Les Informations industrielles and commerciales

Thumbnail
NUMERO
SPECIAL
UUSINE
industrielles et commerciales
in
CD
^'J
lo
a
;>
1:5
m
sommaire
LA DEVALUATION PEUT ELLE ENCORE ETRE EVITEE?
PAR F. RENARD
OU LE V» MINISTERE POMPIDOU PUISERA-T-IL
SES IDEES SOCIALES?
PAR M.M. DE MONTERA
NOS RESERVES OR ET DEVISES
PAR L. LABROUSSE
EXTREME INQUIETUDE DE L'INDUSTRIE
PAR Y. CASTEL
LES ACCORDS DE GRENELLE
ONT ETE SENSIBLEMENT DEPASSES
PAR J.-P. DUMONT
UNE AUTRE CATASTROPHE
POUR L'ECONOMIE FRANÇAISE
PAR F.H. DE VIRIEU
LES P.M.E
PAR M. CHAUVIERE
LES CADRES PENDANT LA GREVE
PAR J -P. DUMONT
LA CARENCE DES SYNDICATS
PAR J.-P DUMONT
MUTATIONS A REUSSIR
PAR « U.N. »
LE GRAND ET LE PETIT PATRONAT
AU PIED DU MUR
PAR J.C. HUBERT
LES OPINIONS D'EDGARD P1SANI
RECUEILLIES PAR F.H, DE VIRIEU
UNE EXPLOSION SALARIALE
QUI N'A PAS DETRUIT L'ECONOMIE
PAR M. PAGANELLI
MARCHE COMMUN
CONTROLE DES CHANGES
JURIDIQUE: LES EVENEMENTS
ET VOTRE DROIT A REPARATION
LACUNES DE L'INFORMATION!
PAR J. ROUME
12
13
14
16
18
20
24
26
28
30
à condition que la défense de la monnaie
soit aussi celle de l'industrie.
Peut-être chez les gaullistes de gauche
Elles nous permettent de tenir
deux ans environ.
Un « coup de sonde »
dans quelque grands secteurs professionnels
Les entreprises ont suivi les consignes du Patronat niai»
les nouvelles mesures agricoles.
Ce qu'ils demandent.
Quatre types de comportement
Pourquoi ?
Tout n'aura pas été vain si
Au pied d'un même mur, mais dans des situations
bien différentes.
Celles d'un gaulliste d'opposition !
L'exemple hollandais de 1963.
Quelles « sauvegardes » la France pourrait demander
à Bruxelles?
La nouvelle réglementation
... en cas de grèves, d'occupations d'usines,
d'émeutes, etc.
L'ignorance économique est un fléau social
II
USINE
PUBLICATIONS
Les « Informations Industrielles et
Commerciales >, ainsi que leur
supplément technique mensuel
« Voici des Idées >, sont éditées
par la Société de Publications
Industrielles et Economiques.
Gérant : Jean-Pierre Parodi.
142, RUE MONTMARTRE, PARIS-2'
TEL. 488-73-40 à 42
C.C.P. PARIS 2575-29
ABONNEMENT ANNUEL :
FRANCE 100 F
tin
USINE l_
MUOIKMS
- L Usine Nouvelle - est éditée
par la Société de Périodiques
Techniques et Industriels.
S.A. au capital de 1.080.000 F.
R.C. Seine 54 B 84 62
Président Directeur Général :
EDOUARD C. DIDIER.
5, RUE BLEUE, PARIS 9ième
TEL. 82491 18
C.C.P. PARIS 4^30 34
ABONNEMENT ANNUEL .
FRANCE 38 F
Il y a dix ans. l'une des premières tâches
de la Ve République fut de procéder à
l'assainissement de l'économie; Antoine
Pinay, ministre des Finances d'alors, dé-
valuait le franc de 17,5%. pour rendre à
notre industrie sa force compétitive et
permettre à notre pays d'entrer à part
entière dans le Marché commun.
Aujourd'hui, la solidité du franc est
remise en cause, et l'on parle de déva-
luation. Est-elle inévitable?
A très court terme, la crise politique
actuelle et le déferlement des revendica-
tions sociales ont provoqué l'inquiétude
et le départ des capitaux en quête de
refuge; le franc est tombé au voisinage
de son prix plancher sur les marchés in-
ternationaux et son soutien a coûté quel-
que 1 300 millions de dollars à la Banque
de France en mai. Pour réduire l'hémor-
ragie, le contrôle des changes a été « pro-
visoirement » remis en vigueur, et la
France va tirer 750 millions de dollars sur
le Fonds Monétaire International (afin
d'économiser son or). C'est la mise en
alerte sur la première ligne de défense.
Est-ce dire qu'une dévaluation puisse
intervenir à bref délai? Certainement
pas. Nos réserves de change avoisinent
encore 6 milliards de dollars (7 milliards
environ avec nos créances sur le F.M.I.)
Elles nous donnent le temps de la réfle-
xion et nous permettent de chiffrer cal-
mement l'incidence des accords du
28 mai (et de leurs séquelles) sur les prix
de revient industriel. Mais pour tous
les responsables de l'économie fran-
çaise, une question se pose désormais:
est-il possible d'éviter à terme une
nouvelle définition du franc, et est-ce
souhaitable?
O hacun connaît les désastreux effets
** d'un ajustement monétaire, finan-
ciers et sociaux, et ses inconvénients par-
ticulièrement pour un régime dont la
politique extérieure est largement fondée
sur le prestige du franc. Ajoutons qu'il
nous est pratiquement impossible de
procéder unilatéralement à un ajustement
monétaire efficace (10 à 15 % au mini-
mum) sans détruire le Marché commun:
cette décision équivaudrait en effet à
rétablir la protection de nos produits
vis-à-vis de nos partenaires de la C.E.E.
et risquerait de provoquer une désas-
treuse réaction en chaîne.
En revanche, s'il était avéré que la
hausse des prix intérieurs français exi-
geait une nouvelle définition de la parité
de change, nos partenaires consenti-
raient sans doute à examiner avec nous,
la question d'un ajustement modéré.
On peut toujours éviter une dévalua-
tion. La gamme des moyens techniques
est connue. Il s'agit de rassembler les élé-
ments d'une politique d'austérité pour
éponger la demande supplémentaire,
freiner la hausse des prix et réduire la
consommation intérieure au profit des
exportations. Emprunt national, majo-
ration des impôts directs et indirects,
contrôle du crédit, économies budgétai-
res: l'arsenal est très complet.
Reste à savoir si une telle politique
d'austérité peut être compatible avec les
aspirations profondes du pays. Une nou-
velle ponction fiscale est inévitable, mais
ne pourra, sans troubles graves, repren-
dre aux travailleurs tout ou partie des
avantages matériels qu'ils viennent de
conquérir. Limitée aux revenus élevés
et à la fortune acquise, elle risque d'être
insuffisante et d'application délicate,
L'OPINION DE
FRANÇOIS RENARD
La
dévaluation
peut-elle
encore être
évitée?
sans parler des conséquences politiques
et psychologiques: peur des « possé-
dants », fuite devant la monnaie, etc.
Autre question qu'il faut se poser:
est-il souhaitable de maintenir notre taux
d'expansion à un niveau compatible avec
l'équilibre de notre balance des paie-
ments? Il faut bien comprendre que la
condition sine qua non est l'adoption
d'un taux d'expansion très prudent.
Or. l'une des causes principales de
l'explosion actuelle réside — nul ne
l'ignore — dans la mutation douloureuse
que subit notre économie. L'accroisse-
ment rapide de la productivité française
s'est conjuguée avec la relative stagnation
des dernières années pour créer au sein
des masses une inquiétude profonde. Le
taux d'expansion de 5 %, prôné encore
tout récemment par M. Debré est notoi-
rement insuffisant pour réduire le chô-
mage, tant structurel que conjoncturel,
donner du travail aux jeunes et permettre
la reconversion des agriculteurs.
L'exemple du gouvernement de
M. Wilson (et de toutes les politiques de
ce genre) nous montre à quel point les
exigences d'une politique de défense de
la monnaie peuvent être contraignantes
pour l'industrie et les travailleurs. Les
syndicats britanniques supporteront-ils
longtemps ces exigences? Il est permis
d'en douter. Et le raisonnement vaut bien
plus pour la France.
Sans hasarder pour les prochains mois
des prévisions qui manqueraient totale-
ment de fondement, on peut escompter
que l'industrie française « épongera » sur
ses propres ressources, par l'accroisse-
ment de sa productivité, une part appré-
ciable des charges salariales nouvelle-
ment créées (6 à 12 °/0 suivant les cas),
une « dérive » des prix de l'ordre de
3 à 4% assurant le reste. Le cas des ser-
vices et celui des P.M.E. sera mis à part
en raison des sujétions particulières qui
les frappent.
Côté budget national, 1' « enveloppe »
supplémentaire est plus lourde de jour en
jour et il est vain d'attendre de la S.N.
C.F., d'E.D.F., des P.T.T. et de la Fonc-
tion publique un accroissement de pro-
ductivité sensible et immédiat. Un élar-
gissement de l'impasse est inévitable; il
faudra aussi chercher des ressources
supplémentaires. Celles-ci seront obte-
nues sans doute par un relèvement des
impôts, mais pourraient plus avantageu-
sement être recherchées dans une expan-
sion accélérée, seule susceptible de brû-
ler les scories de l'opération actuelle.
Mais alors l'équilibre de la balance com-
merciale sera durablement compromis.
On peut se demander si à terme un réa-
justement de la parité du franc ne
deviendra pas nécessaire, de toute fa-
çon: il serait souhaitable qu'il se pro-
duisit dans le cadre d'un accord général
sur les monnaies. Car il faut se rendre
compte que la secousse a été rude et que
ses effets se feront sentir longtemps avant
d'être complètement résorbés. Cette pers-
pective rebutera beaucoup. Mais le réta-
blissement de la paix sociale, l'accéléra-
tion indispensable de notre expansion et
le développement de notre industrie doi-
vent avoir la priorité sur toutes les autres
considérations et même sur les questions
internationales, si graves soient-elles.
Dans une économie comme la nôtre, qui
n'a pas encore accédé intégralement à
l'ère industrielle, une nouvelle dévalua-
tion sera peut-être le prix à payer pour
achever la mutation...
Le Ve ministère
Pompidou
va-t-il puiser
ses idées sociales
chez les
gaullistes
de gauche?
M. René CAPITANT... à la Justice.
Le remaniement ministériel qui vient
d'intervenir appelle les réflexions suivan-
tes : première constatation, c'est une opé-
ration d'une importance assez limitée, s'
l'on tient compte de l'ampleur de la crise
qui l'a provoqué.
Du « déjà vu »
C'crtes. il \ a plusieurs partants rem-
placés par des têtes nouvelles (neuf au
total). La composition de ce cinquième
gouvernement Pompidou donne néan-
moins le sentiment d'un aménagement
plus que d'un bouleversement. Peut-être
cela tient-il au fait que l'équipe des
« meneurs de jeu » reste pratiquement la
même: 12 ministres (sur 29) ont échangé
entre eux leurs portefeuilles! Le cas le
plus frappant est celui du «chasse-croisé»
entre Michel Debré et Maurice Couve de
Murville.
En dépit de ces mouvements, c'est
donc une impression de stabilité, disons
même de « déjà vu »
Trois gaullistes de gauche.
Deuxième constatation: l'entrée « en
lorce » (toute proportion gardée) des
gaullistes de gauche au ministère: René
Capitant à la Justice. Philippe Dechartre
au Secrétariat d'Etat à l'Equipement et
au Logement. Yvon Morandat au Secré-
tariat d'Etat aux Affaires sociales (chargé
des problèmes de l'emploi). Elle traduit
le souci qu'a actuellement le gouverne-
ment d'apparaître avant tout social et
décidé à des réformes profondes.
Jusqu'à présent, les gaullistes de
gauche n'ont guère eu d'audience. Au
sein même de la Majorité, ils étaient
assez peu pris au sérieux. D'abord parce
qu'ils n'étaient qu'une poignée, ensuite,
parce que leurs idées semblaient souvent
à leurs collègues, soit « fumeuses ».
soit « dangereuses ».
11 faut rappeler que le mouvement des
gaullistes de gauche s'est organisé en
1958: en même temps que l'U.N.R.
naissait l'U.D.T. ou Union Démocrati-
M. Philippe DECHARTRE... à l'Équipe-
ment et au Logement
que du Travail, se recommandant égale-
ment du général de Gaulle.
Dès 1962 c'était la fusion avec l'U.N.
R., le mouvement n'ayant pas réussi à
recruter suffisamment de fidèles.
Non seulement les gaullistes de gauche
sont peu nombreux, mais ils sont divisés:
il y a l'U.D.T. (intégrée maintenant dans
l'U.D. Ve) déjà citée, et qui est animée
par des hommes comme Louis Vallon.
René Capitant, Léo Hamon, Grandval.
c'est-à-dire l'équipe de l'hebdomadaire
gaulliste « Notre République ». Il y a
aussi la Convention de la Gauche V1'
République, née à la fin de 1966 sous
l'impulsion d'un ancien mendésiste.
Philippe Dechartre.
Il y a le Front travailliste, né d'une
dissidence avec la S.F.I.O. et animé par
Yvon Morandat, président des Houil-
lères du Nord. Il y a enfin le « club des
29 » qui réunit un certain nombre de
personnalités de gauche, telles que
d'Astier de la Vigerie ou Pierre Le Brun.
Bien que leurs efforts de recrutement
aient échoué les gaullistes de gauche
n'ont jamais désespéré. Ils ont d'ailleurs
réussi à faire passer un certain nombre
de leurs idées, depuis la réforme des
comités d'entreprise en 1963 (M. Grand-
val qui défendit la réforme en tant que
ministre du Travail était gaulliste de
gauche) jusqu'au fameux amendement
Vallon sur le droit des salariés à l'auto-
financement des entreprises. Réduits en
fait à un rôle de second plan, ils sont
cependant restés persuadés que le Chef
de l'Etat qui a toujours eu des velléités
sociales, leur donnerait un jour le feu
vert: depuis 10 ans, ils répètent que le
régime, s'il veut durer et s'enraciner pro-
fondément dans le pays, doit promou-
voir des réformes de structure. Ils ont
toujours soutenu qu'il y avait là pour le
régime, le moyen de gagner les voix des
travailleurs, c'est-à-dire en gros de se
rallier la gauche. Aujourd'hui, les évé-
nements semblent leur donner raison.
Ils ont beau jeu de dire que c'est parce
que leur conseil n'a pas été suivi que la
crise a éclaté.
Des idées sur la « participation »
Tous ces gaullistes de gauche n'ont pas
un plan social très précis. Mais ils ont
des idées, beaucoup d'idées même, qui
tournent toutes autour de cette fameuse
participation dont on parle tant. Pour
la plupart, ils estiment que, quelle qu'en
soit la forme, la participation des salariés
aux fruits de l'expansion économique '
ne peut entraîner une suffisante partici-
pation aux responsabilités. Aussi veu-
lent-ils organiser et généraliser la consul-
tation économique préalable des organi-
sations syndicales à tous les niveaux de
la vie économique; au niveau des entre-
prises cela implique à leurs yeux, aussi
bien la section syndicale que la reprise
des conceptions chères à Bloch Laine
par exemple celle d'un comité d'entrepri-
se doté d'une personnalité et d'un rôle
accrus jouant auprès du chef d'entreprise
(qui dans cette hypothèse en perd la
présidence), le rôle d'une sorte de « com-
missaire du gouvernement ».
Cela implique aussi l'adoption du
système allemand dans lequel se tiennent
des réunions communes entre le comité
d'entreprise (salariés) et le conseil de
surveillance (actionnaires).
Un diplomate et un banquier
II est certain que tous ces projets,
toutes ces idées agitées jusqu'ici en petit
comité, vont l'être désormais au sein des
instances gouvernementales et qu'au
moment où à l'Elysée comme à Mati-
gnon on a promis des réformes, sans
trop savoir lesquelles, on sera tenté de
reprendre les suggestions des gaullistes
de gauche. Mais il est encore trop tôt
pour savoir si ces derniers au sein du
gouvernement pourront devenir des
membres actifs de l'équipe gouverne-
mentale ou ne seront que des otages.
