Cahiers de mai
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CE QU'ON CHERCHE
A NOUS FAIRE OUBLIER
A NOUS FAIRE OUBLIER
Ce qui s'est produit en France au mois de mai
— ce qui continue à se produire en de nom-
breux endroits du pays à la mi-juin — constitue
un. événement dont on cherche, de divers côtés,
à dissimuler à tout prix l'importance et la nature
réelle.
— ce qui continue à se produire en de nom-
breux endroits du pays à la mi-juin — constitue
un. événement dont on cherche, de divers côtés,
à dissimuler à tout prix l'importance et la nature
réelle.
On entretient, pour commencer, une extraor-
dinaire confusion dans le langage. Il ne se passe
pas de jours sans qu'un nouvel académicien,
sociologue, penseur-libéral ou journaliste-de-
gauche n'invente un mot nouveau pour décrire
le phénomène.
dinaire confusion dans le langage. Il ne se passe
pas de jours sans qu'un nouvel académicien,
sociologue, penseur-libéral ou journaliste-de-
gauche n'invente un mot nouveau pour décrire
le phénomène.
De même, pour prendre deux exemples gros-
siers, lorsqu'un journal aussi peu suspect de
sympathie révolutionnaire que FRANCE-SOIR
parle avec insistance de la « Révolution de
Mai » — et lorsque Waldeck-Rochet définit
l'événement comme « un mouvement d'une
puissance et d'une ampleur exceptionnelles (qui)
vient de soulever toutes les couches laborieuses
de notre pays », ils contribuent l'un et l'autre à
entretenir la confusion.
siers, lorsqu'un journal aussi peu suspect de
sympathie révolutionnaire que FRANCE-SOIR
parle avec insistance de la « Révolution de
Mai » — et lorsque Waldeck-Rochet définit
l'événement comme « un mouvement d'une
puissance et d'une ampleur exceptionnelles (qui)
vient de soulever toutes les couches laborieuses
de notre pays », ils contribuent l'un et l'autre à
entretenir la confusion.
Pour FRANCE-SOIR, la révolution a donc eu
lieu durant le mois de mai. Pourquoi les travail-
leurs et les étudiants s'obstineraient-ils à faire
grève, à occuper les facultés, à désirer des chan-
gements radicaux ? Sont-ils tellement distraits
qu'ils ne s'aperçoivent pas que la révolution est
terminée ?
lieu durant le mois de mai. Pourquoi les travail-
leurs et les étudiants s'obstineraient-ils à faire
grève, à occuper les facultés, à désirer des chan-
gements radicaux ? Sont-ils tellement distraits
qu'ils ne s'aperçoivent pas que la révolution est
terminée ?
Pour Waldeck-Rochet, ce qui s'est produit au
mois de mai, ce qui continue à se produire en
ce moment, ne constitue au contraire qu'un
événement d'une nature courante dans la vie
d'une nation — un mouvement qui ne se diffé-
mois de mai, ce qui continue à se produire en
ce moment, ne constitue au contraire qu'un
événement d'une nature courante dans la vie
d'une nation — un mouvement qui ne se diffé-
rencie des autres mouvements de même nature
que par « une puissance et une ampleur ex-
ceptionnelles ». Pourquoi les travailleurs ne
ssraienr-ils pas satisfaits des avantages subsran-
t els qu'ils ont obtenu ? Pourquoi éprouveraient-
ils un sentiment de déception ? Pourquoi les
étudiants, enfin, ne reprendraient-ils pas sage-
rient leurs études ? La réforme de l'Université
r'est-elle pas imminente?
que par « une puissance et une ampleur ex-
ceptionnelles ». Pourquoi les travailleurs ne
ssraienr-ils pas satisfaits des avantages subsran-
t els qu'ils ont obtenu ? Pourquoi éprouveraient-
ils un sentiment de déception ? Pourquoi les
étudiants, enfin, ne reprendraient-ils pas sage-
rient leurs études ? La réforme de l'Université
r'est-elle pas imminente?
Voilà les deux procédés les plus souvent uti-
lisés, ces jours-ci, pour tenter de ramener « le
calme dans les esprits ».
lisés, ces jours-ci, pour tenter de ramener « le
calme dans les esprits ».
On veut nous faire douter de ce que nous
civons vécu. On veut effacer de notre mémoire
ce que nous avons vu, ressenti, touché du doigt
presque physiquement. La survie de ce régime,
de cette société, de cette civilisation même,
dépend en partie de cet oubli.
civons vécu. On veut effacer de notre mémoire
ce que nous avons vu, ressenti, touché du doigt
presque physiquement. La survie de ce régime,
de cette société, de cette civilisation même,
dépend en partie de cet oubli.
C'est que nous avons tous été les témoins, au
mois de mai, d'un spectacle défendu. Nous avons
vu le roi nu, chancelant, battant l'air de ses
bras. Nous savons que cet Etat est excessivement
vulnérable, qu'il n'a pas la solidité de la pierre
uvec laquelle sont construits les bâtiments offi-
ciels. Nous avons découvert en nous une force
inouïe, au sens précis du mot. Une force jamais
me auparavant.
mois de mai, d'un spectacle défendu. Nous avons
vu le roi nu, chancelant, battant l'air de ses
bras. Nous savons que cet Etat est excessivement
vulnérable, qu'il n'a pas la solidité de la pierre
uvec laquelle sont construits les bâtiments offi-
ciels. Nous avons découvert en nous une force
inouïe, au sens précis du mot. Une force jamais
me auparavant.
Il n'existe pas d'exemple, en effet, dans toute
'histoire, qu'une grève ait été faite par une
nussi forte proportion de la population active
:l'un pays — 10 millions de grévistes sur 17
nillions de personnes actives recensées. Jusqu'au
mois dernier, on ne' croyait pas qu'une telle
jrève soit possible.
'histoire, qu'une grève ait été faite par une
nussi forte proportion de la population active
:l'un pays — 10 millions de grévistes sur 17
nillions de personnes actives recensées. Jusqu'au
mois dernier, on ne' croyait pas qu'une telle
jrève soit possible.
Il n'existe pas d'exemple, non plus, que la
bourgeoisie ait été dépossédée simultanément,
d'une façon aussi nette et aussi simple, de tous
ses moyens de production, de communication,
d'information, et de ses arsenaux mêmes, qui
étaient eux aussi occupés par les ouvriers, c'est
à .dire, en leur pouvoir.
bourgeoisie ait été dépossédée simultanément,
d'une façon aussi nette et aussi simple, de tous
ses moyens de production, de communication,
d'information, et de ses arsenaux mêmes, qui
étaient eux aussi occupés par les ouvriers, c'est
à .dire, en leur pouvoir.
Durant quelques jours en mai, on vit alors les
ministres, le premier ministre, le président de
la République, perdre au fil des heures leur
consistance. Ils devenaient des ombres. Ils
menaçaient à chaque instant de s'évaporer dans
l'air léger du printemps. On n'en croyait pas nos
yeux. C'était pourtant la seule issue qui parais-
sait logique.
ministres, le premier ministre, le président de
la République, perdre au fil des heures leur
consistance. Ils devenaient des ombres. Ils
menaçaient à chaque instant de s'évaporer dans
l'air léger du printemps. On n'en croyait pas nos
yeux. C'était pourtant la seule issue qui parais-
sait logique.
Que pouvaient-ils faire ? Réprimer deux ou
trois manifestations, mais pas dix ou vingt. La
police était sur les genoux, commençait elle-
même à flotter. Disposer ici ou là quelques
tanks ramenés d'Allemagne, mais les trains
auraient-ils recommencé à circuler pour autant ?
Malgré tous les efforts financiers consentis pour
l'armée ces dernières années, il n'y avait pas
assez de tanks, ou trop de cheminots.
trois manifestations, mais pas dix ou vingt. La
police était sur les genoux, commençait elle-
même à flotter. Disposer ici ou là quelques
tanks ramenés d'Allemagne, mais les trains
auraient-ils recommencé à circuler pour autant ?
Malgré tous les efforts financiers consentis pour
l'armée ces dernières années, il n'y avait pas
assez de tanks, ou trop de cheminots.
Voilà le spectacle défendu. Voilà le secret du
mois de mai. Durant quelques jours, l'Etat était
moribond, la bourgeoisie avait virtuellement
perdu le pouvoir. Et si elle l'a finalement conser-
vé, cela ne tient à aucun coup d'éclat de sa part,
aucune manœuvre géniale. Les journaux sont
remplis, à ce sujet, de contes pour enfants,
d'histoires à dormir debout.
mois de mai. Durant quelques jours, l'Etat était
moribond, la bourgeoisie avait virtuellement
perdu le pouvoir. Et si elle l'a finalement conser-
vé, cela ne tient à aucun coup d'éclat de sa part,
aucune manœuvre géniale. Les journaux sont
remplis, à ce sujet, de contes pour enfants,
d'histoires à dormir debout.
Mais il n'y aura bientôt plus — il n'y a déjà
plus, si l'on regarde de près — que deux camps
en présence. D'un côté, ceux qui acceptent,
quelque soient leurs opinions déclarées, d'effacer
de leur mémoire ce qu'ils ont vu en mai, et de
reprendre le jeu politique ancien qui ne trompe
plus grand monde. De l'autre, ceux qui n'ou-
blieront jamais. Ceux qui tireront toutes les
leçons de Ce qu'ils ont vu et compris en mai.
plus, si l'on regarde de près — que deux camps
en présence. D'un côté, ceux qui acceptent,
quelque soient leurs opinions déclarées, d'effacer
de leur mémoire ce qu'ils ont vu en mai, et de
reprendre le jeu politique ancien qui ne trompe
plus grand monde. De l'autre, ceux qui n'ou-
blieront jamais. Ceux qui tireront toutes les
leçons de Ce qu'ils ont vu et compris en mai.
Nous savons, par exemple, que les quelques
centaines de milliers de bourgeois, d'adolescents
sages, de petites gens sentimentales et d'anciens
combattants qui se sont rassemblés aux Champs-
Elysées, leur lieu habituel de promenade, à
l'appel des pouvoirs publics et sous la protection
de la police, n'ont joué aucun rôle, strictement,
dans les événements. Ils ne criaient pas leur
détermination de mourir en combattant mais,
d'une voix encore blanche, leur soulagement.
centaines de milliers de bourgeois, d'adolescents
sages, de petites gens sentimentales et d'anciens
combattants qui se sont rassemblés aux Champs-
Elysées, leur lieu habituel de promenade, à
l'appel des pouvoirs publics et sous la protection
de la police, n'ont joué aucun rôle, strictement,
dans les événements. Ils ne criaient pas leur
détermination de mourir en combattant mais,
d'une voix encore blanche, leur soulagement.
L'Etat était toujours debout, ce soir-là, sim-
plement parce que les ouvriers, quelques jours
plus tôt, avaient accepté de le laisser debout.
Feront-ils de même la prochaine fois ? Toute la
question est là.
plement parce que les ouvriers, quelques jours
plus tôt, avaient accepté de le laisser debout.
Feront-ils de même la prochaine fois ? Toute la
question est là.
Mais pourquoi serions-nous uniquement amers,
déçus ? Une époque prodigieuse s'annonce en
France, en Europe même. Pour la première fois,
nous savons aujourd'hui qu'une Révolution socia-
liste dans un pays à haut niveau'industriel, c'est
à dire, dans les conditions mêmes espérées par
déçus ? Une époque prodigieuse s'annonce en
France, en Europe même. Pour la première fois,
nous savons aujourd'hui qu'une Révolution socia-
liste dans un pays à haut niveau'industriel, c'est
à dire, dans les conditions mêmes espérées par
Marx, se prépare enfin. Une révolution qui
transformera le visage du Socialisme dans le
monde. Et, durant ces journées de mai, l'effer-
vescenc.ï révolutionnaire qui est apparue .dans
la société française a produit des effets surpre-
nants, d'un type entièrement nouveau. Il faut
sans tarder les connaître, les étudier, les com-
prendre Ils constituent un véritable trésor pour
le mouvement ouvrier, français et international.
Un trésor de guerre pour les combats à venir.
transformera le visage du Socialisme dans le
monde. Et, durant ces journées de mai, l'effer-
vescenc.ï révolutionnaire qui est apparue .dans
la société française a produit des effets surpre-
nants, d'un type entièrement nouveau. Il faut
sans tarder les connaître, les étudier, les com-
prendre Ils constituent un véritable trésor pour
le mouvement ouvrier, français et international.
Un trésor de guerre pour les combats à venir.
Notre ambition, en publiant ces cahiers, est
de contribuer à en rassembler les éléments épars
et à comprendre en quoi toutes les idées neuves
qui se sont exprimées, toutes les expériences
révolutionnaires concrètes qui ont été vécues
(commo à Nantes), et aussi tout ce qui a été
conquis, au mois de mai, d'un bout à l'autre du
pays, dcins les usines, les facultés, les lycées, les
bureaux et les gares occupés, préfigurent l'avenir
et indicuent des voies nouvelles. Nous faisons
appel à tous pour y parvenir.
de contribuer à en rassembler les éléments épars
et à comprendre en quoi toutes les idées neuves
qui se sont exprimées, toutes les expériences
révolutionnaires concrètes qui ont été vécues
(commo à Nantes), et aussi tout ce qui a été
conquis, au mois de mai, d'un bout à l'autre du
pays, dcins les usines, les facultés, les lycées, les
bureaux et les gares occupés, préfigurent l'avenir
et indicuent des voies nouvelles. Nous faisons
appel à tous pour y parvenir.
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MARCELLE FOURNIE
80, Quai de La Râpée
Paris (12e)
C.C.P. M. Fournie
N° 9.702 73 Paris
N° 9.702 73 Paris
r
toute une vit te découvre le pouvoir populaire
(ouvriers, paysans, étudiants)
Compte rendu collectif d'un voyage
à Nantes effectué par trois camarades
de la Faculté de Nanterre : Bernard
CONEIN, Bernard GRANOTIER et Henri
FOURNIE.
à Nantes effectué par trois camarades
de la Faculté de Nanterre : Bernard
CONEIN, Bernard GRANOTIER et Henri
FOURNIE.
