Cahiers de mai
Thumbnail
Contribuer à la liaison
travailleurs - étudiants
travailleurs - étudiants
Après deux mois de travail, l'équipe des
« Cahiers de Mai » a constaté en tout cas ceci :
« Cahiers de Mai » a constaté en tout cas ceci :
1 ) Le phénomène d'effervescence révolution-
naire qui s'est produit dans la société française
en mai et en juin a été plus ample et plus pro-
fond encore que nous ne le pressentions au mo-
ment de publier le premier numéro. D'un bout à
l'autre du pays, dans toutes les branches de l'ac-
tivité économique, une proportion considérable
de travailleurs ont manifesté clairement, par des
actes, leur volonté de prendre au plus tôt leurs
affaires en mains. On a vu se lever des femmes
et des hommes qui, bien souvent, n'avaient ja-
mais parlé politique avant le mois de mai, qui
n'avaient jamais pris leur carte à un syndicat, et
proposaient soudain des solutions neuves, origi-
nales, à toutes sortes de problèmes, qu'on réglait
jusque-là sur leur dos, sans les consulter — sans
même se douter, peut-être, qu'ils pouvaient s'in-
téresser à autre chose qu'aux voitures, au tiercé
et aux vacances. Pour qu'une révolution s'an-
nonce dans un pays il ne suffit pas que le peuple
se révolte contre l'injustice sociale, les bas salai-
res, les conditions de travail humiliantes. Il faut
aussi qu'il dise soudain à la classe dominante :
« Ce n'est plus assez d'exiger de toi que tu voles
et triches un peu moins. Ce temps-là se termine.
Je ne crois plus à ta capacité de diriger le pays.
JE SAURAI MIEUX LE FAIRE QUE TOI ! ... »
C'est ce langage qui a été tenu en France aux
mois de mai et juin par des millions de travail-
leurs et d'étudiants. Et, lorsque les masses s'em-
parent d'une idée, elles ne se contentent ipas de
la peindre sur une banderole ou jd'en faire une
motion. Elles s'efforcent de la mettre en pratique.
On l'a bien vu durant deux à trois semaines ce
printemps. Chaque jour, ou presque, nous apporte
une nouvelle confirmation là-dessus.
naire qui s'est produit dans la société française
en mai et en juin a été plus ample et plus pro-
fond encore que nous ne le pressentions au mo-
ment de publier le premier numéro. D'un bout à
l'autre du pays, dans toutes les branches de l'ac-
tivité économique, une proportion considérable
de travailleurs ont manifesté clairement, par des
actes, leur volonté de prendre au plus tôt leurs
affaires en mains. On a vu se lever des femmes
et des hommes qui, bien souvent, n'avaient ja-
mais parlé politique avant le mois de mai, qui
n'avaient jamais pris leur carte à un syndicat, et
proposaient soudain des solutions neuves, origi-
nales, à toutes sortes de problèmes, qu'on réglait
jusque-là sur leur dos, sans les consulter — sans
même se douter, peut-être, qu'ils pouvaient s'in-
téresser à autre chose qu'aux voitures, au tiercé
et aux vacances. Pour qu'une révolution s'an-
nonce dans un pays il ne suffit pas que le peuple
se révolte contre l'injustice sociale, les bas salai-
res, les conditions de travail humiliantes. Il faut
aussi qu'il dise soudain à la classe dominante :
« Ce n'est plus assez d'exiger de toi que tu voles
et triches un peu moins. Ce temps-là se termine.
Je ne crois plus à ta capacité de diriger le pays.
JE SAURAI MIEUX LE FAIRE QUE TOI ! ... »
C'est ce langage qui a été tenu en France aux
mois de mai et juin par des millions de travail-
leurs et d'étudiants. Et, lorsque les masses s'em-
parent d'une idée, elles ne se contentent ipas de
la peindre sur une banderole ou jd'en faire une
motion. Elles s'efforcent de la mettre en pratique.
On l'a bien vu durant deux à trois semaines ce
printemps. Chaque jour, ou presque, nous apporte
une nouvelle confirmation là-dessus.
2) L'immense majorité dès travailleurs, y com-
pris ceux qui ont pris une part très active dans
le mouvement de Mai, ignorent presque complè-
tement ce qui passe ailleurs que dans leurs entre-
prises. Sans doute le manque de transports et
d'essence a-t-il joué un rôle dans cet isolement.
Sans doute aussi le caractère extrêmement nou-
pris ceux qui ont pris une part très active dans
le mouvement de Mai, ignorent presque complè-
tement ce qui passe ailleurs que dans leurs entre-
prises. Sans doute le manque de transports et
d'essence a-t-il joué un rôle dans cet isolement.
Sans doute aussi le caractère extrêmement nou-
veau et actif du mouvement, dans la plupart des
entreprises, a-t-il retenu de nombreux travail-
leurs sur place. On n'avait pas le temps d'aller
aux nouvelles.
entreprises, a-t-il retenu de nombreux travail-
leurs sur place. On n'avait pas le temps d'aller
aux nouvelles.
Mais la cause principale de cet isolement
paraît être une volonté délibérée, de la part des
directions syndicales, de couper ces liaisons, afin
de contrôler plus facilement un mouvement qui
les avait prises de court-, quoiqu'on prétende au-
jourd'hui, ici et là, et qui les alarmait de plus
en plus à mesure qu'il se développait. Car, dans
le meilleur des cas, une Direction qui ronronne
dans ses petits privilèges, remplie d'une haute
idée d'elle-même et coupée de la base, s'alarme
toujours de ce qui la prend de court. Elle ne
reconnaît plus « son » peuple. Elle soupçonne
« ses » militants qui, brusquement, lui tiennent
des propos insolites pour elle. Elle ne dort plus
et voit partout des manœuvres, des provocations,
des pièges.
paraît être une volonté délibérée, de la part des
directions syndicales, de couper ces liaisons, afin
de contrôler plus facilement un mouvement qui
les avait prises de court-, quoiqu'on prétende au-
jourd'hui, ici et là, et qui les alarmait de plus
en plus à mesure qu'il se développait. Car, dans
le meilleur des cas, une Direction qui ronronne
dans ses petits privilèges, remplie d'une haute
idée d'elle-même et coupée de la base, s'alarme
toujours de ce qui la prend de court. Elle ne
reconnaît plus « son » peuple. Elle soupçonne
« ses » militants qui, brusquement, lui tiennent
des propos insolites pour elle. Elle ne dort plus
et voit partout des manœuvres, des provocations,
des pièges.
En coupant les liaisons, donc, en refusant
même de donner des informations au respon-
sable d'un syndicat sur la grève dans son sec-
teur (voir, par exemple, l'article sur la grève au
Ministère de l'Equipement, « Cahiers de Mai »,
N 2), les directions syndicales ont souvent agi
à la manière des pompiers lorsque ceux-ci s'ef-
forcent de circonscrire un incendie.
même de donner des informations au respon-
sable d'un syndicat sur la grève dans son sec-
teur (voir, par exemple, l'article sur la grève au
Ministère de l'Equipement, « Cahiers de Mai »,
N 2), les directions syndicales ont souvent agi
à la manière des pompiers lorsque ceux-ci s'ef-
forcent de circonscrire un incendie.
N'a-t-il pas fallu un concours de circonstances
exceptionnel — la présence de radio-reporters à
Billancourt pour que les millions de travailleurs
en grève apprennent comment les « accords de
Grenelle » étaient accueillis chez Renault ? Sans
doute les radio-reporters qui avaient fait le dé-
placement, ou du moins leurs patrons qui les
avaient laissé intervenir sur l'antenne en direct,
s'attendaient-ils à autre chose ce matin-là ? En
tout cas on ne les a pas revu dans les usines —
ni dans les dépôts de la R.A.T.P., pour prendre
cet autre exemple. Mais il s'agit-là d'une allusion
bien entendu, qui ne concerne pas les radio-
reporters. Ce n'était pas à eux de fournir en temps
voulu, aux travailleurs de la R.A.T.P., des infor-
mations précises et exactes sur le vote pour la
exceptionnel — la présence de radio-reporters à
Billancourt pour que les millions de travailleurs
en grève apprennent comment les « accords de
Grenelle » étaient accueillis chez Renault ? Sans
doute les radio-reporters qui avaient fait le dé-
placement, ou du moins leurs patrons qui les
avaient laissé intervenir sur l'antenne en direct,
s'attendaient-ils à autre chose ce matin-là ? En
tout cas on ne les a pas revu dans les usines —
ni dans les dépôts de la R.A.T.P., pour prendre
cet autre exemple. Mais il s'agit-là d'une allusion
bien entendu, qui ne concerne pas les radio-
reporters. Ce n'était pas à eux de fournir en temps
voulu, aux travailleurs de la R.A.T.P., des infor-
mations précises et exactes sur le vote pour la
étudiants
reprise du travail dans les différents dépôts et
ateliers l
ateliers l
Quant aux liaisons dans le mouvement étu-
diant, on n'ose à peine en parler. Dans tous les
locaux universitaires, il y avait pourtant des télé-
phones en état de fonctionner. Des gens faisaient
même la queue pour appeler leurs amis aux anti-
podes. On entendait des conversations éton-
nantes : « Dis bien à tous les copains de Tokyo
que le drapeau rouge flotte sur la Sorbonne ! »
Mais il était quasiment impossible de savoir, de
façon précise, ce qui se passait à Caen ou à
Besançon. Il existait, il est vrai, de nombreux
« comités de coordination » qui, faute de coor-
donner quoique ce soit, ou si peu, allaient sans
aucun doute donner naissance sous peu à un
« comité de coordination des comités de coordi-
nation ».
diant, on n'ose à peine en parler. Dans tous les
locaux universitaires, il y avait pourtant des télé-
phones en état de fonctionner. Des gens faisaient
même la queue pour appeler leurs amis aux anti-
podes. On entendait des conversations éton-
nantes : « Dis bien à tous les copains de Tokyo
que le drapeau rouge flotte sur la Sorbonne ! »
Mais il était quasiment impossible de savoir, de
façon précise, ce qui se passait à Caen ou à
Besançon. Il existait, il est vrai, de nombreux
« comités de coordination » qui, faute de coor-
donner quoique ce soit, ou si peu, allaient sans
aucun doute donner naissance sous peu à un
« comité de coordination des comités de coordi-
nation ».
De même, pour les comités d'action. Ils n'a-
vaient — ils n'ont toujours, pour la plupart —
aucune liaison régulière entre eux, même lors-
qu'ils agissent dans un même arrondissement.
vaient — ils n'ont toujours, pour la plupart —
aucune liaison régulière entre eux, même lors-
qu'ils agissent dans un même arrondissement.
Mais tout ce désordre, tout ce bouillonnement
d'initiatives, constituent eux aussi un des aspects
de l'effervescence révolutionnaire, dans un pre-
mier temps. Lorsqu'il est possible à trois person-
nes réunies par le hasard dr fonder un «^comité »,
de tirer un premier tract, et de susciter immédia-
tement l'intérêt parmi 50 ou 100 autres person-
nes, c'est le signe que les organisations existan-
tes, qui ont pignon sur rue, ne répondent plus
dans leurs formes actuelles aux besoins nou-
veaux. Combien de fois les partis politiques, et
le parti communiste en tout premier, n'ont-ils
pas tenté de créer des comités de quartier ou
autres ! Mais il fallait bientôt que les militants
de ces partis les maintiennent artificiellement en
vie. Dans la mesure où l'on estimait plus habile
de s'adresser à la population aux noms des co-
mités fontom.es plutôt qu'au nom du parti lui-
même. Aujourd'hui, dans l'immense majorité des
comités d'action, il y a des gens qui n'ont été
mandatés par aucune organisation existante, qui
n'ont pas de passé politique avant Mai, ou bien
qui sont en rupture avec l'organisation à laquelle
ils appartiennent.
d'initiatives, constituent eux aussi un des aspects
de l'effervescence révolutionnaire, dans un pre-
mier temps. Lorsqu'il est possible à trois person-
nes réunies par le hasard dr fonder un «^comité »,
de tirer un premier tract, et de susciter immédia-
tement l'intérêt parmi 50 ou 100 autres person-
nes, c'est le signe que les organisations existan-
tes, qui ont pignon sur rue, ne répondent plus
dans leurs formes actuelles aux besoins nou-
veaux. Combien de fois les partis politiques, et
le parti communiste en tout premier, n'ont-ils
pas tenté de créer des comités de quartier ou
autres ! Mais il fallait bientôt que les militants
de ces partis les maintiennent artificiellement en
vie. Dans la mesure où l'on estimait plus habile
de s'adresser à la population aux noms des co-
mités fontom.es plutôt qu'au nom du parti lui-
même. Aujourd'hui, dans l'immense majorité des
comités d'action, il y a des gens qui n'ont été
mandatés par aucune organisation existante, qui
n'ont pas de passé politique avant Mai, ou bien
qui sont en rupture avec l'organisation à laquelle
ils appartiennent.
Cela dit, il ne s'agit sans doute pas de contem-
pler tout ce désordre, et tout ce bouillonnement,
même, avec complaisance. Mais il ne s'agit pas,
non plus, d'être outrecuidant devant ce qui naît
sous nos yeux, devant la vie, et de négliger la
pler tout ce désordre, et tout ce bouillonnement,
même, avec complaisance. Mais il ne s'agit pas,
non plus, d'être outrecuidant devant ce qui naît
sous nos yeux, devant la vie, et de négliger la
moindre indication que nous donne l'expérience
pratique des gens.
pratique des gens.
3) A la fin juillet, malgré la reprise du travail
en ordre dispersé, la défaite électorale des partis
de gauche et les congés payés, le mouvement de
Mai a des prolongements considérables dans les
entreprises.
en ordre dispersé, la défaite électorale des partis
de gauche et les congés payés, le mouvement de
Mai a des prolongements considérables dans les
entreprises.
D'abord, les travailleurs ont pris conscience de
leur force immense. Répétons-le : c'est une expé-
rience que chaque génération doit recommencer
pour elle-même. Mais lorsque cette expérience
est faite, elle soutient la volonté de la classe
ouvrière durant toute une génération. Aussi les
tentatives de minimiser le mouvement de Mai
qui ont cours en ce moment, de plusieurs côtés
à la fois, se heurteront en fin de compte à l'in-
crédulité des travailleurs. Ils ont vécu Mai et
savent qu'ils serpnt les maîtres de ce pays lors-
qu'ils le décideront. Pour beaucoup, c'est une
révélation toute récente encore. Il faut un cer-
tain temps pour s'y habituer. Mais, depuis deux
mois, un rêve nouveau, exaltant, s'empare peu
à peu de la jeunesse ouvrière. Un espoir est né.
Une possibilité inouïe se dessine à l'horizon.
Jamais on n'a marché la tête si haute.
leur force immense. Répétons-le : c'est une expé-
rience que chaque génération doit recommencer
pour elle-même. Mais lorsque cette expérience
est faite, elle soutient la volonté de la classe
ouvrière durant toute une génération. Aussi les
tentatives de minimiser le mouvement de Mai
qui ont cours en ce moment, de plusieurs côtés
à la fois, se heurteront en fin de compte à l'in-
crédulité des travailleurs. Ils ont vécu Mai et
savent qu'ils serpnt les maîtres de ce pays lors-
qu'ils le décideront. Pour beaucoup, c'est une
révélation toute récente encore. Il faut un cer-
tain temps pour s'y habituer. Mais, depuis deux
mois, un rêve nouveau, exaltant, s'empare peu
à peu de la jeunesse ouvrière. Un espoir est né.
Une possibilité inouïe se dessine à l'horizon.
Jamais on n'a marché la tête si haute.
Les chefs d'ateliers en font l'expérience tous
les jours. Pour un mot déplacé, une remarque qui
n'aurait pas même été relevée voici deux mois,
on connaît même le cas d'ateliers qui ont débrayé.
Rarement, une aussi longue grève, qui a imposé
dans la plupart des cas des pertes de salaires
importantes, n'a été suivie d'une aussi vive com-
bativité.
les jours. Pour un mot déplacé, une remarque qui
n'aurait pas même été relevée voici deux mois,
on connaît même le cas d'ateliers qui ont débrayé.
Rarement, une aussi longue grève, qui a imposé
dans la plupart des cas des pertes de salaires
importantes, n'a été suivie d'une aussi vive com-
bativité.
Les travailleurs, enfin, commencent à tirer les
leçons de Mai. Les premières concernent évidem-
ment leur organisation dans les entreprises. Par-
mi de nombreux exemples, nous avons décrit
dans le précédent numéro des « Cahiers de Mai »
l'expérience poursuivie à la C.S.F. (Issy-les-Mou-
lineaux) avec les « comités de base ». Chez
Hachette, par contre, les travailleurs ont adopté
une solution tout à fait différente (voir l'article
page 4), mais après avoir pris connaissance de
ce qui se faisait à la C.S.F., ils ont décidé de
s'inspirer d'une des innovations de leurs cama-
rades sur un point de détail. Pour être franc,
c'est notre plus grande satisfaction à ce jour.
leçons de Mai. Les premières concernent évidem-
ment leur organisation dans les entreprises. Par-
mi de nombreux exemples, nous avons décrit
dans le précédent numéro des « Cahiers de Mai »
l'expérience poursuivie à la C.S.F. (Issy-les-Mou-
lineaux) avec les « comités de base ». Chez
Hachette, par contre, les travailleurs ont adopté
une solution tout à fait différente (voir l'article
page 4), mais après avoir pris connaissance de
ce qui se faisait à la C.S.F., ils ont décidé de
s'inspirer d'une des innovations de leurs cama-
rades sur un point de détail. Pour être franc,
c'est notre plus grande satisfaction à ce jour.
Contribuer à cette indispensable liaison entre
travailleurs, entre étudiants, entretenir et ren-
forcer la liaison entre les uns et les autres —
c'est le but des « Cahiers de Mai ».
travailleurs, entre étudiants, entretenir et ren-
forcer la liaison entre les uns et les autres —
c'est le but des « Cahiers de Mai ».
