Action

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N1 18 • JEUDI 27 JUIN • PRIX MINIMUM : 0,50 F • Ça Journal a été réalteé au Sarvtaa daa Comltea d'Action, avec la soutien do l'UNEF, du SNESup et des Comités d'Action Lycé«na.
5HMTlft
UN
PED PLDS
ADROITE
Les désistements pour le deuxième tour sont main-
tenant connus. Pour en connaître les détails consultez
n'importe quel autre quotidien. Nous tâchons ici de ne
pas répandre d'illusions. Nous ne voulons pas jouer les
sectaires en braquant les projecteurs sur un événement,
laissant ainsi soigneusement dans l'ombre le reste de
l'actualité. Mais c'est un fait que pour ce qui nous inté-
resse, c'est-à-dire l'avenir, la grève-surprise, sans pré-
avis, des cheminots de Saint-Lazare en riposte à un
gaulliste à la gâchette facile est essentielle. Elle montre
que la combativité ouvrière demeure, dans une situation
où l'électoralisme des partis de gauche a permis à la
droite de s'offrir un succès facile.
Qu'avec la queue des grèves de la métallur-
gie (une dizaine de milliers d'ouvriers) la grève des
cheminots soit la seule, montre aussi que les directions
syndicales et politiques ne sont pas revenues sur ce qui
les a conduites à la défaite du premier tour : le refus
d'impulser l'action de masse. Au contraire le gouverne-
ment peut avoir au moins deux motifs supplémentaires
de satisfaction.
Le premier c'est de constater que le P.C.F., pour
justifier son échec, répand la thèse du complot gau-
chiste dirigé de l'étranger, thèse que même la D.S.T.
n'a pu alimenter.
Le deuxième c'est de constater que les mots
d'ordre adoptés pour le second tour marquent un nou-
veau glissement à droite du P.C.F.
En mars 1967, c'est Mitterrand qui parlait d'unir
les républicains de progrès. En juin 1968, c'est « L'Hu-
manité » qui se prononce pour le sursaut républicain.
En subordonnant tout au deuxième tour, le P.C.F. veut
faire croire que ce deuxième tour va tout régler. Comme
si, à lui tout seul, un bulletin de vote répond aux exigen-
ces de la situation. Comme si le premier tour n'avait
pas eu lieu.
Dans ce contexte, les initiatives organisées en
milieu universitaire ou par les Comités d'Action dans
les quartiers, prennent plus de valeur. Non parce que
dans une situation difficile elles permettent d'adopter
une attitude volontariste (on calme son inquiétude en
collant dix fois plus d'affiches) mais parce que dès
maintenant elles ouvrent, avec les habitants des quar-
tiers et les étudiants, la réflexion sur ce qui se passe
et expérimentent de nouvelles activités. C'est la meil-
leure riposte à la réaction car c'est ainsi que tous ceux
qui, depuis sept semaines, sont à nos côtés, pourront
s'organiser eux-mêmes.
L'instituteur
qui refuse
la répression
Quand les X candidats au cer-
tificat d'études de la salle dont
j'avais la responsabilité furent
assis (es), j'expliquai mon com-
portement : « Ce certificat, com-
me tous les examens, est un
moyen de sélection injuste et
injustifiable. Je l'ai toujours dit
et certains d'entre vous (1) sa-
vent que je n'utilise ni les notes,
ni les classements, ni même les
appréciations de valeur dans
ma classe. Vous savez sans
doute que si les étudiants se
sont révoltés il y a quelque deux
mois, c'est en partie à cause des
examens. Je ne suivrai pas cel-
les des consignes écrites qui
font de moi une personne irres-
ponsable. »
Voici, rapidement noté, ce
que nous avons fait.
Rédaction : Je lis les deux
sujets. J'explique ce qui est de-
mandé. Je donne des idées pour
la lettre et pour l'autre sujet en
proposant de choisir de préfé-
rence le sujet qui permet de
traiter un événement vécu (les
sujets sont très réalistes). Pour
le plan je suggère de procéder
ainsi : sur le brouillon, noter les
idées comme elles viennent, les
ordonner en mettant un chiffre
devant, rédiger entièrement in-
troduction et conclusion, rédi-
ger la copie définitive. Ce plan
est écrit rapidement au tableau.
Les enfants rédigent, je cons-
tate qu'aucun (e) ne fait de plan,
que certains (es) écrivent direc-
tement sur la feuille, que d'au-
tres font un brouillon complet.
J'aide un (e) candidat (e) qui
avait commencé à traiter les
deux sujets ensemble. En cir-
culant dans les travées, je fais
corriger des erreurs d'orthogra-
phe et supprimer des mots inu-
tiles. J'arrive à me faire une
idée du contenu de chaque
texte : aucun ne devrait être
noté moins de 5.
Dictée : Je rappelle ma posi-
tion : éviter que quelqu'un fasse
5 erreurs ou plus. Là, ma parti-
cipation sera d'autant plus
grande que le texte n'est pas
facile. En dictant, /'explique (es
mots inconnus, j'épelle une di-
zaine de mots. Je fais corriger
des erreurs et finalement, je
relis les X dictées en les corri-
geant moi-même de manière
qu'aucune ne présente plus de
3 erreurs.
Calcul : Ensemble, nous déter-
minons par la discussion la meil-
leure manière de conduire les
problèmes. Je m'assure que
chacun (e) peut commencer son
travail fructueusement. J'ai con-
seillé de faire les preuves des
opérations, dont le nombre m'in-
terdit de recompter chacune
d'elles. Je laisse les enfants coo-
pérer. Je réexplique en cours
de travail. Quand elles (ils) me
remettent leurs copies, je leur
dit ce qui est réussi.
Correction : La correction
étant organisée par un direc-
teur très bureaucratique, ma
marge d'initiatives était réduite.
Affecté (e) autoritairement à la
correction du calcul, j'ai essayé
d'avantager le plus possible les
candidat (e) s en notant, quand
cela s'avérait nécessaire, le plus
réussi du travail : résultats chif-
frés ou solutions rédigées. En-
suite, j'ai corrigé quelques dic-
tées : les copies étaient très
bonnes (0 ou 1 erreur), sauf deux
dont j'ai complété (3) certains
mots mal orthographiés pour
neutraliser le « couperet des 5
fautes ».