Le remaniement du gouvernement
pose enfin un point d'interrogation. Il
tient au remplacement de M. Debré par
M. Couve de Murville. Le départ de
M. Debré — et bien entendu les événe-
ments — devraient entraîner, une remise
en cau^c de la politique économique
suivie jusque-là. Jusqu'où ira-t-elle? Il
est très difficile de le dire On ne peut
que formuler quelques hypothèses a
partir de ce que l'on connaît de la per-
sonnalité de Maurice Couve de Murville.
Licencié en Lettres, docteur en droit,
diplômé des Sciences Politiques, Mauri-
ce Couve de Murville est ce que l'on a
coutume d'appeler un grand commis.
C'est-à-dire qu'il est surtout très respec-
tueux des lignes politiques qui lui sont
fixées. Deux points sont à souligner:
d'abord il a opté dès 1944 pour la diplo-
matie, s'éloignant ainsi depuis 20 ans
des questions économiques et financiè-
res (sauf des questions monétaires inter-
nationales).
Ensuite qu'il ne connaît pas ou peu
le monde de l'industrie. Ajoutons qu'il
passe pour un « rueffiste » convaincu et
un partisan de l'orthodoxie financière.
Certains opposent la nomination de
ce diplomate aux Finances à celle d'Al-
bin Chalandon au ministère de l'Indus-
trie. Ce dernier n'a jamais caché ses
opinions. Ce banquier est pour une
expansion plus soutenue. Son passage
dans les affaires lui a donné une grande
compréhension des problèmes des in-
dustriels. Il a sans doute été choisi pour
rassurer ces derniers. Pour le moment
donc, le double choix de Couve de Mur-
ville et de Chalandon semble résulter
d'un habile compromis. Reste à savoir
qui se fera le mieux écouter.
Mais la question la plus importante
qui se pose est celle de la durée de ce
nouveau gouvernement. Des propos
qu'aurait tenus M. Pompidou, il semble
ressortir qu'aux yeux du Premier minis-
tre, et en cas de reconduction de la
Majorité, l'équipe actuelle serait égale-
ment reconduite. Mais on peut se
demander dans quelle mesure il ne
faudra pas quand même faire place aux
centristes, ralliés éventuellement à ce
qu'on pourrait appeler le « Front trico-
lore ».
M.-M. de MONTERA
Nos réserves or et
devises nous permettent de tenir
deux ans environ
Une des conséquences immédiates des
événements actuels, est la rapide
détérioration des finances extérieu-
res de la France (plus de 300 millions
de dollars ont été perdus au mois de
mai). On doit l'attribuer dans l'immédiat
au réflexe de méfiance qui a entraîné un
départ massif des capitaux flottants et
un moindre apport de capitaux à long
terme, qui depuis 10 ans ont contribué
pour une large part à renforcer la posi-
tion excédentaire de notre balance des
paiements.
Nos réserves monétaires sont impor-
tantes: plus de 6 milliards de dollars
— dont plus de 80 % en or — ce qui
donne à la France une marge de manœu-
vre beaucoup plus grande que celle de
la plupart des pays industrialisés.
En France, les réserves représentent
plus de 6 mois d'importations nettes,
en Allemagne et aux Etats-Unis moins
de 5 mois.
Toutefois, il est nécessaire de tenir
compte d'un certain nombre de facteurs
qui dès maintenant vont entraîner une
baisse substantielle de nos réserves. On
peut considérer comme certaine une
diminution d'environ 1 milliard de dol-
lars, représentant le montant des fonds
à court terme détenus par des étrangers.
Cette réaction de défiance atteint un
certain nombre de nationaux. Coût pro-
bable: 500 millions de dollars, compte
tenu du contrôle des changes.
D'autre part, le climat d'insécurité sur
le franc va amener nos créanciers (no-
tamment à l'importation) à demander un
paiement plus rapide des transactions
et nos débiteurs (notamment à l'expor-
tation) à différer leurs règlements. D'où
une sortie de devises que l'on peut
chiffrer actuellement à 400 millions de
dollars.
Il faut enfin tenir compte du fait que
250 millions de dollars, montant de notre
quote-part or au FM I, ne sont pas
disponibles. Au total, la France ne peut
compter que sur 4 milliards de réserves,
auxquelles il faut ajouter les droits de
tirage automatique sur le F M 1 1 mi!
liard environ —. Ainsi, en misant su:
un déficit mensuel de l'ordre de 250 mil
lions de dollars dans les mois à veni
(hypothèse très pessimiste), on voit qu
la France dispose d'une marge de sécu
rite qui lui permettrait de tenir 18 moi
au minimum et sans doute au moin
deux ans.
i MILLIARDS DE DOLLARS
LES RÉSERVES—
.OR ET DEVISES-
DES GRANDS PAYS
INDUSTRIALISÉS~
U.S.A. ALLEMAGNE FRANCE ITALIE GRANDE- BELGIQUE PAYS-BAS
BRETAGNE
Plus de 15000 entreprises françaises ont
adopté les systèmes FIDUS de comptabilité par décalque.
Pourquoi ?
* Les systèmes FIDUS répondent aux exigences d'une entreprise moderne : sans surcharger le service
comptable, Ils fournissent a chaque instant les analyses utiles aux dirigeants et à leurs "conseils".
* Les systèmes FIDUS s'adaptent à toutes les formes de comptabilité : auxiliaires, financière, générale,
budgétaire ; gestion des stocks, salaires.
* Les systèmes FIDUS conviennent a toutes les entreprises : quels que soient leur importance, leur
activité et leurs objectifs.
Avec P.C.M. la comptabilité devient un service moteur de l'entreprise.
P.C.
PROCEDES COMPTABLES MODERNES
22, r. Leuto Blanc Parie 10* - Toi. 205.S3.S9
RENSEIGNEZ-VOUS (bon à recopier)
Veuillez m'adresser, sans engagement <Je ma part,
la documentation gratuite sur les Systèmes FIDUS.
Nom.................................
Raison sociale..........................
Adresse.....................•........
Depuis 12 ans, 1200 entreprises, 12000 employés le savent
le travail temporaire
est AVANT TOUT
une affaire de
SPECIALISTE
RESPONSABLE
eric soutou
DEPARTEMENTS :
Administratif 744 20-64
Electro-comptable 874 96-82
Dessin industriel 74211-30
58 BIS CHAUSSEE DANTIN PARIS 9'-
6 RUE DE HANOVRE PARIS 2
Dans I automobile, les giexo qui
revêtent un caractère particuliè-
rement dur, ont interrompu un
mouvement de reprise assez net, notam-
ment sur le marché intérieur. En avril,
les immatriculations de voitures de tou-
risme (136.000 unités) ont dépassé, pour
la première fois cette année, le niveau
de 1967.
Un coup très dur
pour les réseaux commerciaux
Mais ce sont surtout les exportations
qui seront vraisemblablement sérieuse-
ment perturbées cette année. L'arrêt
des expéditions vers l'étranger, qui
avaient atteint des chiffres records au
cours des premiers mois de 1968 (plus
de 90.000 unités par mois en moyenne)
et représentaient près de 50 °-u de la
production, intervient en effet au mo-
ment où la demande saisonnière est la
plus forte partout en Europe. L'acheteur
allemand, belge, italien, etc., n'attendra
pas indéfiniment le modèle français
qu'il a commandé, mais va se tourner
vers une marque nationale ou une autre
marque étrangère. Les réseaux com-
merciaux que les constructeurs français
ont patiemment mis en place au cours
des dernières années risquent ainsi d'être
sinon démantelés, du moins de perdre
une partie de leur force et de leur
cohésion. La situation est d'autant plus
préoccupante que la concurrence étran-
gère en France devient plus vive que
jamais. Actuellement, le taux de péné-
tration du marché français par les mar-
ques étrangères atteint 18,6 ",u, alors
qu'il ne représentait que 15,3 ";, il y a
un an.
Dans l'immédiat, les constructeurs
français font leurs comptes et la note à
payer, dans une industrie où la part de
la main-d'œuvre dans le prix de revient
(de 35 à 40 % selon les firmes) est im-
portante, s'avère d'ores et déjà très
lourde. L'exemple de Simca, dont le
personnel n'a pas fait grève mais qui a
dû, faute d'approvisionnements et de
transport, arrêter ses fabrications, peut
être extrapolé à l'ensemble de la branche.
Pour la firme de Poissy, le manque à
gagner par jour d'arrêt de travail, s'élève
Un « coup de sonde »
dans quelques grands secteurs
EXTRÊME INQUIÉTUDE
DE L'INDUSTRIE
Ce que coûte actuellement la grève à l'économie nationak
est relativement facile à calculer: entre 1,3 et 1,5 % de k.
production intérieure brute par semaine, disent les écono
mistes. Mais l'impact à terme sur l'industrie privée de:
divers avantages accordés aux salariés est beaucoup plu:
difficile à évaluer. Les comptes sont encore loin d'être fait:
et toutes les conséquences n'ont pas encore été tirées
Cela dit, d'un rapide sondage effectué auprès de quelque
firmes et secteurs professionnels, il ressort que les hypo
thèques prises aujourd'hui grèveront lourdement les entre
à 2,295 millions de francs et les pertes
en salaires à 842.000 F, soit une perte-
totale de 3,1 millions de francs par jour.
En année pleine, l'application des
accords du 28 mai coûtera à Simca
50 millions de francs de charges supplé-
mentaires (24 millions pour 1968) pour
une masse salariale de l'ordre de 374 mil-
lions de francs, soit un accroissement
de 13,3 °v A noter qu'en 1967. les
bénéfices nets ne se sont élevés qu'à
11.9 millions de francs. La firme aui
probablement encore à subir des hausse
sur le prix des matières premières, de
équipements et des pièces détachées.
Dans ces conditions, comment le
constructeurs français pourront-ils teni
leurs prix? En réduisant leurs investis
sements déjà relativement faibles, c'est
à-dire en sacrifiant l'avenir? En amélio
rant encore leur productivité, c'est-à-dm
en procédant par la force des choses ;
LES HAUSSES
SALARIALES
DANS LE
SECTEUR PUBLIC
COUTERONT
AU MOINS
5 MILLIARDS
AU BUDGET
II est certes trop ambitieux de vouloir
chiffrer dès maintenant l'impact budgé-
taire de l'actuelle crise sociale. Il dépen-
dra principalement, en effet, des options
qui seront prises en matière de politique
économique (fiscalité, incitations et aides
publiques, etc.).
Cependant, il est possible de faire dès
maintenant un bilan chiffré approximatif
pour ce qui est des dépenses de fonction-
nement des administrations et services
publics, dont inéluctablement la charge
incombera totalement ou partiellement
au budget de l'Etat. Pour les dépenses
de fonctionnement de l'administration.
qui représentent 20 % du budget, le coût
de l'opération (14 % en moyenne d'aug
mentation des salaires) s'élèvera à plus
de 4,5 milliards, soit plus du double de ce
qui était initialement prévu (1,9 milliard)
Pour les grands services publics (prin-
cipalement S.N.C.F.. R.A.T.P.), dont
l'équilibre financier est plus ou moins lié
au budget général par le biais de subven
lions d'équilibre, une augmentation du
prix du service rendu est difficilement
concevable dans le contexte actuel, une
hausse importante étant déjà intervenue
en 1967. De plus, le niveau de ces prix
a une très grande importance économique
L occupation chez Renault Fortement exportatrice, la construction automobile
française est particulièrement menacée
prises à l'avenir. Les plus durement touchées seront celles
évidemment qui emploient une nombreuse main-d'œuvre,
et celles qui sont tournées vers l'étranger. Pour les indus-
tries, telle l'automobile, qui cumulent ces deux caractéris-
tiques, on conçoit que la situation et les perspectives, à
l'approche de l'échéance du 1er juillet, soient particulière-
ment préoccupantes. Dans un proche avenir, des « cahiers
de doléances » seront vraisemblablement présentés au
gouvernement et tout un système d'aides sectorielles devra
être mis en place.
des licenciements'.' En fournissant à leur
clientèle des prestations de moindre qua-
lité, c'est-à-dire en se mettant en état
de moindre compétitivité vis-à-vis de la
concurrence étrangère''... Autant de so-
lutions difficilement acceptable** dan*-
le contexte actuel.
Accroissement sensible
du chômage
Inquiétude également dans la chimie.
où la conjoncture récente était parti-
culièrement favorable. C'ertains profes-
sionnels estiment que les charges supplé-
mentaires entraînées par les accords
du 28 mai condamnent à mort un nom-
bre appréciable de petites et moyennes
entreprises, et que Ton doit s'attendre à
un développement sensible du chômage.
Les appréhensions sont vives notam-
ment dans les branches où l'incidence
de la main-d'œuvre est importante, ("est
le cas. par exemple, des peintures et
vernis, de la pharmacie, etc. La grande
chimie organique et minérale, où la
main-d'œuvre n'entre que pour moins
de 20 °-n en moyenne dans les prix de
revient, paraît par contre mieux armée
pour absorber les hausses de salaires.
Côté pétrole, les négociations et les
accords ont pu aboutir beaucoup plus
rapidement qu'ailleurs, pour la simple
raison que la part des charges salariales
dans le coût final des produits est rela-
tivement faible (moins de 10 "„). La
hausse des salaires et les divers avan-
tages sociaux accordés ne devraient
donc se traduire que par une augmen-
tation modérée — à peine supérieure
à la normale des prix.
Perte de débouchés
Pour la sidérurgie, les charges supplé-
mentaires seront d'autant plus pesantes
que, par le jeu de la concurrence inter-
nationale, les cours sont déjà nettement
en dessous du barème officiel et s'éta-
blissent à un niveau correspondant à la
situation sociale de 1962. Toute hausse
de prix paraît donc impossible et les
entreprises ne pourront faire face aux
exigences actuelles que par une pro-
ductivité accrue, ce qui paraît extrê-
mement difficile, compte tenu des efforts
considérables qu'elles ont déjà accom-
plis au cours des derniers mois. Les
perspectives de profits accrus, et donc
d'un meilleur autofinancement, que les
firmes pouvaient retirer de l'amélio-
ration récente de la conjoncture, parais-
sent maintenant très compromises. Mais
dans l'immédiat, ce que craignent sur-
tout certains professionnels, c'est une
profonde perturbation des courants
d'échanges. Quelques clients allemands
notamment se tournent déjà vers d'autres
fournisseurs.
Dans les industries d'équipement, le
pessimisme prévaut. Beaucoup de petites
et moyennes entreprises « boiront le
bouillon » si les pouvoirs publics ne
prennent pas de mesures de sauvegarde
d'urgence. Leur avenir dépendra en
quelque sorte des compensations qui
pourront leur être accordées. Pour les
plus grandes entreprises, le point noir
concerne l'exportation, où d'importants
et un « effet entraînant » considérable
Un effort supplémentaire devra donc être
demandé à l'Etat: son incidence hudçié
taire sera de l'ordre du milliard
En ce qui concerne la S.N CF., il est
bien évident que les charges supplémen
taires risquent en outre de handicaper
l'application du plan de réforme de la
société nationale tendant à lui restituer sa
complète responsabilité de gestion com
merciale et à rendre le fer compétitif avec
tous les moyens de transport concurrents
(la route notamment) L'accroissement
sensible de la masse salariale (8 milliards
de francs en 19B71 se traduira pn> une
forte augmentation du déséquilibre finan-
cier. La charge financière totale supportée
par l'Etat, qui s'accroit inexorablement de
10 % par an, s'est élevée déjà en 1967 à
4,5 milliards de francs (compte tenu de
la subvention d'équilibre de 1,5 milliard).
Ce qui équivaut, comme l'a récemment
souligné un représentant du ministre des
Transports, au coût de plus de 1 000 km
d'autoroutes de liaison
Enfin, pour le budget annexe des P.T.T.,
dans lequel les charges salariales repré
sentent environ 60 % du total, l'addition
devrait s'élever à ROO millions de franrs
environ
Au total, l'on aboutit donc à une aug
mentation quasi automatique des dépen-
ses budgétaires de l'ordre de 4,5 à 5
milliards au minimum (il s'agit en effet
d'approximations encore incomplètes) ce
qui aura pour conséquence de porter
l'impasse à 13 milliards environ. Mais il
ne faut pas cacher que cette dernière
risque d'être bien plus importante, ce
d'autant plus qu'une grève aussi longue
va se traduire par une moins value fiscale
très importante
L LABROUSSE
marchés conclus ou en cours de négo-
ciations risquent de ne pas être honorés
dans les délais prévus. Là aussi, une
aide gouvernementale sera vraisembla-
blement nécessaire.