IJe désire souscrire un abonnement aux « CAHIERS
DE MAI », à partir du N°
D pour six mois (10F)
D pour un an (20 F) (1 )
DE MAI », à partir du N°
D pour six mois (10F)
D pour un an (20 F) (1 )
NOM ................ Profession :...........
Adresse.......................................
2 Je désire souscrire un abonnement aux « CAHIERS
DE MAI » qui sera servi de ma part durant six mois D
un an D
DE MAI » qui sera servi de ma part durant six mois D
un an D
à M................... Profession ............
Adresse.......................................
J'effectue à ce jour le règlement de ces abonnements par
D virement postal
D chèque bancaire
D mandat poste.
D virement postal
D chèque bancaire
D mandat poste.
à Marcelle FOURNIE - 80, quai de la Râpée - PARIS-12
C.C.P. 9.703 73 PARIS
(1
7 S F
Conséquence du mouvement de Mai
Chez Hachette,
la Section Syndicale C.G.T.
est complètement réorganisée
De tous côtés on apprend que les travailleurs,
tirant la leçon du mouvement de Mai, cherchent
à s'organiser d'une manière nouvelle, plus effi-
cace. Ceux de Hachette ont transformé complè-
tement le syndicat de leur entreprise. La Fédé-
ration du Livre (C.G.T.), à laquelle appartient
leur syndicat, et la direction du trust Hachette
elle-même, ont dû s'incliner devant leur déci-
sion.
tirant la leçon du mouvement de Mai, cherchent
à s'organiser d'une manière nouvelle, plus effi-
cace. Ceux de Hachette ont transformé complè-
tement le syndicat de leur entreprise. La Fédé-
ration du Livre (C.G.T.), à laquelle appartient
leur syndicat, et la direction du trust Hachette
elle-même, ont dû s'incliner devant leur déci-
sion.
Hachette détient le quasi-monopole de la dis-
tribution en France des ouvrages imprimés, jour-
naux et périodiques — directement ou par l'en-
tremise des Nouvelles Messageries de la Presse
Parisienne (N.M.P.P.) qu'il contrôle. C'est le plus
grand trust mondial dans cette spécialité. A Pa-
ris, Hachette seul emploie 3.150 salariés répartis
entre 7 annexes. La plus importante est « Céven-
nes-Javel » où travaillent 1.100 employés et
500 cadres. On y sert les commandes des détail-
lants (libraires, papetiers, bibliothèques de gare,
etc:) de l'arrivée de la commande à l'expédition
du colis. C'est de là que la grève est partie, dès
le vendredi 17 mai, d'une façon fulgurante.
tribution en France des ouvrages imprimés, jour-
naux et périodiques — directement ou par l'en-
tremise des Nouvelles Messageries de la Presse
Parisienne (N.M.P.P.) qu'il contrôle. C'est le plus
grand trust mondial dans cette spécialité. A Pa-
ris, Hachette seul emploie 3.150 salariés répartis
entre 7 annexes. La plus importante est « Céven-
nes-Javel » où travaillent 1.100 employés et
500 cadres. On y sert les commandes des détail-
lants (libraires, papetiers, bibliothèques de gare,
etc:) de l'arrivée de la commande à l'expédition
du colis. C'est de là que la grève est partie, dès
le vendredi 17 mai, d'une façon fulgurante.
Le service du syndicat C.G.T. a réuni le per-
sonnel dans la cour, à 13 h 30, pour lui annoncer
qu'un cahier de revendications en 10 points avait
été établi et que les délégués l'avaient porté à la
direction, qui avait jusqu'à 16 heures pour en
accepter 2 points au moins :
sonnel dans la cour, à 13 h 30, pour lui annoncer
qu'un cahier de revendications en 10 points avait
été établi et que les délégués l'avaient porté à la
direction, qui avait jusqu'à 16 heures pour en
accepter 2 points au moins :
— Majoration de 25 % de tous les salaires allant
de pair avec la suppression de toutes les
primés personnelles ;
de pair avec la suppression de toutes les
primés personnelles ;
— Cinquième semaine de congés payés.
Pour être assuré de lire
le prochain numéro
le prochain numéro
abonnez-vous
dès aujourd'hui
dès aujourd'hui
Si on consulte uniquement les registres, le syn-
dicat paraissait puissant puisque plus de 30 %
des employés avaient en poche leur carte de la
C.G.T., seule Centrale représentée dans l'entre-
prise. Un point faible, pourtant : les cadres, dont
moins de 10 % sont syndiqués.
dicat paraissait puissant puisque plus de 30 %
des employés avaient en poche leur carte de la
C.G.T., seule Centrale représentée dans l'entre-
prise. Un point faible, pourtant : les cadres, dont
moins de 10 % sont syndiqués.
Pour tenter d'enrayer le mouvement, la direc-
tion accorde immédiatement la cinquième se-
maine de congés payés. Le délégué annonce la
nouvelle à 16 heures. Mais les autres revendica-
tions étant rejetées, les travailleurs réunis dans
la cour décident aussitôt la grève illimitée, avec
occupation des locaux, et le piquet de grève est
constitué.
tion accorde immédiatement la cinquième se-
maine de congés payés. Le délégué annonce la
nouvelle à 16 heures. Mais les autres revendica-
tions étant rejetées, les travailleurs réunis dans
la cour décident aussitôt la grève illimitée, avec
occupation des locaux, et le piquet de grève est
constitué.
« Oui, plus tard.....
Malgré ce début prometteur, la grève ne va
pas se dérouler de façon satisfaisante. Le manque
d'organisation intérieure est évident, le piquet
de grève pas assez nombreux. On peut même dire
que le seul effort d'organisation accompli par les
délégués consiste à établir des laissez-passer
pour le piquet de grève afin de tenir à l'écart les
étudiants qui se présentent aux portes de l'entre-
prise. Mais les travailleurs ne sont pas informés
de manière régulière de ce qui se passe aux réu-
nions successives qui ont lieu entre les délégués
et la direction de Hachette. Même ceux qui par-
ticipent au piquet de grève n'apprennent les nou-
velles que par bribes, au cours de discussions à
2 ou 3. Rien n'est jamais certain. C'est toujours
« le bruit court que... ». Et, durant les deux pre-
mières semaines de grève, aucune réunion du
personnel, ou même du piquet de grève, n'est
convoquée.
pas se dérouler de façon satisfaisante. Le manque
d'organisation intérieure est évident, le piquet
de grève pas assez nombreux. On peut même dire
que le seul effort d'organisation accompli par les
délégués consiste à établir des laissez-passer
pour le piquet de grève afin de tenir à l'écart les
étudiants qui se présentent aux portes de l'entre-
prise. Mais les travailleurs ne sont pas informés
de manière régulière de ce qui se passe aux réu-
nions successives qui ont lieu entre les délégués
et la direction de Hachette. Même ceux qui par-
ticipent au piquet de grève n'apprennent les nou-
velles que par bribes, au cours de discussions à
2 ou 3. Rien n'est jamais certain. C'est toujours
« le bruit court que... ». Et, durant les deux pre-
mières semaines de grève, aucune réunion du
personnel, ou même du piquet de grève, n'est
convoquée.
Lorsque les travailleurs qui occupent l'entre-
prise demandent aux délégués d'organiser une
réunion, on leur répond : « Oui, plus tard. On va
le faire. Attendez ». Ils commencent alors à s'in-
quiéter, à manifester leur mécontentement. Ils
sont environ 250 et, malgré la proportion relati-
vement forte de syndiqués à « Cévennes-Javel »,
plus des deux-tiers des grévistes actifs ne sont
pas syndiqués. (A la petite annexe de la rue Sta-
nislas, parmi les 12 membres du piquet de grève,
il n'y a même qu'un seul syndiqué.) Quelques-
uns d'entre eux décident alors de convoquer, de
leur propre initiative, une réunion d'information,
prise demandent aux délégués d'organiser une
réunion, on leur répond : « Oui, plus tard. On va
le faire. Attendez ». Ils commencent alors à s'in-
quiéter, à manifester leur mécontentement. Ils
sont environ 250 et, malgré la proportion relati-
vement forte de syndiqués à « Cévennes-Javel »,
plus des deux-tiers des grévistes actifs ne sont
pas syndiqués. (A la petite annexe de la rue Sta-
nislas, parmi les 12 membres du piquet de grève,
il n'y a même qu'un seul syndiqué.) Quelques-
uns d'entre eux décident alors de convoquer, de
leur propre initiative, une réunion d'information,
pour les membres du piquet de grève au moins.
Une centaine de travailleurs — dont la moitié
n'est pas syndiquée — se rassemblent ainsi, le
mardi 28 mai et discutent du sens qu'ils enten-
dent donner à la grève. Leur opinion est que le
mouvement ne peut pas être uniquement reven-
dicatif parce que, dans la société actuelle, « aug-
mentations de salaires = néant ». Le mouve-
ment, disent-ils, est aussi politique. Il met en
cause la société capitaliste elle-même.
Une centaine de travailleurs — dont la moitié
n'est pas syndiquée — se rassemblent ainsi, le
mardi 28 mai et discutent du sens qu'ils enten-
dent donner à la grève. Leur opinion est que le
mouvement ne peut pas être uniquement reven-
dicatif parce que, dans la société actuelle, « aug-
mentations de salaires = néant ». Le mouve-
ment, disent-ils, est aussi politique. Il met en
cause la société capitaliste elle-même.
Mais les délégués syndicaux commencent à
parler, de leur côté, de « savoir terminer une
grève ». C'est le week-end de la Pentecôte. Sans
consulter les travailleurs, les délégués acceptent
même que la direction de Hachette organise un
vote sur la reprise du travail, vote qui doit avoir
lieu le 4 juin.
parler, de leur côté, de « savoir terminer une
grève ». C'est le week-end de la Pentecôte. Sans
consulter les travailleurs, les délégués acceptent
même que la direction de Hachette organise un
vote sur la reprise du travail, vote qui doit avoir
lieu le 4 juin.
700 enveloppes
portées à domicile
portées à domicile
Les membres du piquet de grève décident le
boycott de ce vote patronal. Ils prennent contact
avec les étudiants du « Comité de Soutien aux
luttes du Peuple », à l'Ecole des Beaux-Arts, et
des « Comités Travailleurs-Etudiants » de Cen-
sier et du 1 5e arrondissement. Ils leur demandent
de les aider pour le boycott. Et, le 4 juin, la direc-
tion de Hachette est incapable d'organiser le vote
parce que, sous la pression des grévistes, on lui
refuse coup sur coup les salles du quartier. Seuls
les cadres votent, sans contrôle syndical, dans
une annexe, rue Christine. Et devant la porte
de « Cévennes-Javel » le représentant de la di-
rection est accueilli par « l'Internationale ». Des
habitants du quartier, des étudiants et des mem-
bres des piquets de grève de Citroën et de l'Im-
primerie Nationale sont venus soutenir les gré-
vistes de Hachette.
boycott de ce vote patronal. Ils prennent contact
avec les étudiants du « Comité de Soutien aux
luttes du Peuple », à l'Ecole des Beaux-Arts, et
des « Comités Travailleurs-Etudiants » de Cen-
sier et du 1 5e arrondissement. Ils leur demandent
de les aider pour le boycott. Et, le 4 juin, la direc-
tion de Hachette est incapable d'organiser le vote
parce que, sous la pression des grévistes, on lui
refuse coup sur coup les salles du quartier. Seuls
les cadres votent, sans contrôle syndical, dans
une annexe, rue Christine. Et devant la porte
de « Cévennes-Javel » le représentant de la di-
rection est accueilli par « l'Internationale ». Des
habitants du quartier, des étudiants et des mem-
bres des piquets de grève de Citroën et de l'Im-
primerie Nationale sont venus soutenir les gré-
vistes de Hachette.
Mais la direction demeure intransigeante. Elle
exige un nouveau vote le 7 juin. Les grévistes
tiennent une réunion, avec les étudiants, à l'in-
térieur de la Librairie Hachette et poussent les
délégués — si on ne peut pas empêcher le vote —
à recommander au moins au personnel de voter
contre la reprise du travail puisque toutes les
revendications présentées le 17 mai n'ont pas
été acceptées. One convocation est préparée, que
les étudiants vont réussir, dans la nuit du 5 au
6 juin, à porter au domicile de 700 employés, à
Paris et en banlieue. Le oersonnel de Hachette est
exige un nouveau vote le 7 juin. Les grévistes
tiennent une réunion, avec les étudiants, à l'in-
térieur de la Librairie Hachette et poussent les
délégués — si on ne peut pas empêcher le vote —
à recommander au moins au personnel de voter
contre la reprise du travail puisque toutes les
revendications présentées le 17 mai n'ont pas
été acceptées. One convocation est préparée, que
les étudiants vont réussir, dans la nuit du 5 au
6 juin, à porter au domicile de 700 employés, à
Paris et en banlieue. Le oersonnel de Hachette est
o
appelé à se réunir le lendemain 6 juin à 14 heures
devant « Cévennes-Javel ».
devant « Cévennes-Javel ».
Plus de 500 personnes répondent à l'appel et
un délégué — prenant de court ceux qui comp-
taient proposer le boycott du vote patronal —
recommande seulement aux travailleurs de voter
contre la reprise du travail.
un délégué — prenant de court ceux qui comp-
taient proposer le boycott du vote patronal —
recommande seulement aux travailleurs de voter
contre la reprise du travail.
Bref, le principe du vote est à nouveau ac-
cepté, contre l'avis de nombreux grévistes, et il
a lieu le 7 juin, à bulletins secrets, rue Christine.
La majorité des employés de « Cévennes-Javel »
se prononce pour la poursuite de la grève. Mais
les cadres, en votant massivement contre, entraî-
nent la reprise du travail, qui est effective le
10 juin.
cepté, contre l'avis de nombreux grévistes, et il
a lieu le 7 juin, à bulletins secrets, rue Christine.
La majorité des employés de « Cévennes-Javel »
se prononce pour la poursuite de la grève. Mais
les cadres, en votant massivement contre, entraî-
nent la reprise du travail, qui est effective le
10 juin.
Les grévistes avaient pourtant tenté d'engager
des poursuites, par voie de justice, afin de faire
déclarer nul le résultat de ce vote, la direction
de Hachette ayant diffusé dans la presse des
résultats partiels (ceux concernant les cadres)
avant la clôture du scrutin. Un huissier s'était
même présenté au nom des grévistes, rue Chris-
tine, le 7 juin. Mais les délégués, en acceptant
de reconnaître la validité du vote, avaient rendu
cette action difficile — à moins d'entrer en
conflit avec le syndicat.
des poursuites, par voie de justice, afin de faire
déclarer nul le résultat de ce vote, la direction
de Hachette ayant diffusé dans la presse des
résultats partiels (ceux concernant les cadres)
avant la clôture du scrutin. Un huissier s'était
même présenté au nom des grévistes, rue Chris-
tine, le 7 juin. Mais les délégués, en acceptant
de reconnaître la validité du vote, avaient rendu
cette action difficile — à moins d'entrer en
conflit avec le syndicat.
Les travailleurs de Hachette ont obtenu une
cinquième semaine de congés payés; la reconnais-
sance de la Section Syndicale avec 2 heures par
mois sur le temps de travail pour les réunions ;
la suppression de l'abattement d'âge pour les
jeunes — qui sont employés en grand nombre
par le trust ; la révision des classifications avant
la fin de l'année et un nouveau barème des sa-
laires ; le paiement intégral, en une seule fois,
des heures de grève.
cinquième semaine de congés payés; la reconnais-
sance de la Section Syndicale avec 2 heures par
mois sur le temps de travail pour les réunions ;
la suppression de l'abattement d'âge pour les
jeunes — qui sont employés en grand nombre
par le trust ; la révision des classifications avant
la fin de l'année et un nouveau barème des sa-
laires ; le paiement intégral, en une seule fois,
des heures de grève.
Comment transformer
le syndicat ?
le syndicat ?
Mais ils ont le sentiment que leur volonté de
lutte a été sous-estimée par leurs délégués et que
le mouvement a été mal organisé, mal dirigé et
mal orienté. Parmi les travailleurs qui ont parti-
cipé au piquet de grève se constitue alors un
Comité d'Action, en vue de poursuivre le mouve-
ment. Une première réunion se tient le 15 juin
en présence de 120 travailleurs, dont la moitié
n'est pas syndiquée. La discussion porte essen-
tiellement sur le mauvais fonctionnement du syn-
lutte a été sous-estimée par leurs délégués et que
le mouvement a été mal organisé, mal dirigé et
mal orienté. Parmi les travailleurs qui ont parti-
cipé au piquet de grève se constitue alors un
Comité d'Action, en vue de poursuivre le mouve-
ment. Une première réunion se tient le 15 juin
en présence de 120 travailleurs, dont la moitié
n'est pas syndiquée. La discussion porte essen-
tiellement sur le mauvais fonctionnement du syn-
SOI.TEiMÎZ '
u-:s i;uiivisTi<:s i>i<:
VOTHI-: OIJAltTlKK
M
DE REP1ATRA6!
LA STRUCTURE
EST POURRIE
EST POURRIE
dicat. On reproche aux délégués de prendre des
décisions sans consulter réellement les travail-
leurs. On exige de pouvoir contrôler à tout mo-
ment leur activité. Mais comment le Comité
d'Action pourra-t-il contrôler le syndicat afin
qu'il exprime plus fidèlement la volonté
des travailleurs ? Si on reste à l'extérieur
du syndicat, celui-ci ne risque-t-il pas de conti-
nuer à agir de son côté ? Telles sont les ques-
tions.
décisions sans consulter réellement les travail-
leurs. On exige de pouvoir contrôler à tout mo-
ment leur activité. Mais comment le Comité
d'Action pourra-t-il contrôler le syndicat afin
qu'il exprime plus fidèlement la volonté
des travailleurs ? Si on reste à l'extérieur
du syndicat, celui-ci ne risque-t-il pas de conti-
nuer à agir de son côté ? Telles sont les ques-
tions.
