Combat

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< COMBAT» ACCUEILLE DANS CE NUMERO SES CONFRERES
DU < CANARD ENCHAINE » ( pages 7, 8, 9 et 10 )
No 7425 Jeudi 30 Mai 1968
C OMBAT
de la Résistance à la Révolution
18, RPE DU CROISSANT. PARIS 2e TELEPHONE - CEN. 81-11 (CINQ LIGNES GROUPEES) 50 C.
LES DERNIERES
CARTES
• Ou bien Pompidou démissionne aujourd'hui
et de Gaulle tente un très difficile redressement
• Ou bien de Gaulle démissionne aujourd'hui et
Pompidou se pose immédiatement en successeur
• Ou bien le régime choisit la force contre les
grévistes
• P. M-F : je suis prêt
O ci Je ne refuserai pas les responsabilités qui pourraient m'être confiées par l'ensemble de la
gauche » déclare l'ancien Président du Conseil
• Giscard se prononce ce matin en faveur d'un nouveau gouvernement
0 Déclaration du Premier ministre devant l'Assemblée à 17 h 30
• A 18 h. place de la Concorde manifestation
gaulliste à l'initiative de l'VD Verne
• La lutte syndicale définitivement politisée
% La CFDT lance un appel à P.M.-F.
• La manifestation de la CGT a réuni plusieurs centaines de milliers de travailleurs sur des mots
d'ordre très durs
UNE INTERVIEW DE M. MICHEL ROCARD
SECRETAIRE NATIONAL DU P.S.U. (page 4)
Journal
île
Pari»
LES heures qui viennent seront décisives
dans la crise qui secoue la France depuis
bientôt un mois. Elles le seront paree-
qu'un en est arrivé à la limite du point de
rupture, que chacun des partenaires du drame
en est conscient, et que dans leur jeu il ne reste
plus beaueoup de cartes. Il reste les dernières,
qui sont toujours les plus fortes et qu'ils abat-
tront aujourd'hui ou demain.
D'abord le régime. Le régime, pour tenter de
survivre, va sans doute devoir immoler l'une
de ses deux têtes. La logique voudrait que ce
fût celle du Chef de l'Etat. Le mal est trop
avancé maintenant pour que la démission du
gouvernement Pompidou suffise à le résorber.
Dans les conditions actuelles, de Gaulle restant
à l'Elysée, la succession du Premier Ministre
serait inviable. L'impasse continuerait d'être
totale. L'intérêt des gaullistes, s'ils veulent gar-
der une chance de se maintenir au pouvoir, leur
commande d'autre part de sacrifier de Gaulle
à Pompidou si ce sacrifice permet à ce dernier
de se poser immédiatement en successeur du
général de Gaulle. La courte transition qui sé-
parerait la démission de celui-ci de l'élection
présidentielle verrait à la fois M. Pompidou
Premier Ministre en exercice et candidat à
l'Elysée, ce qui serait tout avantage. Mais cet-
te manœuvre, si elle était décidée, ne se heur-
terait-elle pas à l'opposition déterminée de ceux
qui estiment qu'il n'y a plus d'Etat et qui pos-
tulent le pouvoir ? Ce qui revient à se deman-
der dans quelle mesure les opposants sont dis-
posés à respecter la légalité. Car la combinai-
son dont on prête l'intention à M. Pompidou
serait légale, malgré son astuce.
Les opposants, ce sont d'une part les « révo-
lutionnaires », d'autre part la gauche tradition-
nelle. La gauche traditionnelle est très
tentée de prendre le pouvoir. Mais vi-
siblement cela l'ennuie de le prendre par des
voies illégales. Elle ne veut pas faire son 13
mai ni donner la partie trop belle au P.C. En
demandant à M. Mendès France de lui prêter
main-forte, ce dont elle avait besoin pour re-
dorer son blason et augmenter ses chances, elle
a étouffé ses derniers instincts révolutionnai-
res, si l'on sait que l'ancien Président du Con-
seil est très respectueux de la légalité.
A moins que... A moins que l'appel ne vienne
de la rue. Et une fois de plus on retrouve la
rue, et ses inconnues. Mais la rue aujourd'hui
n'est plus celle qu'elle était au début du mois
lorsque les étudiants et les jeunes travailleurs
l'envahissaient pour crier leur désir de rénova-
tion. Le contrôle de la rue est maintenant aux
mains des syndicats. Les « révolutionnaires »
sont devenus les grévistes. Le tout est de savoir
dans quelle proportion les travailleurs français
veulent aujourd'hui pousser jusqu'à son terme
la lutte politique, et si la démission du général
de Gaulle ne sera pas à leurs yeux une victoire
suffisante. Mais il est vrai qu'en la matière la
proportion n'est pas quantitative.
Au terme de cette analyse, il apparaît que
l'issue de cette crise appartient aux dirigeants
syndicaux. S'ils décident de mobiliser leurs
troupes pour appeler Mendès au pouvoir, c'en
sera fait de la Verne République. S'ils ne le
font pas, l'avenir de M. Pompidou a de grandes
chances d'être assuré, et la faillite de la gauche
traditionnelle sera consommée.
Philippe TESSON
St voici que de Gaulle sen eut
'auê. Est-ce une ultime tactique
in grand acteur qui déjà il y a
10 ont était « rentré dans son
village »... pour en mieux reve-
nir.
Durant ce temps l'Etat s'effi-
the. L'ordre ne règne que lors-
M force» officiellement dé-
iêt pour y pourvoir sont ab-
tte» &t la ftê et de la vue Que
Premier ministre dise sa pré-
'rence poitr le vote ouvrier à
'•in secret et celui-ci est aus-
16t rejeté far Jet intéressés. Les
' tissions ministérielles n'appor-
POUR EOMBLER LE VIDE
par Daniel MAYER
tent même pas ta aatis)action
qu'elles eussent suscité si elles
s'étaient produites il y a seule-
ment 2 semaines. Et le retour de
Cohn-Bena.it dépasse le plus sa-
voureux canular.
Il s'avère a l'évidence que les
'hommes Au régime ont accumulé
les impossibilités de leur succes-
sion. Enlisés dans leurs propres
contradictions ils ne peuvent ni
s'imposer ni partir dont des con-
ditions normales. Pour s'être ac~
commoaes du seut soutien d'un
homme, ils s'aperçoivent que leur
construction artificielle n'a rien
prévu pour assurer la nécessaire
relève. L'unique solution que de-
vrait leur dicter un véritable pa-
triotisme serait le départ conco-
mitant du Président de la Répu-
blique et du Premier ministre.
Qu'on ne me dise pas que ces
vacances ajouteraient au désor-
dre : le calme au contraire y ga-
gnerait. Qu'on ne dise pas non
plus que l'hypothèse n'est pas
prévue par les textes. Ecoutez à
ce propos ce qui (ut une grande
voix : s Quand les événements
parlent très fort et qu'on est
d'accord sur le fond, les procédu-
res comportent une flexibilité
considérable ». (De Gaulle — 19.
S. 68).
Ces propos qui voulaient ex-
pliquer une arrivée insolite jus-
tifient amplement un départ
souhaité.
Au surplus que ceux qui crai-
gnent ce qu'ils appellent l'anar-
chie se rassurent : le vide sera
rapidement comblé par ceux qui
instaureront l'ordre nouveau avec
l'assentiment de la nation.
Les noms actuellement pronon-
cés offrent la double garantie de
la création sociale et de la sauve-
garde des libertés publiques. Des
précisions demeurent à fournir
non sur lies intentions mais sur
les moyens employés pour attein-
dre des objectifs précis. Les dé-
clarations annoncées doivent nous
renseigner davantage à cet égard
dés aujourd'hui. On le voit, le
processus est largement engagé.
La crise politique
Manifestation silencieuse
de l'UD
à la CONCORDE
Le service de presse de l'OJ).-Vème Répuglique communi-
que :
€ Les comités pour la défense de la République invitent
tous ceux qui sont attachés t à la légalité, à la paix civile, aux
institutions », à une manifestation silencieuse, le jeudi 30 mai
à 18 heures à la Concorde.
€ Les profonds mouvements auxquels nous assistons et
dont on s'efforce de rendre responsable la République ne sont
gué les diverses phases d'un conflit entre deux tendances ré-
volutionnaire» ». déclare dans un communiqué l'association na-
tionale pour le soutien de Faction du général de Gaulle.
€ C'est ajoute-t-elle, la lutte entre le parti communiste
classique et ce qv,'on appelle maintenant les < Chinois ». Ce
n'est pas nouveau que le parti de la révolution se laisse tou-
jours déborder sur sa gauche. C'est ce qui arrive aujourd'hui
au parti communiste et à son satellite la C.G.T. ».
Après avoir affirmé que t les partisans d'une révolution
à la Mao Tse Toung, aidés par les anarchistes, se sont lancés
à l'assaut de toutes les institutions » et que « leur action aurait
été menée avec autant d'énergie contre un gouvernement du
front populaire », l'association souligne :
« Ce n'est pas M. Mitterrand, ni M. Waldeck Rochet, ni
U. Mendès- France, qui peuvent s'opposer à cette tentative. Ils
snt déjà dépassés et ne savent plus ce qu'Us défendent ».
« II n'y a qu'un homme qui puisse arrêter ce nouveau péril
au seuil de l'Europe, c'est le général de Gaulle ».
« Que tous ceux qui sont attachés à notre civilisation et
qui refusent l'anarchie ou la dictature chinoise se regroupent
derrière le président de la République française dans la lutte
pour la liberté des hommes >
Les trois textes régissant
le référendum du me;?
de juin
Le Journal Officiel ou 29 mai
publie les textes relatifs au réfé-
rendum du 16 juin ; ces textes
sont au nombre de trois. Le pre-
mier est une lettre de M. Pompi-
dou au président de la Républi-
que :
Monsieur le président,
« Conformément aux délibéra-
tions du Conseil des ministres de
ce Jour, j'ai l'honneur de vous
proposer, au nom du gouverne-
ment, dé soumettre au référen-
dum, en vertu de l'article 11 de
la constitution, le projet de loi
pour la rénovation universitaire,
sociale et économique.
« Je vous pris d'agréer, Mon-
iteur le Président, l'assurance de
mon profond respect.
Georges Pompidou ».
Le second est un décret signé
du général de Gaulle disposant
en son article 1er que c le pro-
jet de toi annexe au présent dé-
cret délibéré en conseil des minis-
tres après avis du conseil d'Etat,
sera soumis au référendum le 16
Juki 1968, conformément aux dis-
positions de l'article 11 de la cons-
titution », et en son article 2 que
« tes électeurs auront à répondre
par oui ou par non à la question
suivante : « Approuvez-vous le
projet de loi soumis au peuple
français par le président de la
République pour la rénovation uni-
versitaire, sociale et économique ?»
Enfin, le troisième texte est ce-
lui du projet de loi rendu public
hier par M. Georges Corse, mi-
nistre de l'Information.
Dans la presse
• A la suite d'une grève dé-
clenchée mardi, jrève ayant
interrompu la transmission
des dépêches.
Les différentes catégories
du personnel non Journa-
liste (cadres et non cadres)
de l'agence France Presse
ayant obtenu satisfaction
sur certains points priori-
taires de lenrae revendica-
tions ont décidé de repren-
dre le travail hier après-
midi.
Les revendications non
encore satisfaites font l'ob-
jet de négociations.
• Les journalistes de la région
Dauphiné Savoie et notamment
ceux du « Progrès » et du « Dau-
phiné Libéré », ont constitué un
comité de rédaction dans le but
(1) de faire pariciper tes repré-
sentante élus des différences ca-
tégories de personnel (cadres, em-
ployés, journalistes, livre) à lia ges-
tion des journaux et agences de
presse ; 2) d'appeler plus parti-
culièrement des représentants élus
à la conception dss journaux en col-
laboration avec les directions et
les cadres de rédaction ; 3) de
consulter de façon régulière les
lecteurs de tous horizons.
Par ailleurs, une société de ré-
dacteurs a été constituée par les
journalistes de « Paris Match »
réunis en Assemblée Générale.
• Le Comité de presse du Comi-
té d'action des étudiants en mé-
decine communique :
« Appel à toutes les sages-fem-
mes àe France : dans le cadre
de la réforme médicale actuelle,
leur assemblée générale concer-
nant la profession de sage-femme
aura lieu le 31 mai 196S à 15 heu-
res à l'ancienne faculté de Méde-
cine de Paris, rue de l'Ecole de
Médecine-
• La fédération des conseils de
jiarents d'élèves que préside Me
Cornée, a reporté à une date ulté-
rieure son congrès qui devait se
tenir à Nice à la Pentecôte.
Les rapatriés
revendiquent aussi
La Fédération Paris-Nord des
Français Rapatriés (1) nous a
fait parvenir un communiqué signé
par MM. Marcel Driot, Jean Char-
les Isselin, Dominique Zattara et
le Dr Romeo, dans lequel elle pro-
clame sa solidarité avec les agri-
cuteurs rapatriés qui viennent
d'envahir la préfecture de Toulou-
se pour obtenir un moratoire pour
leurs prêts.
« Elle souligne également que la
ptus élémentaire justice ordonne
Pamnistie générale et l'indemnisa-
tion totale- Elle se tient prête à
discuter avec les pouvoirs publics,
en accord avec la Fédération du
Sud et du Sud-Est des Français
rapatriés, le FNR de Lyon et le
RANFRAff de Toulouse, des me-
sures propres à satisfaire ces deux
revendications fondamentales des
rapatriés ».
(1) 30, rue Notre
Victoires (LOU. 0851)
Dame des
REACTIONS ET PRISES DE POSITION
Une mise en garde du Club
Jean Moulin contre
les risques de pouvoir
autoritaire
Le club Jean Moulin a précisé
hier sa position en ces termes :
« Le maintien au pouvoir du gt-
néral de Gaulle et de son gouver-
nement conduit infailliblement
désormais a une situation insur-
rectionnelle qui, à son tour, ris-
que d'amener un pouvoir autori-
taire fondé sur la peur.
A ce jour, il n'y a pour la Fran-
ce, considérée tant en elle-même
que dans ses responsabilités vis-
à-vis de l'Europe, qu'une seule
issue raisonnable :
- rabandon Au pouvoir par le gé-
néral de Gaulle selon le» voies lé-
gales,
- la constitution d'un gouverne-
ment provisoire qui symbolise le
rassemblement de la nation au-
tour de la gauche unie.
- forganisation par ce gouverne-
ment provisoire tf'élections géné-
rales pour un président de ta 1U-
puTblque et pour un parlement.
- la mise en route par ce gouver-
nement provisoire d'un premier
train de réformes répondant aux
aspirations les plus profondes des
travaillews et de la jeunesse et
visant plutôt une transformation
de la osciété française que la dis-
tribution irresponsble d'avantages
matériels dont certains pourraient
rapidement se révéler illusoires »
M. Jacques SOUSTELLE :
« Partez mon général »
« Partez, mon général, c'est le
dernier service que vous puissiez
rendre à la France ». Telle est la
conclusion d'une déclaration de
M. Jacques Soustelle publiée Mer
à Lyon. è
« Dix ans d'un pouvoir autori-
taire tans contrôle et sans limites
aboutissent sous nos yeux à un
chocs sans précédent, écrit U
Soustelle.
« II faut donc changer de poli-
tique, et pour cela, d'abord chan-
ger d'équipe. Celle qui a accaparé
le pouvoir depuis dix ans s'est dis-
créditée. Le chef de l'Etat, ayant
cessé d'être un arbitre national
n'est plus que le leader et le re-
présentant de cette équipe. L'inté-
rêt du pays exige son départ.
€ Avec sagesse : c'est-à-dire d'a-
bord revenir à l'exercice normal de
la loi constitutionnelle, mettre fin
à l'arbitraire, ouvrir la voie de la
reconciliation des Français, don-
ner la parole au pays par de nou-
velles élections présidentielles et
législatives conduisant à la réno-
vation dans l'ordre républicain.
€ Avec générosité : car il est
temps de reconnaître que la jeu-
nesse, inquiète à bon droit devant
favenir que lui prépare une société
sclérosée, et le monde du travail,
fruste de sa part légitime dans le
•progrès économique, doivent trou-
ver leur juste place dans les nou-
velles structures de la nation »
Me Isorni : soutien
à Mitterrand
Me Jacques Isorni, ancien dé-
puté, a remis à la presse, dans
les couloirs du Palais-Bourbon,
une déclaration par laquelle il se
déclare « convaincu que le pro-
cessus entamé par François Mit-
terrand est le seul qui, convenant
a la situation actuelle, permette
à la nation de sortir du chaos
ou l'homme néfaste l'a plongé
avant de partir pour toujours. Les
paroles qu'il a prononcées sur la
liberté, la justice et la réconcilia-
tion nationale, doivent constituer
une garantie. L'ordre n'est com-
patible qu'avec la justice et la
liberté ».
M. Isorni ajoute :
« Je suis également convaincu
que Pierre Mendès-Franie est
qualifié pour être le Premier mi-
nistre d'un gouvernement qui gé-
rera la France Jusqu'aux prochai-
nes élections. L'un et l'autre n'ont
aucune responsabilité personneKe
dans la saisie du pouvoir par
Charles de Gaulle il y a dix
ans x.
Enfin J£. IsornS déclare que
lors de rélectk» présidentielle,
« certaine qui, par action, omis-
sion ou défaillance, portent une
responsabilité écrasante. avaient
le front de se présenter en sau-
veurs », il serait candidat < sans
autre ambition que d'avoir les
moyens de dire à ce grand peu-
ple les vérité» dont 11 a soif parce
qu'on l'a gorgé de mensonges »•
Appel du groupe d'action
municipal de Grenoble
à PJW.-P.
M. Hubert Dubedout maire de
Grenoble, et le groupe d'action
municipale de la ville ont publié
un communiqué dans lequel ils
constatent que ta gravité de la
crise sociale, économique et poli-
tique que traverse actuellement la
France a été provoquée par la
« carence » du gouvernement. Re-
grettant rimpasse dans laquelle
ont mené les négociations entre
les syndicats, le patronat et le
gouvernement, inquiète du vide po-
litique et du manque de solution
de rechange, faction municipale
et le maire de Grenoble estiment
que :
f Le gouvernement paraît cha-
que jour de plus en plus incapa-
ble d'apporter une solution aux
problèmes posés par les étudiants
et les salariés et que, dans les
circonstances que nous vivons, il
serait dangereux d'entraîner les
Français dans un référendum qui
ne répond pas aux problèmes po-
sés ».
« En conséquence, te groupe
d'action municipale demande au
président Pierre Mendès-France,
député de gauche, de préciser
dans quelles conditions il pourrait
envisager de constituer un gou-
vernement de transition qui ré-
ponde aux aspirations profondes
qui se sont révélées dans le pays ».
L'« Humanité » répond
au P.S.U. : « La luttte
sociale est affaire
sérieuse »
Le P.S.U. ayant déclaré que les
événement montraient :
c nmpujssance croissante du ré-
gime eaulliste et de la direction
communiste à faire rentrer les cho-
ses dans l'ordre et à sauver le
gouvernement, « l'Humanité » ri-
poste vivement. L'organe commu-
niste écrit sous le titre : « les
Diviseurs » : c Le P.S.U. se vent
socialiste. Mais an lieu de contri-
buer à ouvrir la voie au socia-
lisme, il tente de dévoyer le mou-
vement actuel vers nne issue peu
propice à des mesures vraiment
démocratiques. (...)
« Le P.S.U. se veut unitaire.
Mais, au lieu de contribuer à ras-
sembler contre le gaullisme, tou-
tes les forces nécessaires à une
victoire sur lui, il s'agite pour
les diviser. (...)
c n est inutile de lui conseiller
la modestie : le P.S.U. en est in-
capable. Mais U est utile de faire
observer à ceux que son tapage
pourrait impressionner, de -leur
LE CREPUSCULE DES REGENTS
par Jacques-Arnaud PENENT
Le Régime a vécu. Sa gran-
deur n'est plus qu'un mon-
ceau de gestes et de phrases.
On n'enlève pas les poubelles...
pour l'instant ! De manœu-
vres en démissions, le corbil-
lard pompidolien se traîne. De
négociations en Indécisions, la
gauche classique demeure à la
traîne. De manifestations en
propositions, le Mouvement
prouve sa force mais aussi,
regrettons-le, une certaine
incapacité à vouloir s'organi-
ser.
Et pourtant, jamais situa-
tion n'aura été aussi favora-
ble à l'instauration du socia-
lisme, à la création d'une for-
ce nouvelle l'exprimant.
Pour l'heure, le départ de
de Gaulle et l'effondrement
le son Régime s'imposent et
nous imposent de refuser no-
tamment son pseudo-référen-
dum qui connaîtra le sort de
la session de juin du bac 6S.
Par contre, les masses ayant
balayé le Régime, des élec-
tions générales ne sauraient
nous déranger, sûrs que nous
sommes de la victoire.
De même, contrairement
aux citations dénaturées de
V « Humanité » me concer-
nant, je ne pense pas que
nous devions chercher un
Sauveur Suprême, un autre.
Les travailleurs et les étu-
diants expriment une volonté
qui se passe fort bien de tra-
ducteur. La rue parle clair.
Par contre, ie ne le cache
pas. un gouvernement popu-
laire, enraciné dans les mas-
ses et contrôlé par elles dans
son oîuvre révolutionnaire, un
tel gouvernement aurait, sans
nul doute, l'appui de l'ensem-
ble des travailleurs.
Le redouter ou le nier re-
vient d s'enfoncer dans un
nihilisme sans rivages. Ainsi,
l'on parle de Mendès, Mitter-
rand, Rocard, Barjonet ou un
autre, qu'importé I L'impor-
tant reste l'instrument popu-
laire de cette Révolution, l'im-
portant reste la forme nouvel-
le du pouvoir des travailleurs
mais aussi l'esprit de conquê-
te préservé, mais enfin le
programme capable de répon-
dre à nos aspirations révolu-
tionnaires. Unis et résolus,
nous vaincrons. Nous, je veux
varier du Front Socialiste
faire observer fraternellement que
la lutte sociale est nne affaire sé-
rieuse et que, le P.S.U. y parti-
cipe de telle manière que le gaul-
lisme y trouve son compte... »
J.J.S.S. : « de Gaulle
n'est plus de son temps »
M. J.J. Servan-Schreiber lor»
d'une Interview consacrée à la
crise française et publiée par
« Life » a notamment déclaré à
propos du général de Gaulle :
« H possède une remarquable
intuition. Il a compris beaucoup
de choses et il a lancé beaucoup
d'idées qui, l'histoire te prouvera
sont justes (...). Mais l'essence du
gaullisme, 'ces* le monologue et
ce qui croule en ce moment mê-
me, c'est l'idée d'une société gou-
vernée par le monologue. De Gaulle
est une ambiguïté. Historiquement,
son message restera valable, mal»
seg méthodes sont d'un autre âge.
Quand s'en rra-t-11 ? Personne a*
le sait - mate déjà 11 n'est plut
de ce temps. (...)
« De Gaulle a toujours fait pas-
ser, avant tout, la politique étran-
gère (...). Mais en même temps
que de Gaulle pressait tes getm
des autres pays de changer chez
eux les choses, il ne discernait paj
qu'il avait le même problème chea
lui (...).
« De Gaulle croit qu'il peut dé-
cider quand 11 parle. Or te sujet du
mécontempnt fondamental de cet-
te révolution, c'est Justement con-
tre l'Idée qu'un seul peut décider
de tant de choses qui concernent»
tant d'hommes. Tout te monde
veut avoir part au débat. Ceci est
contraire au tempérament de de
Gaulle (...).
M. Servan-Schreiber a ajouté :
à propos de la crise actuelle :
« Envoyer la police contre les
étudiants. C'est à partfir de ce
moment que les choses ont échap-
pé au contrôle. Sans la ponce,
nous aurions assisté à une évola^
tion plus progressive, pas une ré-
volution. Mais on serait finale-
ment arrivé au même point. (...) »
La convocation !
des institutions ]
républicaines souhaite un
« référendum de Jeunes »
Dans une déclaration à la pres-
se faite hier à l'issue de la réu-
nion du secrétariat de la. conven-
tion des institutions républicaines
dont Ils sont respectivement dê-i
légué général et secrétaire géné-
ral, M-M Charles Hernu et Louis
Mermaz demandent au gouverne-
ment de permettre aux jeunes
qui auront 21 ans au 16 Juin
(veille du référendum), de pou-
voir s'inscrire exceptionnellement
sur les listes électorales.
Ils réclament, d'autre part,
l'inscription d'urgence à l'ordre du
jour de l'Assemblée, de la propo-
sition de loi de la FGD6 tendant
à fixer à 18 ans l'âge de la ma-
jorité civile et de la majorité
électorale.
Si ces demandes n'étalent pas
satisfaites, la convention des ins-
titutions républicaines souhaite
« que la ieunesse consciente de
ses responsabilités. prenne en
main la mise en place du réfé-
rendum des Jeunes dans le cadre
de leurs organisations respectives
(UNEF, CGT, CFDT CGT-FO
FEN, CNJA, mouvements d'édu-
cation populaire, scoutisme etc..)'
Une bombe au siège
de « La Nation »
Une violente explosion a secoué
hier matin aux environs de 6 heu.
res 30 l'knmeuble du 81 de la
rue de Lille où sont installés, au
rez de chaussée, les bureaux de
la rédaction du journal « La Na-
tion ».
L'engin qui a fait explosion
avait été placé dans le couloir de-
vant la porte qui donne sur une
succession de bureaux et sur la
salle de rédaction du Journal.
L'explosion, oui a été très vio-
lente, a soufflé cette porte d'en-
trée - en même temps crie celles
des appartements donnant sur
trois étages sur la cage d'escalier
- et a provoqué de nombreux dé-
gâts dans plusieurs bureaux, mais
la grande salle de rédaction n'a
pratiquement pas été touchée.
Tous les bureaux étant déserts
à cette heure matinale, il n'y a
pas eu de blessés. Les dégâts ma-
tériels, selon une première esti-
mation, se monteraient à plusieurs
millions d'anciens francs.
Le laboratoire municipal a qui
ont été transmis les débris de la
bombe n'a pas encore déterminé
la nature de l'engin explosif.
Jeudi 30 Mai 1968
COMBAT
M. POMPIDOU SERA-T IL CE SOIR CANDIDAT
A LA PRESIDENCE DE LA REPURLIOUE ?
Désabusé, las, le général de Gaulle confia à M.
Georges Pompidou qu'il était vain de réunir un
Conseil des Ministres dans les circonstances actuel-
les puisque ses décisions seraient pratiquement sans
effet Le Chef de l'Etat exprima à son Premier Mi-
nistre l'opinion selon laquelle son maintien à la
Présidence de la République ne pouvait désormais
qu'hypothéquer une solution pacifique à la crise ac-
tuelle : de Gaulle laissait entendre à M. Georges
Pompidou qu'il était prêt à démissionner.
C'était hier matin, peu de temps avant l'ouver-
ture du Conseil des Ministres. Mais l'inattendu vint
alors de la part du chef du gouvernement : « Don-
nez-moi 48 heures et je vous suggérerai une solu-
tion que vous pourrez alors accepter ou refuser »,
affirma-t-il en substance au Chef de l'Etat. Ce der-
nier prit alors la décision de reporter à cet après-
midi le conseil des ministres et donna, d'une maniè-
re suspensive, « carte blanche » à M. Georges Pom-
pidou puis s'envola à destination de Colombey-les-
Deux Eglises.
Dès lors s'esquissait rapidement la tactique du
Premier Ministre : agir sur l'opinion publique, pui-
ser dans la base gaullste liée à son passé dans la
Résistance les éléments capables d'assurer une pré-
sence physique lors d'une manifestation de masse
dans la capitale. D'où la présence à l'Hôtel Matignon
de M. Sanguinetti, expert dans les domaines que
l'on sait. D'où, en réaction, l'appel de Jacques Sous-
telle : « Partez mon général, le gaullisme est pas-
sé... » D'où l'annonce de la manifestation « popu-
laire » de cet après-midi place de la Connorde, au
moment même où le Premier Ministre, de l'autre
côté du pont sur la Seine prononcera une déclara-
tion dans l'hémicycle du Palais-Bourbon placé ain-
si sous la protection de la manifestation gaulliste.