COMBATTIVITE OUVRIERE
DANS LES USINES OCCUPEES
DANS LES USINES OCCUPEES
Nous avons pris comme test de la combattivité
ouvrière, deux entreprises : Sud-Aviation Bou-
guenais et l'A.C.B. (chantiers navals). Egale-
ment les nombreuses discussions que nous avons
eues avec des syndicalistes ouvriers nous per-
mettent de donner un aspect du degré de
conscience de classe chez les travailleurs nan-
tais ; en particulier, nous avons assisté au
Comité de Grève intersyndical des cheminots.
ouvrière, deux entreprises : Sud-Aviation Bou-
guenais et l'A.C.B. (chantiers navals). Egale-
ment les nombreuses discussions que nous avons
eues avec des syndicalistes ouvriers nous per-
mettent de donner un aspect du degré de
conscience de classe chez les travailleurs nan-
tais ; en particulier, nous avons assisté au
Comité de Grève intersyndical des cheminots.
Le contact avec l'usine Sud-Aviation Bougue-
nais nous semblait particulièrement important,
puisque ce fut la première entreprise occupée
par les ouvriers, et qui a joué le rôle du « déto-
nateur » dans le déclenchement de la grève
générale.
nais nous semblait particulièrement important,
puisque ce fut la première entreprise occupée
par les ouvriers, et qui a joué le rôle du « déto-
nateur » dans le déclenchement de la grève
générale.
L'usine se situe à la périphérie de Nantes.
Elle prend aujourd'huit l'aspect d'un véritable
camp retranché ; des barrages successifs con-
trôlent l'entrée des alentours de la boîte. Tous
les 20 mètres se trouvent des piquets de grève
Elle prend aujourd'huit l'aspect d'un véritable
camp retranché ; des barrages successifs con-
trôlent l'entrée des alentours de la boîte. Tous
les 20 mètres se trouvent des piquets de grève
(21 en tout) prêts à la riposte contre toute at-
taque extérieure. Ce soir-là, les nervis des CD R.
taque extérieure. Ce soir-là, les nervis des CD R.
(Comité de Défense Républicaine) étaient atten-
dus.
dus.
La C.G.T. est majoritaire à Sud-Aviation avec
800 voix ; ensuite vient la C.F.D.T. avec 700
voix ; et la C.G.T.-F.O. avec 300 voix. Les
piquets de grève de la C.G.T. se méfiant des
contacts avec les étudiants, la liaison ouvriers-
étudiants se fait au point 16, piquet des ouvriers
horaires F.O., qui sont sur des positions syndi-
calistes révolutionnaires.
800 voix ; ensuite vient la C.F.D.T. avec 700
voix ; et la C.G.T.-F.O. avec 300 voix. Les
piquets de grève de la C.G.T. se méfiant des
contacts avec les étudiants, la liaison ouvriers-
étudiants se fait au point 16, piquet des ouvriers
horaires F.O., qui sont sur des positions syndi-
calistes révolutionnaires.
Tout a commencé à partir d'une revendication
sur la réduction du temps de travail sans dimi-
nution de salaire. Le 1'r mai, après le refus de
la Direction de prendre en considération les
revendications ouvrières, les syndicats C.G.T. et
C.F.D.T. lancent un mot d'ordre de grève perlée,
F.O. réclamant la grève illimitée avec occupa-
tion d'usines. Le 7 mai, deux jours avant une
journée complète de grève, le patron s'enfuit,
poursuivi par 35 ouvriers. Il réussit à se sauver.
sur la réduction du temps de travail sans dimi-
nution de salaire. Le 1'r mai, après le refus de
la Direction de prendre en considération les
revendications ouvrières, les syndicats C.G.T. et
C.F.D.T. lancent un mot d'ordre de grève perlée,
F.O. réclamant la grève illimitée avec occupa-
tion d'usines. Le 7 mai, deux jours avant une
journée complète de grève, le patron s'enfuit,
poursuivi par 35 ouvriers. Il réussit à se sauver.
Le 10 mai, l'entrevue avec la Direction tourne
a la mascarade. La position des syndicats de
continuer la grève par 1 /2 heures est réaffirmée
par un vote qui refuse la proposition de la
C.G.T. et de F.O. de grève totale sans occupa-
1 ion d'usines. Mardi 14 mai, la grève par 1/2
heures continue, mais vers 15 heures, trois
délégués syndicaux décident de virer les men-
suels des bureaux et d'enfermer le patron dans
:,on bureau. Quelques cadres se joignent au
Directeur séquestré. Un poste de garde est
installé devant sa porte. Pour que le patron ne
«'ennuie pas, un haut-parleur est installé près
(Je sa porte et hurle à tue-tête des chants
révolutionnaires, ce qui permet à un patron
d'apprendre par cœur l'Internationale sans faire
d'efforts idéologiques. Mais le son est tellement
lort qu'il abrutit autant le directeur que le
piquet de garde des syndicats devant le bureau ;
le haut-parleur est finalement enlevé, le concert
musical s'arrête.
a la mascarade. La position des syndicats de
continuer la grève par 1 /2 heures est réaffirmée
par un vote qui refuse la proposition de la
C.G.T. et de F.O. de grève totale sans occupa-
1 ion d'usines. Mardi 14 mai, la grève par 1/2
heures continue, mais vers 15 heures, trois
délégués syndicaux décident de virer les men-
suels des bureaux et d'enfermer le patron dans
:,on bureau. Quelques cadres se joignent au
Directeur séquestré. Un poste de garde est
installé devant sa porte. Pour que le patron ne
«'ennuie pas, un haut-parleur est installé près
(Je sa porte et hurle à tue-tête des chants
révolutionnaires, ce qui permet à un patron
d'apprendre par cœur l'Internationale sans faire
d'efforts idéologiques. Mais le son est tellement
lort qu'il abrutit autant le directeur que le
piquet de garde des syndicats devant le bureau ;
le haut-parleur est finalement enlevé, le concert
musical s'arrête.
Un Comité de Grève est constitué, où sont
leprésentés les délégués élus des postes de garde.
Ces derniers sont installés spontanément par les
ouvriers au moyen de planches de bois pour
constituer derrière les murs de l'usine des tou-
relles pour installer les services d'ordre. La
première nuit, les ouvriers couchent dans des
cartons d'emballages de frigidaires.
leprésentés les délégués élus des postes de garde.
Ces derniers sont installés spontanément par les
ouvriers au moyen de planches de bois pour
constituer derrière les murs de l'usine des tou-
relles pour installer les services d'ordre. La
première nuit, les ouvriers couchent dans des
cartons d'emballages de frigidaires.
Quelques jours plus tard, la séquestration du
patron pose des problèmes aux syndicalistes de
la C.G.T., après la condamnation par Séguy des
actes de séquestration. La C.F.D.T. est pour la
libération de Duvochel, sous garantie qu'il paie
un acompte. La section F.O. est pour le main-
tien de la séquestration. La majorité des ou-
vriers est hostile à la libération de Duvochel qui
risquait de démobiliser une bonne partie des
travailleurs. Un représentant des cadres de la
C.G.T., Desaigne, arrive de Paris dans la nuit.
Cette rapidité de déplacement étonne les ou-
vriers. Desaigne leur demande avec fierté :
patron pose des problèmes aux syndicalistes de
la C.G.T., après la condamnation par Séguy des
actes de séquestration. La C.F.D.T. est pour la
libération de Duvochel, sous garantie qu'il paie
un acompte. La section F.O. est pour le main-
tien de la séquestration. La majorité des ou-
vriers est hostile à la libération de Duvochel qui
risquait de démobiliser une bonne partie des
travailleurs. Un représentant des cadres de la
C.G.T., Desaigne, arrive de Paris dans la nuit.
Cette rapidité de déplacement étonne les ou-
vriers. Desaigne leur demande avec fierté :
— Devinez comment je suis venu ?
Réponse des travailleurs :
Réponse des travailleurs :
— En bécane ?
— Non, répond Desaigne.
— En voiture ?
— Non.
— En train ?
— Non, en avion, répond fièrement Desaigne
à l'étonnement de la majorité du poste.
à l'étonnement de la majorité du poste.
4
Le lendemain, à l'Intersyndicale, Desaigne
prend la parole, expliquant qu'il est venu de
sa propre initiative, contre l'avis de la Confé-
dération, et demande la libération de Duvochel.
Cette intervention est très mal prise par le
Comité de Grève ; un délégué C.G.T. lui rétor-
que même que le problème de la séquestration
de Duvochel ne peut être posé par quelqu'un de
l'extérieur. Finalement Desaigne, furieux, s'en
va et reprend l'avion directement pour Paris. Le
lendemain, un vote est organisé pour ou contre
la séquestration de Duvochel ; la libération du
directeur est acquise à 66,7 % des voix des
présents.
prend la parole, expliquant qu'il est venu de
sa propre initiative, contre l'avis de la Confé-
dération, et demande la libération de Duvochel.
Cette intervention est très mal prise par le
Comité de Grève ; un délégué C.G.T. lui rétor-
que même que le problème de la séquestration
de Duvochel ne peut être posé par quelqu'un de
l'extérieur. Finalement Desaigne, furieux, s'en
va et reprend l'avion directement pour Paris. Le
lendemain, un vote est organisé pour ou contre
la séquestration de Duvochel ; la libération du
directeur est acquise à 66,7 % des voix des
présents.
Quelques jours après, les grévistes mettent au
point un système d'organisation interne à l'en-
treprise pour assurer l'occupation. Une cantine
est assurée tous les jours par un service bénévole.
Des constructions en dur sont installées partout
dans l'usine pour s'abriter la nuit. Des distrac-
tions sont organisées, et une kermesse au profit
du Comité de Grève s'est tenue dimanche.
point un système d'organisation interne à l'en-
treprise pour assurer l'occupation. Une cantine
est assurée tous les jours par un service bénévole.
Des constructions en dur sont installées partout
dans l'usine pour s'abriter la nuit. Des distrac-
tions sont organisées, et une kermesse au profit
du Comité de Grève s'est tenue dimanche.
Cette occupation de l'usine est sans précédent
dans l'histoire de Sud-Aviation, bien que l'usine
ait été plusieurs fois lock-outée en 1957 où elle
fut occupée par les forces de police ; en 1960
nouveau lock-out de quinze jours après une
grève de salaires, et en 1962 également.
dans l'histoire de Sud-Aviation, bien que l'usine
ait été plusieurs fois lock-outée en 1957 où elle
fut occupée par les forces de police ; en 1960
nouveau lock-out de quinze jours après une
grève de salaires, et en 1962 également.
Avec ses 2.800 ouvriers, l'usine de Sud-
Aviation est l'une des plus grosses entreprises de
\a région.
Aviation est l'une des plus grosses entreprises de
\a région.
LES DEBUTS D'UNE GESTION DIRECTE
DANS LES ENTREPRISES
DANS LES ENTREPRISES
Les phénomènes les plus profonds sont sans
doute passés inaperçus au cours des dernières
semaines. L'excitation ou l'angoisse ont braqué
les regards sur les aspects spectaculaires au
détriment des changements plus importants
Pourtant quelques journaux mentionnaient en
passant des cas de mise en question par les
travailleurs des modalités de leur travail, qu'il
s'agisse de cadences, de conditions de sécurité,
de productivité. Des ouvriers ont commencé à
envisager des modifications de leur propre
initiative, et cela à Péchiney, à Donges, à la
C.S.F. de Brest, etc... L'information, malheureu-
sement, n'a pas été bavarde sur ces expériences.
doute passés inaperçus au cours des dernières
semaines. L'excitation ou l'angoisse ont braqué
les regards sur les aspects spectaculaires au
détriment des changements plus importants
Pourtant quelques journaux mentionnaient en
passant des cas de mise en question par les
travailleurs des modalités de leur travail, qu'il
s'agisse de cadences, de conditions de sécurité,
de productivité. Des ouvriers ont commencé à
envisager des modifications de leur propre
initiative, et cela à Péchiney, à Donges, à la
C.S.F. de Brest, etc... L'information, malheureu-
sement, n'a pas été bavarde sur ces expériences.
Il est essentiel maintenant de réfléchir sur les
embryons d'autogestion développés par les tra-
vailleurs dans certaines usines, parce qu'elles
marquent une prise de conscience supérieure,
comparée aux revendications salariales tradi-
tionnelles. Une des caractéristiques, sans doute,
des journées de mai, ce fut l'hésitation et l'ambi-
guïté autour du combat prioritaire : la C.G.T.
s'efforça de toujours maintenir la lutte au ni-
veau des strictes améliorations quantitatives ;
la C.F.D.T. avança les formules de participation
et de cogestion, sans dépasser l'idéal mystifica-
teur du socialisme suédois. Par contre, on vit la
base quitter le terrain cégétiste, ou donner un
contenu radical aux formules cégétistes, en
mettant en pratique la notion d'appropriation
des moyens de production par les travailleurs.
embryons d'autogestion développés par les tra-
vailleurs dans certaines usines, parce qu'elles
marquent une prise de conscience supérieure,
comparée aux revendications salariales tradi-
tionnelles. Une des caractéristiques, sans doute,
des journées de mai, ce fut l'hésitation et l'ambi-
guïté autour du combat prioritaire : la C.G.T.
s'efforça de toujours maintenir la lutte au ni-
veau des strictes améliorations quantitatives ;
la C.F.D.T. avança les formules de participation
et de cogestion, sans dépasser l'idéal mystifica-
teur du socialisme suédois. Par contre, on vit la
base quitter le terrain cégétiste, ou donner un
contenu radical aux formules cégétistes, en
mettant en pratique la notion d'appropriation
des moyens de production par les travailleurs.