Avant l'épreuve de calcul, j'ai
rappelé mon option. J'ai dit que
je pensais que chacun de nous
était libre de dire ou taire ce que
nous avions vécu et qu'en ce qui
me concerne j'avais seulement
pris la responsabilité d'accorder
mes actes à mes paroles.
(1) Des élèves de l'école où j'exerce.
(2) Aucun document ne peut être tolé-
ré. Veiller à ce qu'il n'y ait aucune
tentative (sic) de communication entre
les candidats. Pendant chaque épreuve,
le surveillant doit rester au bureau le
plus possible et toujours (sic) garder
sous les yeux l'ensemble des candi-
dats. Ne pas s'occuper des sourds ou
myopes, les places ont été prévues à
I avance.
(3) Je signale aux candidat (e)s que
les copies rédigées au crayon s bille
bleu sont les plus faciles à « corriger *
ainsi.
DIMANCHE
LA CHAMBRE
TRICOLORE
Les désistements ne sont que
le reflet des résultats de diman-
che dernier. L'U.D.R. représente
seule le camp réactionnaire dans
243 circonscriptions ; elle est
présente dans 48 combats trian-
gulaires. Si l'on ajoute les 10
duels où c'est un Républicain
indépendant qui mène le combat,
les gaullistes sont présents dans
302 des 317 circonscriptions en
ballottage. Un os a été laissé à
11 P.D.M. et à 4 non-inscrits. En-
core faut-il remarquer que cer-
tains de ces P.D.M. sont très
modérés dans leur opposition :
M. Fontanet, par exemple, ancien
ministre de la Santé du général
de Gaulle.
Il peut y avoir dimanche pro-
chain une mobilisation d'absten-
tionnistes de gauche. Les diri-
geants gaullistes feignent de le
craindre. Ce déplacement en
tout état de cause ne pourra por-
ter que sur des éléments margi-
naux. Ce qui est en jeu c'est de
savoir si les gaullistes retrouve-
ront le nombre de sièges obte-
nus en 1962 (284), ou s'ils en
obtiendront plus : 300 ou peut-
être 320. Ce qui est en jeu, c'est
l'obtention, par les gaullistes de
stricte obédience de la majorité
absolue (244 sièges).
En tout état de cause la cham-
bre élue dimanche prochain sera
l'une des plus réactionnaires
élues en France depuis 1945 :
une chambre bleu blanc rouge.
Numériquement elle est dépas-
sée par la chambre de 1958,
mais politiquement elle présente
le double avantage pour la réac-
bre de ses sièges ; il était pra-
tiquement nul sous la législature
précédente. La guéguerre parle-
mentaire sera plus difficile; cela
n'empêchera pas les leaders de
l'opposition d'utiliser la seule
possibilité qui leur est laissée au
parlement depuis 1958 : parler.
Seul un recul très sensible des
communistes peut avoir des con-
séquences politiques : si les
communites ont moins de cin-
quante sièges, ils ne pourront
plus déposer de motion de cen-
sure ou menacer de le faire.
Les problèmes politiques de
fond qui se posent à la France
n'en seront pas résolus pour
autant. Les contradictions inter-
nes du néo-capitalisme ne dis-
paraissent pas par l'effet d'un
vote, si massif soit-il. Le débat
interne de la bourgeoisie fran-
çaise sur l'orientation de la po-
litique internationale peut être
masqué par la solidarité instinc-
tive du capital face au proléta-
riat, il demeure cependant. La
contradiction entre une politi-
que étrangère axée sur la con-
testation du leadership améri-
cain et une politique économi-
que d'intégration au marché
atlantique est inscrite dans les
faits.
Il faut être aussi imbécile que
M. Capitant pour s'imaginer que
la « participation » peut résou-
dre les problèmes sociaux.
M. Capitant est prêt à avaler
n'importe quelle couleuvre : pas
les travailleurs. Une majorité
réactionnaire, qui sera aussi
une majorité de réaction, peut
ro.n ut « ni
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tion que les forces de droite y
seront à la fois très massive-
ment représentées et très soli-
dement unies.
A part les intermèdes Bona-
partistes et Vichystes, jamais le
de l'ordre en France n'avait
été aussi largement unifié depuis
a révolution française. Il est
aussi important que ce regrou-
pement ait fait apparaître, à côté
du général de Gaulle, un leader
ncontesté : M. Pompidou. Cela
signifie que le processus engagé
depuis 10 ans par les gaullistes :
'unification du parti de l'ordre
dans une formation politique ca-
pable de survivre à son chef est
en passe de parvenir à son
terme.
Sur le plan politique le gou-
vernement va bénéficier dans les
mois à venir d'une marge de ma-
nœuvre supplémentaire. En poli-
tique internationale la critique
sera moins vive de la part de
ceux qui ont eu besoin du géné-
ral de Gaulle pour mettre au pas
a classe ouvrière. La bourgeoi-
sie atlantiste française abdiquera
ses velléités contestatrices pour
préserver sa bourse.
Sur le plan parlementaire, le
contrôle de l'action gouverne-
mentale, déjà minime sous la
précédente législature va dispa-
aître totalement. Le gouverne-
ment ne sera sans doute plus
ontraint d'utiliser des procé-
dures aussi manifestement anti-
démocratiques que les ordon-
nances.
L'opposition ne verra guère
son rôle diminuer avec le nom-
replatrer le système ancien, fa-
ciliter la récupération par le
capital des avantages acquis
par les travailleurs. Il faut autre
chose pour éliminer les insatis-
factions profondes qu'engendré
le régime capitaliste.
Même du strict point de vue
de la logique interne du sys-
tème capitaliste, les problèmes
sont loin d'être résolus. Ce n'est
pas parce que la majorité était
faible que le gaullisme n'a pas
résolu les problèmes de la spé-
culation foncière, de l'adaptation
de l'agriculture, de la Sécurité
sociale ou de la politique scien-
tifique. Ce n'est pas seulement
à cause de l'incurie des minis-
tres de l'Education nationale que
l'Université est totalement ina-
daptée aux besoins du système
néo-capitaliste.
Tous ces problèmes nécessi-
tent des choix politiques qui
n'ont pas encore été faits. Ils
mettent en jeu les contradictions
du système social. Les intérêts
divergents des groupes capita-
listes devront être conciliés et
chacun sait que ces arbitrages
ne se font pas sur la place pu-
blique. C'est dans l'ombre des
cabinets ministériels, au siège
des grands trusts capitalistes,
au cours de déjeuners d'affaires
que se prennent ces décisions
majeures. Le poids des contrac-
tants ne se pèse pas par mil-
lions de voix mais par milliards
de francs.