Une très vive activté n'a cessé de régner hier rue
de Solférino. Un appel aux a Comités de Défense de
la République » a été lancé, îl s'agit d'organisations
gaullistes. En fin d'après-midi les « Jeunes pour le
Progrès » ont envoyé un télégramme au Général à
Colombey : « Nous voici, mon général ».
Voilà pour l'aspect populaire de l'entreprise déci-
dée par le Premier iiVInistre.
Sur le plan politique, M.G. Pompidou a reçu hier
après-midi et conjointement les leaders de l'U.D.
Verne et des giscardiens. M. Valéry Giscard-D'Es
taing était absent. Ses interlocuteurs ont trouvé un
Premier Ministre à l'âme de Chef d'Etat décidé à se
battre et à combattre.
Voici le schéma envisagé : si le général de Gaul-
le remet sa démission cet après-midi lors du Con-
seil des Ministres, le Président du Sénat assure l'in-
térim mais le gouvernement Pompidou, selon la
constitution, demeure en place. Nous sommes en
mesure d'assurer que M. Pompidou rendrait alors
publique, dans cette hypothèse, sa candidature à
l'Elysée. Il n'y aurait donc pas de vacance du pou-
voir et la déclaration que fera ce matin M. Giscard
d'Estaing « sur les mesures à prendre pour permet-
tre à la majorité du peuple français d'exprimer dans
l'ordre sa volonté réelle » deviendrait sans objet.
Sefon nos informations, l'ancien ministre des Fi-
nances se bornerait en effet à souhaiter la forma-
tion d'un nouveau gouvernement et non pas une
élection présidentielle.
La procédure que choisirait ainsi M. Pompidou
bloquerait le « processus » envisagé par M. F. Mit-
terrand car dès acquise la démission du général de
Gaulle il ne peut plus y avoir de motion de cen-
sure et le gouvernement Pompidou resterait en
place de droit jusqu'à l'élection présidentielle.
Cette procédure cependant accepte le risque cal-
culé d'un affrontement qui peut être dramatique.
Hier M. Lecanuet avait affirmé son accord pour
la constitution d'un a gouvernement de salut pu-
blic » dirigé par Pierre Mendès-France et composé
« d'hommes de progrès non inféodés à des partis
politiques ».
M. Pierre Mendès-France, devant le groupe FGDS
à l'Assemblée Nationale a déclaré que c'était toute
la gauche qui devait participer à un nouveau gou-
vernement. « Ce qui est important ce n'est pas un
problème d'hommes, mais de savoir ce que fera
cette équipe qui permettra la reprise du travail ».
L'ancien Président du Conseil envisage donc la
constitution de ce gouvernement avant la fin de la
grève. La manifestation de la CGT, hier à Paris, al-
lait dans ce sens. Au sein de la FGDS l'accord est
maintenant unanime.
Entre la thèse que s'apprête à mettre en applica-
tion M. Pompidou et celle incarnée par M. Mendès-
France « prêt à pédaler avec Mitterrand sur le
même tamden » il y a un fossé qui risque d'être ce
soir une barrciade sanglante.
C'est peut-être la raison qui finalement pourrait
conduire de Gaulle à préférer se séparer de son
Premier Ministre dès aujourd'hui, mais dans ce
cas on voit mal quel pourrait être le successeur dé-
signé de M. Georges Pompidou à l'Hôtel Mati-
gnon...
Jean-Claude VAJOU
P.M-F : Je ne refuserai pas les responsabilités qui pourraient m'être confiées par l'ensemble de la gauche
x Je ne refuserai pas les respon-
sabilités qui pourraient m'être con-
fiées par l'ensemble de la gau-
che ». a affirmé hier soir M Pier-
re Mendès-France. dans une dé-
claration faite au Palais Bourbon
devant les journalistes parlemen-
taires.
Cette déclaration faisait suite à
un entretien qui s'était déroulé
pendant plusieurs heures entre M.
Pierre Mendès-France et les prin-
cipaux leaders de la Fédération :
MM. François Mitterrand, Guy
Mollet. René Billères et Gaston
Deffere.
« La Journée a été marquée par
toute une série de nouvelles ou
d'incertitudes. Nous ne savons plus
très bien où en est le régime, nous
ne savons pas s'il y a, encore un
gouvernemen1: et nous ne connais-
sons ni ses intentions ni ses déci-
sions », a ajouté M. Mendès-Fran-
ce.
« La longue conversation de tra-
vail que j'ai eue avec les diri-
geants de la FGDS devait tenir
compte de ces incertitudes. Nous
avons exploré toutes, les hypothè-
ses et constaté sans surprise, que.
quels que soient les événements des
prochains jours, notre réponse
conduirait toujours à la création
d'un gouvernement de transition.
« Cette solution, a "dit M. Men-
dès-France, est ceUe que l'oppo-
sition de gauche devait mettre en
avant ».
« Mais, a-t-il ajouté, il faut que
nous soyions tous d'accord sur oe
que devra faire ce gouvernement.
C'est là-dessus que nous avons
travaillé très sérieusement.
Nous avons tous compris que ce
gouvernement de transition devrait
rr.énager. à travers les problèmes
actuels, un passage cohérent pour
garantir les nécessaires réformes
de structure. Mais ce gouverne-
ment n'aurait aucun sens s'il n'ob-
tenait pas la confiance de tous
ceux qui ont manifesté leur op-
posU'^n -n régime et il est évi-
dent, a-t-il ajouté, que les forces
vives de la nation doivent tou-
tes être réunies demain pour re-
construire, comme l'a dit M. Mit-
•p'-Tind « sans exclusive et sans
dosage ».
« ~"out ce qui oppose ces forces
vives, a-t-il dit, est néfaste et
bMtmable pour l'avenir. Aucun de
nous d'ailleurs, a ajouté M. Pierre
Mendès-France n'a ressenti le be-
soin, étant donné la gravité de la
situation, d'évoquer des questions
de personne. Pour ma part, j'ai
été touché que M. Mitterrand met-
te mon nom en avant. Il est évi-
dent que mon concours est acquis
aux hommes de gauche, et que Je
ne refuserait pas les responsabilités
qui pourraient m'être confiées par
la gauche ».
En ce qui concerne le gouver-
nement de transition, 11 s'agira,
selon M Pierre Mendès-France,
non pas d'un gouvernement neu-
tre, mais de créer un gouverne-
ment de mouvement orienté vers
une société plus juste et plus so-
cialiste. « II devra prendre des dé-
cisions immédiates dont nous avo- -à
parlé cet après-midi et dont nous
continuerons à parler dan? les
prochains jours »
« En nous plaçant face aux vraies
difficultés, a conclu l'ancien pré-
sident du Conseil, nous faisons le
même genre d'effort que celui des
jeunes, des grévistes et des chô-
meurs ».
M. Mendès-France a enfin reaf-
firmé que la rencontre avait été
sérieuse « Nous ne nous sommes
pas dissimulés les difficultés Nous
partions le conceptions qui n'è-
i'effort a été positif et fructueux,
taient pas toujours les mêmes, mais
Nous sommes conscients des res-
ponsabilités qui nous attendent
dans les heures qui viennent ».
Parmi les oMiciusiuus que l on
doit d'ores et déjà tirer ue.-> évé-
nements qui Ouuleverseiit la
France, il en est uut qui nous,
paraît décisive. »--a enet la
preuve rient a être louruie de
l'inadéquation entre les aspi-
rations populaires et io3 repré-
sentations politiques a tous les
niveaux, et eu particulier ani
niveau parlementaire. Lorsque
l'on veut voir rongin* de la
présente crise dans > o-seuce ou
le formalisme lies corps inter-
médiaires, il faut Dieu se rea-
dre compte que le couteau
même de ces coi p.» intermédiai-
res est lui-même anacruomque.
En on mot, la classe politique
en place ne correspond plus
aux exigences de la société
française en mutation. La ré-
volte qui s'est levée n'a pas
seuleinent été dirigée coniie
le« pouvoirs au tons étendu
du terme, mais contre ceux
qui étaient censés présenter
l'opposition à ces pouvoirs en
s'appuyant sur des thèmes ca-
dftcs. l« décalage entre les pro.
grammes, les idées et les hom-
mes de l'ensemble de la clas-
se politique et les problèmes
ressentis à la base explique poC»
âne grande part l'impossibilité
provisoire d'une solution effi-
ciente » la crise
NUANCES
A cette thèse globale il con-
vient d'apporter des précisions
et des correctifs. En premier
lien l'on n'ignore pas que
coexistent une France du pas-
sé «t une France du futur. Que
la France du passé trouve des
interprétés, élus on non. la mé-
diation est normale. Par contre
beaucoup plus anormal appa-
raît le défaut de traduction
entre les forces neuves et les
hommes qui seraient censés les
représenter. Forces neuves aus-
si bien an niveau d<- nouvel-
le* couches sociales que de nou-
velles aspirations. Ainsi le phé-
nomène étudiant s'ernlique à la
fols par la multiplication dé-
De nouvelles élections
mographique des travailleurs
intellectuels dans un« société
de plus en plus tournée vers
le progrès technique et la re-
cherche de conceptions de vie
et d'organisation de vie origi-
nale.
On trouverait quelque chose
de différent dans le cas des
paysans puisque là au contrai-
re c'est la diminution du nom-
bre qui pose le problème d'un
réaménagement de la condition
paysanne. Quoiqu'il en soit,
dans les deux cas on se rend
compte que ces deux grandes
couches sociales ne disposent
pas de représentants politiques
motivés par de« préoccupations
spécifiques. S'agissant des étu-
diants la démonstration est
éclatante; s'agissant des pay-
sans nul n'ignore l'existence
de syndicats, d'interprétée po-
litiques à tous les échelons de
l'organisme de la nation. Mais
11 suffit de s'arrêter à l'exem-
ple des conseillers généraux
considérés comme les porte-pa-
role traditionnels du monde
paysan pour souligner a quel
point ce type de prolongements
détient peu de pouvoirs réels.
On touche là à l'une des prin-
cipales contradictions de ta
France moderne qui expliquent
son blocage actuel.
Si l'on observe ce qui se pro-
duit pour la classe ouvrière
la reflexion nécessite plus de
nuances dans la mesure où la
puissance du Parti Communiste
repose en grande partie sur une
large base ouvrière. H resterait
cependant à s'Interroger sur la
manière dont le PCF répond
aux nouveaux problèmes qui se
posent à la classe ouvrière.
C'est retrouver là nne vlelB*
polémique que nous ne rouvri-
rons pas dans le cadre de cet
article sinon pour brièvement
noter que si le PCF est effec-
tivement d'extraction ouvrière,
il est loin de toujours se com-
porter comme le médiateur des
revendications et des objectifs
de la nouvelle classe ouvrSiôjrl I
(la notion de nouveauté ren-
voyant à des préoccupations in.
connues jusqu'ici et à une pro-
portion croissante de jeunes
travailleurs). Autrement dit, on
constate également que la clas-
se ouvrière n'a pu voir ses as-
pirations et ses revendications
traduites au niveau de l'Etat
(il va de soi que la nature ca-
pitaliste de l'Etat explique au-
delà du PCF et de ses carences
l'absence de solutions aux pro-
blèmes posés par le dévelop-
pement de la classe ouvrière).
Le gaullisme conscient de cette
profonde distorsion a cru résou-
dre la crise en imposant des
pouvoirs autoritaires et ce fai-
sant il n'a fait qu'approfondir
la crise en la reculant et en la
durcissant.
LA REPRESENTATION
POUR DEMAIN
On ne s'apesantira même pas
sur l'inexistence des droits de
participation à la gestion dans
l'entreprise ou les services, sur
le formalisme des pouvoirs ré-
gionaux concentrés dans les
mains des représentants di-
rect» de l'Etat ou sur celui des
pouvoirs des municipalités pa-
ralysées par la soumission obli-
gée à la tutelle et l'asphyxie
financière; sur le refus du dia-
logue avec les syndicats qui
eux-mêmes demanderaient à
être * démocratisés » l'on s'en
tiendra seulement aux pouvoirs
des dépotés et à leur inter-
vention effective dans l'évolu-
tion de la vie réelle des
Français. Là il faut bien
voir que si le système gaul-
liste a Oté ses dernières signifi-
cations i la fonction de dépo-
té, il n'a fait <H»e poursuivre
nne évolution commencée aupa-
ravant. Parce que l'on n'a ja-
mais vraiment désiré que le ré-
gime parlementaire traduise tes
exigences des couches sociales
on a fini par attribuer au Par-
lement une fonction de déri-
vation des vœux de$ électeurs.
Et c'est sur la base de cette
démocratie faussée que les re-
présentations de la gauche se
sont constituées à travers les
élections et les réçimes.
Référons-nous à titre d'exem-
ple aux deux leçons principa-
les tirées des récents scrutins
de mars 1967 : la tendance
à la polarisation et la faible
marge de manœuvre de la ma-
jorité. L'on n'a raisonné sur
ces deux constatations qu'à
l'intérieur de la mécanique
électorale, sans prendre cons-
cience que plus on s'enférait
dan* ces analyses et ces stra-
tégies exclusivement parlemen-
taires, moins on percevait l'é-
cart entre ces jeux et le pays
réel. Le résultat éclate au-
jourd'hui : la motion de cen-
sure est repoustsée au point
que la preuve est administrée
que jamais elle ne pourra être
votée; c'est alors que très na-
turellement les forces vives de
la nation mettent en question
l'existence du gouvernement et
du régime par-delà les réalités
parlementaires
L'on n'a pas compris qoe la
polarisation, formule séduisan-
te a/n niveau de l'arithmétique
électorale, afooutjçmit en fait
à réprimer la complexité et
le foisonnement des revendica-
tions. Ce n'est pas le plus pe-
tit nombre de partis politiques
qui permettra de gouverner,
mais la présence dans une as-
semblée des interprètes directs
des différentes couches socia-
les qui composent la société mo-
derne. C'est donc tout le con-
traire, H faut assurer la dé-
mocratie, c'est ce qui rendra
son sens * la fonction électi-
ve, fonction passablement dé-
criée.
Dans le contexte présent sans
aborder 10g thèmes d'un pro-
gramme de transition vers le
socialisme autour desquels de-
vraient être centrées de nouvel-
les électrons (1). il nous ap-
paraît nécessaire d'institution-
naliser le débat déclenché dan*
la rue. D'aucuns soupçonneront
je ne sais quel désir d'atténua-
tion dans cette volonté d'Insti-
tutionnalisation. En vérité le
danger réside beaucoup plus
dans le risque de récupération
du mouvement populaire au ni-
veau des forces traditionnelles
de la gauche. La mécanique
parlementaire est un auxHiaire
précleu* de la société de con-
sommation de masse en vidant
les exlerences de base de leur
sens. Il convient par suite d'en-
rayer cette mécanique en con-
fiant les rênes anx forces réel-
les do pays. Il est indispensa-
ble que la classe politique soit
à l'Image des nrohlemes do
pavs rt de ses besoins.
Une telle institutionnalisation
ne s'onèreralt pas sens daneers
d'édulrnratlon. mais le main-
tien de la situation actuelle
sans débouchés préVnte égale-
ment des rtansrers. Eyiçer One
le pars rp>I soit rporésenfé est
conforme au profond mouve-
ment démocratique oui se fait
four f| constitue également le
senl moven de surmonter l'obs-
tacle de la gauche trartitlon-
nel!<v qnl n'incarne pas Ie« ob-
jectifs poursuivis par la révo-
lution en festatlon.
Claude GLAYMAN
(1) _ Cf. notre article « La
transition » dans « Combat »
de lundi dernier. Nous aurons
l'occasion de revenir sur les
orientations d'un tel program-
me
P.S. Cet article a été écrit
avant ç|ue ne soit connue la
dernier démarche du chef de
l'Etat, Mais quant au fond ces
lignes nous paraissent toujours
Justifiées.
La crise politique
UNE INTERVIEW DE M. MIEDEL ROCARD
SECRETAIRE NATIONAL DU PSU
« L'issue pulitique du mnuvement actuel ne peut se définir dans des formes parlementaires >
On conviendra peut-être plus tard du rô-
le particulier qu'aura assumé le P.S.V. dans la
dernière phase de désagrégation du gaullisme.
Parti jeune, il aura dérouté bien des interprè-
tes, provoqué bon nombre d'hostilités, été l'ob-
jet de dénigrements dans un climat trop sou-
vent passionnel.
Aujourd'hui, lors d'une crise fondamen-
talement extra-parlementaire, il apparaît com-
me une formation charnière, désireuse avant
tout de pousser la contestation à son terme,
c'est-à-dire de collaborer à la mise en place
d'une société socialiste moderne.
Kn ces heures graves, il nous a paru tout
particulièrement significatif d'interroger son
secrétaire national, Michçl Rocard, et de lui
permettre de dévelonper l'analyse de son par-
ti sur les événements que nous venons de vivre
et sur ceux que nous allons voir.
Q. : Quelle est la signification des événements
que la France est en train de vivre ?
R. : Cette signification est évidente : ni durant
la quatrième République, ni durant la cinquième,
les structures légales et constitutionnelles du pays
n'ont permis de répondre aux aspirations les plus
profondes des Français et d'effectuer à temps tous
les changements que l'évolution rapide du pays danô
les domaines économique, social et culturel, rendait
nécessaire.
La quatrième République est morte de son im-
puissance à résoudre le problême de la décolonisation
et le gaullisme meurt sous nos yeux du poids des
concessions économiques et sociales qu'il a dû faire
au patronat pour lui faire accepter une politique
étrangère qui n'avait pas son approbation.
La colère des travailleurs a deux raisons prin-
cipales :
— la première est la constatation évidente que
chacun fait sur ce pays : l'inégalité sociale va en
s'aggravant constamment. Il n'existe pas d'impôt
sérieux sur le capital, toute la législation fiscale
avantage le profit privé par rapport aux revenus du
travail et les sociétés aux dépens des salariés. L'éven-
tail des revenus lui-même est allé en s'ouvrant cons-
tamment et.malgré les belles phrases prononcées à
ce sujet l'Université demeure toujours fermée aux
enfants d'ouvriers et de paysans.
— la seconde raison est le refus permanent de
toute négociation sérieuse opposé tant par le patro-
nat que par le gouvernement aux demandes des
organisations syndicales.
L'Etat n'a jamais admis de discuter avec ses
propres salariés de leurs rémunérations et de leurs
conditions de travail.
Les travailleurs français ont eu, de ce fait, plus
encore que ceux des pays voisins, l'impression d'être
traités en mineurs. Leur longue patience ne s'expli-
que donc que par la vigueur de la répression anti-
syndicale, la prudence d'organisations syndicales
trop faibles pour jouer un jeu plus énergique, le sou-
ci du P.C., décidé à faire disparaître dans l'opinion
l'image du « parti de la subversion » qui est restée
ancrée si longtemps.
Mais la colère des travailleurs n'a pas explosé
d'elle-même n a fallu un « détonateur » pour que
les travailleurs comprennent que dans un régime où
on ne discute pas, leur pression devait devenir plus
énergique ; ce détonateur, c'est l'explosion étudiante.
Il n'y a pas lieu pour ce qui concerne l'Univer-
sité de se montrer surpris. Le P.S.U., sensible à la
crise de l'Université, avait décidé dés le mois de no-
vembre de consacrer à son examen les Assises natio-
nales convoquées pour le mois de juin. En mars, nous
convoquions un Comité politique national pour les
11 et 12 mai avec l'ordre du jour des luttes univer-
sitaires. C'est dire que si nous avons é^é surpris
par l'ampleur du phénomène dont, bien sûr, person-
ne ne pouvait dater l'explosion, nous savions cepen-
dant pour notre part que la crise était inévitable
et serait dure. Nous l'attendions plutôt pour la ren-
trée. La maladresse d'un recteur l'a précipitée. Cela
ne change rien d'important.
Les raisons de cette crise sont évidentes : l'Uni-
versité est un des secteurs du pays qui s'est le moins
adapté à l'évolution récente. Elle continuait à déli-
vrer avec solennité une culture archaïque sans prise
sur le réel et qui servait des tests pour le choix des
petits et grands commis de la bourgeoisie.
Faisant le pari démagogique d'une ouverture
plus large de l'Université, le régime a été incapable
d'en assurer les moyens matériels, pas plus que d'en
repenser le contenu et les fonctions. Mais en même
temps l'Université reste un des éléments majeurs de
la recherche scientifique. A ce titre, elle est une force,
essentielle puisqu'elle façonne l'avenir collectif par
l'orientation même de cette recherche.
. Mais l'Université aussi est centralisée.
Dans l'Université non plus, on ne discute pas ; le
pouvoir de décision réel appartient à d'anonymes
bureaux de.la rue de Grenelle et au ministère des
Finances. Aucun moyen n'était offert pour poser les
problèmes réels et faire avancer les solutions. Dans
ces conditions, la colère d'abord, la violence ensuite
étaient le seul mode d'expression du mouvement
étudiant. Et l'impossibilité de régler le problème sur
un plan purement universitaire a conduit les étu-
diants à une critique radicale de la société dans son
ensemble.
L'extension très rapide de la solidarité étudiante
montre la profondeur de la crise, et le déclenche-
ment spontané des grèves avec occupations d'usines
confirme que c'est aujourd'hui la structure profon-
de du pays, sa hiérarchie de castes, son refus du
changement qui sont contestés.
Q. : Un an après votre Verne congrès, compte
tenu d'interprétations parfois très fantaisistes à
l'égard du rôle de votre parti, comment analysez-
vous le comportement du P.S.U. au cours des 3 der-
nières semaines et quelle pourrait être son attitude
dans les jours à venir ?
R. : Les choix politiques du P.S.U. ont en effet
été fréquemment et sciemment déformés. Dès le,
premier congrès ordinaire~du P.S.U. en 1961 à Cli-
chy, nous affirmions que l'attaque du gaullisme sur
le plan électoral et parlementaire aurait beaucoup
de mal à vaincre précisément parce que nos struc-
tures politiques n'étaient pas de taille à apporter
efficacement une opposition novatrice à ce régime.
Ni les conseillers généraux, ni les parlementaires,
ni notre mode de scrutin, ni la structure sociale des
différents partis, ni le dogmatisme, ni l'opportunis-
me électoral qui caractérise pour l'essentiel les vieil-
les familles politiques ne paraissaient pouvoir per-
mettre de porter la contestation sur son vrai ter-
rain. En revanche, le Gaullisme était fragile, et cela
aussi nous l'avions toujours souligné, sur le plan éco-
nomique et social. C'est la raison pour laquelle nous
avons toujours mis l'accent de notre travail politique
sur la critique de la société capitaliste française et
des aménagements que lui apportait le gaullisme.
C'est aussi la raison pour laquelle les 30 et 31
mars derniers, nous consacrions un Conseil natio-
nal aux relations entre partis et syndicats pour en
définir un contenu nouveau et aux revendications
d'un pouvoir syndical dans l'entreprise.
Le rôle du P.S.U. dans les phénomènes récents
s'explique très bien à partir de ces positions :
— priorité à la lutte contre le capitalisme.
— refus de pactiser avec qui que ce soit sur
des bases ambiguës.
— refus d'un électoralisme sans principe,
— et soutien à toutes les luttes des travailleurs,
des paysans contre les structures dans les-
quelles ils vivent ; même si ces luttes pren-
nent une forme extra parlementaire.
Pour ces raisons, nous nous sommes trouvés de
plain pied dans le combat qui vient de s^engager,
qu'il s'agisse du secteur étudiant, du secteur paysan
ou du secteur ouvrier, les membres du P.S.U. sont
partout unanimes dans la lutte. Certain d'entre eux
assurent même de lourdes responsabilités dans l'ani-
mation de ces luttes. Mais comprenons-nous bien.
L'objet de ces luttes est justement de contester les
formes politiques rigides et abstraites dans lesquelles
tout se décide depuis des états-majors centraux à
Paris. Ce n'est pas la conception du P.S.U. et si quel-
ques uns de nos camarades ont pris dans les batail-
les récentes de très importantes responsabilités, ce
n'est pas à partir des consignes que nous avons don-
nés, mais bien plus profndément à partir des exi-
gences de la base et en plein accord avec les milieux
de travail dans lesquels ils sont insérés. Le P.S.U.
est de ce fait bien davantage un lieu de rencontre
des militants au combat et un centre de réflexion
sur les objectifs communs, à l'occasion, un milieu
de coordination de luttes lorsque cela est possible.
Il ne songe en aucune manière à les diriger direc-
tement, car il a appris que c'est précisément ce gen-
re de choses que la base en lutte refuse aujourdbui.
La crise du régime est aujourd'hui ouverte : le
gaullisme se désagrège d'heure en heure sous nos
yeux. Dans de telles conditions, accepter l'idée d'en
revenir a des formes traditionnelles, à des négocia-
tions d'états-major parlementaires pour remettre en
place une coalition des forces qui ont contribué à
l'immobilisme du pays, c'est se couper des événe-
ments comme du mouvement, c'est accepter la défai-
te.
Q. : Ce qui m'amène très normalement à vous
demander comment vous voyez l'évolution de la cri-
se actuelle ?
Personne ne peut faire de pronostic. La lutte en-
gagée spontanément par un très grand nombre d'étu-
diants et de travailleurs inorganisé.-; est puissante.
Mais, elle a d'innombrables adversaires, réunis autour
du gouvernement, de sa bourgeoisie et du patronat.
Pour que le mouvement engagé remporte la
victoire, il a aujourd'hui besoin d'une issue politi-
que. Mais elle ne peut se définir dans des formes
parlementaires, ni même peut-être celles d'un gou-
vernement dit d'-union démocratique.
Pour le P.S.V., l'essentiel aujourd'hui est la dé-
finition des objectifs du mouvement, et non le sim-
ple recours à un homme. Que les forces en mouve-
ment se rassemblent autour d'une plate forme préci-
se à traders laquelle les militants en lutte à l'usine
ou à l'Unir-ersité précisent dans le détail leur volon-
té de mettre bas le système capitaliste. Ce travail,
d'une certaine manière, est presque un préalable au
recours à un homme. Il doit être conduit pour l'es-
sentiel par les comités d'action populaire qui se mul-
tiplient aujourd'hui à travers tout le pays.
C'est dans ce cadre qu'une solution politique éma
nant de divers horizons des forces sociales peut être
envisagée. C'est ce à quoi nous travaillons. Si dans les
quelques jours qui viennent, une telle issue peut
être proposée au pays, alors la victoire du change-
ment contre l'immobilisme, la victoire des forces
socialistes contre les forces de conservation quel-
quétiquette qu'elles -portent à des chances d'être
acquises.
Propos recueillis
par Claude GLAYMAN
// faut savoir aussi terminer un règne !
Arrivé au pouvoir dans les
fourgons des prétoriens en
révolte, après dix ans pas-
sés dans « le mobilier na-
tional ». si de Gaulle est
renvoyé dans ses foyers par
un peuple résolu et fort de
la puissance de ses bras
croisés, que pourrions-nous
dire de mieux sinon qu'enfin
justice est faite...
Depuis dix ans nous nous
interrogions. « Comment va
s'opérer la succession ? » La
démesure était telle, à tous
les échelons, que les hypo-
thèses les plus audacieuses
se heurtaient à une réalité
inaccessible. L'homme était
si encombrant, il mettait une
telle application à nous as-
surer que, n'ayant jamais eu
d« prédécesseurs, ne pou-
vant être comparé à quicon-
que (sinon en manière d'of-
fense) sa disparition mar-
querait la fin de notre his-
toire, qu'on se laissait pres-
que prendre au jeu. Quel au-
dacieux oserait désormais
s'asseoir sur le fauteuil en-
core chaud ? Et le succes-
seur, convaincu de ses in-
suffisances, saurait-il se li-
bérer du complexe de l'occu-
pant sans titre ?