REVENDICATIONS
ET PROBLEME DU POUVOIR
Quelqjes étudiants se proclamant depuis
quelques temps « les seuls révolutionnaires »,
parce qu'ils ont mis l'accent sur le refus de la
hiérarch e universitaire, alors que les ouvriers
seraient d'ignobles réformistes limitant leur
lutte à des revendications. Cette prétention,
venant ce la part de privilégiés, ne peut prêter
qu'à sourire. Car, contre le point de vue inverse
et plus dangereux : « les travailleurs peuvent-ils
améliore- leur condition de vie de façon irré-
versible dans le cadre du gouvernement et
même du régime actuel ? », l'expérience de 1936
permet ce répondre : non î Et la nécessité, pour
la consolidation même des revendications, de
mettre en cause le pouvoir bourgeois, s'exprime
bien dan:; ce slogan écrit sur les murs de Nantes :
quelques temps « les seuls révolutionnaires »,
parce qu'ils ont mis l'accent sur le refus de la
hiérarch e universitaire, alors que les ouvriers
seraient d'ignobles réformistes limitant leur
lutte à des revendications. Cette prétention,
venant ce la part de privilégiés, ne peut prêter
qu'à sourire. Car, contre le point de vue inverse
et plus dangereux : « les travailleurs peuvent-ils
améliore- leur condition de vie de façon irré-
versible dans le cadre du gouvernement et
même du régime actuel ? », l'expérience de 1936
permet ce répondre : non î Et la nécessité, pour
la consolidation même des revendications, de
mettre en cause le pouvoir bourgeois, s'exprime
bien dan:; ce slogan écrit sur les murs de Nantes :
« Augmentation
massive des salaires
sans changement des ,
structure» économiques
et politiques
massive des salaires
sans changement des ,
structure» économiques
et politiques
Augmentation
du coût de la vie
et
retour à la misère
d'ici quelques mois ».
Ce qui nous intéresse c'est que cette position
a été mise en pratique même sous des formes
trop partielles. Témoin ce tract du Comité de
Giève des Marins, qui fait précéder toute une
série de revendications matérielles par quatre
points posant la question du pouvoir :
a été mise en pratique même sous des formes
trop partielles. Témoin ce tract du Comité de
Giève des Marins, qui fait précéder toute une
série de revendications matérielles par quatre
points posant la question du pouvoir :
COMITE DE GREVE
DU PORT DE NANTES
OFFICIERS ET MARINS
DU PORT DE NANTES
OFFICIERS ET MARINS
REVENDICATIONS
au préalable à toutes discussions :
1" - Abrogation des ordonnances anti-
sociales et du décret du 31 juil-
let 1963 portant limitation du
droit de grève ;
sociales et du décret du 31 juil-
let 1963 portant limitation du
droit de grève ;
2" - Paiement intégral des jours de
grève ;
grève ;
3" - Non décrochage des salaires avec
le large et garanties formelles
pour l'avenir.
le large et garanties formelles
pour l'avenir.
Reconnaissance des libertés syndi-
cales au sein de l'entreprise.
cales au sein de l'entreprise.
Augmentation. du pouvoir du Délé-
gué et son immunité.
gué et son immunité.
Création au sein du Port Autonome
d'un Comité d'entreprise.
d'un Comité d'entreprise.
r
— Gestion paritaire de l'entreprise par
les Délégués au C.E. en attendant
une nationalisation démocratique de
la Marine Marchande.
les Délégués au C.E. en attendant
une nationalisation démocratique de
la Marine Marchande.
— Reconnaissance de pouvoirs réels au
Comité d'entreprise et augmentation
importante de leurs budgets, mini-
mum 5 %.
Comité d'entreprise et augmentation
importante de leurs budgets, mini-
mum 5 %.
— Retour à la semaine des 40 heures
sans diminution de salaires.
sans diminution de salaires.
— Parité des congés et de l'indemnité
de nourriture entre Officiers et
Marins.
de nourriture entre Officiers et
Marins.
— Attribution du 13e mois à date fixe.
— Etc...
Et il n'y a pas eu que des tracts...
REMISE EN CAUSE
DE LA HIERARCHIE PATRONALE
L'emprisonnement des directeurs a été le
premier symptôme. A Sud-Aviation, le P.D.G.
Duvochel a été bouclé plusieurs jours, jusqu'à
ce qu'il obtienne de Séguy, cet autre P.D.G.,
sa libération, malgré la volonté des ouvriers.
premier symptôme. A Sud-Aviation, le P.D.G.
Duvochel a été bouclé plusieurs jours, jusqu'à
ce qu'il obtienne de Séguy, cet autre P.D.G.,
sa libération, malgré la volonté des ouvriers.
Dans la marine marchande, le délégué C.G.T.
Andrieu raconte que pour la première fois les
marins se sont révoltés contre leur commandant :
celui-ci ayant la mauvaise habitude de surveiller
la vie privée de ses hommes, il a été dénoncé et
insulté. Tout commence par cet irrespect-là. Sur
un autre navire, un vote-bidon avait été organisé
avec les Noirs illettrés en service, pour forcer à
la reprise du travail. Aussitôt, 30 militants sont
intervenus, et on a vu les dirigés remettre leur
dirigeant à sa place. Dernier exemple, ce tract
publié fin mai en Loire-Atlantique par les
travailleurs de la Sécurité Sociale réclamant
l'abrogation dés ordonnances :
Andrieu raconte que pour la première fois les
marins se sont révoltés contre leur commandant :
celui-ci ayant la mauvaise habitude de surveiller
la vie privée de ses hommes, il a été dénoncé et
insulté. Tout commence par cet irrespect-là. Sur
un autre navire, un vote-bidon avait été organisé
avec les Noirs illettrés en service, pour forcer à
la reprise du travail. Aussitôt, 30 militants sont
intervenus, et on a vu les dirigés remettre leur
dirigeant à sa place. Dernier exemple, ce tract
publié fin mai en Loire-Atlantique par les
travailleurs de la Sécurité Sociale réclamant
l'abrogation dés ordonnances :
« Afin d'accélérer la réalisation de cet
objectif, les Unions départementales
C.G.T. et C.F.D.T. ont décidé avec leurs
Confédérations, de mettre en place
immédiatement des Comités provisoires
de gestion, composés uniquement de
salariés dans les diverses Caisses de
Sécurité Sociale et d'Allocations Fami-
liales du département.
objectif, les Unions départementales
C.G.T. et C.F.D.T. ont décidé avec leurs
Confédérations, de mettre en place
immédiatement des Comités provisoires
de gestion, composés uniquement de
salariés dans les diverses Caisses de
Sécurité Sociale et d'Allocations Fami-
liales du département.
Ces Comités s° substituent d'autorité
aux Conseils mis en place par le Pouvoir
dans le cadre des ordonnances.
aux Conseils mis en place par le Pouvoir
dans le cadre des ordonnances.
Ils œuvrent pour que des dispositions
soient rapidement prises pour assurer
des élections d'Administrateurs salariés,
seuls compétents pour gérer les fonds
appartenant aux travailleurs ».
soient rapidement prises pour assurer
des élections d'Administrateurs salariés,
seuls compétents pour gérer les fonds
appartenant aux travailleurs ».
A la centrale thermique E.D.F. de Cheviré, la
gestion s'est même imposée plus profondément.
La dimanche 2 juin, jour où j'ai discuté avec les
ouvriers et techniciens de cette usine, ils venaient
d'obtenir 15.000 anciens francs d'augmentation
rrensuelle moyenne et... continuaient la grève !
C'est que, comme le disait >'un d'eux : « Les
cadres ne sont plus là depuis deux semaines et
ça tourne. On peut se passer d'eux pour fournir
le courant ». Cette intervention devait d'ailleurs
entraîner toute une discussion sur le problème
d=s cadres. On m'expliqua qu'en Loire-Atlanti-
qje, les cadres se sont solidarisés avec les
travailleurs en nombre impressionnant, ce qui
ne s'était jamais vu. Or le soutien aux revendi-
cations salariales n'était pas l'essentiel : c'est le
tlième de la gestion qui a cimenté l'union. Les
cadres sont frustrés par la trop grande centra-
lisation des organismes publics : ils restent dans
leurs bureaux à signer des papiers, mais n'ont
pas un pouvoir de décision. Que le mouvement
s; fasse avec les cadres ou non, comment, en
définitive, y a-t-il eu autogestion ?
gestion s'est même imposée plus profondément.
La dimanche 2 juin, jour où j'ai discuté avec les
ouvriers et techniciens de cette usine, ils venaient
d'obtenir 15.000 anciens francs d'augmentation
rrensuelle moyenne et... continuaient la grève !
C'est que, comme le disait >'un d'eux : « Les
cadres ne sont plus là depuis deux semaines et
ça tourne. On peut se passer d'eux pour fournir
le courant ». Cette intervention devait d'ailleurs
entraîner toute une discussion sur le problème
d=s cadres. On m'expliqua qu'en Loire-Atlanti-
qje, les cadres se sont solidarisés avec les
travailleurs en nombre impressionnant, ce qui
ne s'était jamais vu. Or le soutien aux revendi-
cations salariales n'était pas l'essentiel : c'est le
tlième de la gestion qui a cimenté l'union. Les
cadres sont frustrés par la trop grande centra-
lisation des organismes publics : ils restent dans
leurs bureaux à signer des papiers, mais n'ont
pas un pouvoir de décision. Que le mouvement
s; fasse avec les cadres ou non, comment, en
définitive, y a-t-il eu autogestion ?
LE FONCTIONNEMENT
DE LA GESTION DIRECTE
DE LA GESTION DIRECTE
On peut voir un premier stade dans l'organi-
sation de l'occupation des usines. Voici, par
exemple, le communiqué du Comité central de
Grève à propos des chantiers A.C.B. :
sation de l'occupation des usines. Voici, par
exemple, le communiqué du Comité central de
Grève à propos des chantiers A.C.B. :
Au troisième jour d'occupation, le
Comité central constate avec satisfaction
la volonté de lutte de l'ensemble du
personnel des A.C.B.
Comité central constate avec satisfaction
la volonté de lutte de l'ensemble du
personnel des A.C.B.
Aucune difficulté n'a été signalée au
Comité pour l'organisation des rondes et
des rotations. Tous les ateliers, tous les
bureaux se sont maintenant bien orga-
nisés ; cela mérite d'être souligné. Quand
les travailleurs dirigent, ils savent s'or-
ganiser.
Comité pour l'organisation des rondes et
des rotations. Tous les ateliers, tous les
bureaux se sont maintenant bien orga-
nisés ; cela mérite d'être souligné. Quand
les travailleurs dirigent, ils savent s'or-
ganiser.
La paie a été distribuée normalement
mercredi à 16 heures. Un certain nom-
bre de camarades n'ont pas encore retiré
leur enveloppe ; qu'ils s'adressent pour
cela au Comité central (téléphone 322).
mercredi à 16 heures. Un certain nom-
bre de camarades n'ont pas encore retiré
leur enveloppe ; qu'ils s'adressent pour
cela au Comité central (téléphone 322).
Une distribution de conserves a suivi
la paie et nous soulignons ici la disci-
pline du personnel, car toutes les com-
mandes enregistrées étaient inférieures
à 30 F comme il avait été demandé. »
la paie et nous soulignons ici la disci-
pline du personnel, car toutes les com-
mandes enregistrées étaient inférieures
à 30 F comme il avait été demandé. »
Les deux derniers paragraphes donnent des
indications intéressantes sur le règlement des
acomptes par les travailleurs eux-mêmes, et sur
le ravitaillement. De la même manière, les
grévistes de la marine marchande ont réquisi-
tionné tous les vivres entreposés sur les navires.
Dans les grèves précédentes, cela n'était jamais
arrivé, et cette fois encore, des armateurs ten-
tèrent d'empêcher l'ouverture des cambuses ;
mais devant les menaces de faire sauter portes
et verrous, ils durent céder.
indications intéressantes sur le règlement des
acomptes par les travailleurs eux-mêmes, et sur
le ravitaillement. De la même manière, les
grévistes de la marine marchande ont réquisi-
tionné tous les vivres entreposés sur les navires.
Dans les grèves précédentes, cela n'était jamais
arrivé, et cette fois encore, des armateurs ten-
tèrent d'empêcher l'ouverture des cambuses ;
mais devant les menaces de faire sauter portes
et verrous, ils durent céder.
Dans le cas de l'usine Cheviré, l'auto-
gestion s'est imposée aux travailleurs comme
une nécessité. Lorsque les 293 agents eurent
occupé les lieux, le samedi 18 mai, ils choisirent
un comité de grève composé de délégués de
chaque syndicat (il y a 90 % de syndiqués à
l'E.D.F.). Or il était nécessaire, tout en dimi-
nuant le courant (ce qui contribuait à paralyser
les industries locales) de maintenir un minimum
d'électricité pour assurer les services de sécu-
rité : hôpitaux, etc... Le Comité de Grève de-
manda donc aux grévistes de « prendre leurs
gestion s'est imposée aux travailleurs comme
une nécessité. Lorsque les 293 agents eurent
occupé les lieux, le samedi 18 mai, ils choisirent
un comité de grève composé de délégués de
chaque syndicat (il y a 90 % de syndiqués à
l'E.D.F.). Or il était nécessaire, tout en dimi-
nuant le courant (ce qui contribuait à paralyser
les industries locales) de maintenir un minimum
d'électricité pour assurer les services de sécu-
rité : hôpitaux, etc... Le Comité de Grève de-
manda donc aux grévistes de « prendre leurs
responsabilités » à ce sujet. Dans les faits, le
Comité <:lu détenait depuis quinze jours, au
moment de mon enquête, toute l'autorité dans la
centrale. Il veillait à ce qu'une permanence soit
assurée par les travailleurs. Il organisait la
poursuite de l'approvisionnement en combustible
(gaz de Lacq). Pour le ravitaillement des gré-
vistes, il avait ordonné la solidarité active, mais
quelque peu confuse, avec la population environ-
nante.
Comité <:lu détenait depuis quinze jours, au
moment de mon enquête, toute l'autorité dans la
centrale. Il veillait à ce qu'une permanence soit
assurée par les travailleurs. Il organisait la
poursuite de l'approvisionnement en combustible
(gaz de Lacq). Pour le ravitaillement des gré-
vistes, il avait ordonné la solidarité active, mais
quelque peu confuse, avec la population environ-
nante.
Les militants avec qui je discutais étaient très
conscients (le délégué C.G.T. lui-même !) du
sens politique de cette expérience, et l'un d'eux
expliquai" :
conscients (le délégué C.G.T. lui-même !) du
sens politique de cette expérience, et l'un d'eux
expliquai" :
« Nou; voulions montrer notre capacité et
donc notrs droit, en tant que producteurs, à gérer
les moyens de production que nous utilisons. La
preuve est faite ! ».
donc notrs droit, en tant que producteurs, à gérer
les moyens de production que nous utilisons. La
preuve est faite ! ».