Les industriels du textile craignent que
les événements actuels n'accélèrent très
vivement le processus de fermeture
d'usines déjà amorcé il y a quelques
années, et que le chômage ne s'aggrave
dans des proportions sensibles.
Dans le verre, où le travail a partout
repris à ce jour, sauf dans une usine
de Saint-Gobain, les appréhensions por-
tent surtout sur le commerce extérieur.
L'exportation, dans un secteur tradi-
tionnellement tourné vers l'étranger,
était déjà devenue plus difficile en 1967.
Yves CASTEL r>
Les mesures agricoles
UNE AUTRE CATASTROPHE
POUR L'ÉCONOMIE
FRANÇAISE
«Les choses évoluent vite! Il faut
savoir s'adapter... » a dit M. Edgar
Faure en sortant le 29 mai à l'aube du
conseil des ministres de l'agriculture des
Six à Bruxelles. Ce n'est pas la profession
de foi d'un homme politique habile à
épouser le changement. En réalité entre
cette phrase et le discours prononcé par
le même M. Edgar Faure à Grenoble
le 7 mai (sur la baisse des prix agricoles),
toutes les données du problème agri-
cole ont changé.
Le général de Gaulle lui-même avait
accepté enfin, de présider — le 11 juin —
ce fameux comité restreint consacré à la
définition d'une nouvelle politique agri-
cole.
Il est maintenant à prévoir que le far-
deau du soutien de l'agriculture, non
seulement n'est pas près de s'alléger,
mais encore qu'il ira en s'alourdissant.
Inquiets d'avoir vu venir jusque sous
leurs fenêtres quelque 6000 paysans
d'Europe contenus à grand peine par
les jets des motopompes, les ministres
des Six ont accepté de signer le 29 mai
n'importe quoi et ont renoncé à l'idée
qu'ils avaient un instant eue d'engager
enfin « l'Europe verte » dans la voie
d'une baisse des prix agricoles. L'heure
n'était plus à réfléchir à ce que pourrait
être une politique européenne saine. Il
s'agissait avant tout d'éviter la « conta-
gion » de l'exemple français.
D'autre part, le salaire minimum
(SMAG) — que perçoivent le 1/5° des
ouvriers agricoles — a été majoré de
56 % (de 1,92 F à 3 F). Cette mesure
ne grèvera pas les coûts de production
du secteur le plus artisanal, mais freinera
donc le développement de l'agriculture
industrielle.
F.H. de VIRIEU H
Les accords
de Grenelle
sensiblement
dépassés
Le protocole d'accord de Grenelle (28 mai) a-t-il
été largement dépassé lors des négociations engagées
pour la reprise du travail? Les accords signés, ou en
voie de signature, sur le plan local ou sectoriel sem-
blent l'indiquer, notamment en ce qui concerne les
salaires minima et les avantages annexes.
Ces concessions supplémentaires ont
amené M. Seguy, secrétaire général
de la C.G.T., à déclarer au quotidien
l'Humanité (5.6.68) que « tous les projets
d'accord dépassent souvent très sensi-
blement les concessions internes dans le
projet de protocole de Grenelle ».
Les « salaires de progrès »
En ce qui concerne les salaires, l'aug-
mentation est généralement celle prévue
par les partenaires sociaux de Grenelle:
— 10% environ (en fait, compte tenu
que certaines augmentations n'auront
lieu qu'en octobre, l'accroissement an-
nuel des salaires pourrait être de 8 à 9%).
Si dans le secteur nationalisé, l'accroisse-
ment moyen varie de 12 à 14%, cela est
dû à la volonté des syndicats et du gou-
vernement de combler en partie le retard
pris depuis plusieurs années par les trai-
tements des fonctionnaires et du person-
nel des entreprises nationalisées sur ceux
des travailleurs du secteur privé. On
note par contre, dans toutes les branches,
une nette progression des salaires minima
ou des bas salaires. Cette politique, dite
des « salaires de progrès » tend à atténuer
les disparités de salaires qui s'étaient
accentuées depuis plusieurs années. C'est
ainsi que la progression des bas salaires
varie de ^ 16% à la S.N.C.F. à - 17%
dans les P.T.T., 19,50 % à l'E.D.F.-
G.D.F., 20 % dans l'habillement, la
chaussure, à 23 % dans le textile.
Certaines entreprises au lieu de faire
du 10 °/0 uniforme ont consenti une
augmentation générale de 4 à 5 % à la-
quelle s'ajoute un versement forfaitaire,
quel que soit le smidc. de XO ;'i 120 F. ce
qui favorise les bas salaires. Enfin, da ;
certains cas, assez exceptionnels, 1 >
cadres ont accepté de reporter une p;i
tie de l'augmentation prévue pour e1
sur les bas salaires. C'est le cas au siè
social de Péchiney-Saint-Gobain. Aut
exemple: l'accord signé par les syndic;
et le groupement patronal interpr -
fessionnel de Lille-Roubaix-Tourcoi g
(20 000 salariés travaillant dans c s
secteurs très divers: métallurgie, caoi -
chouc, transport, matières plastiqu ,
ventes par correspondance); les cad: s
ont abandonné 3 % d'augmentati n
sur les 7 % prévus au 1er juin: ce c i
a permis d'accroître les salaires réi s
des manœuvres de 13%, l'accroisseme t
des salaires supérieurs à 1 700 F éta t
limité à 4 %.
Quant à la réduction de la durée eu
travail, elle correspond généralement
aux mesures prévues par le procès-verb il
de Grenelle: « une réduction de 2 heur s
des horaires hebdomadaires supérieur
à 48 h et une réduction d'une heure des
horaires hebdomadaires compris ent e
45 et 48 h d'ici à 1970 ». C'est le cas <ie
l'E.D.F.-G.D.F., de la R.A.T.P. Néa n-
moins, dans la chimie et le pétrole, ;a
réduction progressive de la durée c.u
travail est un peu plus forte: 44 à 42 h
dans le pétrole d'ici le 1.7.69 et réducti' n
de 4 h d'ici le 1.1.69 pour les horair.s
supérieurs à 47 heures, avec compen'- ;-
tion à 66 %.
On notera cependant que dans ! s
grandes entreprises de la chimie (Rhôt -
Poulenc. Pechiney, Ugine) les grévis s
ont décidé de poursuivre la grève: < -;
10
(( Rien
en deçà,
rien au
delà... »
négociations sont désormais ouvertes au
niveau de ces sociétés.
On constate en outre un peu partout
la reconnaissance d'avantages annexes,
tels que 1 à 2 jours de congés payés sup-
plémentaires (2 à la S.N.C.F. et à
l'E.D.F.-G.D.F., 1 à la R.A.T.P., 1 dans
la porcelaine de Limoges. Dans de
nombreuses entreprises, les primes d'an-
cienneté ou de vacances ont été augmen-
tées et un peu partout certains avantages
sociaux ont été accordés pour régler les
contentieux propres à chaque société.
Une expérience:
l'assemblée générale du personnel
Dans l'habillement, le patronat a
décidé d'adhérer à la convention na-
tionale du 23.2.68 sur le chômage
partiel; dans la région de Lille, le
groupement patronal, cité ci-dessus,
a décidé d'appliquer, avec quelques
modifications, l'accord signé dans la
métallurgie parisienne, il y a un an,
sur l'assurance maladie complémen-
taire. Ce même groupement a d'autre
part accepté de tenter avec les syndicats
une expérience : celle de tenir des assem-
blées générales du personnel, en dehors
des heures de travail. Si les partenaires
sociaux estiment au bout de 3 mois, (le
30.11.68), que l'expérience est con-
cluante, elle sera poursuivie.
Il convient de noter également que tou-
tes les entreprises n'ont pas été occupées
et que certaines sociétés n'ont pas été
touchées par la grève. Chez Simca, les
travailleurs qui appartiennent à un syn-
dicat-maison et bénéficient presque tous
(65 %) d'une rémunération mensuelle,
il n'y a pas eu de grève. Mais depuis ven-
dredi dernier, les ateliers ont dû s'arrêter,
faute de matière première. Chez Vini-
Prix, entreprise qui a la première béné-
ficié d'un accord sur l'intéressement, il
n'y a pas eu de grève. A la suite du pro-
cès-verbal de Grenelle, la direction et le
personnel ont décidé d'appliquer une
augmentation de principe de 10 % des
salaires et de négocier catégorie profes-
sionnelle par catégorie professionnelle,
l'augmentation des salaires réels, avec
l'aide d'un spécialiste extérieur à l'entre-
prise. Par contre chez Messier (aviation),
où il existait un accord d'entreprise pré-
voyant une réduction progressive de la
durée du travail et une mensualisation
partielle, les salariés ont occupé les usines
à Paris et en province. Selon le comité
de grève des discussions seraient en
cours: les grévistes auraient obtenu le
principe de la mensualisation totale des
horaires et le droit de réunir l'ensemble
du personnel pendant le temps de travail.
Dans une autre entreprise dynamique,
Poclain, les ateliers et bureaux ont été
occupés jusqu'à mardi 4 juin. Un accord
est intervenu, réduisant la durée du tra-
vail de 47 h 30 à 46 h le 1.10.68 et à
45 h le 1.12.68; l'accord prévoit égale-
ment une refonte du système de rému-
nération, notamment des bonis.
Un autre fait important a été l'ouver-
ture de négociations entre l'U.I.M.M.
(Union des Industries Métallurgiques et
Minières) et les syndicats. Pour la pre-
mière fois, l'U.I.M.M. a accepté de
négocier au sommet des conventions
collectives pour les cadres et pour l'en-
M. Paul
Huvelin,
président
du C.N.P.F.
a donné
deux consignes
aux adhérents
de la Centrale
patronale :
« Appliquez
scrupuleusement
les accords
du 28 mai,
mais n'allez
pas au-delà. »
Dans
l'ensemble
les entreprises
ont fait
preuve de
discipline.
semble des métallos sur les points sui-
vants: durée de travail, droit syndical
(lequel doit faire l'objet, au préalable,
d'une loi), et les problèmes généraux
concernant l'emploi. Mais les syndicats
ont refusé de discuter sur cette base; ils
réclamaient un accord sur l'augmenta-
tion des salaires, problème que TU.I.
M.M. désire voir négocier au niveau des
fédérations régionales.
L'U.I.M.M. a cependant confirmé sa
proposition de négocier sur les points
énumérés ci-dessus.
A l'heure où nous écrivons, la reprise
du travail se généralise, mais on note
cependant un durcissement dans certains
secteurs ou localités. Il semble que la
politique de la C.G.T., et derrière elle,
du P.C. soit de ne pas s'opposer à la
reprise du travail dans le secteur natio-
nalisé et public et de se montrer dure
dans la métallurgie. Les négociations,
en cours au moment où nous écrivons,
entre le groupe patronal de la métallur-
gie parisienne et les syndicats sont suivies
avec une grande attention. La C.G.T. y
attache beaucoup d'importance puis-
qu'elle a tenu à envoyer l'un de ses
principaux dirigeants, M. Krasucki.
pour participer aux discussions. D'autre
part, dans certaines entreprises où des
accords ont été signés et où le travail a
repris, on a noté que le climat restait très
incertain : le personnel reste très sensible
aux négociations en cours dans les autres
secteurs. De nombreux dérapages sont
encore possibles. Il ne peut être encore
question de dresser un bilan des négo-
ciations.
J P DUMOIMT -<
1 1
Ce que
demandent
les
P.M.E.
Les entreprises, et notamment les
industries, de petite et moyenne impor-
tance seront-elles capables d'absorber
les hausses de salaires prévues dans le
protocole du 28 mai ou qui résulteront
d'accords passés à l'échelon de la pro-
fession ou de la région? On fait remar-
quer, à cet égard, à la C.G.P.M.E., que
cela ne dépend pas surtout de la taille
des entreprises, mais de la plus ou moins
grande vulnérabilité des secteurs profes-
sionnels. Dans les secteurs de pointe
(électronique et certaines branches de la
chimie, par exemple), les entreprises
moyennes ont des marges bénéficiaires
du même ordre de grandeur que celles
des grandes entreprises et elles pourront
peut-être supporter sans trop de dom-
mages les mesures prises. Au contraire,
dans les professions vulnérables, et
notamment dans le textile, ces mesures,
estime-t-on, auront les plus graves réper-
cussions, quelle que soit la taille de la
firme.
Pour les P.M.E., se pose tout parti-
culièrement un problème de trésorerie:
il leur faut amortir les premières se-
cousses que provoqueront la reprise du
travail et les payements qu'elles auront
à assurer (sans recettes correspondantes)
lorsque la situation redeviendra normale.
Elles devront également s'adapter aux
nouvelles conditions d'exploitation.
Pour faire face à ces difficultés, la
C.G.P.M.E. demande que des crédits
spéciaux leur soient accordés. M. Gin-
gembre a pris contact à cet effet avec
le nouveau ministre des Finances.
M. Couve de Murville. qui lui a accepté.
Toute entreprise faisant un chiffre d'af-
faires 1967, hors taxe, inférieur à 20 mil-
lions de francs (c'est-à-dire pratiquement
toutes les petites et moyennes entreprises)
pourra obtenir, hors plafond, en fonction
de ses besoins, des crédits de trésorerie à
18 mois au taux maximum de 5°,,. tous
frais compris avec 6 mois de franchise.
Elle devra, à cet effet, s'adresser à sa
banque avant le 15 septembre. Notons
que les banques passeront elles-mêmes
par la Caisse des marchés de l'Etat.
M. Léon Gingembre,
délégué général de la C.G.P.M E.,
a été reçu deux fois cette semaine par
le nouveau ministre des Finances.
M Couve de Murville
Pour
un report d'échéance
Autre revendication de la C.G.P.M.E. :
un report général des échéances, éche-
lonné sur cinq mois. Il ne paraît pas que
le gouvernement ait répondu à cette
attente: il s'est contenté, la semaine der-
nière, de proroger, à compter du 20 mai
et jusqu'à une date non précisée, les
délais de protêt et autres actes de conser-
vation des recours. Ce qui signifie sim-
plement que les poursuites sont sus-
pendues en cas de non payement .le
traites.
Quant au ministre des Finances il a
prorogé seulement jusqu'au 15 juin ;e
délai de payement des impôts, notai ;-
ment de là T.V.A.. exigibles depi s
depuis le 20 mai. Taxe sur les salarie ;
reportée d'un mois.
Tourisme
et investissements
On signalera également deux auti s
revendications, qui émanent, l'une c j
Groupement des maisons spécialisé s
dans la vente aux touristes étrangei ,,
l'autre des Chambres de commerce t
d'industrie.
Le premier de ces organismes f; t
remarquer que la saison touristique a
été gravement compromise par les é\
nements et que les commerces de lu*
qui réalisent un chiffre d'affaires anm
de 100 millions de francs, se trouve
ainsi menacés. Le Groupement demam
en conséquence, qu'on étende à te is I
les touristes quittant la France le v ,a
douanier de détaxe. On sait en et :t |
que. depuis le mois de décembre demi r,
la détaxation des ventes aux touris ;s|
étrangers est subordonnée à un visa tel
la douane, qui ne peut être délivré q
certains postes frontière.
De son côté. l'Assemblée permane tel
des Chambres de commerce et d'ind s-
trie considère que. pour limiter la hau sel
des prix de revient, il est indispensa lel
qu'une nouvelle politique économie ie|
et financière soit définie et que esl
mesures fiscales soient adoptées, ess n-l
tiellement une nouvelle déduction fise lel
pour l'achat de biens d'équipement e lai
réévaluation des bilans, et aussi la s p-l
pression de la taxe sur les salaires, uil
serait amortie d'une nouvelle répartit
des recettes entre l'Etat et les collectiv
"K"leS M CHAUVIERI
NOM .
Je désire m'abonner aux
« INFORMATIONS »
un an 100 Fl__16 mois 50 F
D
à « l'USINE NOUVELLE »
un an 38 FLJ
.......... ADRESSE ..............