Eh bien ! La colère des
écoles et la grève de 9 mil-
lions de travailleurs réso-
luent ce problème qui restait
insoluble tant qu'on en limi-
tait les données à l'évalua-
tion des forces sur l'échiquier
parlementaire-
Plus récemment, depuis
que s'est ouverte cette crise
sociale dont l'ampleur n'eut
pas de précédent, une autre
question venait sur toutes
les lèvres : c Comment pas-
serait-on dn stade revendi-
catif à la bataille pour le
pouvoir politique ?» Il est
vrai que l'articulation du
politique snr le social n'ap-
paraissait pas. Les chefs syn-
dicalistes, on l'oublie trop, ne
sont pas des généraux d'ar-
mée dont les ordres sont
obéis sans hésitation ni
murmure. On ne commande
pas à des hommes qui ont
une famille à nourrir, des
traites en cours, de renoncer
à des semaines de salaire,
comme à un soldat de sortir
de sa tranchée. Les cadres
syndicaux prennent la tem-
pérature de leurs troupes et
les conduisent là où celles-
ci ont au préalable, décidé
d'aller. Les travailleurs de
France veulent aller jusqu'à
la disparition du gaullisme
et à la mise en place d'un
nouveau gouvernement Pro-
visoire ou définitif, ce n'est
pour l'instant qu'une moda-
lité pratique...
Hier encore, devant l'an-
nonce d'un référendum, on
pouvait hésiter. Devait-on
entrer dans le jeu, voter
cn«n> pour que, de Gaulle
battu politiquement et dans
les formes légales, une hypo-
thèque soit levée et la légi-
timité du nouveau régime
indiscutable ? Devait-on, au
contraire, boycotter cette
consultation qui visait seu-
lement à sauver un homme ?
Les événements qui se sont
précipités depuis quelques
heures ont rendu le choix
plus facile. Même les gaul-
listes les plus fidèles admet-
tent l'absurdité de ce réfé-
rendum qui exigerait, pour
être organisé, que l'Etat tînt
encore debout.
De quelque manière que
les choses se passent main-
tenant, de Gaulle aura raté
sa sortie- L'image d'Epinal
qui raconte la carrière, assez
exceptionnelle, d'un homme
dont le génie a consisté à
saisir l'occasion au passage
la belle légende dorée du
gaullisme se termine bien
maL Mais l'homme paie les
dix années au cours desquel-
les il a humilié ses compa-
triotes, méprisé leurs aspira-
tions les plus naturelles, tout
écarté de ce qui, autour de
lui, pouvait porter ombrage
à un pouvoir qu'il voulait
absolu, comme en un siècle
lointain où sa pensée évo-
luait plus volontiers que
dans le nôtre... Sa dernière
faute, une des plus graves :
avoir abaissé ces corps in-
termédiaires, ces assemblées
élues qui auraient, sans dou-
te, tamisé sa puissance mais
aussi amorti la violence de
l'affrontement.
A un de Gaulle ilont les
heures sont maintenant
comptées, il reste une res-
source : prétendre qu'il part
de son bon gré et tenter ain-
si de faire oublier qu'on le
chasse... Mais quelle piètre
consolation pour celui qui ne
vivait que pour un tète à
tête impérial avec l'Histoire
en marche !
F. Fonvieille-Alquier
Jeudi 30 Mai 1968
COMBAT S
LA EOURSE DE VITESSE EST ENGAGEE
ENTRE M. POMPIDOU ET LES SYNDICATS
« Devant le vide politique qui se révèle, devant
le départ à Colombey du général de Gaulle 11 ap-
paraît que M. Mendès-France est l'homme qui est
capable de garantir les droits acquis, d'animer une
équipe nouvelle, et d'assumer avec les forces de gau-
che les responsabilités du pouvoir ». Le choix est
clair. Solennellement, conscient de la gravité de la
situation, M. Eugène Descamps, secrétaire général
de la Cf.D.T. a lancé sa confédération dans la lut-
te politique, a posé les problèmes sociaux actuels
en termes de crise du régime. Pour la C.F.D.T., le
gouvernement et le chef de l'Etat ne sont plus des
interlocuteurs valables.
« De Gaulle démission I » « Gouvernement po-
pulaire / » scandaient hier après-midi de la Bas-
tille à Saint-Lazare des centaines de milliers de per-
sonnes venues manifester à l'appel de la C.G.T. De-
puis le 13 mai dernier, les défilés folkloriques de la
Boitille a la République appartiennent au passé et
-ont laissé la place à de véritables manifestations de
motte où, suivant l'exemple des étudiants, le» tra-
vailleurs n'hésitent plus à brandir de multiples dra-
peaux rouges et à chanter V « Internationale ».
Cette prise de position de la C.F.D.T et cette
manifestation de la C.G.T, entérinent et consacrent
te volonté des millions de grévistes de renverser un
régime responsable d'une politique sociale rétrogra-
de, et qui a trop fait du mépris du citoyen et du
mensonge ses moyens favoris de gouvernement pour
être encore considéré par l'opinion comme un inter-
locuteur.
Les « mégottages » des négociations de la rue
de Grenelle ont achevé de cristalliser le méconten-
tement populaire, de transformer la crise sociale
en une crise de régime. Contrairement aux accords
Matignon de 1936, les travailleurs n'obtenaient au-
cune victoire immédiate, franche et concrète. Com-
ment le général de Gaulle qui a toujours fondé son
autorité et son prestige sur le sens des foules, des
coups d'éclat, des beaux et grands gestes a-t-il pu
à ce point se suicider politiquement ? En sauvant
les Ordonnances, M. Pompidou a perdu le régime.
C'est son orgueil qui aura tué le gaullisme.
Il reste à cette évidence politique -- la mort
du gaullisme — à devenir une réalité. Et là une cour-
se de vitesse est engagée entre le Pouvoir et les
syndicats.
Le Pouvoir ou plutôt M. Pompidou, n'est pas
décidé à abandonner la partie et à céder devant
la rue (voir page 3>. Hier, (le jeu était entre trois
forces : le Pouvoir, les syndicats, la rue ; aujour-
d'hui H se joue entre deux antagonistes : Si. Pom-
pidou et l'arriére-ban gaulliste, les syndicats sui-
vant les masses.
Pour M. Pompidou, voulant restaurer son au-
torité, le problème social est la pierre de touche. Ja-
mais il ne pourra reprendre en main le monde po-
litique, réussir ou même réaliser des élections pré-
sidentielles ou législatives s'il n'a pas remis au tra-
vail la majorité des grévistes, s'il n'a pas rendu au
pays une vie élémentaire. L'appareil d'Etat est en
déliquescence. Nous n'en donnerons pour exemple
que la décision prise hier par le personnel assurant
les liaisons télé entre le ministère de l'Intérieur et
les préfectures de se mettre en grève.
Mais que peut faire Pompidou. Négocier ? re-
prendre la rue ? réprimer ?
Négocier ? les syndicats les plus importants ne
le reconnaissent plus comme un interlocuteur vala-
ble et les négociations actuelles dans le secteur na-
tionalisé ne sont pas propres à l'encourager. A l'EDF,
RATP, SNCF, c'est la rupture. Les mineurs avaient
bien signé un accord, mais hier matin ils ont refu-
sé de reprendre le travail et les cégétistes comme
les cédétistes remettent en cause l'accord conclu.
A la fonction publique, les négociations prévues pour
hier ont été curieusement remises à aujourd'hui 15
heures, heure du conseil des ministres.
Reprendre la rue ? La manifestation gaulliste
prévue pour cet après-midi à la Concorde sera sans,
doute bien insuffisante pour cette tâche, et aura
sans doute pour seul effet d'apparaître aux syndicats
et aux grévistes comme une provocation.
Réprimer ? habilement M. Pompidou pourrait
tout d'abord lancer un appel pour le respect du
droit au travail. Mais ce serait là s'engager sur la
voie de la répression. Car qui peut penser que les pi-
quets de grève abandonneront les usines à un sim-
ple appel de M. Pompidou ? Et comment les con-
traindre ? La justice hier a donné ration aux grévis-
tes contre Citroën à propos de l'occupation des usi-
nes. Et la répression policière, outre qu'elle serait
bien faible à dix millions de grévistes répartis dans
tout le pays, elle pourrait bien hâter la fin d'un ré-
gime que la répression du mouvement étudiant a
réussi à ébranler.
On le voit, c'est l'impasse. Pressés par la base,
les syndicats ne peuvent plus reculer et à la courue
de vitesse que nous évoquions plut haut s'ajoute
celle qui se développe entre les organisations syndi-
cales elles-mêmes.
Bien qu'en retard, la C.G.T., a effectué un vira-
ge sur lequel elle ne peut p!us revenir. Sa modéra-
tion des jours passés a 'MUïé trop de troubles dans
ses remgt pour qu'élit puisse revenir en arrière. Avec
ses 1.500.000 adhérents, la C G.T., a déclaré la guerre
au rtffir.e.
La C.F.D.T. p-j" sa par* est prête à toutes les
éventualités est prête « a intervenir plus directe-
ment dans les événements politiques » si cela *st
nécessaire
Cette intervention syndicale au-delà de l'action
des parti' politiques, préfigure l'avenir. Les forces
nouvelles rui viennent le surgir dans le monde étit-
di. il et oi-i-rier veillerait à ce que on ne leur vole
pas leur &• toire. Ils sont venus à la politique, pour
que la m.~itiçue demain vienne à eux.
Georges VALANCE
O Fonction publique :
négociations reportées
Les conversations sur la Fonc-
tion publique, interrompues mar-
di soir «levaient reprendre hier
à là h. (on peut noter que la
reprise de ces discussions était
prévue à l'heure même où devait
se dérouler le Conseil des mi-
nistres). Mercredi matin des tech-
niciens se sont réunis pour situer
les répercussions financières de la
demande présentée par M. Trl-
bte, secrétaire général des fonc-
tionnaires FO qui a demandé
l'attribution de 40 points d'indice,
uniformément à tous les fonction-
naires. Cette proposition avait été
formulée par M. Tribie après que
M. Pompidou ait refusé, dans la
nuit de mardi à mercredi, de don-
ner aux fonctionnaires davantage
qu'au secteur privé, alors que les
fonctionnaires demandaient 16 %
d'augmentation afin de permettre
le rattrapage.
I' restait donc à discuter l'Inté-
gration de ^indemnité de résidence
dans le traitement, l'extension des
droits syndicaux, une loi-cadre
modifiant le statut de la fonction
publique et le paiement des jours
de grève, lorsque l'on apprit que
les négociations étaient reportées
à aujourd'hui après-midi.
• Mineurs : demande
«T.mverture de négociations
La Fédération CGT du sous-sol
» demandé hier la réouverture
des discussions afin de reconsidé-
rer plusieurs points précis : sa-
laire, échelle mobile, 40 heures,
Indemnité de raccordement aux
mineurs qui n'en bénéficient pas
encore, avenir de la profession, fl-
NEGOCIATIONS : RIEN NE VA PLUS
xatîon d'objectifs de production a
terme, garantie de remploi, et
avenir des fils de mineurs.
Dans un communiqué la Fédé-
ration souligne que :
t Les mineurs rejettent comme
Insuffisantes les propositions con-
tenues dans le constat qui avait
été dressé à l'issue de discussions
entre syndicats et direction des
charbonnages ».
La Fédération CFDT des mi-
neurs demande eHe aussi la réou-
verture des discussions.
De son côté « la Fédération des
mineurs Force Ouvrière » annonce
qu'elle « a demandé à la direc-
tion des Charbonnages de France
de poursuivre la discussion de
points en suspens ».
• SNCF et RATP :
rupture
Les négociations avec la SNCF
et la RATP sont totalement inter-
rompues. A ce sujet, le ministère
des Transoorts a publié un com-
muniqué dans lequel il précise les
conditions dans lesquelles ces dis-
cussions on été suspendues :
1) en ce qui concerne la SNCF,
au cours d'une première réunion.
ii a pas cru
devoir présenter des contre-propo-
sitions à celles qui hii ont été fai-
tes.
2) En ce qui concerne la RATP,
le ministère des Transports a sou-
mis hier, 28 m:i, aux organisa-
tions syndicales des propositions
qui comportent notamment une
augmentation de 12 % de salaire
y compris certaines mesures ca-
tégorielles, un aménagement im-
portant des horaires de travail et
diverses améliorations du régime
des pensions.
Aucun effort de cette Importance
n'a jamais été consenti en faveur
de cette entreprise, à aucun mo-
ment dans le passé. Mais ces con-
cessions vont à la limite de ce
qui est tolérabte pour les contri-
buables de la région parisienne et
les usagers des transports en com-
mun ».
«c Les négociations ajoute le mi-
nistère des Transports, peuvent
naturellement être reprises à tout
instant pour réaliser sur ces ba-
ses un accord qui conduirait à la
reprise du travail ».
LES REACTIONS SYNDICALES
Les réactions suscitées par tes
négociations continuent d'affluer
En général, les positions, tant du
côté syndicaliste Que du côté pa-
tronal restent inchangées.
Hier matin, te bureau confédé-
ral FO publiait un nouveau com-
muniqué. Après avoir rappelé que
FO s'est toujours montré favora-
ble à des discussions dans tout le
secteur public, nationalisé et pri-
vé. La déclaration précise notam-
ment que :
€ Les militants FO s'efforceront
partout d'arriver a (les accords
qui répondent aux préoccupations
des salaires et également à l'inté-
rêt général.
€ La situation e*t arrivée à
un point tel que chacun doit pren-
dre ses responsabilités.
« Le bureau de FO veut espé-
rer que du coté patronal et gou-
vernemental on en aura conscien-
ce.
« La confédération FO assume
ra ses responsabilités ».
Dans un communiqué publié hier
la CFTC attire l'attention sur
la politisation de la grève. Ce
qui entraîne un éloignement des
objectifs professionnels.
Dans cette optique, la CFTC dé-
clare notamment :
€ En face de la volonté délibé-
rée affirmée fortement par cer-
tains responsables syndicaux de
politiser le mouvement, ajoute le
communiqué, la CFTC déclare
sans équivoque que c'est aux for-
mations politiques d'assurer leurs
responsabilités. A chaque citoyen
de se prononcer au moyen de son
bulletin de vote.
« La CFTC se félicite de ren-
gagement de négociations à l'é-
chelon des grands secteurs d'ac-
tivité (métallurgie, bâtiment, tex-
tile, chimie, commerce etc.-) en
plus des secteurs public et natio-
nalisé.
La Fédération de l'éducation na-
tionale « proteste contre les len-
teurs apportées dans le déroule-
ment des négociations sur la fonc-
tion publique et le refus jusqu'ici
opposé à sa demande d'ouverture
de discussions Immédiates sur les
problèmes de l'éducation nationa-
Les Etats-Unis
au secours du franc
Le Fédéral Reserve Bank de
New York agissant pour le comp-
te de la Banque de France a an-
noncé qu'elle était disposée grâce
à un accord < swap » de 100 mil-
lions de dollars à acheter des
francs français au prix plancher
de 20,145 cents. Ainsi, après la
Banque des Règlements Interna-
tionaux, c'est la Banque Fédérale
de Réserre Américaine qui vient
an secours do franc.
Cette situation prend un relief
tout particulier si l'on se souvient
des positions de la France lors de
la crise monétaire internationale
et particulièrement au moment des
accords de Stockholm.
Alors qu'à l'époque. M. Michel
Debré avait refusé, avec la plus
grande intransigeance et sam; mê-
me appliquer les règles élémen-
taires de courtoisie en matière de
rapports internationaux, d'accor-
der aux Etats-Unis le soutien
français, les mêmes Etats-Unis
répondent aujourd'hui en évitant
un possible effondrement du franc.
H est évident qu'à Washington,
on considère dès aujourd'hui que
le général de Gaulle et son minis-
tre des Finances doivent être dis-
sociés d'un pays qui les répudie et
que c'est à ce pays seul que les
Américains tendent la main.
Pli. M.
• L'Assemblée générale des Syn-
dicats des correcteurs CGT. tout
en regrettant « l'attitude anti-
unitaire de la Confédération » et
la rupture provoquée par M Sc-
çuy, approuve M. Barjonet « qui
devrait, selon cette assemblée gé-
nérale, présider à l'orientation de
la Confédération ».
L'ECONOMIE FRANÇAISE RESISTERAIT
DIFFICILEMENT A DE NOUVELLES SURENCHERES
Dépassé, vaincu, humilié, le gouvernement de
M. Pompidou a accepté de passer sous le joug. Il
a accepté la négociation de laquelle sont issus les
pseudos accords de Grenelle. Lâchant tout, consen-
tant à presque tout dans un effort désespéré de
conserver un Pouvoir qui ne peut plus rien, celui
que l'on est en droit de considérer d'ores et déjà
comme l'ex-Premier ministre, a tendu une main
molle aux syndicats. Là, tout pouvait encore s'ar-
ranger. L'effort consenti aux travailleurs par les
pouvoirs publics pouvait encore_ être résorbé par
la Nation- Le gonflement des prix de revient, con-
séquence naturelle de l'augmentation des salaires,
pouvait trouver sa parade sur trois fronts. D'une
part, le renoncement aux dépenses somptuaires de
l'Etat et notamment l'abandon de la force de frap-
pe. A condition bien entendu, que cet abandon
ne se traduise pas par une augmentation des dé-
penses militaires classiques.
D'autre part, l'augmentation du pouvoir d'achat
des travailleurs, pouvait se traduire par une aug-
mentation symétrique de la consommation. Ce qui
aurait pour premier effet d'augmenter la produc-
tivité des entreprises-
Enfin, un coup de fouet d'une vigueur extrême
aurait pu être donné à l'expansion, en portant son
taux de croissance aux alentours de 9% ce qui
avait d'ailleurs été proposé au moment de l'élabo-
ration du Ve Plan.
Donc en fait, tant qu'on en restait aux accords
de Grenelle une solution à la crise pouvait encore
être trouvée sur le plan économique. Solution dif-
ficile certes, douloureuse parfois. Car, ne nous
leurrons pas, à une échéance très rapprochée, ce
sont les PME qui supporteraient le poids majeur
de la nouvelle politique. N'ayant ni les « épaules »
ni les moyens des industries de pointe, nombre
d'entre elles seraient irrémédiablement condamnées.
En outre, renoncer à certaines dépenses, notam-
ment les dépenses militaires, c'était déposséder de
leur emploi des dizaines de milliers de travailleurs.
Ne prenons qu'un exemple : les usines Dassault.
Mais, répétons-le, coûte que coûte, vaille que
vaille, la solution était possible. Syndicats et gou-
vernement, unis par le même conservatisme la dé-
siraient. Or, voici que depuis quarante-huit heures,
la dynamique de l'action, ce qu'il faut bien main-
tenant appeler un courant révolutionnaire, ont ba-
layé toutes ces hypothèses.
L'économie française répondrait difficilement à
de nouvelles surenchères, même si l'Europe était
sacrifiée. De toute façon, cette surenchère ne s'ins-
crit plus maintenant dans un contexte économique
ou syndical. Ce qui est en cause aujourd'hui ce
n'est ni le niveau de vie, ni le SM1G, ni les 40
heures. C'est l'Etat, ou tout au moins ce qui en
reste. C'est à dire uniquement une façade lézardée,
quelques apparences. Un chef d'Etat affolé qui court
chercher l'inspiration à la campagne. Un gouver-
nement qrii ne gouverne plus et des forces de l'or-
dre qui déambulont en vain dans le désordre.
A partir de maintenant, la eontestatira n'est
plus ni sociale ni économique. Elle n'est que po-
litique et la seule solution doit être trouvée dans
la démission du chef de l'Etat.
Le général de Gaulle arrive à Colombey, Daniel
Cohn-Bendit à la Sorbonne. David a abattu Go-
liath. H serait temps d'en prendre conscience.
Philippe MARCOVICI
La crise universitaire
COHN-BENDIT RELAI, JE LE PRINCIPE D'UN MOUVEMENT
REVOLUTIONNAIRE LIBRE DE TOUTES ATTACHES
«La rue ne mène pas forcément
au massacre»
DECLARE LE LEADER DU MOUVEMENT DU 22 MARS A LA SORBONNE
La contestation
permanente
par Henry CHAPIER
Avant sa conférence de presse de minuit, Daniel Cohn-
Bendit s'est adressé dans le grand amphi de la Sorbonne aux
étudiants et jeunes ouvriers réunis en assemblée de contesta-
tion.
Pendant cette demi-heure qui a suivi son retour, le leader
du mouvement du 22 mars a précisé sans équivoque sa doctrine
revenant sur le principe de contestation permanente qui ani-
me le mouvement révolutionnaire Que d'aucuns voudraient voir
se constituer en parti politique. Dans son exposé d'une logique
irréfutable. Cohn-Bendit a déclaré que toute la puissance du
mouvement venait justement de son absence d'organisation
centralisée, et de structures rigides.
« Je me refuse, a-t-il souligné, de construire ici à la tribu-
ne de la Sorbonne une ligne politique quelconque, et à agir
f.n leader. Mes camarades du « Mouvement du 22 mars » se
sont à présent dispersés dans les « Comités de quartier ». C'est
là, au cœur de l'action, au milieu des militants que naît peu
à peu notre ligne : ce n'est pas à nous — ici — d'en mé-
juger >-.
Ce refus de se laisser emprisonner par le verbalisme d'une
plateforme politique, par la dicipline d'un parti constitué est
le moteur même de ce mouvement révolutionnaire : libre de
toutes les attaches, Cohn-Bendit ne veut pas fixer « d'objectifs »
à atteindre, et tout montre que la contestation permanente ne
s'arrêtera plus, qu'elle ne se contentera guère plus d'un gou-
vernement qu'elle ne s'est satisfaite des améliorations réfor-
mistes recherchées par la C.G.T.
Certes, le renversement du capitalisme, et l'avènement
d'une société socialiste sont-ils les buts du mouvement. Mais
Daniel Cohn-Bendit voit au-delà, et la doctrine de son mou-
vement aspire à une révolution en profondeur, au niveau des
structures mentales, psychiques, et sociales de l'homme du
XXème siècle, traumatisé par la technologie, et le travail tel
qu'on l'entend aussi bien à l'Ouest qu'à l'Est. En prenant ses
distances avec l'U.N.E.F., comme avec les syndicats ouvriers,
le mouvement du 2?. mars précise cependant qu'il s'associe aux
manifestations et actions communes, chaque fois qu'elles lui pa-
raissent compatibles avec l'essence de l'impulsion révolution-
naire, et à condition qu'on ne lui demande pas d'action concer-
tée et structurée à long terme.
« Certains déplorent notre absence d'organisation. Nous le
savons. Nous savons aussi qu'en ce moment nous ne sommes
pas capables de comprendre tout le parti à tirer d'une situa-
tion explosive. Mais lorsque les premières barricades se sont
élevées dans Paris, elles sont parties spontanément, d'une im-
pulsion populaire, et non pas par des mots d'ordre. Personne ne
l'avait prévu, et des structures d'organisation l'auraient peut-
être empêché. Notre mouvement n'a ni l'intention de se figer,
ni d'être récupéré par quelque formation que ce soit ».
Cette option d'un mouvement * Open » de contestation per-
manente explique aussi que Daniel Cohn-Bendit ait joué une
farce à la presse télévisée hier, mercredi matin, dans le grand
amphi de la Sorbonne, où il était censé paraître.
« La presse à la porte. — Les festivités sont finies. — II
n'y aura ni Brigitte Bardot, ni Cohn-Bendit ». Dans ces cris
vengeurs des étudiants, il y avait beaucoup plus qu'une rail-
lerie. Le leader du mouvement du 22 mars a compris que son
utilisation par les chaînes de télévision risquait d'en faire une
« vedette », qu'à trop paraître sur le petit écran il perdrait son
impact, et retomberait dans la situation des rhéteurs politi-
ques traditionnels. En un mot, il a eu la subtilité de ne pas
jouer le jeu. de refuser la gloriole proposée par le système.
Les prolongements de la révolution culturelle dans les uni-
versités ateliers, théâtres, usines et écoles, ainsi qu'aux états-
généraux du cinéma lui donnent raison : les révolutions se font
dans chaque domaine à partir de la base sans mot d'ordre, et
par delà les syndicats, associations et partis C'est ce ferment
que Daniel Cohn-Bendit veut préserver, c'est cette brèche au
cœur du système bourgeois qu'il veut approfondir. Il ne suffit
pas de renverser le régime et ses structures politiques si après
ce coup de balai — la sclérose demeure...
H. CH
LE RETOUR DE L'ENFANT
PRODIGUE
M. Cohn-Bendit avait dit :
« Je reviendrai ». Il a tenu son
défi. Malgré les frontières héris-
sées de chevaux de frise, de
CRS et de sous-préfets aux
champs, il est revenu. A pied
ou autrement, peu importe ; il
est là, en dépit des fouchets, des
grimauds, des papillons et des
boulevards du crépuscule. Ce
n'est pas un événement ; c'est
une gifle. Le personnage de
Cohn-Bendit prend une dimen-
sion légendaire. La révolution
néerlandaise a eu Till Eulens-
piegel, la fronde étudiante aura
« Dany le Ronge et Nflir ».
Mardi soir, c'était la fête an
Quartier Latin. Les étudiants en
Sciences Politiques Jetaient les
analyses du Monde aux orties
et se ruaient avidement sur
les transistors périphériques.
Les jeunes puristes faisaient des
effets de toge « La loi, très
cher... ». La Faculté de Méde-
cine était déserte. Tous à l'A-
gora ; tous à la Sorbonne. M.
Pompidou annonce : « J'ai d'au-
tres sujets de préoccupation
que M. Cohn-Bendit ». Que
n'en avait-il d'autres que de le
déclarer indésirable t Ou bien,
ignore-t-il ce que fait M. Fou-
chet t
Maintenant, grâce à leur im-
péritie, M. Cohn-Bendit règne
sur la Sorbonne «. Dis, qui t'a
fait roi 1 ».
L'enragé
Le régime de la grandeur française
sombre de plus en plus dans le ridicule.
Mardi soir il aura suffi d'un jeune étu-
diant aux cheveux roux teints en noir
pour ridiculiser un gouvernement qui
avait décidé de l'expulser de France sans
être capable -- et c'est bien normal —
de fermer les frontières, et sans pouvoir
maintenant l'arrêter à moins de prendre
le risque de violentes manifestations qui
ébranleraient encore plus ce qui reste
du régime.
Daniel Cohn-Bendit a pu ainsi don-
ner une conférence de presse à la Sor-
bonne a la barbe de tous les flics en ci-
vil et à la matraque de tous ceux en
uniforme. Une fois de plus c'est la sottise
de Goliath qui a fait la force de David.
Un David humoriste qui ne s'est pas pri-
vé de moquer tes « persécuteurs » : « J'ai re-
çu un procès-verbal signé Christian Fouchet
me signifiant que j'étais jugé indésirable
en France. La raison donnée est que ma pré-
sence en France est de nature à compromet-
tre l'ordre public. Il y a eu au Quartier La-
tin deux fois de gros désordres. La premiè-
re fois lorsque la police est rentrée à la Sor-
bonne. Jusqu'à preuve du contraire, ce n'est
pas Dany Cohn-Bendit qui a fait rentrer la po-
!ice à la Sorbonne. Donc, je demande que le
responsable qui a fait rentrer la police à la
Sorbonne et qui a ainsi causé du désordre, soit
expulsé de France. Deuxièmement, après mon
départ, il y a eu des manifestations, je demande
que celui qui m'a expulsé, puisqu'il a causé du
désordre dans les rues de Paris, soit expulsé de
France ».
Comment Cohn-Bendit a-t-il passé la fron-
tière ") : « Tïn marchant dans la brume mati-
nale, dans les bois, au chant des oiseaux, je me
suis retrouvé très tôt en France ». Restera-t-il
à la Sorbonne "> On verra ! ».