Pour la bourgeoisie, comme
pour les masses, les questions
décisives ne se règlent pas au
Parlement.
UNIVERSITÉS POPULAIRES
A PARIS
PREMIERS DÉPARTS
Malgré la grande confusion
qui préside au travail politique
dans les facultés et les écoles
occupées, malgré surtout les
attaques du pouvoir n'attendant
qu'un prétexte pour fermer d'au-
tres facultés que la Sorbonne,
le mouvement des Universités
populaires d'été commence à
devenir effectif. Les premières
sessions d'été ont commencé
dans certaines écoles et facul-
tés, tandis que des courants po-
litiques se dessinent quant à la
définition, au rôle et à l'organi-
sation de ces universités popu-
laires.
Aujourd'hui, nous commen-
çons à faire rapidement le point
sur des premières expériences.
D'autres tableaux beaucoup plus
complets paraîtront dans les pro-
chains numéros d' « Action ».
Cependant, dès à présent,
nous pouvons distinguer deux
tendances qui se font jour sans
que l'on puisse classer pour au-
tant telle faculté dans telle ten-
dance.
La première tendance met l'ac-
cent principal sur la cogestion
et la réforme de l'Université.
Dans ce cas, la mise au point
des structures paritaires, la
redéfinition des continus et des
méthodes de l'enseignement,
sont au centre du travail. Les
débats politiques ont leur place
mais viennent plutôt consacrer
le caractère « libre » de l'Uni-
versité que lui donner son sens
profond. On a affaire en quel-
que sorte à l'expérimentation
d'une université nouvelle telle
qu'on veut la voir fonctionner en
permanence. Bref, nous avons
affaire ici au courant réformiste
qui espère pouvoir promouvoir
une réforme démocratique de
l'Université — dans le cadre
social actuel — par les seuls
remèdes de la cogestion pari-
taire, l'autonomie et le libéra-
lisme.
La seconde tendance, au con-
traire, met l'accent sur l'utilisa-
tion de l'Université comme l'un
des lieux privilégiés de l'action
et de la réflexion politique dans
le prolongement du Mouvement
de mai-juin. La réforme de l'Uni-
versité a alors une fonction se-
condaire, mais surtout, aucune
illusion ne se fait sur les possi-
bilités réelles de démocratisation
de l'institution universitaire dans
le cadre du régime capitaliste.
En quelque sorte, les seules ré-
formes démocratiques possibles
sont l'installation d'une critique
permanente de l'Université, la
conquête de certains pouvoirs de
contrôle, droits aux débats poli-
tiques, contrôle des centres de
pouvoirs, etc.), le frein opposé
aux idéologies capitalistes sé-
crétées par l'institution. L'Uni-
versité populaire rentre dans ce
cadre. Pendant plusieurs mois,
elle se donne comme objectif de
stopper l'université officielle et
de promouvoir un centre démo-
cratique d'élaboration politique,
de dépasser les limites de l'uni-
versité en créant un lien perma-
nent de rencontre entre travail-
leurs et étudiants.
FACULTE DES SCIENCES
HALLE-AUX-VINS
Les premiers débats et sémi-
naires ont débuté depuis une
dizaine de jours. Ils s'organisent
en trois branches principales :
1) Expériences pédagogiques
et critique de l'Université. Tra-
vail organisé au niveau discipli-
naire comme au niveau inter-
disciplinaire. Expérimentation en-
tre étudiants et enseignants de
nouvelles formes d'apprentis-
sage scientifique.
2) Critique des sciences « ex-
tra-scientifiques ». Réflexion sur
l'idéologie bourgeoise en philo-
sophie, sociologie, économie po-
litique, etc. Des séminaires sur
« Epistémologie et matérialisme
historique » sont prévus en juil-
let et en septembre.
3) Débats politiques sur l'his-
torique du mouvement ouvrier
et sur le mouvement de mai-
juin 1968. Plusieurs universitai-
res ou non-universitaires parti-
cipent à ces débats.
Près de 2000 inscriptions ont
déjà été enregistrées pour les
mois de juillet, août et septem-
bre.
Enfin des contacts sont pris,
en ce moment, avec des sec-
tions syndicales et des associa-
tions comme l'« Union des
foyers des jeunes travailleurs »
en vue de la participation effec-
tive des jeunes travailleurs. En
ce sens aussi, des contacts sont
pris avec les auberges de jeu-
nesse et les cités universitaires
pour l'hébergement des partici-
pants.
Les renseignements peuvent
être pris au « Secrétariat inter-
facs •» (cf. plus loin), Halle aux
Vins, tour 23, 5e étage.
oOo
Les informations sur les au-
tres facultés sont pour l'instant
beaucoup plus fragmentaires :
SCIENCES POLITIQUES
Début juillet sont organisés
3 débats généraux qui seront
suivis d'un travail en commis-
sions étalé sur deux semaines.
Dates et heures de ces débats :
• Lundi rr juillet : Université
critique et expérimentale.
• Mardi 2 juillet : Economie et
entreprise (dans l'optique syndi-
cale et politique).
• Mercredi 3 juillet : Le Mou-
vement de mai-juin.
CITE UNIVERSITAIRE
Après la « libération » de plu-
sieurs pavillons, les membres de
la Cité Universitaire, réunis en
assemblée générale, ont mis sur
pied un « programme de travail
de l'Université critique populai-
re » principalement axé sur l'in-
ternationalisme (au niveau étu-
diant et ouvrier), l'impérialisme
et le néo-colonialisme. L'orga-
nisation même des débats et
séminaires ne nous a pas encore
été précisé.
BEAUX-ARTS
La commission « Université
populaire » a mis sur pied un
programme de travail axé sur
la Cité socialiste et comprenant
deux domaines :
• L'analyse et la critique de la
Cité dans la société capitaliste.
• L'analyse et la critique des
différentes expériences socialis-
tes.
Les travaux ont débuté depuis
samedi dernier. (S'adresser 14,
rue Bonaparte, Paris-6e).
CENSIER-SORBONNE
Le travail démarre lentement.
Depuis une semaine, différen-
tes commissions se sont réu-
nies. Des thèmes de travail,
comme l'alphabétisation des tra-
vailleurs étrangers, l'analyse du
Mouvement de mai-juin, l'auto-
gestion ont été adoptés.
