. Beaucoup
d'entre elles ne pourront faire face aux nouvelles charges
salariales.
tivité moyenne de l'économie française ne dépasse certai-
nement pas celle de l'Allemagne ou de l'Angleterre, elle
lui est plutôt inférieure. Mais cette moyenne recouvre
un déséquilibre profond. La plus grande partie des forces
de travail se trouve dans des unités de production
archaïques et très peu efficientes, que ce soit dans l'agri-
culture, le textile, la métallurgie et bien d'autres petits
secteurs traditionnels. La majorité des entreprises fran-
çaises retarde ainsi de beaucoup sur les entreprises cor-
respondantes d'Allemagne par exemple. Beaucoup
d'entre elles ne pourront faire face aux nouvelles charges
salariales.
En revanche, l'industrie automobile et de nombreuses
firrfics de l'électricité, de la chimie, de la mécanique, etc.,
obtiennent des résultats extrêmement brillants. C'est par-
mi ces entreprises qu'on trouve les principaux expor-
tateurs.
firrfics de l'électricité, de la chimie, de la mécanique, etc.,
obtiennent des résultats extrêmement brillants. C'est par-
mi ces entreprises qu'on trouve les principaux expor-
tateurs.
Ce déséquilibre de l'économie française existait avant
la guerre, mais il faut reconnaître qu'il s'est lortement
accru depuis vingt ans. De ce point de vue le système de
planification adopté après 1945 a été totalement ineffi-
cace. Il n'a rien fait pour sortir les secteurs arriérés de
leur situation. Il a seulement facilité le développement
des secteurs les plus modernes.
la guerre, mais il faut reconnaître qu'il s'est lortement
accru depuis vingt ans. De ce point de vue le système de
planification adopté après 1945 a été totalement ineffi-
cace. Il n'a rien fait pour sortir les secteurs arriérés de
leur situation. Il a seulement facilité le développement
des secteurs les plus modernes.
Cette distorsion fondamentale rend l'économie natio-
nale particulièrement vulnérable. L'accroissement de la
charge salariale touche peu les grandes maisons expor-
tatrices, mais met en danger une multitude de produc-
nale particulièrement vulnérable. L'accroissement de la
charge salariale touche peu les grandes maisons expor-
tatrices, mais met en danger une multitude de produc-
teurs retardataires dont les articles ne pourront plus
soutenir la concurrence des articles importés.
soutenir la concurrence des articles importés.
Il serait logique, dans la conjoncture présente, de
mettre la balance commerciale en déficit, pour importer
massivement des outillages avancés susceptibles de lancer
des industries modernes et rénover les industries désuètes.
Il est clair que le gouvernement va s'orienter dans ce
sens, dans la mesure où il le pourra. En effet, à l'égard
des partenaires du Marché commun, la France ne dispose
plus en principe que d'une liberté d'action limitée.
mettre la balance commerciale en déficit, pour importer
massivement des outillages avancés susceptibles de lancer
des industries modernes et rénover les industries désuètes.
Il est clair que le gouvernement va s'orienter dans ce
sens, dans la mesure où il le pourra. En effet, à l'égard
des partenaires du Marché commun, la France ne dispose
plus en principe que d'une liberté d'action limitée.
L'obstacle du Marché commun
Quoique la capacité exportatrice de la France soit rela-
tivement peu atteinte, le gouvernement a déjà pris une
série de mesures pour favoriser les exportations. Cer-
taines correspondent à une subvention pure et simple. Ce
n'est évidemment pas conforme au traité de Rome et la
France profite un peu des circonstances. Cependant ses
partenaires européens l'accepteront probablement pour
quelques mois.
tivement peu atteinte, le gouvernement a déjà pris une
série de mesures pour favoriser les exportations. Cer-
taines correspondent à une subvention pure et simple. Ce
n'est évidemment pas conforme au traité de Rome et la
France profite un peu des circonstances. Cependant ses
partenaires européens l'accepteront probablement pour
quelques mois.
Ce qui est beaucoup plus grave, ce sont les contin-
gentements que Paris a déjà établis et qui touchent une
série d'articles textiles, ménagers, sidérurgiques et même
l'autom'obile. En l'absence de réforme monétaire, beau-
coup de ces contingents risquent d'être maintenus long-
temps. Ici, nous tournons le dos au Marché commun.
Celui-ci est franchement remis en question et toute la rhé-
torique n'y changera rien. Abolir les droits de douane
et imposer en même temps des contingents, cela fait l'effet
d'une farce. L'Europe n'est pas près de constituer une
unité économique et il serait honnête de le reconnaître.
gentements que Paris a déjà établis et qui touchent une
série d'articles textiles, ménagers, sidérurgiques et même
l'autom'obile. En l'absence de réforme monétaire, beau-
coup de ces contingents risquent d'être maintenus long-
temps. Ici, nous tournons le dos au Marché commun.
Celui-ci est franchement remis en question et toute la rhé-
torique n'y changera rien. Abolir les droits de douane
et imposer en même temps des contingents, cela fait l'effet
d'une farce. L'Europe n'est pas près de constituer une
unité économique et il serait honnête de le reconnaître.
Le Marché commun n'est pas une panacée et rie conduit
nullement à un Etat supranational comme certains l'ont
cru. Cependant l'institution a fait ses preuves comme une
source de solutions économiques empiriques. Aucun de
ses membres ne désire la voir disparaître.
nullement à un Etat supranational comme certains l'ont
cru. Cependant l'institution a fait ses preuves comme une
source de solutions économiques empiriques. Aucun de
ses membres ne désire la voir disparaître.
Le gouvernement français ne pouvait pas agir autre-
ment qu'il ne l'a fait. Mais, il ne peut ignorer que le main-
tien des contingents videra le Marché commun de sa
substance. C'est pourquoi il optera probablement pour
une dévaluation, quoique celle-ci ne soit pas du tout
imposée par la situation proprement monétaire.
ment qu'il ne l'a fait. Mais, il ne peut ignorer que le main-
tien des contingents videra le Marché commun de sa
substance. C'est pourquoi il optera probablement pour
une dévaluation, quoique celle-ci ne soit pas du tout
imposée par la situation proprement monétaire.
La dévaluation elle-même n'est d'ailleurs pas une solu-
tion facile. Elle obligerait notamment à renégocier tous
les accords sur l'agriculture. En effet ces accords ont
fixé des prix agricoles en francs-or. La dévaluation entraî-
nerait ipso facto une élévation correspondantes des prix
agricoles français, ce qui supprimerait instantanément
une grande partie des avantages de la dépréciation moné-
taire.
tion facile. Elle obligerait notamment à renégocier tous
les accords sur l'agriculture. En effet ces accords ont
fixé des prix agricoles en francs-or. La dévaluation entraî-
nerait ipso facto une élévation correspondantes des prix
agricoles français, ce qui supprimerait instantanément
une grande partie des avantages de la dépréciation moné-
taire.
Le gouvernement de Paris met probablement ses
espoirs dans une réévaluation du prix américain de l'or.
Il s'ensuivrait un réajustement général des monnaies et
des accords commerciaux. Cela fournirait l'occasion de
remettre l'économie française et le Marché commun sur
pied, au moins pour quelque temps.
espoirs dans une réévaluation du prix américain de l'or.
Il s'ensuivrait un réajustement général des monnaies et
des accords commerciaux. Cela fournirait l'occasion de
remettre l'économie française et le Marché commun sur
pied, au moins pour quelque temps.
Charles Morand
69
L'internationale
étudiante
étudiante
Agitation étudiante, contestation étudiante, révolte étudiante :
depuis deux mois une nouvelle rubrique est née dans les quotidiens
où l'on trouve en vrac des informations
venues de tous les points du globe.
Albert-Paul Lentin
O O JUIN 1968 — Dans un grand quotidien du soir,
^ £* sous une rubrique intitulée « l'agitation étu-
diante », on lit : « Rio, quatre morts, cinquante blessés au
cours de violents affrontements entre policiers et étu-
diants. Bruxelles : élargissement du conseil d'adminis-
tration de l'Université libre. Tokyo : barricades au quar-
tier universitaire. Bangkok : manifestation d'étudiants
hostiles aux Américains. Dusseldorf : le minitre - Pré-
sident de Rhénanie - Westphalie pris à partie par les
manifestants. Turquie : le mouvement de contestation
des étudiants s'est développé en dehors des organisations
syndicales. Saint-Domingue : incidents à l'Université ».
Depuis plus de deux mois, une nouvelle rubrique est ainsi
apparue qui s'intitule agitation étudiante, contestation
étudiante, révolte étudiante. On y trouve en vrac des
informations venant de tous les points du globe. Un
monde étudiant apparaît à côté ou contre celui de ses
aînés.
^ £* sous une rubrique intitulée « l'agitation étu-
diante », on lit : « Rio, quatre morts, cinquante blessés au
cours de violents affrontements entre policiers et étu-
diants. Bruxelles : élargissement du conseil d'adminis-
tration de l'Université libre. Tokyo : barricades au quar-
tier universitaire. Bangkok : manifestation d'étudiants
hostiles aux Américains. Dusseldorf : le minitre - Pré-
sident de Rhénanie - Westphalie pris à partie par les
manifestants. Turquie : le mouvement de contestation
des étudiants s'est développé en dehors des organisations
syndicales. Saint-Domingue : incidents à l'Université ».
Depuis plus de deux mois, une nouvelle rubrique est ainsi
apparue qui s'intitule agitation étudiante, contestation
étudiante, révolte étudiante. On y trouve en vrac des
informations venant de tous les points du globe. Un
monde étudiant apparaît à côté ou contre celui de ses
aînés.
Les étudiants ont toujours formé un groupe social
spécifique, avec ses revendications particulières et sa cri-
tique de la société établie. Ce groupe, autrefois restreint
s'accroît considérablement en raison de la poussée démo-
graphique et d'une relative démocratisation de l'enseigne-
ment, qui permet aux lycéens d'entrer plus nombreux au
lycée.
spécifique, avec ses revendications particulières et sa cri-
tique de la société établie. Ce groupe, autrefois restreint
s'accroît considérablement en raison de la poussée démo-
graphique et d'une relative démocratisation de l'enseigne-
ment, qui permet aux lycéens d'entrer plus nombreux au
lycée.
Plus les étudiants sont nombreux, plus les problèmes
sont aigus. De la contestation, purement universitaire
au départ, du slogan « des crédits, des locaux, des maî-
sont aigus. De la contestation, purement universitaire
au départ, du slogan « des crédits, des locaux, des maî-
En Italie, étudiants et forces de l'ordre
très », on passe facilement à la contestation du pouvoir
incapable ou peu désireux de donner ces crédits, ces maî-
tres, ces locaux. Et cette contestation est partout radicale
(on s'attaque aux racines même du système), immédiate
(on ne se préoccupe pas des finalités, des programmes,
on refuse) indépendante des formes traditionnelles d'op-
position (les partis, les mouvements, les syndicats sont
dépassés et critiqués parce qu'ils se sont intégrés aux
sociétés qu'ils prétendaient transformer).
incapable ou peu désireux de donner ces crédits, ces maî-
tres, ces locaux. Et cette contestation est partout radicale
(on s'attaque aux racines même du système), immédiate
(on ne se préoccupe pas des finalités, des programmes,
on refuse) indépendante des formes traditionnelles d'op-
position (les partis, les mouvements, les syndicats sont
dépassés et critiqués parce qu'ils se sont intégrés aux
sociétés qu'ils prétendaient transformer).
Cette triple contestation donne au mouvement étudiant
une coloration libertaire qu'on retrouve dans le style
et les formes de lutte qu'il emploie.
une coloration libertaire qu'on retrouve dans le style
et les formes de lutte qu'il emploie.
Le slogan inscrit sur la Sorbonne « l'imagination prend
le pouvoir » est un slogan qu'on pourrait appliquer
partout. Les provos hollandais avaient inventé le « hap-
pening », les allemands l'université critique, les étudiants
japonais le « hop-hop » et d'ingénieuses armes contre la
police... C'est justement sur le problème des rapports
avec les forces de l'ordre que l'attitude des étudiants est
la même : on n'attaque pas si l'on n'est pas attaqué ; si
l'on est attaqué, on contre-attaque et vigoureusement.
Nulle part dans le monde les forces désordre n'avaient
été préparées à pareil dialogue : ceci explique la violence
des affrontements et la brutalité de la police.
le pouvoir » est un slogan qu'on pourrait appliquer
partout. Les provos hollandais avaient inventé le « hap-
pening », les allemands l'université critique, les étudiants
japonais le « hop-hop » et d'ingénieuses armes contre la
police... C'est justement sur le problème des rapports
avec les forces de l'ordre que l'attitude des étudiants est
la même : on n'attaque pas si l'on n'est pas attaqué ; si
l'on est attaqué, on contre-attaque et vigoureusement.
Nulle part dans le monde les forces désordre n'avaient
été préparées à pareil dialogue : ceci explique la violence
des affrontements et la brutalité de la police.
A Varsovie, les étudiants disaient : « Nous avons la
police la plus cultivée du monde, elle est toujours fourrée
à l'université ». A Prague, ils ont demandé que les poli-
ciers portent des numéros matricules très visibles et ils
ont fait de cette question l'une de leurs revendications
essentielles. En Yougoslavie, les étudiants réclament la
police la plus cultivée du monde, elle est toujours fourrée
à l'université ». A Prague, ils ont demandé que les poli-
ciers portent des numéros matricules très visibles et ils
ont fait de cette question l'une de leurs revendications
essentielles. En Yougoslavie, les étudiants réclament la
71
démission du chef de la police de Belgrade, du ministre
de l'Intérieur de Serbie et du ministre de l'Intérieur
fédéral. Si la contestation étudiante a le même visage, il
faut cependant distinguer entre trois catégories de pays
dont les conditions socio-économiques et politiques sont
différentes.
de l'Intérieur de Serbie et du ministre de l'Intérieur
fédéral. Si la contestation étudiante a le même visage, il
faut cependant distinguer entre trois catégories de pays
dont les conditions socio-économiques et politiques sont
différentes.
Les Etats-Unis
Ce n'est pas un hasard si les premières révoltes impor-
tantes ont commencé aux Etats-Unis, face à une société
industrielle capitaliste dans sa phase la plus achevée, à
l'intérieur d'un système où le capitalisme est le plus
concentré, le plus militarisé, le plus avancé technologi-
quement. La révolte des étudiants, au début très confuse,
est révélatrice du malaise qui peut naître dans une société
où tout est fonction de la rentabilité, de la finalité éco-
nomique, où règne un terrorisme contre tout ce qui n'est
pas conforme à Y American way of li/e.
tantes ont commencé aux Etats-Unis, face à une société
industrielle capitaliste dans sa phase la plus achevée, à
l'intérieur d'un système où le capitalisme est le plus
concentré, le plus militarisé, le plus avancé technologi-
quement. La révolte des étudiants, au début très confuse,
est révélatrice du malaise qui peut naître dans une société
où tout est fonction de la rentabilité, de la finalité éco-
nomique, où règne un terrorisme contre tout ce qui n'est
pas conforme à Y American way of li/e.
A Berkeley, à Columbia, le mouvement né de l'oppo-
sition à la guerre du Viêt-nam se radicalise et conteste
le fonctionnement même du système américain (liaisons
entre les Universités américaines et des organismes
d'Etat — C.I.A., Pentagone —, problème racial etc.).
sition à la guerre du Viêt-nam se radicalise et conteste
le fonctionnement même du système américain (liaisons
entre les Universités américaines et des organismes
d'Etat — C.I.A., Pentagone —, problème racial etc.).
On retrouve ces caractéristiques au Japon où les étu-
diants mènent une double lutte contre un système inté-
rieur de trusts très concentrés et le système impérialiste
américain. Le mouvement Zengakuren est certainement le»
mouvement étudiant le plus organisé du monde, le plus
dur et le plus violent. Les étudiants livrent aux forces de
l'ordre à chaque manifestation des batailles presque mili-
taires.
diants mènent une double lutte contre un système inté-
rieur de trusts très concentrés et le système impérialiste
américain. Le mouvement Zengakuren est certainement le»
mouvement étudiant le plus organisé du monde, le plus
dur et le plus violent. Les étudiants livrent aux forces de
l'ordre à chaque manifestation des batailles presque mili-
taires.
En Europe, c'est en Allemagne, avec le S.O.S., que le
mouvement étudiant a commencé, avec ses thèmes :
condamnation de la vieille Université — Université criti-
que — lutte contre la guerre du Viêt-nam — lutte contre le
gouvernement allemand complice des Etats-Unis, promo-
teur des lois d'exceptions — lutte contre le système tout
entier — campagne contre la presse de Springer. Ils ont
donné le ton, le style du mouvement en Europe occiden-
tale mais leur mouvement est encore confus. Le S.D.S.
ressent le besoin d'approfondir le contenu politique.
mouvement étudiant a commencé, avec ses thèmes :
condamnation de la vieille Université — Université criti-
que — lutte contre la guerre du Viêt-nam — lutte contre le
gouvernement allemand complice des Etats-Unis, promo-
teur des lois d'exceptions — lutte contre le système tout
entier — campagne contre la presse de Springer. Ils ont
donné le ton, le style du mouvement en Europe occiden-
tale mais leur mouvement est encore confus. Le S.D.S.
ressent le besoin d'approfondir le contenu politique.
Similaires mais beaucoup moins fortes, des révoltes
étudiantes sont apparues en Angleterre, en Suisse, en
Suède, en Belgique. Plus violent en Suède, plus esthétique
en Angleterre, très universitaire en Belgique et en Suisse,
le mouvement piétine devant les structures politiques
très stables dans tous ces pays.