Comment échappera-t-il à la police ? « on
verra ! ».
Mais Cohn-Bendit a également parlé en res-
ponsable, c'est-à-dire en évitant toutes les pro-
vocations, tout en ne fuyant pas les questions.
Le gouvernement l'a accusé d'avoir dit à Amster-
dam que l'on devait déchirer le drapeau fran-
çais. Jl répond : « Je n'ai pas dit qu'il devrait
être déchiré mais qu'il a été déchiré. Et c'est
vrai, on en a fait des drapeaux rouges ! ». Et
il ajoute : « Vu ma nationalité douteuse, vu mon
ascendance douteuse, je ne reconnais aucun dra-
peau national, français ou allemand. Les seuls
drapeaux que je reconnaisse sont ceux du mou-
vemnt ouvrier : les noirs et les rouges Mais si
TRIBUNE LIBRE
quelqu'un veut faire la révolution avec le de*-:
peau bleu, blanc, rouge, je ne suis pas confie
du moment qu'il fait la révolution ».
Cohn-Bendit s'est ainsi posé en leader ré-
volutionnaire plus qu'en leader étudiant : « fa
n'existe pas de mouvement étudiant mais w.
mouvement révolutionnaire dont la devise est 1
v. prolétaires de tous les pays, unissez-vous (t
Dany le Rouge répondra-t-il aux accusa-:
lions lancées contre lui par le parti communis-
te : « II n'est pas question pour mol de cote
damner les organisations traditionnelles de )Bl
classe ouvrière. Je comprends la démocratie 0*
vriere comme le droit pour chacun de déveloÇ-
per sa ligne politique.
Mais dire, comme l'a fait le P.C.F., que Je
suis à la solde d'une organisation Internationa-
le est aberrant. Si l'on veut dire par là que Je
fais partie d'un mouvement révolutionnaire In-
ternational, c'est vrai ! Nous avons des relations
avec des révolutionnaires de plusieurs pays ».
Le « mouvement du 22 mars » a pourtant
des divergences plus profondes avec le P.C. :
Oui, mais ce n'est pas par anti-communisme,
c'est seulement parce que nous ne sommes pas
d'accord avec la politique du P.C. Le P.C. a le
droit de dire que nous sommes des farfelus et
des ridicules. Mais je trouve inadmissible qu'il
se livre à des attaques personnelles. Enfin, ce que
je peux dire, c'est que dans les structures d'or-
ganisation actuelles du parti, il est évident que
s'y exprime la direction et non la base ».
Quelle action envisage de mener désormaif
Daniel Cohn-Bendit ? : « C'est au mouvement
du 22 mars, auquel j'appartiens de le décider a.
Est-il du moins partisan de continuer l'action
dans la rue ? : « Pompidou a dit qu'il approu-
vait tout sauf la pression de la rue. Et effectif
vement si notre mouvement s'est développé, c'est
grâce à la rue. Mais cela ne veut pas dire que
je sois partisan des massacres. Il y a des formée
d'action dans la rue qui ne mènent pas forcé-
ment au massacre. Le mouvement actuel a suf-
fisamment montré ses capacités pour qu'il puis-
se éviter les affrontements provocateurs de la
police. Mais il ne faut pas renoncer à manifes-
ter dans la rue parce que la police est décidée
à nous interdire la rue. En aucun cas la rue ne
doit être sacrifiée à la police ».
Daniel Cohn-Bendit est ainsi décidé à pour-
suivre son action. Son retour, sa conférence
de presse sont les plus beaux signes de la désin-
tégration actuelle du Pouvoir.
La présence à Paris de Dany le Rouge est
le signe vivant de la situation révolutionnaire
qui se développe actuellement en France.
Georges VALANCE
LE TEMPS DE L'AUTOGESTION
Impuissant à endiguer le puis-
sant mouvement étudiant et ou-
vrier qui a définitivement boule-
versé les structures de la France
anachronique, en dépit de la vio-
lence de la répression policière,
en dépit du soutien déguisé des
bureaucraties politiques et syndi-
cales accrochées aux thèses du ré-
formisme le plus plat, le pouvoir
gaulliste cherche une Issue en
proposant un référendum concer-
nant la « participation », autre-
ment dit la « cocestion ».
Pour le grand capital, confron-
té à un capital retardataire, ti-
moré, il s'agit, ni plus ni moins,
de tenter d'intégrrer. comme cela
s'est fait dans plusieurs démocra-
ties bourgeoises, la classe ouvrière
française à l'ordre établi, celui de
l'exploration de l'homme par
l'homme. Il s'agit, ni plus ni moins
de transformer les travailleurs en
co-gérants loyaux de K» société
capitaliste. On verrait alors exploi-
tés et exploiteurs confondus ceu-
vrer de sor(e nue la machine ca-
pitaliste fonctionne au mieux.
Une fraction importanie <!P la
« gauche » rontiniie de se faire
l'avocat de la co-ppstion. T'est
mie trahison des motivations réel-
les oui ont am»né (les milliers et
des milliers d'étudiants et de tra-
vailleurs - jeunes ou vétérans des
luttes syndicales rt politiques _ à
affironter à plusieurs reprises, avec
un courage inouï, une pnssion de
feu, les « ehienc de garde » des
puissances d'argent.
Aujourd'hui, malgré !<>s entre-
prises de sabotage des Ségny et
Ci«, les travailleurs refusent d'en-
terrer leurs grandes espérances.
Certes, une grande majorité d'en-
tre eux n'adhèrent pas encore au
« projet révolutionnaire ». - Mais
t] s'en faudrait de peu pour que
sur des perspectives claires, lis
rengagent sur la voie de la trans-
formation radicale des rapports de
production.
Ces perspectives claires se ré-
sument à quelques expressions -
Pouvoir ouvrier, autogestion. Elles
découlent de la logique, étant en-
tendu que le régime gaulliste se
trouve en contradiction absolue
avec les aspirations actuelles des
masses.
Au pouvoir bourgeois doit succé-
der le pouvoir des étudiants, des
ouvriers et des travailleurs. Ce
pouvoir existe déjà dans les usi-
nes, les ateliers, les facultés, les
bureaux.
Qu'U y ait nécessité d'une «pé-
riode de transition », que le socia-
lisme ne puisse triompher dès de-
main matin, ne doit pas avoir pour
conséquence que le mouvement de
révolte et de refus qui illumine
notre pays depuis Je début, du
mois de mai, puisse être catalysé
par les politicards traditionnels,
les parlementaristes increvables.
C'est en fondant dès mainte-
nant, par l'autogestion, le véri-
table pouvoir des ouvriers, des
étudiants et des travailleurs, qu'on
assurera l'avenir, qu'on sera sûr
que la «transition» enclenchera
sur la révolution socialiste. C'est
à ce prix nue la bourgeoisie se
verra imnuissnnte à effectuer un
refour en force, qu'elle prépaie
dans la cnulisse. en s'appuyant sur
le « pirti de la trouille » et les
démocrates bourgeois qui repren-
nent du poil de la bête.
André LAUDE
TRIBUNE LIBRE
On demande une vraie gauehe
La colère des étudiants et
l'adhésior, populaire à leur mou-
vement de contestation globale de
la société, ont créé une situation
révolutionnaire en France.
Ur, grand, espoir se levé que l'or-
dre bourgeois sera détruit et qu'un
système fondé sur la justice et
la liberté pourra lui succéder.
Etudiants et jeunes travailleurs
qui ont déclenché la révolte, in-
tellectuels, ouvriers et même clas-
ses moyennes nui ?e sont engagées
à leurs côtés, ne pourront jamais
accepter que leur révolution soit
confisquée par les appareils des
partis qui ont depuis longtemps
trahi les intérêts de la classe
ouvrière :
— le P.C-F parce qu'il est
l'ir/Hrument d'ure « Internatio-
nale » qui a installé dans cer-
tains pays des régimes qui ne peu-
vent être considérés comme dos
ciémocraties.
— le FGD6 parce qu'elle e«t la
rrun'Mi de familles politiques non
représentatives des travailleurs et
qa' ont donné — du noins pour
le pfirti radical et 'a SFfO —
r/ubi^urç fois la preuve u'e'.les
n'avaient pas pour objectif la
traryformation de la société mais
«a prr''f-'Pvvntion.
La t-fule alternative au gaul-
!>me — si l'on veut réellement
briser !(\~ structures capitalistes —
est la nui^rmce d'une grande for-
mation de eaucl.p unissant tes
trav:1,!i :,-,; libérés de la tutelle
communiste, les étudiants qui OJK
montré '-IK !P combat pour la i&-
novation passait par la Révolu-"
tion Aujourd'hui, c'est une évi-
de-,-e nn.rta.eee.
Michel NAULET
(Mouvement de Mal 68).
TRIBUNE LIBRE
Dans les quatre pages qui suivent, nos lecteurs trouveront
un certain nombre d'articles et de dessins émanant de collabo-
rateurs du « Canard Enchaîné »
« Combat », dans le cadre de sa Tribune Libre? est heureux
de leur donner la possibilité de s'exprimer à titre personnel
sur les présents événements
DE GAULLE ? QUI EST-CE ?
NON
jAJIBBBHHBHIK. I
ÉLÉMENT INCONTRÔLÉ !
QiûlUfl. dwCdiKtkt
Ah ! que la République était belle sous de Gaulle !
FICHTRE oui. elle était
belle, cette république,
la vraie, celle dont nous
avons rêvé durant ces di:. an-
nées, la même que nous espé-
rions connaître à la Libération,
«t dont les plus âgés d'entre
nous avaient déjà, l'espace d'un
été. entrevu le visage rayon-
nant en 1936.. Et en ce mai 68,
la revoici plus que jamais, belle
et rebelle sur sea barricades-
Pourvu que cette fois elle le
reste ! C'est le souhait que nous
formulons tous pendant qu'il en
est temps encore, pendant que
rien n'est perdu, pendant que
tout peut être gagné.
Déjà la première manche :
nous voilà précipités dans
l'aprês-gaullisme— alors que de
Gaulle est encore là. Si peu. il
est vrai... Comme Volpone, qui
feignait d'être mort, notre Gol-
pone a l'amer privilège de voir
défiler, autour de ce qui reste
de lui. la cohorte de ses dau-
phins. De les voir et de les en-
tendre. C'est l'heure de vérité,
la minute des c Tu quoque Bru-
tus... > C'est l'heure des retour-
nements de veste, voire de gi-
lets rayés- Qui n'a pas son
brassard de F.F.I. T Qui n'a pas
son forMfifat de résistance ?
Monsieur, moi qui vous
parle, j'ai serré la main à Mon-
nerville, tel jour, à telle heure,
demandez-le lui
— Moi, j'ai flanqué ma dé-
mission avant Pisani.
— Moi. j'ai crié c Vive l'Amé-
rique ! > lors d« l'anniversaire
du débarquement.
Chaque révolution a son sty-
le. Le panier de son est périmé,
dieu merci I Nous en sommes
au panier de crabes.
< II » est retourné à Colombey,
où cette fois, ni Pinay. ni Guy
Mollet n'iront le chercher, du
moins on le suppose. Et l'on ne
sait encore quel sera le titre du
quatrième tome de ses « Mé-
moires ».
Ce qui est certain, c'est que
la page est tournée.
Attention, citoyens ! Faite.
gaffe, camarades ! Le parti de
la Crainte relève la tête. Rien
de commun avec celui dont
parlait et sur Vrn.Tel comptait
Giscard d'Estaing. avec ces
51 pour cent de Français qui,
pour l'amour d« l'Ordre, étaient
prêts à voter c Oui » au réfé-
rendum.
Le parti de la Crainte. le
vrai, c'est celui qtd naquit, dans
le c Milieu > politique, le 13 Mai
1958 quand Pflimlm foira ;
quand la peur du parachutiste,
savamment attisée par les hom-
mes de main gaullistes, préci-
pita le processus que vous sa-
vez. Ce parti de la Crainte,
c'est celui dont les chefs de file
s'en furent dare-dare s« décu-
lotter à Colombey et qui dix
années durant, de plébiscite en
plébiscite, se tut ou se terra.
Bref, celui qui. audacieux mais
pas téméraire, savait < jusqu'où
il ne faut pas aller trop loin ».
(Admirable formule qui avait
été faite pour lui).
Ce parti de la Crainte fut
aussi, dans une certaine mesu-
re le parti de la satisfaction.
Les côtés « positifs >, vous sa-
vez T de la politique du géné-
ral. Cette politique extérieure
qui, ainsi que le faisait remar-
quer l'autre jour un journal de
New York, lui faisait oublier sa
politique intérieure. Il n'était
pas le seul. Une section impor-
tante de la gauche française en
faisait autant.
« La France s'ennuie. > disait
l'autre. Non. elle dormait. Qui
eût pu prévoir que ce qui la
réveillerait serait le chahut un
peu poussé d'un < quarteron >
d'étudiants de Nanterre ? C'était
le signal guetté par l'Histoire.
Aux premières barricades, on
comprit que c'était du sérieux.
Car la Révolution, en France, a
des traditions, un rite auquel
elle tient II lui faut des bar-
ricades... < Mais nous sommes
en 1968, le romantisme est pé-
rimé ! > — c Débrouillez, vous I ».
Elle les a eues ses barrica-
des, et au Quartier Latin, en-
core 1 Et même un peu, pour
honorer les ancêtres, au fau-
bourg St-Antoine et à la Bas-
tille... Cette même Bastille où
le parti de la Crainte, il y a
dix ans, avait fait défiler sec
foules, comme à un enterre-
ment. C'en était un d'ailleurs»...
R. Treno
du c Canard Enchaîné »
(suite en page 9),
8
ÇA VA DE SOI
Loi
Moi
Roi (en exil)
Les échos de Jean Manan, du « Canard Enchaîné »
ON NE MANQUE PAS
D'EFFERVESCENCE
FRANÇOIS MITTERRAND
avait préparé sa confé-
rence de presse de mar-
di depuis plusieurs jours, mais
il n'a pu la faire Qu'après de
jolies bagarres au sein de la
Fédération. Deux camps s'op-
posaient — et s'opposent enco-
re. La bataille a porté sur ce
« gouvernement provisoire > qui
prendrait le pays en charge en
cas de démission d« de Gaulle
(avec MonnerviLle se pointant à
que Mitterrand s'est rallié et
c'est elle qu'il est allé proposer à
Waldeck-Hochet.
Les communistes, qui redoutent
comme la peste la solution « cen-
triste » qui les rejetterait dans
leur « ghetto » accepteraient, dit-
on une sorte de compromis entre
les deux thèses : à savoir un gou-
vernement provisoire de gauche
(avec participation de personna-
lités centristes) dirigé par Men-
dès-France.
On en était là mercredi matin.
«... L'impuissance de ce grand corps à s'adapter aux
exigences de la vie moderne ...»
l'Elysée) ou en cas de « non >
au référendum.
Le premier camp, animé par
des radesoques dont Billières se
fit le porte-drapeau, proposait
un regroupement au centre, re-
groupement Qui se serait étendu
sur la droite jusqu'à la cinquan-
taine de gaullistes (devenus ex)
dont Pisani passe pour le chef.
Les giscardiens et les P.D.M.
auraient fait partie de ce camp.
Plusieurs socialistes ont appuyé
cette manoeuvre, du style
«Union Nationale».
Dans ce cas le chef dudit
gouvernement se serait appelé
Pierre Mendès-France. On a pu
voir l'effet de cette manœuvre
dans les < appels > parfaitement
spontanés lancés d'ici et de là
à P.M-F.
Mitterrand a eu le plus grand
mal à bloquer cette opération et
il n'est pas sûr qu'il puisse la
bloquer définitivement. Et il
n'a annoncé qu'il était à nou-
veau candidat à la Présidence
de la République que pour
mieux barrer la route à ces
messieurs-dames qui se regrou-
pent pour porter Mendès au
pouvoir, non seulement à Ma-
tignon mais aussi, si faire se
peut, à l'Elysée.
A GAUCHE
L'autre camp, dont l'âme a été
les députés de la « Convention
des Institutions Républicaines »,
certains S.F.I.O. et 1' « ex-PSU
Desson, s'est battu contre cette
solution « centriste » et pour un
gouvernement provisoire compre-
nant des communistes. Mais à
l'intérieur de ce camp, il y a eu
des bisbilles sur la participation
ou non de personnalités des
P.D.M. (comme, notamment,
Pierre Sudreau).
<7e*t à cette dernière position
ON S'EN VA
Côté majorité le processus est
beaucoup plus compliqué encore.
Quand les ministres se sont poin-
tés à l'Elysée, mercredi à 10 heu-
res, on leur a dit que le Conseil
n'avait pas lieu. Puis ils ont appris
(par la radio pour la plupart)
que de Gaulle était parti dans son
cher et vieux village.
Ce qu'on ne leur a pas dit, c'est
que jusqu'à 4 heures du matin, on
avait beaucoup causé à l'Elysée et
qu'à cette heure-là Pompidou avait
quasiment obtenu la démission
(d'aucunr disaient l'abdication) de
de GauHe.
Question : est-ce pour fignoler
son testament politique ou pour
revenir sur cette « décision » qu'il
est allé à Colombey ?
On va bientôt le savoir, non ?
— Quoi, plus
d'essence pour les
pétroleuses !...
AU FRAIS
Le Guide aime à être entouré,
ces jours-ci : pour la fin de
l'après-midi et la soirée de lundi
dernier, il y avait seulement cinq
mille policiers et C.R.S. de dissé-
minés autour du quartier de
l'Elysée et du Ministère de l'In-
térieur. Plusieurs centaines
avaient été disposés dans les
sous-sols du palais de l'Elysée.
Comme il y faisait une chaleur
à crever, on installa en hâte des
appareils de conditionnement
d'air. Résultat, des tapées de
poulets ont attrapé un rhume.
Quand le régime pi-end froid,
la police éternue.
COMME D'HABITUDE
On se demande pourquoi d'au-
cuns, dans mes entourages, se
permettent de couiner que l'actuel
chef de l'Etat n'est plus dans la
course. Il n'a jamais été aussi
près des réalités ! A preuve qu'il a
fallu des démarches pressantes
de plusieurs personnes, plus celle
de Pompidou pour que. vendredi,
il ne se mette pas en uniforme
pour son allocution aux Françai-
ses Français.
Il en est encore à croire que ça
Impressionne les gens !
INTRA MUROS
Ces derniers mois, tout entiers
à la guéguerre psychologique du
Guide avec les USA, les milieux
gaullistes bien informés allaient
disant que ces pauvres américains
allaient devoir faire faoe, dans
l'été, à un affrontement avec les
Noirs qui prendrait la forme terri-
ble de la « guérilla urbaine ».
Et d'en frémir avec allégresse et
d'avance.
Car c'est quelque chose qui ne
saurait arriver chez nous, n'est-
ce pas 1
AILLEURS
Aussitôt après le speech du Gui-
de, la panique s'empara de pas
mal de compagnons - elle ne les
a pas quittés depuis, bien au con-
traire. Il ne s'était pas passé une
demi-heure que plusieurs hôtels
de Bruxelles recevaient des appels
téléphoniques de Paris demandant
des réservations. Il y en a, du côté
du pouvoir, qui ont la conscience
tellement tranquille qu'ils sont dé-
jà, en esprit de l'autre côté de la
frontière !
NON MAIS
Jeudi 23 mai, sur la Place de
Bourgogne, derrière le Palais-
Bourbon, une escouade de C.R.S.
reçoit l'ordre de marche. Ces mes-
sieurs mettent leur casque. L'un
d'eux, en l'enfonçant sur sa tête,
s'écrie sur un ton de défi :
_ Et nos indices !
Jolie mentalité ...
A UN POIL
C'est qu'ils ont des revendica-
tions, eux aussi. Le mercredi 8
mai leur délégué syndical fut reçu
au ministère des Finances par le
haut fonctionnaire idoine. Les
C.R.S. réclamaient un relèvement
minimum de 5 % de leur traite-
ment. Après de longues palabres,
les Finances proposèrent 4,75 %
seulement. Le délégué syndical re-
fusa.
D'où la rogne, la grogne et :
« nos indices ! ».
UN EXPERT
Guéna (ministre des PTT, pour
œux qui croient qu'il y a encore
un ministre des PTT) a interdit
les radio-téléphones aux radios be-
cause les renseignements que les
étudiants en recueillaient sur les
mouvements de la police.
Un nommé Vivien, député gaul-
liste résuma la chose en disant
que les journalistes des radios
étaient des indicateurs.
Il juge les autres d'après soi-
même, car, à plusieurs reprises,
pendant les manifs, on a repéré
le Vivien avec l'état-major des
forces dites de l'ordre. Pour leur
•outenir le moral, sans doute.
SOCIALISME
ET LIBERTÉ !
par Morvan Lebesque
du « Canard Enchaîné »
LES heures que nous vivons vont plus vite que la plume.
Elles ne 7ious laissent que le temps d'un cri : socialisme
et liberté !
Plus jamais le pouvoir d'un seul ! Plus jamais, sur cette
France si jeune, le règne du vieillard Pétain ou du vieillard de
Gaulle I Plus jamais le mensonge d'état baptisé information I
A bas toute contrainte, et toute dictature, d'où qu'elles viennent!
On parle de réformer l'Etat. La grande réforme est de l'adap-
ter à la France, à ce pays beau et divers appelé France, dont fi
n'a jamais été le serviteur, mais le maître implacable et loin-
tain. Il faut abattre le centralisme césarien, non seulement dans
l'administration, mais dans les appareils sclérosés et dans les
esprits. Il faut réconcilier l'Etat et la Nation. Il faut proclamer
partout la responsabilité de base : dans les usines, dans les uni-
versités, dans les provinces nivelées et ruinées. Ce pays, acca-
blé de Louis XIV paradant sur des tréteaux de prestige, doit re-
trouver son âme multiple dans une démocratie moderne, popu-
laire et fédéraliste. Sinon, cette révolution, comme tant d'autres,
sera vaine. Elle n'installera au pouvoir que de nouveaux maî-
tres, c'est-à-dire, sous quelle forme qu'ils se présentent, une
nouvelle bourgeoisie.
Nous sommes, en ce moment, à la fois à Prague et à Madrid.
Socialisme et liberté î
— Merci, mon cher Cohn-Bendit de m'avoir indiqué le chemin
de Colombey !
L'Ineffable du quartier
IL s'agit, bien sûr, d«
Christian Fouchet. Sa dé-
claration, au milieu de la
nuit de vendredi à samedi, a
eu des effets beaucoup plus hi-
larants que les grenades à gaz.
Après avoir classé les « émeu-
tiers > en trois catégories : —
1) Les étudiants c pris de ver-
tige > ; 2) La pègre, qui t sur-
git de chaque pavé » ; 3) Les
anarchistes, qui, avec de faus-
ses croix-rouges, font circuler
des voitures espionnes camou-
flées en ambulances, — notre
hi-han national enchaînait.
Contre tout cela, le service
d'ordre doit se battre dans des
conditions difficiles, avec des
grenades lacrymogènes et des
bâtons. Le service d'ordre doit
se battre contre ces gens bien
armés, qui utilisent des lanoc-
pierres, et même des billes
d'acier.
En l'écoutant, les étudiants
vertigineux, la pègre et les
anars du Quartier Latin, hon-
teux de s'attaquer aux sans-dé-*
fense de l'Ordre, versaient d«
chaudes larmes qui n'étaient
pas dues aux grenades, mais
aux remords.
On a pu noter que notre Ubu
avait retrouvé le < ton Kocher-
N'oir >, — ce tont pète-sec que
laissent prévoir ses ioues re-
bondies : c'est qu'il venait de
remporter une belle victoire
contre la pègre. En capturant,
grâce à l'intervention de tren-
te cars de police, les sep; éner-
gumènes qui, armés jusqu'aux
dents, avaient eu l'audace d'oc-
cuper son splendide apparte-
ment à la terrasse du Musé» de
l'Homme. Les sept vandales —
ils se disent fonctionnaires du
Musée ! — ont été embarqués
au commissariat Beaujjn. et
mis hors d'état de nuire.
De sorte que les étudiants en
ethnologie pourront encore al-
ler étudier de près (en mon-
tant sur le toit) une des plus
belles pièces du Musée de
l'Homme : le flicus anthropoï-
dus, encore appelé « Homo co-
gnons, - fossile particulièrement
intéressant d'une ère (presque)'
révolue, dont on peut retrouver
certains spécimens au Musée de
l'Ane.
Gabriel Macé
du « Canard Enchaîné »
AUTO-STOP
Jeudi 30 Mai 1968 COMBAT
LE 29 Mai, dix ans jour pour
jour après qu'il eut an-
noncé au peuple qu'il
engageait le processus de sa
restauration, le Roi fut forcé
par le peuple d'engager celui de
sen abdication. Quel terrible
retour des choses ! Quelle le-
çon prodigieuse ! Quel fatal ac-
complissement !
Les prairies de Colombey res-
plendissaient de fleurs quand
le Roi y arriva à la sourdine
pour y méditer sur les malheurs
de la fin du règne et l'abais-
sement de l'orgueil des Grands.
Mais pour ce prince, c'était
l'automne en mai.
Déjà, depuis plusieurs jours,
on avait vu se décomposer le
peu de Cour qui restait autour
de lui. L'insolence qui avait été
pendant dix ans le masque or-
dinaire des courtisans et des
ministres, s'était figée sur leur
visage. Il régnait sur l'Elysée un
air de veillée funèbre, les cor-
Triste et terrible fin du règne
ridors, les antichambres, les ar-
rière-cabinets offraient le spec-
tacle coufus de la désolation. On
entendait les mugissements con-
tenus des chevau-légers, on
apercevait partout des petites
compagnies de silencieux qui
méditaient profondément aux
suites de l'événement, les yeux
fichés à terre, tirant des sou-
pirs de leurs talons. Mais le
plus plaisant à observer, c'était
les manèges de ceux qui pre-
naient leurs mesures pour se
hâter furtivement de courir
trahir.
Recluse dans ses réduits, Ma-
dame de Maintenant, que dis-
je ? Madame de Naguère, exha-
lait du matin au soir ses regrets
sur le ton éploré de la litanie :
— Ah ! si Charles m'avait écou-
té quand je le suppliai en 19C5
de se retirer à Colombey dans
le sein de sa gloire et de n'as-
pirer point à un second sep-
tennat.
Mais Charles n'avait écouté
que « ses voix »...
Que de jours passèrent, au
long de ces semaines cinglan-
tes, avant que le Roi sentît, par
degrés, que les temps de son
omnipotence étaient révolus.
Quoique le coup de tonnerre de
la révolte de ses sujets l'eût ti-
ré du songe dont il se berçait
depuis dix ans, ses yeux ne se
dessillèrent point d'emblée. Il
voulait se persuader que cette
Fronde était tournée, non con-
tre lui et contre son despotisme,
mais contre la sottise et les bé-
vues de ses ministres. Il pensa
l'apaiser par ses chimères réfé-
rendaires. Il redoubla de bons
mots, de saillies dérisoires, cla-
ma que jusque dans sa rébel-
lion « la France était exemplai-
re ».
Le pauvre homme ! Déjà c*
n'était plus qu'un roi de plâ-
tre régnant sur un postiche
d'Etat, de qui l'autorité ne s'é-
tendait pas au-delà des murs
de l'Elysée. Mais il ne le savait
pas encore et longues journées
s'écoulèrent avant que ses mi-
nistres et les personnages de sa
manche osassent enfin de lui
dire.
C'est en vain qu'on avait vu
le premier ministre se saisir dn
timon vermoulu de l'Etat et
tenter à la désespérade de sau-
ver la couronne. Las ! il n'était
plus question que le Roi échap-
pât du naufrage.
Le rideau tombait, la scène
changeait.
Et voici qu'à l'heure du dé-
nouement, revenait à la mé-
moire la sentence fameuse de
Balzac dans « Sur Catherine de
Médicis » :
« A l'exception de Charlema-
gne. tous les rois de France du
nom de Charles ont fini misé-
rablement »-.