Si mai 1968 a été vraiment pour la France un
« 1905 pacifique», suivant les mots d'Andrieu,
le 1917 qui arrive devra mener les conquêtes
gestionnaires à leur terme : le pouvoir aux tra-
vailleurs.
« 1905 pacifique», suivant les mots d'Andrieu,
le 1917 qui arrive devra mener les conquêtes
gestionnaires à leur terme : le pouvoir aux tra-
vailleurs.
IMODEFIffi!
DES
BARRAGES ROUTIERS
BARRAGES ROUTIERS
A
L'AUTODÉFENSE
L'AUTODÉFENSE
NANTES, 24 MU - 31 MAI
Des polémiques ont eu lieu dans la deuxième
moitié du mois de mai entre politiciens d'appa-
reils et « gauchistes » pour savoir si la situation
française était révolutionnaire ou non. Il est
certain que le débat est beaucoup plus clair à
Nantes, où l'état des luttes est tel que chacun
doit se démarquer sans échappatoire possible.
Un exemple concret nous est donné par le tracl
signé U.N.E.F. - Transports F.O., et qui a été
diffusé le 30 mai :
moitié du mois de mai entre politiciens d'appa-
reils et « gauchistes » pour savoir si la situation
française était révolutionnaire ou non. Il est
certain que le débat est beaucoup plus clair à
Nantes, où l'état des luttes est tel que chacun
doit se démarquer sans échappatoire possible.
Un exemple concret nous est donné par le tracl
signé U.N.E.F. - Transports F.O., et qui a été
diffusé le 30 mai :
C.R.S. CONTRE BARRAGE
Un barrage des transports F.O. et
d'étudiants était mis en place le 29 mai
à l'entrée des Sorinières vers 17 heures.
Il était composé d'une cinquantaine de
bidons au milieu de la route et d'une
centaine de transporteurs F.O. aidés par
des étudiants.
d'étudiants était mis en place le 29 mai
à l'entrée des Sorinières vers 17 heures.
Il était composé d'une cinquantaine de
bidons au milieu de la route et d'une
centaine de transporteurs F.O. aidés par
des étudiants.
En accord ave le Comité central de
Grève, seuls les camions transportant
des denrées périssables et munis d'un
laisser-passer du Comité central de
Grève, ainsi que les voitures particu-
lières étaient autorisés à passer.
Grève, seuls les camions transportant
des denrées périssables et munis d'un
laisser-passer du Comité central de
Grève, ainsi que les voitures particu-
lières étaient autorisés à passer.
Alors, vers 22 heures, quatre cars de
gardes mobiles, cinq « estafettes », six
rnotards, sans compter les voitures de
police, arrivent de Nantes. Après avoir
appelé le responsable du barrage, le
chef des forces de « l'ordre » fait char-
ger le peloton, sans sommations.
gardes mobiles, cinq « estafettes », six
rnotards, sans compter les voitures de
police, arrivent de Nantes. Après avoir
appelé le responsable du barrage, le
chef des forces de « l'ordre » fait char-
ger le peloton, sans sommations.
Il y a eu plusieurs blessés, dont un
lycéen, gravement atteint.
lycéen, gravement atteint.
8
Ceux qui ont rédigé le tract étaient d'accord
avec leurs lecteurs : il existe un Comité central
de Grève ; ce Comité détient le pouvoir ; il
décide du droit de circulation routière ; si les
particuliers veulent un interlocuteur valable, ce
n'est pas le maire ou le préfet, mais bien ce
Comité central. Si une telle situation n'est pas
révolutionnaire, quand donc y a-t-il révolution ?
Ou les mots n'ont plus aucun sens.
avec leurs lecteurs : il existe un Comité central
de Grève ; ce Comité détient le pouvoir ; il
décide du droit de circulation routière ; si les
particuliers veulent un interlocuteur valable, ce
n'est pas le maire ou le préfet, mais bien ce
Comité central. Si une telle situation n'est pas
révolutionnaire, quand donc y a-t-il révolution ?
Ou les mots n'ont plus aucun sens.
A Nantes, en tous cas, quand les transpor-
teurs sont entrés en grève, ils ne se sont pas
posé de questions subtiles sur la révolution, mais
ils ont vu clairement qu'il fallait contrôler les
communications de Nantes avec l'extérieur.
C'était la seule solution.
teurs sont entrés en grève, ils ne se sont pas
posé de questions subtiles sur la révolution, mais
ils ont vu clairement qu'il fallait contrôler les
communications de Nantes avec l'extérieur.
C'était la seule solution.
Les barrages routiers autour de Nantes ont
été mis en place à partir du vendredi 24 mai.
Les transporteurs en grève ont bloqué les prin-
cipales artères avec l'aide des lycéens et étu-
diants pour renforcer leurs effectifs. Après le
26 "mai, le syndicat F.O. — dominant dans les
Transports, à Nantes — a agi en liaison avec le
Comité central de Grève qui venait de se consti-
tuer. Le Comité central de Grève distribuait déjà
des bons d'essence ; il fut chargé en outre de
délivrer des autorisations aux camionneurs pour
que seules les marchandises nécessaires aux
paysans ou au strict ravitaillement des grévistes
puissent passer. L'idée était bonne, mais malheu-
reusement, une grande confusion a d'abord
régné, par manque d'organisation. En l'absence
d'une commission « transports » compétente, le
Comité central de Grève a mal distribué ses
autorisations. Le numéro du camion et la nature
du fret (marchandise urgente ou non) n'étaient
pas précisés sur le laisser-passer. Beaucoup de
camionneurs ignoraient au début qu'il fallait
une autorisation. On a vu le patron de la prin-
cipale « tôle », Grangjouan, obtenir l'autorisa-
tion, car le Comité central de Grève n'avait pas
contacté les transporteurs ! etc... Malgré cela, le
contrôle des routes a pris place. Les quatre
principaux accès étaient surveillés par des pi-
quets de 500 camionneurs et étudiants. Il y a
eu quelques vitres brisées et pneus dégonflés
pour les briseurs de barrages. Mais pas de
pillage : samedi 1" juin, un communiqué F.O.
démentait les rumeurs de rançonnage des voi-
tures particulières. Les flics n'osaient pas
disperser leurs forces pour attaquer. Les mairies
se faisaient plus ou moins complices de l'orga-
nisation mise en place.
été mis en place à partir du vendredi 24 mai.
Les transporteurs en grève ont bloqué les prin-
cipales artères avec l'aide des lycéens et étu-
diants pour renforcer leurs effectifs. Après le
26 "mai, le syndicat F.O. — dominant dans les
Transports, à Nantes — a agi en liaison avec le
Comité central de Grève qui venait de se consti-
tuer. Le Comité central de Grève distribuait déjà
des bons d'essence ; il fut chargé en outre de
délivrer des autorisations aux camionneurs pour
que seules les marchandises nécessaires aux
paysans ou au strict ravitaillement des grévistes
puissent passer. L'idée était bonne, mais malheu-
reusement, une grande confusion a d'abord
régné, par manque d'organisation. En l'absence
d'une commission « transports » compétente, le
Comité central de Grève a mal distribué ses
autorisations. Le numéro du camion et la nature
du fret (marchandise urgente ou non) n'étaient
pas précisés sur le laisser-passer. Beaucoup de
camionneurs ignoraient au début qu'il fallait
une autorisation. On a vu le patron de la prin-
cipale « tôle », Grangjouan, obtenir l'autorisa-
tion, car le Comité central de Grève n'avait pas
contacté les transporteurs ! etc... Malgré cela, le
contrôle des routes a pris place. Les quatre
principaux accès étaient surveillés par des pi-
quets de 500 camionneurs et étudiants. Il y a
eu quelques vitres brisées et pneus dégonflés
pour les briseurs de barrages. Mais pas de
pillage : samedi 1" juin, un communiqué F.O.
démentait les rumeurs de rançonnage des voi-
tures particulières. Les flics n'osaient pas
disperser leurs forces pour attaquer. Les mairies
se faisaient plus ou moins complices de l'orga-
nisation mise en place.
Ainsi, pendant plusieurs jours, toute une ville
a été isolée, les barrages fonctionnant comme
filtres, prêts, même, à une résistance armée, si
les maigres forces policières encore à la dispo-
sition du préfet voulaient intervenir. Cependant,
la situation a évolué à partir du 31 mai. Le
réveil de l'Etat gaulliste a donné plus de réalité
aux menaces de répressions policières. Les fêtes
de Pentecôte démobilisèrent, et surtout la reprise
probable du boulot dans quelques tôles, obli-
geait les syndicats à renforcer les piquets de
grève, c'est-à-dire à dégarnir les barrages. Enfin
a été isolée, les barrages fonctionnant comme
filtres, prêts, même, à une résistance armée, si
les maigres forces policières encore à la dispo-
sition du préfet voulaient intervenir. Cependant,
la situation a évolué à partir du 31 mai. Le
réveil de l'Etat gaulliste a donné plus de réalité
aux menaces de répressions policières. Les fêtes
de Pentecôte démobilisèrent, et surtout la reprise
probable du boulot dans quelques tôles, obli-
geait les syndicats à renforcer les piquets de
grève, c'est-à-dire à dégarnir les barrages. Enfin
le Conité centrai de Grève décida, le 1" juin,
d'abandonner le système des bons d'essence
(lequ;l mobilisait une véritable administration
de 4C personnes) par peur du mécontentement
des automobilistes. Dans ces circonstances, les
barrages n'étaient plus tenables ; ils furent
suppr mes dans la nuit du 1" au 2 juin. Pour
éviter toute effusion de sang, il allait changer
de teirain. Comme me le disait un délégué F.O.
le 2 juin : « Si Paris reprend mardi 4 juin, des
convois de camions escortés vont arriver en
masse. Pas question de tenir les routes ! Mais si
nos piquets de grève dans les tôles empêchent
de décharger les camions, la lutte continuera ».
d'abandonner le système des bons d'essence
(lequ;l mobilisait une véritable administration
de 4C personnes) par peur du mécontentement
des automobilistes. Dans ces circonstances, les
barrages n'étaient plus tenables ; ils furent
suppr mes dans la nuit du 1" au 2 juin. Pour
éviter toute effusion de sang, il allait changer
de teirain. Comme me le disait un délégué F.O.
le 2 juin : « Si Paris reprend mardi 4 juin, des
convois de camions escortés vont arriver en
masse. Pas question de tenir les routes ! Mais si
nos piquets de grève dans les tôles empêchent
de décharger les camions, la lutte continuera ».
Nantes aura donc vécu pendant une semaine
dans une situation quasiment d'auto-défense,
que seul le démantèlement des autorités publi-
ques a évité de se manifester violemment.
dans une situation quasiment d'auto-défense,
que seul le démantèlement des autorités publi-
ques a évité de se manifester violemment.
DE L'AUTO-ORGANISATION
A L'AUTOGESTION
A L'AUTOGESTION
Conme pendant la Commune de Paris, la ville
de Nantes s'est organisée elle-même sans passer
par les corps intermédiaires de l'Etat.
de Nantes s'est organisée elle-même sans passer
par les corps intermédiaires de l'Etat.
Dès les premiers jours de grève, le dépérisse-
ment de l'Etat se réalisait dans les faits. Pour
faire face à la situation, les syndicats ouvriers
et pciysans prenaient en main les destinées de
la ville.
ment de l'Etat se réalisait dans les faits. Pour
faire face à la situation, les syndicats ouvriers
et pciysans prenaient en main les destinées de
la ville.
Cette action exemplaire a démontré une des
choses les plus importantes aux masses popu-
laires, c'est qu'elles ont la capacité de s'auto-
organiser. Un élément du socialisme se réalisait
concrètement dans le Nantais et dépassait de
beaucoup les réformes démocratiques demandées
par lus partis politiques de gauche. Dimanche 27
mai, le Comité central de Grève, qui réunit les
syndicats paysans et ouvriers, s'installait à la
Mair e. Le préfet n'avait plus à sa disposition
qu'un huissier.
choses les plus importantes aux masses popu-
laires, c'est qu'elles ont la capacité de s'auto-
organiser. Un élément du socialisme se réalisait
concrètement dans le Nantais et dépassait de
beaucoup les réformes démocratiques demandées
par lus partis politiques de gauche. Dimanche 27
mai, le Comité central de Grève, qui réunit les
syndicats paysans et ouvriers, s'installait à la
Mair e. Le préfet n'avait plus à sa disposition
qu'un huissier.
I. — Naissance du nouveau pouvoir : des
Comités de quartier au Comité central de
Grève.
Comités de quartier au Comité central de
Grève.
Tout a commencé à la fin de la deuxième
semcine de grève (24 mai) dans un quartier
nantais à 95 % ouvriers, les Batignolles, où les
femries de grévistes regroupées dans les asso-
ciations de familles (A.S.P. et A.P.F.) ont
décidé d'organiser le ravitaillement elles-mêmes.
En prissent dans les habitations du quartier avec
un haut-parleur, les femmes de grévistes ont
comoqué la population à une réunion d'infor-
matbn.
semcine de grève (24 mai) dans un quartier
nantais à 95 % ouvriers, les Batignolles, où les
femries de grévistes regroupées dans les asso-
ciations de familles (A.S.P. et A.P.F.) ont
décidé d'organiser le ravitaillement elles-mêmes.
En prissent dans les habitations du quartier avec
un haut-parleur, les femmes de grévistes ont
comoqué la population à une réunion d'infor-
matbn.
Cette première réunion fut très chaude et très
militante, tout le monde avait conscience du
caractère politique de l'action envisagée. Après
la réunion, une délégation d'une centaine de
femmes de grévistes se rendit à l'usine la plus
proche pour contacter les Comités de Grève.
militante, tout le monde avait conscience du
caractère politique de l'action envisagée. Après
la réunion, une délégation d'une centaine de
femmes de grévistes se rendit à l'usine la plus
proche pour contacter les Comités de Grève.