étudiantes sont apparues en Angleterre, en Suisse, en
Suède, en Belgique. Plus violent en Suède, plus esthétique
en Angleterre, très universitaire en Belgique et en Suisse,
le mouvement piétine devant les structures politiques
très stables dans tous ces pays.
L'Italie
C'est en Italie que la révolte étudiante est la plus im-
portante. Avec la France, l'Italie est le seul pays d'Europe
où la classe ouvrière a une tradition révolutionnaire et
même une tradition anarcho-syndicalistc avec les mythes
du « Grand Soir », de la « Sociale », etc. Autrement dit,
une contestation radicale des étudiants peut v faire éclater
une constestation ouvrière. On est amené à faire une dis-
portante. Avec la France, l'Italie est le seul pays d'Europe
où la classe ouvrière a une tradition révolutionnaire et
même une tradition anarcho-syndicalistc avec les mythes
du « Grand Soir », de la « Sociale », etc. Autrement dit,
une contestation radicale des étudiants peut v faire éclater
une constestation ouvrière. On est amené à faire une dis-
72
tinction assez nette entre les pays où la (lasse ouvrière est
de tradition social-démocrate c'est-à-dire les pays où les
ouvriers sont allés assez loin dans le processus d'intégra-
tion capitaliste en échange de satisfactions limitées — co-
gestion de tvpe allemande, avantages sociaux en Scandi-
navie — et où il est très difficile de les faire sortir d'un
processus purement revendicatif.
de tradition social-démocrate c'est-à-dire les pays où les
ouvriers sont allés assez loin dans le processus d'intégra-
tion capitaliste en échange de satisfactions limitées — co-
gestion de tvpe allemande, avantages sociaux en Scandi-
navie — et où il est très difficile de les faire sortir d'un
processus purement revendicatif.
En France et en Italie, les partis qui représentent la
classe ouvrière se disent révolutionnaires. Même si on est
amené à contester l'attitude modérée qu'ils ont prise de-
vant les derniers événements, il est évident que le pro-
blème de la prise du pouvoir et du renversement du
capitalisme est posé depuis très longtemps. Leurs réti-
cences relèvent plus de la tactique à utiliser que de la dé-
finition des objectifs fondamentaux et de la stratégie.
classe ouvrière se disent révolutionnaires. Même si on est
amené à contester l'attitude modérée qu'ils ont prise de-
vant les derniers événements, il est évident que le pro-
blème de la prise du pouvoir et du renversement du
capitalisme est posé depuis très longtemps. Leurs réti-
cences relèvent plus de la tactique à utiliser que de la dé-
finition des objectifs fondamentaux et de la stratégie.
En France, à partir du moment où les étudiants ont
prouvé par une action vigoureuse qu'il était possible clé
faire triompher les objectifs qu'ils s'étaient assignés, on
a vu les jeunes ouvriers d'abord puis la base syndicale,
puis les syndicats — et cela à quelques heures d'intervalle1 —
entrer dans le mouvement qui a englobé dix millions de
travailleurs.
prouvé par une action vigoureuse qu'il était possible clé
faire triompher les objectifs qu'ils s'étaient assignés, on
a vu les jeunes ouvriers d'abord puis la base syndicale,
puis les syndicats — et cela à quelques heures d'intervalle1 —
entrer dans le mouvement qui a englobé dix millions de
travailleurs.
En Italie, un phénomène semblable est possible. Au
cours des dernières élections, le parti socialiste unifié
de Nenni et Saragat a perdu près de la moitié de ses
électeurs. Les sociaux-démocrates sont amenés à aban-
donner la coalition gouvernementale (démocrates-chré-
tiens et sociaux-démocrates) et à raclicaliser leur ligne-
politique. Pour le moment, ils ont décidé clé faire une
cure d'opposition et de laisser l'Italie à un gouvernement
monocolore — c'est-à-dire démocrate-chrétien — en
attendant leur congrès d'octobre. Actuellement, le Parti
communiste et le P.S.LU.P. (extrême-gauche) représen-
tent 30 % des voix. Si le P.S.U. venait s'y joindre entraî-
nant le durcissement du courant progressiste existant
parmi les démocrates chrétiens, la gauche serait majori-
taire et une révolte sociale et économique aurait des
conséquences importantes. C'est ce qu'a compris le
P.C.I., qui s'est montré beaucoup plus souple que le
P.C.F. : le secrétaire général Luigi Longo a reçu pendant
plusieurs heures les représentants des étudiants italiens
et leur a dit que, si lui, vieux révolutionnaire, pouvait
les faire bénéficier de son expérience, il avait beaucoup à
apprendre des formes nouvelles d'action inventées par les
étudiants. A la fin de l'entretien, il a offert que le- compte
rendu intégral du débat soit publié dans la revue théo-
rique du Parti Rinascita. Les étudiants ont refusé pour ne
pas être récupérés, mais ils ont accepté que Longo fasse
un grand article dans lequel il tirerait les leçons du débat.
En Italie, la coordination ouvrier-étudiant paraît être
plus facile qu'en France où étudiants et ouvriers sont
enfermés dans des ghettos et où ils ont du mal à trouver
un langage commun.
cours des dernières élections, le parti socialiste unifié
de Nenni et Saragat a perdu près de la moitié de ses
électeurs. Les sociaux-démocrates sont amenés à aban-
donner la coalition gouvernementale (démocrates-chré-
tiens et sociaux-démocrates) et à raclicaliser leur ligne-
politique. Pour le moment, ils ont décidé clé faire une
cure d'opposition et de laisser l'Italie à un gouvernement
monocolore — c'est-à-dire démocrate-chrétien — en
attendant leur congrès d'octobre. Actuellement, le Parti
communiste et le P.S.LU.P. (extrême-gauche) représen-
tent 30 % des voix. Si le P.S.U. venait s'y joindre entraî-
nant le durcissement du courant progressiste existant
parmi les démocrates chrétiens, la gauche serait majori-
taire et une révolte sociale et économique aurait des
conséquences importantes. C'est ce qu'a compris le
P.C.I., qui s'est montré beaucoup plus souple que le
P.C.F. : le secrétaire général Luigi Longo a reçu pendant
plusieurs heures les représentants des étudiants italiens
et leur a dit que, si lui, vieux révolutionnaire, pouvait
les faire bénéficier de son expérience, il avait beaucoup à
apprendre des formes nouvelles d'action inventées par les
étudiants. A la fin de l'entretien, il a offert que le- compte
rendu intégral du débat soit publié dans la revue théo-
rique du Parti Rinascita. Les étudiants ont refusé pour ne
pas être récupérés, mais ils ont accepté que Longo fasse
un grand article dans lequel il tirerait les leçons du débat.
En Italie, la coordination ouvrier-étudiant paraît être
plus facile qu'en France où étudiants et ouvriers sont
enfermés dans des ghettos et où ils ont du mal à trouver
un langage commun.
Enfin, si l'on veut rester en Europe occidentale, il faut
parler des pays semi-développés et qui ont une structure
interne de type fascite. Là, la répression est rigoureuse et
le mouvement étudiant n'a pas de peine à se politiser ei
à entrer dans le cadre des luttes antilacistes. En Espagne,
le mouvement étudiant vigoureusement anti-franquiste,
parler des pays semi-développés et qui ont une structure
interne de type fascite. Là, la répression est rigoureuse et
le mouvement étudiant n'a pas de peine à se politiser ei
à entrer dans le cadre des luttes antilacistes. En Espagne,
le mouvement étudiant vigoureusement anti-franquiste,
Au Riévl : lu répre^ion
avait précédé le mouvement français et n'a fail qu'em-
prunter à la France quelques clauses de style. C'est ainsi
que des barricades se sont élevées dans la Princessa, l'une
clés plus grandes artères de Madrid. Cependant, les « com-
missions ouvrières », soucieuses d'élargir leur action
avaient posé, bien avant ces combats de rue, le problème
de leurs rapports avec les étudiants révolutionnaires.
prunter à la France quelques clauses de style. C'est ainsi
que des barricades se sont élevées dans la Princessa, l'une
clés plus grandes artères de Madrid. Cependant, les « com-
missions ouvrières », soucieuses d'élargir leur action
avaient posé, bien avant ces combats de rue, le problème
de leurs rapports avec les étudiants révolutionnaires.
C'est dans le Sud-Est de l'Europe, et là, le phénomène
est très nouveau, que l'on voit naître un mouvement étu-
diant antifasciste. En Grèce, les étudiants développent
une résistance autonome, mais reliée à l'ensemble de la
résistance contre les colonels. En Turquie, les étudiants
occupent leurs Universités à Istambul et à Ankara. Ils
affrontent et l'appareil répressif de l'Etat et les forces
d'exii èrne-droite, très puissantes même à l'Université où
s'exprime un nationalisme exacerbé.
est très nouveau, que l'on voit naître un mouvement étu-
diant antifasciste. En Grèce, les étudiants développent
une résistance autonome, mais reliée à l'ensemble de la
résistance contre les colonels. En Turquie, les étudiants
occupent leurs Universités à Istambul et à Ankara. Ils
affrontent et l'appareil répressif de l'Etat et les forces
d'exii èrne-droite, très puissantes même à l'Université où
s'exprime un nationalisme exacerbé.
Les pays socialistes
Dans les pays socialistes, la contestation étudiante ne
porte pas sur le système socialiste, mais sur les condi-
tions particulières dans lesquelles il a été instauré, sur les
structures bureaucratiques, hiérarchiques et autoritaires
de l'Etat. En Union soviétique, cette critique est encore
embryonnaire : l'héritage stalinien est très lourd et les
traditions libérales et pluralistes qui existaient dans un
pays comme la Tchécoslovaquie ont toujours été absentes
en Russie avant la révolution. Pour l'instant, c'est à
travers des formules d'avant-garde, esthétiques et intellec-
luetles, que s'exprime la contestation.
porte pas sur le système socialiste, mais sur les condi-
tions particulières dans lesquelles il a été instauré, sur les
structures bureaucratiques, hiérarchiques et autoritaires
de l'Etat. En Union soviétique, cette critique est encore
embryonnaire : l'héritage stalinien est très lourd et les
traditions libérales et pluralistes qui existaient dans un
pays comme la Tchécoslovaquie ont toujours été absentes
en Russie avant la révolution. Pour l'instant, c'est à
travers des formules d'avant-garde, esthétiques et intellec-
luetles, que s'exprime la contestation.
En revanche, le mouvement étudiant a joue un rôle
important en Tchécoslovaquie. La réforme économique
entreprise pour des raisons d'efficacité avait été laissée à
mi-chemin. Pour la mener à terme, il fallait briser l'appa-
reil bureaucratique et autoritaire. C'est à ce moment que
les étudiants sont intervenus. Au départ leur révolte était
circonstantielle : le courant avait été coupé à la Cité
universitaire, les étudiants y répondirent de manière iro-
nique en manifestant avec des flambeaux. Des heurts
avec la police s'en suivirent : ainsi apparût le conflit
entre des revendications de libéralisme et de pluralisme
ir tellectuel et la force brutale au service d'un monolithis-
i : politique. Ensuite, la révolte des écrivains, des techno-
important en Tchécoslovaquie. La réforme économique
entreprise pour des raisons d'efficacité avait été laissée à
mi-chemin. Pour la mener à terme, il fallait briser l'appa-
reil bureaucratique et autoritaire. C'est à ce moment que
les étudiants sont intervenus. Au départ leur révolte était
circonstantielle : le courant avait été coupé à la Cité
universitaire, les étudiants y répondirent de manière iro-
nique en manifestant avec des flambeaux. Des heurts
avec la police s'en suivirent : ainsi apparût le conflit
entre des revendications de libéralisme et de pluralisme
ir tellectuel et la force brutale au service d'un monolithis-
i : politique. Ensuite, la révolte des écrivains, des techno-
Gamma
crates astucieux, des journalistes, des intellectuels donna
naissance à ce qu'on peut appeler le ce Printemps de
Prague », qui marque la réconciliation du socialisme et
d'un certain nombre de libertés auxquelles l'Occident est
très attaché.
naissance à ce qu'on peut appeler le ce Printemps de
Prague », qui marque la réconciliation du socialisme et
d'un certain nombre de libertés auxquelles l'Occident est
très attaché.
En Pologne, au contraire, le poids d'une population
paysanne peu ou pas acquise au socialisme, de traditions
féodales, d'un clergé réactionnaire a fait échec au mou-
vement étudiant. Les dirigeants ont eu peur de jouer aux
apprentis-sorciers en laissant se déclencher des forces
qui se seraient retournées contre le système socialiste
lui-même.
paysanne peu ou pas acquise au socialisme, de traditions
féodales, d'un clergé réactionnaire a fait échec au mou-
vement étudiant. Les dirigeants ont eu peur de jouer aux
apprentis-sorciers en laissant se déclencher des forces
qui se seraient retournées contre le système socialiste
lui-même.
C'est en Yougoslavie que le mouvement est le plus inté-
ressant. Les étudiants ont réclamé l'autogestion de l'uni-
versité, ils l'ont occupée, créé des comités d'action. Les
affrontements avec la police ont été très violents. La situa-
tion se détériora à tel point qu'il fallut un discours
pathétique de Tito mettant en jeu son pouvoir pour
instaurer un dialogue. Les étudiants ont crié ce Tito est
à nous, nous sommes à Tito » mais ils ont maintenu leurs
comités d'action dans les universités et ils entendent bien
être écoutés.
ressant. Les étudiants ont réclamé l'autogestion de l'uni-
versité, ils l'ont occupée, créé des comités d'action. Les
affrontements avec la police ont été très violents. La situa-
tion se détériora à tel point qu'il fallut un discours
pathétique de Tito mettant en jeu son pouvoir pour
instaurer un dialogue. Les étudiants ont crié ce Tito est
à nous, nous sommes à Tito » mais ils ont maintenu leurs
comités d'action dans les universités et ils entendent bien
être écoutés.
C'est clans le débat qui oppose les vieux dogmatiques
de la Ligue des communistes et les technocrates qui ne
se soucient que d'efficacité, qui ne pensent qu'à copier
les systèmes occidentaux d'économie de marché, que les
étudiants sont intervenus. Leur critique a porté sur
la politique économique des technocrates qui entraîne
le chômage, surtout des jeunes et qui aggrave l'inégalité
de développement entre les régions. Mais ils ont attaqué
aussi les vieux dogmatiques : il faut que l'autogestion
s'accompagne d'une réintroduction des valeurs morales
révolutionnaires, qu'un pluralisme et une démocratie
qui se réfèrent directement à l'humanisme marxiste
s'instaurent. Cette démarche dans un pays où la démocra-
tisation et la dépolitisation sont très grandes est salutaire.
de la Ligue des communistes et les technocrates qui ne
se soucient que d'efficacité, qui ne pensent qu'à copier
les systèmes occidentaux d'économie de marché, que les
étudiants sont intervenus. Leur critique a porté sur
la politique économique des technocrates qui entraîne
le chômage, surtout des jeunes et qui aggrave l'inégalité
de développement entre les régions. Mais ils ont attaqué
aussi les vieux dogmatiques : il faut que l'autogestion
s'accompagne d'une réintroduction des valeurs morales
révolutionnaires, qu'un pluralisme et une démocratie
qui se réfèrent directement à l'humanisme marxiste
s'instaurent. Cette démarche dans un pays où la démocra-
tisation et la dépolitisation sont très grandes est salutaire.
L'Amérique latine
Le mouvement étudiant dans le Tiers-Monde a des tra-
ditions très anciennes. Il a participé à toutes les luttes
nationales contre la colonisation. Si l'on célèbre le 21
ditions très anciennes. Il a participé à toutes les luttes
nationales contre la colonisation. Si l'on célèbre le 21
73
février la journée anticolonialiste, c'est en raison des
manifestations qui se déroulèrent, au lendemain de la
Seconde Guerre mondiale, un 21 février, en Egypte et
aux Indes contre le colonialisme britannique. En Améri-
que latine, les traditions sont plus anciennes encore. Le
xixe siècle vit naître le mouvement d'indépendance de
l'Amérique latine et les universités y avaient joué un
grand rôle et obtenu un certain nombre de franchises
universitaires. On fête cette année le cinquantenaire du
mouvement de Cordoba qui parti d'Argentine, a propagé
les idées d'autonomie universitaire dans toute l'Amérique
latine.
manifestations qui se déroulèrent, au lendemain de la
Seconde Guerre mondiale, un 21 février, en Egypte et
aux Indes contre le colonialisme britannique. En Améri-
que latine, les traditions sont plus anciennes encore. Le
xixe siècle vit naître le mouvement d'indépendance de
l'Amérique latine et les universités y avaient joué un
grand rôle et obtenu un certain nombre de franchises
universitaires. On fête cette année le cinquantenaire du
mouvement de Cordoba qui parti d'Argentine, a propagé
les idées d'autonomie universitaire dans toute l'Amérique
latine.
Actuellement, la phase néo-coloniale a remplacé la
phase coloniale. Tous les pays où presque ont conquis
leur indépendance formelle, tous ont un drapeau, un
hymme national, une délégation aux Nations-Unies.
Tous sont encore sous la domination de l'impérialisme
américain et le pouvoir y est exercé par des classes diri-
geantes qui assurent le relais de l'ancienne puissance colo-
niale. Les classes dirigeantes acceptent les circuits d'ex-
ploitation de l'impérialisme, la détérioration des termes
de l'échange, le pillage du Tiers-Monde. C'est contre ce
système que se révoltent les étudiants. Ils le font dans
des conditions difficiles.
phase coloniale. Tous les pays où presque ont conquis
leur indépendance formelle, tous ont un drapeau, un
hymme national, une délégation aux Nations-Unies.