Le dernier Charles, à son
rang, avait accompli la parole.
André Ribaud
du « Canard Enc':nîn^ »
SUR LE FRANC DES GREVES
MA Cour des Comptes, mon
Conseil d'Etat, tous mes
grands corps d'Etat,
pourtant truffés, depuis dix
ans, d'énarques bien pensants,
sont en pleine désagrégation.
Ces jeunes gens et ces vieilles
barbes considèrent positivement
que de Gaulle est déjà retiré
à Colombey. Petits impatients !
GENEROSITE
Le dernier quarteron de minis-
tres fidèles a convoqué le dernier
quarteron de fonctionnaires fidè-
les ou présumés tels. Consigne gé-
nérale : fairt savoir à toutes les
communes, aux sociétés de pêche,
aux amicales de joueurs de bou-
les, etc... que le moindre de leurs
désirs, exprimé en vain depuis dix
ans, doit être considéré désormais
ccmme satisfait.
Et qu'on est prêt, s'il le i;;ut. à
signer tout ce qu'on voudra. C'est
le gouvernement suivant qui paiera.
CONTRACTES
La police parisienne - la pau-
vre ! - n a plus d'essence ; eMe
est obligée d'aller se ravitailler à
Chartres, aux dépôts de l'Armée.
A propos de police, il n'y a plus
de contractuels dans les rues de
Paris. On les a priés de se faire
oublier. Au moins jusqu'au réfé-
rendum.
LES NANTIS
Dans la matinée de mardi 28
mai l'honorable direction du Con-
seil National du Crédit a suggéré
aux banquiers de « trouver des
méthodes ingénieuses d'épargne »
(sic) pour éponger une bonne par-
tie des quelque 30 milliards an-
ciens que les salariés vont palper
dans les prochains douze mois du
fait des augmentations de salairs*.
Ces messsieurs les hauts fonc-
tionnaires du Conseil National du
Crédit croient en effet que les sa-
lariée a'ont que faire de cet argent
et qu'ils vont chercher à le mettre
de côté.
Qui dit mieux ?
UN SAUVEUR, S.V.P. !
Au sein du grand patronat, ça
gamberge dur. Pour le moment,
Huvelin se dévoue, se montre, par-
le, signe. Et laisse les gens sé-
rieux, Ambroise Roux par exem-
ple, mijoter dans une ombre pro-
pice. Pour la relève.
Ces messieurs sont prêts à ad-
mettre que la porcelaine gouverne-
mentale est tellement ébréchée
qu'une opération de recollage pa-
rait surhumaine, et que, avec ou
sans oui massif, ma Cinquième est
cuite. Comme disait Mayolle lundi :
« Si même Frachon ne peut plus
parler chez Renault, où va-t-on ? »
Kux aussi lorgnent, du côté de
Mendès._
ILS RIENT JAUNE
Pas vernis, les Japonais. Ils ve-
naient juste de choisir le franc
français pour financer leur com-
merce avec l£ Chine. Or, le franc
n'est plus coté sur les places mo-
nétaires Internationales. Ou bien
il est en 'laisse épouvantable.
C'est dire que les malheureux qui
venaient de faire de grosses réser-
ves de francs, prenent une mé-
chante piquette ; et se font un
devoir de liquider à toute allure
leurs francs pourris. C'est bien
triste.
EMIGRATION
Les francs quittent d'ailleurs la
France. Et même pas sous les ban-
quettes de voitures : ce sont, pri-
mo des francs déposés naguère par
des étrangers, donc convertibles,
qui regagnent le havre suisse au
rythme, pour l'instant, de 50 mil-
lions de dollars par semaine ;
mais aussi des francs bien fran-
çais, en billets Voltaire, que les
financiers amateurs ne parviennent
à échanger en Allemagne et en
Italie qu'à 80 % de leur valeur,
Dimanche dernier, en Belgique
et au Luxembourg, certains pom-
pistes n'acceptaient même plus de
monnaie française. Belle menta-
lité !
VOYAGE REMIS
L'Association professionnelle des
Banques devait envoyer ces jours
derniers un peloton d'adhérents en
Ah ! que la République
était belle sous de Gaulle !
(suite de la page 7)
Aujourd'hui, par la orèche
ouverte, tentent de s'engouffrer
le bon et le pire, les demi-solde
de la Quatrième, les francs ti-
reurs de la Sixième, et surtout
le gros de la troupe, celui sans
qui les révolutions ne sont que
des essais non transformés et
les barricades de pitoyables
images d'Epinal. Aujourd'hui
ce n'est plus : « Voilà comment
on meurt pour 25 francs »...
Mais « Voilà commr ' on se
bat pour ton S.M.I.C., camara-
de !»
Les révolutions, tout comme
les putsches, c'est connu, ont
leurs cocus. Mais il y a la ma-
nière. D'aucuns ont voulu trop
vite et trop brutalement évin-
cer les étudiants, ces incontrô-
lés, ces incontrôlables, enfin,
quoi, ces gêneurs ces emmer-
deurs ; trop vite les balancer
par-dessus bord. Entreprise dif-
ficile 1 On assiste à des navet-
tes affolées : de Varsovie en
Prague et de Prague en Var-
sovie. Chers amis, reprenez-
vous, que diable I Nous som-
mes tout de ™ême à Paris...
A Paris, vous savez ?
Au lendemain du 14 Juillet,
un chroniqueur slupide écrivit,
pnrait-il. que « la prise de 'a
Bastille, ce n'est pas ça qui te-
rnit disparaître les prisons >•
C'est comme si aujourd'hui
quelqu'un disait « que l'incen-
die de la Bourse, ce n'est pas
ça qui abolira le capitalisme. >
On lui rirait au nez. Et l'on
aurait raison...
Que la République était beJlt
sous de Gaulle..
Et la France donc, au soleil
(d'ailleurs rsre) de Mai. ssulor
B. Tr.
Australie, aux fins d'investir là-
bas la bonne épargne française.
Toute réflexion faite, les banquiers
resteront à Paris. On e:t casanier 1
ÏRRATUM
Légère confusion, vendredi der-
nier, lors de la marche sur la
Bourse. Les penseurs du 22 mars
avaient imaginé une marche sur
la Bourse du Travail, histoire de
rendre « la Bourse aux travail-
leurs ». Mais les troupes n'ont rien
compris.
Jean Manan
du « Canard Enchaîné 3
« La France est toujours exemplaire » (de Gaulle)
L'exemplaire en question (évidemment^
10
QUAND ON
NANTERRE LA
Pas de référenaum. Et
pourtant on avait déjà en-
registré le premier « non ».
Celui du Conseil d'-Etat.
Si vous manquez d'essence...
...prenez vos r
Cohn-Bendi., . un anarchiste
bon teint
Ce n'est pas ce que vous croyez, il s'agit du Parti de la Crainte.
H n'est bon Becket que de Paris
Le Théâtre, lui-aussi, est descendu dans la rue. Les fameuses poubelles de la pièce de Samuel Bec-
ket, « FIN DE PARTIE », dans lesquelles deux vieillards épiloguent sur la fin du monde — tout an
moins, d'un monde, — sont depuis huit jours sur tous les trottoirs. Voici le dernier acte de r-i '^">->-
tion française de la pièce. C'est une « reprise » d u théâtre du Vieux-Colombey.
Salariés, attention !
Serez-vous payés en gourdes ?
L'AUTRE semaine, Fran-
ce-Soir présentait la
photo d'une nouvelle
pièce de monnaie haïtienne,
frappée le jour - symbolique -
du 13 Mai (1968). C'est une
pièce très remarquable :
Côté face, on voit, au lieu de
la Semeuse, une sorte de B.B.
à l'opulent balconnet qui bran-
dit un redoutable coupe-choux.
Côté pile, un cocotier entouré
de drapeaux et surmonté des
mots fameux : Liberté. Egalité,
Fraternité. Au-dessous du coco -
tier la valeur de la pièce : 1.000
gourdes.
France-Soir affirmait que
cette pièce aurait un tirage
très limité.
Erreur, cher confrère !
Car notre ministre des Fi-
nances, le cher Debré, a eu le
coup de foudre pour la gourde.
Il entend qu'elle remplace dé-
sormais le franc comme unité
monétaire- Ce dégourdi-là trou-
ve que la gourde est beaucoup
plus symbolique pour les Fran-
çais.
Le fait est que bon nombre
de nos expressions s'en trouve-
raient heureusement rénovées :
« L'épi sauvera la gourde >.
« gourde comme l'or », etc...
D'ailleurs, H suffit d'un tout
petit changement pour conver-
tir la gourde haïtienne en gour-
de française : on remplacera la
B.B. du côté face par une effigie
du général de Gaulle, le côté pile
conservant la vieille formule
républicaine, - et le cocotier.
Voilà la réforme monétaire
qui s'imposait !
Le moment est venu, en ef-
fet, où les Français sont appe-
lés, une fois de plus, par la
grâce du référendum, à jouer à
oui ou non. c'est à dire à pile
ou face.
Et vous voyez l'avantage de
la gourde dans ce jeu-là : fa-
ce, le général, Pile, la devise ré-
publicaine-
Lés uns souhaiteront sauver
la face, les autres, flanquer la
pile. Pour le cas où ça tombe-
rait pile, on pourra, éventuels
lement, secouer le symbolique
cocotier.
Françaises, Français, prépa-
rez-vous à jeter vos gourdes en
l'air. i
Le tout est de ne pas s'en-
gourdir ! Ouvrez vos esgourdes ».
Gabriel Macé
du « Canard Enchaîné »
A la Télé
Un joli programme - démissions
A la télé, c'est tous les
jours la nuit du 4 Août:
on s'embrasse, on s'unit,
du passé on fait table rase.
Et c'est très bien ainsi.
Mais cela donne lieu, tout de
même, à des scènes qui méri-
tent de passer à l'histoire.
Notamment lorsque M. de La
Grange prit la parole pour dé-
noncer avec force le manque
d'objectivité des Actualités Té-
lévisées.
On vit alors le vieux Claude
Darget monter sur l'estrade. On
• Rebondissement de la
grève des douaniers : M.
Chaban-Delmas, qui avait
déclaré qu'il allait faire une
déclaration, déclare qu'il n'a
rien à déclarer.
Cohn-Bendit a passé...
...son Forbach
Autre dernière nouvelle :
Pour suppléer à la grève-
surprise (combien surpre-
nante en effet) des trans-
missions au ministère de
l'Intérieur, M. Christian
Fouchet aurait décidé de
faire appel à Cohn-Bendit.
Dernière minuté : Fompi-
'dou veut former un gouver-
nement provisoire.
Jérôme Canard
du « Canard Enchaîné *
Messages
personnels
En raison des difficultés de communication» le .
comme plusieurs de ses confrères, se fait un devoir de <UI-
fuser dans «e numéro, des messages personnels, qui allon-
geront sensiblement la rubrique « Petite Correspondance ».
H. Gnena ne nous en voudra pas ...
x x
MGR MARTY fait savoir aux étudiants att«int*par des gre-
nades lacrymogènes, et qui sont soignés à 1» Sorbonne, qu'il
va tonr faire parvenir cent bouteilles de lacryma christi de
sa cave personnelle. Le Mutin de la Messe Noire entend,
par ce geste, être le premier à mettre M pratique les gé-
néreux principes énoncés dans son fameux appel dn 25 Mai.
x x
X
M.C. POUCHET mis en demeure de quitter le Musée de
l'Homme, cherche petit intérieur au Musée Grévin.
s'attendait à un éclat, n resta
calme et silencieux. Mais pen-
dant que l'orateur continuait de
donner des leçons de civisme à
ses petits camarades, on oit
Darget enlever sa veste, la re-
tourner ostensiblement et l'en-
filer à l'envers.
Evidemment, ce n'est ni po-
sitif, ni constructif, mais cela
valait la peine d'être vu.
Mais le spectacle le plus
inoubliable a été donné lors de
la réunion des producteurs. La
poursuite de la grève fut votée
i main levée. Un seul contre :
M. Jean-Pierre Rosnay, du club
des Poètes (et qui décerna un
prix de poésie présidé par M.
Missoffe). Une seule abstention:
Albert Raisner, l'harminiciste yé-
Vé.
On allait donc lever la séan-
ce lorsque Jean-Paul Carrera
(qui est loin pourtant d'être un
enragé) demanda la parole pour,
une simple observation :
— Il m'a bien semblé que notre
camarade Jacques Locquin vo-
tait la grève. Cela me paraît st
surprenant que je lui demande
de confirmer son vote.
— Je le confirme, dit Jacques...
Et, croyez-moi, cela a causé
comme un choc. Car l'honora-
ble Jacques Locquin (produc-
teur de « Micros et caméras i>)t
exerce, à ses moments perdi^
les fonctions de barbouze no-
toire, ancien chef d'antenne en
Chine, actuellement en mission
permanente auprès de VO.R.T.F,
Yvan Audouard
du c Canard Enchaîné »
FEU LA BOURSE !
Par suite de l'apparition soudaine de quelques actions
incontrôlées, la Bourse de Paris a enregistré une flambée des
cours mais la tendance a, en définitive, heureusement fait long
feu.
ISOLFEU
CHARGEURS REUNIS
FRANCE INVESTISSEMENT
EX AZOTE
RADIO-TELEPHONE
SAINT-CHARLES LIMITED
POMPIDOU CONSOLIDÉ
FRANÇAISE DES PETROLES
00
22
moins 5
se tient à 4
hélas, 8 au prochain
référendum
oh l ce cours !
incoté, voir à Oïl-Triste.
Opticon
du s Canard Enchaîné »
Je vous salue, Paris !
Par St-Jacques, St-Michel.
Par l'UNEF. la SNE Sup.
L'ouvrier qui occupe
Son usine, à Javel,
Par les cars pleins de bourres
Massés an Luxembourg,
Par les pavés des rues
Et par les barricades,
Par les jets de grenades
Et les flics qui se ruent,
Je vous salue Paris !
n
Par la foule des On
En blouse ou en sarrau
Ecartant les Barrault
Place de l'Odéon
Par la grève à Auteull
Gagnant dans un fauteuil.
Par la contestation -
- Service « Immobll-OH »
Par la marche à l'Etoile,
La manifestation,
Je vous salue Paris I
ni
Par tous les syndicats
Luttant pour les SMIG, SMAG
Et par tous les micmacs
Pour quatre ou cinq ducats.
Par le Quartier Latin
Et ses tristes matins,
Par les hôtes-ruisseau.
Les damnés de la terre,
Par la faute à Nanterre
Et la faute à Rousseau.
Je vous salue Parts I
IV
Par le monde futur
Qu'il faut construire en hâte,
Par tous les fluctat
Et les née mergltur.
Par la réforme-oul
Naissant de la chienlit,
Par tous les Interdits,
Par Lyon, Bordeaux, Nantes,
La France bourdonnante,
L'Hexagone-Bendlt,
Je vous salue Paris I
Roland Bacri
du « Canard Enchaîné »
Jeudi 30 Mai 1968
COMBAT 11
Alors les hommes des anciens jours réapparurent
La révolte étudiante a eu des aspecls tragiques
mais l'espoir veut qu'on s'attende à un dénouement
heureux. De l'Université est née une crise qui a
pris l'envergure d'un drame national. Aujourd'hui
c'est le chaos : le gouvernement ne tient plus les
rênes du pays et le Parlement a prouvé sa vacance
de fait. Pourtant, à tous les niveaux, les Français
prennent leurs responsabilités et veulent reconstruire
un Pouvoir démocratique et social. Pour une fois les
faits ont précédé les idées et cette révolution aura
été impromptue ; derrière le mythe de la stabilité
gaullienne toutes les structures ont craqué. De la
profession à la civilisation tout est contesté, criti-
qué et seules les irrémédiables Cassandre se plai-
gnent de ce que les projets de refonte ne sont pas
assez clairement explicités. C'est sur le tas que ^e
fait cette révolution, à l'usage et sans préjugés.
Les étudiants ne se sont pas battus seulement
pour une nouvelle Université. Ils veulent une nou-
velle société dans laquelle ils auront la place qu'ils
méritent et les responsabilités qu'ils peuvent assu-
mer. Dès le début leur lutte a été politique, écono-
mique, sociale et culturelle, ils ne se «ont pas con-
tentés de conquérir de nouveaux privilèges. Les
barricades qu'ils ont dressées au cœur de Paris et
dans plusieurs villes de province auront eu une
lourde responsabilité dans la fin du gaullisme et
c'est pourquoi l'UNEF et les étudiants qui avec elle
se sont révoltés veulent poursuivre la lutte jusqu'à
ce qu'un nouveau régime leur permette de mieux
s'épanouir. Moins que jamais les revendications des
étudiants peuvent se limiter au cadre de l'Univer-
sité ; plus que jamais leur syndicalisme doit dépas-
ser le corporatisme. (Bien sûr, la majorité des
étudiants est indifférente ou attentiste ! bien sûr,
des étudiants militent en grand nombre dans des
organisations d'autres bords mais il se trouve que
ce sont les étudiants de gauche qui ont conquis le
pouvoir dans l'Université et qui ont ébranlé le Ré-
gime).
La lutte de l'UNEF et des « groupuscules » est
au lond révolutionnaire même si certains n'ont pas
approuvé leur stratégie. La forme violente de
leur combat dans la rue, la démonstration de leur
puissance au stade C'harléty, leur volonté de s'unir
à la lutte ouvrière et les propositions qui apparais-
sent dans leur programme implicite en témoignent.
Un grand mouvement révolutionnaire se dessine
qui provoquera peut-être le rajeunissement des
structures politiques et syndicales et qui n'attend
plus que d'être plus précisément organisé.
Les « enragés » qui furent une poignée à Nan-
terre se sont multipliés par dizaines de milliers par-
mi les étudiants mais aussi parmi tous les travail-
leurs - et pas seulement chez les jeunes. Auprès de
l'UNEF se sont rangés des militants de tout ordre,
des syndicalistes, «les hommes politiques, des intel-
lectuels, des ouvriers, des paysans... Le meeting de
Charlèty a peut-être définitivement sorti les étu-
diants du ghetto universitaire ; il en a fait des ci-
toyens à part entière, intégrés dans la société au
même degré que les autres travailleurs.
Le PC et la CGT, qui n'ont pas été tendres avec
des étudiants qui ne semblaient pas les respecter
assez et qui sont loin de pardonner à Daniel Cohn-
Bendit ses propos anarchistes, ont finalement pris
conscience de cet état de choses. Les rapports qui
furent un moment tendus sont loin d'être très cor-
diaux mais les uns ont compris qu'ils avaient be-
soin des autres et que leur combat était essentiel-
lement le même. Les communistes et les cégétistes,
prudents et embarrassés par des idées trop précon-
çues, ont été quelque peu dépassés par la révolu-
tion. Ils ont manqué d'audace en laissant les étu-
diants se faire matraquer par les « forces de l'or-
dre » mais le jeu auquel ils se livrent maintenant
n'est pas exactement une « récupération » : c'est
une alliance avec une force neuve.
La CGT tient de sa forme syndicale une certaine
souplesse qui l'oblige à en référer toujours à la
« base » sans se retrancher derrière l'évangile du
Parti. Or cette base a montré sa fermeté dans la
grève générale ei sa volonté de porter la lutte du
plan social au plan politique. Nombreux ont été les
ouvriers qui se laissèrent tenter par la dureté ré-
volutionnaire des étudiants et qui acceptèrent de Se
mêler à eux. Aussi la CGT est revenue sur sa con-
damnation du mouvement étudiant et a-t-elle ac-
cepté de rencontrer l'UXEF :
« Elle considère qu'une collaboration féconde peut
et doit s'établir entre la CGT et l'UNEF sur la base
de la définition d'objectifs communs, de la respon-
sabilité des organisations dans la conduite d'un
mouvement de masse de caractère organisé, ainsi
que du respect mutuel de l'indépendance respective
des organisations et du respect des engagements
pris en commun »
L'UNEF veut aller beaucoup plus loin et organise
une grande manifestation inter-syndicale sur deux
objectifs : « Le renversement du régime et l'octroi
du pouvoir aux travailleurs ».
Mais le sens politique de son action n'aveugle pas
l'UNEF qui sait jusqu'où elle peut aller trop loin
et qui reviendra dès que les temps seront plus cal-
mes à des tâches plus syndicales. Le « Mouvement
du 22 mars » s'est déjà retranché sur ses positions de
Nanterre car il doit craindre que la pureté de sa ré-
volte ne soit détournée au contact des tactiques po-
litiques ; son but était surtout de contester et de
provoquer (ce qu'il a fait à merveille) mais
c'est à d'autres de reconstruire. Et certains qui fu-
rent sur les barricades, malgré le retour rocambo-
lesque de Cohn-Bendit pensent déjà amèrement à
cette phrase de T.E. Lawrence :
«... Pourtant quand nous fûmes au terme et que
vint l'aube du monde nouveau, les hommes des an-
ciens jours reparurent et nous dérobèrent notre
victoire, et ils la réformèrent à la ressemblance du
monde antérieur qu'ils connaissaient.
... En balbutiant, nous disions que nous avions
travaillé pour un ciel neuf et pour une terre nou-
velle... »
Gilles PL1ZY
Baccalauréat : Pompidou «consulto
M. Pompidou, ministre de l'Education Na-
tionale par intérim, a fait savoir que < la ses-
sion du baccalauréat QUI devait s'ouvrir les 6
et 7 juin dans la zone A et les 13 et 14 juin
dans la zone B est reportée dans les deux zo-
nes après le 20 juin. La date et les modalités
de l'examen font actuelement l'objet de con-
sultations auprès des diverses parties intéres-
sées et seront communiquées prochainement >.
En ce qui concerne le déroulement des épreu-
ves, il se pourrait que la formule retenue par
le gouvernement soit proche de celle propo-
sée par la F.E-N. et le S.N.E.S. : Passage sur
dossier scolaire, possibilité d'appel pour les
ajournés, sous forme d'examen oral. Pour les
refusés, une session se déroulerait sous une
forme voisine de celle du baccalauréat tradi-
tionnel.
Loin de nous l'idée de faire un procès d'in-
tention à M. Pompidou, mais nous aimerions
bien savoir quelles sont les parties intéressées
auxquelles il fait allusion, ce ne sont sûre-
ment pas les lycéens, ni leurs comités d'action,
pas plus que les grands syndicats d'enseignants
du secondaire qui ne le considèrent pas comme
un interlocuteur valable. Alors, qui ? quelques
professeurs, quelque comité < des Sages », quel-
ques parents d'élèves ? Les replâtrages opérés
par ce < groupuscule > sauront-ils obtenir l'ad-
hésion de la grande masse ? En face, ensei-
gnants, comités d'action, syndicats, continuent
d'élaborer projets et contre-projets. C'est l'Eco-
cole Napoléonienne qui est entièrement remise
en cause. Et cela, M. Pompidou ne l'a pas com-
pris, du moins en apparence. Là où il ne voit
que < monômes », il y a une volonté délibérée
de changement. Le seul moyen de sauvez le
baccalauréat, pour cette année, c'est que M
Pompidou accepte de s'effacer, et qu'il laisse
aux responsables de l'Enseignement Secondai-
re le soin d'établir les modalités d'attribution
du diplôme de fin d'études de classe terminale-
C'est à ce prix, seulement, que l'on pourra dé-
politiser le problème.
.....-------- M.E.
Les illusions
retrouvées
Mes protestations ont été
en partie entendues... Nous
avions des doutes sur la date
de la Fête des mères, mais
nous pourrions le 16 juin cé-
lébrer la Fête des Pères en
toute tranquilité... Cette heu-
reuse nouvelle, nous la devons
au Comité National de la
Fête des Pères, que préside M.
Maurice Genevoix. et au nom
duquel M. Roland Poszo di
Borgo a déclaré que « cette
manifestation familiale doit
t'tre maintenue, surtout en des
périodes difficiles où la famil
le demeure une institution de
base nécessaire ». // a même
ajouté gué « la Fête des Pères
est avant tout une manifesta-
tion familiale et affective
dont la date n? Aurait être
modifiée, notamment pour des
considérations Commerciales a
Une chose c''pemia>~i me
contrarie encore : le climat
familial, en ce jour de la Fê-
te des Pères, riSQuera d'être
-v.'.W par (7es converKci'c:'
politioues inorrinrtii'nps...
Le référendum r.e pour r ait -
il paf être reporté à une date
•ilfér-ïriire ?
Brigitte ANCELY
LA PROPOSITION DU SNES
Le SNES considère que les in-
térêts des élèves doivent être
sauvegardés, que le travail d'une
année scolaire doit être valable-
ment sanctionné, que le Bacca-
lauréat doit conserver toute sa
valeur et donner droit en parti-
culier à l'entrée dans l'enseigne-
ment supérieur, que tout doit
être fait pour empêcher qu'un
boycott du Baccalauréat ait pour
conséquence la mise en place de
barrages à l'entrée dans l'ensei-
gnement supérieur.
Dans cet :sprit. la -ertion aca-
démique de Paris du SNES sou-
met à la discussion des intéressés
les propos'fions suivantes pour le
déroulement des épreuves du
Baccalauréat session 1968 :
0 1ère é;uac. ..... lie un ion du
Conseil de classe.
— 1er temps : en présence des
délégués élus des élevés et des
représentants des associations de
parents d'élèves, et tenant compte
de 'eurs observations, le Conseil
de classe arrête les eritrres col-
lectifs de iupemfnt. en fonction
ries conditions de la scolarité
dont mention sera faite sur le
livret srolaire.
— 2ème temps : examen des
cas individuels par les professeurs
en fonction de l'option choisie
par le candidat.
Le Conseil donne un avis
d'orientation et formule un avis
selon un éventail de mentions po-
sitives et négatives sur l'aptitude
du candidat à l'admission au
Baccalauréat.
— 3 éme temps : le candidat
prend connaissance, dans l'éta-
blissement scolaire de ces avis et
porte ses remarques sur un docu-
ment Joint au livret scolaire.
Mention est faite du nombre de
candidats proposés à l'admission
et du nombre de chacune des
mentions déovtve? pour l'ensem-
ble de la classe.
£ 2éme étape. — Ces dossiers
sont transmis au jury qui décide
soit d'admettre immédiatement et
définitivement le candidat, soi*
d'un examen d'appel
0 Sème étape. — Cet examen
d'appel est un oral. Le Ju-
ry au début des épreuves,
informe les candidats de la na-
ture de cet examen et de la
procédure suivie par le jury, ain-
si que de la forme adaptée rete-
nue pour les matières principales
de la série qui auraient dû faire
l'objet d'unp r'nreuvp écrite. Pou:
chacune de? séries. les coefficient1-
restent ce qui était nrévu pour
l'ensemble des épreuves Le jury
prend EPS décidions anv<"; consul-
'atlon d1" livret scolaire.
£ terne étape Cession de
septembre de rappel pour tous
ajournés. Cette session pourra
comporter un écrit et un oral.
Ces mesures sont exceptionnel-
les et ne sauraient sur tous les
points engager l'avenir.
Pour les enseignement? techni-
ques, des modalités analogues
sont à prévoir (BT. BTS. BRI.
BSEC1
La Révolution dans
l'Enseignement Secondaire
Enfin l'Université se libère !
Elle est devenue en quelques se-
maines un vaste laboratoire de re-
cherches culturelles et pédagogi-
ques. L'esprit nouveau surgit par-
tout : au début dans les facultés
et maintenant dans le monde des
lycéens et parfois dans le primaire.
Dans les lycées, sous la pression
des jeunes du second cycle, une
révolution s'opère dans ies menta-
lités et les pratiques.
Le mouvement des lycéens du
second cycle s'est exprimé par la
formation de comités d'élèves ou
CAL. Dans certains endroits, les
comités ont eu le temps de se
soumettre à une élection générale
II en est sorti deux représntants
par classe. On a observé que dans
ies circonstances actuelles, cette
représentativité a été une force.