Découpez œ bon et envoyez-le 15, rue Bleue (Pans 9") Vous paierez plus lard
12
Les cadres
pendant la grève :
quatre comportements
différents
« Les cadres ne sont pas et ne veulent
pas être absents du mouvement qui
emporte la nation. Ils participent nom-
breux aux occupations d'usine » dé-
clare-t-on à la C.F.D.T. « Nous n'avons
donné aucun mot d'ordre mais dans
de nombreuses entreprises les cadres
se sont mis en grève ». nous a confié un
responsable de la C.G.C. Chez Renault,
à la C.G.E.. dans les Assurances, mais
aussi dans le pétrole, la chimie, la
métallurgie, partout une petite minorité
agissante de cadres a fait grève, ici 10",,,
là 30",,. parfois, mais rarement. 100",,
comme dans le Centre Technique de
Recherches chez Renault. En fait, on
peut distinguer dans l'industrie privée
quatre comportements de cadres.
• La majorité s'est opposée à la grève.
Mais il est à noter que même dans ce
cas, les cadres, ont souvent demandé
à leur direction d'assurer à l'avenir une
meilleure information. Ce fut notam-
ment le cas dans les sièges sociaux de
Lesieur. Pechiney. Saint-Gobain. Rous-
sel, Uclaf et Nestlé.
• Ensuite on trouve les cadres qui ont
manifesté le désir, non pas de faire hi
grève, mais d'être présents dans l'entre-
prise occupée. Dans certaines entre-
prises, des cadres ont négocié avec le
comité de grève pour entrer dans l'usine
et discuter avec les grévistes: dans
d'autres entreprises, des cadres ont refusé
en principe d'occuper les usines, mais
se sont rendus tous les jours aux réu-
nions d'information organisées par les
syndicats: certains ont pu discuter avec
les grévistes, dans des salles neutres,
transformées en « parloirs ». Chez ces
cadres il y a eu le souci d'éviter la cou-
pure entre les ouvriers et eux-mêmes:
ils ont joué leur rôle d'intermédiaire
entre les ouvriers et la direction.
• D'autres cadres ont fait grève, mais
uniquement pour détendre la hiérarchie,
s'opposer au déplafonnement institué
par les ordonnances sur la Sécurité
sociale et obtenir la liberté syndicale.
• Une petite minorité a joué la grève
à fond. Revendication principale: obte-
nir une refonte profonde des structures
de l'entreprise. Il s'ns'jt surtout de
cadres sans fonction 'l'i'iv .-H^emeni
(chercheurs, eu )
Le chercheur est un cadre par sa formation
mais non par ses fonctions...
A l'Institut Français du Pétrole, au
S.E.R.E.T.E.. au Cent-re National d'Etu-
des Spatiales, la majorité des cadres a
fait grève et obtenu que des commissions
de participation ou d'information soient
créées. Au Centre Technique de Re-
cherche de Renault, les ingénieurs ont
fait grève et décidé de la poursuivre,
comme les ouvriers.
Dans de grandes entreprises comme
Rhône-Poulenc à Vitry, la C.G.E. à
Marcoussis, des cadres ont occupé
l'usine, mais on en comptait seulement
16 sur 321 dans la première. Dans une
autre entreprise métallurgique de la
banlieue parisienne sur 60 cadres, 38
ont voté dont 21 pour la grève: 15 y ont
effectivement participé. Dans une filiale
de Renault, les cadres ont fait grève
à mi-temps: travail le matin, discussion
l'après-midi en commissions.
Dans leur majorité, les cadres sont
donc restés hors de la grève. Néan-
moins, l'attitude de la minorité agissante
soit dans l'usine occupée, soit dans les
« parloirs », soit dans les commissions
aura d'importantes répercussions, à
l'avenir, dans les entreprises. Ils ont
en effet accéléré ainsi une prise de
conscience tant chez les cadres que chez
les employeurs. D'où une nécessité
accrue de bâtir une nouvelle politique
de gestion des entreprises basée sur une
meilleure information, voire sur une
participation réelle et sur une politique
de formation permanente.
.1 P DIIMONT n
Ce n'est pas une erreur,
( -O ,S pOLUO-'S C. re
qu'ils so-t a ..,55' -e'=, c. :ss' vr-n1- ~ ;•
docu-^en1 .n.Mcl.: " ; 'ARCOR -00 " ^;
d.j1* *O'js doc '-ne^ '?K (i." de~ r
-•''excède-* nns ^0 r.n^'. cf pr^-^et -'i^. * i
e^te^d>j, D^n-^c,
^our répondre à 'ous vos beso "r>. 4 c,
modèles vo s so-t o'fe^ts, iU .'oi ^
n^e'te^t de rcprod-jirc o-"i^i"n''^^er't
documents, v compas do^ ri--r;^^ de ! .•
''Snns casser la reh-jre)
— ARCOR STANDARD: '^-'- -( -'•-.-
formct o r ; g ' n c I ?. ! - ~*Q •
- ARCQR 4: (r-p^rnri:.ctiri" d i f-.>
or.gmal 2: •' ^^
- ARCOR 4: (rnp-od -' o" d-i f'->'
POLYCLAIRsA
BON POUR DOCUMENTATION GRACIEUSE
POLYCIAIR SA
LA
CARENCE DES
SYNDICATS
POURQUOI?
La crise sociale aura pour conséquence
une crise économique dont ont veut
espérer qu'elle ne prendra pas un carac-
tère catastrophique.
Les travailleurs risquent donc de
connaître de nouveau une « amère vic-
toire » (voir .notre précédente publica-
tion) ou plutôt une victoire sans lende-
main, car ils se heurteront à une force
que même des millions d'hommes ne
peuvent vaincre: l'inflation.
Très peu de syndiqués
Dans les origines de la crise, on peut
sans doute disserter sur les responsabi-
lités des trois partenaires sociaux: Etat,
patronat, syndicalisme ouvrier, en disant
qu'ils n'ont pas su bâtir une politique
sociale à la mesure du développement
industriel et des aspirations sociales du
pays. Mais dans la « dérive » de la crise,
les responsabilités sont claires: les syndi-
cats ouvriers n'ont pas su jouer leur
rôle, ils ont été trop souvent impuis-
sants à signer des engagements raison-
nables et quand ils le faisaient à faire
respecter leur signature. C'est évident en
ce qui concerne les accords du 27 mai.
C'est certain en ce qui concerne beau-
M. Georges Seguy et le
« double jeu » de la C.G.T.
Chez Renault (28.5) : « Les choses
seraient allées différemment
s'il y avait eu en face de nous
un gouvernement de gauche.
et, face aux patrons,
une seule organisation syndicale..
Mais ce qui n'a pas été possible
aujourd'hui le deviendra demain,
pour peu qu'on s'en occupe ».
Le 30 mai, la C.G.T. abandonnait cependant
le terrain « politique » :
la base. elle, n'a pas
toujours bien compris
Le syndicalisme dans le monde
Proportion des travailleurs^ syndiqués par rapport aux salariés de l'industrie
Autriche ....
Belgique ...
Suède .....
Grande-Bretagne
Luxembourg . .
Italie .....
Pays-Bas .
Allemagne . . .
U.S.A......
Japon .....
France . . . .
64
60
45
40
40
35
27
26
22
20
20
à 66 %
%
à 44%
%
à 43 %
à 34%
à 37 %
à 28,5 °,
à 22 %
à 21 %
Le pourcentage des travailleurs syndiqués par rapport à l'ensemble des salariés
de l'industrie est très controversé dans la plupart des pays, car il est généralement
calculé à partir des statistiques syndicales assez peu objectives. Quelques sources:
The Economist (3.9.66), « Le mouvement syndical en Belgique » publié par la
Documentation française (201.1967), « Cadres et Professions », organe de la
C.F.D.T. (avril 1966)
coup de négociations « sectorielles » ou
locales ultérieures.
Pourquoi cette carence? Grosso mo-
do, on peut dire qu'il y a trois grandes
raisons: le faible taux de syndicalisation
la pression des jeunes, les surenchères
nées des divisions syndicales.
La pression des « jeunes »
Pour les quatre cinquièmes des travail-
leurs français la voix des syndicats n'a
qu'une autorité « contestable ». C'est
à leurs yeux celle d'organisations enga-
gées dans le « système >( obtenant au
prix de difficiles négociations des résul-
tats peu spectaculaires, et dont les mili-
tants s'usent en des querelles de clocher.
La révélation des événements, c'est
la pression des « masses » et principale-
ment des jeunes sur les « appareils »
syndicaux.
Dans le monde entier, on a enregistré
depuis 10 ans une régression de la syndi-
calisation. Mais aux Etats-Unis (voir
« Les Informations » n" 1200) le phéno-
mène a traduit l'aspiration des jeunes
à la société de consommation, aux satis-
factions matérielles immédiates, en un
mot à l'embourgeoisement. En France,
au contraire, la pression des jeunes tra-
vailleurs s'est exercée dans le sens d'un
retour aux sources du syndicalisme
français.
Le résultat de cette pression pendant
la crise a été une sorte de paralysie
idéologique des syndicats tiraillés entre
deux politiques contradictoires.
« Paritarisme » ou
« politisation »
Traditionnellement, les syndicats fran-
çais oscillent entre le « paritarisme » et
la « politisation »: la première thèse
suppose que le rôle des syndicats est
d'obtenir la satisfaction des revendi-
cations de leurs adhérents, sans s'in-
quiéter de la couleur politique du gou-
vernement, la seconde thèse affirme que
si le gouvernement ne change pas, les
négociations ne peuvent aboutir qu'à des
concessions partielles ou sans portée et
ne sont en définitive que « des conver-
sations de salon » (dixit la C.F.D.T. à
Renault - 29 mai).
F.O. et la C.F.T.Ç. maintenue
avaient choisi le paritarisme, la C.G.T.
et la C.F.D.T. n'ont jamais publique-
ment osé « hisser leurs couleurs ».
D'où une sorte de double jeu plus
apparent que jamais, écartelées que
sont ces deux grandes confédérations
entre la donnée politique créé,e par
le discours du général de Gaulle du 30 mai
et les remous d'une « base » agitée
par le romantisme révolutionnaire.
Au petit matin qui suivit les 25 heures
de discussions rue de Grenelle, les
observateurs s'attendaient à ce que
certaines centrales signent ce procès
verbal, en émettant des réserves impor-
14
tantes pour les grandes entreprises ou
les secteurs peu touchés par la revalori-
sation du Smig. Admettons même que
la C.G.T. et la C.F.D.T. ne se soient
pas engagées. Mais les autres centrales?
Si l'on observe quels étaient, avant la
crise, le comportement de la C.G.T.F.O..
de la C.F.T.C. maintenue, de la C.G.C.
il était logique de penser que ces trois
syndicats — dits « libres » — auraient le
courage de signer le procès-verbal, tout
en invitant leurs adhérents à négocier
des avantages spécifiques à l'échelon
des fédérations et des entreprises. Le
C.N.P.F. avait d'ailleurs promis le
28 mai que de telles négociations s'ou-
vriraient. Ils ne l'ont pas fait.
Le « gauchisme » de la C.F.D.T.
La C.F.D.T. joue un jeu assez parti-
culier. C'est la plus « politisée » des
centrales. Car sa tactique traditionnelle
a toujours été d'essayer de déborder la
C.G.T. par la gauche. Les événements de
mai lui ont fourni des occasions mul-
tiples: les étudiants, les « chinois », les
« anarchistes » et autres révolutionnaires
ou « agités » de tous crus et de tout poil.
Pour la C.F.D.T., l'objectif est désor-
mais clair: il faut réformer les « struc-
tures », c'est-à-dire introduire de nou-
velles formules de participation des
salariés conduisant à une démocrati-
sation de l'entreprise. Pour certains de
ses militants, il ne s'agit que de cela,
mais pour d'autres, il s'agit surtout
d'obtenir une nouvelle politique écono-
mique et sociale, c'est-à-dire un nou-
veau gouvernement et même une révo-
lution. Le 30 mai M. Descamps prenait
la parole pour proclamer son désir d'un
gouvernement dirigé par M. Mendès-
France.
La C.G.T.. elle, est fort embarrassée:
MM. Frachon et Seguy naviguent actuel-
lement au plus serré: d'une part les
communistes ne sont pas prêts à prendre
le pouvoir et Moscou ne les y pousse
pas, du moins actuellement...; d'autre
part il lui faut, contenir et canaliser
un million de cégétistes et des millions
de sympathisants qui, eux, sont prêts à
« politiser ». Conséquence; la C.G.T.
a du mener depuis le début de la grève
un « double jeu » avec une échappée
sur la « politique » le 29 mai et un hardi
retour en arrière le 31 mai.
Quel que soit le sort de la crise actuel-
le, un bouleversement à l'intérieur des
syndicats est à peu près certain. La
C.F.D.T. qui, la première, a affirmé le
caractère politique de la grève, accroîtra
sans doute son audience, mais le ma-
laise de la minorité « apolitique » ira
en s'accroissant. Quant à la C.G.T. la
C.G.T.-F.O., et la C.G.C., elles pour-
raient subir l'assaut de la « base » qui
désire, elle aussi, participer — le maître
mot — à la politique de leur syndicat.
De jeunes syndicalistes nous l'ont affir-
mé à plusieurs reprises: « Tous les
syndicats ont été dépassés ».
J P. DUMONT r-
la meilleure
des garanties pour
vos investissements :
la réussite spei
En 1967, la SPEI double son chiffre d'affaires de 1966.
En 1968, toujours à l'avant-garde
dans la conception de son marketing
comme dans l'étude de ses programmes,
elle continue à progresser et à élargir son champ d'action.
Ses grandes réalisations comme La Plagne,
l'International Club du Lys, le Nouveau Belleville,
sont pour vous la meilleure preuve de sérieux et de qualité.
Dans la conjoncture actuelle,
devant les besoins croissants en appartements,
bureaux et locaux commerciaux, et aussi en loisirs,
l'investissement immobilier
se confirme comme la valeur sûre.
La SPEI peut ainsi vous proposer des places de port,
des emplacements de parking,
des studios à Paris ou en montagne,
des locaux commerciaux
et peut même se charger dans certains cas
de vous trouver des locataires
vous assurant la rentabilité de vos investissements.
Dans Paris, en banlieue comme en province,
pour les logements de fonction de votre personnel,
investissez de façon intéressante
le 1 % patronal dans certains programmes SPEI.
Pour vous guider dans votre choix (lieu d'implantation,
facilités de crédit, études juridiques,
problèmes fiscaux, etc...
notre Service Conseil spécialisé est à votre disposition.
14 avenue Franklin-Roosevelt - BAL 54-04
Service Conseil Locaux Commerciaux
1, Rue de Berry Paris 8e ELY 09-98
MUTATION
A
RÉUSSIR
La
révolution
qui vient
d'ébranler
la société française
M
rejoint
par son ampleur
les grandes secousses
de notre histoire.
Un monde nouveau
peut en naître.
Mais il y faut
certaines conditions.
Nous les rappelons
ici.
Tous ceux qui ont vécu les journées
de juin 36 sont d'accord: le mou-
vement social de mai-juin 68 a été
plus ample, plus profond, plus spontané
qu'il y a 32 ans. Il y a eu davantage de
grévistes. Tous les grands services col-
lectifs, courrier, transport, se sont arrê-
tés. Aucun secteur d'activité n'a été
épargné. Toutes les formes d'autorité
et pas seulement l'économique ont
été contesté -s.
Ni haine
ni vraie doctrine
En revanche, cette immense remise en
question a perdu, semble-t-il, en âpreté
ce qu'elle gagnait en ampleur. Que
lisait-on la plupart du temps sur les
calicots ou pancartes accrochés aux
murs des usines occupées? « nos salai-
res, nos quarante heures payées qua-
rante-huit, la retraite à 60 ans. etc. » Ce
grand déferlement revendicatif s'accom-
pagnait rarement de slogans empruntés
au vocabulaire classique de la lutte des
classes du genre: « mort au patron, à bas
le capitalisme... » et autres fruits de
l'idéologie révolutionnaire. Curieuse-
ment, c'est aux grilles d'une des gares
de Paris que les cheminots grévistes,
salariés de l'Etat, exprimaient le plus
fortement leur haine d'une bourgeoisie
appelée, selon eux. à une prompte dis-
parition.