Tous sont encore sous la domination de l'impérialisme
américain et le pouvoir y est exercé par des classes diri-
geantes qui assurent le relais de l'ancienne puissance colo-
niale. Les classes dirigeantes acceptent les circuits d'ex-
ploitation de l'impérialisme, la détérioration des termes
de l'échange, le pillage du Tiers-Monde. C'est contre ce
système que se révoltent les étudiants. Ils le font dans
des conditions difficiles.
En effet, la structure de classe diffère fondamentale-
ment de celle des pays capitalistes développés. Au plus
bas de l'échelle sociale, se trouve la grande masse des
paysans sans terre dont la situation est de plus en plus
misérable : la productivité n'augmente pas, les grands
propriétaires laissent la terre en friche ou la cultivent très
mal, l'accroissement démographique est extraordinaire.
Beaucoup de ruraux affamés s'en vont vers les bidonvilles
qui-cernent les grandes métropoles : 14 % de la popula-
tion urbaine d'Amérique latine vit dans ces bidonvilles.
ment de celle des pays capitalistes développés. Au plus
bas de l'échelle sociale, se trouve la grande masse des
paysans sans terre dont la situation est de plus en plus
misérable : la productivité n'augmente pas, les grands
propriétaires laissent la terre en friche ou la cultivent très
mal, l'accroissement démographique est extraordinaire.
Beaucoup de ruraux affamés s'en vont vers les bidonvilles
qui-cernent les grandes métropoles : 14 % de la popula-
tion urbaine d'Amérique latine vit dans ces bidonvilles.
Au-dessus des paysans sans terre, et des chômeurs des
bidonvilles, on trouve une petite bourgeoisie attirée par
l'American way of life mais paupérisée par les inflations
monétaires et le déséquilibre économique. Cette petite
bourgeoisie constitue une masse hésitante, toujours
tiraillée entre des aspirations contradictoires. Puis, la
classe ouvrière se trouve elle aussi dans une situation
ambiguë, paupérisée comme la petite bourgeoisie, elle est
privilégiée par rapport aux paysans sans terre et aux chô-
meurs des bidonvilles. Il en résulte un affrontement entre
les traditions révolutionnaires qu'elle véhicule et le réfor-
misme qui lui permet d'obtenir des avantages immédiats,
plus ou moins bien acceptés par la classe dirigeante,
l'oligarchie qui occupe le sommet de la pyramide.
bidonvilles, on trouve une petite bourgeoisie attirée par
l'American way of life mais paupérisée par les inflations
monétaires et le déséquilibre économique. Cette petite
bourgeoisie constitue une masse hésitante, toujours
tiraillée entre des aspirations contradictoires. Puis, la
classe ouvrière se trouve elle aussi dans une situation
ambiguë, paupérisée comme la petite bourgeoisie, elle est
privilégiée par rapport aux paysans sans terre et aux chô-
meurs des bidonvilles. Il en résulte un affrontement entre
les traditions révolutionnaires qu'elle véhicule et le réfor-
misme qui lui permet d'obtenir des avantages immédiats,
plus ou moins bien acceptés par la classe dirigeante,
l'oligarchie qui occupe le sommet de la pyramide.
Les étudiants sont originaires de la classe dirigeante
et de la petite bourgeoisie. D'une revendication pure-
ment universitaire, de la lutte pour le rétablissement des
libertés supprimées par les régimes militaires, ils passent
à une opposition politique à ces régimes et au système qui
leur permet de se maintenir. Si leur lutte prend à chaque
étape une forme plus radicale qui les amène à entrer dans
la guérilla, ils ont un très grand mal à établir le contact
avec les ouvriers ou les chômeurs des bidonvilles. Les
affrontements sont très violents : l'armée vient au secours
de la police, les armes à feu, les charges à cheval et même
et de la petite bourgeoisie. D'une revendication pure-
ment universitaire, de la lutte pour le rétablissement des
libertés supprimées par les régimes militaires, ils passent
à une opposition politique à ces régimes et au système qui
leur permet de se maintenir. Si leur lutte prend à chaque
étape une forme plus radicale qui les amène à entrer dans
la guérilla, ils ont un très grand mal à établir le contact
avec les ouvriers ou les chômeurs des bidonvilles. Les
affrontements sont très violents : l'armée vient au secours
de la police, les armes à feu, les charges à cheval et même
les tanks sont employés. Il n'est pas rare qu'il y ait des
morts. Cinq morts, début avril, six morts, fin juin au
Brésil, quatre morts au Venezuela en avril. Au Venezuela
et en Uruguay, l'état d'urgence a été proclamé.
morts. Cinq morts, début avril, six morts, fin juin au
Brésil, quatre morts au Venezuela en avril. Au Venezuela
et en Uruguay, l'état d'urgence a été proclamé.
L'Asie et l'Afrique
En Asie, la situation des étudiants est beaucoup plus
précaire. Les étudiants sont moins nombreux par rapport
à la masse de la population. Ils affrontent et l'appareil
d'Etat néo-colonialiste et les forces d'extrême-droite
nationalistes et anti-communistes. Cependant, le mouve-
ment étudiant se développe.
précaire. Les étudiants sont moins nombreux par rapport
à la masse de la population. Ils affrontent et l'appareil
d'Etat néo-colonialiste et les forces d'extrême-droite
nationalistes et anti-communistes. Cependant, le mouve-
ment étudiant se développe.
C'est ainsi qu'en Indonésie, après toute une période
où le régime militaire a fait jouer le nationalisme musul-
man d'extrême droite contre les progressistes, l'équilibre
se déplace et les étudiants de gauche commencent à s'en
prendre au régime de Suharto.
où le régime militaire a fait jouer le nationalisme musul-
man d'extrême droite contre les progressistes, l'équilibre
se déplace et les étudiants de gauche commencent à s'en
prendre au régime de Suharto.
En Inde, où le nationalisme antichinois est très fort,
les étudiants participent à des mouvements progressistes
depuis les dernières élections qui ont montré l'affaiblis-
sement du parti du Congrès.
les étudiants participent à des mouvements progressistes
depuis les dernières élections qui ont montré l'affaiblis-
sement du parti du Congrès.
En Afrique, en Afrique du Nord, au Proche-Orient,
on retrouve les mêmes phénomènes ; l'agitation étudiante
contre l'université et le pouvoir existe depuis longtemps :
les étudiants ont participé à la décolonisation et après
celle-ci à la lutte contre le néo-colonialisme. Notamment
en Afrique du Nord où l'on a vu en février en Algérie,
mars en Tunisie et au Maroc des mouvements très durs
subir une répression violente.
on retrouve les mêmes phénomènes ; l'agitation étudiante
contre l'université et le pouvoir existe depuis longtemps :
les étudiants ont participé à la décolonisation et après
celle-ci à la lutte contre le néo-colonialisme. Notamment
en Afrique du Nord où l'on a vu en février en Algérie,
mars en Tunisie et au Maroc des mouvements très durs
subir une répression violente.
En Afrique noire, on assiste pour la première fois à des
révoltes étudiantes. Ainsi, au Sénégal, un mouvement
de revendications à propos des bourses a très vite pris une
signification politique. Les ouvriers ont suivi, les leaders
syndicalistes ont lancé un ordre de grève illimitée : pen-
dant plusieurs jours la région du Cap Vert et de Dakar a
été pratiquement paralysée. Les chômeurs des bidonvilles
ont tenté de transformer la grève en émeute. Le gouver-
nement est parvenu à séparer les travailleurs des chô-
meurs. La paysannerie est restée fidèle au gouvernement.
Le mouvement a échoué pour le moment faute de liaison
entre étudiants et ouvriers d'une part, chômeurs des
bidonvilles et paysans d'autre part.
révoltes étudiantes. Ainsi, au Sénégal, un mouvement
de revendications à propos des bourses a très vite pris une
signification politique. Les ouvriers ont suivi, les leaders
syndicalistes ont lancé un ordre de grève illimitée : pen-
dant plusieurs jours la région du Cap Vert et de Dakar a
été pratiquement paralysée. Les chômeurs des bidonvilles
ont tenté de transformer la grève en émeute. Le gouver-
nement est parvenu à séparer les travailleurs des chô-
meurs. La paysannerie est restée fidèle au gouvernement.
Le mouvement a échoué pour le moment faute de liaison
entre étudiants et ouvriers d'une part, chômeurs des
bidonvilles et paysans d'autre part.
La Mauritanie a été touchée par le mouvement né au
Sénégal : les ouvriers de la Miferma se sont mis en grève.
L'intervention de l'armée a fait sept morts, vingt-sept
blessés du côté des grévistes et le travail a repris sous le
contrôle des forces de l'ordre. Même le Congo Kinshasa a
eu ses révoltes de lycé-ens.
Sénégal : les ouvriers de la Miferma se sont mis en grève.
L'intervention de l'armée a fait sept morts, vingt-sept
blessés du côté des grévistes et le travail a repris sous le
contrôle des forces de l'ordre. Même le Congo Kinshasa a
eu ses révoltes de lycé-ens.
Quelles que soient les différences, le phénomène est
mondial : les idées circulent, les informations circulent.
En France, on a traité les premiers révoltés « d'enragés ».
On a simplement oublié que la rage était la plus conta-
gieuse des maladies.
mondial : les idées circulent, les informations circulent.
En France, on a traité les premiers révoltés « d'enragés ».
On a simplement oublié que la rage était la plus conta-
gieuse des maladies.
Albert-Paul Lentin
74
Gamma
BRÉSIL. Le 19 juin, les étudiants occupent la
cour du ministère de l'Éducation nationale : les
bâtons des manifestants s'opposent aux matra-
ques des policiers. Quatre cents emprisonnés. Le
20, le Rectorat est occupé, les professeurs rejoi-
gnent leurs étudiants. La répression continue.
Le 21, étudiants, professeurs et ouvriers mar-
chent sur le ministère de VÉducation nationale
cour du ministère de l'Éducation nationale : les
bâtons des manifestants s'opposent aux matra-
ques des policiers. Quatre cents emprisonnés. Le
20, le Rectorat est occupé, les professeurs rejoi-
gnent leurs étudiants. La répression continue.
Le 21, étudiants, professeurs et ouvriers mar-
chent sur le ministère de VÉducation nationale
et sur l'ambassade des États-Unis. La police
tire : six morts. Les manifestations se généra-
lisent — du Parlement aux bidonvilles qui s'or-
ganisent pour la première fois. Dans un pays
accablé par la tutelle américaine, dans une
Université dont les « réformes » sont décidées
après accord de Washington, la révolte étudiante
ne se sépare pas de la lutte anti-impérialiste.
tire : six morts. Les manifestations se généra-
lisent — du Parlement aux bidonvilles qui s'or-
ganisent pour la première fois. Dans un pays
accablé par la tutelle américaine, dans une
Université dont les « réformes » sont décidées
après accord de Washington, la révolte étudiante
ne se sépare pas de la lutte anti-impérialiste.
75
AMERIQUE DU NORD
BERKELEY — La grève s'est déclenchée pour protester
contre le recrutement du trust « Dow Chemical » qui fabrique
le napalm utilisé au Viêt-nam. COLOMBIA — Les étudiants
du S.O.S. (Student for a Démocratie Society) s'inspirent
de Marcuse, Debray et Guevara. Ils baptisent les locaux
occupés «zones libérées».
contre le recrutement du trust « Dow Chemical » qui fabrique
le napalm utilisé au Viêt-nam. COLOMBIA — Les étudiants
du S.O.S. (Student for a Démocratie Society) s'inspirent
de Marcuse, Debray et Guevara. Ils baptisent les locaux
occupés «zones libérées».
AMERIQUE LATINE
CHILI — 24 mai : 3 000 étudiants occupent l'université
de Santiago du Chili. BRESIL - 6 juin : 16000 étudiants
en grève. 12 juin : le président Costa e Silva déclare : «qu'il
ne tolérerait pas que l'agitation universitaire plonge le pays
dans le chaos qui a paralysé la France. » 13 juin : grève à
Rio et Saint-Paul. 19 juin : 22 blessés à Rio. 21 juin : 4
morts à Rio parmi les étudiants et ouvriers qui manifestent
au cri de «A bas la dictature». 22 juin : les étudiants occu-
pent le Parlement de Brasilia. 24 juin : le général Lisboa
commandant l'armée à Sao Paulo : « nous sommes prêts à
étouffer les foyers de subversion... dans les églises, les uni-
versités, les usines. » 26 juin : 100000 personnes défilent
à Rio au cri de « Le pouvoir au peuple «.URUGUAY— 12juin :
heurts violents entre la police et les étudiants à Montevideo.
L'état de siège est décrété. 15 juin : les fonctionnaires des
administrations centrales déclenchent une grève illimitée.
de Santiago du Chili. BRESIL - 6 juin : 16000 étudiants
en grève. 12 juin : le président Costa e Silva déclare : «qu'il
ne tolérerait pas que l'agitation universitaire plonge le pays
dans le chaos qui a paralysé la France. » 13 juin : grève à
Rio et Saint-Paul. 19 juin : 22 blessés à Rio. 21 juin : 4
morts à Rio parmi les étudiants et ouvriers qui manifestent
au cri de «A bas la dictature». 22 juin : les étudiants occu-
pent le Parlement de Brasilia. 24 juin : le général Lisboa
commandant l'armée à Sao Paulo : « nous sommes prêts à
étouffer les foyers de subversion... dans les églises, les uni-
versités, les usines. » 26 juin : 100000 personnes défilent
à Rio au cri de « Le pouvoir au peuple «.URUGUAY— 12juin :
heurts violents entre la police et les étudiants à Montevideo.
L'état de siège est décrété. 15 juin : les fonctionnaires des
administrations centrales déclenchent une grève illimitée.
20 juin : manifestations au centre de Montevideo, début des
barricades. ARGENTINE - 14 juin : les étudiants réclament
l'autonomie des universités qui leur avait été donnée à la
fin du XIXe et reprise en 1965. 22 juin : six étudiants arrê-
tés. Affrontements violents avec la police. VENEZUELA -
mars-avril : quatre morts, deux cents blessés lors du soutien
de la grève des ouvriers de la voirie par les étudiants. L'état
d'urgence est proclamé.
barricades. ARGENTINE - 14 juin : les étudiants réclament
l'autonomie des universités qui leur avait été donnée à la
fin du XIXe et reprise en 1965. 22 juin : six étudiants arrê-
tés. Affrontements violents avec la police. VENEZUELA -
mars-avril : quatre morts, deux cents blessés lors du soutien
de la grève des ouvriers de la voirie par les étudiants. L'état
d'urgence est proclamé.
EUROPE
ESPAGNE - 18 mai : 1 0 000 étudiants et ouvriers défilent
à Madrid avec drapeaux rouges et portraits de « Che »
Guevara. Ils tentent d'édifier des barricades mais sont
dispersés par d'importantes forces de police. 28 mai :
occupation de la Faculté des Lettres de Madrid. 28 mai :
la police investit les Facultés. « Contrairement à nos cama-
rades français nous luttons seuls. La plupart des professeurs
sont complices du franquisme» déclare un responsable
étudiant. ITALIE — 14 mai : l'Université de Milan est oc-
cupée par les étudiants. 22 mai : occupation de facultés
à Venise. 3 juin : à Rome la police, sur ordre du recteur,
expulse les étudiants de la cité universitaire. 7 juin : heurts
violents à Milan entre policiers et étudiants qui s'opposent
à la sortie du quotidien « Corriere délia Sera ».
ALLEMAGNE - 11 mai : 50000 étudiants et ouvriers
organisent une marche sur Bonn pour lutter contre la légis-
lation d'exception. 1er juin : les étudiants repeignent le
nom de Karl Marx sur la façade de l'université de Francfort.
à Madrid avec drapeaux rouges et portraits de « Che »
Guevara. Ils tentent d'édifier des barricades mais sont
dispersés par d'importantes forces de police. 28 mai :
occupation de la Faculté des Lettres de Madrid. 28 mai :
la police investit les Facultés. « Contrairement à nos cama-
rades français nous luttons seuls. La plupart des professeurs
sont complices du franquisme» déclare un responsable
étudiant. ITALIE — 14 mai : l'Université de Milan est oc-
cupée par les étudiants. 22 mai : occupation de facultés
à Venise. 3 juin : à Rome la police, sur ordre du recteur,
expulse les étudiants de la cité universitaire. 7 juin : heurts
violents à Milan entre policiers et étudiants qui s'opposent
à la sortie du quotidien « Corriere délia Sera ».
ALLEMAGNE - 11 mai : 50000 étudiants et ouvriers
organisent une marche sur Bonn pour lutter contre la légis-
lation d'exception. 1er juin : les étudiants repeignent le
nom de Karl Marx sur la façade de l'université de Francfort.
21 juin : à Dusseldorf le ministre président de Rhénanie-
Westphalie est pris à partie par des manifestants. 22 juin :
barricades à Cologne. SUISSE — 7 juin : des étudiants
genevois réclament la démocratisation de l'Université.
16 juin : à Zurich quelques centaines de manifestants
occupent un immeuble vide avec le projet de le transfor-
mer en Auberge de la Jeunesse. Ouvriers et étudiants
créent un « tribunal populaire » pour juger la police zuri-
choise. 20 juin : les autorités refusent de faire aux étudiants
des concessions «à la française». YOUGOSLAVIE — 2-3
Westphalie est pris à partie par des manifestants. 22 juin :
barricades à Cologne. SUISSE — 7 juin : des étudiants
genevois réclament la démocratisation de l'Université.