Certains ont obtenu : local, télé-
phone, droit de contacts avec l'ex-
térieur et en particulier avec d'au-
tres lycées, droit de publier leurs
travaux, d'affichage.
Une prise de conscience
L'émergence d'un mouvement des
,ycéens, mais aussi une prise de
conscience des enseignants impo-
sent une transformation radicale
des structures des lycées : sur le
plan administratif, culturel (en-
seignement) et socio-éducatif..
Le principe des structure? nou-
velles sera celui d'une cogestion,
j'est-à-dire de la reconnaissance
d'un pouvoir des lycéens sur toutes
ies décisions les concernant, et
d'un pouvoi- des enseignants et des
^lèves dans l'établissement.
Outre les droits donnés aux co-
mités, le pouvoir des lycéens sup-
pose qu'on fasse place aux élèves
dans toutes ies instances où se
débattent leurs probièmes : con-
seils de classes, conseil d'orienta-
tion, discipline
La reconnaissance d'un pouvoir
des lycéens et des enseignants
n'est possible que par la mise pn
niace d'un nouveau statut des ly-
cées. Cela signifie que ceux-ci de-
vront jouir d'une autonomie a dé-
finir.
Il faut définir le lycée comme
une maison ouverte. La division
actuelle entre établissements sco-
laires et maisons de jeunes ne se
défend que dans la conception
d'une école lieu d'ennui, et cou-
pée de la vie. On doit définir une
insertion du lycée dans le quar-
tier. 11 est inadmissible que ies
locaux ne puissent pas servir le
soir et dar= ia mesure des possi-
bilités a des activités culturelles
ouvertes aux jeun.s du quartier et
même à toute la population.
Le rôle des enseignants
a. Un enseignant a oesoin, pour
c,ue son enseignement prenne
toute sa siyrmic taion, de com-
prendre comment il s insère dans
un ensemble. ijuur cela, il faut
encourager la coii^nuiion de co-
rnues interdisciplinaires de re-
cherches, composés d'au moins
un enseignant par discipline ».
« Tout cela implique un chan-
gement des inc-maïues du corps
enseignant. Mais ce n est possible
que par un changement radical
des méthodes de Jorrnation des
maîtres. Il laut revoir toutes les
structures pédagogiques ».
Tout ce qui précède ne doit pas
aboutir évidemment à un alour-
dissement du temps de travail
des enseignants il s agit essentiel-
lement d'un changement de
structure de cet horaire.
Nous l'avoiio Mi en souhaitant
la formation de comité interdis-
ciplinaires, l'enseignement se-
condaire a besoin dune nouvelle
deîinïtion de la culture scolaire,
compte tenu de la culture vivan-
te daujourd hui. compte tenu de
la civilisation contemporaine.
Le gonflement des effectifs par
classe est un obstacle majeur à
toute transi ormation des mé-
thodes d'enseignement. Mais ce
préalable posé, il reste qu'un ef-
fort rie création et d'expérimen-
tation de méthodes nouvelles
est possible.
Cette transformation va
d'abord rtnm le sens d'un déve-
Ioppem°nt à côté des relations
maitre-élèves. de relations hori-
zontales entre élèves dans un tra,-
vail d'équipe.
1) Ce terte est composé d'ex-
traits d'un document de travail
établi par n Enseignement 70 »
à la suite d'une réunion d'une
centaine d'fnifirmnnfs du 1er et
'lu 2è -legrf*
Une seconde r'avion se tiemi.T
le samedi 1er juin à 19 heures
20 Rue Geoffroy Saint Hilaire
Paris 5è, sur les suites à donner
à cette initiative : on peut déposer
le courrier au siège d'Enseigne-
ment 70, 94 Rue N-D des Champs
Paris 6e.
La crise universitaire
Les futurs dentistes élaborent
la charte de leur profession
Hors l'année obligatoire de S.P.C.N-, les Eco-
les dentaires sont totalement isolées au sein de
l'Université. Malgré leur rôle incontestable
dans le domaine de la santé, aucun pont ne
les relie aux Facultés de médecine.
Les étudiants n'y reçoivent aucun enseigne-
ment de sciences fondamentales, leurs profes-
seurs n'ont pas un grade universitaire équiva-
lent à celui des autres facultés. Ils sont exagé-
rément limités dans leurs prescriptions médi-
cales et leurs moyens d'investigation et de dia-
gnostic.
Face aux progrès incessants de la chirurgie
dentaire, l'organisation actuelle de cette dis-
cipline est dépessée. Elle appelle incontesta-
blement une réforme. Les chirurgiens dentis-
tes ne veulent plus être des sous-médecins.
A.R.
Répondant à un désir général de
voir réformer l'organisation ac-
tuelle, dans le double sens, du re-
lèvement du niveau des études et
de te défense des intérêts de la
profession, les étudiants en chi-
rurfie dentaire de Paris se sont
donnés les moyens d'y aboutir.
Entrevoyant la réforme sous un
double aspect : création d'une fa-
cuJté de chirurgie et réorganisa-
tion de leur enseignement, ils ont
formé des commissions limitant
leur travail :
— à la création de nouveaux
c Statuts ».
— à une refonte de « l'enseigne-
ment ».
L'enveloppe de cet enseignement
•ous- entendant :
— de nouveaux aspects des exa-
mens,
— la mise en place d'un doctorat
d'exercice.
— l'obtention des 3ème et 4ème cy-
cles d'études universitaires.
Il est apparu à la commission des
statuts de solliciter auprès des
pouvoirs publics les points sui-
vants définis dans la Charte pro-
visoire.
Charte provisoire
Le régime d'études et d'examens
conduisant au diplôme de chirur-
gien dentiste se trouve dépassé par
le progrès de la Chirurgie Dentai-
re et les modifications du contex-
te européen. Ainsi les décrets du
11 janvier 1909 et ceux du 24 mai
1949. ainsi qu'une grande partie de
la réfor..ie de 1965 se trouvent
inadaptés.
A) Le nouveau régime d'études se
distingue du précédent par :
1 — La création d'une structure
particulière d'enseignement pou-
vant s'intituler Faculté de Chirur-
gie dentaire ou Département de
Chirurgie dentaire au sein d'une
Faculté des Sciences médicales ou
d'un Bloc Santé.
2 — La création de Centres de
consultation et de traitement en
chirurgie dentaire (CCTCD).
3 — La facilité d'adaptation de
ces structures et statuts à une fu-
ture autonomie universitaire.
4 — L'introduction de !a notion de
co-gestion Etudiants-Enseignants,
personnel administratif et techni-
que, au sein de "a même structure
mise en place.
5 — La suppression de la notion
ancienne d'année d'étude ex son
remplacement par celle de cycle
d'étude
6 — La création d'un corps d'En-
seignants-Chercheurs à plein
temps, encadrant un corps profes-
soral à temps partiel.
7 — La création d'une recherche
dentaire dans un cadre permet-
tant d'atteindre un niveau inter-
national et répondant aux besoins
nationaux.
8 — L'obtention des grades uni-
versitaires sanctionnant la fin de
ces études et donnant droit d'exer-
cer et permettant de suivre le cy-
cle universitaire normal menant à
l'enseignement et à la recherche
jusqu'au grade de professeur de
Faculté inclus (indice 760 à 1311).
B) L'exercice professionnel se ca-
ractérise par :
1 — Le fait qu'il est réservé à ceux
Le conseil de l'ordre
refuse de se dissoudre
Les Présidents et Secrétaires
Généraux des Conseils Départe-
mentaux de la ville de Paris et
du District de Paris, et les Con-
seillers Nationaux réunis sous la
présidence du Professeur de
Verriejoul Président du Conseil
National de l'Ordre des Médecins,
le 28 mai 1968. expriment avec
force leur attachement à l'insti-
tution de l'Ordre des Médecins
dont ils considèrent à l'unani-
mité qu'il est, dans l'intérêt des
malades, le garant de l'indépen-
dance du médecin ;
Ils se déclarent unanimement
partisans des réformes fonda-
mentales et depuis longtemps né-
«cfesfMt^es des études médicales,
et demandent à participer à
l'élaboration et aux décisions con-
cernant toutes mesures envisa-
à propos de leur profession.
qui posséderont le grade universi-
taire de Fin d'études et qui ne
peut être acquis que dans la struc-
tre mise en place.
2 — Notamment, l'ensemble des
spécialités mises en place :
Paradontie ; Endodontie ; Pédo-
dontie ; Orthopédie dento-faciale
Prothèse conjointe et adjointe
Chirurgie bucco-dentaire ; Radio-
logie ; Anesthésie et réanimation
Thérapeutiques par agents physi-
ques.
3 — Toute liberté de prescription
dans les trois tableaux du Codex.
4 — Tous moyens d'investigation
et de diagnostic.
5 — Ne saurait exister tout* no-
tion de limitation dans le domai-
ne des Recherches.
6 — La capacité professionnelle
est directement liée à la revalo-
risation des études et au progrés
scientifique. Un comité d'adminis-
tration mixte et permanent a été
créé.
Ces différents points sont te ré-
sultat de travaux approfondis sur
des revendications Justifiées :
— Il paraît inconcevable que le
plus haut grade de nos enseignants
(c'est-à-dire professeur 1er grade.
2ème classe) soit inférieur au gra-
de minimum d'un professeur uni-
versitaire (soit l'indice 760).
— Il est hors de question d'exclure
de leur enseignement les « fonda-
mentalistes » qui leur sont indis-
pensables. Mais Ils réclament aus-
si des enseignants, pour leurs ma-
tières spéciales : professeurs de
leur faculté qui aient un grade uni-
versitaire équivalent à celui des
autres facultés.
Ainsi donc. Ils recherchent la
possibilité d'un Sème et 4ème cycles
d'études universitaires, conduisant
à un professorat dans un cadre
hospitalo-universitaire.
Réforme des études médicales :
les syndicats médicaux solidaires
La Confédération des Syndicats
Médicaux Français considère
comme conforme à la vocation
de la civilisation moderne qu'une
large part des fruits de l'expan-
sion serve au développement,
dans toutes les catégories socia-
les, de la Santé, de l'Education
permanente, de la Culture.
La Médecine et au service de
cette œuvre humaine et sociale :
elle est une des professions capa-
bles de faire vivre aujourd'hui,
au bénéfice de tous, le libre dia-
logue d'homme à homme sans le-
quel il n'est pas d'épanouissement
personnel.
Depuis plusieurs années, la
Confédération des Syndicats Mé-
dicaux demande une réforme de
l'enseignement universitaire et
post-universitaire qui crée enfin
et maintienne des rapports con-
fraternels constants entre Etu-
diants, Praticiens et Enseignants.
Elle a signalé qu'une sélection
pratiquée dans un esprit malthu-
sien aggravait la pénurie déjà si
dramatique de médecins.
Aussi, elle se déclare solidaire
de l ensemble des étudiants en
médecine et comprend leurs as-
pirations.
Depuis plusieurs années, la
Confédération demande un dia-
logue véritable entre Pouvoirs
publics, Partenaires sociaux et
Profession médicale pour que
l'assurance maladie soit une œu-
vre authentique de solidarité na-
tionale, pour que soient assurées
à tous les médecins une dignité
et une sécurité familiale indis-
pensables à leur mission et pour
qu'en toute circonstance soient
respectés les principes fondamen-
taux qui garantissent l'indépen-
dance de la médecine.
En cette période grave, la C.S.
M.F. alerte tous les médecins et
leur demande de rester en con-
tact permanent avec leur syndi-
cat.
L'action entreprise sera pour-
suivie pour obtenir enfin un dia-
logue constructif et une partici-
pation effective de la Profession
médicale à l'élaboration d'une
politique de santé.
L'AGITATION ETU-
DIANTE EN EUROPE
Les étudiants allemands qui ont été, sous la bannière de Ru-
ai le Rouge, à la pointe de la révolte de la jeunesse, continuent
leur agitation, tournée actuellement surtout contre les lois d'ur-
gence. L'occupation de locaux et la recherche de dialogues sont
leurs armes principales comme c'est le cas pour les étudiants
français qui sont désormais, pour leurs camarades des autres
pays, l'exemple de la révolte. C'est ainsi que plusieurs centaines
d'étudiants ont fait irruption dans le grand amphithéâtre de l'Uni-
versité technique de Berlin-Ouest et ont saboté une conférence
d'un archéologue britannique. L« professeur Kurt Weichselberger,
recteur de l'Université en a jugé qu'il n'était plus en mesure d'exer-
cer son autorité et a donné sa démission. D'autre part, à Ber-
lin-Ouest, un millier d'étudiants environ ont attaqué le Théâtre
Schiller où l'on jouait une pièce de Feydeau, « La puce à l'oreille ».
Là aussi, il s'agissait de manifester contre les lois d'exception.
Les policiers, bien que prévenus des intentions des étudiants,
n'ont pu empêcher ceux-ci de briser les portes vitrées du théâtre
et de pénétrer dans le hall, mais tirant leurs revolvers et faisant
usage de leurs matraques, Ils ont pu refouler les assaillants. Au-
cun coup de feu n'a été tiré. Quelques manifestants ont été arrêtés.
Enfin, les étudiants de Berlin-Ouest sont furieux de ce que les
syndicats n'aient pas décrété la grève générale pour protester
contre les pouvoirs spéciaux. Es auraient même envisagé d'aller
occuper le siège de la Fédération des syndicats et la police montait
hier la garde pour empêcher que ne soit réalisé un tel projet
A BRUXELLES
Le Conseil de l'Université libre a déclaré, dans un communi-
qué, qu'il ne pouvait tolérer plus longtemps l'occupation de celle-
ci par les étudiants qui y sont Installés depuis le 23 mal.
En même temps, le Conseil se déclare prêt à satisfaire à la
revendication principale des étudiants en accordant à ceux-ci un»
plus large participation à l'administration de l'Université. Un
nouveau Conseil de 32 membres sera formé d'ici trois semai-
nes, dans lequel les représentants des étudiants, des anciens étu-
diants, des professeurs et des chercheurs seraient majoritaires
dans une proportion de trois contre un.
Dans la nuit de mardi à mercredi, 200 jeunes peintres et sculp-
teurs ont occupé le palais des Beaux-Arts.
Les jeunes artistes ont accroché sur la face du palais une
Immense banderole portant l'Inscription : « Assemblée générale ^
A LONDRES
De nombreux étudiants ont occupé au cours de la même nuit
le bâtiment principal de l'école des Beaux-Arts de Hornsey, dans
la banlieue Nord de Londres. La décision d'occuper le bâtiment
a été prise par un comité d'action qui souhaite que les étudiants
aient un contrôle total sur les fonds de leur syndicat, et parti-
cipent davantage au fonctionnement de l'établissement. Le direc-
teur de l'école a regagné l'établissement et couche dans son bu-
reau, mais les étudiants n'ont manifesté aucun désir de le ren-
contrer.
Vers l'autonomie des arts et métiers
Le corps enseignant et les tra-
vailleurs-étudiants du Conserva-
toire National des Arts et Métiers
soucieux d'accoître l'efficacité de
cet établissement d'enseignement
supérieur de caractère exception-
nel à vocation démocratique,
Les étudiants en pharmacie
ne veulent plus être des potards
Pour le grand public il
n'existe qu'un seul visage
du pharmacien, celui du
pharmacien d'officine dis-
pensateur du médicament
et conseiller éclairé. Or,
avant même le grand mou-
vement de réforme actuel
c'est à tous les niveaux de
l'élaboration dit médica-
ment que les pharmaciens
travaillent, depuis sa con-
ception initiale jusqu'à sa
mise sous forme galénique
utilisable en passant par la
mise en évidence de son
activité thérapeutique, sans
oublier le contrôle méticu-
leux à tous les stades de la
fabrication.
De plus il faut rappeler
aussi que la vocation bio-
logique du pharmacien
s'exprime dans les faits de-
puis des années : - les
pharmaciens qui ont créé
les laboratoires hospitaliers
de biologie, à une époque où
cette discipline était inexis-
tante n'ont cessé depuis de
développer leur activité
dans ce domaine bien qu'Us
ne bénéficient d'aucun sta-
tut. Quant aux laboratoires
d'analyses biologiques ils
sont dans leur majorité di-
rigés par des pharmaciens.
Mais la rapidité de l'é-
volution des techniques et
leur diversification extrême
dans le monde moderne né-
cessitent une adaptation in-
cessante.
C'est pourquoi les Assis-
tants et les Chefs de Tra-
vaux de la Faculté de Phar-
macie de Paris se proposent
de faire connaître ce qui a
déjà été élaboré dans le ca-
dre de la j'éforme de l'Uni-
versité.
• Les assistants et chefs de tra-
vaux de la Faculté de Pharmacie
de Paris ont adopté, en Assemblée
Générale, le 17 mai, la motion des
étudiants en Pharmacie.
Ils ont installé 7 groupes de
travail articulés d'une part avec
les commissions de travail des étu-
diants, d'autre part avec les com-
missions paritaires qui compren-
nent 3 étudiants et 3 enseignants,
dont un de leurs représentants.
Ces Commissions paritaires parti-
cipent à l'élaboration des proposi-
tions de réforme dont la ratifica-
tion dépend du vote de l'Assem-
blée générale étudiante.
Le problème des examens de fin
d'année est en voie de règlement, ce
qui permet à l'ensemble de la Fa-
culté de se consacrer pleinement à
l'étude des problèmes de fond.
Trois commissions paritaires
d'urgence ont traité de l'organisa-
tion de l'enseignement pharma-
ceutique pour l'année 1968-69 dans
ses trois orientations principales :
industrie, officine et biologie.
Pour l'orientation vers l'indus-
trie, il est prévu un enseignement
des techniques industrielles du
fonctionnement d'une entreprise et
de son administration. Il s'y ajou-
te un stage effectué dans l'indus-
trie.
Pour l'orientation vers l'officine,
il est prévu un enseignement d'é-
ducation sanitaire et sociale et
« d'analyse biologique clinique
d'urgence », avec, en plus, un sta-
ge officinal et un stage hospita-
lier.
Quant à l'orientation vers 1«
biologie, les pharmaciens réaffir-
ment la nécessité prévue par la
loi d'organiser un enseignement
pratique dans leurs laboratoires
hospitaliers.
En dehors de cette année de
transition, d'autres propositions
font l'objet de travaux approfon-
dis. Ils concernent l'autonomie de
la Faculté, la réforme des struc-
tures, les programmes, les métho-
des d'enseignement et la pédago-
gie, îa liaison Hecherche-Enseï-
gnement, et l'avemr de la profes-
sion.
Pour ce qui est de l'autonomie
de la Faculté, la commission pa-
ritaire l'envisage comme un moyen
d'assurer la libre gestion de l'éta-
blissement et estime qu'elle doit
être assumée par tous ses mem-
bres. EHe définit :
1°) l'autonomie financière
2°) l'autonomie administrative
3") la co-gestion qui repose sur
deux principes fondamentaux :
« — L'élection à tous les niveaux
à parité avec les enseignants,
— le renouvellement de même à
tous les niveaux des organes di-
recteurs, après une durée qui res-
te à définir ».
Cette autonomie est considérée
comme un des moyens de mettre
en œuvre rapidement la réforme
qui dans l'intérêt de la Santé pu-
blique et dans la perspective du
Marché commun, devrait conduire
le futur pharmacien à recevoir un
enseignement mieux adapté à
l'exercice de profession dans les
trois branche.. : industrie, offici-
ne et biologie ».
compte tenu des besoins et des
préoccupations des élèves et de.
la nécessité de leur participation
au fonctionnement et aux res-
ponsabilités de la gestion, se sont
déclarés solidaires sur leg pointa
suivants :
— maintien d'un libre accès pré-
sélection
— restitution et développement de
l'autonomie du C.N.A.M.
— mise au point rapide de la ré-
forme des études déjà entre-
prise
— réforme des structures en vue
de permettre l'information et
la participation effective de
tous les intéressés
— mesures législatives facilitant
le développement de la promo-
tion des travailleurs-étudiants
dans leur ensemble et affir-
mant le rôle de pilote du
C.N.A.M. dans ce domaine,
prise en considération, dans les
conventionsl collectives, de tous
les diplômes du C.N.A.M.
— réciprocité totale d'équivalence
avec diplômes universitaires
— mise à la disposition du
C.N.A.M. des moyens indispen-
sables à l'accomplissement de
ses missions permanentes d'en-
seignement, de recherche et de
service public.
Beaux-Arts : la contestation
s'amplifie
Les architectes et les étudiants
qui ont Investi l'ordre et ont exigé
des Pouvoirs Publics sa dissolution,
invitent tous ceux qui sont con-
cernés par l'acte de bâtir a parti-
ciper nombreux à la réunion d'in-
formation qui se tiendra Vendredi
31 Mai 1968 à 18 h à l'Institut
Miohelet (Ancien institut d'urba-
nisme 3. rue Michelet Paris 6è).
0 L'Association nationale des as-
sistantes sociales et des assistants
sociaux, se solidarise avec les
étudiants du service social regrou-
pés en comités d'action inter-
Ecoles pour appuyer leur demande
de repvrt de la première session
d'examen du diplôme d'Etat.
Jeudi 30 Mai 1968
COMBAT 13
Seul prnJBt révolutionnaire, le rapport DERDCLES
soulevé l'enthousiasme des Etats-Généraux du Cinéma
bien qu'il n'arrive qu'en quatrième position après trois formules réformistes
par Henry CHAPIEB
Réunis à Suresnes pour la seconde fois en Assem-
Clée Générale, les 1.092 votants de Dimanche soir
ont été les acteurs et les témoins d'un revirement
étonnant : bien qu'ils aient donné leurs voix à trois
formules de type réformiste (les rapports Malle,
Lhomme, et Cournot), les participants aux travaux
se sont brusquement aperçus - à la faveur des
longues discussions critiques - que seul le projet 4,
présenté par Thierry Derocles était réellement d'ins-
piration révolutionnaire.
Il n'est pas difficile de comprendre ce paradoxe :
très brillamment soutenu, le projet 16 de Louis
Malle était le fruit d'un fort noyau dé cinéastes-
auteurs, et d'hommes ayant - comme René Allio -
l'expérience d'une action culturelle en milieu po-
pulaire. Ce projet avait recueilli 429 voix, et vient
en tête des textes retenus pour mettre au point
cette plateforme commune des Etats Généraux, qui
s'engagent à la défendre face à tout interlocuteur
futur, quel qu'il soit. Mais à la fin de la soirée de
Mardi, on s'est rendu compte qu'il comportait des
lacunes, et qu'il n'apportait pas de réponses assez
satisfaisantes au niveau du financement. Les six
unités de production (voir < Combat > du Mercredi
22 Mai) ne disposeraient au départ que de sommes
modestes, le fonds d'aide de l'Etat ainsi que les
antres dotations officielles ne dépassant guère le
chiffre de 5 à 6 milliards d'anciens francs : il a fal-
lu, pou arriver à ce montant tenir pour acquise la
suppression du gaspillage entretenu par « Unifran-
ce » et les organismes parasitaires du Quai d'Orsay
et du Ministère de la Coopération, « fromages gaul-
listes » à bannir d'urgence.
Il est évident que dans ces conditions, le nouveau
régime issu du projet 16 risque de cantonner la
production au niveau du jeune cinéma, et des films
destinés au même « ghetto » intellectuel réservé
jusqu'ici aux salles dites d'Art et d'Essai. Bien que
la formule soit un progrès par rapport aux dino-
saures de l'administration qui siègent au C.N.C., il
est juste que le groupe d'études inspiré par la con-
testation permanente propre au mouvement du 22
Mars rejette ce réformisme de bon aloi.
Mentalité légaliste
La discussion sur le projet 13, soutenue par les
syndicats m'empêche de publier « inextenso > le
texte proposé. Relevons cependant qu'il est curieu-
sement le plus proche d'une certaine mentalité
SFIO, dans le savant dosage qui "est fait entre un
secteur nationalisé, co-géré par l'Etat, et un sec-
teur privé, qui reste libre, et qui sera détaxé. Voici
comment les auteurs du projet 13 imaginent l'auto-
gestion du secteur nationalisé :
< L'organe essentiel de ce secteur nationalisé est
un Etablissement de Crédit Public autonome à vo-
cation industrielle et commerciale, cogéré parilai-
rement par des représentants de l'Etat et de la
Profession.
• FONCTIONNEMENT FINANCIER :
— Dotation en capital" inscrite dans le budget gé-
néral de l'Etat.
— Recettes d'exploitation — avec un système ac-
céléré de la remontée des recettes, dont la quote-
part revenant aux organismes de production sera
augmentée du fait de la suppression quasi totale des
commissions de distribution (part distributeur).
• PRODUCTION :
— Cet établissement de Crédit Public compren-
dra des groupes de production eux-mêmes gérés et
basés sur les principes de la libre circulation des
personnel (cinéma, télévision) et sur le principe de
directions élues et renouvelables.
— C'est au niveau de ces groupes de production
que s'effectuera le choix des sujets, tant pour le
secteur autogéré que dans le cadre des co-produc-
tions avec le secteur privé.
— Le financement sera assuré par l'Etablissement
de Crédit Public. La notion de rentabilité se com-
plétera d'une notion de recherche et de contestation
permanente. Les groupes de production joueront
un rôle pilote >.
Il était fatal que l'idée d'une co-gestion paritaire
avec les représentants de l'Etat rappelle le fâcheux
précédent de la Cinémathèque. On devait objecter
au groupe d'études 13 que le pouvoir quelqu'il soit
arrive toujours à détenir la majorité, et à contrô-
ler ce genre d'organisme.
Là encore, Thierry Derocles, rapporteur du pro-
jet 4 s'insurge - à juste titre - contre la perspective
illusoire d'une dotation de capital inscrite dans le
budget général de l'Etat : le financement massif,
seul capable d'assurer un changement radical de
structures manque ici, comme dans la formule pré-
cédente.
A ce niveau, il y a beaucoup plus de souplesse et
d astuce dans le projet 19, passionnément défendu
par Robert Enrico, et soutenu par un certain nom-
bre de réalisateurs-producteurs.
Il faut de toute façon en retenir l'admirable pré-
face de Michel Cournot, sa « déclaration des droits
du cinéma >. sa mystique révolutionnaire et son
style enflammé. Mais la seconde partie du projet 19
est un tel amalgame de dispositions libérales, un tel
tremplin pour les jeunes loups de la production, que
nous pataugeons au coeur du compromis néo-capi-
taliste.
J'attendais d'en arriver à ce point du compte-
rendu ehronoligue, pour dire que tout le dilemme
des Etats Généraux se réduit à une seule question :
faut-il aboutir à une plate-forme commune inspirée
par des considérations réalistes - donc réformistes -
ou est-il préférable d'être à la ponte du combat en
pariant sur un bouleversement radical ?
Il est évident qu'une société se transforme rare-
ment par le haut, ci que l'ensemble des trois pre-
miers projets partent d'une hypothèse capitaliste.
Les groupes 16, 13, et 19 ont chacun - à leur ma-
nière - expliqué que la plateforme n'était pour
l'instant qu'une première étape, ce fameux point de
< non-retour ^adopté par les Etats Généraux vis-
à-vis du négociateur officiel. Les représentants syn-
dicaux ont notamment soutenu que l'ordre bourgeois,
ne s'abattant pas d'un trait de plume, on devait
s'efforcer d'obtenir l'essentiel, avant que de s'enga-
ger sur la voie d'une utopie, fût-elle d'une plus
évidente pureté révolutionnaire-
Apres douze heures de discussions acharnées,
j'avoue que si ma raison fut séduite par le sérieux
du rapport Louis Malle, il n'en reste pas moins que
seule l'intransigeance du projet Thierry Derocles
est fidèle à là vocation révolutionnaire que se sont
donnée les Etats Généraux du Cinéma, lorsqu'ils se
Sont réunis à l'Ecole de Vaugirard.
En effet, si l'on sy arrête assez longtemps pour
réfléchir, qu'est-ce qui change réellement le sys-
tème en profondeur dans les trois projets de base
votés par l'Assemblée ?