Ensuite, se créa un comité de ravitaillement
groupant les trois associations familiales ou-
vrières (A.S.F., A.P.F., U.F.F.). Ce comité a pris
contact directement avec les syndicats paysans
du village le plus proche : La Chapelle-sur-Érdre.
Une réunion comprenant 15 Paysans syndiqués
et une délégation d'ouvriers et d'étudiants déci-
da d'assurer une liaison permanente pour orga-
niser un réseau de distribution sans intermé-
diaire.
groupant les trois associations familiales ou-
vrières (A.S.F., A.P.F., U.F.F.). Ce comité a pris
contact directement avec les syndicats paysans
du village le plus proche : La Chapelle-sur-Érdre.
Une réunion comprenant 15 Paysans syndiqués
et une délégation d'ouvriers et d'étudiants déci-
da d'assurer une liaison permanente pour orga-
niser un réseau de distribution sans intermé-
diaire.
Le 26 mai, au même moment, au niveau syn-
dical, était envisagée la constitution du Comité
central de Grève, réclamée depuis une semaine
par l'U.O.F.O. de Loire-Atlantique, qui est sur
des. positions révolutionnaires en rupture avec la
confédération nationale F.O.
dical, était envisagée la constitution du Comité
central de Grève, réclamée depuis une semaine
par l'U.O.F.O. de Loire-Atlantique, qui est sur
des. positions révolutionnaires en rupture avec la
confédération nationale F.O.
Ce choix impliquait pour les syndicats de se
déterminer entre le bloquage total de la produc-
tion, ou l'utilisation de ces moyens de production
par les producteurs afin d'assumer la création
d'un pouvoir populaire autonome. Ce Comité
central de Grève réunit sept syndicats : les trois
syndicats ouvriers, les deux syndicats paysans
(E.N.S.E.A., C.N.S.A.) et les deux syndicats
universitaires (F.E.N., U.N.E.F.). Deux délégués
par syndicat représenté.
déterminer entre le bloquage total de la produc-
tion, ou l'utilisation de ces moyens de production
par les producteurs afin d'assumer la création
d'un pouvoir populaire autonome. Ce Comité
central de Grève réunit sept syndicats : les trois
syndicats ouvriers, les deux syndicats paysans
(E.N.S.E.A., C.N.S.A.) et les deux syndicats
universitaires (F.E.N., U.N.E.F.). Deux délégués
par syndicat représenté.
Cette idée d'unité organique a mis longtemps
à être acceptée par les Unions Départementales
des syndicats, mais elle est l'amorce d'un pou-
voir ouvrier indépendant. Le Comité central de
Grève a la même idée que les Comités de
quartier pour organiser la ravitaillement, mais
en fait ces deux organisations vont un peu se
chevaucher dans l'action.
à être acceptée par les Unions Départementales
des syndicats, mais elle est l'amorce d'un pou-
voir ouvrier indépendant. Le Comité central de
Grève a la même idée que les Comités de
quartier pour organiser la ravitaillement, mais
en fait ces deux organisations vont un peu se
chevaucher dans l'action.
Le Comité central de Grève se méfie des
Comités de quartier et leur reproche de ne pas
être passés par eux au début.
Comités de quartier et leur reproche de ne pas
être passés par eux au début.
En fait, les Comités de quartier vont se révéler
beaucoup plus efficaces dans l'organisation du
ravitaillement, et leur action sera beaucoup plus
profonde que celle des syndicats. Partis de la
création d'un marché direct de la production, ils
vont devenir des cellules de politisation des
quartiers ouvriers.
beaucoup plus efficaces dans l'organisation du
ravitaillement, et leur action sera beaucoup plus
profonde que celle des syndicats. Partis de la
création d'un marché direct de la production, ils
vont devenir des cellules de politisation des
quartiers ouvriers.
Le Comité des Batignolles édite quatre affi-
ches d'information dans les quartiers. L'une de
ces affiches témoigne du degré de politisation
de ces comités de quartier ; elle lance le slogan
suivant :
ches d'information dans les quartiers. L'une de
ces affiches témoigne du degré de politisation
de ces comités de quartier ; elle lance le slogan
suivant :
« Augmentation massive des salaires sans
changement des structures économiques et poli-
tiques = Augmentation du coût de la vie et
retour à la misère d'ici quelques mois. »
changement des structures économiques et poli-
tiques = Augmentation du coût de la vie et
retour à la misère d'ici quelques mois. »
II. — Organisation du ravitaillement par les
grévistes.
grévistes.
Pendant ce temps, le Comité central de Grève
coordonne l'organisation des divers ravitaille-
ment:;. La Chambre d'Agriculture, occupée,
assur= la liaison entre les Comités de quartiers
et le Comité central de Grève. Les Comités de
quartier font tache d'huile dans tous les quar-
tiers ouvriers. Mercredi 29 mai, le Comité central
de Grève ouvre six points de vente dans les
école:;. Les Syndicats agricoles lancent un appel
à la solidarité ouvrière et paysanne le 23 mai
pour organiser concrètement le ravitaillement.
Des équipes ouvriers-étudiants se créent pour
aider les paysans et vont biner les pommes de
terre et aider à l'arrachage des pommes de terre
nouvelles.
coordonne l'organisation des divers ravitaille-
ment:;. La Chambre d'Agriculture, occupée,
assur= la liaison entre les Comités de quartiers
et le Comité central de Grève. Les Comités de
quartier font tache d'huile dans tous les quar-
tiers ouvriers. Mercredi 29 mai, le Comité central
de Grève ouvre six points de vente dans les
école:;. Les Syndicats agricoles lancent un appel
à la solidarité ouvrière et paysanne le 23 mai
pour organiser concrètement le ravitaillement.
Des équipes ouvriers-étudiants se créent pour
aider les paysans et vont biner les pommes de
terre et aider à l'arrachage des pommes de terre
nouvelles.
Les transports sont assurés en permanence,
au début, au moyen de petites camionnettes et
ensuite grâce aux cars de la Municipalité.
au début, au moyen de petites camionnettes et
ensuite grâce aux cars de la Municipalité.
Les prix sont équivalents au prix de revient,
le litre de lait passe de 80 à 50 centimes, le kilo
de pommes de terre de 70 à 12 centimes, les
carot:es de 80 à 50 centimes. Les gros commer-
çants sont obligés de fermer. Tous les matins,
les s/ndicalistes vont vérifier les prix sur les
marchés. Munis d'un micro, ils lancent des
appels : « Commerçants, restez honnêtes ».
le litre de lait passe de 80 à 50 centimes, le kilo
de pommes de terre de 70 à 12 centimes, les
carot:es de 80 à 50 centimes. Les gros commer-
çants sont obligés de fermer. Tous les matins,
les s/ndicalistes vont vérifier les prix sur les
marchés. Munis d'un micro, ils lancent des
appels : « Commerçants, restez honnêtes ».
Armés d'une liste de prix donnant une « four-
chette » d'application, des équipes volantes se
reperdent sur les marchés. Des explications sont
demandées à ceux qui dépassent la « fourchet-
te ». Des affiches sont délivrées dans des maga-
sins d'alimentation autorisés à ouvrir, avec le
libelle suivant : « Ayant le souci du ravitaille-
ment de la population, les syndicats autorisent
ce petit magasin à ouvrir ses portes à condition
qu'il respecte les prix normaux ».
chette » d'application, des équipes volantes se
reperdent sur les marchés. Des explications sont
demandées à ceux qui dépassent la « fourchet-
te ». Des affiches sont délivrées dans des maga-
sins d'alimentation autorisés à ouvrir, avec le
libelle suivant : « Ayant le souci du ravitaille-
ment de la population, les syndicats autorisent
ce petit magasin à ouvrir ses portes à condition
qu'il respecte les prix normaux ».
Deux millions et demi de fonds ont été donnés
par les paysans, qui sont mis en réserve pour
assurer la survie plus tard. S'ajoutent à cela de
nombreux dons en nature.
par les paysans, qui sont mis en réserve pour
assurer la survie plus tard. S'ajoutent à cela de
nombreux dons en nature.
Les ouvriers laissent le courant pour faire
tourner spécialement les laiteries. Le fuel et
l'essence nécessaire aux paysans sont délivrés
normalement, ainsi que des laissez-passer aux
camions de paysans qui doivent aller chercher
l'essence et le fuel. Les aliments industriels
nécessaires au bétail sont fournis par les gré-
vistes aux paysans.
tourner spécialement les laiteries. Le fuel et
l'essence nécessaire aux paysans sont délivrés
normalement, ainsi que des laissez-passer aux
camions de paysans qui doivent aller chercher
l'essence et le fuel. Les aliments industriels
nécessaires au bétail sont fournis par les gré-
vistes aux paysans.
L'entr'aide ouvrière-paysanne se réalise dans
les faits à chaque action, avec une conscience
claire de son caractère politique. La transforma-
tion (Jes techniques de production agricole et la
prolétarisation de la paysannerie sont en train
de créer une nouvelle classe paysanne dans la
jeune génération d'agriculteurs, qui lie directe-
ment son sort à celui de la classe ouvrière. Le
leader paysan, Bernard Lambert, représente le
mieux cette nouvelle conscience révolutionnaire
de la paysannerie.
les faits à chaque action, avec une conscience
claire de son caractère politique. La transforma-
tion (Jes techniques de production agricole et la
prolétarisation de la paysannerie sont en train
de créer une nouvelle classe paysanne dans la
jeune génération d'agriculteurs, qui lie directe-
ment son sort à celui de la classe ouvrière. Le
leader paysan, Bernard Lambert, représente le
mieux cette nouvelle conscience révolutionnaire
de la paysannerie.
III. — Généralisation de la gestion directe.
D'autre part, le Comité central de Grève a
également pris en main, avec l'accord du Comité
de Grève des Pétroliers, la distribution de
l'essence par bons délivrés, par les syndicats,
aux Services de Santé et pour assurer le ravitail-
lement. Cette décision ne remet en cause, en
aucun cas, l'action de la grève dans les secteurs
concernés. Cette action est limitée à l'organi-
sation des services prioritaires sous le contrôle
des syndicats, qui ont pour fonction de renforcer
le pouvoir syndical dans la ville.
également pris en main, avec l'accord du Comité
de Grève des Pétroliers, la distribution de
l'essence par bons délivrés, par les syndicats,
aux Services de Santé et pour assurer le ravitail-
lement. Cette décision ne remet en cause, en
aucun cas, l'action de la grève dans les secteurs
concernés. Cette action est limitée à l'organi-
sation des services prioritaires sous le contrôle
des syndicats, qui ont pour fonction de renforcer
le pouvoir syndical dans la ville.
Est pris en main également la garde des
enfants des grévistes par les enseignants syndi-
qués et les moniteurs de colonies de vacances.
Ce sont les Comités de Grève des établissements
qui assument la responsabilité de l'accueil des
enfants, évitant que les mouvements de grève
des enseignants soient brisés.
enfants des grévistes par les enseignants syndi-
qués et les moniteurs de colonies de vacances.
Ce sont les Comités de Grève des établissements
qui assument la responsabilité de l'accueil des
enfants, évitant que les mouvements de grève
des enseignants soient brisés.
En même temps, dans les facultés, un baby-
sitting est organisé.
sitting est organisé.
Enfin, pour les familles de grévistes qui se
trouvent dans la plus mauvaise situation finan-
cière, les organisations syndicales leur distri-
buent des bons de denrées alimentaires. Ces
bons sont équivalents à une certaine quantité
d'aliments. Pour chaque enfant de moins de
trois ans : un bon de 1 franc de lait, et pour
trouvent dans la plus mauvaise situation finan-
cière, les organisations syndicales leur distri-
buent des bons de denrées alimentaires. Ces
bons sont équivalents à une certaine quantité
d'aliments. Pour chaque enfant de moins de
trois ans : un bon de 1 franc de lait, et pour
chaque personne âgée de plus de trois ans, un
bon pDur 500 gr de pain et un bon de 1 franc ;
de cenrées alimentaires de consommation
courante.
bon pDur 500 gr de pain et un bon de 1 franc ;
de cenrées alimentaires de consommation
courante.
Les syndicats de commerçants détaillants et
de pharmaciens groupent les bons qui seront
payables aux caisses du bureau d'aide sociale.
Un cppel est lancé aux commerçants pour
honorer les bons émis par solidarité à l'égard
des fcmilles de grévistes.
de pharmaciens groupent les bons qui seront
payables aux caisses du bureau d'aide sociale.
Un cppel est lancé aux commerçants pour
honorer les bons émis par solidarité à l'égard
des fcmilles de grévistes.
Cette organisation directe par ce nouveau
pouvo r impliquait l'existence d'un front uni
politicue entre les paysans, la classe ouvrière,
les étjdiants et les classes moyennes. Ce front
uni s';st réalisé à Nantes et a permis de passer
à un ceuxième stade de la lutte : la création d'un
pouvo r autonome des travailleurs face à la
désagrégation du pouvoir de la classe dominante.
pouvo r impliquait l'existence d'un front uni
politicue entre les paysans, la classe ouvrière,
les étjdiants et les classes moyennes. Ce front
uni s';st réalisé à Nantes et a permis de passer
à un ceuxième stade de la lutte : la création d'un
pouvo r autonome des travailleurs face à la
désagrégation du pouvoir de la classe dominante.
Nantes est le seul exemple concret qui dé-
montrs la possibilité d'un gouvernement des
travailleurs fondé sur la gestion directe de
l'économie par les producteurs.
l'économie par les producteurs.
Ce témoignage tire la leçon directe des
événements de mai : si les syndicats et les partis
politiqjes ouvriers avaient exploités les possi-
bilités du mouvement social, ce deuxième stade
de la utte aurait pu être atteint non seulement
à Nartes qui n'est plus qu'un exemple, mais
dans toutes les villes industrielles de France.
événements de mai : si les syndicats et les partis
politiqjes ouvriers avaient exploités les possi-
bilités du mouvement social, ce deuxième stade
de la utte aurait pu être atteint non seulement
à Nartes qui n'est plus qu'un exemple, mais
dans toutes les villes industrielles de France.