16 juin : à Zurich quelques centaines de manifestants
occupent un immeuble vide avec le projet de le transfor-
mer en Auberge de la Jeunesse. Ouvriers et étudiants
créent un « tribunal populaire » pour juger la police zuri-
choise. 20 juin : les autorités refusent de faire aux étudiants
des concessions «à la française». YOUGOSLAVIE — 2-3
juin : échauffourées entre policiers et étudiants. Des comités
s'organisent contre la « bourgeoisie rouge », les étudiants
demandent la démission des directeurs de tous les journaux
de Belgrade et du commandant de la milice. 4 juin : occupa-
tion des facultés. La Ligue des communistes promet des
réformes. 7 juin : le comité d'action de l'Université de Bel-
grade rejette un compromis avec le gouvernement. 26 juin :
le maréchal Tito annonce des changements à la direction
du Parti, à la suite des manifestations étudiantes. GRECE —
14 étudiants appartenant au réseau de résistance Rigas
Ferraios (du nom du poète et héros de l'indépendance
grecque) sont arrêtés et traduits devant un tribunal mili-
taire. TURQUIE - 10 juin : 20000 étudiants se mettent
en grève et occupent les facultés. A Istambul bagarres entre
étudiants « durs » et « modérés ».
s'organisent contre la « bourgeoisie rouge », les étudiants
demandent la démission des directeurs de tous les journaux
de Belgrade et du commandant de la milice. 4 juin : occupa-
tion des facultés. La Ligue des communistes promet des
réformes. 7 juin : le comité d'action de l'Université de Bel-
grade rejette un compromis avec le gouvernement. 26 juin :
le maréchal Tito annonce des changements à la direction
du Parti, à la suite des manifestations étudiantes. GRECE —
14 étudiants appartenant au réseau de résistance Rigas
Ferraios (du nom du poète et héros de l'indépendance
grecque) sont arrêtés et traduits devant un tribunal mili-
taire. TURQUIE - 10 juin : 20000 étudiants se mettent
en grève et occupent les facultés. A Istambul bagarres entre
étudiants « durs » et « modérés ».
AFRIQUE
SENEGAL — 27 mai : grève à l'Université de Dakar et dans
76
les établissements secondaires. 29 mai : l'Université est
fermée, après expulsion des étudiants par la police, l'état
d'urgence est proclamé. 1er juin : 36 condamnations, de
18 mois à 3 ans de prison, sont prononcées. 6 juin : le
mouvement reprend. 13 juin : M. Senghor annonce un
relèvement des bas salaires de 15%. 14 juin : un mort
au cours d'affrontements entre policiers et lycéens. Ferme-
ture des lycées. CONGO-KINSHASA - Après des mani-
festations de lycéens, annulation des examens.
fermée, après expulsion des étudiants par la police, l'état
d'urgence est proclamé. 1er juin : 36 condamnations, de
18 mois à 3 ans de prison, sont prononcées. 6 juin : le
mouvement reprend. 13 juin : M. Senghor annonce un
relèvement des bas salaires de 15%. 14 juin : un mort
au cours d'affrontements entre policiers et lycéens. Ferme-
ture des lycées. CONGO-KINSHASA - Après des mani-
festations de lycéens, annulation des examens.
ASIE
CHINE — août 1966 : après quelques mois de révolte spon-
tanée dans les universités, la «révolution culturelle» est
proclamée. Toute la Chine est secouée par cet immense
mouvement de jeunesse contre l'ordre établi, la bureaucratie
politique, les vestiges de la féodalité. Rien n'est épargné :
le mouvement va dans toutes les provinces, il touche le
tanée dans les universités, la «révolution culturelle» est
proclamée. Toute la Chine est secouée par cet immense
mouvement de jeunesse contre l'ordre établi, la bureaucratie
politique, les vestiges de la féodalité. Rien n'est épargné :
le mouvement va dans toutes les provinces, il touche le
parti, l'armée, les syndicats, les universités, les usines...
Aujourd'hui, un répit se fait sentir mais la révolution culturelle
continue, et sert de référence à de nombreux mouvements
Ajourd'hui, un répit se fait sentir mais la révolution culturelle
continue, et sert de référence à de nombreux mouvements
étudiants. En France, on a beaucoup parlé de révolution
culturelle : à Pékin, plusieurs centaines de milliers d'étu-
diants et d'ouvriers ont défilé en signe de solidarité avec le
peuple français. JAPON - 6 juin : manifestation étudiante
contre les bases américaines. 16 juin : nouvelles manifes-
tations très violentes à la suite de la chute d'un avion améri-
cain dans un campus. 20 juin : barricades à Tokyo. Le mot
d'ordre «transformons Kanda en Quartier Latin» apparaît.
2 500 policiers interviennent, 55 arrestations. THAÏLANDE
- 20 juin : première manifestation depuis dix ans à Bangkok,
des étudiants réclament le retour du corps expéditionnaire
thaïlandais opérant au Viêt-nam.
Aujourd'hui, un répit se fait sentir mais la révolution culturelle
continue, et sert de référence à de nombreux mouvements
Ajourd'hui, un répit se fait sentir mais la révolution culturelle
continue, et sert de référence à de nombreux mouvements
étudiants. En France, on a beaucoup parlé de révolution
culturelle : à Pékin, plusieurs centaines de milliers d'étu-
diants et d'ouvriers ont défilé en signe de solidarité avec le
peuple français. JAPON - 6 juin : manifestation étudiante
contre les bases américaines. 16 juin : nouvelles manifes-
tations très violentes à la suite de la chute d'un avion améri-
cain dans un campus. 20 juin : barricades à Tokyo. Le mot
d'ordre «transformons Kanda en Quartier Latin» apparaît.
2 500 policiers interviennent, 55 arrestations. THAÏLANDE
- 20 juin : première manifestation depuis dix ans à Bangkok,
des étudiants réclament le retour du corps expéditionnaire
thaïlandais opérant au Viêt-nam.
77
VIET-NAM :
LE DESSOUS
DES CARTES
LE DESSOUS
DES CARTES
L'Amérique ne veut plus mourir pour Khe Sanh :
par crainte d'un Dien Bien Phu, elle évacue la base.
A Paris, les conversations entre les Etats-Unis
et le Viêt-nam du Nord s'enlisent. A Saigon,
offensives et contre-offensives se poursuivent.
Le sort des négociations se réglera sur le terrain.
par crainte d'un Dien Bien Phu, elle évacue la base.
A Paris, les conversations entre les Etats-Unis
et le Viêt-nam du Nord s'enlisent. A Saigon,
offensives et contre-offensives se poursuivent.
Le sort des négociations se réglera sur le terrain.
La deuxième offensive : une nouvelle fou la guerre à Saigon
78
ce
à
à
Entretien avec Wilfred Burchett
Notre correspondant en Asie du Sud-Est, Wilfred Burchett,
a suivi depuis le début
les conversations américano-viêt-namiennes de Paris.
Voici son analyse de la situation.
Voici son analyse de la situation.
Pourquoi Hanoi a-t-il accepté de participer à des conversations
à Paris avec les Américains sans insister sur l'arrêt incondi-
tionnel des bombardements sur tout le Nord Viêt-nam ?
à Paris avec les Américains sans insister sur l'arrêt incondi-
tionnel des bombardements sur tout le Nord Viêt-nam ?
Il faut revenir en arrière. Les Etats-Unis avaient invo-
qué, pour bombarder le Nord Viêt-nam, la nécessité de
représailles après l'attaque par un commando d'un
terrain d'aviation américain près de Pleiku dans les
Hauts Plateaux (au centre du Sud Viêt-nam). Les raids
aériens continuèrent, les Etats-Unis donnèrent alors une
autre raison : il fallait stopper l'envoi de renforts nor-
distes au Sud Viêt-nam. Enfin, troisième raison invoquée,
les bombardements étaient nécessaires, selon le président
Johnson, pour amener Hanoi à la table des négociations.
Telle fut la position officielle en 1965 et 1966.
qué, pour bombarder le Nord Viêt-nam, la nécessité de
représailles après l'attaque par un commando d'un
terrain d'aviation américain près de Pleiku dans les
Hauts Plateaux (au centre du Sud Viêt-nam). Les raids
aériens continuèrent, les Etats-Unis donnèrent alors une
autre raison : il fallait stopper l'envoi de renforts nor-
distes au Sud Viêt-nam. Enfin, troisième raison invoquée,
les bombardements étaient nécessaires, selon le président
Johnson, pour amener Hanoi à la table des négociations.
Telle fut la position officielle en 1965 et 1966.
Le Nord refusa évidemment d'être bombardé pendant
les négociations. Pendant la période 1965-1966, le Nord
Viêt-nam s'occupait de transférer son industrie dans la
jungle et les montagnes, de renforcer les digues... Les
bombardements atteignirent fin 1966 leur intensité maxi-
male. Pendant cette période les dirigeants Nord Viet-
namiens estimaient que l'acceptation de l'offre de « négo-
ciations inconditionnelles » du président Johnson aurait
été prise par Washington pour un signe de faiblesse.
Mais, tout au long de l'année 1966, Hanoi subit des
pressions considérables de la part de quelques uns de
ses alliés du camp socialiste — et de quelques soi-disant
neutralistes — pour qu'il prenne au mot les propositions
de Johnson.
les négociations. Pendant la période 1965-1966, le Nord
Viêt-nam s'occupait de transférer son industrie dans la
jungle et les montagnes, de renforcer les digues... Les
bombardements atteignirent fin 1966 leur intensité maxi-
male. Pendant cette période les dirigeants Nord Viet-
namiens estimaient que l'acceptation de l'offre de « négo-
ciations inconditionnelles » du président Johnson aurait
été prise par Washington pour un signe de faiblesse.
Mais, tout au long de l'année 1966, Hanoi subit des
pressions considérables de la part de quelques uns de
ses alliés du camp socialiste — et de quelques soi-disant
neutralistes — pour qu'il prenne au mot les propositions
de Johnson.
Des contacts furent pris fin 1966 par la délégation polo-
naise à la Commission internationale de contrôle à
Saigon et il fut décidé que des conversations secrètes et
officieuses pourraient commencer à Varsovie en jan-
vier 1967. Au moment même où ces arrangements eurent
lieu, Hanoi fut très durement bombardée, le 13 décem-
bre et les jours suivants. On sait que dans une zone de
vingt-cinq kilomètres autour de la capitale, les bombar-
dements sont soumis à l'autorisation formelle du prési-
dent Johnson : ce fut donc la réponse de Johnson aux
contacts secrets qui avaient été pris. A ce moment, Hanoi
ne demandait pas la fin des bombardements comme
préalable aux négociations.
naise à la Commission internationale de contrôle à
Saigon et il fut décidé que des conversations secrètes et
officieuses pourraient commencer à Varsovie en jan-
vier 1967. Au moment même où ces arrangements eurent
lieu, Hanoi fut très durement bombardée, le 13 décem-
bre et les jours suivants. On sait que dans une zone de
vingt-cinq kilomètres autour de la capitale, les bombar-
dements sont soumis à l'autorisation formelle du prési-
dent Johnson : ce fut donc la réponse de Johnson aux
contacts secrets qui avaient été pris. A ce moment, Hanoi
ne demandait pas la fin des bombardements comme
préalable aux négociations.
Quelques jours après les bombardements des 13 et
14 décembre, Harrison Salisbury, rédacteur en chef du
New York Times, arrivait à Hanoi. Ses témoignages sur
les bombardements d'objectifs civils — alors que le dépar-
tement d'Etat et le département de la Défense persis-
taient à nier les bombardements de Hanoi et les bombar-
dements d'objectifs civils — soulevèrent une grande émo-
tion dans le monde. Johnson, tout en continuant à nier
le bombardement d'objectifs civils, lia alors le problème
de l'arrêt des bombardements à celui des négociations.
New York Times, arrivait à Hanoi. Ses témoignages sur
les bombardements d'objectifs civils — alors que le dépar-
tement d'Etat et le département de la Défense persis-
taient à nier les bombardements de Hanoi et les bombar-
dements d'objectifs civils — soulevèrent une grande émo-
tion dans le monde. Johnson, tout en continuant à nier
le bombardement d'objectifs civils, lia alors le problème
de l'arrêt des bombardements à celui des négociations.
Le 28 janvier 1967, le ministre des Affaires étrangères
du Nord Viêt-nam, Nguyen Duy Trinh, déclara qu'en
effet le Nord Viêt-nam était prêt à entamer des négocia-
tions aussitôt que les bombardements cesseraient. Cette
déclaration intervint juste avant la trêve du Têt et beau-
coup, dont U'Thant, Arthur Goldberg, ambassadeur amé-
ricain des Nations unies, Kossyguine, crurent qu'il y aurait
après le Têt une pause prolongée des bombardements
pendant laquelle les conversations pourraient commencer.
du Nord Viêt-nam, Nguyen Duy Trinh, déclara qu'en
effet le Nord Viêt-nam était prêt à entamer des négocia-
tions aussitôt que les bombardements cesseraient. Cette
déclaration intervint juste avant la trêve du Têt et beau-
coup, dont U'Thant, Arthur Goldberg, ambassadeur amé-
ricain des Nations unies, Kossyguine, crurent qu'il y aurait
après le Têt une pause prolongée des bombardements
pendant laquelle les conversations pourraient commencer.
Le contraire arriva. Après le Têt, les bombardements
reprirent de plus belle, ils furent renforcés par des bom-
bardements sur les zones côtières, le minage des embou-
chures des rivières navigables, des tirs d'artillerie sur le
Nord au-dessus clé la zone démilitarisée, le bombarde-
ment et l'invasion de cette zone par les Marines améri-
cains qui laissaient présager l'invasion du Nord Viêt-nam.
Washington, comme les Nord Vietnamiens l'avaient sup-
posé, avait pris l'acceptation de négociations pour un
signe de faiblesse et décidé que le Nord s'effondrerait si
les bombardements doublaient. Une fois de plus, les
perspectives de négociations disparurent sous les bombes.
reprirent de plus belle, ils furent renforcés par des bom-
bardements sur les zones côtières, le minage des embou-
chures des rivières navigables, des tirs d'artillerie sur le
Nord au-dessus clé la zone démilitarisée, le bombarde-
ment et l'invasion de cette zone par les Marines améri-
cains qui laissaient présager l'invasion du Nord Viêt-nam.
Washington, comme les Nord Vietnamiens l'avaient sup-
posé, avait pris l'acceptation de négociations pour un
signe de faiblesse et décidé que le Nord s'effondrerait si
les bombardements doublaient. Une fois de plus, les
perspectives de négociations disparurent sous les bombes.
Les dirigeants du Nord Viêt-nam me dirent à cette
époque qu'il serait inutile de poursuivre les initiatives
avant un an — jusqu'à ce que les Américains voient
l'absurdité de leurs calculs sur l'effondrement de Hanoi.
Pendant ce temps, les industries décentralisées commen-
çaient à produire et l'agriculture et l'industrie légère
voyaient leur production augmenter. Le réseau de
communications s'étendait, et Hanoi avait plus confiance
que jamais dans l'évolution de la situation.
époque qu'il serait inutile de poursuivre les initiatives
avant un an — jusqu'à ce que les Américains voient
l'absurdité de leurs calculs sur l'effondrement de Hanoi.
Pendant ce temps, les industries décentralisées commen-
çaient à produire et l'agriculture et l'industrie légère
voyaient leur production augmenter. Le réseau de
communications s'étendait, et Hanoi avait plus confiance
que jamais dans l'évolution de la situation.
Fin 1967, Washington devait admettre que ses troupes
étaient sur la défensive au Sud et que les renforts arri-
vaient plus vite que jamais du Nord. Hanoi montrait
étaient sur la défensive au Sud et que les renforts arri-
vaient plus vite que jamais du Nord. Hanoi montrait
80
moins de signes d'effondrement que jamais. Nguyen
Duy Trinh fit une déclaration à une délégation mongole :
si les bombardements cessent, les négociations commen-
ceront. Washington remarqua avec intérêt que le condi-
tionnel de décembre 1967 avait été remplacé par le futur.
Duy Trinh fit une déclaration à une délégation mongole :
si les bombardements cessent, les négociations commen-
ceront. Washington remarqua avec intérêt que le condi-
tionnel de décembre 1967 avait été remplacé par le futur.
En février 1968, dans une interview au correspondant
de l'A.F.P., B.J. Cabannes, le ministre des Affaires étran-
gères poussa les choses un peu plus loin en disant que
des sujets d'intérêt commun aux deux parties pourraient
être discutés et que les négociations pourraient commen-
cer aussitôt l'arrêt des bombardements.
de l'A.F.P., B.J. Cabannes, le ministre des Affaires étran-
gères poussa les choses un peu plus loin en disant que
des sujets d'intérêt commun aux deux parties pourraient
être discutés et que les négociations pourraient commen-
cer aussitôt l'arrêt des bombardements.
La proposition suivante d'Hanoi devait être exposée
lors de la visite de Charles Collingwood, le chef du
service étranger de la chaîne de télévision américaine
C.B.S. qui arrivait à Hanoi le 29 mars. Dans sa première
émission à Tokyo, quand on lui demanda pourquoi
Hanoi avait répondu si vite au discours de Johnson
du 31 mars, Collingwood répondit qu'il avait la très
nette impression que Hanoi était sur le point de prendre
une initiative. Le 30 mars, Collingwood devait rencontrer
des personnalités très importantes dont Nguyen Duy
Trinh. Parmi les questions qui devaient être discutées, il
V avait celle de l'initiative qu'Hanoi préparait.
lors de la visite de Charles Collingwood, le chef du
service étranger de la chaîne de télévision américaine
C.B.S. qui arrivait à Hanoi le 29 mars. Dans sa première
émission à Tokyo, quand on lui demanda pourquoi
Hanoi avait répondu si vite au discours de Johnson
du 31 mars, Collingwood répondit qu'il avait la très
nette impression que Hanoi était sur le point de prendre
une initiative. Le 30 mars, Collingwood devait rencontrer
des personnalités très importantes dont Nguyen Duy
Trinh. Parmi les questions qui devaient être discutées, il
V avait celle de l'initiative qu'Hanoi préparait.