Un délégué propose une solution, qui est fina-
lement acceptée : les membres non syndiqués
du Comité d'Action adhèrent au syndicat et
l'Assemblée Générale des syndiqués élit une com-
mission executive qui devient le nouvel organisme
de direction du syndicat.
lement acceptée : les membres non syndiqués
du Comité d'Action adhèrent au syndicat et
l'Assemblée Générale des syndiqués élit une com-
mission executive qui devient le nouvel organisme
de direction du syndicat.
On compte alors 157 adhésions nouvelles au
syndicat et la Section Syndicale Hachette de la
C.G.T. publie le 18 juin — sous le titre « Bilan
et perspectives » — un tract où il est dit notam-
ment :
syndicat et la Section Syndicale Hachette de la
C.G.T. publie le 18 juin — sous le titre « Bilan
et perspectives » — un tract où il est dit notam-
ment :
« ...Nous avons décidé de restructurer notre section
syndicale et de faire participer de façon positive tous
les syndiqués à l'action sociale et revendicative par la
CREATION D'UNE COMMISSION EXECUTIVE qui sera
élue par l'ensemble des syndiqués. Cette commission
représentative de la volonté des syndiqués aura pour rôle
essentiel DE DEFINIR L'ACTION A VENIR, DE DESIGNER
NOS CANDIDATS AUX ELECTIONS PROFESSIONNELLES
(Délégués du Personnel et Délégués au Comité) ET DE
CONTROLER L'ACTIVITE DE NOS ELUS AU SEIN DE CES
ORGANISMES. Enfin, cette Commission Executive elle-
même RENDRA COMPTE DE SON MANDAT A L'AS-
SEMBLEE GENERALE DES SYNDIQUES.
syndicale et de faire participer de façon positive tous
les syndiqués à l'action sociale et revendicative par la
CREATION D'UNE COMMISSION EXECUTIVE qui sera
élue par l'ensemble des syndiqués. Cette commission
représentative de la volonté des syndiqués aura pour rôle
essentiel DE DEFINIR L'ACTION A VENIR, DE DESIGNER
NOS CANDIDATS AUX ELECTIONS PROFESSIONNELLES
(Délégués du Personnel et Délégués au Comité) ET DE
CONTROLER L'ACTIVITE DE NOS ELUS AU SEIN DE CES
ORGANISMES. Enfin, cette Commission Executive elle-
même RENDRA COMPTE DE SON MANDAT A L'AS-
SEMBLEE GENERALE DES SYNDIQUES.
« Ces nouvelles structures doivent permettre de for-
ger un outil plus efficace, plus démocratique aussi, pour
la conduite de nos luttes syndicales.
ger un outil plus efficace, plus démocratique aussi, pour
la conduite de nos luttes syndicales.
« Elles ont été rendues possibles par la reconnaissance
de la Section Syndicale, mais surtout par la très large
conscience qu'a permis, dans l'esprit des Travailleurs,
le mouvement déclenché le 17 mai.
de la Section Syndicale, mais surtout par la très large
conscience qu'a permis, dans l'esprit des Travailleurs,
le mouvement déclenché le 17 mai.
« Nous vous convions tous à participer à notre action.
«CE N'EST QU'UN DEBUT...»
«CE N'EST QU'UN DEBUT...»
L'Assemblée Générale des syndiqués de
Hachette se réunit donc le 25 juin, salle du Pa-
tronage Laïc, avenue Félix-Faure, en présence de
Loisil, secrétaire du syndicat du Livre parisien,
qui commence un long, très long exposé sur les
« accords de Grenelle ». Les travailleurs n'écou-
tent que d'une oreille distraite. Ils se sont rassem-
blés dans un but précis : l'élection de leur Com-
mission Executive. Mais l'heure tourne et l'ora-
teur parle toujours. Aura-t-on le temps de pro-
céder à l'élection ? Cherche-t-on, à la direction
Hachette se réunit donc le 25 juin, salle du Pa-
tronage Laïc, avenue Félix-Faure, en présence de
Loisil, secrétaire du syndicat du Livre parisien,
qui commence un long, très long exposé sur les
« accords de Grenelle ». Les travailleurs n'écou-
tent que d'une oreille distraite. Ils se sont rassem-
blés dans un but précis : l'élection de leur Com-
mission Executive. Mais l'heure tourne et l'ora-
teur parle toujours. Aura-t-on le temps de pro-
céder à l'élection ? Cherche-t-on, à la direction
fédérale, à « noyer le poisson » ? Un travailleur
doit rappeler à l'orateur le but de la réunion, qui
est de critiquer l'action du syndicat durant le
mouvement de Mai et d'y remédier sans plus
tarder. Ces paroles sont accueillies par une véri-
table ovation, la première de la soirée, et l'on
passe enfin à l'élection de la Commission Exe-
cutive.
doit rappeler à l'orateur le but de la réunion, qui
est de critiquer l'action du syndicat durant le
mouvement de Mai et d'y remédier sans plus
tarder. Ces paroles sont accueillies par une véri-
table ovation, la première de la soirée, et l'on
passe enfin à l'élection de la Commission Exe-
cutive.
Elle comprend 37 membres (24 pour « Céven-
nes-Javel » et respectivement 9,3 et 1 pour les
annexes « Boulevard », « Stanislas » et « Réau-
mur») et 26 de ses membres appartiennent à
l'ancien Comité d'Action. Les jours suivants, mal-
gré l'approche des congés payés, elle se met au
travail afin d'animer dans l'entreprise un syndi-
calisme militant qui ne se bornera plus, comme
dans le passé récent, à vendre « V.O. » et « An-
toinette », le magazine féminin de la C.G.T., et
à distribuer les timbres de cotisation. Il s'agit
que les travailleurs se forment eux-mêmes par
l'action et la discussion collectives et se préparent
ainsi pour les luttes imminentes. Pour le cahier
de revendications, par exemple, le rôle de la
Commission Executive consistera seulement à
préparer un projet qui devra être soumis aux tra-
vailleurs en Assemblée Générale. De même, le
petit bureau formé au sein de la Commission exe-
cutive, et qui comprend un représentant de cha-
que annexe, n'est qu'un organe de liaison per-
manent.
nes-Javel » et respectivement 9,3 et 1 pour les
annexes « Boulevard », « Stanislas » et « Réau-
mur») et 26 de ses membres appartiennent à
l'ancien Comité d'Action. Les jours suivants, mal-
gré l'approche des congés payés, elle se met au
travail afin d'animer dans l'entreprise un syndi-
calisme militant qui ne se bornera plus, comme
dans le passé récent, à vendre « V.O. » et « An-
toinette », le magazine féminin de la C.G.T., et
à distribuer les timbres de cotisation. Il s'agit
que les travailleurs se forment eux-mêmes par
l'action et la discussion collectives et se préparent
ainsi pour les luttes imminentes. Pour le cahier
de revendications, par exemple, le rôle de la
Commission Executive consistera seulement à
préparer un projet qui devra être soumis aux tra-
vailleurs en Assemblée Générale. De même, le
petit bureau formé au sein de la Commission exe-
cutive, et qui comprend un représentant de cha-
que annexe, n'est qu'un organe de liaison per-
manent.
D'autre part, il a été décidé par l'Assemblée
.Générale du 25 juin que toutes les directives et
tous les tracts émanant de la direction fédérale
devront recevoir l'approbation de la Commission
Executive avant d'être appliqués ou diffusés
dans l'entreprise.
.Générale du 25 juin que toutes les directives et
tous les tracts émanant de la direction fédérale
devront recevoir l'approbation de la Commission
Executive avant d'être appliqués ou diffusés
dans l'entreprise.
La direction de Hachette, de son côté, n'a pu
que reconnaître officiellement l'existence de la
Commission Executive et les travailleurs ont ob-
tenu qu'un des membres dispose de 15 heures
par mois pour son travail syndical et participe
aux réunions avec la Direction. Il est tenu de
faire un rapport immédiat devant la Commission
Executive et il est révocable à tout moment. A la
date du 25 juillet, la Commission Executive de la
Section Syndicale Hachette, élue voici un mois,
s'est réunie deux fois déjà. Elles s'efforcent d'a-
bord de faire aboutir des revendications non sa-
tisfaites à la suite de la grève (notamment
concernant le contrôle des promotions). Mais
elle prépare pour la rentrée des revendications
portant sur des points jamais abordés jusque-là
dans l'entreprise : l'autoritarisme de certains
chefs ; l'exigence de se faire communiquer par
la Direction certains de ses « secrets » ds gestion.
Elle prépare aussi la liste des candidats aux élec-
tions de délégués du personnel et du comité
d'entreprise, la révision complète des classifica-
tions professionnelles — et, ayant pris connais-
sance de ce qui se fait., depuis Mai, à la C.S.F.,
elle compte remettre dorénavant les cahiers de
revendication de chaque service non plus à la
Direction mais directement entre les mains des
chefs de service concernés. Bref, la Commission
Executive s'est mise au travail d'arrache-pied.
que reconnaître officiellement l'existence de la
Commission Executive et les travailleurs ont ob-
tenu qu'un des membres dispose de 15 heures
par mois pour son travail syndical et participe
aux réunions avec la Direction. Il est tenu de
faire un rapport immédiat devant la Commission
Executive et il est révocable à tout moment. A la
date du 25 juillet, la Commission Executive de la
Section Syndicale Hachette, élue voici un mois,
s'est réunie deux fois déjà. Elles s'efforcent d'a-
bord de faire aboutir des revendications non sa-
tisfaites à la suite de la grève (notamment
concernant le contrôle des promotions). Mais
elle prépare pour la rentrée des revendications
portant sur des points jamais abordés jusque-là
dans l'entreprise : l'autoritarisme de certains
chefs ; l'exigence de se faire communiquer par
la Direction certains de ses « secrets » ds gestion.
Elle prépare aussi la liste des candidats aux élec-
tions de délégués du personnel et du comité
d'entreprise, la révision complète des classifica-
tions professionnelles — et, ayant pris connais-
sance de ce qui se fait., depuis Mai, à la C.S.F.,
elle compte remettre dorénavant les cahiers de
revendication de chaque service non plus à la
Direction mais directement entre les mains des
chefs de service concernés. Bref, la Commission
Executive s'est mise au travail d'arrache-pied.
Enfin, l'ancien Comité d'Action a donné nais-
sance à un Cercle d'Etudes où les travailleurs
de Hachette, dont beaucoup se sont éveillés à la
vie politique en Mai, ont l'intention d'approfon-
dir leur action dans l'esprit de la lutte des classes.
sance à un Cercle d'Etudes où les travailleurs
de Hachette, dont beaucoup se sont éveillés à la
vie politique en Mai, ont l'intention d'approfon-
dir leur action dans l'esprit de la lutte des classes.
LES ÉTUDIANTS
A FLINS
A FLINS
nuit du 6 au 7 Juin
et h matinée du 7
et h matinée du 7
La présence d'étudiants venus de Paris devant
l'usine Renault de Flins, au petit matin du 7 juin,
a donné lieu à toute une littérature (dans le
genre roman policier et d'espionnage). On mon-
tre, d'un côté, des ouvriers tranquilles, discipli-
nés, conduits par des dirigeants sages, ayant le
sens des responsabilités, et de l'autre des per-
sonnages louches, bizarres, qui rappliquent brus-
quement de tous les côtés, contre la volonté des
ouvriers, et qui cherchent à tout prix à semer
le trouble, obéissant à de mystérieux mots d'ordre.
l'usine Renault de Flins, au petit matin du 7 juin,
a donné lieu à toute une littérature (dans le
genre roman policier et d'espionnage). On mon-
tre, d'un côté, des ouvriers tranquilles, discipli-
nés, conduits par des dirigeants sages, ayant le
sens des responsabilités, et de l'autre des per-
sonnages louches, bizarres, qui rappliquent brus-
quement de tous les côtés, contre la volonté des
ouvriers, et qui cherchent à tout prix à semer
le trouble, obéissant à de mystérieux mots d'ordre.
Il est donc intéressant de savoir pourquoi et
comment des étudiants se sont effectivement
trouvés devant l'usine de Flins le 7 juin, dès
5 heures du matin. Qui les avait appelés ? Et
que! rôle ont-ils joué ?
comment des étudiants se sont effectivement
trouvés devant l'usine de Flins le 7 juin, dès
5 heures du matin. Qui les avait appelés ? Et
que! rôle ont-ils joué ?
Comme on sait, l'usine Renault de Flins est
située en plein champ, entre Mantes (12 km) et
Les Mureaux (5 km) dans le département de
la Seine-et-Oise. D'un côté passe la Seine, de
l'autre l'autoroute et la ligne de chemin de fer.
On y produit des voitures (R4, R 8, RIO, R 16)
avec des moteurs qui viennent de l'usine de
Cléon, située à 19 km au sud de Rouen. 10.500
ouvriers travaillent à Flins. qui habitent dissé-
minés dans toutes les localités de la région. La
plupart arrivent et repartent par la gare des
Mureaux, où fonctionne un service de cars de
la Régie Renault. Quelques-uns possèdent un
véhicule personnel et arrivent directement. On
las appelle — on les appelait du moins, avant
mai et juin — les « betteraviers » parce qu'il y
a des betteraves autour de l'usine et, surtout,
que de nombreux ouvriers viennent de province,
et même de la campagne sans transition. Ce sont
des ouvriers de fraîche date. Il y a aussi de nom-
breux étrangers parmi eux : Espagnols, Portu-
gais, Yougoslaves. Des Noirs égalements. Avant
la grève, 7 % seulement des ouvriers de Flins
étaient syndiqués à la C.G.T. ou à la C.F.D.T.
(aujourd'hui 15 % environ). Mais cela n'a pas
empêché l'usine de partir en grève dès le
17 mai, Is lendemain du début de la grève et
de l'occupation de Cléon.
située en plein champ, entre Mantes (12 km) et
Les Mureaux (5 km) dans le département de
la Seine-et-Oise. D'un côté passe la Seine, de
l'autre l'autoroute et la ligne de chemin de fer.
On y produit des voitures (R4, R 8, RIO, R 16)
avec des moteurs qui viennent de l'usine de
Cléon, située à 19 km au sud de Rouen. 10.500
ouvriers travaillent à Flins. qui habitent dissé-
minés dans toutes les localités de la région. La
plupart arrivent et repartent par la gare des
Mureaux, où fonctionne un service de cars de
la Régie Renault. Quelques-uns possèdent un
véhicule personnel et arrivent directement. On
las appelle — on les appelait du moins, avant
mai et juin — les « betteraviers » parce qu'il y
a des betteraves autour de l'usine et, surtout,
que de nombreux ouvriers viennent de province,
et même de la campagne sans transition. Ce sont
des ouvriers de fraîche date. Il y a aussi de nom-
breux étrangers parmi eux : Espagnols, Portu-
gais, Yougoslaves. Des Noirs égalements. Avant
la grève, 7 % seulement des ouvriers de Flins
étaient syndiqués à la C.G.T. ou à la C.F.D.T.
(aujourd'hui 15 % environ). Mais cela n'a pas
empêché l'usine de partir en grève dès le
17 mai, Is lendemain du début de la grève et
de l'occupation de Cléon.
La situation locale,
jeudi après-midi
jeudi après-midi
Trois semaines plus tard., le jeudi 6 juin, à
3 heures du matin, un millier de C.R.S. et de
gendarmes mobiles encerclent l'usine et renver-
sent avec des half-tracks les barrières que le
piquet de grève dresse la nuit, et les braseros
rnjtour desquels il s.e réchauffe. Le piquet de
grève est chassé de l'usine. Puis, dans la matinée,
la direction annonce que — la « liberté du tra-
vail » étant rétablie à Flins par les forces de
l'ordre — les ouvriers sont convoqués pour re-
prendre le travail le lendemain vendredi 7 juin.
3 heures du matin, un millier de C.R.S. et de
gendarmes mobiles encerclent l'usine et renver-
sent avec des half-tracks les barrières que le
piquet de grève dresse la nuit, et les braseros
rnjtour desquels il s.e réchauffe. Le piquet de
grève est chassé de l'usine. Puis, dans la matinée,
la direction annonce que — la « liberté du tra-
vail » étant rétablie à Flins par les forces de
l'ordre — les ouvriers sont convoqués pour re-
prendre le travail le lendemain vendredi 7 juin.
Dès que la nouvelle de l'occupation de Flins
est connue — c'est-à-dire, dans la matinée du
6 juin —, de nombreux ouvriers se rassemblent
autour de l'usine et, dans l'après-midi, une mani-
festation parcourt les localités avoisinantes, ap-
pelant à la poursuite de la grève. De leur côté,
les organisations d'étudiants et d'enseignants
qui participent au mouvement de Mai lancent
l'idée d'une « mqrche sur Flins » afin de soute-
nir les ouvriers en lutte.
est connue — c'est-à-dire, dans la matinée du
6 juin —, de nombreux ouvriers se rassemblent
autour de l'usine et, dans l'après-midi, une mani-
festation parcourt les localités avoisinantes, ap-
pelant à la poursuite de la grève. De leur côté,
les organisations d'étudiants et d'enseignants
qui participent au mouvement de Mai lancent
l'idée d'une « mqrche sur Flins » afin de soute-
nir les ouvriers en lutte.
Mais un communiqué, signé tout au moins par
le Syndicat C.G.T. Renault, déclare précipitam-
ment :
le Syndicat C.G.T. Renault, déclare précipitam-
ment :
Le pouvoir gaulliste et M. Dreyfus ont subi un
échec cinglant en tentant de faire reprendre le travail
par la force dans l'usine de Flins. La masse des
travailleurs poursuit la grève dans toutes les usines
Renault. Nous exigeons le départ immédiat des troupes
policières de Flins.