Ce climat très spécial qui distingue
radicalement le mouvement social d'au-
jourd'hui de ses devanciers, comporte
plusieurs enseignements. En voici une
autre illustration.
Expliquer pour apaiser
Dans une importante entreprise tex-
tile, l'arrêt du travail est lancé, comme
il est arrivé souvent, par des jeunes
Cette entreprise pratique un système d'in-
téressement aux bénéfices appréciables et
apprécié. Le travail, il est vrai, y est
intense, la rotation de la main-d'œuvre
rapide, la moyenne d'âge peu élevée.
Cette entreprise exporte une part impor-
tante de sa production, en particulier en
Allemagne. Une grève prolongée lui
porterait un coup sensible. Elle dure
S jours. A ce moment, le patron parvient
à réunir les représentants syndicaux et
leur expose chiffres en mains, la situation
de sa maison, le coût des journées non
travaillées, l'impact d'une hausse aveugle
des salaires. Il leur explique aussi celle de
'•es principaux concurrents européens I i
1 fi
lutte qu'il doit mener, les conditions de
prix qui sont les siennes, la menace
directe que représenterait un ralentisse-
ment dans la modernisation du matériel.
Réalités contreignantes qui dessinent le
présent et l'avenir de la société: et cepen-
dant réalités nouvelles pour la plupart
des syndicalistes appelés, pour la pre-
mière fois et à chaud, à un effort de
réflexion. Cet effort paie: le travail
reprend non sous l'effet d'une contrainte
subie mais sous l'effet d'une information
comprise.
Patrons et salariés
égaux devant la loi du marché
Cet exemple a valeur universelle. Il a
été beaucoup question de démocratie
ces jours derniers. Faut-il rappeler que
celle-ci se définit avant tout par l'exis-
tence et le respect d'une loi qui vaut pour
tous les citoyens? Or, en matière éco-
nomique, la loi c'est l'état du marché.
Est-il si difficile de montrer qu'aujour-
d'hui capital et travail, patrons et sala-
riés sont au même titre soumis à sa
rigueur? Que tout affrontement qui ne
tient pas compte de cette communauté
de destin, nuit fatalement et également
aux deux parties? Bref, que dans une
économie ouverte, le vieux cliché de la
lutte des classes, né en un temps d'écono-
mies frustes, de marchés autarciques, a
perdu son sens?
Le syndicat « participe »
au progrès industriel
Nous ne le pensons pas. Cet effort de
clarification et de vérité paraît d'autant
plus opportun que. sinon les cadres syn-
dicaux, du moins la masse moyenne des
salariés vit encore dans l'ancien monde.
Elle reste persuadée que le patron détient
un « magot » caché dans lequel il suffit
de puiser. Elle confond bénéfice et dis-
tribution. Elle ignore ce que savent les
syndicalistes allemands ou suédois. Non
pas que ceux-ci soient associés à la mar-
che de l'entreprise. Le tout puissant syn-
dicat ouvrier de la très socialiste Suède
n'a jamais revendiqué la moindre « par-
ticipation ». à la gestion des sociétés.
Mais il connaît assez la situation finan-
cière et l'état du marché mondial où
s'inscrit une industrie très fortement
exportatrice, pour comprendre qu'une
revendication peut ressembler à un sui-
cide. Par contre, il prend une part très
active à tout ce qui touche l'organisation
du travail dans l'entreprise, le calcul des
temps, le recyclage des salariés. Bref, il
apporte un concours actif et nécessaire
à un progrès qui ne sépare pas les exi-
gences de la technique et le souci de
l'homme.
Une facilité trompeuse
La moyenne des salaires français a
atteint un niveau suffisant pour que des
grèves de l'ampleur de celles que nous
connaissons, durent plusieurs semaines.
C'est là aussi un fait nouveau. Autrefois,
la dégradation rapide de la situation des
familles de salariés hâtait l'heure du
compromis. Il n'en est apparemment plus
ainsi aujourd'hui. Mais attention! Cette
facilité est trompeuse. Le dommage subi
est devenu à la fois moins sensible et plus
profond. La grève est moins un affron-
tement brutal, une tension douloureuse
qu'un grand défoulement d'où la haine
paraît absente. Mais, redisons-le, l'éco-
nomie a ses lois plus rigoureuses peut-
être encore aujourd'hui qu'hier. C'est
pourquoi la sagesse, fille autrefois de la
crainte ou du besoin, doit naître mainte-
nant de la réflexion.
Or. combien de grévistes mesurent
même en gros, le coût de trois semaines
de travail chômées, de ces millions
envolés avec les commandes non hono-
rées, le tourisme compromis, les expo-
sitions, salons désertés? Combien ima-
ginent que cette perte les concerne direc-
tement? Très peu. sans aucun doute.
A la lettre, beaucoup ne savent pas ce
qu'ils font. Mais le leur a-t-on appris'.'
Les sociétés nationalisées
en porte-à-faux
Enfin, s'il est vrai que la rigueur
domine l'économie moderne, combien
ambiguë apparaît par contraste et inquié-
tante à terme la situation des entreprises
nationalisées!
On savait depuis longtemps que l'Etat,
premier patron de France, responsable
d'entreprises libérées de l'impératif du
profit n'avait pas un « profil » social
beaucoup plus séduisant que l'entre-
prise privée. C'était même plutôt le
contraire. C'est qu'au niveau des grands
services publics, la concurrence est
inexistante, l'établissement des coûts
réels quasi impossible, le patron, enfin,
sans visage. Pour toutes ces raisons, la
double évolution qui mène à une person-
nalisation croissante des relations humai-
nes dans l'entreprise et à une prise de
conscience des exigences d'un marché
concurrentiel y est entravée. Alors on
s'installe dans une revendication sans
obligation ni sanction, on échappe à la
loi commune qui lie le progrès à la pro-
ductivité et au mouvement. Non que les
doléances des syndicats soient toujours
sans fondement. Mais il est beaucoup
plus difficile qu'ailleurs d'en mesurer
la portée et la validité. Il y manque ce
juge impartial: le marché.
Dernier paradoxe: ces grands services
publics, qui échappent à la règle com-
mune, sont aussi les clés de toute l'éco-
nomie faite d'échanges et de communi-
cations et soumise, elle, à la loi d'airain
de la concurrence. Il y a là une con-
tradiction à laquelle n'avaient pas songé
ceux qui, voici 23 ans, dans une
France exsangue, aux échanges com-
merciaux dérisoires, ont voulu et imposé
les nationalisations.
Un mûrissement
salutaire
On n'a pas fini de mesurer l'étendue
des problèmes, la profondeur des ques-
tions que posent à la société économique
française tout entière les journées que
nous finissons à peine de vivre.
Nous n'avons rien dit de l'aspect poli-
tique qu'elles ont failli prendre à plu-
sieurs reprises et qui sera finalement
révélé par le scrutin du 30 juin. L'addi-
tion, on le sait, sera très lourde. 11 est peu
probable que les électeurs auront le
temps, en quinze jours, d'en prendre
pleine conscience. Il est peu probable
que les candidats pourront, toutes pas-
sions apaisées, leur tenir le langage de la
vérité. Il y a donc lieu de craindre que la
France ne paie cher et longtemps la
luxueuse cure de désintoxication qu'elle
vient de s'offrir.
Mais tout n'aura pas été vain si cette
période exceptionnelle a hâté chez les
trois partenaires du drame: Etat, pa-
trons, syndicats le mûrissement néces-
saire. L'accélération de la technique et
des échanges, la modernisation coûteuse
de notre appareil industriel devaient tôt
ou tard amener une rupture de nos habi-
tudes séculaires. Quand, comment, où'.'
Nul ne pouvait le dire. C'est l'assaut
inquiet de la jeunesse qui a tout précipité.
Maintenant, il faut, à tous les niveaux,
politique, économique, social, restaurer.
Si la France y parvient, elle aura, pour
la première fois, réussi une révolution.
LE GRAND
ET LE PETIT PATRONAT
AU PIED DU MUR
A l'heure où la dernière échéance du
Marché commun est inscrite au
calendrier du 1er juillet prochain, le
dénominateur commun des dirigeants
et responsables français d'entreprises a
été évidemment le souci d'un retour ra-
pide à la paix sociale.
Il s'agit maintenant pour tous de
faire face à une augmentation générali-
sée des coûts et des prix, dans le moment
où l'ouverture des frontières va donner à
nos concurrents une force de pénétra-
tion accrue, et où les produits français
auront eux-mêmes à lutter plus dure-
ment pour s'imposer sur les marchés
étrangers, spécialement sur ceux de nos
partenaires communautaires.
On doit convenir néanmoins que ce
mot d'ordre unique exprimé par un
communiqué de la Confédération pa-
tronale, s'applique à des situations fort
diverses selon les évolutions sectorielles
et l'état de santé individuel des entre-
prises.
1400 fusions
2500 décentralisations
Engagée dans un vaste processus de
transformation de ses structures, l'in-
dustrie française a réalisé depuis 1958
quelque 1400 opérations de fusion et de
concentration, plus de 2500 opérations
de décentralisation ont été effectuées, ce
qui n'a point empêché d'autre part la
création de milliers d'entreprises nou-
velles, de toutes dimensions.
Durant ces mêmes dix dernières an-
nées, nos exportations ont plus que
doublé en monnaie constante, en même
temps que la part des pays du Marché
commun dans notre commerce exté-
rieur s'accroissait de moitié.
Voilà le chemin déjà parcouru. Il ne
peut qu'inciter à reconnaître l'impor-
tance de celui qui reste à parcourir,
pour l'insertion définitive de l'industrie
française dans la compétition inter-
nationale, la plus difficile.
La haute mer
de l'aventure industrielle
... « Une communauté n'a jamais pu
distribuer que ce qu'elle produit, n'a
jamais pu offrir de nouveaux emplois
que si elle investit ».
... « Toutes les mesures appliquées ou
envisagées pour réduire les inconvé-
nients des mutations inévitables reste-
raient vaines si, à terme, il n'était pas
possible de créer suffisamment d'em-
plois stables.
« Dans ce domaine, je dois dire bien
clairement que tout ne dépend pas uni-
quement de nous, industriels, que la
création d'emplois nouveaux ne peut
résulter que du développement des
investissements productifs, que ceux-ci
à leur tout dépendent des capitaux qui
pourront être obtenus, soit de l'épargne
publique ou privée, soit de l'autofinan-
cement déjà insuffisant des entreprises ».
Ces propos d'actualité, tenus il y a
quelques jours au cœur des événements,
par le Président de Péchiney, situent
très exactement la prise de position et de
responsabilités d'un « Grand patronat »
qui a déjà gagné, si l'on peut dire, la
haute mer de l'aventure industrielle,
avec des structures de production et de
distribution intégrées à l'échelle inter-
nationale et au niveau de ses principaux
concurrents mondiaux.
Contraintes et capables de gagner la
bataille de la productivité et du manage-
ment modernes, ces grandes unités
doivent passer un cap difficile, tout en
réclamant des pouvoirs publics qu'ils
mettent, « comme le font les entreprises,
leur action et leurs méthodes en accord
avec les impératifs de la concurrence
internationale ».
La surcharge
des plus faibles
Tout autre, sauf cas particuliers, appa-
raît le sort des petites et moyennes en-
treprises françaises dans la conjoncture
actuelle.
Se situant entre 6 et 500 personnes,
— elles emploient plus de 60% des sala-
riés français — la P.M.E. n'a point enco-
re surmonté son risque d'isolement chro-
nique, à la fois géographique et écono-
mique, malgré des efforts incontestables.
Facteur essentiel de la prospérité d'un
pays en fonction de leur importance en
volume d'emploi et masse salariale, les
P.M.E. vont supporter à plein l'impact
des concessions salariales et avantages
annexes, des hausses de prix et de tarifs,
d'une fiscalité sans doute accrue à
terme.
Dans les industries à fort pourcen-
tage de main-d'œuvre notamment (tex-
tile et habillement, petite mécanique...),
ainsi que dans d'autres activités de
transformation et de distribution, exis-
tent de nombreux risques de rupture
d'équilibre, précisément dans des zones
industrielles déjà en perte de vitesse.
Revalorisation des bas salaires, du
S.M.I.C., abandon des abattements de
zone sont certes des mesures sociales
justifiées et indispensables, mais elles se
trouvent peser brusquement et lourde-
ment sur la partie la plus faible de
l'appareil productif français.
Le schéma-type du patron français,
tel qu'il est défini au titre d'une direc-
tion confédérale, est alors bien une
moyenne, un compromis entre des
situations fort diverses, comptabilisant
les espoirs d'une France industrielle en
expansion et les appréhensions de pro-
ducteurs et d'employeurs, qu'on veut
contraindre à une conversion désormais
précipitée.
J.C. HUBERT D
pour votre congrès
BAL 67-56
un coup de téléphone
qui vous évitera
bien des tâtonnements
france-congrès
"Centre permanent de renseignements patronné
par le Commissariat Général au Tourisme et
les villes de Biarritz, Cannes, Deauville,
Evian, Lyon, Marseille, Nice, Strasbourg, Vichy,
Vittel" met gracieusement à votre disposition
son expérience et sa documentation unique
pour l'organisation de votre congrès,
colloque, symposium, séminaire.
france-congrès 7, rue Balzac - 75 - Paris 8e
Tél. 225-67.56 - Télex : 28978
18
... /Vous, c'est les dix fenêtres que
vous voyez à gauche, au quatorzième étage,
trois cents mètres carrés ; et je fais
tout installer par BUROGUID,
bureaux, sièges, meubles et rayonnages.
'Is ont même installé des cloisons démontables
pour isoler les différents services -
enfin, c'est ce qui se fait de mieux
maintenant, à mon avis.
équipe le bureau moderne
bureaux et meubles de
rangement bois et métal
rayonnages
cloisons mobiles
INSTALLATION FRANCE ENTIÈRE vente et exposition
10 r St-Senoch 75 Paris 17e
tel 227.31.63 - 227.35.97
lignes groupées
BON POUR UNE DOCUMENTATION meubles bois G meubles métal
rayonnages C cloisons Q
A découper et à envovsr 10, rue St-Senoch - 75 - Paris 17'
19
Les 23 et 30 juin,
les Français auront à faire
un choix décisif pour l'avenir
du pays, notamment dans les domaines
économique et social.
Dans un but de stricte information,
nous ouvrons nos colonnes
à un certain nombre de personnalités
que nous estimons représentatives
de courants d'opinions ou d'idées.
Aujourd'hui à Edgard Pisani,
qu'on pourrait appeler un
gaulliste... d'opposition.
Bien entendu, et suivant
la formule consacrée,
les opinions exprimées n'engagent
que leurs auteurs.
E. PISANI
« L'APPLICATION
IMMEDIATE DES
ACCORDS DE GRENELLE
SERAIT UNE DISTRIBUTION
DE FAUSSE
MONNAIE »
F.H. de Virieu
Comment vous situez-vous, vous et
candidats « pisanistes ». dans la
électorale qui vient de s'ouvrir et qui
pour tout le monde, apparaît comme un
affrontement entre deux blocs: les yin/l
listes et /'opposition de gauche '.'
Je refuse le partage
de la France
E. Pisani
Aujourd'hui, dans la vie politique, on
ne combat plus l'adversaire, on le
récuse. M. Pompidou monte à la tribune
et récuse le parti communiste comme
l'ennemi du peuple, comme un adver-
saire dont il est impensable qu'il accède
au pouvoir. Nous avons un pays où la
moitié des gens sont dans l'institution
qu'ils s'approprient et les autres sem-
blent être hors de l'institution. Ainsi.
l'un contestant l'autre, maintient-on le
débat au niveau mythologique des prin
cipes et non pas de la réalité sociale.
En réduisant la bataille politique ac-
tuelle à une opposition UDVf' Répu-
blique contre Parti Communiste et en
récusant en même temps ce dernier, les
gaullistes cherchent à démontrer au pays
qu'ils sont les seuls capables de gou-
verner. Or un pays dans lequel un seul
parti est capable de gouverner n'est pas
un pays démocratique. Il y a une dia-
lectique « salazarienne » dans l'attitude
de M. Pompidou. A partir du moment
où le parti communiste existe, la seule
formule est d'aller vers un système ter-
naire ou quaternaire, vers trois ou
quatre groupes parlementaires.