Hanoi était fermement décidée à ne pas laisser l'ini-
tiative de Johnson court-circuiter la leur. Aussi dès le 3,
Hanoi se disait prêt à ouvrir les négociations et le 5, dans
une interview accordée à Collingwood, le ministre des
Affaires étrangères proposait Phnom Penh comme lieu
de rencontre pour des conversations entre ambassadeurs.
tiative de Johnson court-circuiter la leur. Aussi dès le 3,
Hanoi se disait prêt à ouvrir les négociations et le 5, dans
une interview accordée à Collingwood, le ministre des
Affaires étrangères proposait Phnom Penh comme lieu
de rencontre pour des conversations entre ambassadeurs.
Vous n'avez pas expliqué pourquoi Hanoi a donné son accord
pour venir à Paru avant que les Etals-Unis aient arrêté les
bombardements contre le Nord ?
pour venir à Paru avant que les Etals-Unis aient arrêté les
bombardements contre le Nord ?
Je suppose que Hanoi sentait qu'à une ouverture
limitée pourrait correspondre une réponse limitée, qu'à
une limitation des bombardements pourrait correspon-
dre des conversations limitées — conversations qui por-
teraient sur l'arrêt complet des bombardements afin d'ar-
river enfin au fond du problème, le règlement politique
au Sud Viêt-nam.
limitée pourrait correspondre une réponse limitée, qu'à
une limitation des bombardements pourrait correspon-
dre des conversations limitées — conversations qui por-
teraient sur l'arrêt complet des bombardements afin d'ar-
river enfin au fond du problème, le règlement politique
au Sud Viêt-nam.
— points de repère -
LES « QUATRE POINTS DE HANOI »
La position vietnamienne a été officielle-
ment formulée dès le 8 avril 1966 dans
les « Quatre points de Hanoi » :
ment formulée dès le 8 avril 1966 dans
les « Quatre points de Hanoi » :
— réaffirmation des droits fondamentaux
du peuple vietnamien : paix, indépen-
dance, souveraineté, unité, intégrité
territoriale ; retrait des troupes améri-
caines et fin de l'intervention améri-
caine au Viêt-nam, conformément aux
accords de Genève.
du peuple vietnamien : paix, indépen-
dance, souveraineté, unité, intégrité
territoriale ; retrait des troupes améri-
caines et fin de l'intervention améri-
caine au Viêt-nam, conformément aux
accords de Genève.
— strict respect des accords de Genève
jusqu'à la réunification du pays, en
particulier dans le domaine militaire
(interdiction des bases militaires et de
l'appartenance aux blocs militaires) ;
jusqu'à la réunification du pays, en
particulier dans le domaine militaire
(interdiction des bases militaires et de
l'appartenance aux blocs militaires) ;
— les affaires du Sud Viêt-nam doivent
être réglées conformément au pro-
être réglées conformément au pro-
gramme du Front national de libéra-
tion du Sud Viêt-nam ;
— la réunification des deux Viêt-nam sera
l'affaire du peuple des deux zones,
sans ingérence étrangère.
tion du Sud Viêt-nam ;
— la réunification des deux Viêt-nam sera
l'affaire du peuple des deux zones,
sans ingérence étrangère.
LES CINQ POINTS DU F.N.L.
Dans une déclaration en cinq points
publiée le 23 mars 1965 le F.N.L. souli-
gne que les Etats-Unis ont saboté les
accords de Genève et agressé le peuple
vietnamien mais que celui-ci est décidé à
se battre jusqu'au bout pour libérer son
territoire et « instituer un Sud Viêt-nam in-
dépendant, démocratique et neutre en marche
vers la réunification de sa patrie ». Il se dé-
clare prêt à accepter toute aide, y compris
publiée le 23 mars 1965 le F.N.L. souli-
gne que les Etats-Unis ont saboté les
accords de Genève et agressé le peuple
vietnamien mais que celui-ci est décidé à
se battre jusqu'au bout pour libérer son
territoire et « instituer un Sud Viêt-nam in-
dépendant, démocratique et neutre en marche
vers la réunification de sa patrie ». Il se dé-
clare prêt à accepter toute aide, y compris
l'aide armée, et remercie tous les peuples
épris de paix « de leur soutien chaleu-
reux ».
épris de paix « de leur soutien chaleu-
reux ».
ACCORDS DE GENEVE
— Cessez-le-feu le long du 17e parallèle
sous la garantie des cinq grands
(France - Grande-Bretagne - Ù.R.S.S. -
Chine - Etats-Unis).
sous la garantie des cinq grands
(France - Grande-Bretagne - Ù.R.S.S. -
Chine - Etats-Unis).
— Neutralité militaire de tous les pays de
l'ancienne Indochine dégagés de tout
groupement militaire et de tout lien
militaire avec l'étranger.
l'ancienne Indochine dégagés de tout
groupement militaire et de tout lien
militaire avec l'étranger.
— Division provisoire du Viêt-nam en
deux parties par une ligne de démar-
cation militaire temporaire.
deux parties par une ligne de démar-
cation militaire temporaire.
— Affirmation de l'unité du Viêt-nam et
annonce d'élections libres sur tout le
territoire au plus tard en 1956.
annonce d'élections libres sur tout le
territoire au plus tard en 1956.
81
Comment à votre avis les événement!, survenus au Sud Viêt-nam
ont-ils contribué à rendre possible l'ouverture des conversations ?
ont-ils contribué à rendre possible l'ouverture des conversations ?
Revenons à 1965, lorsque commença l'intervention
directe des troupes américaines. Les Américains eurent
l'initiative stratégique durant les opérations de la saison
sèche 65-66 et 66-67. Ils décidaient où et quand les opé-
rations auraient lieu. Mais, même à ce moment-là, à
l'intérieur de chaque opération, le Front de libération
avait l'initiative tactique — il décidait de l'acceptation, de
la date et du lieu du combat. Le principal objectif de
ces opérations — la destruction du gros des forces du
Front — n'a pas été atteint. En fait, les troupes améri-
caines ont rarement eu le contact avec les troupes du
Front qui s'étaient repliées dans leurs bases et s'entraî-
naient pour être prêtes le moment venu à la contre-offen-
sive. C'est ce qui arriva fin octobre 1967 à Loc Ninh, à
Dak To un mois plus tard, les Américains furent réduits
à la défensive. Pris dans la contradiction entre disper-
sion ou concentration, ne sachant pas où le principal
coup serait porté — près de la zone démilitarisée, dans
les Hauts Plateaux du centre, dans la région de Saigon —
Westmoreland était forcé d'éparpiller ses divisions et
d'attendre pour réagir que le Front attaquât. Cette tacti-
que conduisit à l'offensive du Têt et à l'introduction de
la guerre dans et autour des villes.
directe des troupes américaines. Les Américains eurent
l'initiative stratégique durant les opérations de la saison
sèche 65-66 et 66-67. Ils décidaient où et quand les opé-
rations auraient lieu. Mais, même à ce moment-là, à
l'intérieur de chaque opération, le Front de libération
avait l'initiative tactique — il décidait de l'acceptation, de
la date et du lieu du combat. Le principal objectif de
ces opérations — la destruction du gros des forces du
Front — n'a pas été atteint. En fait, les troupes améri-
caines ont rarement eu le contact avec les troupes du
Front qui s'étaient repliées dans leurs bases et s'entraî-
naient pour être prêtes le moment venu à la contre-offen-
sive. C'est ce qui arriva fin octobre 1967 à Loc Ninh, à
Dak To un mois plus tard, les Américains furent réduits
à la défensive. Pris dans la contradiction entre disper-
sion ou concentration, ne sachant pas où le principal
coup serait porté — près de la zone démilitarisée, dans
les Hauts Plateaux du centre, dans la région de Saigon —
Westmoreland était forcé d'éparpiller ses divisions et
d'attendre pour réagir que le Front attaquât. Cette tacti-
que conduisit à l'offensive du Têt et à l'introduction de
la guerre dans et autour des villes.
La contre-offensive avait été précédée sur le plan poli-
tique par un congrès extraordinaire du Front fin août 67
au cours duquel un nouveau programme fut adopté :
très proche du premier que peu de gens connaissaient,
il donnait plus de détails sur les principaux points et
surtout lançait un appel à toutes les forces hostiles à la
présence américaine pour qu'elles s'unissent sur la base
la plus large possible. Il promettait une place dans un
futur gouvernement de coalition aux fonctionnaires, aux
officiers, à tous ceux qui se seraient lancés assez tôt dans
la lutte aux côtés du Front et qui soutiendraient son
programme.
tique par un congrès extraordinaire du Front fin août 67
au cours duquel un nouveau programme fut adopté :
très proche du premier que peu de gens connaissaient,
il donnait plus de détails sur les principaux points et
surtout lançait un appel à toutes les forces hostiles à la
présence américaine pour qu'elles s'unissent sur la base
la plus large possible. Il promettait une place dans un
futur gouvernement de coalition aux fonctionnaires, aux
officiers, à tous ceux qui se seraient lancés assez tôt dans
la lutte aux côtés du Front et qui soutiendraient son
programme.
Une des premières conséquences de l'offensive du Têt
fut la formation à Saigon de l'Alliance des forces natio-
nales, démocratiques et pacifiques sur un programme
plus large que celui du Front. Les noms de dix membres
sur quarante du Comité central de l'Alliance furent
publiés : ces dix membres sont tous très connus et sont
des intellectuels de Hué et de Saigon, avocats, docteurs.
Parmi les autres membres il y aurait des officiers de haut
rang, des personnalités officielles de Saigon dont les noms
s'ils étaient connus feraient sensation.
fut la formation à Saigon de l'Alliance des forces natio-
nales, démocratiques et pacifiques sur un programme
plus large que celui du Front. Les noms de dix membres
sur quarante du Comité central de l'Alliance furent
publiés : ces dix membres sont tous très connus et sont
des intellectuels de Hué et de Saigon, avocats, docteurs.
Parmi les autres membres il y aurait des officiers de haut
rang, des personnalités officielles de Saigon dont les noms
s'ils étaient connus feraient sensation.
La création de l'Alliance fut très favorablement accueil-
lie par le Front et Hanoi. Il est clair qu'ils pensent que
l'Alliance jouera un rôle important lors du règlement
politique avec les Etats-Unis. Il est significatif que Hanoi
et le F.N.L. aient fait récemment disparaître le mot seul
dans la formule habituelle « le F.N.L., seul représentant
authentique du peuple vietnamien ». L'Alliance, de par
la modération de son programme, est plus acceptable
que le Front pour les Etats-Unis. Peut-être•• sera-t-elle
lie par le Front et Hanoi. Il est clair qu'ils pensent que
l'Alliance jouera un rôle important lors du règlement
politique avec les Etats-Unis. Il est significatif que Hanoi
et le F.N.L. aient fait récemment disparaître le mot seul
dans la formule habituelle « le F.N.L., seul représentant
authentique du peuple vietnamien ». L'Alliance, de par
la modération de son programme, est plus acceptable
que le Front pour les Etats-Unis. Peut-être•• sera-t-elle
l'embryon du large mouvement d'union nationale que
réclame le nouveau programme du Front ?
réclame le nouveau programme du Front ?
Comment expliquez-vous la lente progression des conversations
de Paris ?
de Paris ?
La plupart des gens s'étonnent de cette lenteur. Beau-
coup sentent que Washington a été pris de court par la
rapidité de la réaction de Hanoi. Le président Johnson,
selon des sources bien informées de Washington, aurait
préféré que les conversations commencent en juillet,
que des progrès soient réalisés en août juste avant la
Convention démocrate, et d'autres avant les élections de
novembre. C'est l'explication qui est donnée pour justi-
fier le mois passé à choisir un lieu de rencontre et les
cinq semaines de palabres sur l'arrêt des bombardements.
Il est clair que les conversations sérieuses ne commen-
ceront pas tant que l'arrêt inconditionnel des bombar-
dements ne sera pas réalisé, plaçant ainsi les deux parties
sur un plan d'égalité.
coup sentent que Washington a été pris de court par la
rapidité de la réaction de Hanoi. Le président Johnson,
selon des sources bien informées de Washington, aurait
préféré que les conversations commencent en juillet,
que des progrès soient réalisés en août juste avant la
Convention démocrate, et d'autres avant les élections de
novembre. C'est l'explication qui est donnée pour justi-
fier le mois passé à choisir un lieu de rencontre et les
cinq semaines de palabres sur l'arrêt des bombardements.
Il est clair que les conversations sérieuses ne commen-
ceront pas tant que l'arrêt inconditionnel des bombar-
dements ne sera pas réalisé, plaçant ainsi les deux parties
sur un plan d'égalité.
Les Viêt namiens considèrent ces conversations comme
le début de ce qui pourrait être la dernière phase d'un
combat de deux mille ans pour l'indépendance nationale
complète et ils ne vont pas risquer un faux pas en cher-
chant à aller trop vite. Ils ont eu pour envahisseurs ou
occupants, sous un prétexte ou un autre, les Chinois,
les Mongols, de nouveau les Chinois, les Français, les
Japonais, les Chinois du Kuomintang, de nouveau les
Français et maintenant les Américains. Leur lutte est une
lutte nationale, le combat des Etats-Unis une croisade
anti-communiste. Pour Hanoi le but final ne peut être
que le départ des Américains du Sud, et un règlement
entre Sud Vietnamiens dont l'expression serait un gou-
vernement représentatif des diverses couches sociales,
minorités nationales et religieuses.
le début de ce qui pourrait être la dernière phase d'un
combat de deux mille ans pour l'indépendance nationale
complète et ils ne vont pas risquer un faux pas en cher-
chant à aller trop vite. Ils ont eu pour envahisseurs ou
occupants, sous un prétexte ou un autre, les Chinois,
les Mongols, de nouveau les Chinois, les Français, les
Japonais, les Chinois du Kuomintang, de nouveau les
Français et maintenant les Américains. Leur lutte est une
lutte nationale, le combat des Etats-Unis une croisade
anti-communiste. Pour Hanoi le but final ne peut être
que le départ des Américains du Sud, et un règlement
entre Sud Vietnamiens dont l'expression serait un gou-
vernement représentatif des diverses couches sociales,
minorités nationales et religieuses.
Je ne pense pas que les Nord Vietnamiens cherchent
à créer les conditions de la prise du pouvoir par un
gouvernement à tendance communiste. Cette solution
aurait leur préférence, mais ils sont réalistes. Pour faire
aboutir leur long combat pour l'indépendance, les Nord
Vietnamiens et le Front sont prêts à mettre sur pied un
gouvernement acceptable par le peuple vietnamien tout
entier, par l'Est comme par l'Ouest. Un délai sera néces-
saire pour aboutir à la réunification et le Front et Hanoi
pensent que c'est le prix à payer pour se débarrasser
de la présence étrangère. Mais ils ne conclueront aucun
accord à moins du retrait total des forces américaines
et alliées du Sud.
à créer les conditions de la prise du pouvoir par un
gouvernement à tendance communiste. Cette solution
aurait leur préférence, mais ils sont réalistes. Pour faire
aboutir leur long combat pour l'indépendance, les Nord
Vietnamiens et le Front sont prêts à mettre sur pied un
gouvernement acceptable par le peuple vietnamien tout
entier, par l'Est comme par l'Ouest. Un délai sera néces-
saire pour aboutir à la réunification et le Front et Hanoi
pensent que c'est le prix à payer pour se débarrasser
de la présence étrangère. Mais ils ne conclueront aucun
accord à moins du retrait total des forces américaines
et alliées du Sud.
Quand vous parlez de retrait des forces américaines et alliées,
pensez-vous que Hanoi et le Front soient d'accord pour que
celui-ci s'étale sur une longue période ?
pensez-vous que Hanoi et le Front soient d'accord pour que
celui-ci s'étale sur une longue période ?
Je n'ai jamais entendu parler de limite de temps. Mais
les dirigeants Vietnamiens sont raisonnables et réalistes.
les dirigeants Vietnamiens sont raisonnables et réalistes.
Ce que les soldats laissent sert de jouet aux enfants
I
I
82
réclament un signe concret pour être convaincus. Ils sa-
vent qu'il est impossible d'évacuer six cent mille hommes
et leur matériel en quelques jours, voire quelques semai-
nes. Je suppose qu'il y aura des étapes. Les accords de
Genève de 1954 prévoyaient une période de trois cents
jours pour l'évacuation par étape des forces françaises du
Nord Viêt-nam, ['ai entendu dire, de manière officieuse,
que l'Union soviétique mettrait à la disposition des Amé-
ricains des bateaux et des avions pendant les six mois que
durerait l'évacuation.
vent qu'il est impossible d'évacuer six cent mille hommes
et leur matériel en quelques jours, voire quelques semai-
nes. Je suppose qu'il y aura des étapes. Les accords de
Genève de 1954 prévoyaient une période de trois cents
jours pour l'évacuation par étape des forces françaises du
Nord Viêt-nam, ['ai entendu dire, de manière officieuse,
que l'Union soviétique mettrait à la disposition des Amé-
ricains des bateaux et des avions pendant les six mois que
durerait l'évacuation.