échec cinglant en tentant de faire reprendre le travail
par la force dans l'usine de Flins. La masse des
travailleurs poursuit la grève dans toutes les usines
Renault. Nous exigeons le départ immédiat des troupes
policières de Flins.
D'autre part, nous apprenons que les dirigeants des
syndicats d'étudiants et d'enseignants ont décidé
d'appeler à une marche sur Flins. Nous tenons à pré-
ciser notre complet désaccord sur une telle initiative
qui risque de favoriser une provocation policière et
nuire à la grève des travailleurs de chez Renault.
syndicats d'étudiants et d'enseignants ont décidé
d'appeler à une marche sur Flins. Nous tenons à pré-
ciser notre complet désaccord sur une telle initiative
qui risque de favoriser une provocation policière et
nuire à la grève des travailleurs de chez Renault.
Les travailleurs de Flins, comme ceux de Billan-
court, ont fait la démonstration qu'ils étaient capables
de régler leurs problèmes avec les formes décidées
par les travailleurs et dans leurs intérêts.
court, ont fait la démonstration qu'ils étaient capables
de régler leurs problèmes avec les formes décidées
par les travailleurs et dans leurs intérêts.
15 f<^L^>^\
tnn..:i _„ \; sJ^HBMWHiËM^
Garqahville ll.>m,«i<
- %r4? 14
j^M^^M*^
*- o
Ce communiqué, en date du 6 juin, annonce
donc 24 heures à l'avance que la tentative de
faire reprendre le travail par la force à Flins a
été un échec puisque la bataille pour ou contre
la reprise ne va se dérouler en réalité que le
1 juin au matin. Il s'agit sans doute de dissua-
der les étudiants de se rendre à Flins en leur
faisant croire que tout va bien et que, de toutes
façons, ils arriveraient après la bataille.
donc 24 heures à l'avance que la tentative de
faire reprendre le travail par la force à Flins a
été un échec puisque la bataille pour ou contre
la reprise ne va se dérouler en réalité que le
1 juin au matin. Il s'agit sans doute de dissua-
der les étudiants de se rendre à Flins en leur
faisant croire que tout va bien et que, de toutes
façons, ils arriveraient après la bataille.
Mais les ouvriers de Flins eux-mêmes — ceux
qui veulent continuer la lutte — commencent à
s'inquiéter devant les décisions de la C.G.T. et
de la C.F.D.T. sur le plan local. La seule riposte
à l'occupation de l'usine, annoncée par les res-
ponsables syndicaux, consiste à convoquer un
meeting aux Mureaux (soit à 5 km de l'usine)
pour le lendemain 1 juin à 8 heures du matin.
Or, tous les ouvriers savent bien que la première
équipe (1.500) prend le travail à 5 h 30 et la
seconde (6.000) à 7 h 30. A qui s'adresse donc
l'appel pour le meeting ? Privés de consignes
claires, ne sachant plus si la grève se poursuit
ou non, de nombreux ouvriers ne vont-ils pas
monter dans les cars et reprendre le travail alors
que la direction multiplie les pressions sur eux,
notamment sur les étrangers? Et à 8 heures, lors-
que commencera le meeting, en présence d'une
minorité d'ouvriers, la grève ne sera-t-elle pas
déjà terminée, dans la réalité, et les ouvriers
rassemblés aux Mureaux placés devant le fait
accompli ?
qui veulent continuer la lutte — commencent à
s'inquiéter devant les décisions de la C.G.T. et
de la C.F.D.T. sur le plan local. La seule riposte
à l'occupation de l'usine, annoncée par les res-
ponsables syndicaux, consiste à convoquer un
meeting aux Mureaux (soit à 5 km de l'usine)
pour le lendemain 1 juin à 8 heures du matin.
Or, tous les ouvriers savent bien que la première
équipe (1.500) prend le travail à 5 h 30 et la
seconde (6.000) à 7 h 30. A qui s'adresse donc
l'appel pour le meeting ? Privés de consignes
claires, ne sachant plus si la grève se poursuit
ou non, de nombreux ouvriers ne vont-ils pas
monter dans les cars et reprendre le travail alors
que la direction multiplie les pressions sur eux,
notamment sur les étrangers? Et à 8 heures, lors-
que commencera le meeting, en présence d'une
minorité d'ouvriers, la grève ne sera-t-elle pas
déjà terminée, dans la réalité, et les ouvriers
rassemblés aux Mureaux placés devant le fait
accompli ?
Les ouvriers à
l'école des Beaux-Arts
A la fin de la journée du jeudi 6 juin, quelques
ouvriers de Flins arrivent à l'école des Beaux-
Arts où se trouvent repliés, après l'occupation
par la police de divers locaux universitaires, le
Comité de Coordination des Comités d'Action, le
Comité de Soutien aux luttes du Peuple, le Mou-
vement du 22 Mars et, bien entendu, l'Atelier
Populaire dont les affiches sont connues et très
ouvriers de Flins arrivent à l'école des Beaux-
Arts où se trouvent repliés, après l'occupation
par la police de divers locaux universitaires, le
Comité de Coordination des Comités d'Action, le
Comité de Soutien aux luttes du Peuple, le Mou-
vement du 22 Mars et, bien entendu, l'Atelier
Populaire dont les affiches sont connues et très
appréciées par de nombreux travailleurs. Ils ex-
pliquent aux étudiants la situation — notam-
ment la question des heures de prise du travail
par les équipes et la topographie des lieux — et
ils demandent de l'aide.
pliquent aux étudiants la situation — notam-
ment la question des heures de prise du travail
par les équipes et la topographie des lieux — et
ils demandent de l'aide.
Leur raisonnement est logique : le meeting
intersyndical des Mureaux à 8 heures n'a aucun
sens — à moins qu'il ne soit même une tentative
de torpillage de la grève. Ce qu'il faut, c'est re-
constituer le piquet de grève devant l'usine, dès
5 heures du matin, et appeler la population et
les étudiants à se joindre au piquet de grève. En
premier lieu, donc, les étudiants peuvent-ils tirer
un tract ? .
intersyndical des Mureaux à 8 heures n'a aucun
sens — à moins qu'il ne soit même une tentative
de torpillage de la grève. Ce qu'il faut, c'est re-
constituer le piquet de grève devant l'usine, dès
5 heures du matin, et appeler la population et
les étudiants à se joindre au piquet de grève. En
premier lieu, donc, les étudiants peuvent-ils tirer
un tract ? .
Mais les étudiants ne veulent pas se lancer
tête baissée dans l'action sans connaître la situa-
tion sur place. Ils désignent un des leurs pour
se rendre aux Mureaux. Celui-ci part aussitôt
Hans la voiture d'un jeune ouvrier.
tête baissée dans l'action sans connaître la situa-
tion sur place. Ils désignent un des leurs pour
se rendre aux Mureaux. Celui-ci part aussitôt
Hans la voiture d'un jeune ouvrier.
« Durant le trajet., raconte cet étudiant, il
paraissait très tendu et me questionnait surtout
sur les grenades, mais avec une certaine gêne,
sans appuyer. Il disait : « C'est comment ?
Qu'est-ce que ça fait au juste ? Ils les tirent de
loin, ou quoi ?... » Toutes ces questions sous-
entendaient que nous, les étudiants, on connais-
sait déjà, on avait déjà l'expérience. Il disait
aussi : « Demain, ce sera un grand jour ! Ça va
chauffer !... » Mais il était encore sous le coup
d° l'arrivée des flics. Il ne semblait pas avoir
peur. Simplement ému devant quelque chose de
nouveau. Il m'a aussi parlé de sa femme. C'est
à cause d'elle qu'il devait rentrer avant les
autres. Elle l'attendait. Elle n'était pas contente
de le voir mêlé à tout ça. « Pourtant, je lui ex-
pliqua que c'est pour défendre notre biftek !
Moiç elle ne veut rien entendre... ». Il m'a donc
déposé devant la gare des Mureaux, où on nous
attendait, et il est rentré chez lui à cause de sa
femme. Mais le lendemain, je l'ai retrouvé devant
l'usine, bien peigné et rasé, dès 5 heures du
matin
paraissait très tendu et me questionnait surtout
sur les grenades, mais avec une certaine gêne,
sans appuyer. Il disait : « C'est comment ?
Qu'est-ce que ça fait au juste ? Ils les tirent de
loin, ou quoi ?... » Toutes ces questions sous-
entendaient que nous, les étudiants, on connais-
sait déjà, on avait déjà l'expérience. Il disait
aussi : « Demain, ce sera un grand jour ! Ça va
chauffer !... » Mais il était encore sous le coup
d° l'arrivée des flics. Il ne semblait pas avoir
peur. Simplement ému devant quelque chose de
nouveau. Il m'a aussi parlé de sa femme. C'est
à cause d'elle qu'il devait rentrer avant les
autres. Elle l'attendait. Elle n'était pas contente
de le voir mêlé à tout ça. « Pourtant, je lui ex-
pliqua que c'est pour défendre notre biftek !
Moiç elle ne veut rien entendre... ». Il m'a donc
déposé devant la gare des Mureaux, où on nous
attendait, et il est rentré chez lui à cause de sa
femme. Mais le lendemain, je l'ai retrouvé devant
l'usine, bien peigné et rasé, dès 5 heures du
matin
« A la gare des Mureaux, j'ai trouvé une cin-
quantaine de jeunes ouvriers. Blouson, cheveux
quantaine de jeunes ouvriers. Blouson, cheveux
8
longs, foulard autour du cou et insigne de la
C.G.T. à la boutonnière. Ils m'ont confirmé leur
intention de faire un meeting devant la porte de
l'usine avant l'arrivée de la première équipe. Ils
voulaient un tract, tout de suite. « Très simple,
disaient-ils. Pas de baratin ». On a donc rédigé
le tract sans perdre de temps et on est allé télé-
phoner le texte à l'Ecole des Beaux-Arts, d'un
petit café tout à côté. Il y avait plein de gens qui
discutaient politique, tous très excités. J'ai un
peu hésité parce que le téléphone était dans la
salle. Et puis, je me suis décidé, tant pis ! Le
patron et les clients ont tout entendu. Ça a duré
assez longtemps... et lorsque j'ai demandé le prix
do la communication pour Paris, le patron a re-
gardé son compteur, il hésitait. Finalement, il a
dit 50 centimes, histoire de me faire quand même
payer quelque chose, et il a ajouté, avec fierté :
« II a servi, mon téléphone !... »
C.G.T. à la boutonnière. Ils m'ont confirmé leur
intention de faire un meeting devant la porte de
l'usine avant l'arrivée de la première équipe. Ils
voulaient un tract, tout de suite. « Très simple,
disaient-ils. Pas de baratin ». On a donc rédigé
le tract sans perdre de temps et on est allé télé-
phoner le texte à l'Ecole des Beaux-Arts, d'un
petit café tout à côté. Il y avait plein de gens qui
discutaient politique, tous très excités. J'ai un
peu hésité parce que le téléphone était dans la
salle. Et puis, je me suis décidé, tant pis ! Le
patron et les clients ont tout entendu. Ça a duré
assez longtemps... et lorsque j'ai demandé le prix
do la communication pour Paris, le patron a re-
gardé son compteur, il hésitait. Finalement, il a
dit 50 centimes, histoire de me faire quand même
payer quelque chose, et il a ajouté, avec fierté :
« II a servi, mon téléphone !... »
Le tract a été tiré à 10.000 exemplaires. Aus-
sitôt prêt, des voitures l'ont apporté aux Mu-
reaux, dans la soirée, avec quelques autres étu-
diants qui ont constitué des équipes mixtes
ouvriers-étudiants pour le distribuer dans un
rayon de 15 km environ.
sitôt prêt, des voitures l'ont apporté aux Mu-
reaux, dans la soirée, avec quelques autres étu-
diants qui ont constitué des équipes mixtes
ouvriers-étudiants pour le distribuer dans un
rayon de 15 km environ.
Le tract était ainsi conçu :
MOBILISATION GENERALE
travailleurs-étudiants
travailleurs-étudiants
En réponse à l'occupation de leur usine
par 6.000 C.R.S., les ouvriers de Renault-
Flins appellent tous les travailleurs et étu-
diants disponibles à se rassembler
par 6.000 C.R.S., les ouvriers de Renault-
Flins appellent tous les travailleurs et étu-
diants disponibles à se rassembler
LE 7 JUIN A 5 H DU MATIN
place de l'Etoile à ELISABETHVILLE.
(près de l'usine de Flins)
POUR MANIFESTER EN MASSE LEUR
SOUTIEN !
SOUTIEN !
Les travailleurs de Renault-Flins.
« Mais il était minuit passé. Les gens dor-
maient. A Mantes, dans les H.L.M., on le glis-
sait sous les portes et on sonnait, sans attendre
du reste que les gens ouvrent. On espérait les
réveiller, tout cela, malheureusement, n'était
guère efficace. La plupart des gens allaient trou-
ver le tract en se réveillant, c'est-à-dire, après
5 heures... »
maient. A Mantes, dans les H.L.M., on le glis-
sait sous les portes et on sonnait, sans attendre
du reste que les gens ouvrent. On espérait les
réveiller, tout cela, malheureusement, n'était
guère efficace. La plupart des gens allaient trou-
ver le tract en se réveillant, c'est-à-dire, après
5 heures... »
Devant l'usine, 5 h. 30,
arrivée de la première équipe
arrivée de la première équipe
Le tract distribué, les équipes mixtes revien-
nent à la gare des Mureaux, où d'autres ouvriers
et étudiants arrivent peu à peu, des environs ou
de Paris. Ils dorment une heure ou deux, dans la
salle d'attente ou les voitures, et vers 4 heures
du matin, ils commencent à partir vers l'usine,
par des chemins détournés. Vers 5 heures, en-
fin, ils s'asseoient sur la chaussée devant le cor-
don de gendarmes qui barre l'entrée de l'usine.
Deux ou trois voitures d'étudiants arrivent direc-
tement de Paris. Mais il n'y a encore devant
l'usine, lorsque les ouvriers de la première équipe
commencent à arriver, qu'un piquet de grève de
1 00 à 1 50 personnes qui sont, pour les deux-tiers,
des travailleurs de'Flins et pour un tiers des étu-
diants. De plus, aucun responsable syndical ne
se montre. Néanmoins, le piquet de grève grossit
régulièrement parce que l'immense majorité des
ouvriers qui arrivent (par des moyens de trans-
port individuels tout d'abord) se joignent sans
hésitation au groupe initial. Puis les cars de la
première équipe arrivent à leur tour. Les gen-
darmes mobiles, qui étaient demeurés devant
l'usine, avancent alors pour dégager la route et
repoussent le piquet de grève de l'autre côté de
la route, vers la place de l'Etoile à Elisabethville.
Mais les ouvriers descendent des cars et, au lieu
de se diriger vers l'usine, ils traversent la route
et rejoignent aussi leurs camarades. Bref, pour
la première équipe, il n'y a pas de problème.
nent à la gare des Mureaux, où d'autres ouvriers
et étudiants arrivent peu à peu, des environs ou
de Paris. Ils dorment une heure ou deux, dans la
salle d'attente ou les voitures, et vers 4 heures
du matin, ils commencent à partir vers l'usine,
par des chemins détournés. Vers 5 heures, en-
fin, ils s'asseoient sur la chaussée devant le cor-
don de gendarmes qui barre l'entrée de l'usine.
Deux ou trois voitures d'étudiants arrivent direc-
tement de Paris. Mais il n'y a encore devant
l'usine, lorsque les ouvriers de la première équipe
commencent à arriver, qu'un piquet de grève de
1 00 à 1 50 personnes qui sont, pour les deux-tiers,
des travailleurs de'Flins et pour un tiers des étu-
diants. De plus, aucun responsable syndical ne
se montre. Néanmoins, le piquet de grève grossit
régulièrement parce que l'immense majorité des
ouvriers qui arrivent (par des moyens de trans-
port individuels tout d'abord) se joignent sans
hésitation au groupe initial. Puis les cars de la
première équipe arrivent à leur tour. Les gen-
darmes mobiles, qui étaient demeurés devant
l'usine, avancent alors pour dégager la route et
repoussent le piquet de grève de l'autre côté de
la route, vers la place de l'Etoile à Elisabethville.
Mais les ouvriers descendent des cars et, au lieu
de se diriger vers l'usine, ils traversent la route
et rejoignent aussi leurs camarades. Bref, pour
la première équipe, il n'y a pas de problème.