11
L'UNIVERSITÉ
CONHE BASE ROUGE
CONHE BASE ROUGE
NOUS NE SERONS PAS WJPES
3UIN 36 : US CONQUETES WWBE8ES SCWT
«SES EN MOINS BE 2 ANS
PAR U BO/S6i:OISIÏ
«SES EN MOINS BE 2 ANS
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6REVE DES MINEURS DE 63
U PATRONAT JC6A6ME IN 2MMC
CE WH. A trtCKE
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COMMENT?
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SOUS PEINE DE
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1
Les étudiants de Nantes ont joué le même rôle par
rapport à leur ville, que les « enragés » de Nanterre par
rapport à la paralysie ultérieure du pays. Sur la toile de
fond du malaise paysan, ils ont catalysé le mouvement
général de contestation.
rapport à leur ville, que les « enragés » de Nanterre par
rapport à la paralysie ultérieure du pays. Sur la toile de
fond du malaise paysan, ils ont catalysé le mouvement
général de contestation.
Dès le premier trimestre, quelques troublions posaient
brutalement le problème des Cités Universitaires et de
la ségrégation sexuelle qui y est pratiquée. Ayant arraché
l'abrogation du règlement intérieur (comme un peu plus
tard à Nanterre), les étudiants sentaient le besoin de
dépasser le cadre de leur problèmes en soutenant la lutte
des employés des Cités et Restaurants Universitaires ;
c'est en grande partie grâce à eux que 75 % du personnel
était syndiqué fin décembre.
brutalement le problème des Cités Universitaires et de
la ségrégation sexuelle qui y est pratiquée. Ayant arraché
l'abrogation du règlement intérieur (comme un peu plus
tard à Nanterre), les étudiants sentaient le besoin de
dépasser le cadre de leur problèmes en soutenant la lutte
des employés des Cités et Restaurants Universitaires ;
c'est en grande partie grâce à eux que 75 % du personnel
était syndiqué fin décembre.
A la rentrée du second trimestre, les mêmes activistes
bloquent le restaurant universitaire (10 janvier) « pour
protester contre les conditions de travail et les salaires »,
ils prennent (20 janvier) la direction de l'U.N.E.F et de la
M.N.E.F. non pas pour renforcer ces appareils mais pour
utiliser les moyens matériels dont ils disposent.
bloquent le restaurant universitaire (10 janvier) « pour
protester contre les conditions de travail et les salaires »,
ils prennent (20 janvier) la direction de l'U.N.E.F et de la
M.N.E.F. non pas pour renforcer ces appareils mais pour
utiliser les moyens matériels dont ils disposent.
Le 14 février est une date-clé : la manifestation et l'en-
vahissement du rectorat, à l'occasion de la journée natio-
nale de revendication des Résidents Universitaires, se ter-
minent par une attaque en traître des forces policières ;
il y a de nombreux blessés et des arrestations.
vahissement du rectorat, à l'occasion de la journée natio-
nale de revendication des Résidents Universitaires, se ter-
minent par une attaque en traître des forces policières ;
il y a de nombreux blessés et des arrestations.
Le lendemain, toute la ville est scandalisée par la bru-
talité des C.R.S. Ici comme à Nanterre, chaque pas de la
talité des C.R.S. Ici comme à Nanterre, chaque pas de la
répression entraînera un élargissement des luttes. Une
grève universitaire se déclenche, qui va durer plusieurs
jours : les étudiants discutent avec les professeurs, ils
distribuent des tracts dans les usines. Notons que pen-
dant ce temps, l'U.E.C. mène la même politique de trahi-
son q^'à Nanterre, en s'écartant de ce début de contes-
tation, et même en dénonçant « les provocateurs anar-
chistes » le lendemain du matraquage policier !
grève universitaire se déclenche, qui va durer plusieurs
jours : les étudiants discutent avec les professeurs, ils
distribuent des tracts dans les usines. Notons que pen-
dant ce temps, l'U.E.C. mène la même politique de trahi-
son q^'à Nanterre, en s'écartant de ce début de contes-
tation, et même en dénonçant « les provocateurs anar-
chistes » le lendemain du matraquage policier !
Il n'y a plus ensuite jusqu'à Pâques qu'une simple mani-
festation le 15 mars.
festation le 15 mars.
Mai:; dès le début mai, les événements de Paris se ré-
percutent à Nantes. Le 7 mai, étudiants et professeurs
comfnuncent une grève universitaire en liaison avec le
mouvement national. Le 8 mai, ils participent à la manifes-
tation ouvrière et paysanne par solidarité. Il faut dire que
les ccntacts avec les syndicats ouvriers, d'abord assez
froids, vont s'améliorer dans et par la lutte commune.
F.O. e C.F.D.T., la C.G.T. (non d'ailleurs sans réticences)
acceptaront plus tard une collaboration qui culminera dans
la parricipation étudiante à partir du 30 mai au Comité
CentreI de Grève. Avant cette date, quand Sud-Aviation
déclenche une grève sauvage le 14 mai, les étudiants
accourent pour apporter un soutien moral et matériel
(argent, couvertures prises dans les Cités Universitaires).
Ils sort partout pour renforcer les piquets de grève; ils
défendent avec les camionneurs les barrages routiers
(cf. l'article « Vers l'auto-défense >>}.
percutent à Nantes. Le 7 mai, étudiants et professeurs
comfnuncent une grève universitaire en liaison avec le
mouvement national. Le 8 mai, ils participent à la manifes-
tation ouvrière et paysanne par solidarité. Il faut dire que
les ccntacts avec les syndicats ouvriers, d'abord assez
froids, vont s'améliorer dans et par la lutte commune.
F.O. e C.F.D.T., la C.G.T. (non d'ailleurs sans réticences)
acceptaront plus tard une collaboration qui culminera dans
la parricipation étudiante à partir du 30 mai au Comité
CentreI de Grève. Avant cette date, quand Sud-Aviation
déclenche une grève sauvage le 14 mai, les étudiants
accourent pour apporter un soutien moral et matériel
(argent, couvertures prises dans les Cités Universitaires).
Ils sort partout pour renforcer les piquets de grève; ils
défendent avec les camionneurs les barrages routiers
(cf. l'article « Vers l'auto-défense >>}.
12
Grâce au dynamisme de leur lutte, les étudiants ralient
de nouvelles troupes : les facultés conservatrices (Droit,
Pharmacie, Médecine) écœurées par les violences des
flics se jettent dans la mêlée. En Droit, ils refusent les
examens et proclament leur autonomie. Les lycéens sui-
vent aussi à partir du 11 mai lorsqu'ils envahissent avec
les étudiants la gare de Nantes. Ils constituent des Co-
mités d'Action Lycéens et seront désormais partie pre-
nante dans toutes les actions.
de nouvelles troupes : les facultés conservatrices (Droit,
Pharmacie, Médecine) écœurées par les violences des
flics se jettent dans la mêlée. En Droit, ils refusent les
examens et proclament leur autonomie. Les lycéens sui-
vent aussi à partir du 11 mai lorsqu'ils envahissent avec
les étudiants la gare de Nantes. Ils constituent des Co-
mités d'Action Lycéens et seront désormais partie pre-
nante dans toutes les actions.
Surtout les étudiants — et tous les jeunes avec eux —
imposent la légitimité et l'efficacité de formes d'action
plus radicales. Après les incidents du 14 février, des sanc-
tions avaient été prises par le rectorat ; la subvention
de 10.000 francs avait été supprimée. Pétitions et protes-
tations n'avaient rien changé. Au contraire, lorsqu'après la
manifestation unitaire du 13 mai les étudiants et ouvriers
se bagarrent à la Préfecture, ils obtiendront satisfaction
sur ces deux points en montrant leur force et leur réso-
lution. Même les plus" activistes ne prêchent par la vio-
lence pour la violence ; mais ils ont constaté, comme
d'ailleurs les paysans, que l'autoritarisme du régime ac-
tuel ne laissait pas d'autre issue que la violence dans les
rues pour se faire entendre.
imposent la légitimité et l'efficacité de formes d'action
plus radicales. Après les incidents du 14 février, des sanc-
tions avaient été prises par le rectorat ; la subvention
de 10.000 francs avait été supprimée. Pétitions et protes-
tations n'avaient rien changé. Au contraire, lorsqu'après la
manifestation unitaire du 13 mai les étudiants et ouvriers
se bagarrent à la Préfecture, ils obtiendront satisfaction
sur ces deux points en montrant leur force et leur réso-
lution. Même les plus" activistes ne prêchent par la vio-
lence pour la violence ; mais ils ont constaté, comme
d'ailleurs les paysans, que l'autoritarisme du régime ac-
tuel ne laissait pas d'autre issue que la violence dans les
rues pour se faire entendre.
D'autre part, la Faculté des Lettres a pris une initiative
intéressante en organisant depuis dix jours des discus-
sions sur l'école libre. L'enseignement catholique touche
50 % des élèves scolarisés avant le baccalauréat. Or pour
la première fois le problème a été abordé de front par
les enseignants privés et publics grâce au climat général
de révolution culturelle. Un pas décisif a donc été franchi,
en plein pays chouan, vers l'unification de l'enseignement.
intéressante en organisant depuis dix jours des discus-
sions sur l'école libre. L'enseignement catholique touche
50 % des élèves scolarisés avant le baccalauréat. Or pour
la première fois le problème a été abordé de front par
les enseignants privés et publics grâce au climat général
de révolution culturelle. Un pas décisif a donc été franchi,
en plein pays chouan, vers l'unification de l'enseignement.
RACKET INDUSTRIEL DANS LES CAMPAGNES
DE LOIRE-ATLANTIQUE
DE LOIRE-ATLANTIQUE
Soutien actif et politique
à la grève des travailleurs
à la grève des travailleurs
Un tract du 27 Mai 1968 du Centre Départemental des
Jeunes Agriculteurs — C.D.J.A. —, adressé aux agricul-
teurs de Loire-Atlantique et distribué par les chauffeurs
des camions de ramassage du lait, débute ainsi :
Jeunes Agriculteurs — C.D.J.A. —, adressé aux agricul-
teurs de Loire-Atlantique et distribué par les chauffeurs
des camions de ramassage du lait, débute ainsi :
« Depuis le 13 Mai, les revendications des étu-
diants, des enseignants, des ouvriers, et des agri-
culteurs, ne sont pas sans nous poser des ques-
tions. Chaque catégorie professionnelle demande
des conditions de vie meilleures et plus de respon-
sabilités dans l'ensemble des activités économi-
ques, scolaires ou sociales.
diants, des enseignants, des ouvriers, et des agri-
culteurs, ne sont pas sans nous poser des ques-
tions. Chaque catégorie professionnelle demande
des conditions de vie meilleures et plus de respon-
sabilités dans l'ensemble des activités économi-
ques, scolaires ou sociales.
« Cette vague de revendications et de contesta-
tions provoque des explosions de violences décon-
certantes et regrettables. Cependant, quelque soit
notre opinion personnelle, nous ne pouvons pas
rester insensibles devant les difficultés que ren-
contrent certaines familles. Il s'agit simplement,
comme le soulignent par ailleurs diverses person-
nalités, de solidarité humaine.
tions provoque des explosions de violences décon-
certantes et regrettables. Cependant, quelque soit
notre opinion personnelle, nous ne pouvons pas
rester insensibles devant les difficultés que ren-
contrent certaines familles. Il s'agit simplement,
comme le soulignent par ailleurs diverses person-
nalités, de solidarité humaine.
« Du côté des ouvriers, cette solidarité a déjà
joué. Alors que toute l'économie du pays est blo-
quée, les agriculteurs n'ont subi que le minimum
de perte de produits et ceci, grâce à :
joué. Alors que toute l'économie du pays est blo-
quée, les agriculteurs n'ont subi que le minimum
de perte de produits et ceci, grâce à :
Grâce à l'action, les divisions groupusculaires entre étu-
diants de gauche sont passées au second plan. Paysans
et ouvriers sont venus dans les facultés en curieux, certes,
mais la curiosité peut être un commencement vers une
ouverture vraiment populaire des universités. Actuelle-
ment les étudiants luttent sur deux fronts :
diants de gauche sont passées au second plan. Paysans
et ouvriers sont venus dans les facultés en curieux, certes,
mais la curiosité peut être un commencement vers une
ouverture vraiment populaire des universités. Actuelle-
ment les étudiants luttent sur deux fronts :
— A l'intérieur, ils cherchent à empêcher une récupé-
ration réformiste. Certains étudiants ne voient pas la
profonde remise en cause actuelle : absurdité des exa-
mens en tant que tels, caractère anti-démocratique de la
sélection, isolement des études par rapport aux problèmes
de la vie réelle. Au lieu de chercher des solutions en
liaison avec les ouvriers et paysans, ils ne cherchent que
des réaménagements de détail ou l'acceptation des volon-
tés gaullistes du V' Plan.
ration réformiste. Certains étudiants ne voient pas la
profonde remise en cause actuelle : absurdité des exa-
mens en tant que tels, caractère anti-démocratique de la
sélection, isolement des études par rapport aux problèmes
de la vie réelle. Au lieu de chercher des solutions en
liaison avec les ouvriers et paysans, ils ne cherchent que
des réaménagements de détail ou l'acceptation des volon-
tés gaullistes du V' Plan.
— A l'extérieur, ils participent activement à la grève
et envisagent déjà, pour le futur, la mise sur pied d'une
Université Populaire. Dans toutes leurs manifestations des
banderoles exigeaient l'ouverture des restaurants et Cités
Universitaires, bon marché, à tous les jeunes travailleurs.
Des contacts sont pris avec les syndicats agricoles pour
que la formation professionnelle nécessaire à la promo-
tion des paysans prolétarisés se fasse en liaison avec les
facultés.
et envisagent déjà, pour le futur, la mise sur pied d'une
Université Populaire. Dans toutes leurs manifestations des
banderoles exigeaient l'ouverture des restaurants et Cités
Universitaires, bon marché, à tous les jeunes travailleurs.
Des contacts sont pris avec les syndicats agricoles pour
que la formation professionnelle nécessaire à la promo-
tion des paysans prolétarisés se fasse en liaison avec les
facultés.