Une première assemblée gé-
nérale est convoquée aujour-
d'hui jeudi, à 18 h., Centre Cen-
sier, Amphi A (8, rue de San-
teuil).
NANTERRE
La première journée de l'Uni-
versité populaire d'été se tient
à Nanterrs, le samedi 29 juin,
toute la journée.
INSTITUT DE GEOGRAPHIE
Les géographes de la rue
Saint-Jacques mettent sur pied
un programme d'études sur les
problèmes paysans, en relation
avec des associations syndica-
les ou autres du monde paysan.
Assemblée générale aujourd'hui
jeudi, à 14 h., à l'Institut.
COORDINATION INTER-FACS
DES UNIVERSITES
POPULAIRES
Depuis le 10 juin, un secré-
tariat inter-facultés s'est créé à
la Halle aux Vins, se donnant
pour tâche de coordonner et de
répercuter toutes informations
et initiatives sur les universités
populaires d'été de Paris comme
de province. Il édite un bulle-
tin : « Université d'été ». Il
assume des problèmes maté-
riels comme l'hébergement, le
transport, l'intendance, rapports
avec le C.R.O.U.S., la S.N.C.F.,
la R.A.T.P., la M.N.E.F.
Permanence : Halle aux Vins,
tour 23, salle 518 (5e étage),
quai Saint-Bernard. Téléphone :
336-25-25, poste 46-19.
LA BUREAUCRATIE
EST-ELLE
UN PROBLÈME ?
Beaucoup parlent aujourd'hui
de « l'échec du mouvement »,
comme s'il n'y avait eu qu'un
seul mouvement massif et orga-
nisé à qui l'on puisse reprocher
telle ou telle erreur dans la dé-
cision ou dans l'analyse. Le sen-
timent de l'échec provoque aus-
sitôt la recherche de justifica-
tions. Une des plus courantes
consiste à dire que des « bu-
reaucrates » auraient, presque
depuis le début, pris en main
le mouvement spontané, pour le
neutraliser, le ramener à des
formes traditionnelles, et finale-
ment le conduire à la défaite,
afin que eux, les bureaucrates,
conservent leurs fonctions et
leurs bureaux.
Cette accusation est certai-
nement valable — mais partiel-
lement — pour les organisations
qui ont connu une crise entre
dirigeants et base, tels que les
syndicats.
Or, les structures où précisé-
ment nous avons milité n'étaient
pas des syndicats mais des co-
mités de base sans hiérarchie,
des organisations groupusculai-
res qui n'ont pas connu de crise
intérieure, ou encore des équi-
pes autonomes comme le co-
mité de rédaction d'Action.
Ce qui caractérise ces struc-
tures, ce n'est pas d'avoir cher-
ché à diriger la base, mais au
contraire de lui avoir proposé,
souvent sans succès, des moda-
lités d'action et d'organisation.
On s'aperçoit que les accu-
sations de bureaucratie éma-
nent de chaque organisation et
s'adressent à l'ensemble des
autres. Ainsi chaque organisa-
tion fonde en partie sa cohé-
sion sur la répétition sénile
d'accusations stéréotypées, ja-
mais adressées directement,
jamais discutées publiquement.
Nous nous demandons ce que
recouvre pratiquement la dénon-
ciation de la bureaucratie. Il ne
s'agit pas ici de faire la théorie
de la bureaucratie, mais, pour
que cette théorie s'affine, de
rendre compte des débats con-
crets sur cette question.
Par exemple, Action est ré-
puté être fabriqué par une
équipe de bureaucrates d'an-
ciens mouvements universitai-
res qui auraient disposé d'un
capital et, profitant de leurs con-
tacts avec les militants, au-
raient augmenté ce capital en
vendant une information tron-
quée sur les luttes en cours. Ils
auraient pitoyablement échoué \
parce que, n'étant pas réelle- |
ment implantés dans les mas-
ses, ils n'auraient jamais pu don-
ner d'informations inédites. Nous
avons le regret de dire qu'Ac-
tion s'est lancé sans capital et
n'a pas fait de bénéfice. Quant
à fa nécessité de publier un
journal quotidien, elle est en
effet discutable. Action a déli-
bérément refusé, durant la der-
nière période, d'être un pério-
dique publiant des analyses cri-
trques.
Le comité de rédaction s'est
déclaré provisoirement incapa-
ble de fournir de telles analy-
ses et n'a pas voulu faire d'Ac-
tion une nouvelle feuille d'un
nouveau groupuscule apportant
sa modeste contribution à l'ac-
cumulation théorique.
Il a estimé qu'être dans la
masse, à son niveau, cela si-
gnifiait donner une consistance
au mouvement, par la publication
quotidienne d'informations même
incomplètes et de mots d'ordre
même à court terme.
Cela dit, le comité de rédac-
tion reconnaît la faiblesse de
son travail sur l'information et
l'interprétation à en donner. Il
est clair que nous n'avons pas
été présents sur tous les lieux
de lutte pour en témoigner. Il
est clair que nous avons adopté
paresseusement le même ton
victorieux pour parler de luttes
très différentes les unes des
autres, mettant sur le même plan
la bataille de Flins et la grève
de l'O.R.T.F. et glorifiant les
derniers ilôts de résistance au
moment où ils allaient tomber
sous la pression des directions
syndicales. Si l'on veut, il s'agit
de bureaucratie, dans la me-
sure où nous n'avons pas su
être assez mobiles, où nous
n'avons pas assez milité dans
les comités d'action, où nous
avons passé trop de temps à la
confection même du journal.
Passons ici sur les difficultés
matérielles. Il faut attirer l'atten-
tion sur ceci : la plupart du
temps, l'information est déjà
« bureaucratisée » avant de
parvenir à la connaissance des
rédacteurs. Nous savons tous
que les diverses coordinations
des comités d'action, trop sou-
vent accaparés par des tâches
de négociations, n'ont pas été
en mesure de rassembler une
information quotidienne sur les
activités concrètes.
Mais il y a pire : les militants
à qui nous demandons des in-
formations oublient que l'impor-
tant c'est de faire comprendre
par des exemples pratiques ce
qu'est une action à la base et se
bornent souvent à exprimer les
informations sous forme de di-
rectives politiques générales. Ou
bien encore, les militants trans-
mettent des informations de se-
conde en troisième main, sans
compter les faux bruits...
En un mot, Action a subi les
effets de notre inexpérience col-
lective à exprimer et faire cir-
culer démocratiquement les
idées et les informations.