Je refuse le partage de la France. Je
suis pour la bataille dans le cadre des
institutions. Je ne crois pas qu'il soit
nécessaire de descendre dans la rue pour
faire des réformes: la voie normale reste
la loi. Je considère que l'équipe de
Georges Pompidou est incapable de
mener à bien la réforme qui sérail
souhaitable, qu'elle ne peut pas, qu'elle
ne veut pas même la concevoir. N'a-t-elle
pas bénéficié avec les pouvoirs spéciaux
d'une liberté juridique considéra Mo"
Qu'en a-t-elle fait1'
Cinq réformes
prioritaires
rt La réforme qui serait souhaitable.
dites-vous. C'est-à-dire?
|f _ Dans une société moderne, la part
de ce qui est « contestable » est à la
fois très étroite et très significative. L'ob-
jectif d'un réformateur ne doit pas être
de tout mettre en cause mais d'essayer
de dégager dans chaque secteur et dans
l'ensemble de la société les points sur
lesquels il faudrait agir pour que cette
société change. Quels sont les axes prin-
cipaux de recherche? J'en vois quatre.
Dans l'ordre, l'éducation, la structure
des collectivités locales, les entreprises,
l'information. Si l'on arrivait dans ces
quatre domaines à organiser le passage
de notre société immobile, cloisonnée,
hiérarchisée à une société ouverte et
contestataire, tout le reste suivrait.
Les syndicats
doivent comprendre
Q Pensei-vous que l'économie fran-
çaise puisse « digérer » les accords
de Grenelle et à quelles conditions '.'
|f _ Ce qu'il faut éviter c'est de remettre
en cause ce qui a été accordé.
Mais il faut absolument étudier la façon
dont tout cela peut être accordé sans
faire sauter l'édifice. Car les syndicats
ne peuvent pas ne pas comprendre que
l'application immédiate des « accords
de Grenelle » serait une distribution de
fausse monnaie. Ils ne peuvent pas ne
pas savoir que des professions entières,
des régions entières risquent de sauter.
Les « Smigards » et les « Smagards »
dont les salaires vont être relevés de
35 °0 et 60 °0 sont essentiellement
installés dans les régions en dépression
et dans les industries à hase de main-
Pour ce géant barbu de 50 ans qui
mesure 1,92 m comme le général de
Gaulle, qui a été préfet à 28 ans, séna-
teur à 35, ministre à 43, député à 49 et
qui conserve de ses origines tunisiennes
un esprit de défricheur, il est évident
que « l'avenir de l'avenir est dans le
présent » et que c'est dès maintenant
qu'il faut analyser les situations et faire
les choix. Rien ne l'irrite davantage que
de voir ses contemporains hypothéquer
le futur d'un coeur léger au nom de
l'héritage du passé ou des nécessités du
moment.
« Prophète », « bavard », « velléitaire »,
« florentin », « destructeur », « hâbleur »,
« courageux », « arriviste », « maniaque
de l'analyse », « traitre à ses électeurs ».
Edgard Pisani s'est vu décerner toutes
les épithètes, surtout depuis le 22 mai
dernier date à laquelle il a décidé de
démissionner de son mandat de député
après avoir censuré le gouvernement
auquel il appartenait un an auparavant
Cette démission est un peu une
retraite sur l'Aventin. Dans son for
intérieur Pisani ne se fait guère d'illu-
sions sur ses chances d'être réélu dans
sa circonscription du Maine-et-Loire
II a quitté les rangs de la majorité Mais,
logique avec lui-même jusqu'au bout,
n'a pas pour autant rejoint ceux d'une
opposition de gauche qui lui semble
tout aussi conservatrice et peu imagina-
tive. Il se présente donc dans la bataille
électorale à la tête d'un quarteron de
candidats rassemblés sous la bannière
toute neuve du « Mouvement pour
la réforme », le « P.S.U. du gaullisme »
comme on l'appelle déjà, le « groupus-
cule » des pisanistes...
Pour l'ancien ministre de l'agriculture
et de l'équipement, l'essentiel le 23 juin
sera de prendre date. Une visite à la
Sorbonne en effervescence, les sollicita-
tions de jeunes fonctionnaires, de jeu-
nes patrons ou de jeunes agriculteurs
ont achevé de le convaincre que les
réformateurs pouvaient avoir un avenir
politique
F.-H. V
d'œuvre. celles-là mêmes pour les-
quelles la concurrence étrangère se fait
de plus en plus sévère. Je pense à la
ganterie de Millau. Je pense à la chaus-
sure de Fougères, aux grands vergers
industriels du Val de Loire...
Faute d'un accord entre un gouver-
nement ayant retrouvé une réelle prise
sur l'événement, le patronat et les syn-
dicats, accord définissant les modalités
d'application du « protocole de Gre-
nelle ». je ne vois pas comment on évi-
tera le retour aux pratiques dont la
V'' République avait réussi à nous
écarter.
Les arrière-pensées
de la C.G.T.
Q^ Ne pensez-vous pas qu'en « char-
geant la barque » des revendications
au-delà de ce qui est tolérable pour l'éco-
nomie, certains syndicalistes appliquent la
première étape d'une stratégie politique'.'
|f ^ Je pense en effet que certains
syndicats, et notamment la CGT.
ont la volonté de faire tomber l'appareil
en panne pour essayer de tirer parti de
cette panne, c'est-à-dire, de prendre
le pouvoir démocratiquement, à la faveur
du mécontentement qui suivrait inévi-
tablement une inflation généralisée. Au
train où vont les choses on peut se
trouver dans un an puisque pendant
un an il ne peut pas y avoir de dis-
solution devant une obligation objec-
tive de dissoudre une Assemblée « dé-
phasée » par rapport à la situation née
de l'évolution économique. Il faudrait
alors revenir devant les électeurs et le
scrutin, en période de crise, pourrait
alors donner des résultats, disons...
anormaux.
Je critique
les patrons
Q Où sont, à votre avis, les respon-
sahilités'.'
|f Dans les accords qui viennent
d'être passés entre le patronat et
les syndicats ouvriers et c'est là le
reproche essentiel que je leur ferais
on a préféré mettre en cause l'équilibre
économique de la France que de mettre
en cause le pouvoir dans l'entreprise.
Les syndicats venaient poser le pro-
blème de l'organisation de la société
industrielle. On a refusé de laisser la
conversation s'engager sur ce terrain et,
pour calmer les esprits, on a préféré
lâcher tout le reste. Est-ce la mentalité
des patrons de préférer sacrifier leur
entreprise plutôt que leur autorité dans
l'entreprise? Si oui ce serait absurde et
monstrueux parce que, ce faisant, le
patronat aurait sacrifié l'économie na-
tionale.
Mais je pense, à la réflexion, que c'est
le gouvernement qui est le principal
responsable de la situation actuelle. Il
n'a pas voulu, il n'a pas osé, il n'a pas su
aborder les problèmes de fond de la
société moderne. Après avoir pendant
10 ans résisté, au centième de point
près, à la revalorisation des salaires,
11 vient de lâcher en catastrophe n'im-
porte quoi... D'ailleurs comment le gou-
vernement de Georges Pompidou pou-
vait-il négocier? Il avait fixé une
échéance, le référendum. Il avait besoin
que d'ici-là tout soit rentré dans l'ordre.
Il abordait donc les conversations dans
la position doublement inconfortable
de l'interlocuteur qui ne veut à aucun
prix répondre à la question qui lui est
posée par les syndicats et qui. de sur-
croît, est demandeur et pressé d'en
finir!...
Il ne faut pas aller
à contre-courant de l'Europe
O. Comment voyez-vous l'avenir de
l'entreprise et notamment la parti-
cipation des travailleurs à sa marche ?
01 L'entreprise doit avant tout être
considérée comme une personne
physique ou morale qui crée des richesses
pour les vendre. Avant tout. De ce fait,
elle a une fonction d'intérêt public et la
collectivité publique doit la respecter.
Notre système d'entreprise doit être
jugé d'abord sur sa capacité à créer des
richesses. Or tout ne va pas pour le
mieux dans ce domaine: notre première
tâche sera donc de perfectionner notre
système. Le modèle américain peut, de
ce point de vue, nous donner des indi-
cations. Quel que soit le statut juridique
ou politique de l'entreprise, il est essen-
tiel qu'elle soit bien gérée.
Deuxième constatation: le statut glo-
bal des entreprises françaises ne paraît
pas devoir évoluer de façon substantielle
dans les prochaines années à cause de
nos engagements internationaux. Nous
nous sommes engagés dans un processus
européen qui est à base capitalistique
libérale, ou néo-libérale si vous préférez.
Nous prendrions le risque d'une rupture
interne de l'Europe au moment où
s'effacent les dernières barrières si nous
voulions nous écarter de cette voie.
J'ajoute qu'il est clair, de surcroît, que
le monde aujourd'hui cherche une for-
mule intermédiaire entre le capitalisme
de stricte tradition et le socialisme de
stricte obédience.
Reste le problème de la place de
l'homme dans l'entreprise qui n'est, à
mon sens, dans l'ordre des priorités,
que le troisième problème posé aux
économistes. Je suis personnellement
très favorable à la création de la section
syndicale d'entreprise. Il faut convaincre
les patrons que c'est un autre système
de commandement mais que l'autorité
et la responsabilité ne se trouvent pas
dissoutes sous prétexte qu'avant de
prendre la décision, on en délibère. Il
faut savoir distinguer, je pense, deux
parts dans les conversations entre la
direction et les salariés. Il y a ce qui
touche à la stratégie globale de l'entre-
prise, les décisions qui mettent en cause
son équilibre, pour lesquelles on peut
envisager une simple consultation des
travailleurs. Mais il y a des cas où la
section syndicale peut être directement
associée à la gestion. Si le capitalisme
français ne sait pas découvrir la formule
d'une telle participation, c'est son exis-
tence même qui sera mise en cause.
L'Etat a pris
une place démente
Q^ Comment voyez-vous la concer-
* talion des différentes forces écono-
miques dans un Etat moderne? Et quel
rôle pensez-vous que le syndicalisme
patronal et ouvrier, peut jouer?
U^ Ce qui caractérise le syndicalisme
français, étudiant, ouvrier ou pay-
san, c'est que son seul interlocuteur est
l'Etat. Tout cela parce qu'en France
l'Etat a pris une place démente dans
l'ensemble de nos mécanismes de pensée
et d'action. L'Etat c'est bien souvent
d'ailleurs l'administration, qui pèse plus
lourdement sur la vie économique, so-
ciale ou politique que ne le fait le gou-
vernement lui-même. La Ve République
n'a, contrairement à ce que l'on croit
très souvent, fait qu'exagérer la main-
mise de l'Etat par la stabilité gouver-
nementale qu'elle a apportée. En période
d'instabilité, en effet. l'Etat était tolé-
rable.
Le syndicalisme en France a manqué
de moyens. Son premier objectif aurait
dû être d'avoir des dossiers aussi bons
techniquement que ceux de l'adminis-
tration. Car la contestation c'est d'abord
la capacité d'argumenter aussi bien
que l'interlocuteur. L'absence de moyens
du syndicalisme a dévoyé le débat avec
l'Etat qui est devenu un débat de force
là où il aurait fallu un débat de recherche.
L'éclatement prévisible de l'Etat — il
est même inéluctable car nous sommes
malades de notre Etat — débouchera
tôt ou tard sur de nouvelles formes de
dialogue, le patronat et les syndicats
ouvriers étant, à mon sens, appelés dans
l'avenir à se concerter de façon beaucoup
plus directe et régulière.
Reste le problème de la participation
des forces économiques à la concertation
nationale. Là. je pose la question, au
moment où l'institution parlementaire
semble frappée d'un certain discrédit:
a-t-on tiré tout le parti possible du
conseil économique et social? Certes il
faut se méfier de la tendance corpo-
ratiste, héritage de l'époque où les
structures économiques et profession-
nelles étaient figées. Un corporatisme
en période de mutation constante c'est
l'arrêt de l'évolution. Or notre pays
a déjà suffisamment tendance à refuser
l'évolution. Politiquement contestable
dans la mesure où il représente l'accès
au pouvoir de forces non politiques,
le corporatisme est aujourd'hui techno-
logiquement inacceptable.
Régionalisation
de la fiscalité!
f\ Face à cet Etat centralisateur et
envahissant que vous dénoncez, pen-
sez-vous que l'aménagement du territoire
soit possible et que la population puisse
y être associée?
D L'aménagement du territoire ne
" sera vraiment possible que lorsque
la structure de nos collectivités locales
aura été renforcée. Faire de l'action
régionale actuellement, c'est contester
et non construire. On proteste à Paris.
On mendie à Paris. On attaque Paris.
Mais le jour où un système fiscal nou-
veau donnera vie à ces institutions, une
politique régionale sera possible. Pas
avant. J'entends déjà les objections:
l'impôt local conduit les riches à être
plus riches et les pauvres à être plus
pauvres. C'est vrai. Mais il est très pos-
sible d'imaginer des caisses de compen-
sation interrégionales, intermédiaires en-
tre les impôts locaux et l'impôt de l'Etat.
Les effets irréversibles
de la crise
Q^ Quelles vous paraissent être les
* conséquences irréversibles de la
crise qui vient de secouer la France?
D J'en verrais quatre. D'abord, le
désir de participation des citoyens,
c'est-à-dire leur volonté d'être considérés
comme des hommes et non comme des
outils, d'être informés de leur destin et
même de donner leur avis sur ce destin.
Ensuite, et ceci est la conséquence de
cela, le refus de l'évolution octroyée,
le refus du mythe du père, la volonté
d'être adulte. Troisièmement, l'amorce
d'un éclatement de l'appareil de l'Etat
et de l'appareil universitaire en un sys-
tème quasi fédéral d'institutions auto-
nomes. Et ceci rejoint notre point de
départ: il ne peut y avoir de partici-
pation, de planification démocratique
que dans l'éclatement des institutions.
La participation c'est avant tout un
débat sur les problèmes concrets, immé-
diats, un débat qui ne peut en aucun cas
s'engager avec un Etat lointain et lourd.
PROPOS RECUEILLIS PAR
F.H. de VIRIEU ^
22
Vient
de paraître
le numéro
ÉTÉ 68
du
GUIDE DES
PLACEMENTS
LES PERSPECTIVES
DU MARCHÉ BOURSIER AMÉRICAIN
DÉVOLUTION DES GRANDES
SOCIÉTÉS AMÉRICAINES
LES ACTIONS AMÉRICAINES
PARAISSANT INTÉRESSANTES
ACTUELLEMENT
Tous les trimestres, le département d'études financières de
MERRILL LYNCH à New York (qui n'occupe pas moins de 300 personnes)
édite un «GUIDE DES PLACEMENTS».
Ce document, particulièrement important pour les gérants de portefeuilles,
est destiné à tous ceux qui s'intéressent aux valeurs américaines.
11 répond notamment à ces questions fondamentales.
De plus, il fait état des renseignements économiques et financiers tels que
l'évolution du commerce de détail,
le placement des capitaux, les dépenses publiques...
Enfin, il donne une sélection des valeurs américaines choisies en fonction
des différents objectifs d'investissement.
Pour recevoir ce document, il vous suffit de remplir le coupon-réponse
ci-dessous et de nous l'adresser.
C'est une Actualité Merrill Lynch
COUPON-Rtl'ONSF
Veuille/ me faire parvenir, sans engagement de ma part, un exemplaire
du «Guide des Placements».
NOM
PROFESSION
ADRUSSI
TI I
Les services concernant les recherches et l'exécution des ordres dont il est question
dans cette annonce sont fournis par
MF.RRIL l.YNCH, PIFRCF, FF.NNFR & SMITH Inc., NF.W YORK.