Le financement aléatoire est le point faible dans
les trois cas, ainsi que le fait de pactiser avec un
secteur privé où forcément les conditions de pro-
duction, lancement, et diffusion sont plus efficaces :
ce qu'on réforme ne relève - en définitive - que
du bon vouloir de l'Etat, et de sa propension au mé-
cénat.
Le rôle d'un ferment
La force du projet Derocles, qui n'a pas de chance
de l'emporter aux Etats Généraux, mais qui doit
jouer - par la suite - un rôle de ferment, est d'avoir
fait table rase de tous les systèmes, y compris de la
paperasserie, inévitable à l'application des solutions
présentées jusqu'ici. En voici la teneur : les Etats
Généraux, qui siégeront peut-être simultanément
avec les travaux de synthèse effectués en commis-
sions, n'ont pas fini d'en débattre. J'y reviendrai.
Le rapport de Thierry Derocles débute par un
préambule :
« Ce qui est juste et normal, c'est le droit pour
chacun à participer avec les autres à l'épanouisse-
ment de tous. Les événements de mai 68, par leur
ampleur et leur contenu, ont fait qu'il n'est plus
possible d'accepter les aliénations passées. C'est en
cela qu'ils ont une portée révolutionnaire. Partici-
pant à l'épanouissement culturel de tous, l'audio-
visuel doit révolutionner sa façon d'exister. C'est ce
que propose le projet qui suit.
L'audio-visuel doit devenir un service public in-
dépcndanl du pouvoir, dans le cadre d'un Office re-
groupant cinéma et télévision à l'échelle nationale
et permettant :
1) l'accès gratuit à ses spectacles,
2) la décentralisation véritable de la culture,
3) la possibilité pour tous de devenir profes-
sionnel.
Cet Office serait divisé en deux services, l'un pour
la télévision, l'autre pour le cinéma. S'il est néces-
saire que ces deux services interfèrent, dans l'opti-
que des Etats Généraux, nous n'avons toutefois pris
en considération que les structures du cinéma.
Ce financement permet la multiplication des pro-
ductions de films, donc celle des emplois, et pare au
chômage.
Il est calculé annuellement un coût moyen des
films. Tout budget inférieur ou égal à ce coût moyen
sera discuté par une commission composée de tra-
vailleurs du cinéma et de spectateurs.
Le budget d'un film est préparé par toute l'équipe
des travailleurs participants qui est responsable du
film de son début à sa sortie.
L'Office achète les films étrangers et vend les
films français à l'étranger. L'Office organise et ad-
ministre la distribution des films et l'exploitation
des salles dont les directeurs deviennent les anima-
teurs, appointés par l'Office.
Des leur premier film, les travailleurs de la pro-
duction cinématographique reçoivent un salaire
mensuel uniforme.
Pour chaque travail effectué, ils touchent un se-
cond salaire selon leur qualificatiun. Un travail mi-
nimum est exigible.
Dans le cas d'un vente .. l'étranger, le montant de
la vente est réparti entre l'Office et l'équipe du
film. La somme dévolue à l'équipe est répartie en
parts égales aux travailleurs du film, en plus des
deux salaires précédents.
Extension
Le cinéma doit aller chercher son public et ses
travailleurs là où ils vivent.
Des centres régionaux de l'Office doivent donc
permettre, non seulement la diffusion des specta-
cles, mais aussi la production de films et l'acquisi-
tion de la connaissance professionnelle dans toutes
les régions de France.
Il faut attacher des studios à chacun de ces cen-
tres.
Il faut créer de nouvelles salles, mais aussi des
unités de projection mobiles pour que les specta-
cles pénètrent à l'usine et dans les communes rurales
où l'exploitation d'un salle serait sans lonrirmcius.
La sortie en exclusivité est abolie ».
Les exigences du
Comité
Permanent
du Cinéma
Le Comité Permanent du Ci-
néma (1) groupant Les repré-
sentants des diflérentes branches
de la pro/ession, rappelle que le
cinéma est un moyen d'expres-
sion de la culture, et, qu'à ce
titre il doit occuper dans tous
les domaines la place prépon-
dérante qui est la sienne.
Le Comité Permanent décla-
re que la politique du cinéma
doit être définie par la profes-
sion.
En conséquence, il demande :
— Le remplacement de la ré-
glementation actuelle par des
conventions professionnelles,
— La libération de la cen-
sure,
— L'égalité f:scaie avec les
autres moyens de diffusion
d'information et de culture (li-
vres, journaux, télévision),
— L'établissement des colla-
borations paritaires entre
l'O.R.T.F et le cinéma-
L'adoption de ces mesures
est seule capable d'assurer l'a-
venir du cinéma français- Elle
permettra de réaliser le plein
emploi def travailleurs dp l'en-
semble cincrnfïtnarariïi'oii" de
rétablir la fréquentation des
salles et d" maintenir le rayon-
nement du cinéma français
dans le mond.e de demain-
(1) Comité Permanent du Ci-
néma 92. Av. des Champs-Ely-
sées.
• Comité de grève de la musi-
que.
L'Assemblée générale des mu-
siciens "xécutants aura lieu le
jeudi 30 mai à 15 heures à
l'Olmpia — entrée 10. rue Cau-
martin.
Il est recommandé de se mu-
nir de pièces justificatives.
LES MUSIEIEJVS...D/li\S LE MOUVEMENT
On sait que 95 % des Instru-
mentistes sont en grève ; que les
studios d'enregistrement ont fer-
mé leur porte et que la vie mu-
sicale, elle aussi, se trouve frap-
pée de paralysie.
Bien entendu. les quelques
30000 musiciens professionnels
français ont leurs problèmes,
l<;urs revendications. Des élé-
ments d'informations en notre
possession, on peut en caracté-
riser ainsi l'essentiel :
— Interdiction sur l'ensemble
des émetteurs de radio-diffusion
ayant leurs studios d'émissions
sur le territoire français, de l'uti-
lisation de musique et de chan-
sons enregistrées, pendant toute
la durée de la grève.
Les musiciens considèrent, en
-fftrt. que l'O.R.T.F. et les pet tes
périphériques leur dénient en les
remplaçant par des disques, le
droit de grève inscrit dans la
Constitution, e_t portent atteinU-
à son efficacité.
_ Interdiction de la musique
métallique dans les cabarets et
assimilés.
— Retraite à 60 ans basée -ur
les dix meilleures années et non
les dix dernières dans la carriert
de l':nstrumentiste.
— Convention collective natio-
nale opposable à tout employeur,
que; qu il soit.
— Réglementation de l'amateu-
risme.
— Révalorisation de la rému-
nération.
Il y a là certes, à mon sens, des
revendications absolument justi-
fiées, telles la première, la troi-
sième, la quatrième, la dernière
D'autres, du point de vue de
l'usager, paraissent être telle
que, difficilement admissibles. On
peut concevoir en effet que celui-
ci préfère danser sur des enregis-
trements de haute qualité signés
d'orchestres remarquables, plutôt
que sur la musique Uisuuee par
un orchestre permanent de se-
cond ordre, en tout cas jamais
aussi varié qu \.n as. <.• t mt.-nr de
disques. Quant à la question des
amateurs, n'oubions pas que
presque toutes les formations qui,
ces dernières années, ont créé les
« tubes » étr^-nt au départ des
groupes d'amateurs tels que les
Beatles, les Rolling Stone en
Angleterre, les Haricots Bouges
et les Chariot en France, et c'est
c Tipréhensible. Un petit groupe
de copains animé d'un même es-
prit et trouvant ensemble un
style, demeurent préférables à un
assemblage fortuit de musiciens
interchangeables.
D'où la nécessité de réfléchir
sur la question avant d'en tran-
cher,
Jean HAMON
Devant Le triomphe
à l'Arlequin,
zxclusnité Rive Droite
1 La Royale
ARLEQUIN (LA ROYALE
I,IT «2.25 I \NJ 82 «fi
CLAUDE MAURIAC (UFigane Littéraire)
Si \*>us voulez rire,
ce qui s'appelle rire, allez vog".
_
UEOMcCAREY
CHARLES LAUGHTON
Gentleman Jfcrf etTo b. or no» to h»-
obtient bs fameuses a rare»
____________________«ATM
Vnegurartie (ton.1***** *&**
MIKE
BURTOIV :
les staqes en
altitude seront
utiles aux nageurs de fond
Quel effet une altitude de plus
de 2.000 mètres, celle de Mexico.
où se dérouleront le* Jeux Olym-
piques de 196S. peut-eiie avotï sur
un nageur habitué aux épreuve';
disputées au niveau de la mer '.'
Pour trouver une réponse à la
question. MiK.e Burton, '2i> ans. un
des meilleurs nageurs de.s Etas-
Unis. a voulu se soumettre à un
stage de Quatre semaines a
l't Air Force Academy » du Colo-
rado située à une altitude de
2.225 mètres.
A l'issue de sa première semai-
ne de séjour, au cou''s de laquelle
il a e/fectué quatre heures de nage
par jour dans la piscine de l'aca-
démie. Mike Burton a lait un cer-
tain nombre de constatations qu'il
u résumées comme suit :
« En premier lieu, je ne p>".n:
absolument pas nager aussi vite
Qu'au niveau de la mer. Les pre-
miers jours, j'étais bien au-dessous
de mes temps habituels. Mais de-
puis lors, je n'ai pas cessj d'amé-
liorer mes performances. Les deux
premiers jours en altitude ne de-
vraient préoccuper personne outre
mesure. Par contre, le troisième
jour, on se sent comme « écrase
sous un monceau de briques »
« En deuxième lieu, a indiqué
Burton, j'ai constaté qu'après une
épreuve, U me faut beaucoup de
temps pour récupérer ».
Après les épreuves de sélection,
qui se disputeront a Long Beach.
Californie, du 20 août au 2 sep-
tembre, les membres de l'équipe
olympique américaine de natation
feront un séjour d'un mois a
T« Air Force Academy » du Colo-
rado avant de gagner le Mexique.
« L'entraînement en altitude, es-
time Burton, sera particulièrement-
utile aux nageurs de fond. Je pen-
se que l'altitude devrait les gêner
davantage que les sprinters ».
Mike Burton est détenteur de
deux records du monde nage li-
bre : StM) mètres en S'44". temps
réalisé au Japon le 2 septembre
1967, et 1.500 mètres en 16'J4" 1 '10,
à Chicago, le 13 août 1967.
Le nouveau règlement de la
Coupe d'Europe de Football
L'Union Européenne de Foot-
ball (UEFA), dont le siège est à
Berne, a publié les règlements de
la 14èrne coupe d'Europe des clubs
champions et de la 9ème coupe
d'Europe des vainqueurs de coupe.
Les inscriptions pour les éditions
1968-69 de- ces deux compétitions
devront parvenir a l'UEFA par le
canal des Fédérations nationales
d'Ici au 30 juin. Le tirage au sort
du premier tour aura lieu le 10
juillet.
Plusieurs modifications ont été
apportées aux règlements de ces
deux compétitions. En voici les
principales :
Deux joueurs pourront être rem-
placés durant toute la durée de la
rencontre (jusqu'ici seul le gardien
pouvait être remplacé). Avant la
rencontre, chaque équipe pourra
annoncer seize joueurs sur la feuil-
le de match. Les joueurs rempla-
cés ne seront pas autorisés à re-
jouer.
La partie sera arrêtée au cas où
une des deux équipes ne compte
plus que six joueurs. Dans un tel
cas une décision (forfait ou match
à rejouer) sera prise par la com-
mission chargée de l'organisation
des coupes d'Europe,
Seuls les Joueurs qualifiés avec
leur club avant le 15 août seront
autorisés à disputer les rencontres
des trois premiers tours.
En cas d'expulsion, le joueur en
question ne pourra pas jouer la
prochaine rencontre de la même
compétition ou de toutes autres
compétitions officielles organisées
par l'UEFA (jusqu'à présent, le
joueur était suspendu pour la par-
tie suivante de la coupe en ques-
tion).
Le secrétaire de l'UEFA a égale-
ment publié le règlement de l'édi-
tion 1969 de Son tournoi pour ju-
niors. La phase finale de cette
compétition se déroulera du 17 au
27 mai à Leipzig.
AU SPRINT
% La Commission du championnat de France a envisagé la date
du 9 juin pour les demi-finales du C.F.A. : A Châteauroux : Ga-
zelec Ajaccio - Sedan A Abbeville : Sochaux-Entente Bagneux
Fontainebleau Nemours.
Elle avait retenu le 16 juin pour la finale, mais le référendum
devant avoir lieu ce même jour, il semble peu probable que cette
rencontre puisse se disputer à cette date.
£ Le classement, général du Tour d'Italie après huit étapes est
le suivant :
1). Dancelli (Italie) 37 heures 21' 41" ; 2). Merckx (Belgique)
& 1' 47" ; 3). Zilioli (Italie! à 2' 40" ; 4). Letort (France) à 41 13" ;
5). Adorni (Italie) à 4' 17" : 6> Motta (Italie) à 4' 29" ; 7). Gi-
mondi (Italie» à 4' 52" ; Sl.Jimenez (Espagne) à 4' 55" ; 10).
Vêlez (Espagne) à 4' 55':.
• Leandro Faggin-Horst Oldenburg a remporté les six jours cy-
clistes de Montréal avec 510 points et un tour d'avance sur la
Belgique « A » (Emile Serveryns-Patrick Sercu) 762 points et les
Danois Pâlie Lykke - Freddie Eguen 405 points.
^ En raison des frais élevés qu'elle comporte, la Thaïlande re-
noncera probablement à l'organisation des sixièmes jeux asia-
tiques en 1970, a annoncé le général Prakjhas Charusathien.
Le général qui est président du Comité olympique thaïlandais
estime que l'organisation des jeux coûterait à la Thaïlande 700.000
livres sterling.
La Thaïlande avait déjà organisé les cinquièmes Jeux d'Asie
en décembre 1966.
0 L'Association canadienne de ski amateur demandera à la fédé-
ration internationale de ski. l'autorisation d'ouvrir les champion-
nats du Canada de ski alpin aux amateurs et aux professionnels
0 Le groupement des clubs autorisés a décidé que la prochaine
Journée de championnat de France de football professionnel (1ère
et 2ème division) dont les matches devaient s'échelonner les 31
mai. 1er et 2 juin, était reportée à une date ultérieure.
0 Basket. — La France a battu la Hollande par 6G à 49 (mi-
temps 27-19) en tournoi préolympique poule A et est pratiquement
qualifiée pour les J. O. de Mexico
• La direction du tour de l'Avenir communique : « A la suite
de la décision du gouvernement de fixer au 16 juin la date du ré-
férendum, la direction du tour de l'Avenir décide d'avancer au
samedi 15 l'arrivée de sa compétition à Nancy.
« Le parcours de fin de course modifié en accord avec les
autorités intéressées sera révélé demain ».
0 Fixé au 16 juin, à Aubenas. le championnat de France des rou-
tiers professionnels pourrait être avancé de 24 heures.
FAUT-IL ROUVRIR
LES ECOLES D'ART
par Francis PI.UCHART
La force de ia révolution cul-
tutvl:.* oat d avoir exprimé son ca-
raclo;v positit par une série de
gesici novateurs : fermetures de
facultés, de théâtres, de musées
••t. 3. travers ces actes, d'obtenir
un;-» ptii.'aiysie complète de tous
!e.s sy.-tenies organisés dont elle
démoncre a;r, : l'inutilité.
En dépit ut- nos cris, l'analpha-
bétisme artistique devenait chaque
jour plus évident et le terme mê-
me de culture semblait condamné
a. n'être employé qu'au passé Fl
subitement voici que tout est rer,-
du passible, que la démission eu»
tous les coup-.tbles. Malraux en
tète, a cessé de n'être qu'un vain
espoir. Une force s'est dressée
spontanément qui refuse !'er,:a-
clrem^nt de tous les pa.'ijs tindi-
i jnnels. qui remet totalemciY en
cause les idéologies bourgeoises,
qui oppose le seul mais extraor-
dinaire pouvoir de l'imagination à
la médiocrité des systèmes scléro-
sés dnnt la faillite est imputable
à la carence des vieillards qui
s'accrochent désespérément à leurs
prérogatives sar,; rien comprendre
à la bouleversante mutation ac-
tuelle et au droit à la vie que
réclame dans le sang la jeunesse
tout entière.
—S'il ne compose avec eux, l'art
a toujours représenté un im-
mense danger pour les gouverne-
ments. Tous les régimes de dicta-
ture n'ont cessé de le faire en
emprisonnant ou er, expatriant ses
plus purs représentants. Moins
violemment mais non moins in-
sidieusement, la cinquième Répu-
blique n'a rien fait d'autre. Elle
a étouffé la création, elle l'a ca-
nalisée à sorj gré, avec une inef-
fable fourberie, en affectant, prin-
cipalement dans les maisons de
la culture, de la servir- C'était
pour mieux la brimer, la réfuter,
la mépriser. Dans tous les domai-
nes artistiques (peinture, sculptu-
re, architecture, musique, choré-
graphie), c'est sous la pression des
pays étrangers que les créateurs
de ce pays ont eu droit quelque-
fois à la parole- En revanche, nos
théâtres, nos musées, nos Maisons
de la Culture, dans la quasi-to-
talité de leur action, n'ont guère
représenté et cautionné des œu-
vres inexportables, que des œuvres
refusées à l'étranger pour causa
de médiocrité. Cette volonté d'é-
touffer la création s<^ mesure dans
le fait que tout approche de l'art
contemporain est à peu près in-
terdite à l'ensemble de la nation
qui. ignorant les voies d'acc'V à
l'art actuel, est condamné à en
être tenu à l'écart tout au lorr,
d'une vie. L'Etat est responsable
de cette incurie soug le triple as-
;J?ct de l'éducation, de l'informa-
tion et de la promotion.
La culture a besoin
de cadres
La culture nouvelle a besoin
de cadres, de spécialistes et d'un
public co'Vtitué de la totalité des
citoyens d'un pays. Il s'agit au-
jourd'hui d'enseigner l'art fiés
l'enfance par un contact direct
avec la création contemporaine,
voie d'accès logique à la connais-
sance du phénomi.ie artistique
tout entier. Dès l'école maternelle
et, plus tard, dans les lycées, cet
enseignement doit s'effectuer à
part entière avec les autre? dis-
ciplines de sorte que. parvenus au
terme de leurs études secondai-
rf»s. les adolescents puissent déci-
der du métier d'artiste comme on
décide -lYtre médecin, avocat ou
technicien. On n'atç>rend pas plus
le métier de peir/re ou de sculp-
teur que celui d'écrivain. Il faut
simplement en faire découvrir les
grandeurs et les servitudes, les
exis;pnrf<; et les ambitions. Il faut
des l'enfance montrer que son rô-
le est d'embellir la vie et qu'il
est par là l'une des meilleures ré-
no-r°s au problème de l'emploi
des loisirs Le goût de la création
artistique nait spontanément lors-
qu'on prend conscience de ses
pouvoirs Dans un" éducation ar-
tistique b'en comprise dont le rô-
le consisterait essentiellement à
développer le contact avec l'œu-
vre d'art, chacun serait, à la fin
de ses études secondaires, en me-
sure de participer au mouvement
créateur, soit comme acteur, soit
comme témoin
Les nouvelles écoles d'art, rat-
tachées à l'enseignement supérieur
auraient un double rôle : celui
de parfaire les connaissances de
ceux qui se destinent à une pro-
fession artistique et celui de for-
mer les cadres des structures cul-
tuiii'les en mutation permanente.
Deux positions qui se rejoignent
à un certain niveau tentent ae- le
tueile'iieiH. de cvnier le .suj i. ; u:
celle du comité de grève de 'ex- d'
école des Beaux-Arts et celle au
Comité [jour la réforme de
t.eit;nenieiit artistique qui s:
l'institut d'art et a'archéologi
rue ,M:dielet-
L'attente du Comité
dégrève de l'école des
Beaux-Arts
Pour sa part, le Comité de grè-
ve de l'ex-ecole des Beaux-Arts
estime qu'il est actuellement illu-
soire de penser qu'un enseignement
réellement démocratique piar son
recrutem -, et par son contenu
puisse s .1,..calier d'une manière
durabl' ra".;, une trans!r-r.i;;n... .
radicale de toute la société, faute
de quoi l'ilôt d'autonomie et de
contestation se trouverait vite ré-
duit à l'impui^-vve. Toute réfor-
me tendant à aouyter l'enseigne-
ment à la société actuelle ne fe-
rait que renforcer les structures
que les étudiants s'efforcent de
détruire. Ceci est vrai en général
et en particulier en ce qui con-
cerne l'architecture, l'architecte
étant au service de la classe et
de la culture dominantes, il con-
solide les bases matérielles de
cette domination, la réforme de
l'enseignement doit s'accompagner
d'une réforme des circuits de
diffusion. En conséquence de ces
divers facteurs, le Comité de grève
de l'ex-école des Beaux-Arts pense
qu'il est encore trop tôt pour pré-
senter les projets détaillés de la
réforme des études.
Les projets du Comité
pour la réforme
de l'enseignement
Quant à lui. le Comité pour la
réforme de l'enseignement artisti-
que, qui reste en contact perma-
nent avec le Comité de l'ex-école
des Beaux-Arts a décidé d'établir
un projet de réforme de l'ensei-
gnement artistique visant à la
création d'un" faculté des arts
De cette faculté, sortiraient créa-
teurs et enseignants, une nouvel-
motion u:.; ;.i^ au/. >>re-
uuet's Ki posàiO!.:'.-». et ;e droit
d'erL--.';g-!i-_>i', ai:\ sec ' ; , ta Ue r.-ui'e
a-uvre cieat:':c-'. Toi.t.-j sélection.
toute Si>pa:a:;"ti devront être ban-
nies afin d--1 ;na.:r.enir une con-
n-xion absolue et iwa'.anenie en-
tre altistes unusic:en.s, peiliv»,
sculpteurs. co.necKens. et-cl.
A l'intérieur de cette faculté
s'exprimeraient librement les be-
soins de création et de participa-
tion de tous. Elle serait un lieu
oryan.oé pour l'information et la
diffusion permarvntes. Une mo-
tion dont voici le texte a d'ail-
leurs été votée en ce sens : «Quel-
le que soit la tournure poliUque
que vont prendre les événements.
nous sommes décides à con'iMiier
notre travail qui ne peut ' ef-
ficace qu'à long terme Nous. eK-
écoles La Fontaine. Claude Ber-
nard Honoré de Balzac. ex-Ins-
titut d'art CNTE-Vanves, Cons<T-
vatoire rvtinnal d'Art dramatique.
avons décidé une restructuration
complète de l'enseignement artis-
tique au profit des enfants, des
adolescents, des adultes, du public
que' qu'il soit ».
Des commissions assurent la
liaison avec les autres ex-écoles
d'Art Des commissions pédagogi-
ques composées d'étudiants, de
pxo£^eB°urs. d'artistes, de socio-
logues, etc..- définissent les nou-
velles structures des enseigne-
ments primaire. secondaire et
supérieur. Les bases de cette po-
litique sont le dépassement des
structures existantes, partis et
syndicats et la remise en question
de la société nouvelle pour par-
venir à une société de participa-
tion dans le cadre de laquelle
s'inscrit l'université de contesta-
tion
n va de soi que tout projet da
réforme ne pourra aboutir que si
tous les participants maintien-
nent une position de force face
aux pouvoirs publics. Le Comité
pour la réforme de l'enseignement
artistique a don'- décidé le main-
tien de la grève tant aue des ga-
ranties précises ne seront pas ac-
cordées.
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Politique étrangère
Jeudi 30 Mai 1968
COMBAT
15
points de mire
«Le droit des Vietnamiens
du Nord comme du Sud...»
< Les dernières déclarations du Président John-
con (1) sont totalement hypocrites, ce sont des pa-
roles mensongères quand il parle de négociations et
de volonté de paix > a déclaré hier après-midi, au
cours d'une conférence de presse, le porte-parole de
la délégation nord-vietnamienne aux conversations
de Paris, M. Nguyen Thanh Le.
Auparavant, M. Le avait lu un passage d'un rap-
port fait récemment par M. Pham Van Dong à l'As-
semblée nationale de la R.D.V.N., dans lequel le
premier ministre nord-vietnamien revendiquait le
« droit sacré > des 31 millions de vietnamiens du
Nord comme du Sud de combattre les « agresseurs
amércains > en n'importe quelle partie du tprritoi-
re du Vietnam.
Le porte-parole a cependant éludé la question
d'un journaliste qui lui demandait si le gouverne-
ment de la RDVN reconnaissait par là que ses forces
combattent dans le Sud et si cela constitue une
concession au point de vue américain, comme l'af-
firme le porte-parole de la délégation des Etats-
Unis, n s'est borné à répondre que puisque les
Etats-Unis commettent une agression contre tout
le Vietnam, tout le peuple vietnamien a le droit
de se défendre contre elle.
En réponse à un journaliste américain qui lui de-
mandait s'il avait relevé un changement quelcon-
que dans la position des Etats-Unis depuis le début
des pourparlers, que ce soit dans le sens du durcis-
sement ou de l'assouplissement, M. Le a répondu :
« Depuis le 13 mai, la position de la partie amé-
ricaine demeure obstinée et son attitude perfide. La
partie américaine se tient immobile romme une sta-
tue de pierre >.
(1) Voir Combat du 29 Mai
RFA : la législation d'excep-
tion en troisième lecture
Plusieurs centaines de policiers gardaient hier
le Bundestag où se déroulait le débat en troisième
lecture sur la législation d'exception. Cette précau-
tion n'était pas inutile car on sait que la législa-
tion à l'étude est fortement combattue dans le pays
notamment par les organisation? '•r,-t,,,^-,,,t<; ^t ]es
syndicats ouvriers.
Des dizaines de milliers dV:;>iiji:;nu ;nanu'ed-
talent hier contre les lois d'exception dans toutes
les villes universitaires de l'Allemagne fédérale et
à Berlin-Ouest. Dans la plupart des universités, les
cours étaient suspendus et remplacés par des débats
organisés parles étudiants »ux-mêmes <?t ceux des
enseignants qui se sont joints à eux.
Faisant contraste avec le militantisme des étu-
diants, les directions syndicales observèrent une at-
titude prudente et refusaient en particulier de lan-
cer des ordres de grèye. Néanmoins lot rf là des ar-
rêts de travail se sont produits.
A Berlin-Ouest, le siège de la fédération des
syndicats allemands (DGB). étant gardé par la po-
lice, en prévision d'une éventuelle marche des étu-
diants. Mais court-circuitant les directions syndica-
les, les étudiants d'extrême-gauche s'adressent main-
tenant directement à la base ouvrière.
Réunion du conseil
de l'Entente
Pour la première fols depuis son adhésion il y
a deux ans au conseil de l'Entene, le Togo a accueil-
li hier une réunion au sommet de l'organisation.
La conférence s'est ouverte hier après-midi à
Lomé et les chefs d'Etat des cinq pays membres
les présidents Houphouet-Boigny de Côte d'Ivoire,
Dlori Hamani du Niger, Alphonse Alley du Daho-
mey, Sangoule Lamizana de Haute-Voli,a et Etienne
Eyadema du Togo y prennent part.
La capitale togolaise s'est couverte pour l'oc-
casion de drapeaux des cinq pays et de banderoîes
souhaitant la bienvenue nux chef? des quatre autres
Etats.
La matinée hier a it.é décrétée chômée et payée
pour permettre à la population de réserver un ac-
cueil chaleureux aux hôtes du Togo.
Les travaux se déroulent sous la présidence de
M. Dlort Hamani, qui est président en exercice du
conseil de l'Entente. De source autorisée on déclare
qu'ils auront essentiellement trait à l'étude de plu-
sieurs projets présentés par les Etats membres et à
la définition d'une attitude commune dans la recher-
che de moyens de financement.