L'exemple d'Action permet de
comprendre les autres formes
de « bureaucratie « dénoncées.
La bureaucratie n'est pas un
projet politique de gens qui
cherchent à conserver ou pren-
dre le pouvoir. Elle est le résul-
tat d'une impuissance. Nous
n'acceptons pas l'accusation de
bureaucratie portée contre les
équipes qui ont essayé de coor-
donner la lutte ou de suggérer
la création d'une organisation
révolutionnaire.
On peut constater qu'il n'y
a eu de manifestation de rue
que lorsque les « requins » et
les groupuscules en ont décidé
et y ont participé. Les provoca-
tions policières n'ont jamais pu
dévoyer réellement le mouve-
ment. Quand les groupuscules
se sont désunis dans la disso-
lution, il n'y a plus eu de mani-
festations, malgré l'opiniâtreté
d'une partie de la base. Le seul
reproche que l'on puisse faire
aux « bureaucraties » groupus-
culaires, c'est précisément de
n'avoir pas su conserver une
ligne d'action unitaire : mais
ceci est l'échec de tout un cha-
cun devant les difficultés de la
discussion créée par la répres-
sion gouvernementale et la tra-
hison de la gauche officielle. La
bureaucratie ce serait précisé-
ment d'agir sans tenir compte
de la situation actuelle des mas-
ses qui ont été engagées dans
la lutte. On ne peut oublier que
la structure des comités d'ac-
tion parcellise les luttes qu'elle
soutient. On ne peut oublier que
le triomphe de la droite aux
élections renforce notre isole-
ment. On ne peut oublier que,
si les étudiants continuent d'être
en vacances, les travailleurs ont
précisément repris le travail. On
ne peut oublier que les quel-
ques batailles que nous avons
gagnées se sont appuyées sur
l'alliance entre des courants di-
vers, entre une minorité radi-
cale et une majorité réformiste,
entre des étudiants et des tra-
vailleurs, chômeurs ou grévis-
tes, entre des prolétaires et de
petits bourgeois. Cette alliance
est rompue pour l'instant. La
minorité radicale n'a-t-elle pas
à la rétablir ? Il ne s'agit pas
ici de condamner les interven-
tions de caractère provocateur
telles que badigeonnage de bâti-
ments ou manifestations-surpri-
ses. Mais aujourd'hui ces inter-
ventions ne provoquent précisé-
ment aucun mouvement et n'ap-
paraissent que comme des sur-
sauts vengeurs.
Notre plus grand risque de
bureaucratisation ce n'est pas
de vouloir continuer, mais c'est
de devenir une minorité de per-
manents de l'agitation sans effet,
c'est de nous borner à bénéfi-
cier politiquement et... financiè-
rement du prestige des luttes
passées.
LE VRAI FESTIVAL
DU MARAIS
Une école en ébullition : les Arts
Appliqués ou de l'école maternelle à
l'Université internationale de libre ex-
pression.
Machiavélique, moi ? Le de Gaulle en
Napoléon placardé sur les murs de
Paris sort de l'atelier de sérigraphie
des Arts Appliqués comme en sortent
les affiches de l'Intersyndicale de l'O.R.
T.F. ; Clara Malraux aux prises avec de
jeunes élèves essayant de reconstituer
pour eux l'atmosphère de la guerre
d'Espagne, Daniel Guérin analysant les
raisons de l'échec des groupuscules du
Front Populaire, Lapoujade parlant de
la création artistique, des élèves de
l'école maternelle de la rue Paul-Dubois
se refusant le soir à quitter l'école,
des enfants puis des adultes se mettant
à dessiner par terre librement sur papier
Kraft dans le square du Temple, des
Arabes, des Noirs, des Juifs, des Es-
pagnols écoutant dans la rue, prove-
nant d'un magnétophone, leur musique
natale et se mettant à danser et à
s'exprimer, tels sont quelques-uns des
résultats d'une action culturelle perma-
nente entreprise par le comité élèves-
professeurs des Arts Appliqués.
Aujourd'hui, après la fermeture des
Arts Appliqués sur l'ordre de son ex-
cellence le ministre de l'Education na-
tionale, affolé de voir reprendre l'agi-
tation à la base, une fois remis en
place l'ancien ordre administratif, les
Arts Appliqués, ayant débarqué au C.
H.U. Saint-Antoine animent avec des
étudiants en médecine et des créateurs
la fête populaire du Marais, qui est
permanente, gratuite et circulante. Elle
est le lieu privilégié d'une rencontre
avec les habitants du quartier qui après
avoir été sensibilisés aux différents as-
pects de la création artistique abordent
spontanément les problèmes fondamen-
taux.
Dans le même sens, en liaison avec
l'U.N.E.F. et les Universités populaires
d'été, rejoints par des étudiants et des
travailleurs, des équipes itinérantes
vont parcourir la France, accueillies
par les pères aubergistes, les anima-
teurs de la Ligue de l'enseignement,
dans les maisons de jeunes.
Pour que cette dynamique s'accélère,
venez et participez : information, ac-
cueil des volontaires au secrétariat de
l'Université artistique d'été, U.N.E.F., 15,
rue Soufflet, Paris (5e).
BIENVENUE
A «LUTTE OUVRIERE»
Nous saluons la parution d'un hebdo-
madaire prolétarien paraissant le mer-
credi : « Lutte ouvrière » qui porte en
sous-titre : « Pour que mai 68 féconde
et régénère le mouvement ouvrier. •
Le numéro 1, outre l'analyse politique
de la situation, publie un panorama très
instructif : « La vérité sur la reprise
dans les entreprises. »
LES OUBLIES
DE SINCA ARGENTEUIL
L'usine Simca-Argenteuil qui compte
600 ouvriers environ n'a connu aucun
arrêt de travail pendant les grèves. Ce
fait s'explique, indépendamment de l'at-
titude traditionnelle de la direction de
Simca, qui licencie tout travailleur gré-
viste ou connu pour ses sympathies,
par la présence d'office de deux syndi-
cats (* indépendant • lié à la direction,
cadres, agents de maîtrise, etc., et
• autonome », noyauté et tenu en mains
soigneusement) non revendicatifs.
L'attitude de la Direction s'est préci-
sée à travers deux tentatives coordon-
nées de récupération du personnel.