MERRILL LYNCH, PIERCE, PEIMNER & SMITH
25 Champs-Elysées - Paris 8e • Hôtel Carlton - Cannes
L'exemple hollandais de 1963
L'EXPLOSION SALARIALE
(+18% EN UN AN) N'A PAS
DÉTRUIT L'ÉCONOMIE
L explosion salariale est-elle la clef de l'expansion ? Les Français en doutent aujourd nui Mais les Néerlandais croient que oui I es coùf=
pn mnin H opnvro proqrpsspnt aux Pays-Bas à un rythme de 10 à 11 % par an. Cela n'a rien enlevé A la vitalité économique H» r» pav^
vitalité qu'illustre, ci dessus (activité du port d'Amsterdam
« L'explosion des salaires en France? C'est la clef d'une nou-
velle expansion qui peut se produire dans la stabilité. Voyez
l'exemple hollandais ». Rue de Rivoli et à Matignon on porte
un grand intérêt à l'expérience hollandaise de 1963 et des années
ultérieures: elle montre qu'une économie peut subir le choc
d'une hausse des salaires de près de 18 % sans trop de dommages
pour l'économie. Mais est-ce transposable en France?
« Les Hollandais s'en sont bien tirés
depuis 1963. Pourquoi pas nous? » nous
disait ces jours derniers, dans l'entou-
rage de M. Couve de Murville, un des
nouveaux responsables de notre écono-
mie. Les Néerlandais ont connu en 1963
une explosion salariale sans précédent,
sans trop de dommages pour la machine
économique.
Pas de hausse
de prix sensible
En 1963 (suite à de sérieux conflits
sociaux qui remettaient en cause les fon-
dements mêmes des relations patrons-
ouvriers), les salaires néerlandais ont
grimpé d'un seul coup de quelque 17 %.
Pendant la seule période 1958-1963, le
pouvoir d'achat réel du consommateur
néerlandais avait augmenté de 25%. Au
cours de chacune des années qui ont
suivi 1963, le coût en main-d'œuvre des
entreprises (compte tenu de la hausse des
salaires de base, de la réduction des
horaires de travail, etc.) a augmenté de
11 % par an environ. Pendant ce temps-
là, les prix ont augmenté moins vite
qu'en France (ils étaient au début de
1968 à l'indice 137, contre 140 chez nous,
pour une base de 100 en 1958), et le chô-
mage a augmenté également moins vite
(indice 115 en Hollande contre 284 en
France).
La hausse extrêmement forte des
salaires qu'a connue la Hollande ces
dernières années, n'a pas empêché une
progression raisonnable en moyenne
(et très forte en 1964-1965) de la pro-
duction industrielle; elle a accéléré la
réforme des structures, elle s'est faite
sans hausse de prix sensible. Voilà donc
l'exemple qui pourrait aujourd'hui inspi-
rer les Français.
Des conditions particulières
L'analogie possible avec nos problè-
mes est séduisante. Elle tente les opti-
mistes. Elle doit cependant être limitée.
D'abord, parce qu'un certain nombre de
paramètres économiques de la Hollande
de 1963 sont nettement distincts de ceux
de la France de 1968. Ensuite, parce que
la course des salaires en Hollande n'a
pas eu que des conséquences heureuses.
L'explosion salariale déclenchée en
1963 en Hollande ne devait pas forcé-
ment signifier que l'industrie ou les
« services » néerlandais cessaient pour
autant d'être compétitifs sur le plan
international. Il ne faut pas oublier que
l'admirable position géographique des
Néerlandais, au carrefour des échanges
de l'Europe rhénane et du reste du
monde (avantage renforcé de très bonne
heure par la construction de zones por-
tuaires et d'un habile lacis d'autoroutes
et de canaux), rendait leur activité d'in-
termédiaires, de transporteurs, d'impor-
tateurs-exportateurs, de bâtisseurs de
zones industrielles, indispensable, quel
qu'en soit le prix, à certains de leurs
partenaires étrangers.
Il faut aussi souligner que le florin
était solide. D'une part, son taux était,
(et il semble bien le rester en 1968) sous-
évalué. De l'autre, et c'est là la différence
fondamentale avec la France, il existait
un écart très sensible entre les salaires
hollandais et ceux du reste de l'Europe.
Vers 1958, certains salaires néerlandais
atteignaient la moitié à peine de ceux
pratiqués dans le reste de la C'.h.h.
Restait une marge 1res forte de près de
50% à rattraper. C'est ce que les salariés
hollandais ont commencé de faire dès le
début du Marché commun, bien que le
patronat, l'Etat (qui intervenait alors à
tous les stades des discussions collec-
tives), et les organisations syndicales
elles-mêmes aient longtemps tenté de
freiner le mouvement pour continuer
de bénéficier de coûts de revient extrê-
mement bas.
En 1961, tandis que les revenus sala-
riaux réels approchaient en France, au
Luxembourg et en Belgique de l'indice
100 (Luxembourg: 98, France: 96, Bel-
gique: 93); ils se situaient seulement à
l'indice 78 aux Pays-Bas (83 en Alle-
magne, 63 en Italie).
Etant donné l'énorme écart qui exis-
tait au départ entre leurs salaires et ceux
de leurs voisins, étant donné aussi la
sous-évaluation de leur monnaie, les
Hollandais ont eu la possibilité (ils ne
s'en sont pas privés, surtout depuis 1963,
c'est-à-dire depuis le moment où le sous-
emploi était atteint) de faire « des
bêtises >>.
Nous n'avons pas aujourd'hui les
mains aussi libres. Les coûts en main-
d'œuvre des firmes françaises sont parmi
les plus élevés d'Europe, l'avantage que
nous ont donné les dévaluations succes-
sives du franc en 1957 et 1958, s'est
amenuisé au fil des années.
Un fâcheux
engrenage
Notons aussi que les Néerlandais ont
mis en 1963 le doigt dans un fâcheux
25
1958 --_ 100
300
ÉVOLUTION DES INDICES ENTRE 1958 ET 1968
HOLLANDE
100
FRANCE
SALAIRES
HORAIRES
BRUTS
PRODUCTION
INDUSTRIELLE
CHOMAGE
BALANCE
PRIX A LA COMMERCIALE :
CONSOMMATION DÉFICIT
En 10 ans, les salaires néerlandais ont augmenté plus vite qu'en France, mais la produc-
tion industrielle, l'emploi, ont augmenté également plus rapidement, tandis que les prix
progressaient à un rythme inférieur.
Est-ce un succès? Oui, mais les Hollandais n'ont pu se permettre d'avancer à marches
forcées que parce qu'ils partaient de plus bas que nous. Leur expérience, qui prend d'ail-
leurs un tour critique en ce moment (on parle de « gel » des salaires pour redresser la
balance commerciale) est transposable sur le plan français, mais pas intégralement.
engrenage. lls> uni pris l'habitude d'exigei
et d'obtenir, ehaque année, des hausses
de salaires excédant la hausse de la
productivité. Pour 1969 même et selon
les premiers accords signés (avec 1 an
d'avance, ces derniers mois), la hausse
des coûts pour les entreprises néerlan-
daises sera de nouveau en principe de
11 '%). C'est une hausse chronique qui
se répète chaque année et qui met
désormais régulièrement en difficulté
La Haye sur le plan de la balance des
paiements. Ces derniers jours encore,
affolé par la « note à payer », le gouver-
nement essayait de faire approuver par
le Parlement un véritable gel des salaires
de 6 mois à partir du 1er janvier 1968.
Une explosion salariale n'est
pas fatale pour l'économie
L'exemple hollandais ne peut être
transposé intégralement chez nous: il
montre néanmoins que dans certaines
conditions une explosion salariale peut
n'être pas forcément fatale pour l'éco-
nomie.
Marcel PAGANELLI c
Marché
commun
Quelles « sauvegardes »
la France pourrait-elle
demander à Bruxelles?
• La France sera-t-elle contrainte, en
raison des conséquences de la crise
présente sur son économie, d'invoquer
auprès de la Commission de Bruxelles
les « mesures de sauvegarde » prévues
dans le traité de Rome?
Certaines dispositions de ce traité per-
mettent en effet à un pays adhérent de
prendre, dans le cadre des réglemen-
tations communautaires, de telles mesu-
res (notamment de contingentement ou
de taxation spéciale) en cas de difficultés
graves dans un secteur (ou éventuelle-
ment dans une région) de l'activité éco-
nomique (article 226).
Jusqu'à présent, ce texte n'a été invoqué
que dans des cas très particuliers (réfri-
gérateurs italiens, par exemple). Il ne
semble pas applicable en raison d'une
situation générale, intéressant tout ou
partie de l'économie, bien qu'en théorie,
rien n'empêche de multiplier les cas
d'exception de manière que la plupart
des secteurs soient concernés.
De toute façon, les conditions et les
modalités d'application de ces mesures
sont déterminées par la Commission,
suivant une procédure d'urgence et sur
demande de l'Etat intéressé.
Il est également possible (art. 26 du
traité de Rome) de différer l'abaissement
des droits de douane, mais pour une
durée limitée et seulement pour un en-
semble de positions tarifaires ne repré-
sentant pas pour l'Etat en cause plus
de 5 % de la valeur de ses importations.
D
Contrôle
des changes
Transferts réglementés
au-delà de 250 F
| La conséquence pratique du contrôle
des changes, qui vient d'être rétabli
(J.O. du 31-5), en principe à titre pro-
visoire, est que les transferts de capitaux
sont de nouveau soumis à autorisation
dès que leur montant dépasse 250 F,
au lieu de 500 F auparavant. S'agissant
plus particulièrement du règlement finan-
cier des importations, l'importateur doit
justifier de la réalité et du montant de
sa dette. Il le fera, si le montant est
compris entre 250 et 2500 F, au moyen
d'une simple copie de la facture, qu'il
aura préalablement certifiée conforme.
Lorsque le prix des marchandises im-
portées excède 2500 F, il devra présenter
une photocopie de la déclaration en
douane ou de tout autre document
justificatif (connaissement, lettre de voi-
ture, etc.).
Il est bien évident qu'il n'est plus permis
d'alimenter sans autorisation les comptes
de non résidents par des versements en
billets de banque français, ni de con-
sentir des prêts en francs contre devises
ou des découverts en comptes de non
résidents.
Les exportateurs, de leur côté, doivent
désormais rapatrier les devises encaissées
dans le délai d'un mois et non plus
de 3 mois.
Ces dispositions sont devenues immé-
diatement applicables; ce qui soulève
d'ailleurs des difficultés pratiques pour
les banques et les intermédiaires agréés.
qui regrettent que des mesures transi-
toires n'aient pas été prises.
A noter, sur le plan privé, que les allo-
cations aux touristes se rendant à l'étran-
ger sont limitées à 1000 F, alors qu'il
n'existait plus à cet égard aucune limi-
tation. Toutefois, les hommes d'affaires
peuvent obtenir, sous certaines condi-
tions, en plus de l'allocation touriste
de 1000 F, une allocation spéciale de
3000 F au maximum.
Ajoutons que certains pays de la zone
franc ont pris également certaines mesu-
res de contrôle des changes, notamment
le Sénégal, Madagascar, le Niger, le
Dahomey, la Côte d'Ivoire et le Came-
roun.
26
TABLEAUX DE PLANNING
à gouttièies et pour fiches en forme de T
Reliure " Plastic - Planning " Volets pivo-
tants pour l'affichage de tous documents
BOITES A FICHES ET FICHIERS
A TIROIRS METALLIQUES
pour le classement vertical oe tous
formats standard de fiches
les
CLASSEMENT SPECIALISE
pour stencils typons et plaques offset
BACS SUR ROULETTES
pour fiches comptables adaptables ,n.x
formats des fiches a classer
BOITIERS CLAP-COLOR
avec tiroir et clapet frontal disponible en /
couleurs Permet la construction de blo..s
de classement, tables a roulettes et co1' otons
NOTRE PROGRAMME COMPORTE
AUSSI LA FABRICATION DE
guides de classement, index et cavjhers Je
signalisation Reliures TRI-CLIP Protège
documents Classeurs a courrier V.ihseb
à dossiers suspendus etc
Vente exclusive: Papeteries et Organisations de bureaux.
Documentation
sur demande à :
BPn° 8- 84 VALREAS-
Tél.80&380
JURIDIQUE
LES ÉVÉNEMENTS
ET VOTRE DROIT A
RÉPARATION
Les événements actuels peuvent avoir, sur le plan
juridique, deux sortes de conséquences, selon
qu'il s'agit des grèves ou des émeutes et mani-
festations.
En ce qui concerne la grève, il faut
rappeler qu'elle n'est pas considérée
automatiquement comme un cas de
force majeure. Il y a lieu de rechercher
à propos de chaque affaire, d'après les
circonstances, si la grève a réellement
constitué pour celui qui l'invoque un
obstacle insurmontable à l'exécution de
son obligation. Il ne faut pas en effet que
ceux qui auront fait le nécessaire pour
tenir leurs engagements — par exemple
une livraison à date déterminée — se
trouvent en quelque sorte pénalisés par
rapport à ceux qui n'auront consenti
aucun effort. La grève ne doit pas être
une occasion d'échapper à des obliga-
tions librement contractées. Mais il est
bien certain que, devant une impossi-
bilité matérielle absolue, la non exécu-
tion ne peut être considérée comme con-
damnable.
En cas d'occupation d'usines
En revanche, ce que l'on appelle « le
l'ait du prince », c'est-à-dire tout empê-
chement qui résulte des ordres ou des
interdictions de la puissance publique
(et il y en eut de nombreux ces derniers
jours) constitue un cas fortuit ou de
forme majeure.
En elle-même, la grève est un droit et
non plus, comme dans le passé, un fait
que l'on admettait. Ce changement de
nature doit être gardé présent à l'esprit
dans l'appréciation des conséquences
juridiques.
D'un autre côté, il faut rappeler que la
liberté du travail reste toujours une de
nos libertés fondamentales. On s'accorde
généralement à considérer que les occu-
pajtions d'usines, de chantiers, de bu-
reaux, engagent la responsabilité de
ceux qui s'y livrent: responsabilité civile
en ce que des dommages sont ainsi cau-
sés aux propriétaires privés de leurs
CITROEN:
LES TRIBUNAUX REFUSENT
LA DEMANDE D'EXPULSION
DES GRÉVISTES
La demande d'expulsion des grévistes
formée par la société Citroën a été rejetée
par le tribunal de grande instance de la
Seine siégeant en référé. Motif: cette
procédure sommaire prévue pour les cas
d'urgences ne se justifiait pas en l'oc-
curence. Cette décision est intéressante
car elle contredit la jurisprudence éta-
blie, qui voyait dans l'occupation d'une
usine par des grévistes, une situation
qui permettait au patron d'invoquer
l'urgence et de demander l'expulsion
par ordonnance de référé. Il faut noter
d'ailleurs que, jamais une décision des
tribunaux en la matière n'avait été
effectivement appliquée.
La décision prise par le Président du
Tribunal de la Seine ne tranche pas
bien entendu, la question de fond. Elle
ne porte que sur la procédure employée.
Elle est sujette à appel. Elle s'inscrit,
cependant, dans une nouvelle manière
de considérer la grève et ses consé-
quences.
SUSPENSION DES PROTÊTS
Un décret a suspendu les protêts
jusqu'à une date indéterminée. Il n'y
aura donc pas de conséquences en cas
de non paiement d'une traite ou d'un
effet de commerce quelconque à son
échéance. Cette mesure était possible
parce que les effets de commerce à la
différence des chèques ne nécessitent
pas une provision préalable. Aucune
mesure de ce genre ne peut être envi-
sagée pour les chèques bancaires ou
postaux.
bieii!>; responsabilité pénale en ce que ue>
occupations entraînent une entrave à la
liberté du travail et une violence (pas
forcément physique) faite au proprié-
taire. Mais tout cela est très largement
théorique (car en pratique il n'y a pas
exécution de décisions condamnant à
dommages-intérêts). Autre point: on
connaît la responsabilité du gardien de
tout objet qui intervient dans un acci-
dent. Les propriétaires ou locataires de
locaux occupés par des grévistes conser-
vent-ils la charge de cette responsa-
bilité? En principe, ils ne doivent plus
la supporter, car ils n'ont plus la garde
juridique de leurs biens, par l'effet d'une
infraction à la loi pénale, dont ils sont
les victimes. Mais tout, en cette matière,
dépend des circonstances, car la juris-
prudence est, à cet égard, assez floue.