Il y a six mois tout le monde disait : « Vous les étu-
diants vous critiquez tout, vous voulez tout détruire, mais
vous ne savez pas quoi mettre à la place. Ce sera le
chaos ! »
diants vous critiquez tout, vous voulez tout détruire, mais
vous ne savez pas quoi mettre à la place. Ce sera le
chaos ! »
Aujourd'hui au cours de la lutte, des crèches ont été
improvisés dans toutes les Facultés et plus généralement
des nouvelles formes d'organisation sont nées.
improvisés dans toutes les Facultés et plus généralement
des nouvelles formes d'organisation sont nées.
C'est cette confiance dans la vertu créatrice du mouve-
ment de lutte en lui-même, qui reste le grand apport de
l'agitation étudiante.
ment de lutte en lui-même, qui reste le grand apport de
l'agitation étudiante.
1) La continuité du ramassage du lait.
2) La collecte et la vente de la viande.
3) L'approvisionnement des usines en aliment du
bétail, pour les élevages.
bétail, pour les élevages.
4) L'approvisionnement en carburant pour le trans-
port des marchandises citées ci-dessus. •>
port des marchandises citées ci-dessus. •>
Lambert, responsable syndical du C.D.J.A., chez qui nous
nous trouvons, nous fait lire ces lignes et ajoute :
nous trouvons, nous fait lire ces lignes et ajoute :
— slous jouons sur les deux tableaux, politique et sen-
timental — entendez, du strict point de vue de la solida-
rité humaine — car il ne faut pas oublier qu'en 1936.
50.00C à 70.000 paysans, en chemise verte, pour la plupart
fermiers ou métayers de grands domaines, manifestaient
à Nartes contre le Front Populaire, pour répondre à l'ap-
pel d3 leurs hobereaux réactionnaires. Pourtant, il y a
seulement quelques jours, 5.000 à 6.000 paysans, montés
sur leurs tracteurs, défilaient à Nantes avec les ouvriers
et le: étudiants, et qui plus est, sous les applaudisse-
ments, prenaient la tête du cortège.
timental — entendez, du strict point de vue de la solida-
rité humaine — car il ne faut pas oublier qu'en 1936.
50.00C à 70.000 paysans, en chemise verte, pour la plupart
fermiers ou métayers de grands domaines, manifestaient
à Nartes contre le Front Populaire, pour répondre à l'ap-
pel d3 leurs hobereaux réactionnaires. Pourtant, il y a
seulement quelques jours, 5.000 à 6.000 paysans, montés
sur leurs tracteurs, défilaient à Nantes avec les ouvriers
et le: étudiants, et qui plus est, sous les applaudisse-
ments, prenaient la tête du cortège.
Le tracteur de tête portait un drapeau rouge, et une
banderole avec une inscription demandant l'abolition de la
sociélé capitaliste ; ni le drapeau rouge, ni la banderole
n'avaisnt été prêtés par les organisations ouvrières et étu-
diantes.
banderole avec une inscription demandant l'abolition de la
sociélé capitaliste ; ni le drapeau rouge, ni la banderole
n'avaisnt été prêtés par les organisations ouvrières et étu-
diantes.
Les délégués paysans avaient au contraire, demandé aux
organ sateurs ouvriers et étudiants de ne pas multiplier
outrarcièrement les drapeaux rouges et les mots d'ordre
révolutionnaire car « ils ne font pas bon ménage avec
les psysans ».
organ sateurs ouvriers et étudiants de ne pas multiplier
outrarcièrement les drapeaux rouges et les mots d'ordre
révolutionnaire car « ils ne font pas bon ménage avec
les psysans ».
L'étDnnement fut donc général quand l'un des convois
de trjcteurs parvint à la place Royale à Nantes, drapeau
rouge en tête. Lambert, visiblement très satisfait, ajoute :
de trjcteurs parvint à la place Royale à Nantes, drapeau
rouge en tête. Lambert, visiblement très satisfait, ajoute :
— On n'aurait pas pu le leur imposer, il fallait que ça
vienne d'eux.
vienne d'eux.
Dans cette période d'effervescence révolutionnaire, cer-
tains pourraient croire que les paysans prenaient opportu-
nément le drapeau des luttes révolutionnaires et ouvrières,
se mettaient dans le vent, en quelque sorte, espérant
ainsi sauvegarder leurs exploitations familiales, suivant le
mot d'ordre du M.O.D.E.F. et émanant du Parti Commu-
niste Français.
tains pourraient croire que les paysans prenaient opportu-
nément le drapeau des luttes révolutionnaires et ouvrières,
se mettaient dans le vent, en quelque sorte, espérant
ainsi sauvegarder leurs exploitations familiales, suivant le
mot d'ordre du M.O.D.E.F. et émanant du Parti Commu-
niste Français.
Mais chez Lambert, ancien secrétaire national de la
J.A.C., un autre paysan est attablé, silencieux et légère-
ment soupçonneux jusqu'à présent, il relance la conversa-
tion par une affirmation que nous pensions impossible dans
ia bouche d'un paysan français :
J.A.C., un autre paysan est attablé, silencieux et légère-
ment soupçonneux jusqu'à présent, il relance la conversa-
tion par une affirmation que nous pensions impossible dans
ia bouche d'un paysan français :
— De toutes façons, il faut nationaliser la terre, le Parti
Communiste en est encore à la défense de la petite pro-
priété, et nous, nous savons depuis longtemps que du
strict point de vue économique,, c'est une erreur; sans
parler de l'erreur politique qu'elle représente pour un
Parti Socialiste.
Communiste en est encore à la défense de la petite pro-
priété, et nous, nous savons depuis longtemps que du
strict point de vue économique,, c'est une erreur; sans
parler de l'erreur politique qu'elle représente pour un
Parti Socialiste.
Lambert précise :
— En effet, la terre est un outil de travail pour le
paysan. La posséder en tant que propriété privée est une
charge financière incroyable. Il faut d'abord l'acheter, c'est
à-dire emprunter de l'argent sur 30 ou 35 ans, s'endetter
pour la vie en somme. Les enfants, au moment de l'héri-
tage doivent payer les droits de sucession, et celui qui
garde la terre doit racheter leurs parts à ses frères et
sœurs. En clair, à chaque génération on rachète la terre,
c'est insoutenable économiquement. Pour racheter la tota-
lité des terres en France, il faudrait investir 6 milliards
de nouveaux francs environ.
paysan. La posséder en tant que propriété privée est une
charge financière incroyable. Il faut d'abord l'acheter, c'est
à-dire emprunter de l'argent sur 30 ou 35 ans, s'endetter
pour la vie en somme. Les enfants, au moment de l'héri-
tage doivent payer les droits de sucession, et celui qui
garde la terre doit racheter leurs parts à ses frères et
sœurs. En clair, à chaque génération on rachète la terre,
c'est insoutenable économiquement. Pour racheter la tota-
lité des terres en France, il faudrait investir 6 milliards
de nouveaux francs environ.
Nous nous regardons car si la démarche intellectuelle
nous paraît irréfutable, nous envisageons difficilement ce
rachat général des terres, qui nous semble utopique si le
problème du renversement des structures de la société
capitaliste n'est pas posé auparavant. Lambert nous mon-
tre un rapport d'orientation du C.N.J.A. du 17 avril 1968
dans lequel on peut lire : « II ne sert à rien aux habitants
de l'Ouest et aux agriculteurs morbihannais en particu-
lier, de réclamer bien haut, et de revendiquer l'application
d'une vraie politique socialiste (au vrai sens du terme),
si, à l'heure du choix, ils mettent leur confiance dans des
personnes et des systèmes qui y sont fondamentalement
opposés. Il faudra bien qu'un jour les agriculteurs soient
logiques avec eux-mêmes et mettent leurs bulletins de
vote en accord avec leurs revendications. »
nous paraît irréfutable, nous envisageons difficilement ce
rachat général des terres, qui nous semble utopique si le
problème du renversement des structures de la société
capitaliste n'est pas posé auparavant. Lambert nous mon-
tre un rapport d'orientation du C.N.J.A. du 17 avril 1968
dans lequel on peut lire : « II ne sert à rien aux habitants
de l'Ouest et aux agriculteurs morbihannais en particu-
lier, de réclamer bien haut, et de revendiquer l'application
d'une vraie politique socialiste (au vrai sens du terme),
si, à l'heure du choix, ils mettent leur confiance dans des
personnes et des systèmes qui y sont fondamentalement
opposés. Il faudra bien qu'un jour les agriculteurs soient
logiques avec eux-mêmes et mettent leurs bulletins de
vote en accord avec leurs revendications. »
Pierre Carreau, paysan, fermier de la terre qu'il cultive,
rappelle à Lambert que la propriété qu'il exploite a été
récemment mise en vente par le propriétaire et qu'il s'est
refusé à l'acheter, bien que jouissant du droit de pré-
emption que lui assurait la S.A.F.E.R. : « Je ne vais pas
me mettre une dette de trente ans sur le dos, pour pos-
séder un outil de travail que mes enfants devront racheter
tout de même. »
rappelle à Lambert que la propriété qu'il exploite a été
récemment mise en vente par le propriétaire et qu'il s'est
refusé à l'acheter, bien que jouissant du droit de pré-
emption que lui assurait la S.A.F.E.R. : « Je ne vais pas
me mettre une dette de trente ans sur le dos, pour pos-
séder un outil de travail que mes enfants devront racheter
tout de même. »
— A travers les S.A.F.E.R., nous pourrions commencer
à peser sur les structures actuelles de la propriété fon-
cière dans les campagnes, assure Lambert. En effet, il suf-
firait que la S.A.F.E.R. soit autorisée (en échange du droit
de préemption que lui abandonneraient les paysans qui en
disposent) à racheter les terres (y compris en payant les
droits de succession et le dédommagement des héritiers
dans le cas d'héritage). Ensuite la S.A.F.E.R. établirait un
contrat de location en faveur de celui qui lui aurait aban-
donné son droit de préemption. Ce contrat serait valable
à peser sur les structures actuelles de la propriété fon-
cière dans les campagnes, assure Lambert. En effet, il suf-
firait que la S.A.F.E.R. soit autorisée (en échange du droit
de préemption que lui abandonneraient les paysans qui en
disposent) à racheter les terres (y compris en payant les
droits de succession et le dédommagement des héritiers
dans le cas d'héritage). Ensuite la S.A.F.E.R. établirait un
contrat de location en faveur de celui qui lui aurait aban-
donné son droit de préemption. Ce contrat serait valable
jusqu'à l'âge de la retraite ; de plus, le bénéficiaire se ver-
rait allouer une somme équivalente à la valeur de la pro-
priété qu'il serait tenu d'investir pour la modernisation de
son exploitation. Ces investissements ne pourraient évi-
demment pas être laissés à l'appréciation de chacun ; il
sérail nécessaire de prévoir un plan général de mise en
valeu- de l'agriculture qui aurait pour effet immédiat de
rationaliser la production agricole en évitant bon nombre
de masures de force.
rait allouer une somme équivalente à la valeur de la pro-
priété qu'il serait tenu d'investir pour la modernisation de
son exploitation. Ces investissements ne pourraient évi-
demment pas être laissés à l'appréciation de chacun ; il
sérail nécessaire de prévoir un plan général de mise en
valeu- de l'agriculture qui aurait pour effet immédiat de
rationaliser la production agricole en évitant bon nombre
de masures de force.
« En une génération le visage traditionnel de l'agricul-
ture française serait changé, et le processus de collecti-
visation amorcé de fait. Le travail collectif, autour d'ins-
tallat onscollectives, permettra l'urbanisation des campa-
gnes. »
ture française serait changé, et le processus de collecti-
visation amorcé de fait. Le travail collectif, autour d'ins-
tallat onscollectives, permettra l'urbanisation des campa-
gnes. »
Lambert débouche une autre bouteille de vin blanc ; ce
vin blanc de la région un peu sec, un peu acide, dont on
peut contester le degré : 9,5°. La conversation reprend à
propos de la solidarité ouvriers-paysans-étudiants en Loire-
Atlantique, car nous venons de lire dans le tract cité plus
haut les phrases suivantes :
vin blanc de la région un peu sec, un peu acide, dont on
peut contester le degré : 9,5°. La conversation reprend à
propos de la solidarité ouvriers-paysans-étudiants en Loire-
Atlantique, car nous venons de lire dans le tract cité plus
haut les phrases suivantes :
« Afin de gêner le moins possible la population, les ou-
vrier:; ont continué de nous fournir de l'électricité. Ils ont
main anu les services urgents (ex. santé).
vrier:; ont continué de nous fournir de l'électricité. Ils ont
main anu les services urgents (ex. santé).
Mais la situation actuelle entraîne des sacrifices très
impo-tants pour de nombreuses familles aux bas salaires.
Certaines n'ont plus de quoi s'approvisionner en nourri-
ture.
impo-tants pour de nombreuses familles aux bas salaires.
Certaines n'ont plus de quoi s'approvisionner en nourri-
ture.
Puisque les ouvriers font le maximum pour limiter les
pertes de nos produits, n'avons-nous pas le devoir de les
aider ? Ne pourrions-nous pas par exemple, donner quel-
ques produits de consommation, provenant de nos exploi-
tations : pommes de terre, carottes, fruits, œufs...
pertes de nos produits, n'avons-nous pas le devoir de les
aider ? Ne pourrions-nous pas par exemple, donner quel-
ques produits de consommation, provenant de nos exploi-
tations : pommes de terre, carottes, fruits, œufs...
Le:; salariés ont déjà perdu plusieurs journées de reve-
nus. Ne serait-il pas possible que nous donnions la va-
leur d'une journée de notre production ? Il s'agit bien
entendu d'un geste laissé à votre appréciation. En cons-
cience, vos responsables syndicaux se devaient de vous
poser le problème.
nus. Ne serait-il pas possible que nous donnions la va-
leur d'une journée de notre production ? Il s'agit bien
entendu d'un geste laissé à votre appréciation. En cons-
cience, vos responsables syndicaux se devaient de vous
poser le problème.