Tout d'abord, les représentants de la
Direction, lors de la signature des
accords de Grenelle, proposèrent d'aug-
menter les salaires de 50 ouvriers à
désigner par les chefs de service, tout
en orchestrant auprès des syndicats une
campagne destinée à mettre en valeur
leur combativité, consignes que ceux-ci
s'efforcèrent de répercuter sans toute-
fois arriver à tromper quelqu'un.
De fait, 50 ouvriers bénéficièrent im-
médiatement de 15 % d'augmentation de
salaire.
La conséquence immédiate, non pré-
vue par la direction, est un méconten-
tement général (celui des 550 « ou-
bliés >).
Croyant pouvoir tirer parti de leur
habileté, les patrons organisèrent ensuite
les élections de délégués du personnel
et de délégués au Comité d'entreprise.
Deux listes sont en présence, celles
des syndicats « maison » évidemment.
Mécontents de l'attitude de leurs
• syndicats » qui ne se sont pas asso-
ciés au mouvement de grève, les ou-
vriers et les employés manifestèrent leur
refus de telles organisations et des
manœuvres patronales : pour la première
fois dans l'histoire des usines S;mca, une
majorité de votants dépose un bulletin
nul. Nouveau scrutin, hostilité renforcée.
Le Patronat n'avait plus alors qu'à
susciter dans un climat de répression et
de surveillance une candidature syndi-
cale (C.G.T. devrait en ce moment faire
l'affaire) afin d obtenir un nombre suffi-
sant de suffrages exprimés, au moyen de
multiples pressions, de contrôles et de
menaces.
LETTRE OUVERTE
AU PRESIDENT
DE LA RÉPUBLIQUE
FRANÇAISE
Monsieur le Président,
Etudiants québécois en France, nous
tenons à vous faire savoir que nous
sommes solidaires des étudiants fran-
çais et que nous les appuyons depuis
le début dans leur mouvement de
contestation.
Nous réprouvons les mesures répres-
sives qu'utilisé votre gouvernement tel-
les que les sévices policiers, les arres-
tations, les perquisitions, la dissolution
de mouvements contestataires, l'occu-
pation de la Sorbonne par la police, la
confiscation des bourses à certains étu-
diants de même que la récente expul-
sion d'un grand nombre de travailleurs
et d'étudiants étrangers.
Si une telle révulsion à la face de
la France doit constituer le prix de ce
que vous appelez la liberté, nous refu-
sons, en tant que Québécois, l'utilisation
que vous faites de nous quand il s'agit
d'alléguer votre volonté ou vos efforts
de libération.
En conséquence, nous laissons à vos
interlocuteurs québécois qui ne retien-
nent de notre lutte que l'aspect national
le soin de se porter garants de vos
propos.
Pour nous qui considérons surtout
l'aspect social de la lutte pour la libé-
ration du Québec, il ne fait pas de doute
que notre combat s'apparente à celui
des étudiants français et qu'il ne peut
s'inscrire que dans la ligne de la contes-
tation.
Hélène Allard. Josée Beaudet, Huguette
Beauséjour. Paul Bélanger, Alain Bordelais.
Micheline Brault. Paul Chamberland. Francine
Chartrand McKenziel, Lise Couvrette, Francine
Dansereau, Laurent Décarie, Paule Doucet.
Claude Portier, Anne Gagnon, Jacques God-
bout. Claude Heppell, Louise Jasmin, Irène
Lafleur, Marie Lavigne, Marc Lebe!, Suzanne
Legault Bélanger, Louis Maheu, Pierre Paquette,
Jean-Marc Flotte, Anne Préfontaine. Yves Pré-
fontaine, Marie Préve!. Martin Prével. Céline
Ouesnel Maheu, Robert Jasmin, Line Ross,
André Saint-Amand, André Smith, Ginette Tou-
rigny, Marie-Thérèse Vinet, Camille Limoges,
Jean Samson, Jean-Claude Cadieux.
LE ELIC-RECTEUR
Martin, soi-disant recteur de l'Univer-
sité de Caen, vient de faire une décla-
ration digne d'une anthologie des textes
du ministère de l'Intérieur.
Il se proclame ennemi de toutes les
violences, mais il ne réprouve que les
tôles froissées, la dépression nerveuse
d'un enseignant, les drapeaux arrachés
et mutilés, les graffiti sur les murs.
Mais Martin ne tarde pas à découvrir
son visage de flic : « C'est pourquoi je
demande que, pour restaurer la dignité
de l'Université, les graffiti soient entiè-
rement effacés par ceux-là mêmes qui
les ont tracés. S'ils n'étaient pas dis-
parus dans les deux jours, je me verrais
dans l'obligation de porter plainte à mon
tour auprès de la justice. Désormais,
toute nouvelle déprédation, tout acte
de violence, feront l'objet de poursuites
judiciaires, etc. »
Oh, le sale pion qui met bien en pra-
tique les principes de l'éducation ré-
pressive : le chantage, l'ultimatum, la
menace de punir I Demain, la punition
en soupirant de ne pas avoir été e-.
tendu.
Mais un sale pion dangereux, car déjà.
derrière lui, les C.R.S. polissent leur
matraques et le Parquet prépare ses
inculpations.
Une des premières réformes de l'en-
seignement, c'est d'empêcher que de,c
consciences aussi crasseuses que celte
de Martin ne puissent avoir aucune
chance d'y parader et de s'y exprimer
DES POLICIERS EN CIVIL
AGRESSENT LES
D1EEUSEURS D'ACTION
La police a arrêté mardi dans l'après-
midi, un camarade qui diffusait « Action «
sur le boulevard Saint-Michel. Une fois
dans le car, des inspecteurs en civil
l'ont frappé et ont déchiré les exem-
plaires du journal.
Emmené à Beaujon, il n'a été libéré
que mercredi dans la soirée.
Ce n'est pas la première fois que la
police s'en prend à des diffuseurs
d' « Action ». Lundi dernier, des poli-
ciers en civil les avaient agressés, tou-
jours sur le boulevard Saint-Michel.
Hier encore, des militants du Comité
d'Action Maubert avaient été arrêtés et
emmenés à Beaujon où ils sont restés
24 heures.
De telles mesures sont totalement
illégales : aucune interdiction ne frappe
- Action ., aucune loi ne s'oppose à la
vente des journaux sur la voie publique
Mais il est vrai que le régime gaulliste
ne reconnaît aux lois que les limites
qu'il veut bien leur donner. La légalité
républicaine, quelle foutais* !