Quelle a été la réaction de Hanoi et du Front au discours du
général de Gaulle à Pnom Penh en août 1966?
général de Gaulle à Pnom Penh en août 1966?
Après l'avoir étudié très soigneusement, la réaction
de Hanoi et du Front fut tout à fait positive. De Gaulle
insistait sur trois points clefs : l'intervention américaine
était la cause des troubles au Sud, la solution résidait
dans le départ de ces troupes américaines, le combat
des Vietnamiens était un combat pour l'indépendance
nationale.
de Hanoi et du Front fut tout à fait positive. De Gaulle
insistait sur trois points clefs : l'intervention américaine
était la cause des troubles au Sud, la solution résidait
dans le départ de ces troupes américaines, le combat
des Vietnamiens était un combat pour l'indépendance
nationale.
De Gaulle suggérait que le Viêt-nam tout entier devien-
ne un pays neutre. Il n'est pas difficile de l'envisager. Le
Nord Viêt-nam, selon les accords de Genève, devait être
un pays militairement neutre et il y était prêt : il n'est
membre d'aucune alliance militaire et n'a pas de bases
étrangères sur son territoire. Il fait partie bien entendu
du camp socialiste mais les accords de Genève sont muets
sur la neutralité politique et idéologique.
ne un pays neutre. Il n'est pas difficile de l'envisager. Le
Nord Viêt-nam, selon les accords de Genève, devait être
un pays militairement neutre et il y était prêt : il n'est
membre d'aucune alliance militaire et n'a pas de bases
étrangères sur son territoire. Il fait partie bien entendu
du camp socialiste mais les accords de Genève sont muets
sur la neutralité politique et idéologique.
Au Sud, le programme du Front et de l'Alliance est
précis sur ce point : une neutralité plus stricte que celle
du Cambodge ; relations diplomatiques, commerciales
et économiques avec tous les pays qui reconnaîtront la
souveraineté nationale du pays ; respect des intérêts étran-
gers, accueil des investissements étrangers qui n'entreront
pas en conflit avec la souveraineté nationale... Cette
conception de la neutralité va très loin et a pour consé-
quence un ajournement de la réunification avec le Nord.
précis sur ce point : une neutralité plus stricte que celle
du Cambodge ; relations diplomatiques, commerciales
et économiques avec tous les pays qui reconnaîtront la
souveraineté nationale du pays ; respect des intérêts étran-
gers, accueil des investissements étrangers qui n'entreront
pas en conflit avec la souveraineté nationale... Cette
conception de la neutralité va très loin et a pour consé-
quence un ajournement de la réunification avec le Nord.
Jusqu'à quel point les, Nord Vietnamiens peuvent-ils parler au
nom du Viêt-nam tout entier, et à quel moment les intérêts des
Sud Vietnamiens devront-ils être directement représentés f
nom du Viêt-nam tout entier, et à quel moment les intérêts des
Sud Vietnamiens devront-ils être directement représentés f
A cause des responsabilités de Hanoi et de Washington,
dans le cadre des accords de Genève, chaque délégation
peut parler de toutes les questions vietnamiennes. Elles
peuvent ainsi se mettre d'accord sur un calendrier des
négociations concernant le Sud. M. Xuan Thuy est habi-
lité à soulever le problème des troupes américaines au
Sud. M. Harriman soulève le problème des troupes nord
vietnamiennes au Sud. Hanoi croit qu'un règlement peut
être atteint dans le cadre des accords de Genève 1954 et
les quatre points de Hanoi reprennent l'essentiel des
accords. Washington a également affirmé son intention
de discuter sur la base des accords de Genève. Cela
donne aux deux parties une grande latitude dans la discus-
sion sur le problème du Sud : en particulier en ce qui
concerne les Etats-Unis qui ont hérité des responsabilités
de la France dans ces accords.
dans le cadre des accords de Genève, chaque délégation
peut parler de toutes les questions vietnamiennes. Elles
peuvent ainsi se mettre d'accord sur un calendrier des
négociations concernant le Sud. M. Xuan Thuy est habi-
lité à soulever le problème des troupes américaines au
Sud. M. Harriman soulève le problème des troupes nord
vietnamiennes au Sud. Hanoi croit qu'un règlement peut
être atteint dans le cadre des accords de Genève 1954 et
les quatre points de Hanoi reprennent l'essentiel des
accords. Washington a également affirmé son intention
de discuter sur la base des accords de Genève. Cela
donne aux deux parties une grande latitude dans la discus-
sion sur le problème du Sud : en particulier en ce qui
concerne les Etats-Unis qui ont hérité des responsabilités
de la France dans ces accords.
Hanoi a répété à plusieurs reprises que la solution
pourrait être définie à partir du programme du Frcmt
qui d'un point de vue occidental est beaucoup plus avan-
tageux que les accords de Genève. Il est clair qu'à un
moment une réprésentation du Front devra prendre part
aux négociations. En particulier lorsqu'on en arrivera
aux problèmes militaires, le Front et les Etats-Unis auront
une part prépondérante. Il est pour le moment impos-
sible de dire quand cette étape interviendra : tant que
les Etats-Unis persisteront à réclamer une contrepartie
à l'arrêt des bombardements il ne pourra être question de
calendrier, ni de participants.
pourrait être définie à partir du programme du Frcmt
qui d'un point de vue occidental est beaucoup plus avan-
tageux que les accords de Genève. Il est clair qu'à un
moment une réprésentation du Front devra prendre part
aux négociations. En particulier lorsqu'on en arrivera
aux problèmes militaires, le Front et les Etats-Unis auront
une part prépondérante. Il est pour le moment impos-
sible de dire quand cette étape interviendra : tant que
les Etats-Unis persisteront à réclamer une contrepartie
à l'arrêt des bombardements il ne pourra être question de
calendrier, ni de participants.
Vous avez fait allusion au fait que Hanoi et le Front estiment
qu'un rôle important peut être joué par l'Alliance des forces
nationales démocratiques et pacifiques lors du règlement poli-
tique. Pouvez-vous prêcher le rôle que pourrait jouer l'Alliance
à ce moment-là ?
qu'un rôle important peut être joué par l'Alliance des forces
nationales démocratiques et pacifiques lors du règlement poli-
tique. Pouvez-vous prêcher le rôle que pourrait jouer l'Alliance
à ce moment-là ?
Il est impossible de prévoir le développement de la
situation au moment où les conversations commenceront.
Ce ne sera peut-être ni le Front, ni l'Alliance mais les
représentants d'un gouvernement de coalition qui auront
un rôle à jouer si les conversations sur l'arrêt des bombar-
dements s'enlisent définitivement. La situation évolue
très vite à Saigon et, peut-être, quelques uns des points
que les Américains aimeraient voir discutés seront déjà
réglés sur le terrain. Il y aura peut-être une coalition entre
le Front, l'Alliance et d'autres forces qu'on ne peut
même pas envisager maintenant.
situation au moment où les conversations commenceront.
Ce ne sera peut-être ni le Front, ni l'Alliance mais les
représentants d'un gouvernement de coalition qui auront
un rôle à jouer si les conversations sur l'arrêt des bombar-
dements s'enlisent définitivement. La situation évolue
très vite à Saigon et, peut-être, quelques uns des points
que les Américains aimeraient voir discutés seront déjà
réglés sur le terrain. Il y aura peut-être une coalition entre
le Front, l'Alliance et d'autres forces qu'on ne peut
même pas envisager maintenant.
A la fin des négociations, quand l'avenir politique du Sud Viêt-
nam sera discuté, notamment le problème de la neutralité, la
présence' de la Chine -semble indispensable. Pensez-vous que
Pékin sera prêt à y participer ?
nam sera discuté, notamment le problème de la neutralité, la
présence' de la Chine -semble indispensable. Pensez-vous que
Pékin sera prêt à y participer ?
C'est un point très important auquel je ne peux répon-
dre. A Paris on pense généralement que Pékin est contre
ces conversations. Je ne crois pas que cela soit vrai. Il y a
une certaine méfiance à Pékin : on craint que les Viet-
namiens une fois encore concluent des accords qui seront
ensuite dénoncés par les Occidentaux comme l'ont été
ceux de Fontainebleau en 1946 et ceux de Genève en
1954. Mais Pékin et Hanoi ont également intérêt au départ
des Américains du Sud Viêt-nam, prélude à l'évacuation
générale de l'Asie du Sud-Est. Depuis treize ans, les
Chinois essaient d'obtenir le départ des Américains de
Formose, leur méfiance est avivée par les articles de la
presse occidentale qui vont souvent chercher leurs infor-
mations dans des pays socialistes et qui laissent entendre
qu'Hanoi accepterait que quelques bases américaines
demeurent au Sud. Les discussions que j'ai eues avec
les dirigeants de Hanoi et du Front infirment cette hypo-
thèse : aucun règlement ne sera possible tant qu'il restera
un Américain au Sud. Et sur ces bases, Pékin accepterait
certainement de participer à une conférence interna-
nationale.
dre. A Paris on pense généralement que Pékin est contre
ces conversations. Je ne crois pas que cela soit vrai. Il y a
une certaine méfiance à Pékin : on craint que les Viet-
namiens une fois encore concluent des accords qui seront
ensuite dénoncés par les Occidentaux comme l'ont été
ceux de Fontainebleau en 1946 et ceux de Genève en
1954. Mais Pékin et Hanoi ont également intérêt au départ
des Américains du Sud Viêt-nam, prélude à l'évacuation
générale de l'Asie du Sud-Est. Depuis treize ans, les
Chinois essaient d'obtenir le départ des Américains de
Formose, leur méfiance est avivée par les articles de la
presse occidentale qui vont souvent chercher leurs infor-
mations dans des pays socialistes et qui laissent entendre
qu'Hanoi accepterait que quelques bases américaines
demeurent au Sud. Les discussions que j'ai eues avec
les dirigeants de Hanoi et du Front infirment cette hypo-
thèse : aucun règlement ne sera possible tant qu'il restera
un Américain au Sud. Et sur ces bases, Pékin accepterait
certainement de participer à une conférence interna-
nationale.
84
Congrès des représentants de l'Alliance des Forces Démocratiques et Pacifiques au Viêt-nam tenu clandestinement près de Saigon. Au
centre, maître Trinh Dinh Thao. A gauche M. Duong Ky, professeur à l'Université et Mme Duong Quynh Hoa, médecin. A droite, M. Lan
Van Têt, ingénieur.
centre, maître Trinh Dinh Thao. A gauche M. Duong Ky, professeur à l'Université et Mme Duong Quynh Hoa, médecin. A droite, M. Lan
Van Têt, ingénieur.
Le '20-21 avril, quelque part du côté de Sai-
gcm-Cholon, l'Alliance des forces nationales,
démocratiques et pacifiques du Sud-Viêt-nam a
tenu son premier congrès. Un manifeste et un
programme ont été publiés : en voici les points
les plus importants.
gcm-Cholon, l'Alliance des forces nationales,
démocratiques et pacifiques du Sud-Viêt-nam a
tenu son premier congrès. Un manifeste et un
programme ont été publiés : en voici les points
les plus importants.
L~ programme d'action de l'Alliance
des Forces nationales démocrati-
ques et pacifiques du Viêt-nam est
formé des principaux points suivants :
des Forces nationales démocrati-
ques et pacifiques du Viêt-nam est
formé des principaux points suivants :
I. Mettre fin à la guerre, restaurer la paix,
reconquérir l'indépendance et la souveraineté
nationale.
reconquérir l'indépendance et la souveraineté
nationale.
a) la population du Sud-Viêt-nam
aspire ardemment à la paix, mais une
paix dans l'honneur et dans la liberté.
L'alliance des Forces nationales démo-
cratiques et pacifiques du Viêt-nam pré-
conise la reconquête de l'indépendance
et de la souveraineté du Sud-Viêt-nam.
Elle exige du gouvernement des Etats-
Unis la cessation de la guerre, le retrait
des troupes américaines et de celles de
ses alliés hors du Sud-Viêt-nam, le dé-
mantèlement des bases militaires amé-
ricaines, le respect de l'indépendance
et la souveraineté du Viêt-nam comme
il a été stipulé par les Accords de Ge-
nève de 1954. L'indépendance, la sou-
veraineté et l'intégrité territoriale du
Sud-Viêt-nam doivent être reconnues et
respectées par tous les gouvernements
du monde. L'Alliance des Forces na-
tionales démocratiques et pacifiques du
Viêt-nam est disposée à entrer en dis-
cussion avec le gouvernement des Etats-
Unis sur les questions susmentionnées.
aspire ardemment à la paix, mais une
paix dans l'honneur et dans la liberté.
L'alliance des Forces nationales démo-
cratiques et pacifiques du Viêt-nam pré-
conise la reconquête de l'indépendance
et de la souveraineté du Sud-Viêt-nam.
Elle exige du gouvernement des Etats-
Unis la cessation de la guerre, le retrait
des troupes américaines et de celles de
ses alliés hors du Sud-Viêt-nam, le dé-
mantèlement des bases militaires amé-
ricaines, le respect de l'indépendance
et la souveraineté du Viêt-nam comme
il a été stipulé par les Accords de Ge-
nève de 1954. L'indépendance, la sou-
veraineté et l'intégrité territoriale du
Sud-Viêt-nam doivent être reconnues et
respectées par tous les gouvernements
du monde. L'Alliance des Forces na-
tionales démocratiques et pacifiques du
Viêt-nam est disposée à entrer en dis-
cussion avec le gouvernement des Etats-
Unis sur les questions susmentionnées.
b) Le F.N.L. du Sud-Viêt-nam, force
patriotique qui a apporté de larges contri-
butions à l'œuvre d impulsion, d'organi-
sation et de direction de la lutte contre
l'agression étrangère au cours des années
passées, ne pourra être absent dans le
règlement de tous les problèmes du Sud-
patriotique qui a apporté de larges contri-
butions à l'œuvre d impulsion, d'organi-
sation et de direction de la lutte contre
l'agression étrangère au cours des années
passées, ne pourra être absent dans le
règlement de tous les problèmes du Sud-
Viêt-nam. Nous nous proposons d'entrer
en contact et de coordonner nos actions
avec le F.N.L. du Sud-Viêt-nam afin de
reconquérir ensemble l'indépendance na-
tionale, de rétablir la paix, de reconstruire
le pays, et de permettre à notre peuple
tout entier de jouir d'une vie libre et
heureuse.
en contact et de coordonner nos actions
avec le F.N.L. du Sud-Viêt-nam afin de
reconquérir ensemble l'indépendance na-
tionale, de rétablir la paix, de reconstruire
le pays, et de permettre à notre peuple
tout entier de jouir d'une vie libre et
heureuse.
2. Edifier le Sud-Viêt-nam en un Etat
indépendant, libre, pacifique neutre et pros-
père.
indépendant, libre, pacifique neutre et pros-
père.
a) Le régime politique institué au Sud-
Viêt-nam sera une république. Le peuple
jouira des libertés démocratiques effec-
tives. Les libertés de parole, de presse,
de croyances, de déplacement, de réu-
nion, d'organisation, d'expatriation, etc.,
seront garanties, sans aucune discrimina-
tion. Tous les organismes du pouvoir
d'Etat seront élus par le peuple suivant
les procédés d'élections libres, équitables
et honnêtes. Toutes les couches sociales
des deux sexes, toutes les nationalités et
toutes les religions auront leurs repré-
sentants au sein de ces organismes. Tous
les citoyens vietnamiens seront égaux dans
tous les domaines. L'Etat s'occupera des
intérêts de nos compatriotes vivant à
l'étranger et respectera les droits légitimes
des ressortissants étrangers vivant au Sud-
Viêt-nam. L'économie du Sud-Viêt-nam
doit être une économie indépendante,
souveraine et prospère. A cet effet, il est
nécessaire de développer l'industrie, d'en-
courager le développement de l'entreprise
industrielle et commerciale, les communi-
cations et les transports, en vue de la
prospérité du pays ; il est nécessaire de
veiller aux intérêts des travailleurs et des
différentes couches de la population.
Viêt-nam sera une république. Le peuple
jouira des libertés démocratiques effec-
tives. Les libertés de parole, de presse,
de croyances, de déplacement, de réu-
nion, d'organisation, d'expatriation, etc.,
seront garanties, sans aucune discrimina-
tion. Tous les organismes du pouvoir
d'Etat seront élus par le peuple suivant
les procédés d'élections libres, équitables
et honnêtes. Toutes les couches sociales
des deux sexes, toutes les nationalités et
toutes les religions auront leurs repré-
sentants au sein de ces organismes. Tous
les citoyens vietnamiens seront égaux dans
tous les domaines. L'Etat s'occupera des
intérêts de nos compatriotes vivant à
l'étranger et respectera les droits légitimes
des ressortissants étrangers vivant au Sud-
Viêt-nam. L'économie du Sud-Viêt-nam
doit être une économie indépendante,
souveraine et prospère. A cet effet, il est
nécessaire de développer l'industrie, d'en-
courager le développement de l'entreprise
industrielle et commerciale, les communi-
cations et les transports, en vue de la
prospérité du pays ; il est nécessaire de
veiller aux intérêts des travailleurs et des
différentes couches de la population.
Le Sud-Viêt-nam appliquera un- pro-
gramme de réforme agraire juste et ra-
tionnel qui servira de base pour le déve-
loppement de l'agriculture, afin d'amé-
liorer les conditions de vie et le pouvoir
gramme de réforme agraire juste et ra-
tionnel qui servira de base pour le déve-
loppement de l'agriculture, afin d'amé-
liorer les conditions de vie et le pouvoir
d'achat des agriculteurs et de contribuer
ainsi à l'épanouissement de l'ensemble
de l'économie nationale.
ainsi à l'épanouissement de l'ensemble
de l'économie nationale.