Satisfaction des agriculteurs
après l'accord de Bruxelles
A la grande satisfaction de M. Edgar Faure
l'accord des Six pour les marchés communs du
lait et du bœuf a pu être réalisé hier à l'aube.
C'est essentiellement un accord de compromis,
assorti de correctifs et qui entérine certaines
entorses aux principes de la politique agricole
commune. Nul doute que les événements de
France et à un moindre degré ceux qui menacent
la Belgique n'aient incité les « Six » à réa-
liser un accord imparfait qui sera revu cet au-
tomne, mais qui, tous comptes faits, vaut mieux
qu'un vacuum. Il donne satisfaction dans l'en-
semble aux agriculteurs français et devrait
contribuer à redonner le calme aux campa-
gnes.
En voici les grands lignes :
1) Le prix indicatif du lait est maintenu à
50 F 85 les 100 kilos (prix payé livré à la lai-
terie), ce prix correspond en moyenne à un
prix de 47 FAI du lait ramassé à la ferme.
2) Le prix d'intervention du beurre est fixé
à 173.5 dollars les 100 kg (865 francs), mais ce
prix représente un c idéal européen » qui ne
sera appliqué qu'en Italie et aux Pays-Bas.
Des « correctifs » ont été en effet prévus pour
les quatre autres partenaires. Ce « correctif »
(de 2,75 dollars pour la France, la Belgique et
le Luxembourg) permettra d'assurer aux pro-
ducteurs nue augmentation de 13 F 75.
3) Pour la poudre de lait écrémé, le prix
d'intervention est fixé à 206 F.25 les 100 kg
(41,25 dollars) là encore, France-Belgique et
Luxembourg bénéficient de s correctifs »•
On notera que ces avantages ne seront pas
,jris en charge par le F.E.O.G.A., les « corrcc-
ûfs » seront couverts par les trésors nationaux
4) Le F.E.O-G.A. ne prendra pas également
entièrement à sa charge le coût de la résorp-
tion des 180 000 F de beurre stocké dans la
C.E.E. Estimé à 800 millions de dollars, ce coût
devra être assuré jusqu'à un montant de 170
par les trésors nationaux.
5) Le Marché commun de la viande et du
bœuf donne entièrement satisfaction aux uns
et aux autres. Des mesures d'intervention, fa-
cultatives ou obligatoires, sont prévues lorsque
les prix de marché seront inférieurs aux prix
d'orientation. La protection aux frontières de
la C.E-E. sera assurée par les droits de douane
(de 17 à 22%) et un prélèvemen' dégressif.
6) Le Conseil des ministres a accepté un
certain nombre de propositions essentielles de
la commission :
a) Une taxe à la margarine de 17 centimes
par kilo,
b) Le contrôle budgétaire, par le Parlement
européen, des sommes ainsi perçues par la Com-
munauté (qui pourront atteindre à un montant
maximum de 87,5 millions de dollars),
c) Un examen d'ensemble, qui aura iieu à
l'automne, des mesuras qui peuvent être prises
pour remodeler l'agriculture et aider les pays
en voie de développement.
Telles sont les grandes lignes de cet accord
qui a été salué hier par la F.N.S.E.A. comme
une réussite.
J.-P. CORNET
KEMEDY
BATTU
par Me Carthy
aux « primaires -•
de l'Dreqon
En remportant pour ce qui con-
cerne les démocrates, les élections
primaires qui se sont déroulées
mardi dans l'Etat de l'Oregon, sur
la côte occidentale des U.S.A., le
sénateur McCarthy a causé l'une
des plus grandes surprises de la
lutte qui se livre actuellement en-
tre les candidates à l'investiture
démocrate pour l'a course à la
Maison Blanche.
Si les observateurs et les son-
dages s'étaient accordés en effet
pour prévoir un échec relatif de
M.B. Kennedy, ils n'avalent pas
imaginé que le frère de l'ancien
président puisse n'arriver que se-
cond derrière le sénateur du Min-
nesota.
Alors aue plus de 60 pour cent
des résultats étalent connus hier
aux premières heures de la jour-
née,. M McCarthy était nettement
en tête avec 43 pour cent des suf-
frages exprimés contre 37 pour
M.R. Kennedy, 13 pour le prési-
dent Johnson et 7 pour M. Hum-
phrey. (Ces deux derniers n'étaient
pas officiellement candidats).
L'ancien «t Attorney général » a
d'ailleurs reconnu publiquement la
gravité de son revers, « les élec-
teurs ont prononcé leur verdict.
Il n'y a plus qu'à s'incliner », a-
t-il dit avant d'envoyer un télé-
gramme de félicitations à M Mc-
Carthy.
Dans le camp du Sénateur du
Minnesotta règne la plus grande
exultation. M. McCarthy a décla-
« Maintenant, Californie, à nous
deux ». C'est en effet en Califor-
nie que se déroulera le 4 juin la
plus importante élection primaire
avant les congrès nationaux où les
deux grands partis choisiront dé-
finitivement leur candidat à le-
lection présidentielle de novembre
II n'est pas Impossible, sans
doute que le verdict de la Cali-
fornie soit plus favorable a Ro-
bert Kennedy aue celui de l'Ore-
gon. mais son échec de mardi a
eu un effet psychologique consi-
dérable
Hn fait, 1'knpresslon première
des spécialistes est que. lors de la
convention démocratie en août
c'est, le vice-président Humphey. j
qui -vose de ï'appui de l'appa- '
peil • Parti, qui a désormais les
pl\is fortes chances de s'lmno?er
il est évident qu'en dépit de
la sympathie qu'il Inspire à de
nombreux commentateurs. M Mr-
Carthy n'appa-aît toujours nas
en mesure de l'emporter en fin
de compte sur M Hnmphev. D^
côté rép"h1icain. M Rirh">rd N'vnn
aux « primaires » de l'OreRon '
a fait pratiquement cavalier seul
il a obtenu 71 % des voix contre
22 au gouverneur de Ta Califor
ni* Ronald Reagan, et 7 au eou-
verneur de l'W.at de New-York,
Nelson Rockfeller.
Les facteurs extérieurs
du « chambardement »
La France est sur la voie de se
métamorphoser en République
des conseils des ouvriers, manuels
et intellectuels.
Le fait est d'importance incom-
mensurable et dépasse, en ce gui
concerne ta signification et se*
conséquences, tout autre événe-
ment mondial.
Voici, en effet, pour la pre-
mière fois dans l'Histoire, qu'un
pays occidental, hautement dé-
veloppé et industrialisé, après
une transplantation cardiaque
réussie sans guerre civile, sans
coup d'Etat, procède au rempla-
cement de son ancien régime ca-
pitaliste, paradis de la finance
internationale, par un régime
socialiste
L'accumulation des erreurs et
des matières inflammables sur le
plan intérieur a rendu inévita-
ble, préparé et mis en route
l'inarrêtable mutation. Certain^
facteurs internationaux, ont non
mais aussi à la déclencher
?t à la déclencher.
Parmi les ferments extérieur.-
du processus, le Printemps dt
Prague, le conflit vietnamien
ont joué un rôle primordial. La
révolution silencieuse de Tchécos
lovaquie, venait en effet de four
tir la preuve gué les démocraties
socialistes peuvent coexister pa
cifiquement, marcher ensemblt
en surmontant une Incompatibi-
lité apparente. D'autre part, la
guerre du Vietnam a éveillé et
consolidé le grand Front Interna
tional de la lutte anti-impéria-
liste et forgé une nouvelle fra-
ternité entre les peuples épris de
liberté. Le conflit opposant Ha-
"o> à Washington s'est révélé
par Georges ANDERSEN
comme le catalyseur de toutes
les colères et résistances contre
les tentatives de domination,
d'expansion et d'asservissement
Une fois les négociations de
paix commencées, le torrent des
exaspérations s'est cherché un
autre objectil et l'a trouvé dans
la pyramide présidentielle fran-
çaise.
Par son discours prononcé au
Kremlin le 21 juin 1966, le prési-
dent de la République précisa
son intention d'instaurer un
nouvel ordre européen, devant se
>>aser sur Paris et Moscou
Mais le communiqué final
franco-soviétique du 28 juin et
plus encore la déclaration de clô-
ture de la conférence des mem-
bres du pacte de Varsovie, dif-
fusé à Bucarest^ le 8 juillet 1966
ont fait apparaître les profondes
divergences de conception des
îeux partenaires. La politique
allemande du général de Gaulle.-
malgré la reconnaissance de la
ligne Oder-Nesse heurtait de
front celle du Kremlin, a fait
voler en éclats toutes les ouver-
tures en vue d'une alliance poli-
tico-stratégique.
Depuis le départ de Paris de
M. Serguiev, Vinogradov, la di-
plomatie soviétique n'avait vu en
Charles de Gaulle qu'un instru-
ment facilitant la réalisation des
deux principaux objectifs .'
1). Affaiblir l'OTAN et l'm-
'luence américaine.
2). Préparer la voie aux solu-
tions socialistes en France et
ailleurs en Europe.
L'opération qui a été bien me-
née, semble être jusqu'à présent,
fructueuse
Télégrammes
• ITALIE. - La direction du parti socialiste unifié a siégé hier toute
la journée pour discuter de l'opportunité du maintien de la coa-
lition de centre-gauche. Très divisés sur ce point, les dirigeants
socialistes n'ont pu prendre de décision et ils poursuivront leur
iiscussion ce matin.
0U.S.A. — Après les désordres de lundi soir dans le quartier a
orédominance noir de l'Ouest de Louisville, qui avaient motivé l'en-
voi de la garde nationale de nouveaux troubles ont éclaté mardi
soir lorsqu'un groupe de 75 noirs environ ont lancé des pierres
st des bouteilles sur les pompiers qui combattaient un début d'in-
jendie.
• JORDANIE. — L'artillerie jordanienne et l'artillerie israélienne
se sont affrontées en un nouveau duel qui a duré prés d'une heure
et demie, avant-hier soir dans la région de Tallat Moussa au Nord
de la ligne de cessez-le-feu établie le long du Jourdain.
£ TCHECOSLOVAQUIE - Le comité central du P.C Tchécoslo-
vaque s'est réuni hier en plénum à Prague pour faire le point de
!a situation et définir les pranclos lignes de la nouvelle constitu-
tion dont le projet devrait être rendu public avant la fin du mois
de juin.
• SENEGAL. — L'université de Dakar est fermée, sine die. sur
ordre du président Senghnr. annonce un communiqué publié hier
i midi à Dakar par le commissariat à l'Information
« Les étudiants non Sénégalais poursuit le texte seront râpa,-,
triés dans les meilleurs délais ».
COMBAT
Algérie 45 dîn. — Tunisie 60 mil. — Maroc O.«0 dtr. — Ïlelglque-Lii xemnourg 5 F belges — Espagne 7 ptas — Italie 100 L - Suisse 0.49
A l'appel de la CGT, P5D.DOO manifestants
de la Bastille à Saint-Lazare
A l'appel cie la CGT, Paris a
été hier après-midi, durant prés
de 5 heures, le cadre d'une nou-
velle manifestation de masse. De
la place de la Bastille à la gare
Saint-Lazare, en passant par les
grands boulevards, des dizaines de
milHers de personnes - 200 à
250.000 manifestants selon certains
organisateurs - ont défilé au long
de quelques 4 kilomètres.
L'immense cortège se met en
marche vers 15 h. Deux heures
après, la queue de la manifesta-
tion s'engage seulement dans le
boulevard Beaumarchais.
En tête, avancent les porteurs
de la triple pancarte sur laquelle
on lit « CGT ». Derrière, on re-
connaît les visages de MM. Benoit
Frachon, président, et Georges Se-
guy. secrétaire général. En retrait,
marchent des dirigeants du parti
communiste, MM. Waldeck-Rochet,
Jacques Puclos, Juquin etc... ain-
si que les écrivains Aragon et
Eisa Trio'.et. Tout de suite après,
la première des délégations d'en-
treprises et celle du personnel des
usines Citroën.
Banderoles, pancartes et dra-
peaux rouges flottent au-dessus
des têtes par milliers. Tout le long
du parcours le service d'ordre de
l.i centrale contient la masse des
manifestants sur la chausée. La
police reste invisible. Seul un hé-
licoptère de la Préfecture survole
le cortège, ce qui lui vaut ça et
là, sifflets et quolibets.
L'« Internationale » est chantée.
En tète roulent des estafettes an-
nonçant la venue du cortège. Elles
donnent des consignes : « Faites
la chaîne sur les trottoirs ; ap-
plaudissez les travailleurs ».
Des membres du comité d'orga-
nisation, haut-parleur en main
diffusent des slogans :
« La chienlit, c'est qui ? »
« C'est lui » répond la mani-
festation.
A leur tour, les manifestants
scandent à tour de rôle les mots
d'ordre « Pompidou, démission »,
« gouvernement front populaire »,
et « la Sème c'est lui, la 6ème c'est
nous ». Les badauds, massés sur
les trottoirs applaudissent.
Il et 17 h. lorsque la tète du
cortège, par la rue du Havre, ar-
rive devant les grilles de la gare
Saint-Lazare sur laquelle flottent
depuis plusieurs jours un drapeau
rouge et un drapeau tricolore. La
foule commence à grossir tout au-
tour des portes closes de la gare.
Le service d'ordre commence alors
à donner l'ordre de dispersion,
qui est observé immédiatement
avec discipline. A ce moment seu-
lement les derniers groupes quit-
tent la Bastille.
M. Alain GEISMAR ne sera pas candidat
A la suite de l'information que n»us avons publiée hier, M.
Alain Geismar nous fait savoir qu'il n'a jamais eu l'intention
de se présenter à l'élection législative partielle du Verne arron-
dissement. Nous lui en donnons acte très volontiers et nous nous
excusons auprès de lui de nous être fait les complices involon-
taires de ce qui apparaît comme une manœuvre gouvernemen-
tale...
EN REPONSE A L'HUMANITE
LES SUIVEURS
« II est indispensable que le
mouvement des universitaires
opère sa jonction avec celui des
ouvriers. L'un comme l'autre
affronte le même ennemi, «af-
firme M. René Andrieu dans
REPONSE A
LIMBECILE
DES STEPPES
Comme ie descendais, courbé et
ahanant sur ma vieille bécane, la
rue de Richelieu, un marchand de
journaux me fit sige cie m'arrêter.
Essoullé je mis pied à terre. Il
•pointa vers moi un index accusa-
teur et me lança : « L'Humanité
vous attaque »." Et de me tendre
ce quotidien dont la qualité n'a
pour moi jamais dépassé le niveau
du prospectus pharmaceutique. Je
l'entrante avec ennui et que vois-
je ? Un plat et nauséabond ar-
ticle, crispé et ridé comme un
vieux chocolat rance, nu. entre
autres gracieusetés ie suis traité
de « saligaud » et de « voyou ».
Mon Dieu ! Que me veut cet in-
sensé Kalmouk, ce "bidet Kirghi-
ze ? Que lui ai-je lait à ce vieux
bureaucrate, à ce stalinien beso-
gneux, à ce débris idéologique, a
ce carnassier de '.'Oural ? Parce
que dans un texte d'une très hau-
te élévation morale et spirituelle
qu'on aurait aussi bien pu trouver
dans la « Veillée des Chaumières »,
favais jugé inadmissible et provo-
cante l'incroyable démonstration
de M. Duclos samedi matin qui,
au Père Lachaise, rendait hom-
mage aux morts de la commune et
pleurait comme un sournois cro-
codile devant le mur des Fédérés,
alors que dans Paris couraient des
jeunes gens aux visages ensan-
glantés. Je parlais calmement avec
une sorte de douceur rigolarde et
je disais notamment Que les Fé-
dérés eussent été révoltés par les
poussifs hommages de M. Duclos
Et je critiquais, toujours sans éle-
ver la voix, la curieuse propension
des staliniens à « annexer » l'His-
toire. Rien de plus Une critique
innocente, un rayon de soleil at-
tiédi dans un ciel de septembre.
une brise légère.
Démesurée m'apparaît la réac-
tion de ce Cosaque Qu'ont.-ils les
staliniens à être devenus brusque-
ment si sensibles ? Qu'est-ce qui
a poussé cet Ouzbeck à m'apostro-
pher d'aussi vigoureuse manière ?
Comment expliquer la violence de
cet enfieffé Turkmène ? Serait-ce
Qu'il doute de lui et Qu'il s'impo-
se un surcroît de colère pour se
rassembler, pour s'unifier tout en-
tier derrière sa frénésie ? Et pour-
quoi appeler la Résistance à la
rescousse ? Voilà ce qu'écrit, ce
géorgien : « Jacoues Duclos. dont
le rôle dans l'Histoire de notre
pays et en pa. iiculier dans la Ré-
sistance est au moins aussi connu
que celui du Charriéve en Ques-
tion... ». Que me veut cet imbé-
cile des steppes ? Je n'ai en effet
pas en de rôle dans la Résistance
mais j'ai une excuse .• ie n'étais
pas né.
Christian CHARRIERE
l'Humanité du 29 mai.
Nous ne le contredirons pas
sur ce point puisque nous n'a-
vons cessé de l'affirmer pour
notre part mais on peut ac-
cueillir cette profonde évidences
avec un sourire lorsqu'on la lit
dans un journal qui a, dès le
départ, manqué le mouvement
étudiant, l'a condamné pour
mieux tenter de l'orienter par
la suite.
S'y ajoutent les commentai-
res contradictoires de M. Séguy
refusant de reconnaître toute
utilité à la jonction que les étu-
diants essayaient d'établir avec
les ouvriers, puis rectifiant
le tir, après avoir été rappelé
à l'ordre san^ doute par le bu-
reau politique du P.C. Nous
nous souvenons aussi des at-
taques perfides sur la person-
ne de Cohn-Bendit et de « l'ir-
responsabilité » prétendue d«
M. Sauvageot et de l'UNEF;
nous avon-s en fin assez déplo-
ré l'absence de la C.G.T. à
Charlety pour comprendre que
l'U NE F ait aujourd'hui quel-
ques hésitations à répondre aux
appels de front commun - mê-
me s'il s'avère utile - que lui
fait le même syndicat _ passer
de l'irresponsabilité à l'adhé-
sion demande un temps de re-
flexion !
Que l'Humanité se fasse l«
défenseur des classes ouvrières,
rien de plus normal. Mais qu'el-
le vienne aujourd'hui traiter
toute la presse de «menteurs»
et accuser notamment Combat
de faire le jeu de la réaction
en cherchant à «diviser pour
régner» c'est choisir un rftle
de censeur et de justicier qui
lui va bien mal !
Ponr être censeur des antres
Pas de pénalités pour les
impôts en retard
« En vue de remédier aux dif-
ficultés de paiement résultant des
perturbations apportées à l'activi-
té économique du pays, les dis-
positions suivantes ont été rete-
nues :
1 _ Jusqu'à nouvel ordre, et en
tout état de cause jusqu'au mer-
creJi 3 juin 1968 inclus, le retard
dans le paiement des sommes dues
au titre des impôts, droits et taxés
devenus exigibles à partir du 20
mai 1968, ne donnera pas lieu à
l'application de pénalités de re-
tard ».
« 2. . Le conseil des ministres
du 27 niai 1968 a approuvé un
projet de décret qui prorogé à
compter du 20 mai 1968 jusqu'à
une date qui sera fixée par un
décret ultérieur les délais dans
lesquels doivent être faits les pro-
jets et les autres actes destinés
à conserver les recours pour toutes
les valeurs négociables ».
« II est en outre rappelé que
l'article 1244 du code civil donne
aux juges la faculté d'accorder par
simple ordonnance de référé des
délais supplémentaires pouvant al-
ler jusqu'à un an aux débiteuns
qui en raison des circonstances,
ne seraient pas en mesure de
s'acquitter de leur dette »•
par Pierre KYRIA
il faudrait d'abord savoir se
juger soi-même. Or personne
n'ignore que le « niea culpa »
n'a jamais été le fort de ce
journal. Le « seul grand quoti-
dien national d'opinion » (sic)
ne risque pas assurément les
contradictions qui sont, paraît-
il, l'apanage de notre journal :
Combat est un journal libre où
chacun expose son point de vue
ses rédacteurs ne sont pas à
la merci des impératifs d'un
parti. Il arrive que nous ne
soyons pas d'accord entre nous,
nos lecteurs le savent. nous
avons du moins l'honnêteté de
ne pas !<• cacher.
Est-ce notre faute, enfin, si
les communistes sont dans cet-
te affaire les suiveurs et s'ils
restent parmi les étudiants les
mal-aimés ? Nous le consta-
tons et l'avons constaté. Il se-
rait vain d'ailleurs d'en tirer
les raisons d'un anti-communis-
me sommaire. C'est du moins
mon opinion : la polémique ne
doit pas se faire entre gens de
gauche, quelle que soit leur
orientation propre, mais contre
le régime gaulliste dont la chu-
te n'est pas acquise. Encore ne
faudrait-il pas multiplier les
attaquas et les sous-entendus
pour cacher ses propres caren-
ces et ses propres maladresses
dans une situation qui a sur-
pris par sa force et sa rapidité.
Notre but essentiel reste de
soutenir le mouvement des étu-
diants dont la volonté politique
s'affirme de jour en jour et
dont les rcvendlcall )ns propre-
ment universitaires sont désor-
mais liées à la chute du régi-
me - M. Pompidou pense-t-il,
un seul instant, que ces réfor-
mes éventuelles pourraient être
acceptées par la « pègre » qu'il
a matraquée ? C'est en cela
qu'il rejoint le mouvement des
ouvriers : pour le renverse-
ment d'un régime qui n'a cessé
de les duper, les uns et les an-
tres et pour la construction
d'un socialisme démocratique
par les uns et les autres.
Pierre KYRIA
HORS LA POIX
Trafic record aux frontières
Selon les services frontaliers
espagnols, de très nombreux Fran-
çais sont passés cette semaine et
la semaine dernière en Espagne.
D'après des estimations officiel-
les plusieurs milliers de Français
ont passé la frontière pour faire
leurs achats en Espagne. Plu-
sieurs navires qui ne peuvent
être déchargés à Marseille sont
déroutés sur Barcelone.
D'autre part, 3.000 Espagnols
qui passent chaque jour en Fran-
ce pour y travailler dans les vil-
les frontalières ne peuvent plus
se rendre à leur travail du fait
des grèves en territoire français.
On remarque d'autre part de
très fortes affluences aux fron-
tières italienne et belge, de nom-
breux Français venant s'appro-
vlssionner notamment en essence
dans ces pays.
RIEN A FAIRE !
L'Union Française des déser-
teurs américain* vient d'adresser
un message de solidarité au mou-
venement révolutionnaire ouvrier
étudiant. (1) Elle (rappelle «que
les Américains qui ont refusé de
servir pour résister aux guerres
des impérialistes en cours dans le
Tiers-Monde ont reçu asile en
France. Ils ont accepté de jurer
de ne point participer aux acti-
vités politiques pendant leur sé-
jour en Francte ». Cependant ils
ne veulent plus être considérés
comme de méprisables émigrants.
En effet ils ne ressemblent pas
au héros d' «America-America» de
Kazan. Ce sont des réfugiés poli-
tiques, ils refusent donc de se
taire.
Ils restent et veulent rester
membres de la gauche révolution-
naire américaine. En tant que tels,
ils contestent les institutions ca-
pitalistes. Les militants de Fran-
ce, les révolutionnaires des Etats-
Unis, les Fronts de Libération du
Tiers-Monde appartiennent au
même mouvement. Nos ennemis
sont les mêmes : les structures
pourries (passons pour quelques
jours sur l'usage du terme de
structure), la répression fascite,
l'exploitation bureaucratique. Nous
faisons face aux mêmes attaques
à Paris, à Saigon, à New York.
* Au feu les pompiers » titre un
cinéma du Quartier Latin !
Malgré la puissance matérielle
effrayante du capital nous ne som-
mes plus effrayés. L'imaginaire est
en train de devenir réel. Au Prin_
temps de 68 les étudiants de Pa-
ris, de Columbia ont occupé les
université; les Zengakuren ja-
ponais manifestent dans les rues
de Kioto. Nous assistons au suc-
cès des mouvements de libération
au Vietnam du Sud et dans les
Communautés noires. Les révoltes
ouvrières de France, d'Espagne,
d'Italie nous concernent. La ré-
pression violente n'a fait que ren-
forcer notre détermination. Toute
détermination est négation. Nous
devons être par delà la crainte
et le tremblement.
Dans ce local des gens arrivent.
« ils ont des bruits ». ils font du
bruit. Gardons un calme révolu-
tionnaire. Sachons nier l'ordre
social existant pour instaurer l'au-
togestion. Il faut répondre aux
manœuvres de « co-gestion » en
proposant un autre type d'organi-
sation politique. Soyons des tracts
vivants. Sortons du Sème arron-
dissement. Les étudiants ont tou-
ché juste. L'ensemble des travail-
leurs est concerné.
Quelques centimes ne sauraient
suffire à étancher notre soif.
Christian DESCAMPS
(1) On peut les contacter à
Censier.
0 Le Comité de grève du Crédit
lyonnais fait savoir que le per-
sonnel de cet établissement pour-
ra recevoir à partir du vendredi
31 mal 1968 sa paie intégrale sur
le lieu de travail ou un acompte
de 500 Frs à tous guichets du
Crédit Lyonnais sur présentation
du bulletin de salaire d'avril.
• Au procès de la Thalidomide, te
président du Tribunal, M. Peter
Weber, a rejette la demande de
la Défense, qui réclamait que la
liste des parents requérants, soit
limitée aux cent cas Initiaux. . ,
M. FOUCHET
HUMORISTE
II porte plainte
contre « Combat »
L'agence € France-Presse » »
diffusé hier après-midi le com-
muniqué suivant :
« M. Christian Fouchet, minis-
tre de l'Intérieur, a déposé mardi
après midi- auprès du procureur
de la République une plainte en
diffamation contre le quotidien
« Combat » pour un article paru
sous le titre « Le sang-froid »
faisant état de brutalités qu'au-
rait commises le service d'ordre
au cours des récentes manifesta-
tions lui ont lieu à Paris ».
N.DL.R.
M. Fouchet a de l'humour. Nous
comprenons bien, ne serait-ce
qu'en lisant les communiqués
émanant de diverses organisations
groupant les forces de l'ordre,
qu'il y a ces jours-ci un certain
malaise entre le ministre de l'In-
térieur et les hommes chargés
d'exécuter ses consignes. Malgré
les félicitations de M. Pompidou,
les forces répressives trouvent
qu'on n'a pas encore assez exalté
le fameux « sanp-froid » d<mt
elles font preuve...
Cela dit, nous n'avons jamais
affirmé ni pensé à aucun instant
que sévices et brutalités étaient
les rè?!es prescrites d'en haut : il
est évident que ni M. Fouchet
ni le Premier m'nistre n'ont or-
donné que les snz offensifs ren-
dent les manifestations aveugles
ou que des filles mineurs soient
molestées dans des conditions
sauraees. comme nous en avons
témoigné l'autr« jour. Est-ce une
raison pour le faire ?
Cette plainte en diffamation
e=t erotesiti" : la qualité de nos
témoins, la caution morale des
signataires du texte est lnconfAs-
table : les preuves sont en nos
mains, et on sait que bientôt un
Uvre blanc va paraître.
M. Fouchet nous Interdira-t-il de
fa.it état des matraquages de nos
propres collaborateurs pour le
simple fait d'avoir présenté leur
carte national de Presse. ?
Le ministre rie ''Intérieur peut-
'' nous expliquer nourquoï le jeune
Wasserman, fi's d'une directrice
de salle d'Art et d'Essai fut ar-
rêté et matraaué avec quelques
amis hier soir nie de Rivoli alors
rentrait tranmiillement chez lui ?
De toute évidence M. Fouchot
a du se tromper d'adresse en por-
tant plainte, ce en quoi 11 est fi-
dèle à cette action à rebours qui
est la politiaue du gouvernement.
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Title
Combat
Issue
no.7425
Date
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Publication information
no.7425