LA REVELATION DE MAI
LES COMITES D'ACTION
DANS LES ENTREPRISES
Les comités d'action (ou de grève, ou de base, ou
d'information) ont été, on le sait, l'une des révélations
de mai. Que sont ces comités, qui regroupent-ils, quels
sont leurs objectifs maintenant que la grève est ter-
minée ? Quel fut, quel sera, que devrait être leur rôle
dans les entreprises où existent déjà des syndicats,
notamment la C.G.T. ?
Ce problème préoccupe les C.A. de toutes les
entreprises aux réunions desquels nous avons assisté.
Nous ne saurions le résoudre à la place des travail-
leurs. Mais nous pouvons poser le problème et exposer
les diverses solutions envisagées par eux.
Ce faisant, « Action » entend ouvrir un débat.
La question en débat dans les entreprises : s'organiser pour les batailles futures.
AVEC
OU SANS
LES SYNDICATS
— Début mai, j'ai pris ma
carte. Fin mai, je l'ai déchirée.
On est 80 dans notre atelier. On
s'est dit ; « puisque la C.G.T.
est incapable de résoudre nos
problèmes, on va les résoudre
tout seuls ». Le reste était fa-
cile. On a expliqué aux gars que
la C.G.T. faisait le jeu de la bour-
geoisie et qu'il fallait la détruire.
Le délégué, on ne l'a pas exac-
tement foutu dehors mais quand
il a dit : « Si vous voulez que
je m'en aille...? » on lui a ré-
pondu : « Salut ! »
C'est un membre de C.A. du
secteur automobile qui vient de
parler. Mais dans une autre
« taule » de la même entreprise,
le son de cloche est tout autre :
— Chez nous, on ne peut ral-
lier les travailleurs que sur des
problèmes d'horaires, de salai-
res : des problèmes de syndicat.
Donc notre C.A. doit passer par
le syndicat. D'ailleurs ce sont les
ouvriers syndiqués qui sont les
plus politisés. Et se couper de la
C.G.T., chez nous, reviendrait à
créer un autre syndicat, ce qui
diviserait les ouvriers.
Pourtant ce métallo, syndiqué
C.G.T., n'est pas du tout d'ac-
cord avec sa centrale.
— C'est justement pour ça
que nous (une trentaine de jeu-
nes), nous avons créé un comi-
té. La C.G.T. est trop molle. A
nous de lui demander des comp-
tes, de faire pression sur ses
délégués, en ayant la masse der-
rière nous. Quand tous les ou-
vriers se dresseront contre leurs
délégués, ils seront bien obligés
de les écouter.
Conclusion : il faut renforcer
la C.G.T., voire, y entrer en
masse et puis, une fois dedans,
« faire le ménage ». En un mot,
« se servir de la C.G.T. pour
prendre le pouvoir ouvrier »-.
L'ANTICHAMBRE
DE LA C.G.T.
Voilà donc deux positions ra-
dicalement opposées. Il y en a
d'autres. Dans une grande im-
primerie, un comité de grève est
né qui a réussi, pendant un
temps, à dépasser, déborder et
finalement neutraliser le puissant
collège des délégués.
Les membres de ce comité
étaient syndiqués (« par néces-
sité, parce que, chez nous, le
syndicat commande l'embau-
che »). Mais pas question, ici,
de noyautage : ils ont délibéré-
ment et ouvertement institué
dans leur usine un * pouvoir pa-
rallèle » à celui de la C.G.T.
Il arrive, certes, que des C.A.
tentent de noyauter le syndicat,
mais le danger numéro un, pour
eux, c'est d'être noyauté par lui.
C'est le cas du comité de grève
d'une entreprise automobile dont
les membres les plus actifs sont,
parait-il, le secrétaire de l'union
locale C.G.T. et trois autres mili-
tants. Dans une grande maison
d'édition, les tentatives de récu-
pération sont telles que de mau-
vais esprits ont pu dire que « les
C.A. y sont l'antichambre de la
C.G.T. ». Quant aux comités de
grève, et de quartier, de Nantes,
ils ont fait l'objet d'une récupé-
ration qu'ils ne sont pas près
d'oublier.
A vrai dire, les syndicats ne
sont pas seuls à noyauter. Dans
une compagnie d'aviation, les
comités sont systématiquement
noyautés, depuis la fin de la
grève, par les cadres anti-gré-
vistes.
Ce sont là des manœuvres
simples. Il en est de plus filan-
dreuses. Dans l'électronique, un
comité de base a été créé sur
proposition de la C.G.T. qui es
pérait ainsi « couler » les deux
syndicats rivaux. Résultat : la
C.G.T. s'est « coulée » elle
même et du comité de base
« syndical » est partie une véri
table organisation révolution
naire qui comprenait, comme
membres actifs, plus de 50 °/
des ouvriers, et se considérai
comme parfaitement capable de
faire tourner l'usine.
UNE SECTION
SYNDICALE BIDON \
Les délégués syndicaux de-
meurèrent au sommet — sommet
purement fictif puisque, dénués
de tout pouvoir — ils durent se
contenter de mener les négocia-
tions sous la dictée du comité
de base.
y a enfin, à Paris, un coin
jù l'on prépare activement la
nouvelle grève. La date en est
léjà fixée. Les jeunes ouvriers,
lui n'ont que cette idée en tête,
ont pris le parti d' « ignorer »
e problème syndical.
— Nous ne sommes ni pour,
ni contre, ni avec, ni sans les
syndicats, disent-ils. Si les syn-
diqués agissent avec nous, tant
mieux, sinon on s'en fout. On
estime toutefois qu'il serait ab-
surde de repousser de nos rangs
es cégétistes, ou syndicalistes
Drolétariens, ou qui que ce soit
d'autre, qui milite pour la pro-
chaine grève.
Dans un autre coin de Paris,
enfin, un comité en herbe a tout
simplement adopté une étiquette
syndicale à titre de « couver-
ture ». Comme il n'existait pas,
sur leur lieu de travail, de sec-
tion C.F.D.T., ils ont transformé
leur C.A. en « section C.F.D.T.
bidon ».
On voit que le problème des
rapports comités-syndicats ad
met, dans la pratique, un choix
éblouissant de solutions. Com-
ment choisir? C'est impossible
à dire. Tout dépend des condi-
tions locales de l'entreprise, de
la vigueur des comités, de l'im-
plantation relative des syndicats
et de quels syndicats il s'agit.
LA PEUR DU VIDE
CHEZ LES SYNDIQUES
révolutionnaires et les syndicats
qui le sont moins.