Dans l'immédiat, après le rétablisse-
ment de la paix, pour panser les blessures
de guerre, édifier et développer l'écono-
mie, le Sud-Viêt-nam fera appel aux aides
en capitaux, en technique et aux experts
venant de tous les pays, aides dépour-
vues de toute condition politique.
ment de la paix, pour panser les blessures
de guerre, édifier et développer l'écono-
mie, le Sud-Viêt-nam fera appel aux aides
en capitaux, en technique et aux experts
venant de tous les pays, aides dépour-
vues de toute condition politique.
b) Le Sud-Viêt-nam sera un Etat indé-
pendant jouissant pleinement de sa sou-
veraineté ; il poursuivra une politique
extérieure de non-alignement et aura des
relations avec tous les Etats, sans discri-
mination de régime politique, à condition
que ces Etats respectent effectivement l'in-
dépendance, la souveraineté et l'intégrité
territoriale du Viêt-nam.
pendant jouissant pleinement de sa sou-
veraineté ; il poursuivra une politique
extérieure de non-alignement et aura des
relations avec tous les Etats, sans discri-
mination de régime politique, à condition
que ces Etats respectent effectivement l'in-
dépendance, la souveraineté et l'intégrité
territoriale du Viêt-nam.
Le Sud-Viêt-nam attachera une impor-
tance particulière aux relations d'amitié
avec ses voisins : le Cambodge et le L?os.
tance particulière aux relations d'amitié
avec ses voisins : le Cambodge et le L?os.
3. Sur la réunification du pays.
La réunification du pavs est une aspira-
tion ardente et une cause sacrée de notre
peuple tout entier. En raison de l'exis-
tence effective de deux régimes politiques
différents dans les deux zones nord et sud,
la réunification du pays ne peut être effec-
tuée du jour au lendemain. Par consé-
quent, il est nécessaire que les deux zones
nord et sud entrent en contact sur une
base d'égalité et de respect des particula-
rités, afin de s'acheminer vers la réuni-
fication pacifique du pays. En attendant
la réunification, des relations entre les
deux zones dans les domaines de l'écono-
mie, de la culture, de la circulation s'avè-
rent nécessaires. Les compatriotes du
Sud-Viêt-nam regroupés au Nord sont
libres de rentrer au Sud et inversement,
les compatriotes du Nord évacués au Sud
sont également libres de regagner leur
lieu d'origine.
tion ardente et une cause sacrée de notre
peuple tout entier. En raison de l'exis-
tence effective de deux régimes politiques
différents dans les deux zones nord et sud,
la réunification du pays ne peut être effec-
tuée du jour au lendemain. Par consé-
quent, il est nécessaire que les deux zones
nord et sud entrent en contact sur une
base d'égalité et de respect des particula-
rités, afin de s'acheminer vers la réuni-
fication pacifique du pays. En attendant
la réunification, des relations entre les
deux zones dans les domaines de l'écono-
mie, de la culture, de la circulation s'avè-
rent nécessaires. Les compatriotes du
Sud-Viêt-nam regroupés au Nord sont
libres de rentrer au Sud et inversement,
les compatriotes du Nord évacués au Sud
sont également libres de regagner leur
lieu d'origine.
85
Saigon : la pourriture
La deuxième offensive du F.N.L.,
Vouverture des conversations ont accéléré la décomposition
Vouverture des conversations ont accéléré la décomposition
du régime sudiste.
Simon Notte, retour de Saigon, raconte.
Simon Notte, retour de Saigon, raconte.
f/T E gouvernement Huong va peut-être démission-
• •> ner ». « Le vice-Président Ky affirme qu'il ne pré-
pare aucun coup d'Etat »... Ces nouvelles sont les symp-
tômes d'une crise grave à Saigon; en fait, c'est l'existence
même du régime pro-américain qui est mis en cause.
• •> ner ». « Le vice-Président Ky affirme qu'il ne pré-
pare aucun coup d'Etat »... Ces nouvelles sont les symp-
tômes d'une crise grave à Saigon; en fait, c'est l'existence
même du régime pro-américain qui est mis en cause.
Toute littérature qui porte sur la guerre d'Indochine
ou sur la guerre du Viêt-nam devient un morceau de roi
quand elle touche à « Saigon ville de la corruption »...
Les récits de la vie à Saigon révèlent en effet des mœurs
et des systèmes qui n'ont plus cours, sous cette forme,
en Occident mais qui fascinent en chacun de nous l'ama-
teur d'aventure, d'exotisme et de rêves.
ou sur la guerre du Viêt-nam devient un morceau de roi
quand elle touche à « Saigon ville de la corruption »...
Les récits de la vie à Saigon révèlent en effet des mœurs
et des systèmes qui n'ont plus cours, sous cette forme,
en Occident mais qui fascinent en chacun de nous l'ama-
teur d'aventure, d'exotisme et de rêves.
Il serait intéressant de dépouiller Saigon de ces ori-
peaux sensationnels pour essayer de comprendre plus
précisément comment une telle « institution » peut ainsi
fonctionner et ce qu'elle représente pour les Vietnamiens
de 1968.
peaux sensationnels pour essayer de comprendre plus
précisément comment une telle « institution » peut ainsi
fonctionner et ce qu'elle représente pour les Vietnamiens
de 1968.
A vivre à Saigon, on apprend très vite les manifesta-
tions concrètes de cette corruption célèbre, que les
dirigeants dénonçaient régulièrement d'ailleurs, avec la
plus grande virulence, à seule fin d'apaiser l'Américain
démocrate et le Vietnamien nationaliste. La corruption
est d'abord un phénomène anodin, quotidien, banal.
Si vous vous rendez dans un ministère ou un bureau
quelconque, vous découvrirez de vastes salles poussié-
reuses et moites, où chaque employé se case comme il
peut entre des piles de dossiers qui s'écroulent de tous
côtés, des théières, des journaux, des bols de riz vides
(on a institué récemment la journée continue à cause
du couvre-feu). Ici et là, une vieille machine à écrire
où peine un secrétaire. Il faut un certain temps avant de
comprendre le sens de la curieuse activité qui se déroule
dans ces bureaux... Tout le monde se promène, reçoit
un ami, bavarde, sirote un thé glacé, va, vient, disparaît.
Sourires et murmures, nonchalance et gentillesse, mais
personne ne s'occupe de vous. Seuls, deux ou trois
préposés semblent assumer les tâches des vingt autres
employés. Quand, au bout de trois heures, vous avez
réussi à obtenir enfin le bon formulaire (en général il
tions concrètes de cette corruption célèbre, que les
dirigeants dénonçaient régulièrement d'ailleurs, avec la
plus grande virulence, à seule fin d'apaiser l'Américain
démocrate et le Vietnamien nationaliste. La corruption
est d'abord un phénomène anodin, quotidien, banal.
Si vous vous rendez dans un ministère ou un bureau
quelconque, vous découvrirez de vastes salles poussié-
reuses et moites, où chaque employé se case comme il
peut entre des piles de dossiers qui s'écroulent de tous
côtés, des théières, des journaux, des bols de riz vides
(on a institué récemment la journée continue à cause
du couvre-feu). Ici et là, une vieille machine à écrire
où peine un secrétaire. Il faut un certain temps avant de
comprendre le sens de la curieuse activité qui se déroule
dans ces bureaux... Tout le monde se promène, reçoit
un ami, bavarde, sirote un thé glacé, va, vient, disparaît.
Sourires et murmures, nonchalance et gentillesse, mais
personne ne s'occupe de vous. Seuls, deux ou trois
préposés semblent assumer les tâches des vingt autres
employés. Quand, au bout de trois heures, vous avez
réussi à obtenir enfin le bon formulaire (en général il
8b
faut revenir plusieurs fois, après un mauvais dossier,
un mauvais renseignement et quelques voyages à l'étage
du dessus, du dessous, au bureau d'en face ou d'à côté),
on vous dit qu'il vous faudra revenir le lendemain, ou le
surlendemain, car il est maintenant « trop tard ». Enfin,
après avoir hanté les bureaux, les couloirs, les coins et
recoins de l'administration vietnamienne plusieurs
heures par jour pendant plusieurs jours, vous arrachez
de haute lutte (lutte silencieuse et haute politesse), à
force de ténacité et de patience, ce que vous auriez obtenu
en une heure si vous aviez su donner à qui de droit les
piastres qu'il attendait de vous. C'est la première leçon
de corruption.
un mauvais renseignement et quelques voyages à l'étage
du dessus, du dessous, au bureau d'en face ou d'à côté),
on vous dit qu'il vous faudra revenir le lendemain, ou le
surlendemain, car il est maintenant « trop tard ». Enfin,
après avoir hanté les bureaux, les couloirs, les coins et
recoins de l'administration vietnamienne plusieurs
heures par jour pendant plusieurs jours, vous arrachez
de haute lutte (lutte silencieuse et haute politesse), à
force de ténacité et de patience, ce que vous auriez obtenu
en une heure si vous aviez su donner à qui de droit les
piastres qu'il attendait de vous. C'est la première leçon
de corruption.
A partir de là, tout est simple et compréhensible.
Les salaires des fonctionnaires sont scandaleusement bas
(un professeur est payé 300 F par mois, une infirmière
180 F), l'inflation est bien sûr galopante, et le régime
n'a pas su trouver l'aiguillon qui donnerait à ses citoyens
l'envie de travailler pour lui et pour rien. Ce qui se conçoit
assez bien.
Les salaires des fonctionnaires sont scandaleusement bas
(un professeur est payé 300 F par mois, une infirmière
180 F), l'inflation est bien sûr galopante, et le régime
n'a pas su trouver l'aiguillon qui donnerait à ses citoyens
l'envie de travailler pour lui et pour rien. Ce qui se conçoit
assez bien.
La mise en coupe du pays
Bien sûr, la corruption saigonnaise n'en reste pas tou-
jours à ce niveau d'improvisation artisanale. Elle se
systématise et s'organise jusqu'au racket, au fur et à
mesure qu'on monte dans l'échelle sociale. De plus,
elle se particularise, suivant les catégories : armée, police,
commerçants, Français, Américains, Chinois ; elle se
ramifie à travers les clans, les bandes et les familles. Elle
va chercher très loin à l'étranger ses fonds et ses matières
premières. On pourrait citer mille anecdotes, toutes
plus savoureuses les unes que les autres : celle du chef
de service des douanes qui a pour tâche de vous faire
payer les taxes que vous devez sur une voiture importée :
300 96 du prix de la voiture. A moins qu'on ne trouve
des arrangements. Le directeur des douanes est un homme
accomodant, toujours prêt à prendre en considération
jours à ce niveau d'improvisation artisanale. Elle se
systématise et s'organise jusqu'au racket, au fur et à
mesure qu'on monte dans l'échelle sociale. De plus,
elle se particularise, suivant les catégories : armée, police,
commerçants, Français, Américains, Chinois ; elle se
ramifie à travers les clans, les bandes et les familles. Elle
va chercher très loin à l'étranger ses fonds et ses matières
premières. On pourrait citer mille anecdotes, toutes
plus savoureuses les unes que les autres : celle du chef
de service des douanes qui a pour tâche de vous faire
payer les taxes que vous devez sur une voiture importée :
300 96 du prix de la voiture. A moins qu'on ne trouve
des arrangements. Le directeur des douanes est un homme
accomodant, toujours prêt à prendre en considération
les cas individuels, c'est-à-dire les lourdes enveloppes
craquantes.
craquantes.
Puis le scandale éclate, on remplace un homme ou
deux, en général des boucs émissaires de deuxième zone,
jamais les « grosses légumes », et tout recommence.
deux, en général des boucs émissaires de deuxième zone,
jamais les « grosses légumes », et tout recommence.
Corruption du système et système de la corruption
Le gouvernement avait poussé la démagogie jusqu'à
menacer d'exécution tout trafiquant, et plus particulière-
ment tout militaire convaincu de trafic. (On sait que le
général Ky est à la tête d'un gros trafic d'opium, que le
général Thieu fait parfois saisir cet opium qui arrive
du Viêt-nam Nord et qui n'en est pas moins redistribué
aux revendeurs quelques jours après la saisie). L'armée
semble s'être particulièrement bien organisée pour pra-
tiquer la mise en coupe du pays. Ici, tel colonel a le mono-
pole du bois et des scieries qu'il fait exploiter par ses
hommes, à qui il redistribue une mince partie des revenus.
Là, c'est le monopole de l'eau qui est détenu par les
militaires, qui coupent ou détournent le précieux liquide
à volonté. Là, ils construisent des ensembles de maisons
à toute vitesse, avec les matériaux, les biens d'équipement
et les hommes de l'armée, puis on loue ces champignons
de béton armé, de fer forgé, de brique et de fresques
(c'est toute une nouvelle conception de l'urbanisme et
un véritable nouveau style qui sont nés de cette activité)
aux Américains de passage. Et il y en a. Ou bien encore
on met sur pied des petits bordels de campagne destinés
aux Américains. Et l'on imagine s'il est difficile de faire
marcher ce genre d'entreprise dans les jungles et les
rizières désolées et menacées : de quoi-occuper toute
une compagnie. Ou bien encore, on reste dans sa famille,
ou on ouvre un commerce, si l'on est 2e classe, avec
.l'accord de son supérieur, auquel on cède sa solde en
échange. Ce sont les gradés repus d'une afmée fantôme.
Toutes ces activités offrent plusieurs avantages à ceux qui
les pratiquent, et singulièrement celui de s'enrichir sans
aller au combat. Cet état d'esprit est tellement généralisé
que celui qui prétendrait ne pas y participer se désigne-
rait rapidement comme une victime. Seul, il subirait
toutes les tâches et tous les dangers. A quoi bon?
menacer d'exécution tout trafiquant, et plus particulière-
ment tout militaire convaincu de trafic. (On sait que le
général Ky est à la tête d'un gros trafic d'opium, que le
général Thieu fait parfois saisir cet opium qui arrive
du Viêt-nam Nord et qui n'en est pas moins redistribué
aux revendeurs quelques jours après la saisie). L'armée
semble s'être particulièrement bien organisée pour pra-
tiquer la mise en coupe du pays. Ici, tel colonel a le mono-
pole du bois et des scieries qu'il fait exploiter par ses
hommes, à qui il redistribue une mince partie des revenus.
Là, c'est le monopole de l'eau qui est détenu par les
militaires, qui coupent ou détournent le précieux liquide
à volonté. Là, ils construisent des ensembles de maisons
à toute vitesse, avec les matériaux, les biens d'équipement
et les hommes de l'armée, puis on loue ces champignons
de béton armé, de fer forgé, de brique et de fresques
(c'est toute une nouvelle conception de l'urbanisme et
un véritable nouveau style qui sont nés de cette activité)
aux Américains de passage. Et il y en a. Ou bien encore
on met sur pied des petits bordels de campagne destinés
aux Américains. Et l'on imagine s'il est difficile de faire
marcher ce genre d'entreprise dans les jungles et les
rizières désolées et menacées : de quoi-occuper toute
une compagnie. Ou bien encore, on reste dans sa famille,
ou on ouvre un commerce, si l'on est 2e classe, avec
.l'accord de son supérieur, auquel on cède sa solde en
échange. Ce sont les gradés repus d'une afmée fantôme.
Toutes ces activités offrent plusieurs avantages à ceux qui
les pratiquent, et singulièrement celui de s'enrichir sans
aller au combat. Cet état d'esprit est tellement généralisé
que celui qui prétendrait ne pas y participer se désigne-
rait rapidement comme une victime. Seul, il subirait
toutes les tâches et tous les dangers. A quoi bon?
Le gouvernement, à la suite de l'offensive du Têt, avait
déclenché une grande opération austérité et épuration,
dans l'espoir de réhausser le prestige sérieusement atteint
de son régime. Il fit donc exécuter sur la place publique
un malheureux sous-officier coupable d'avoir détourné
deux millions de piastres. Celui-ci, avant de mourir,
déclara qu'il voulait bien, étant donné la gravité de la
crise que traversait son pays, mourir pour couvrir ses
supérieurs. Toute la presse était là, on avait offert à la
démocratie sa victime expiatoire. Rien n'est changé.
déclenché une grande opération austérité et épuration,
dans l'espoir de réhausser le prestige sérieusement atteint
de son régime. Il fit donc exécuter sur la place publique
un malheureux sous-officier coupable d'avoir détourné
deux millions de piastres. Celui-ci, avant de mourir,
déclara qu'il voulait bien, étant donné la gravité de la
crise que traversait son pays, mourir pour couvrir ses
supérieurs. Toute la presse était là, on avait offert à la
démocratie sa victime expiatoire. Rien n'est changé.
Se tenir en dehors de la guerre tout en profitant est le
grand souci d'une certaine partie des Saigonnais, ceux
qui ont de l'argent. Les Américains, comme tout le
monde, changent leurs dollars au marché noir, qu'ils
ont baptisé « thé bank of India ». On s'y rend à l'heure
de l'apéritif. Quand aux Français fonctionnaires, ils sont
grand souci d'une certaine partie des Saigonnais, ceux
qui ont de l'argent. Les Américains, comme tout le
monde, changent leurs dollars au marché noir, qu'ils
ont baptisé « thé bank of India ». On s'y rend à l'heure
de l'apéritif. Quand aux Français fonctionnaires, ils sont
payés en francs et en France. Mais ils ont avec eux leur
carnet de chèques. Et c'est ainsi que contre des piastres
obtenues à un taux deux fois supérieurs au cours officiel,
on fait des chèques payables à Paris, Nantes ou Mar-
seille.
carnet de chèques. Et c'est ainsi que contre des piastres
obtenues à un taux deux fois supérieurs au cours officiel,
on fait des chèques payables à Paris, Nantes ou Mar-
seille.