Mais la partie n'est pas gagnée. C'est sans
doute sur la seconde équipe, forte de 6.000 tra-
vailleurs, que compte la direction pour imposer la
reprise. Du côté des grévistes et des étudiants
la confiance s'est accrue après ce premier suc-
cès. Pourtant, on scrute la route au loin dans
l'attente des-cars. On se moque aussi de l'accou-
trement des gendarmes mobiles et des C.R.S.,
dont la plupart des ouvriers voient pour la pre-
mièro fois, les boucliers et les visières, et l'on
fait cercle autour des étudiants qui, avec quelque
fierté, expliquent comment se protéger des gaz
utilisés par la police. Il est environ 7 heures. Des
voitures bourrées d'étudiants continuent à arri-
doute sur la seconde équipe, forte de 6.000 tra-
vailleurs, que compte la direction pour imposer la
reprise. Du côté des grévistes et des étudiants
la confiance s'est accrue après ce premier suc-
cès. Pourtant, on scrute la route au loin dans
l'attente des-cars. On se moque aussi de l'accou-
trement des gendarmes mobiles et des C.R.S.,
dont la plupart des ouvriers voient pour la pre-
mièro fois, les boucliers et les visières, et l'on
fait cercle autour des étudiants qui, avec quelque
fierté, expliquent comment se protéger des gaz
utilisés par la police. Il est environ 7 heures. Des
voitures bourrées d'étudiants continuent à arri-
les trois premières affiches pour Flins
C6T
GREVISTE
RENAL'
SOUTENEZ
ENAULT FLINS
NOUVELLE ETAPE
IvENOREW, FlINS 5000 «5 BWOUEwn.'USlNE I
5k,». Ml AIKFUCS 9000 OWRSRS S'UNISSENT [
PO* CONTINUER U GREVE f
5k,». Ml AIKFUCS 9000 OWRSRS S'UNISSENT [
PO* CONTINUER U GREVE f
»(«,„ LES FttCS ATTAQUENT A UGRENA6E
OFFENSIVE Lt RASSEMBLEMENT OUVRIER
LES CBS. SONT US SEULS PROVOCATEURS'
£ fOMOR ET U R4«0 PRETENDENT QUE CE
IT LES tTUWANTS 9UI SE BATTENT
OFFENSIVE Lt RASSEMBLEMENT OUVRIER
LES CBS. SONT US SEULS PROVOCATEURS'
£ fOMOR ET U R4«0 PRETENDENT QUE CE
IT LES tTUWANTS 9UI SE BATTENT
10 Un. Ml LENDEMAIN US OUVRIERS
..ISENT ET DMGENT U RIPOSTE
POUR TOUT IE MOUVEMENT GREVISTE
tES SECTEURS REPRENNENT LAGRE.VE
SOLIBWITE IES TRIS POSTAUX FURENT LK|
..iEMKM
..ISENT ET DMGENT U RIPOSTE
POUR TOUT IE MOUVEMENT GREVISTE
tES SECTEURS REPRENNENT LAGRE.VE
SOLIBWITE IES TRIS POSTAUX FURENT LK|
..iEMKM
SOLIDAIRES AVEC FLINS...
OBILISONS MOUS SAMEDI DIMANCHE
JNDIPOUR COMMUE* AU RENFOKEKNrl
'U MOUVEMENT BE GREVE
JNDIPOUR COMMUE* AU RENFOKEKNrl
'U MOUVEMENT BE GREVE
Les trois premières affiches sur Flins, réalisées à l'Atelier Populaire dans la nuit de Jeudi à Vendredi sur les mots d'ordre donnés par les grévistes
ver. L'une d'entre elles porte même sur le toit
une caisse dont les nouveaux arrivants extraient
des casques de motocyclistes et des bâtons. De
tous les témoignages recueillis, c'est d'ailleurs le
seul détail qui puisse étayer l'affirmation que des
étudiants constituaient des « formations entraî-
nées quasi-militairement ». Tout compte fait,
c'est fort peu comme organisation après un mois
de brutalité policière. Quant au caractère « qua-
si-militaire » de cette équipée, il est peu évident.
On n'a jamais entendu parler de militaires par-
tant en opérations avec leurs casques et leurs
armes enfermés dans une malle placée sur le toit
de leur véhicule ! Il n'empêche que les nouveaux
arrivants sont priés par leurs camarades étudiants
de ne pas coiffer leur casque ni d'agiter leur
bâton.
une caisse dont les nouveaux arrivants extraient
des casques de motocyclistes et des bâtons. De
tous les témoignages recueillis, c'est d'ailleurs le
seul détail qui puisse étayer l'affirmation que des
étudiants constituaient des « formations entraî-
nées quasi-militairement ». Tout compte fait,
c'est fort peu comme organisation après un mois
de brutalité policière. Quant au caractère « qua-
si-militaire » de cette équipée, il est peu évident.
On n'a jamais entendu parler de militaires par-
tant en opérations avec leurs casques et leurs
armes enfermés dans une malle placée sur le toit
de leur véhicule ! Il n'empêche que les nouveaux
arrivants sont priés par leurs camarades étudiants
de ne pas coiffer leur casque ni d'agiter leur
bâton.
De nombreux jeunes ouvriers ont d'ailleurs le
même réflexe d'autodéfense et dissimulent des
triques. Pour tous, sans exception, c'est la pré-
sence des gendarmes mobiles et des C.R.S. à
Flins qui constitue la provocation.
même réflexe d'autodéfense et dissimulent des
triques. Pour tous, sans exception, c'est la pré-
sence des gendarmes mobiles et des C.R.S. à
Flins qui constitue la provocation.
Pourtant, à ce moment-là, l'atmosphère est plu-
tôt à une sorte de gaieté vengeresse. Une scène
cocasse se dérouie le long de la route avec le
préfet du dépattement, un grand homme pataud
qui a revêtu son uniforme. Entouré d'une dou-
zaine de policiers locaux, très pâles, il cherche,
lui aussi, à chasser les jeunes ouvriers et étu-
diants de la route. « Dégagez ! Dégagez ! crie-
t-il. Respectez la liberté du travail ! » Et, sur
son passage, des cris et, surtout, des rires lui ré-
pondent: « Ridicule !.. Comique !... Guignol ï... »
lui lance-t-on de toutes parts. Quelqu'un même
lui met le doigt dans le dos. Il se retourne, fu-
rieux : « Qui m'a fait ça ! Je veux savoir qui m'a
fait ça !... ». Alors quelqu'un d'autre lui prend
soudain le bras et le fait tourniquer sur lui-même
trois fois/ en signe de dérision sans doute. Les
policiers locaux n'interviennent pas — ils sont
de plus en plus pâles — et le préfet s'éclipse.
tôt à une sorte de gaieté vengeresse. Une scène
cocasse se dérouie le long de la route avec le
préfet du dépattement, un grand homme pataud
qui a revêtu son uniforme. Entouré d'une dou-
zaine de policiers locaux, très pâles, il cherche,
lui aussi, à chasser les jeunes ouvriers et étu-
diants de la route. « Dégagez ! Dégagez ! crie-
t-il. Respectez la liberté du travail ! » Et, sur
son passage, des cris et, surtout, des rires lui ré-
pondent: « Ridicule !.. Comique !... Guignol ï... »
lui lance-t-on de toutes parts. Quelqu'un même
lui met le doigt dans le dos. Il se retourne, fu-
rieux : « Qui m'a fait ça ! Je veux savoir qui m'a
fait ça !... ». Alors quelqu'un d'autre lui prend
soudain le bras et le fait tourniquer sur lui-même
trois fois/ en signe de dérision sans doute. Les
policiers locaux n'interviennent pas — ils sont
de plus en plus pâles — et le préfet s'éclipse.
7 h. 30, la seconde
équipe
équipe
On voit alors avancer sur la route une file inin-
terrompue de cars remplis d'ouvriers, une file qui
s'allonge sur plusieurs kilomètres, semble-t-il.
C'est la seconde équipe. Les C.R.S. font évacuer
l'autre côté de la route, repoussant les grévistes
et les étudiants chaque fois plus loin en direc-
tion de la place de l'Etoile d'Èlisabethville. Mais
des jeunes ouvriers et des étudiants débordent le
cordon de C.R.S. sur sa gauche et glissent le
long de la route, vont au devant des cars et les
forcent à s'arrêter en se plaçant devant eux sur
la chaussée. Ils montent dans les cars et disent
aux ouvriers : « Les flics tiennent l'usine. Vous
ne pouvez pas reprendre le travail avec un fusil
dans le dos ! La grève n'est pas terminée !... »
De nombreux ouvriers descendent des cars aussi-
tôt, tandis que ceux qui restent assis à l'intérieur
se font agonir. D'autres cars, par contre, par-
viennent devant l'usine. Certains ouvriers en-
trent, dans un premier temps, puis ressortent.
Mais la plupart des cars sont arrêtés sur la route
malgré les C.R.S. qui essayent de remonter le
long de la file, dans leurs petites voitures, pour
chasser les jeunes ouvriers et les étudiants vers
les bas-côtés de la route.
terrompue de cars remplis d'ouvriers, une file qui
s'allonge sur plusieurs kilomètres, semble-t-il.
C'est la seconde équipe. Les C.R.S. font évacuer
l'autre côté de la route, repoussant les grévistes
et les étudiants chaque fois plus loin en direc-
tion de la place de l'Etoile d'Èlisabethville. Mais
des jeunes ouvriers et des étudiants débordent le
cordon de C.R.S. sur sa gauche et glissent le
long de la route, vont au devant des cars et les
forcent à s'arrêter en se plaçant devant eux sur
la chaussée. Ils montent dans les cars et disent
aux ouvriers : « Les flics tiennent l'usine. Vous
ne pouvez pas reprendre le travail avec un fusil
dans le dos ! La grève n'est pas terminée !... »
De nombreux ouvriers descendent des cars aussi-
tôt, tandis que ceux qui restent assis à l'intérieur
se font agonir. D'autres cars, par contre, par-
viennent devant l'usine. Certains ouvriers en-
trent, dans un premier temps, puis ressortent.
Mais la plupart des cars sont arrêtés sur la route
malgré les C.R.S. qui essayent de remonter le
long de la file, dans leurs petites voitures, pour
chasser les jeunes ouvriers et les étudiants vers
les bas-côtés de la route.
: VI
,' crMfrr AI
l_ L.J iLL\\/-\L
iv Jl-ur _,- , - fuJi, inrs
I" / juin u jn du pxih,
, i i -' if- l'étoile n
, i i -' if- l'étoile n
'EU3A\LÎETHVILLE
'Ov.irs manifester enn^.n
leur s ou h en V
leur s ou h en V
Entre-temps, trois responsables de la C.G.T.
sont enfin arrivés. Ils se tiennent sur le remblai
du chemin de fer et crient de loin, dans un porte-
voix : « Camarades, la grève continue ! Mais
pas de provocation ! Pas de provocation !... »
Ils leur arrivent aussi de se moquer des étudiants
lorsque ceux-ci, comme les ouvriers qui sont
avec eux le long de la route, sont repoussés par
les C.R.S. en contre-bas, au pied du remblai.
sont enfin arrivés. Ils se tiennent sur le remblai
du chemin de fer et crient de loin, dans un porte-
voix : « Camarades, la grève continue ! Mais
pas de provocation ! Pas de provocation !... »
Ils leur arrivent aussi de se moquer des étudiants
lorsque ceux-ci, comme les ouvriers qui sont
avec eux le long de la route, sont repoussés par
les C.R.S. en contre-bas, au pied du remblai.
Aux Mureaux,
pendant ce temps-là
pendant ce temps-là
II est maintenant 8 heures. On peut estimer que
80 à 90 % de la seconde équipe n'est pas entrée
dans l'usine. Sans arrêt, de plus, des ouvriers qui
sont d'abord entrés, ressortent en groupe sous
les applaudissements des grévistes et des étu-
diants. Mais que ce passe-t-il aux Mureaux où
le meeting intersyndical avait été convoqué ?
80 à 90 % de la seconde équipe n'est pas entrée
dans l'usine. Sans arrêt, de plus, des ouvriers qui
sont d'abord entrés, ressortent en groupe sous
les applaudissements des grévistes et des étu-
diants. Mais que ce passe-t-il aux Mureaux où
le meeting intersyndical avait été convoqué ?
« A ma grande surprise, raconte un étudiant,
le meeting n'était toujours pas décommandé. Les
responsables syndicaux étaient là, sur le perron
de la Mairie, munis de leur sono, et il y avait
devant eux, pour les écouter, 200 à 300 travail-
leurs tout au plus. C'est un responsable de la
C.F.D.T. qui a pris la parole en premier. Il parais-
sait plutôt embarrassé. Je me souviens seulement
qu'il a dit : « La situation est floue. Elle est mou-
vante, camarades. Elle évolue tout le temps,
camarades... » Mais quelqu'un, derrière lui, l'a
tiré par la manche pour lui demander d'inter-
rompre. Il a accepté, et quelqu'un est venu an-
noncer que le meeting se transportait à Elisabth-
ville place de l'Etoile. Tout juste comme il était
dit sur le tract qu'on avait fait à la demande des
jeunes ouvriers ! Les responsables syndicaux
avaient 3 heures de retard, il est vrai... ».
le meeting n'était toujours pas décommandé. Les
responsables syndicaux étaient là, sur le perron
de la Mairie, munis de leur sono, et il y avait
devant eux, pour les écouter, 200 à 300 travail-
leurs tout au plus. C'est un responsable de la
C.F.D.T. qui a pris la parole en premier. Il parais-
sait plutôt embarrassé. Je me souviens seulement
qu'il a dit : « La situation est floue. Elle est mou-
vante, camarades. Elle évolue tout le temps,
camarades... » Mais quelqu'un, derrière lui, l'a
tiré par la manche pour lui demander d'inter-
rompre. Il a accepté, et quelqu'un est venu an-
noncer que le meeting se transportait à Elisabth-
ville place de l'Etoile. Tout juste comme il était
dit sur le tract qu'on avait fait à la demande des
jeunes ouvriers ! Les responsables syndicaux
avaient 3 heures de retard, il est vrai... ».
Retour à Elisabethville
La sono et les responsables syndicaux arrivent
donc place de l'Etoile, à Elisabethville, et mon-
tent sur un socle qui est au milieu de la place.
Autour d'eux, il y a au moins 7.000 ouvriers de
donc place de l'Etoile, à Elisabethville, et mon-
tent sur un socle qui est au milieu de la place.
Autour d'eux, il y a au moins 7.000 ouvriers de
1O
Flins, plus quelques centaines d'étudiants. Jean
Breteau, secrétaire général de la Fédération des
Métaux (C.G.T.), prend la parole. Il assure les
ouvriers de Flins de la solidarité de tous les
autres ouvriers de le métallurgie, notamment
ceux de Billancourt (tonnerre d'applaudisse-
ments) . Il lit des télégrammes venus de l'étranger
et remercie « les étudiants gui sont venus de
Parie pour soutenir les travailleurs de Flins »
(tonnerre d'applaudissements). Il ajoute «qu'il
fout la présence de nombreux étudiants pour
collaborer avec eux mais que la lutte des travail-
leurs est exclusivement dirigée par eux ». Puis,
après avoir demandé le retrait des forces de po-
lice, il annonce qu'une délégation va se rendre
aussitôt auprès de la direction de l'usine.
Breteau, secrétaire général de la Fédération des
Métaux (C.G.T.), prend la parole. Il assure les
ouvriers de Flins de la solidarité de tous les
autres ouvriers de le métallurgie, notamment
ceux de Billancourt (tonnerre d'applaudisse-
ments) . Il lit des télégrammes venus de l'étranger
et remercie « les étudiants gui sont venus de
Parie pour soutenir les travailleurs de Flins »
(tonnerre d'applaudissements). Il ajoute «qu'il
fout la présence de nombreux étudiants pour
collaborer avec eux mais que la lutte des travail-
leurs est exclusivement dirigée par eux ». Puis,
après avoir demandé le retrait des forces de po-
lice, il annonce qu'une délégation va se rendre
aussitôt auprès de la direction de l'usine.
V REPUBLIQUE
Vf»*
RËORGANlSATld
TU PEPS1NNEB
TU PEPS1NNEB
FERMÉ \
Un responsable C.F.D.T. prend ensuite la pa-
role. Il remercie lui aussi les « camarades étu-
diants qui mènent avec les travailleurs un seul
et même combat ». Ils ont été les premiers, dit-
'il, à monter dans les cars pour expliquer aux tra-
vailleurs qu'il ne fallait pas reprendre le tra-
vail.
role. Il remercie lui aussi les « camarades étu-
diants qui mènent avec les travailleurs un seul
et même combat ». Ils ont été les premiers, dit-
'il, à monter dans les cars pour expliquer aux tra-
vailleurs qu'il ne fallait pas reprendre le tra-
vail.
Le meeting prend fin — du moins dans l'es-
prit des responsables syndicaux. Mais une ru-
meur monte de la foule des travailleurs : « La
parole aux étudiants ». L'un d'entre eux, qui se
trouve à proximité du Monument aux Morts,
est poussé vers le micro. Les responsables
C, G. T. ne veulent pas le lui donner. Ils
commencent même à débrancher la sono.
Lec ouvriers qui voient la scène protestent
aussitôt et, derrière eux, leurs camarades pous-
sent en avant les étudiants pour qu'ils puissent
parler. On entend notamment : « Vous n'allez
DOC vous opposer à la volonté de la base ?...
Vous êtes des dirigeants ou des représentants ?...
« II y a une bousculade. Un responsable syndical
donne donc le micro à un étudiant. Il déclare que
« les étudiants sont venus de Paris pour soutenir
les travailleurs qui veulent reprendre leur usine
aux flics... ». Il s'exprime de façon maladroite.
Mais Alain Gsismar, arrivé à FPins vers 6 heures
du matin, prend à son tour la parole. Il est très
bref et exprime de façon plus exacte l'opinion
des étudiants et des enseignants présents. « Les
étudiants et les enseignants qui sont venus à
prit des responsables syndicaux. Mais une ru-
meur monte de la foule des travailleurs : « La
parole aux étudiants ». L'un d'entre eux, qui se
trouve à proximité du Monument aux Morts,
est poussé vers le micro. Les responsables
C, G. T. ne veulent pas le lui donner. Ils
commencent même à débrancher la sono.
Lec ouvriers qui voient la scène protestent
aussitôt et, derrière eux, leurs camarades pous-
sent en avant les étudiants pour qu'ils puissent
parler. On entend notamment : « Vous n'allez
DOC vous opposer à la volonté de la base ?...
Vous êtes des dirigeants ou des représentants ?...
« II y a une bousculade. Un responsable syndical
donne donc le micro à un étudiant. Il déclare que
« les étudiants sont venus de Paris pour soutenir
les travailleurs qui veulent reprendre leur usine
aux flics... ». Il s'exprime de façon maladroite.
Mais Alain Gsismar, arrivé à FPins vers 6 heures
du matin, prend à son tour la parole. Il est très
bref et exprime de façon plus exacte l'opinion
des étudiants et des enseignants présents. « Les
étudiants et les enseignants qui sont venus à
Tract
tlu
8 Mai
RENAULT-FL1NS : REPRISE VICTORIEUSE DE LA GREVE
Le Capital croyait attaquer le maillon faible de la
métallurgie (usine isolée, pas de traditions syndicales,
nombreux travailleurs immigrés, organisation fasciste
dans les usines.
dans les usines.