Les syndicats sont numérique-
ment les plus forts (800000
adhésions en un mois, estime-
t-on, malgré les cartes déchi-
rées). Leur organisation est un
tout aux yeux de ceux qui,
yant peur du vide, ne voient de
alut que dans une structure,
l'importe laquelle, fût-elle pour-
ie, et craignent de se couper de
a masse. (Pourtant, 20 % seu-
sment des salariés français sont
syndiqués !) On a vu, ainsi, au
mois de mai, des milliers de gens
quitter leur syndicat ou leur parti
jour se précipiter, tête baissée,
dans un autre. Même chez cer-
ains ex- ou non-syndiqués, la
crainte révérentielle du syndicat
Dersiste. Leur solution consiste
soit à saper leur propre syndicat,
soit à en créer un autre à partir
des C.A.
Aux premiers il faut demander
s'ils s'imaginent vraiment que
'appareil syndical, C.G.T. ou
autre, leur laissera faire la révo-
ution tranquillement dans ses
-angs.
La question leur a été posée.
Ils ont répondu que si la base
est derrière eux, la C.G.T. n'ose-
ra pas les étouffer, encore moins
les exclure. Est-ce si sûr? Déjà,
ces « révolutionnaires de l'inté-
rieur » avouent qu'ils ne peuvent
pas s'exprimer librement devant
leurs propres délégués C.G.T.
- Si on leur disait vraiment ce
qu'on pense, on serait aussitôt
viré, avec un bon coup de pied
au cul. »
Ils nourrissent toutefois l'es-
poir de « faire sauter Waldeck
Rochet » par la « pression de la
base ».
Leurs contradicteurs répon-
dent que si la C.G.T. est sensible
à de telles pressions, elle vibre j
plus volontiers avec sa base pé- ;
père et réformiste qu'avec ses
adhérents « gauchistes ».
N'empêche qu'il faut clarifie
les idées, déterminer si oui ou
non un modus vivendi est pos-
sible entre les nouveaux comités
Vi directeur de la publication :
Jean-Pierre VICIER
Grandes Imprimeries « Paris Centre »
142, rue Montmartr»
Paris (2-)
TravoH exécuté par des ouvriers syndiqués
CITROEN :
EN ATTENDANT
LA PROCHAINE
A Citroën, ce sont des gars
de la base, non syndiqués, qui
ont déclenché le mouvement,
comme dans beaucoup d'en-
droits.
Le C.A. Citroën a démarré
avant le début de la grève.
Son objectif est de regrouper
syndiqués et non-syndiqués
dans une organisation à la base
comme le C.A. de Rhône-Pou-
lenc.
— Il ne s'agit donc pas de
créer des contre-syndicats, des
syndicats révolutionnaires ?
— Non, le syndicat ne peut
mener que les luttes strictement
revendicatives, il ne peut être
que réformiste, qu'un organisme
d'intégration au capitalisme, le
terme même de syndicat révo-
lutionnaire est contradictoire. Il
s'agit, avec les C.A. d'entreprise,
de créer une organisation qui
ouvre des perspectives que per-
sonne n'ouvre. Le syndicat peut
faire des compromis. Les C.A.,
eux, doivent essayer d'étendre
la lutte, de passer à une grève
offensive contre le capitalisme.
Cependant, nous enverrons
quelques ouvriers dans le syn-
dicat comme informateurs.
— Les C.A. sont donc des
| embryons d'organisation politi-
que ?
— Ce ne sont pas effecti-
vement des organisations de
masse, mais des organisations
politiques non classiques, le
pendant des C.A. étudiants ou
de quartiers.
Ils ne regrouperont donc,
maintenant, qu'une minorité
d'ouvriers qui auront mené la
lutte cette fois-ci. Lorsque la
prochaine grève éclatera, les
C.A. devront se transformer en
comités de base capables d'en-
cadrer les ouvriers qui rentre-
ront dans la lutte.
— Quelle est leur base poli-
tique alors ?
— Comme les autres C.A. :
lutte contre le capitalisme et
nécessité d'une nouvelle orga-
nisation pour mener des luttes
jusqu'au bout. Nous nous réu-
nissons une fois par semaine
et nous avons une permanence
tous les jours dans une fac.
Pour le moment, il s'agit de tirer
les leçons des événements et
préparer les luttes à venir. Les
C.A. d'usine doivent se lier à
des C.A. de quartier, qui de-
vront les aider pour tirer des
tracts, prêter des locaux, etc.
— Combien êtes-vous et
quels sont vos rapports avec les
autres C.A. d'usine ?
— Nous n'avons pas de struc-
ture rigide et centralisée, et ce
n'est pas facile de dire combien
nous sommes. De plus, il y a
beaucoup d'ouvriers que nous
n'avons pu toucher depuis la
reprise du travail.
Nous sommes plusieurs di-
zaines sur Javel, Nanterre, Ba-
lard et Félix-Faure. Nous nous
sommes rendus compte aussi
de notre absence de coordina-
tion avec les autres C.A. d'usi-
nes. Les C.A. de la R.A.T.P., par
exemple, n'ont pas pu se coor-
donner durant la grève, car
c'était les pontes syndicaux qui
contrôlaient les standards télé-
phoniques et qui donc centra-
lisaient toutes les informations.
La prochaine fois, nous nous
emparerons aussitôt des stan-
dards.
Nous avons aussi créé un
comité inter-entreprises qui re-
groupe les différents C.A. :
Rhône-Poulenc, Citroën, SNEC-
MA, Nord-Aviation, P.T.T., R.A.
T.P., Le Printemps, et tous les
grands magasins.
Lors du prochain mouvement,
nous pourrons ainsi nous coor-
donner et lier nos luttes.
— Ne penses-tu pas qu'en
dehors de la période de lutte
intense, les C.A. risquent de se
disloquer ?
— Il ne s'agit pas effective-
ment de créer une organisation
de masse, celle-ci ne peut appa-
raître que dans les périodes de
lutte ouverte, et ce seront des
comités de base. Il s'agit main-
tenant de regrouper une mino-
rité qui politisera les problèmes
et qui sera l'embryon d'organi-
sation nécessaire lors de la
prochaine grève.
Pou IL ÊTRE
LES JE'(/Kl'ES .
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iofores,
SAMEDI 29 JUIN 1968
19 h. - 24 h.
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(Fac. Sciences)
LA PAROLE
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