Chacun fait assaut d'ingéniosité et les ressources les
plus inattendues sont utilisées pour exploiter le filon de
la « planque et du dollar ». S'il est juste de dire que la
vénalité, la corruption et le racket ont des origines très
anciennes dans la société sino-viêtnamienne, il faut
insister sur le fait que la colonisation française et l'impé-
rialisme américain ont modifié ce svstème en l'aggravant.
plus inattendues sont utilisées pour exploiter le filon de
la « planque et du dollar ». S'il est juste de dire que la
vénalité, la corruption et le racket ont des origines très
anciennes dans la société sino-viêtnamienne, il faut
insister sur le fait que la colonisation française et l'impé-
rialisme américain ont modifié ce svstème en l'aggravant.
Du fait d'une guerre de destruction, la famille, si
importante au Viêt-nam, a souvent été cassée, ou en tout
cas affaiblie dans son unité. Du groupe on a fait des unités,
des individus isolés, qui ont dû apprendre à ne compter
que sur eux seuls. En introduisant un embryon de société
de consommation (plus grand exportateur, le Japon)
dans une société artisanale et paysanne, on a plus qu'ail-
leurs brutalisé les traditions, créé des besoins faux et
proposé des moyens faciles pour les assouvir... et élargir
le marché.
importante au Viêt-nam, a souvent été cassée, ou en tout
cas affaiblie dans son unité. Du groupe on a fait des unités,
des individus isolés, qui ont dû apprendre à ne compter
que sur eux seuls. En introduisant un embryon de société
de consommation (plus grand exportateur, le Japon)
dans une société artisanale et paysanne, on a plus qu'ail-
leurs brutalisé les traditions, créé des besoins faux et
proposé des moyens faciles pour les assouvir... et élargir
le marché.
Par la généralisation du système, par cette injection
folle d'argent et de biens de consommation, on a réussi
à isoler complètement celui qui voulait se préserver de
ce nouveau mode vie qui faisait tache d'huile. Mais qui,
en dehors des paysans, peut vivre en autarcie absolue?
La résistance passive au système reste difficile.
folle d'argent et de biens de consommation, on a réussi
à isoler complètement celui qui voulait se préserver de
ce nouveau mode vie qui faisait tache d'huile. Mais qui,
en dehors des paysans, peut vivre en autarcie absolue?
La résistance passive au système reste difficile.
Cette corruption, due à la guerre, au néo-colonialisme,
à l'économie artificielle qui a été imposée (il n'y a pas en
réalité d'économie Sud vietnamienne) est devenue l'élé-
ment « moteur » du pays. On ne saurait concevoir para-
doxe plus effrayant.
à l'économie artificielle qui a été imposée (il n'y a pas en
réalité d'économie Sud vietnamienne) est devenue l'élé-
ment « moteur » du pays. On ne saurait concevoir para-
doxe plus effrayant.
Corruption du système, système de la corruption. La
machine gouvernementale continue à ronronner, malgré
la crise ouverte par le revirement américain du 31 mars.
Elle ne détient que les apparences du pouvoir. Il est évi-
dent pour tout le monde à Saigon que la phase actuelle
est transitoire, puisque les Américains et leurs adversaires
sont sur la voie d'une solution, qui interviendra dans un
mois ou dans un an.
machine gouvernementale continue à ronronner, malgré
la crise ouverte par le revirement américain du 31 mars.
Elle ne détient que les apparences du pouvoir. Il est évi-
dent pour tout le monde à Saigon que la phase actuelle
est transitoire, puisque les Américains et leurs adversaires
sont sur la voie d'une solution, qui interviendra dans un
mois ou dans un an.
Donner une bonne image du régime
Les hommes qui sont au pouvoir à Saigon se battent
sur trois fronts : contre les forces de libération, contre
les Américains qui veulent les couler dans le moule de
leur nouvelle politique, contre leurs alliés de classe, bour-
geoisie et hiérarchie militaire, qui contestent leur lea-
dership. Le moyen principal de leur lutte contre ces
deux derniers adversaires est l'intrigue.
sur trois fronts : contre les forces de libération, contre
les Américains qui veulent les couler dans le moule de
leur nouvelle politique, contre leurs alliés de classe, bour-
geoisie et hiérarchie militaire, qui contestent leur lea-
dership. Le moyen principal de leur lutte contre ces
deux derniers adversaires est l'intrigue.
Contre le FNL, le gouvernement a peu à faire : il lui
faut et il lui suffit de donner à la presse et à l'opinion
américaines l'illusion d'un régime à la fois fort, démocra-
tique et décidé à poursuivre la lutte anticommuniste. On
ne néglige rien : les ministres ne reculent devant aucune
déclaration, aussi absurde soit-elle. On instaure une vaste
campagne de mobilisation, sans autre résultat notable
faut et il lui suffit de donner à la presse et à l'opinion
américaines l'illusion d'un régime à la fois fort, démocra-
tique et décidé à poursuivre la lutte anticommuniste. On
ne néglige rien : les ministres ne reculent devant aucune
déclaration, aussi absurde soit-elle. On instaure une vaste
campagne de mobilisation, sans autre résultat notable
87
que de renchérir le prix des réformes médicales et des
faux papiers. On mobilise les étudiants, tristement
affublés de vieux uniformes français. Toutes les chaînes
de télévision participent à l'exercice. Ensuite, on ne dorme
à cette élite du savoir qu'une vieille pétoire pour 10
hommes. Il s'agit, comme disent les « conseillers »
américains, de donner une « bonne image » du régime
sud vietnamien, une image qui soit « consommable »
aux Etats-Unis. Quant au reste, la guerre, ce sont les
Américains qui, pour l'essentiel, s'en chargent — depuis
longtemps. On sait le résultat.
faux papiers. On mobilise les étudiants, tristement
affublés de vieux uniformes français. Toutes les chaînes
de télévision participent à l'exercice. Ensuite, on ne dorme
à cette élite du savoir qu'une vieille pétoire pour 10
hommes. Il s'agit, comme disent les « conseillers »
américains, de donner une « bonne image » du régime
sud vietnamien, une image qui soit « consommable »
aux Etats-Unis. Quant au reste, la guerre, ce sont les
Américains qui, pour l'essentiel, s'en chargent — depuis
longtemps. On sait le résultat.
Vis-à-vis des Américains, le général Thieu est contraint
à la souplesse. Les Etats-Unis le poussent à renforcer
son pouvoir aux dépens de Nguyen Cao Ky, mais dans
certaines limites, car ils redoutent le pouvoir d'un homme
seul qui pourrait échapper à leur contrôle. C'est la
théorie dite « de la balance » qui veut l'union entre les
différents clans. Aucun ne doit réellement l'emporter
sur l'autre. En même temps, la Maison Blanche veut
avoir les mains libres pour négocier et pouvoir contrain-
dre Saigon à accepter toute solution que Washington
estimerait satisfaisante. De là l'origine des énormes
bluffs qui se jouent actuellement à Saigon : Thieu éli-
minera-t-il Ky? Ky fera-t-il un coup d'Etat? Certains
ministres seraient prêts à négocier directement avec le
Front ? Le premier ministre Huong va-t-il démissionner ?
Toutes ces questions, et d'autres, sont, en fait, rhéto-
riques. Personne, parmi les cercles dirigeants, n'a le pou-
voir d'agir contre la volonté américaine. Mais chacun
laisse entendre qu'il le pourrait à seule fin d'obtenir
un maximum de soutien de la part des différents clans
qui constituent le commandement américain (ambassade,
état-major, service secrets, Pentagone, etc.). Le but est de
rester en place, ou de quitter sa place avec le maximum
de compensation — et avec l'espoir d'y revenir. Ces
intrigues quotidiennes à base de rumeurs, de coups de
poker, de gros fric, d'intimidation policière, de ma-
nœuvre journalistique pourraient donner lieu à de fort
longs récits dont le seul défaut serait d'être totalement
inintéressant.
à la souplesse. Les Etats-Unis le poussent à renforcer
son pouvoir aux dépens de Nguyen Cao Ky, mais dans
certaines limites, car ils redoutent le pouvoir d'un homme
seul qui pourrait échapper à leur contrôle. C'est la
théorie dite « de la balance » qui veut l'union entre les
différents clans. Aucun ne doit réellement l'emporter
sur l'autre. En même temps, la Maison Blanche veut
avoir les mains libres pour négocier et pouvoir contrain-
dre Saigon à accepter toute solution que Washington
estimerait satisfaisante. De là l'origine des énormes
bluffs qui se jouent actuellement à Saigon : Thieu éli-
minera-t-il Ky? Ky fera-t-il un coup d'Etat? Certains
ministres seraient prêts à négocier directement avec le
Front ? Le premier ministre Huong va-t-il démissionner ?
Toutes ces questions, et d'autres, sont, en fait, rhéto-
riques. Personne, parmi les cercles dirigeants, n'a le pou-
voir d'agir contre la volonté américaine. Mais chacun
laisse entendre qu'il le pourrait à seule fin d'obtenir
un maximum de soutien de la part des différents clans
qui constituent le commandement américain (ambassade,
état-major, service secrets, Pentagone, etc.). Le but est de
rester en place, ou de quitter sa place avec le maximum
de compensation — et avec l'espoir d'y revenir. Ces
intrigues quotidiennes à base de rumeurs, de coups de
poker, de gros fric, d'intimidation policière, de ma-
nœuvre journalistique pourraient donner lieu à de fort
longs récits dont le seul défaut serait d'être totalement
inintéressant.
Une complète déliquescence
Une idée émerge peut-être chez les Américains (on
soupçonne mal ici ,leur confusionnisme politique à
Saigon) : c'est que Ky est un adversaire acharné de toute
négociation et qu'il faut par conséquent lui enlever les
moyens de saboter les pourparlers sans faire de lui un
opposant réel. Plusieurs de ses lieutenants ont été récem-
ment tués ou blessés, soit au combat, soit par une roquette
américaine (accident?). Le plus fidèle pilier de son pou-
voir, Le Nguyen Khang, chef militaire de Saigon et
commandant des marines sud vietnamiens, a été relevé
de ses fonctions, et remplacé par un « fidèle » de Thieu.
Il aura fallu plusieurs mois' d'intrigue, et surtout l'ef-
frayante pression déclenchée sur Saigon par le Front.
soupçonne mal ici ,leur confusionnisme politique à
Saigon) : c'est que Ky est un adversaire acharné de toute
négociation et qu'il faut par conséquent lui enlever les
moyens de saboter les pourparlers sans faire de lui un
opposant réel. Plusieurs de ses lieutenants ont été récem-
ment tués ou blessés, soit au combat, soit par une roquette
américaine (accident?). Le plus fidèle pilier de son pou-
voir, Le Nguyen Khang, chef militaire de Saigon et
commandant des marines sud vietnamiens, a été relevé
de ses fonctions, et remplacé par un « fidèle » de Thieu.
Il aura fallu plusieurs mois' d'intrigue, et surtout l'ef-
frayante pression déclenchée sur Saigon par le Front.
Les pluies de roquettes ont clairement signihé aux Amé-
ricains que l'heure n'était plus aux jeux du sérail.
ricains que l'heure n'était plus aux jeux du sérail.
Au sein des couches pro-gouvernementales, les réac-
tions — depuis l'offensive du Têt — ont été très variées.
On sait qu'une fraction importante de la bourgeoisie
est entrée dans la lutte aux cotés du Front, en formant
l'Alliance présidée par Me Thao. Ce lut une surprise
pour beaucoup. La bourgeoisie riche se trouve tassée
en deux, et elle ne pourra jamais plus présenter un
front uni. D'autres sont partis ; ils ont réalisé leurs biens
et sont venus en France ou ailleurs rejoindre leurs comptes
en banque. D'autres, nationalistes et anti-américains,
attendent discrètement l'issue des négociations pour jouer
un rôle centriste de conciliation et d'arbitrage au sein
d'un gouvernement de coalition. Bien que leurs positions
soient parfois ambiguës, ils ne pourront désormais
participer à une solution politique qu'avec l'aval du
Front. Les Américains ont perdu là une très belle chance
de se faire avec eux des alliés, incommodes certes,
mais honnêtes et capables d'entraîner une bonne partie
de l'opinion urbaine, en particulier dans les milieux
bouddhistes. Il reste les malades de la corruption, les
trafiquants et les fous d'ambition qui veulent amasser
à tout prix et le plus longtemps possible. Ils jugent que
toute solution internationale leur réservera une place
importante et que les Américains ne les laisseront jamais
tomber; ils refusent de quitter le navire parce qu'ils
croient savoir nager.
tions — depuis l'offensive du Têt — ont été très variées.
On sait qu'une fraction importante de la bourgeoisie
est entrée dans la lutte aux cotés du Front, en formant
l'Alliance présidée par Me Thao. Ce lut une surprise
pour beaucoup. La bourgeoisie riche se trouve tassée
en deux, et elle ne pourra jamais plus présenter un
front uni. D'autres sont partis ; ils ont réalisé leurs biens
et sont venus en France ou ailleurs rejoindre leurs comptes
en banque. D'autres, nationalistes et anti-américains,
attendent discrètement l'issue des négociations pour jouer
un rôle centriste de conciliation et d'arbitrage au sein
d'un gouvernement de coalition. Bien que leurs positions
soient parfois ambiguës, ils ne pourront désormais
participer à une solution politique qu'avec l'aval du
Front. Les Américains ont perdu là une très belle chance
de se faire avec eux des alliés, incommodes certes,
mais honnêtes et capables d'entraîner une bonne partie
de l'opinion urbaine, en particulier dans les milieux
bouddhistes. Il reste les malades de la corruption, les
trafiquants et les fous d'ambition qui veulent amasser
à tout prix et le plus longtemps possible. Ils jugent que
toute solution internationale leur réservera une place
importante et que les Américains ne les laisseront jamais
tomber; ils refusent de quitter le navire parce qu'ils
croient savoir nager.
Depuis l'offensive du Têt pourtant, beaucoup de choses
ont changé. L'administration est complètement déli-
quescente; bien peu de choses fonctionnent à part la
police. Dans les ministères même, où chaque chef de
bureau est doublé d'un fonctionnaire américain, l'inef-
ficacité est à peu près totale. La machine économique
et les échanges sont plongés dans une léthargie proche
de la mort. Le pouvoir d'Etat, qui s'exerce dans des
zones peuplées mais réduites est quotidiennement ridi-
culisé par la liberté de mouvement du Front Le régime
est dans l'incapacité totale de nourrir et de reloger les
réfugiés qui se comptent par centaines de milliers à
l'intérieur même de la capitale. Les masques sont tombés.
Comme à un malade dans le coma, les Américains injec-
tent fébrilement piqûre après piqûre des doses d'argent,
de propagande, d'énergie. Le malade continue pourtant
à s'affaiblir.
ont changé. L'administration est complètement déli-
quescente; bien peu de choses fonctionnent à part la
police. Dans les ministères même, où chaque chef de
bureau est doublé d'un fonctionnaire américain, l'inef-
ficacité est à peu près totale. La machine économique
et les échanges sont plongés dans une léthargie proche
de la mort. Le pouvoir d'Etat, qui s'exerce dans des
zones peuplées mais réduites est quotidiennement ridi-
culisé par la liberté de mouvement du Front Le régime
est dans l'incapacité totale de nourrir et de reloger les
réfugiés qui se comptent par centaines de milliers à
l'intérieur même de la capitale. Les masques sont tombés.
Comme à un malade dans le coma, les Américains injec-
tent fébrilement piqûre après piqûre des doses d'argent,
de propagande, d'énergie. Le malade continue pourtant
à s'affaiblir.
Quelles sont alors les perspectives politiques du Front ?
Celles du déclenchement d'une insurrection populaire
armée qui ferait disparaître le régime fantoche. Beaucoup
de problêmes n'étaient pas encore résolus lors de la
deuxième offensive de mai. La population urbaine était
encore mal structurée politiquement. Mais les progrès
sont extrêmement rapides,
Celles du déclenchement d'une insurrection populaire
armée qui ferait disparaître le régime fantoche. Beaucoup
de problêmes n'étaient pas encore résolus lors de la
deuxième offensive de mai. La population urbaine était
encore mal structurée politiquement. Mais les progrès
sont extrêmement rapides,
II s'est engagé une sorte de course de vitesse entre les
négociations de Paris et la possibilité d'une insurrection
à Saigon. L'alternative reste ouverte. Nul ne peut, pour
le moment, écarter l'une ou l'autre de ces solutions.
négociations de Paris et la possibilité d'une insurrection
à Saigon. L'alternative reste ouverte. Nul ne peut, pour
le moment, écarter l'une ou l'autre de ces solutions.
Simon Notte
88
Voici la nouvelle carte accréditive du
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SIGNATURE PERSONNELLE OBLIGATOIRE
UF 1-309-9874-0
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Q ÉVÉNEMENT 5, rue Lamartine - Paris 9e
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J_______ J_ NOM (en majuscules! Prénnm
demande
d'admission
au dîners club
de France
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Précisez si la présente souscription
est établie dans le cadre de l'entre-
prise .... ou à titre personnel.....
est établie dans le cadre de l'entre-
prise .... ou à titre personnel.....
NOM (en majuscules)
Adresse privée
tél..
Adresse de la Banque.
Société----------------------
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.Banque.
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Adresse de la Société__
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commentateurs différents.
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07/1968;08/1968
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