L'Etat doit payer
Quant aux dégâts causés dans la rue
par les incidents entre manifestants et
forces de l'ordre, ce sont les communes
qui en sont civilement responsables. La
loi précise les conditions qui doivent être
remplies pour la mise en jeu de cette
responsabilité. Les dommages doivent
résulter « de crimes ou délits commis à
force ouverte (c'est-à-dire par pillage)
ou par violence sur leur territoire (celui
des communes), par des attroupements
ou rassemblements armés ou non armés,
soit envers des personnes, soit contre des
propriétés publiques ou privées ».
Le texte est très large et doit permet-
tre l'indemnisation des victimes des
incidents de ce mois.
En vertu du « risque social », l'Etat
doit contribuer au paiement. Il supporte
la moitié des dommages-intérêts et frais
résultant de cette responsabilité des
communes, sauf s'il peut établir que
celles-ci, par « inertie » ou « conni-
vence », ont manqué à leur devoir. Il
peut alors être déchargé à concurrence
de 70 °/0 des sommes qu'il aurait dû
verser. L'Etat et les communes ont, bien
entendu, un recours contre les « auteurs
ou complices du désordre ».
C'est aux tribunaux civils qu'il faut
s'adresser pour obtenir la réparation des
dommages. On ne doit pas se dissimuler
toutefois que la procédure est longue et
difficile et son issue aléatoire. Car per-
sonne n'est plus procédurier et mauvais
payeur que les collectivités publiques,
et le fait qu'il y ait partage des charges
entre l'Etat et la commune et que l'un
et l'autre aient un recours en garantie
contre les auteurs des dommages n'est
évidemment pas de nature à permettre
une indemnisation rapide.
Il est, dans ces conditions, pratique-
ment indispensable que les victimes se
groupent en associations. Elles auront
ainsi plus de poids, ne serait-ce que
parce qu'elles pourront faire appel à des
avocats spécialisés.
H. d'AREMONT n
28
Les hommes
ont besoin d'eau...
l'eau a besoin de Degrémont.
En 1968, la colombe Degrémont prend un nouvel essor.
Symbole de l'harmonie et de la pureté, la colombe Degrémont se fait encore plus légère,
plus dynamique, plus rapide, plus efficace.
Par son développement technique et son rayonnement mondial, Degrémont est le premier
spécialiste du traitement des eaux : industrielles, potables, résiduaires, comme de la régénération
des eaux de piscine. De son côté, une filiale : PERMO, met à la disposition du grand public
des appareils de traitement de l'eau standards pour des débits plus faibles.
183, route de St-Cloud - 92 Rueil - Tél. : 506.66.50
HUALES: AMSTERDAM - BILBAO -BOGOTA - BOUND-BROOK - BRUXELLES - BUENOS-AIRES HELblNM
MILAN - MONTREAL - NEW YORK - SAO-PAULO - STOCKHOLM - STUTTGART - TOKYO - VEVEY - WESTON
A autant en convenir tout de suite:
certains aspects de la crise sociale
qui a éclaté le mois dernier ont sur-
pris l'opinion publique, y compris bon
nombre des premiers intéressés eux-
mêmes. Au départ, tout semblait s'en-
gager comme en 1936, mais avec cette
circonstance aggravante que le pouvoir
était détenu cette fois-ci par un gouver-
nement dit « capitaliste » ou « bour-
geois », et non par une formation de
Front populaire, plus ouverte par défi-
nition aux revendications de la classe
ouvrière. L'épreuve de force aurait
logiquement dû être plus étendue, et il
n'est pas étonnant que la grève se soit
accompagnée au départ d'une contesta-
tion politique.
Les erreurs
de l'opinion publique
Par rapport à la référence de 1936.
l'évolution de la crise présente égale-
ment quelques anomalies flagrantes qui
apportent un trouble diffus dans les
esprits. Le gouvernement Pompidou et
le patronat ont accordé sans combat
véritable des avantages sociaux très
étendus, parfois supérieurs aux pre-
mières estimations réalistes, mais le
premier n'est pas sorti discrédité des
salons de la rue de Grenelle, et le second
n'a jamais fait en fin de compte figure
d'accusé présumé coupable, comme
c'était le cas il y a trente-deux ans.
Quant aux travailleurs, l'impression
demeure qu'ils ont bien plutôt obtenu
reconnaissance d'un dû qu'arraché des
concessions exorbitantes en profitant
abusivement d'une position de force.
L'opinion publique a donc souvent cru
qu'on allait recommencer 1936 et s'est
trompée du moins jusqu'à ce jour. Pour-
quoi cette erreur?
Elle tient, nous semble-t-il, à une
cascade de jugements inconsidérés por-
tés sur le patronat, les pouvoirs publics,
les syndicats de travailleurs et la situa-
tion réelle de l'industrie française. En
fait, nous nous trouvons devant une
carence manifeste de l'information éco-
nomique. Cette lacune, si elle avait
été générale, aurait pu conduire à toutes
les erreurs. Elle continue de faire planer
une menace grave sur la situation pré-
sente.
Jugement sur le patronat
Le premier jugement à réviser a été
porté sur le patronat auquel l'opinion
publique a instinctivement appliqué la
même définition qu'en 1936, en la consi-
dérant comme une classe sociale déte-
nant le capital et retirant des super-
profits occultes de l'exploitation systé-
matique d'une autre classe sociale.
Mais cette référence marxiste ne
tient pas compte du fait que le patronat
a amorcé depuis longtemps déjà une
évolution tellement importante qu'on
comprend mal qu'elle soit restée inaper-
çue. Tout tient en une expression, trop
LACUNES
BEI/INFORMATION!
J. ROUME
abstraite peut-être pour celui qui est
resté à l'écart de l'information écono-
mique, mais qui présente pour les inté-
ressés directs une signification extrême-
ment concrète, brutale et quotidienne:
la libéralisation croissante des échanges
internationaux.
Cette libéralisation entraîne de nom-
breuses conséquences. Citons entre au-
tres: — un produit industriel n'est plus
vendu aujourd'hui dans un marché
protégé au prix le plus élevé qui per-
mette à l'entreprise la moins favorisée
de survivre, mais par référence au prix
le plus bas que peut avancer la concur-
rence internationale: c'est-à-dire à la
fois par référence directe aux prix des
pays de très haute productivité comme
les Etats-Unis ou le Japon et à ceux des
pays où les salaires sont les plus bas.
comme Hong-Kong ou le Pakistan.
— le coût de l'argent pour un investis-
sement n'est plus déterminé par une
situation financière locale privilégiée
que peut instituer un gouvernement
entièrement maître de sa monnaie et
contrôlant étroitement les changes exté-
rieurs, mais selon les taux pratiqués sur
un marché international des capitaux
qui tend à devenir le même pour tous.
— les rémunérations salariales enfin,
c'est-à-dire le niveau de vie des travail-
leurs, sont de moins en moins imposées
par des situations géographiques locales
(zones de salaires, monopoles de fait
de certains employeurs) mais par réfé-
rence à des situations devenues natio-
nales et qui deviendront demain inter-
nationales elles aussi, puisque le Marché
commun doit apporter un jour prochain
la libre circulation des travailleurs entre
les Six pays d'Europe occidentale.
Bref, les privilèges capitalistes, les
super-profits faciles et occultes, l'ex-
ploitation qui ont permis aux analyses
sociales du XIXe siècle de conserver
30
un fondement pendant la première moi-
tié du XXe sont aujourd'hui en voie
d'extinction. Et ce phénomène devrait
encore s'accélérer dans les prochaines
années.
Qu'on ne s'y trompe pas. Il n'y a
jamais eu de « nuit du 4 août », mais
une conséquence obligatoire des idées
qui étaient « en l'air » en 1945 et qui se
sont progressivement concrétisées avec
constance au fil des années par la
création de l'Organisation Européenne
de Coopération Economique (O.E.C.E.
devenue O.C.D.E.) de l'Accord Général
sur les tarifs douaniers (G.A.T.T.),
par les votes historiques de 1952 insti-
tuant la Communauté Européenne du
Charbon et de l'Acier (C.E.C.A.) et de
1957 acceptant la création progressive
d'un Marché commun en Europe occi-
dentale, et enfin par l'approbation des
concessions douanières multi-latérales
du Kennedy Round en 1967.
Devant ces échéances inexorables, le
patronat, non seulement en France mais
en Europe et ailleurs, n'a eu qu'une al-
ternative: ou bien accepter de dispa-
raître en un temps relativement court, ou
s'adapter rapidement à une évolution
voulue confusément par tous et qui fait
du chef d'entreprise le chef d'une com-
munauté étroitement solidaire d'inté-
rêts et de travailleurs. Et pourtant cette
évolution n'a pas toujours été claire-
ment perçue.
La responsabilité de l'Etat
II y a longtemps, en second lieu, que
l'histoire et la sociologie ont fait justice
des gouvernements de droit divin ou
de fait. A sa façon, malgré sa rupture
spectaculaire avec les « errements » de la
IVe République, le gaullisme a prolongé
cette dernière à sa façon. C'est ainsi
qu'après l'hésitation dont on se souvient,
il a assumé notamment la poursuite de la
construction de l'Europe qu'il avait re-
çue en héritage. Du coup, il s'est trouvé
confronté au problème des relations
nouvelles à inventer entre l'Etat, le
patronat et les travailleurs. Qui a parlé
le premier, sans être compris de per-
sonne, de la nécessité d'un contrat de
collaboration compréhensive et con-
fiante entre ces trois parties prenantes
essentielles, sinon le texte de présen-
tation du Ve Plan, écrit en 1965? De
même que le Patronat présent à la nuit
de Grenelle ne pouvait plus être celui
de 1936, de même les représentants du
gouvernement assis à la même table ne
pouvaient pas être « à la solde des trusts »
comme on l'a dit. Sinon, ils n'auraient
pas été là. Pourquoi en a-t-on douté?
Le monde du travail, dès que l'action
revendicative s'est déclenchée, s'est visi-
blement préparé à une épreuve de force
dure et prolongée. Il n'en faut pour
preuves que le sentiment fréquent que
la satisfaction des^ plate-formes » ne
pouvait être obtenue qu'après le réta-
blissement d'un gouvernement « de
gauche », et aussi le fait que les grèves
ont eu du mal à s'arrêter. Pourtant, si
les trois partenaires de la nuit de Gre-
nelle sont apparus optimistes et satis-
faits au petit matin, n'est-ce pas que
les revendications demeuraient dans les
limites du possible et que leur principe
était acquis à l'instant même où a
commencé la négociation? Comment
expliquer à la fois ce préjugé d'affronte-
ment prolongé, ce réalisme dans la
formulation des exigences, et l'incerti-
tude des réactions des grévistes après
l'annonce des résultats des négociations?
Certains de ces derniers, devant des
événements qui ressemblaient de moins
en moins à ceux de 1936, n'ont-ils pas
été un moment jusqu'à murmurer que
les grands responsables syndicaux étaient
« vendus » à l'un ou l'autre de leurs
partenaires?
Une erreur
sur l'économie française
Enfin, il y a eu au moins une autre
erreur assez généralement commise con-
cernant l'appréciation de la situation
exacte de l'économie française. Celle-ci
a connu une stagnation, et non pas une
récession, pendant une année à partir
de l'automne de 1966. Mais, devant
l'adversité, elle a réagi en renforçant sa
productivité par tous les moyens: non
seulement investissements, mais fusions,
concentrations, accords de fabrication,
etc. Dès l'automne 1967, des signes de
reprise ont apparus et se sont multipliés
avec persistance jusqu'aux premiers
jours de la grève. En même temps, la
compétitivité des prix français sur le
marché international a dépassé les pré-
visions des experts, puisque ceux-ci
avaient annoncé une dégradation de
notre balance commerciale qui ne s'est
pas produite. Or, en-dépit de ces infor-
mations incontestables, d'ordre techni-
que, l'opinion publique a entendu dire
et a souvent cru que l'économie fran-
çaise était au bord de la crise.
De là l'inquiétude du monde du travail
devant ce qu'on pouvait alors qualifier
de faillite du patronat (et du gouverne-
ment) et même l'inquiétude présente,
dans la mesure où personne ne peut
véritablement affirmer que l'appareil
productif français, tel qu'il est aujour-
d'hui, pourra « payer » trois semaines
de grèves et les nouveaux avantages
sociaux, sans parler des échéances plus
ou moins immédiates que sont l'instau-
ration définitive du Marché commun,
la dévaluation de la livre sterling, les
engagements du Kennedy Round...
Si une information économique sur
tous ces points avait été parfaitement
assurée, bien des « erreurs » des semai-
nes de mai auraient pu être évitées.
Mais il y a néanmoins dans ce vaste
constat de carence un élément réconfor-
tant par lequel nous terminerons. Si la
grande majorité des Français a cru à
tort, faute d'une information écono-
mique suffisante, que 1936 recommen-
çait, et si les trois partenaires de la rue
de Grenelle ont abordé la négociation
comme le préliminaire d'un combat sans
avoir su auparavant engager le dialogue
sur le fond, il reste néanmoins que
l'information économique à ce niveau
était suffisante pour que la nuit suffise
aux explications différées. Chacun a
parlé le langage des autres et tout le
monde a convenu — et c'est peut-être
là le sens profond que l'histoire retien-
dra — qu'une page des relations socia-
les en France, ouverte depuis un temps
indéfini, était tournée.
On voudrait croire qu'il va être dé-
sormais admis en France que l'Etat, les
employeurs et les salariés, ne peuvent
plus être, à l'âge de la libéralisation des
échanges, des ennemis qui se guettent
et qui règlent périodiquement leurs
comptes, mais des partenaires également
actifs, embarqués sur le même bateau
et veillant chacun selon son talent au
salut commun. Si cette vérité pouvait
prévaloir désormais, il se pourrait fina-
lement que cette grève n'ait pas été
'aine.
Il reste pour conclure à souhaiter que
l'information économique cesse d'ap-
partenir à l'élite qui l'a heureusement
trouvée au cours de l'entretien de la
dernière chance. A l'heure où la réfor-
me de l'enseignement semble plus à
l'ordre du jour que jamais, où l'abaisse-
ment réclamé de l'âge du droit de vote
pose le problème du renouveau de
l'instruction civique, il faudrait profiter
de l'heure pour mettre en place, à tous
les échelons de la société, du cadre à
l'apprenti, du chercheur au commer-
çant, du futur dirigeant au responsable
syndical de base, une information éco-
nomique correspondant à l'âge indus-
triel nouveau qu'a atteint notre pays.
Il faudrait que l'Etat continue de
jouer carte sur table, et ne garde pas
sous le boisseau des études et rapports
dont les conclusions intéressent directe-
ment les destinées économiques du
pays. Il serait également nécessaire que
les chefs d'entreprise acceptent jus-
qu'au bout la règle du jeu que certains
pratiquent, en ouvrant largement leurs
usines et leurs comptabilités. Il faudrait
enfin que les syndicats de travailleurs
établissent à la base leurs revendica-
tions en tenant compte des situations
concrètes d'entreprises, en osant s'élever
contre la tentation des rêveries idéalistes
et des surenchères illusoires.
Il faudrait..., mais nous n'en fini-
rions pas de dégager toutes les impli-
cations que la situation récente semble
comporter. Pourtant, si nous devions
formuler un dernier vœu, nous dirions
qu'il nous semble indispensable, si
l'information économique prend la place
que nous imaginons pour elle, que des
« rendez-vous sociaux » périodiques
soient désormais institués afin de dis-
cuter âprement, mais sainement, de
chaque répartition équitable des fruits
l'expansion obtenue en commun. G
Le Directeur de lo Publication : E.-C. DIDIER
Dépôt légal : 21' trimestre 1968
Imp.-Hél. C. Van Cortenbergh, s.p r I
Imp en Belgique
Brux
Olivetti
INFORMATIQUE
UNE EXPERIENCE ET
UNE PRESENCE SUR LES
CINQ CONTINENTS
L'Ingénieur Commercial Olivetti,
spécialiste de l'informatique dans votre domaine,
met à votre disposition la gamme la plus vaste
et la plus variée de matériels modulaires
produits en grande série pour
SAISIR,
TRAITER,
TRANSMETTRE L'INFORMATION
En France, dans plus de 200 centres,
plus de 1000 techniciens
sont à votre service
pour assurer l'assistance technique.
s.a m.p o
Olivetti
Category
Author
Title
Les Informations industrielles and commerciales
Issue
no. special
Date
Keywords
Publication information
no. special