Il envoie 5.000 C.R.S., garde mobiles. Half-track,
etc..., pour protéger la « liberté de travail » des
jaunes.
etc..., pour protéger la « liberté de travail » des
jaunes.
Mais les ouvriers de Flins continuent le combat.
Vendredi, dès 5 reures, ils sont massés avec de
nombreux étudiants devant les milliers de flics qui
protègent l'usine.
Vendredi, dès 5 reures, ils sont massés avec de
nombreux étudiants devant les milliers de flics qui
protègent l'usine.
Ouvriers et étudiants prennent de vitesse les C.R.S.
le long de la route où arrive la colonne de cars qui
amène les ouvriers trompés qui pensaient reprendre
le travail. Ils montent dans chaque car pour expliquer
la situation et rapidement tous les cars sont vides et
les 9.000 ouvriers sont unis dans un meeting pour
continuer la grève.
le long de la route où arrive la colonne de cars qui
amène les ouvriers trompés qui pensaient reprendre
le travail. Ils montent dans chaque car pour expliquer
la situation et rapidement tous les cars sont vides et
les 9.000 ouvriers sont unis dans un meeting pour
continuer la grève.
C'est alors (10 h du matin) que les garde mobiles
tentent de disperser les rassemblements d'ouvriers
dans Elisabethville. Non seulement les ouvriers n'ont
pas accès à leur usine mais encore les villages avoi-
sinant leur sont interdits.
tentent de disperser les rassemblements d'ouvriers
dans Elisabethville. Non seulement les ouvriers n'ont
pas accès à leur usine mais encore les villages avoi-
sinant leur sont interdits.
Toute la journée les ouvriers d'abord surpris, dé-
sarmés, ripostent et tiennent devant les qardes mo-
biles.
biles.
Le pouvoir est obligé d'ajouter 50 cars de C.R.S.
dans la nuit du vendredi.
dans la nuit du vendredi.
L'Humanité, dit ce matin, ce sont des étudiants
provocateurs qui seraient à l'origine de la violence.
C'EST FAUX. Ce sont les ouvriers de Flins (ils étaient
8.000) qui ont appelé les étudiants. Ce sont les C.R.S.,
qui par leur scandaleuse présence dans l'entreprise
et aux abords, ont provoqué les ouvriers de Flins.
provocateurs qui seraient à l'origine de la violence.
C'EST FAUX. Ce sont les ouvriers de Flins (ils étaient
8.000) qui ont appelé les étudiants. Ce sont les C.R.S.,
qui par leur scandaleuse présence dans l'entreprise
et aux abords, ont provoqué les ouvriers de Flins.
Les étudiants qui voulaient reprendre la Sorbonne,
comprennent les ouvriers de Flins qui veulent re-
prendre leur usine : c'est pourquoi ils étaient hier et,
sont toujours aux côtés des travailleurs face à la.
répression patronale et policière.
comprennent les ouvriers de Flins qui veulent re-
prendre leur usine : c'est pourquoi ils étaient hier et,
sont toujours aux côtés des travailleurs face à la.
répression patronale et policière.
La réalité : c'est la colère des travailleurs
La réalité : c'est la fraternisation des travailleurs et
des étudiants.
des étudiants.
Aujourd'hui tout le mouvement gréviste a les yeux
tournés sur RENAULT-FLINS. Des secteurs entiers re-
prennent la lutte : les tris postaux, Berliet, etc...
repartent en grève, en voyant dans la combativité des
ouvriers de FLINS le signe d'une lutte continue pour
l'abolition du patronat.
tournés sur RENAULT-FLINS. Des secteurs entiers re-
prennent la lutte : les tris postaux, Berliet, etc...
repartent en grève, en voyant dans la combativité des
ouvriers de FLINS le signe d'une lutte continue pour
l'abolition du patronat.
Les ouvriers de Flins ont ouvert une nouvelle étape
de la lutte.
de la lutte.
MOBILISONS-NOUS : toutes les entreprises, tous les
travailleurs, tous les étudiants.
travailleurs, tous les étudiants.
RENFORÇONS LE MOUVEMENT GREVISTE
DIMANCHE ET LUNDI seront deux journées qui se-
ront décisives pour la lutte des travailleurs.
ront décisives pour la lutte des travailleurs.
Coordination des Comités d'Action de la
Région Parisienne
Région Parisienne
Mouvement de soutien aux luttes du peuple
Mouvement du 22 Mars
Mouvement du 22 Mars
11
Flins, dit-il, ne cherchent pas du tout à diriger
la lutte des travailleurs, qui savent très bien ce
qu'ils ont à faire. Ils sont venus pour leur ap-
porter leur soutien et pour se mettre à la dispo-
sition des travailleurs. Ils ne feront que ce que
les travailleurs leur demanderont de faire ». Ces
paroles sont saluées par un tonnerre d'applau-
dissements.
la lutte des travailleurs, qui savent très bien ce
qu'ils ont à faire. Ils sont venus pour leur ap-
porter leur soutien et pour se mettre à la dispo-
sition des travailleurs. Ils ne feront que ce que
les travailleurs leur demanderont de faire ». Ces
paroles sont saluées par un tonnerre d'applau-
dissements.
Un responsable de l'Union locale C.G.T. invite
enfin les travailleurs à se masser autour de l'usine
pendant que la délégation se rend auprès de la
direction. Une partie des travailleurs avancent
donc en direction des gendarmes mobiles et des
C.R.S. qui se trouvent devant l'usine, derrière des
barrières métalliques. Ceux-ci prennent sans
doute peur, lorsque le premier rang des travail-
leurs fait osciller les barrières, et lils lancent
aussitôt des grenades lacrymogènes et offensives
dans la foule. C'est le début des incidents.
enfin les travailleurs à se masser autour de l'usine
pendant que la délégation se rend auprès de la
direction. Une partie des travailleurs avancent
donc en direction des gendarmes mobiles et des
C.R.S. qui se trouvent devant l'usine, derrière des
barrières métalliques. Ceux-ci prennent sans
doute peur, lorsque le premier rang des travail-
leurs fait osciller les barrières, et lils lancent
aussitôt des grenades lacrymogènes et offensives
dans la foule. C'est le début des incidents.
Les « Cahiers de Mai » publieront dans leurs prochains
numéros d'autres documents et études sur Flins, aussi
bien sur la première période de la grève que sur la jour-
née du 7 juin et sur les jours suivants. Ils font appel à
tous les témoins directs et désirent prendre connaissance
de tout document inédit susceptible d'éclairer même un
point de détail.
numéros d'autres documents et études sur Flins, aussi
bien sur la première période de la grève que sur la jour-
née du 7 juin et sur les jours suivants. Ils font appel à
tous les témoins directs et désirent prendre connaissance
de tout document inédit susceptible d'éclairer même un
point de détail.
Au sommaire des
précédents numéros
précédents numéros
N' 1 — Nantes, toute une ville découvre
le pouvoir populaire (ouvriers,
paysans, étudiants).
le pouvoir populaire (ouvriers,
paysans, étudiants).
N 2 — Nouvelle forme d'organisation
dans les usines : les comités de
base.
dans les usines : les comités de
base.
— Grève « sur place » au Ministère
de l'Equipement.
de l'Equipement.
— L'Atelier populaire d'affiches
présenté par lui-même.
présenté par lui-même.
Ces deux numéros sur demande à :
Marcelle FOURNIE
80, quai de la Râpée, Paris (12e)
(contre 2,10 F en timbres).
80, quai de la Râpée, Paris (12e)
(contre 2,10 F en timbres).
Directeur de la publication :
Daniel Anselme.
Imprimerie Béresniak
18-20, rue du Fg-du-Temple, Paris-11'
La version de la C.G.T.
et de " l'Humanité "
et de " l'Humanité "
INTERVENIR RIGOUREUSEMENT
CONTRE TOUTE TENTATIVE DE DEVOYER
LE MOUVEMENT OUVRIER
Alors que les négociations se poursuivent dans la
métallurgie et que les consultations préalables à la
reprise du travail continuent dans diverses autres
branches, les entreprises de provocation visant à
remettre tout en cause ou à pousser les travailleurs
à l'aventure se précisent dangereusement.
métallurgie et que les consultations préalables à la
reprise du travail continuent dans diverses autres
branches, les entreprises de provocation visant à
remettre tout en cause ou à pousser les travailleurs
à l'aventure se précisent dangereusement.
C'est à l'usine de Flins que la dernière tentative
de cette nature s'est produite ce matin. Après que le
gouvernement ait décidé l'occupation de l'usine par
les C.R.S. et alors que les travailleurs étaient ras-
semblés dans le calme, des groupes étrangers à la
classe ouvrière, conduits par Geismar, qui apparaît
de plus en plus comme un spécialiste de la provo-
cation, se sont introduits dans ce rassemblement pour
inciter les travailleurs à réoccuper l'usine.
de cette nature s'est produite ce matin. Après que le
gouvernement ait décidé l'occupation de l'usine par
les C.R.S. et alors que les travailleurs étaient ras-
semblés dans le calme, des groupes étrangers à la
classe ouvrière, conduits par Geismar, qui apparaît
de plus en plus comme un spécialiste de la provo-
cation, se sont introduits dans ce rassemblement pour
inciter les travailleurs à réoccuper l'usine.
Ces formations, entraînées quasi-militairement, qui
se sont déjà signalées à l'occasion d'opérations de
même nature dans la région parisienne, agissent visi-
blement au service des pires ennemis de la classe
ouvrière. Il est difficile de croire que l'arrogance du
patronat de la métallurgie, le soutien qu'il reçoit du
gouvernement, les brutalités policières contre les tra-
vailleurs et ces entreprises de provocation ne sont
pas concertées.
se sont déjà signalées à l'occasion d'opérations de
même nature dans la région parisienne, agissent visi-
blement au service des pires ennemis de la classe
ouvrière. Il est difficile de croire que l'arrogance du
patronat de la métallurgie, le soutien qu'il reçoit du
gouvernement, les brutalités policières contre les tra-
vailleurs et ces entreprises de provocation ne sont
pas concertées.
Union Syndicale C.G.T.
de la Région Parisienne,
7 juin.
de la Région Parisienne,
7 juin.
A FLINS, LES GROUPES GEISMAR
ORGANISENT UNE PROVOCATION
CONTRE LES GREVISTES DE CHEZ RENAULT
... Hier, dès le petit matin, les cars amenaient les
métallos des villages voisins. Devant l'usine, les mi-
litants C.G.T. et C.F.D.T. les conviaient à un meeting
place de l'Etoile, à Elisabethville.
métallos des villages voisins. Devant l'usine, les mi-
litants C.G.T. et C.F.D.T. les conviaient à un meeting
place de l'Etoile, à Elisabethville.
[Pas un mot, donc, sur le meeting convoqué en réalité
aux Mureaux, à 5 km d'Elisabethville.]
aux Mureaux, à 5 km d'Elisabethville.]
Le meeting va grouper presque 8.000 travailleurs.
Jean Breteau, secrétaire général de la Fédération
C.G.T., propose qu'une délégation syndicale aille de-
mander le retrait des forces de police et la négocia-
tion immédiate sur les revendications. Yves Ducos
(C.F.D.T.) abonde dans le même sens. Adopté.
Jean Breteau, secrétaire général de la Fédération
C.G.T., propose qu'une délégation syndicale aille de-
mander le retrait des forces de police et la négocia-
tion immédiate sur les revendications. Yves Ducos
(C.F.D.T.) abonde dans le même sens. Adopté.
Alors prend la parole un représentant des groupes
Geismar. Car, depuis le matin, ces groupes (quelques
centaines, nombre d'entre eux casqués) ont rallié
Flins, contournant ou franchissant les barrages que
la police dit avoir mis en place sur certaines routes.
Geismar. Car, depuis le matin, ces groupes (quelques
centaines, nombre d'entre eux casqués) ont rallié
Flins, contournant ou franchissant les barrages que
la police dit avoir mis en place sur certaines routes.
Le représentant de Geismar — qui s'est imposé
à la tribune — prétend vouloir aider les ouvriers
« à reprendre » l'usine. Les ouvriers ne lui ont rien
demandé et des protestations fusent dans l'assistance.
On entend dire : « Nous sommes là pour nos reven-
dications ; nous savons bien que le pouvoir espère
une provocation... ».
à la tribune — prétend vouloir aider les ouvriers
« à reprendre » l'usine. Les ouvriers ne lui ont rien
demandé et des protestations fusent dans l'assistance.
On entend dire : « Nous sommes là pour nos reven-
dications ; nous savons bien que le pouvoir espère
une provocation... ».
Aussi bien les grévistes, sans écouter plus que
cela l'homme de Geismar, décident d'accompagner la
délégation. Ils avancent tranquillement. Mais des pre-
miers heurts se produisent notamment entre le groupe
de ceux qui se disent étudiants et la police. Des
grenades lacrymogènes éclatent...
cela l'homme de Geismar, décident d'accompagner la
délégation. Ils avancent tranquillement. Mais des pre-
miers heurts se produisent notamment entre le groupe
de ceux qui se disent étudiants et la police. Des
grenades lacrymogènes éclatent...
L'HUMANITE. 8 juin
[Pas un mot, non plus sur l'intervention de Geismar
alors que son nom est cité trois /oi5.]
alors que son nom est cité trois /oi5.]
DOCUMENT
Journal
d'un comité exaction
de quartier
Nous publions ci-dessous un compte rendu
d'activité rédigé collectivement pour les « Ca-
hiers as Mai » par des membres du Comité
d'Action du quartier Maine-Montparnasse.
d'activité rédigé collectivement pour les « Ca-
hiers as Mai » par des membres du Comité
d'Action du quartier Maine-Montparnasse.
Le 17 mai, après les premiers événements de la Sor-
bonne, à l'initiative de 3 locataires du grand ensemble
de Maine-Montparnasse et dans le cadre de l'organisa-
tion des « 100 meetings », quelques étudiants ont été
invités à venir exposer leurs problèmes aux habitants de
l'immeuble. Notre but était précis mais assez restreint :
contacter les locataires intéressés et décider ensemble
s'il y avait lieu de former un Comité d'Action dans notre
immeuble.
bonne, à l'initiative de 3 locataires du grand ensemble
de Maine-Montparnasse et dans le cadre de l'organisa-
tion des « 100 meetings », quelques étudiants ont été
invités à venir exposer leurs problèmes aux habitants de
l'immeuble. Notre but était précis mais assez restreint :
contacter les locataires intéressés et décider ensemble
s'il y avait lieu de former un Comité d'Action dans notre
immeuble.
Cet appel réunit une vingtaine de personnes sur la
terrasse de notre immeuble. Une discussion s'amorce
très vite interrompue par des jets de projectiles prove-
nant des locataires qui visiblement ne désirent pas
voir leur terrasse transformée en forum... Nous sommes
donc obligés d'accepter l'hospitalité d'un des organisa-
teurs afin de continuer à l'abri des œufs, des pommes
de terre cuites et des bombes à eau ! Cette retraite
est salutaire à notre discussion. Nous nous présentons :
(photographe, économiste, journaliste, psychologue, ca-
dres divers...) et comprenons très vite que chacun d'entre
nous est déjà très sensibilisé au problème étudiant et
même au-delà. Au cours de cette première rencontre
nous décidons de former un Comité d'Action à l'échelle
de notre immeuble et une première réunion est prévue
dans un local proche de notre lieu d'habitation.
terrasse de notre immeuble. Une discussion s'amorce
très vite interrompue par des jets de projectiles prove-
nant des locataires qui visiblement ne désirent pas
voir leur terrasse transformée en forum... Nous sommes
donc obligés d'accepter l'hospitalité d'un des organisa-
teurs afin de continuer à l'abri des œufs, des pommes
de terre cuites et des bombes à eau ! Cette retraite
est salutaire à notre discussion. Nous nous présentons :
(photographe, économiste, journaliste, psychologue, ca-
dres divers...) et comprenons très vite que chacun d'entre
nous est déjà très sensibilisé au problème étudiant et
même au-delà. Au cours de cette première rencontre
nous décidons de former un Comité d'Action à l'échelle
de notre immeuble et une première réunion est prévue
dans un local proche de notre lieu d'habitation.
Le piquet de grève
demande de l'aide
demande de l'aide
Cette réunion nous montre qu'une cinquantaine de
locataires viennent au moins s'informer et que de nom-
breux jeunes du quartier sont prêts à participer active-
ment à tout ce que l'assemblée présente décidera d'en-
treprendre.
locataires viennent au moins s'informer et que de nom-
breux jeunes du quartier sont prêts à participer active-
ment à tout ce que l'assemblée présente décidera d'en-
treprendre.
Dès sa formation, l'activité du Comité s'est orientée
vers le soutien aux grévistes. Les formes en sont
multiples, tournées surtout vers les grévistes des
entreprises installées dans l'ensemble Maine-Montpar-
nasse : le Tri Postal, la Compagnie des Wagons-Lits, le
Chantier de construction du troisième secteur et la Gare
Montparnasse proprement dite. Il va sans dire qu'avant
le mois de Mai, il n'y avait jamais eu de contact entre
les travailleurs et les locataires de Maine-Montparnasse.
vers le soutien aux grévistes. Les formes en sont
multiples, tournées surtout vers les grévistes des
entreprises installées dans l'ensemble Maine-Montpar-
nasse : le Tri Postal, la Compagnie des Wagons-Lits, le
Chantier de construction du troisième secteur et la Gare
Montparnasse proprement dite. Il va sans dire qu'avant
le mois de Mai, il n'y avait jamais eu de contact entre
les travailleurs et les locataires de Maine-Montparnasse.
Au Tri Postal, le piquet de grève doit garder des
locaux très vastes, avec des entrées multiples ; bien
locaux très vastes, avec des entrées multiples ; bien
que leur effectif soit suffisant, un problème de sécurité
se pose. Un système d'alerte par téléphone est mis au
point : les grévistes appellent quatre numéros de télé-
phone correspondant à des locataires de l'immeuble,
ceux-ci à leur tour en appellent quatre autres, etc...
Nous pouvons ainsi en cas d'urgence contacter le
maximum de personnes en un minimum de temps (sept
minutes). Nous aurons l'occasion de vérifier l'efficacité
de ce système lorsque des « fascistes » viendront « sa-
luer » les grévistes. Mais à peine nous auront-ils aperçu
qu'ils prendront la fuite, comprenant très bien ce qui va
leur arriver ! D'autre part, chaque nuit quatre ou cinq
membres du Comité vont attendre le petit matin avec
les grévistes. Il s'agit plus de soutenir leur moral que de
leur apporter une aide matérielle.
se pose. Un système d'alerte par téléphone est mis au
point : les grévistes appellent quatre numéros de télé-
phone correspondant à des locataires de l'immeuble,
ceux-ci à leur tour en appellent quatre autres, etc...
Nous pouvons ainsi en cas d'urgence contacter le
maximum de personnes en un minimum de temps (sept
minutes). Nous aurons l'occasion de vérifier l'efficacité
de ce système lorsque des « fascistes » viendront « sa-
luer » les grévistes. Mais à peine nous auront-ils aperçu
qu'ils prendront la fuite, comprenant très bien ce qui va
leur arriver ! D'autre part, chaque nuit quatre ou cinq
membres du Comité vont attendre le petit matin avec
les grévistes. Il s'agit plus de soutenir leur moral que de
leur apporter une aide matérielle.
Avec les grévistes au chantier de construction les rap-
ports sont différents. Le piquet de grève contacté répond
qu'il n'a pas de problèmes particuliers mais au'il serait
heureux d'avoir du café pour la nuit ! Toutes les nuits
donc, nous leur portons des bouteilles de café. Evidem-
ment, nous organisons un roulement car il faut leur porter
du café vers minuit au moment où la nuit commence
réellement.
ports sont différents. Le piquet de grève contacté répond
qu'il n'a pas de problèmes particuliers mais au'il serait
heureux d'avoir du café pour la nuit ! Toutes les nuits
donc, nous leur portons des bouteilles de café. Evidem-
ment, nous organisons un roulement car il faut leur porter
du café vers minuit au moment où la nuit commence
réellement.
La reprise partielle
n'arrête pas notre action
n'arrête pas notre action
Puis, le mardi 5 juin, des problèmes nouveaux sur-
gissent : l'essence étant revenue le week-end précédent
(Pentecôte), le gouvernement proclame la reprise générale
du travail, la confédération du bâtiment n'a abouti à
aucun accord avec le patronat, les entreprises du Chantier
de Maine-Montparnasse annoncent la réouverture pour le
mardi matin. Le piquet de grève nous demande de l'aide :
leurs grévistes ne sont pas assez nombreux pour faire
front à tous ceux qui voudront reprendre le travail. Ils
demandent de venir en force, non pour empêcher les ou-
vriers de franchir le seuil du chantier mais pour discuter
avec eux et essayer de leur montrer que la grève n'aura
servi à rien s'ils reprennent avant que des accords soient
conclus. A notre tour nous demandons du renfort aux
autres Comités du XIV arrondissement, aux organisations
locales d'extrême-gauche et, un peu au hasard des ren-
contres, aux étudiants. De soixante-dix à cent personnes
se retrouvent le mardi matin à six heures devant le
chantier : à peu près autant de travailleurs, (étrangers en
majorité) que d'agents de maîtrise et de chefs d'équipe...
Le Comité de grève ne donne pas d'instructions, chacun
discute de son côté, la confusion est totale. Nous ne
savons pas s'il faut ou non interdire l'accès du chantier.
Il nous semble en effet difficile, de prendre nous, Comité
d'Action, des initiatives de ce genre. Au bout de deux
gissent : l'essence étant revenue le week-end précédent
(Pentecôte), le gouvernement proclame la reprise générale
du travail, la confédération du bâtiment n'a abouti à
aucun accord avec le patronat, les entreprises du Chantier
de Maine-Montparnasse annoncent la réouverture pour le
mardi matin. Le piquet de grève nous demande de l'aide :
leurs grévistes ne sont pas assez nombreux pour faire
front à tous ceux qui voudront reprendre le travail. Ils
demandent de venir en force, non pour empêcher les ou-
vriers de franchir le seuil du chantier mais pour discuter
avec eux et essayer de leur montrer que la grève n'aura
servi à rien s'ils reprennent avant que des accords soient
conclus. A notre tour nous demandons du renfort aux
autres Comités du XIV arrondissement, aux organisations
locales d'extrême-gauche et, un peu au hasard des ren-
contres, aux étudiants. De soixante-dix à cent personnes
se retrouvent le mardi matin à six heures devant le
chantier : à peu près autant de travailleurs, (étrangers en
majorité) que d'agents de maîtrise et de chefs d'équipe...
Le Comité de grève ne donne pas d'instructions, chacun
discute de son côté, la confusion est totale. Nous ne
savons pas s'il faut ou non interdire l'accès du chantier.
Il nous semble en effet difficile, de prendre nous, Comité
d'Action, des initiatives de ce genre. Au bout de deux
13
heures la maîtrise fait entrer les travailleurs dans le
chantier (qui nous était interdit) et organise un vote
plus que « trafiqué » en faveur de la reprise (le vote
est soi-disant secret et non à main levée, en fait, un
employé de la direction circule avec un carnet et demande
Individuellement aux ouvriers s'ils sont pour la reprise !
Selon leur réponse, il coche quelque chose sur son
carnet. La reprise est acquise ! Cent votants pour un
millier d'ouvriers ! Soixante pour cent en faveur de la
reprise... essentiellement des cadres et chefs d'entre-
prise ! Et des dizaines d'ouvriers étrangers qui ne
comprennent pas notre langue, qui ne savent pas ce
qu'on leur demande et qui de toutes façons savent
que l'expulsion est au bout de leur réponse... Pourtant,
lorsqu'on leur explique qu'ils ont répondu oui à la reprise
du travail, ils vont demander aux organisateurs du « vote »
d'annuler leur réponse. Trop tard leur répond-on, vous
avez « voté ». Nous ne pouvons, en aucune façon, inter-
venir ; cela donnerait une occasion au patronat pour ap-
peler la police et expulser les personnes étrangères au
chantier. La police est pourtant venue, appelée par télé-
phone par une riveraine de l'avenue du Maine qui craignait
des bagarres ! Casques, matraques, lacrymogènes devant
en principe ramener « tout le monde » à la raison. En fait,
tous les jeunes sont invités plus ou moins durement à
circuler.
chantier (qui nous était interdit) et organise un vote
plus que « trafiqué » en faveur de la reprise (le vote
est soi-disant secret et non à main levée, en fait, un
employé de la direction circule avec un carnet et demande
Individuellement aux ouvriers s'ils sont pour la reprise !
Selon leur réponse, il coche quelque chose sur son
carnet. La reprise est acquise ! Cent votants pour un
millier d'ouvriers ! Soixante pour cent en faveur de la
reprise... essentiellement des cadres et chefs d'entre-
prise ! Et des dizaines d'ouvriers étrangers qui ne
comprennent pas notre langue, qui ne savent pas ce
qu'on leur demande et qui de toutes façons savent
que l'expulsion est au bout de leur réponse... Pourtant,
lorsqu'on leur explique qu'ils ont répondu oui à la reprise
du travail, ils vont demander aux organisateurs du « vote »
d'annuler leur réponse. Trop tard leur répond-on, vous
avez « voté ». Nous ne pouvons, en aucune façon, inter-
venir ; cela donnerait une occasion au patronat pour ap-
peler la police et expulser les personnes étrangères au
chantier. La police est pourtant venue, appelée par télé-
phone par une riveraine de l'avenue du Maine qui craignait
des bagarres ! Casques, matraques, lacrymogènes devant
en principe ramener « tout le monde » à la raison. En fait,
tous les jeunes sont invités plus ou moins durement à
circuler.
Sur la vingtaine d'entreprises qui participent au Chan-
tier, il n'y a de représentation syndicale que dans deux.
Dans les autres, les travailleurs, étrangers pour la plupart,
ont fait grève pour suivre « le mouvement », en espérant
toutefois en bénéficier. Ils ont fait quinze jours de grève
sans même avoir déposé un cahier de revendications et
surtout sans avoir établi de contacts inter-entreprises.
Très rapidement, dans un café voisin, une quinzaine de
travailleurs rédigent avec nous un tract qui affirme la soli-
darité de toutes les entreprises du chantier, présente un
ensemble de revendications et appelle les travailleurs à
en discuter librement avant toute reprise effective du
travail. Ne possédant aucun moyen pour tirer ce tract,
nos camarades du chantier nous demandent de le faire
pour eux et de revenir le lendemain pour le distribuer.
tier, il n'y a de représentation syndicale que dans deux.
Dans les autres, les travailleurs, étrangers pour la plupart,
ont fait grève pour suivre « le mouvement », en espérant
toutefois en bénéficier. Ils ont fait quinze jours de grève
sans même avoir déposé un cahier de revendications et
surtout sans avoir établi de contacts inter-entreprises.
Très rapidement, dans un café voisin, une quinzaine de
travailleurs rédigent avec nous un tract qui affirme la soli-
darité de toutes les entreprises du chantier, présente un
ensemble de revendications et appelle les travailleurs à
en discuter librement avant toute reprise effective du
travail. Ne possédant aucun moyen pour tirer ce tract,
nos camarades du chantier nous demandent de le faire
pour eux et de revenir le lendemain pour le distribuer.
Sur le plan des faits notre action s'est soldée par un
échec, puisque, finalement, le patronat est arrivé à ses
fins. Mais, nous avons contribué à un début de prise de
conscience et d'organisation des ouvriers de Maine-Mont-
parnasse. On peut se demander comment il se fait qu'au-
cune organisation, plus ancienne que notre Comité, n'y
ait pensé ?
échec, puisque, finalement, le patronat est arrivé à ses
fins. Mais, nous avons contribué à un début de prise de
conscience et d'organisation des ouvriers de Maine-Mont-
parnasse. On peut se demander comment il se fait qu'au-
cune organisation, plus ancienne que notre Comité, n'y
ait pensé ?
Les délégués syndicaux
et les ouvriers des Wagons-lits
Les rapports entre les employés des Wagons-Lits et
notre Comité sont fraternels, mais ils ne nous deman-
dent aucune aide pratique. Nous discutons donc tous les
jours des événements et nous faisons quelques petites
« sorties » : par exemple, nous partons un jour décoller
les affiches que le député sortant « de la Maléne » avait
fait placarder par un organisme de publicité, et afin de
rétablir un certain équilibre dans la décoration du quartier
nous collons les affiches de l'atelier populaire concer-
nant notre Comité ou les entreprises de Maine-Mont-
parnasse.
notre Comité sont fraternels, mais ils ne nous deman-
dent aucune aide pratique. Nous discutons donc tous les
jours des événements et nous faisons quelques petites
« sorties » : par exemple, nous partons un jour décoller
les affiches que le député sortant « de la Maléne » avait
fait placarder par un organisme de publicité, et afin de
rétablir un certain équilibre dans la décoration du quartier
nous collons les affiches de l'atelier populaire concer-
nant notre Comité ou les entreprises de Maine-Mont-
parnasse.
Quant à la Gare Montparnasse proprement dite, elle
nous crée quelques petites difficultés. Dès la naissance
de notre Comité, nous allons voir le piquet de grève des
cheminots pour leur proposer nos services. Nous sommes
à la fois très bien reçus et très bien compris, mais aucun
dirigeant syndical n'étant là les camarades cheminots
nous conseillent d'aller les voir à « l'Inter-syndicale » du
quartier. Et là, nous sommes très mal reçus ! Il semble
que les « responsables » nous aient pris pour des « gau-
chistes » organisés et nous sommes donc accueillis comme
il se doit dans ces cas-là ! Malheureusement, un des
membres du Comité qui était allé à l'Inter-syndicale était
communiste et connu comme tel par les dirigeants
syndicaux, aussi les rapports s'envenimèrent-ils un peu.
nous crée quelques petites difficultés. Dès la naissance
de notre Comité, nous allons voir le piquet de grève des
cheminots pour leur proposer nos services. Nous sommes
à la fois très bien reçus et très bien compris, mais aucun
dirigeant syndical n'étant là les camarades cheminots
nous conseillent d'aller les voir à « l'Inter-syndicale » du
quartier. Et là, nous sommes très mal reçus ! Il semble
que les « responsables » nous aient pris pour des « gau-
chistes » organisés et nous sommes donc accueillis comme
il se doit dans ces cas-là ! Malheureusement, un des
membres du Comité qui était allé à l'Inter-syndicale était
communiste et connu comme tel par les dirigeants
syndicaux, aussi les rapports s'envenimèrent-ils un peu.
Les cheminots nous font savoir par un de leurs respon-
sables qu'ils ne souhaitent pas établir de contacts avec
nous. Nous avions pourtant bien compris que les termes
dudit responsable n'engageaient que lui.
sables qu'ils ne souhaitent pas établir de contacts avec
nous. Nous avions pourtant bien compris que les termes
dudit responsable n'engageaient que lui.
Un passage difficile :
des grèves aux élections
des grèves aux élections
Pendant' la période où le soutien aux grévistes cons-
titue l'essentiel de nos activités, nous ne posons que
rarement des problèmes de fond. Mais dès que les élec-
tions deviennent certaines, il en va autrement. Notre C.A.
est composé de membres qui ont en commun leur
arrondissement, leur bonne volonté et leurs idées de
gauche. Nous savons plus ou moins que certains sont
au P.C.F., au P.S.U., dans des organisations telles que I'
U.J.C.M.L. ou les J.C.R., des anarcho-syndicalistes, des cé-
gétistes, des non-affiliés et des non-politisés, mais jamais
personne ne cherche à imposer au Comité le point de
vue de son organisation. Au contraire, chacun est libre
et discute spontanément de l'élaboration d'un tract, d'une
affiche ou d'une réunion. Dans les discussions hebdo-
madaires que nous organisons les compromis sont rares
et une ligne d'action commune ressort très nettement.
titue l'essentiel de nos activités, nous ne posons que
rarement des problèmes de fond. Mais dès que les élec-
tions deviennent certaines, il en va autrement. Notre C.A.
est composé de membres qui ont en commun leur
arrondissement, leur bonne volonté et leurs idées de
gauche. Nous savons plus ou moins que certains sont
au P.C.F., au P.S.U., dans des organisations telles que I'
U.J.C.M.L. ou les J.C.R., des anarcho-syndicalistes, des cé-
gétistes, des non-affiliés et des non-politisés, mais jamais
personne ne cherche à imposer au Comité le point de
vue de son organisation. Au contraire, chacun est libre
et discute spontanément de l'élaboration d'un tract, d'une
affiche ou d'une réunion. Dans les discussions hebdo-
madaires que nous organisons les compromis sont rares
et une ligne d'action commune ressort très nettement.
La préparation des élections crée quelques divergen-
ces. Nous pouvons dire que la majorité des membres
sont pour l'abstentionnisme, mais seulement la majorité !
Nous en discutons longtemps mais comme toujours l'ac-
tion nous réunit. La meilleure preuve en est peut-être
les meetings que nous tenons dans le quartier, le plus
souvent possible. Là, pour ou contre la participation aux
élections, nous savons tous expliquer ce que représentent
les élections dans le cadre de la constitution actuelle
avec ce mode de scrutin. A ce propos, il est intéressant
de souligner le succès de ces meetings. Il est tel que
lorsque nous ne pouvons les organiser aux emplacements
habituels les habitants du quartier y viennent seuls pour
discuter et ils nous abordent plus tard dans la rue pour
nous demander pourquoi nous ne sommes pas venus, ce
qui se passe en ce moment etc...
ces. Nous pouvons dire que la majorité des membres
sont pour l'abstentionnisme, mais seulement la majorité !
Nous en discutons longtemps mais comme toujours l'ac-
tion nous réunit. La meilleure preuve en est peut-être
les meetings que nous tenons dans le quartier, le plus
souvent possible. Là, pour ou contre la participation aux
élections, nous savons tous expliquer ce que représentent
les élections dans le cadre de la constitution actuelle
avec ce mode de scrutin. A ce propos, il est intéressant
de souligner le succès de ces meetings. Il est tel que
lorsque nous ne pouvons les organiser aux emplacements
habituels les habitants du quartier y viennent seuls pour
discuter et ils nous abordent plus tard dans la rue pour
nous demander pourquoi nous ne sommes pas venus, ce
qui se passe en ce moment etc...
Nouveau moyen d'information :
les réunions dans la rue
les réunions dans la rue
Afin d'amplifier nos moyens d'information, nous déci-
dons d'exposer un panneau (articles de la presse quo-
tidienne, d'Action, tracts, documents et photos des
événements) sur l'emplacement du marché Ergar Quinet
ainsi qu'à la sortie du métro Montparnasse, devant le
cinéma.
dons d'exposer un panneau (articles de la presse quo-
tidienne, d'Action, tracts, documents et photos des
événements) sur l'emplacement du marché Ergar Quinet
ainsi qu'à la sortie du métro Montparnasse, devant le
cinéma.
Comme l'expérience le prouvera toujours, les discus-
sions ne commencent que grâce aux gens qui nous
insultent, d'autres arrivent alors à notre rescousse et
voilà, c'est parti ! Nous nous trouvons dans l'impossibilité
sions ne commencent que grâce aux gens qui nous
insultent, d'autres arrivent alors à notre rescousse et
voilà, c'est parti ! Nous nous trouvons dans l'impossibilité
14
de diriger une discussion unique et de nombreux groupes
se forment sur des sujets différents : historiques, actuels,
politiques, électoraux, universitaires, syndicaux, sociaux
etc... On ne peut pas classer facilement la centaine de
personnes qui participent chaque fois à nos discussions.
Il y a de tout. Nous d'abord, vite débordés par le nombre,
mais aussi rapidement secondés par des passants. Chaque
groupe, de 3 à 6 personnes, est évidemment animé par
des gens plus directement concernés par un de ces
problèmes. L'examen des événements actuels intéressent
les plus jeunes et les bourgeoises, qui d'accord avec
les revendications étudiantes — qui sont celles de leurs
enfants — se laissent facilement entraîner sur les pro-
blèmes sociaux. L'histoire est abordée généralement, par
les gaullistes ou les membres de l'extrême-droite qui
cherchent à se justifier ; nous avons été étonné d'en-
tendre dire souvent le nom de Pétain, qui attire encore
bien des sympathies : « C'est grâce à Pétain, si la résis-
tance a pu avoir lieu » ! Les différents syndicaux sont
évidemment décortiqués par les travailleurs qui, tous
d'acord sur le rôle équivoque de la C.G.T., ne le sont
plus sur la façon de mener ou de finir la grève.
se forment sur des sujets différents : historiques, actuels,
politiques, électoraux, universitaires, syndicaux, sociaux
etc... On ne peut pas classer facilement la centaine de
personnes qui participent chaque fois à nos discussions.
Il y a de tout. Nous d'abord, vite débordés par le nombre,
mais aussi rapidement secondés par des passants. Chaque
groupe, de 3 à 6 personnes, est évidemment animé par
des gens plus directement concernés par un de ces
problèmes. L'examen des événements actuels intéressent
les plus jeunes et les bourgeoises, qui d'accord avec
les revendications étudiantes — qui sont celles de leurs
enfants — se laissent facilement entraîner sur les pro-
blèmes sociaux. L'histoire est abordée généralement, par
les gaullistes ou les membres de l'extrême-droite qui
cherchent à se justifier ; nous avons été étonné d'en-
tendre dire souvent le nom de Pétain, qui attire encore
bien des sympathies : « C'est grâce à Pétain, si la résis-
tance a pu avoir lieu » ! Les différents syndicaux sont
évidemment décortiqués par les travailleurs qui, tous
d'acord sur le rôle équivoque de la C.G.T., ne le sont
plus sur la façon de mener ou de finir la grève.
Et puis, il y a les vieux. Deux sortes de vieux : ceux
qui disent être contents de leur sort et qui répondent,
quand on leur demande s'ils pourraient s'en sortir en
cas de maladie grave : « Ah, ben, si vous posez des
questions comme ça » ou « Nous, on est vieux .on n'a
besoin de presque rien » et ceux qui nous étonnent par
leur pensée politique et leur force révolutionnaire (sur-
tout les femmes). Après une longue discussion sur le
socialisme en France, une vieille femme a conclu en
riant : « I n'y a que sur la possibilité de changer l'homme
que je reste sceptique ! ».
qui disent être contents de leur sort et qui répondent,
quand on leur demande s'ils pourraient s'en sortir en
cas de maladie grave : « Ah, ben, si vous posez des
questions comme ça » ou « Nous, on est vieux .on n'a
besoin de presque rien » et ceux qui nous étonnent par
leur pensée politique et leur force révolutionnaire (sur-
tout les femmes). Après une longue discussion sur le
socialisme en France, une vieille femme a conclu en
riant : « I n'y a que sur la possibilité de changer l'homme
que je reste sceptique ! ».
Chaque jour, évidemment, de nouveaux thèmes sont
abordés, mais la seule question posée en permanence
reste : « que proposez-vous pour remplacer le gouver-
nement actuel ? ». Après avoir expliqué que notre but
final était quand même l'abolition de la propriété privée
des moyens de production, nous soulignons notre position
originale quant au changement de gouvernement à l'en-
contre des partis politiques traditionnels, nous ne pro-
posons aucune personnalité, aucune tendance, nous ne
voulons pas, comme ces partis, discuter des solutions
possibles avec tous les gens intéressés (eux en l'oc-
curence), dans le cadre de notre Comité d'Action. Par
cette réponse, nous pensons donner l'impression que ce
problème concerne chacun de nous.
abordés, mais la seule question posée en permanence
reste : « que proposez-vous pour remplacer le gouver-
nement actuel ? ». Après avoir expliqué que notre but
final était quand même l'abolition de la propriété privée
des moyens de production, nous soulignons notre position
originale quant au changement de gouvernement à l'en-
contre des partis politiques traditionnels, nous ne pro-
posons aucune personnalité, aucune tendance, nous ne
voulons pas, comme ces partis, discuter des solutions
possibles avec tous les gens intéressés (eux en l'oc-
curence), dans le cadre de notre Comité d'Action. Par
cette réponse, nous pensons donner l'impression que ce
problème concerne chacun de nous.
Les relations
avec les mouvements organisés
Politiquement notre C.A. n'a donc pas d'idéologie dé-
finie. Lorsque nous sommes d'accord avec les mots
d'ordres du Comité de Coordination de la Sorbonne, puis
de la rue Serpente, nous les appliquons ; c'est ainsi que
nous avons participé en tant que C.A. à toutes les
finie. Lorsque nous sommes d'accord avec les mots
d'ordres du Comité de Coordination de la Sorbonne, puis
de la rue Serpente, nous les appliquons ; c'est ainsi que
nous avons participé en tant que C.A. à toutes les
EXPIOÎIÊR
manifestations organisées par l'U.N.E.F. et le S.N.E. Sup.
(au grand étonnement des locataires de Maine-Montpar-
nasse surpris de voir se former sous leurs yeux, dans
leur immeuble, un groupe de manifestants, drapeau rouge
en tête). Nous possédons une véritable autonomie par
rapport à toutes les organisations étudiantes, de jeunes ou
autres. Les seuls petits accrochages sont les petites ba-
tailles d'affiches avec le P.C.F. et les « zones d'influence »
du quartier. En effet, il existe un centre de permanence
des C.A. du XIV arrondissement où le matériel est mis
au point et distribué. Les autres C.A. de l'arrondissement
ne sont pas tous formés sur la même base de recrute-
ment que le nôtre, il y a le C.A. du 22 Mars et celui
de l'U.J.C.M.L. C'est ainsi par exemple, qu'une manifes-
tation est décidée en commun sur le seul territoire de
notre arrondissement. Il s'agit de faire le tour des entre-
prises et de leur signifier ainsi notre solidarité. Le C.A.
Maine-Montparnasse arrive en nombre, mais nous voyons
très vite que cette manifestation est plus celle des
U.J.C.M.L. que celle des C.A. du XIV" : slogans, presse,
tracts et participants (qui sont loin de tous habiter le
quartier mais qui sont, en tous cas, U.J.C.M.L.).
Une partie de notre C.A. quitte la manifestation
pour cette raison et l'autre reste par souci d'unité
ce qui nous permet de comprendre pourquoi notre
participation n'est pas tellement positive. Devant les
entreprises de notre quartier nous sommes plutôt mal
reçus ! En effet, de longues discussions nocturnes avec
les grévistes nous ont permis de les persuader que nous
ne sommes d'aucun groupe politique (particulièrement
ceux contre lesquels luttent les délégués syndicaux C.
G.T.) et notre participation à cette manifestation leur
laissent croire le contraire ; les camarades de notre C.A.
ont beaucoup de mal à renouer de bonnes relations avec
les grévistes. Nous tenons à souligner que ces petits
problèmes de relations avec les mouvements organisés
ne sont pas d'ordre idéologiques mais purement tactique.
Il est d'ailleurs amusant de voir les membres de notre
C.A. servir d'intermédiaires entre nous et les organisa-
tions politiques dont ils sont membres ! Cela facilite
beaucoup les rapports !
(au grand étonnement des locataires de Maine-Montpar-
nasse surpris de voir se former sous leurs yeux, dans
leur immeuble, un groupe de manifestants, drapeau rouge
en tête). Nous possédons une véritable autonomie par
rapport à toutes les organisations étudiantes, de jeunes ou
autres. Les seuls petits accrochages sont les petites ba-
tailles d'affiches avec le P.C.F. et les « zones d'influence »
du quartier. En effet, il existe un centre de permanence
des C.A. du XIV arrondissement où le matériel est mis
au point et distribué. Les autres C.A. de l'arrondissement
ne sont pas tous formés sur la même base de recrute-
ment que le nôtre, il y a le C.A. du 22 Mars et celui
de l'U.J.C.M.L. C'est ainsi par exemple, qu'une manifes-
tation est décidée en commun sur le seul territoire de
notre arrondissement. Il s'agit de faire le tour des entre-
prises et de leur signifier ainsi notre solidarité. Le C.A.
Maine-Montparnasse arrive en nombre, mais nous voyons
très vite que cette manifestation est plus celle des
U.J.C.M.L. que celle des C.A. du XIV" : slogans, presse,
tracts et participants (qui sont loin de tous habiter le
quartier mais qui sont, en tous cas, U.J.C.M.L.).
Une partie de notre C.A. quitte la manifestation
pour cette raison et l'autre reste par souci d'unité
ce qui nous permet de comprendre pourquoi notre
participation n'est pas tellement positive. Devant les
entreprises de notre quartier nous sommes plutôt mal
reçus ! En effet, de longues discussions nocturnes avec
les grévistes nous ont permis de les persuader que nous
ne sommes d'aucun groupe politique (particulièrement
ceux contre lesquels luttent les délégués syndicaux C.
G.T.) et notre participation à cette manifestation leur
laissent croire le contraire ; les camarades de notre C.A.
ont beaucoup de mal à renouer de bonnes relations avec
les grévistes. Nous tenons à souligner que ces petits
problèmes de relations avec les mouvements organisés
ne sont pas d'ordre idéologiques mais purement tactique.
Il est d'ailleurs amusant de voir les membres de notre
C.A. servir d'intermédiaires entre nous et les organisa-
tions politiques dont ils sont membres ! Cela facilite
beaucoup les rapports !
Nous prenons garde pourtant, après cette manifes-
tation du 3 Juin, à ce que les tracts que nous communi-
que la permanence du XIV arrondissement ne soient pas
trop orientés sur la dénonciation et l'abstentionnisme
quand ils sont signés du C.A. du XIV. Nous voulons
simplement que ces tracts soient distribués avec la
signature et donc la responsabilité du C.A. qui a pris
l'initiative de leur rédaction.
tation du 3 Juin, à ce que les tracts que nous communi-
que la permanence du XIV arrondissement ne soient pas
trop orientés sur la dénonciation et l'abstentionnisme
quand ils sont signés du C.A. du XIV. Nous voulons
simplement que ces tracts soient distribués avec la
signature et donc la responsabilité du C.A. qui a pris
l'initiative de leur rédaction.
L'ensemble Maine-Montparnasse est une belle illustra-
tion de l'urbanisme « ségrégué » : ségrégation complète
dans l'immeuble, inscrite dans la conception, dans les murs
et les ascenseurs ; coupures entre les bureaux. Les en-
treprises et les habitants ; coupures entre le « neuf »
et l'ancien quartier ; à l'intérieur même de l'immeuble,
coupures entre les appartements : chacun est confor-
table (et cher !) mais il n'y a pas de locaux pour une vie
sociale, pas d'espace de jeu pour les enfants.
tion de l'urbanisme « ségrégué » : ségrégation complète
dans l'immeuble, inscrite dans la conception, dans les murs
et les ascenseurs ; coupures entre les bureaux. Les en-
treprises et les habitants ; coupures entre le « neuf »
et l'ancien quartier ; à l'intérieur même de l'immeuble,
coupures entre les appartements : chacun est confor-
table (et cher !) mais il n'y a pas de locaux pour une vie
sociale, pas d'espace de jeu pour les enfants.
CEDER
un
[AUX USINES
. 'OCCUPEES
. 'OCCUPEES
POUR LA VICTOIRE
DU PEUPLE
CBPJTULER
BERUCOUP
BERUCOUP
15
DOCUMENT
Journal
d'un comité exaction
de quartier
(suite)
Mai 1968 a été plus fort que les murs. Toutes ces sé-
grégations ont été brisées ; des locataires et des tra-
vailleurs de l'ensemble, des habitants des autres rues du
quartier ont enfin commencer à militer ensemble, a se
connaître, à se lier d'amitié. Pour le public le Comité
est devenu une des réalités du quartier, par ses affiches,
ses petits meetings, par la diffusion d'Action et des
Cahiers de Mai, par ses tracts et ses manifestations.
grégations ont été brisées ; des locataires et des tra-
vailleurs de l'ensemble, des habitants des autres rues du
quartier ont enfin commencer à militer ensemble, a se
connaître, à se lier d'amitié. Pour le public le Comité
est devenu une des réalités du quartier, par ses affiches,
ses petits meetings, par la diffusion d'Action et des
Cahiers de Mai, par ses tracts et ses manifestations.
Deux illustrations le prouvent :
— au soir de la manifestation gaulliste des Champs
Elysées, un locataire gaulliste a pensé manifester sa
force dans l'immeuble en mettant à sa -fenêtre un dra-
peau tricolore avec une croix de Lorraine. Il ignorait sans
doute l'importance de notre C.A. car son arme s'est
retournée contre lui lorsque l'immense façade de Maine-
Montparnasse s'est couverte de drapeaux rouges (panta-
lons, pull-over, nappes, drapeaux tricolores tronqués
etc...!). Sans le C.A., aucun locataire n'aurait osé croire
à un tel déploiem'ent de rouge ; ce fut notre première
victoire.
Elysées, un locataire gaulliste a pensé manifester sa
force dans l'immeuble en mettant à sa -fenêtre un dra-
peau tricolore avec une croix de Lorraine. Il ignorait sans
doute l'importance de notre C.A. car son arme s'est
retournée contre lui lorsque l'immense façade de Maine-
Montparnasse s'est couverte de drapeaux rouges (panta-
lons, pull-over, nappes, drapeaux tricolores tronqués
etc...!). Sans le C.A., aucun locataire n'aurait osé croire
à un tel déploiem'ent de rouge ; ce fut notre première
victoire.
— malgré les difficultés pour se procurer de l'argent
liquide, la quête que nous avons organisée rapporte un
peu plus de 200.000 AF. En effet, les gens ont confiance
en nous car ils nous connaissent et ils nous donnent plus
facilement qu'à des inconnus. Nous portons cette somme
aux grévistes du Tri Postal pour qu'ils la distribuent entre
les diverses entreprises en grève, mais ils nous informent
vite que leurs grévistes n'en ont pas un besoin urgent
et ils proposent de la donner chez Renault. Ainsi fût
fait!
liquide, la quête que nous avons organisée rapporte un
peu plus de 200.000 AF. En effet, les gens ont confiance
en nous car ils nous connaissent et ils nous donnent plus
facilement qu'à des inconnus. Nous portons cette somme
aux grévistes du Tri Postal pour qu'ils la distribuent entre
les diverses entreprises en grève, mais ils nous informent
vite que leurs grévistes n'en ont pas un besoin urgent
et ils proposent de la donner chez Renault. Ainsi fût
fait!
sont publiés le 1" et le 15 de chaque mois, par
des militants ouvriers, des étudiants et des intel-
lectuels qui ont participé au mouvement de Mai.
des militants ouvriers, des étudiants et des intel-
lectuels qui ont participé au mouvement de Mai.
Ils ne sont pas l'organe d'une organisation
politique et s'eifforcent de contribuer, sans ex-
clusive à gauche et dans un esprit unitaire, à la
connaissance et à la compréhension des événe-
ments de Mai et de leurs développements, les-
quels indiquent des voies nouvelles au courant
révolutionnaire en France, en Europe même.
politique et s'eifforcent de contribuer, sans ex-
clusive à gauche et dans un esprit unitaire, à la
connaissance et à la compréhension des événe-
ments de Mai et de leurs développements, les-
quels indiquent des voies nouvelles au courant
révolutionnaire en France, en Europe même.
Ils font appel à la collaboration de tous, tant
pour leur rédaction que pour leur diffusion.
Ne disposant d'aucune trésorerie, ils dépendent
entièrement de leur vente militante.
pour leur rédaction que pour leur diffusion.
Ne disposant d'aucune trésorerie, ils dépendent
entièrement de leur vente militante.
Des centaines de lecteurs devraient accepter
de diffuser autour d'eux 10 ou 20 exemplaires
de chaque numéro qui leur seraient envoyés ré-
gulièrement. Des centaines de lecteurs devraient
s'abonner.
de diffuser autour d'eux 10 ou 20 exemplaires
de chaque numéro qui leur seraient envoyés ré-
gulièrement. Des centaines de lecteurs devraient
s'abonner.
La correspondance, les commandes et le règle-
ment des sommes dues doivent être adressés au
nom de Marcelle FOURNIE, 80, quai de la Râpée,
PARIS (12e) - C.C.P. 9.70273 PARIS.
ment des sommes dues doivent être adressés au
nom de Marcelle FOURNIE, 80, quai de la Râpée,
PARIS (12e) - C.C.P. 9.70273 PARIS.
La suite reste à écrire...
La suite n'est pas écrite, nous sommes en train de la
vivre (questions économiques internes, discussions poli-
tiques, formation, bibliothèque, invitation de spécialistes,
réunion, etc...). Avec tous les autres, dans les usines,
dans les facultés, dans les quartiers, nous continuons le
mouvement.
vivre (questions économiques internes, discussions poli-
tiques, formation, bibliothèque, invitation de spécialistes,
réunion, etc...). Avec tous les autres, dans les usines,
dans les facultés, dans les quartiers, nous continuons le
mouvement.
Abonnez-vous
dès aujourd'hui
dès aujourd'hui
flous roulons
ptrcf <)"* nous t
et* trahis
RATP
nou* vou.
LES GREVISTES SE &ÀTTRONT
JUSQU'A LA VICTOIRE
JUSQU'A LA VICTOIRE
16
Category
Title
Cahiers de mai
Issue
no.3
Date
01/08/1968 to 01/09/1968
Keywords
Publication information
no.3