Le ; ouvriers et les agriculteurs, qui doivent se conten-
ter les uns et les autres d'un niveau de vie très faible,
sont en fait solidaires. Nous avons là un moyen d'affir-
mer cette solidarité. »
ter les uns et les autres d'un niveau de vie très faible,
sont en fait solidaires. Nous avons là un moyen d'affir-
mer cette solidarité. »
Es:-ce que par delà la simple solidarité humaine, la
paysannerie se sent de plus en plus engagée aux côtés
des ouvriers dans la lutte des classes ? Nous écoutons
Lambert qui parle de la prolétarisation des petits paysans,
et q ji essaie, de peur que nous ne comprenions pas, de
nous expliquer ce phénomène à l'aide d'un exemple, pris
en Loire-Atlantique.
paysannerie se sent de plus en plus engagée aux côtés
des ouvriers dans la lutte des classes ? Nous écoutons
Lambert qui parle de la prolétarisation des petits paysans,
et q ji essaie, de peur que nous ne comprenions pas, de
nous expliquer ce phénomène à l'aide d'un exemple, pris
en Loire-Atlantique.
L'implantation récente, en Loire-Atlantique, d'usines qui
fabriquent des aliments pour les volailles et le bétail,
oblice les paysans qui, pour continuer à fabriquer des pro-
duit:; d'élevage compétitifs doivent utiliser ces nouvelles
méthodes, à adapter rapidement leurs exploitations agri-
coles traditionnelles. Il s'agit, en effet, de procéder à des
réaménagements très coûteux, car pour être rentables ces
nouvelles méthodes d'élevage doivent être pratiquées sur
une grande échelle. Où le paysan trouverait-il l'argent
nécessaire pour l'installation d'un poulailler rationnel, par
exemple ?
fabriquent des aliments pour les volailles et le bétail,
oblice les paysans qui, pour continuer à fabriquer des pro-
duit:; d'élevage compétitifs doivent utiliser ces nouvelles
méthodes, à adapter rapidement leurs exploitations agri-
coles traditionnelles. Il s'agit, en effet, de procéder à des
réaménagements très coûteux, car pour être rentables ces
nouvelles méthodes d'élevage doivent être pratiquées sur
une grande échelle. Où le paysan trouverait-il l'argent
nécessaire pour l'installation d'un poulailler rationnel, par
exemple ?
Er fait, lorsque les industriels investissent 200.000 ou
300.000 anciens francs dans la construction d'une usine
300.000 anciens francs dans la construction d'une usine
14
d'aliments, les paysans obligés d'utiliser leurs produits
doivent paradoxalement investir 5 ou 6 fois plus, sans
qu'ils soient consultés à aucun moment, ni les organisa-
tions paysannes. Mais les patrons des usines d'aliments
se font un devoir et un plaisir de prêter aux paysans l'ar-
gent nécessaire, à condition qu'ils soient les fournisseurs
exclusifs d'aliments, ainsi que les acheteurs du produit
fini.
doivent paradoxalement investir 5 ou 6 fois plus, sans
qu'ils soient consultés à aucun moment, ni les organisa-
tions paysannes. Mais les patrons des usines d'aliments
se font un devoir et un plaisir de prêter aux paysans l'ar-
gent nécessaire, à condition qu'ils soient les fournisseurs
exclusifs d'aliments, ainsi que les acheteurs du produit
fini.
Assurés de ce double monopole, la pesée sur les prix
de vente des aliments, et sur le prix d'achat du produit
peut s'exercer en toute quiétude. Le paysan veut-il se dé-
gager d'une manière ou d'une autre, les prêteurs exigent
le remboursement immédiat de la dette, car une clause
du contrat de prêt stipule que le remboursement immédiat
du montant total du prêt peut être exigé à tout moment.
Par ailleurs, les sociétés ne consentent des prêts qu'aux
paysans propriétaires de leurs terres, ce qui permet de
mettre une hypothèque sur la terre pour garantir le prêt.
de vente des aliments, et sur le prix d'achat du produit
peut s'exercer en toute quiétude. Le paysan veut-il se dé-
gager d'une manière ou d'une autre, les prêteurs exigent
le remboursement immédiat de la dette, car une clause
du contrat de prêt stipule que le remboursement immédiat
du montant total du prêt peut être exigé à tout moment.
Par ailleurs, les sociétés ne consentent des prêts qu'aux
paysans propriétaires de leurs terres, ce qui permet de
mettre une hypothèque sur la terre pour garantir le prêt.
Exiger le remboursement immédiat du prêt revient en
fait à mettre en vente la terre du récalcitrant et à lui
retirer purement et simplement son outil de travail. Ainsi
réapparaît le problème de la propriété privée de la terre
qui" assure aux usiniers usuriers un moyen de chantege
efficace qui élimine toute entrave à leur entreprise de
racket.
fait à mettre en vente la terre du récalcitrant et à lui
retirer purement et simplement son outil de travail. Ainsi
réapparaît le problème de la propriété privée de la terre
qui" assure aux usiniers usuriers un moyen de chantege
efficace qui élimine toute entrave à leur entreprise de
racket.
La société de rachat du produit terminé (volaille ou
bétail de boucherie) achète au cours qu'elle fixe elle-
même, ne laissant qu'une faible marge bénéficiaire, ou pas
du tout suivant les circonstances. Il est bien certain que
seule la petite paysannerie dont le revenu mensuel moyen
en Loire-Atlantique ne dépasse pas 50.000 anciens francs,
supporte cette dictature économique. En effet, la paysan-
nerie riche peut s'autofinancer pour la construction de
nouvelles installations et ne pas dépendre des prêteurs
usiniers.
bétail de boucherie) achète au cours qu'elle fixe elle-
même, ne laissant qu'une faible marge bénéficiaire, ou pas
du tout suivant les circonstances. Il est bien certain que
seule la petite paysannerie dont le revenu mensuel moyen
en Loire-Atlantique ne dépasse pas 50.000 anciens francs,
supporte cette dictature économique. En effet, la paysan-
nerie riche peut s'autofinancer pour la construction de
nouvelles installations et ne pas dépendre des prêteurs
usiniers.
La petite paysannerie perd en fait la liberté d'utilisa-
tion de ses moyens de production artisanaux, et son
salaire est fixé en somme, par les industriels-prêteurs,
mais à la différence des ouvriers, les producteurs paysans
ne sont pas rassemblés en vastes ensembles, ils restent
dispersés. Cependant leur prolétarisation s'accentue, allant
de pair avec une prise de conscience progressive. L'obsta-
cle majeur à une prise de conscience collective des petits
paysans reste leur dissémination en multiples unités de
production.
tion de ses moyens de production artisanaux, et son
salaire est fixé en somme, par les industriels-prêteurs,
mais à la différence des ouvriers, les producteurs paysans
ne sont pas rassemblés en vastes ensembles, ils restent
dispersés. Cependant leur prolétarisation s'accentue, allant
de pair avec une prise de conscience progressive. L'obsta-
cle majeur à une prise de conscience collective des petits
paysans reste leur dissémination en multiples unités de
production.
Le syndicat paysan doit donc avoir comme objectif pre-
mier la levée de la tyrannie économique des industriels-
prêteurs. Il s'agit d'organiser la production à travers une
seule coopérative de vente-cantonale ou régionale — qui
empêche que chaque petit producteur se retrouve seul
face aux racketteurs. La coopérative disposant du mono-
pole de la vente du produit fini, possède donc d'un moyen
de rétorsion, qui lui permet de peser sur l'établissement
du cours d'achat en bloquant la transaction ou en la diffé-
rant.
mier la levée de la tyrannie économique des industriels-
prêteurs. Il s'agit d'organiser la production à travers une
seule coopérative de vente-cantonale ou régionale — qui
empêche que chaque petit producteur se retrouve seul
face aux racketteurs. La coopérative disposant du mono-
pole de la vente du produit fini, possède donc d'un moyen
de rétorsion, qui lui permet de peser sur l'établissement
du cours d'achat en bloquant la transaction ou en la diffé-
rant.
Cependant ce moyen peut se révéler trop peu efficace.
- Alors, dit Lambert, les syndicats appellent leurs adhé-
rents pour une manifestation à l'intérieur de l'usine, où
quelques coups de masse bien appliqués sur les machines
rendent l'usine inutilisable pour un temps. C'est à ce
moment qu'apparaît aux manifestants paysans la nécessité
de l'action conjointe avec les ouvriers qui travaillent dans
l'usine ».
- Alors, dit Lambert, les syndicats appellent leurs adhé-
rents pour une manifestation à l'intérieur de l'usine, où
quelques coups de masse bien appliqués sur les machines
rendent l'usine inutilisable pour un temps. C'est à ce
moment qu'apparaît aux manifestants paysans la nécessité
de l'action conjointe avec les ouvriers qui travaillent dans
l'usine ».
Ainsi, en devenant de plus en plus dépendant de la
production industrielle, les paysans découvrent que leurs
production industrielle, les paysans découvrent que leurs
revendications sont liées à celles des ouvriers. D'ailleurs
le rapport du C.N.J.A. du 17 avril 1968 contient un para-
graphe sur « Les relations Ouvriers-Paysans »...
le rapport du C.N.J.A. du 17 avril 1968 contient un para-
graphe sur « Les relations Ouvriers-Paysans »...
« Si nous souhaitons que notre région s'indus-
trialise, il est aussi nécessaire que nous prenions
les moyens adéquats pour y parvenir. Si le syndi-
calisme « Paysan » se sent incapable d'y parvenir
seul, et il n'y arrivera pas, son devoir est de se
liguer avec d'autres forces ayant les mêmes objec-
tifs.
trialise, il est aussi nécessaire que nous prenions
les moyens adéquats pour y parvenir. Si le syndi-
calisme « Paysan » se sent incapable d'y parvenir
seul, et il n'y arrivera pas, son devoir est de se
liguer avec d'autres forces ayant les mêmes objec-
tifs.
Un sérieux travail d'approche a été réalisé au
stade régional entre les centrales ouvrières et le
syndicalisme agricole F.R.S.E.A. et C.R.J.A. Dans le
Morbihan où en sommes nous ? Certes, quelques
rencontres lors des coups durs, nous permettent
d'échanger nos points de vue. Mais jusqu'à ce jour
cela n'a jamais été loin car il n'a jamais été défini
de politique commune. Nous nous cantonons au
coup sur coup, jamais avant les rencontres, entre
responsables d'organisations, il n'y a eu un groupe
ou une commission chargée de préparer le terrain !
stade régional entre les centrales ouvrières et le
syndicalisme agricole F.R.S.E.A. et C.R.J.A. Dans le
Morbihan où en sommes nous ? Certes, quelques
rencontres lors des coups durs, nous permettent
d'échanger nos points de vue. Mais jusqu'à ce jour
cela n'a jamais été loin car il n'a jamais été défini
de politique commune. Nous nous cantonons au
coup sur coup, jamais avant les rencontres, entre
responsables d'organisations, il n'y a eu un groupe
ou une commission chargée de préparer le terrain !
C'est pourquoi, nous proposons la création d'un
bureau commun départemental entre :
bureau commun départemental entre :
— les Centrales Ouvrières et les Organisations
syndicales Agricoles qui au préalable laisseraient de
côté pour la circonstance, les questions propres à
telle ou telle profession, mais s'attelleraient en pre-
mier, aux questions d'intérêt général :
syndicales Agricoles qui au préalable laisseraient de
côté pour la circonstance, les questions propres à
telle ou telle profession, mais s'attelleraient en pre-
mier, aux questions d'intérêt général :
— La défense des droits de l'homme
— La démocratisation de l'enseignement
— Le droit au travail (emploi)
— La liberté syndicale
— Le développement régional.
L'avenir de la Région, dépend pour beaucoup du
travail en commun qui sera fait entre les diverses
forces syndicales ouvrières et paysannes.
travail en commun qui sera fait entre les diverses
forces syndicales ouvrières et paysannes.
Remarques : Le syndicalisme agricole doit se mé-
fier d'une certaine tendance, se trouvant surtout
dans le Bassin Parisien qui tend à dire qu'il voit le
développement régional uniquement à travers l'in-
dustrialisation, évitant par là de poser le problème
de la régionalisation des crédits au sein de l'agri-
culture !
fier d'une certaine tendance, se trouvant surtout
dans le Bassin Parisien qui tend à dire qu'il voit le
développement régional uniquement à travers l'in-
dustrialisation, évitant par là de poser le problème
de la régionalisation des crédits au sein de l'agri-
culture !
La solidarité des paysans avec les ouvriers, en Loire-
Atlani ique, dépasse donc la simple solidarité humaine pour
devenir une contestation de la société sur une base poli-
tique révolutionnaire. C'est l'envers du poujadisme qui
accusait seulement les circuits de distribution, les impôts,
et les intermédiaires et les rendaient responsables de la
prolétarisation des petits commerçants et des paysans.
Atlani ique, dépasse donc la simple solidarité humaine pour
devenir une contestation de la société sur une base poli-
tique révolutionnaire. C'est l'envers du poujadisme qui
accusait seulement les circuits de distribution, les impôts,
et les intermédiaires et les rendaient responsables de la
prolétarisation des petits commerçants et des paysans.
Lambert se défie aussi des pêcheurs en eau trouble qui
vont enter de prêcher le retour aux sources, aux vieilles
valeurs, et le refus de la société industrielle.
vont enter de prêcher le retour aux sources, aux vieilles
valeurs, et le refus de la société industrielle.
« Dans la société industrielle, c'est la place des
paysans qu'il faut préparer et non leur sacrifice,
c'est de la démagogie réactionnaire qu'il faut les
préserver en leur montrant quels sont leurs vrais
alliés pour renverser cette société d'oppression. »
paysans qu'il faut préparer et non leur sacrifice,
c'est de la démagogie réactionnaire qu'il faut les
préserver en leur montrant quels sont leurs vrais
alliés pour renverser cette société d'oppression. »
15
Ces affiches sont réalisées par l'Atelier Populaire de l'Ecole des Beaux-Arts solidaire des travailleurs en lutte.
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JEUOi 6 -WIN «POT IE BRUN
LA GRÏVE CONTINUE
SOLIDARITE
JUiOUA LAVICT01RE BE
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TRAVAILLEURS ACTIFS
ETCHOMEURS
TOUS UNIS
TOUS UNIS
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CHAUFFEURS
DE TAXIS I
la lutte
continue
continue
Directeur de la publication : D. ANSELME.
Gérant : Mme Marcelle FOURNIE.
Impr. BERESNIAK, 18-20, rue du Fg-da^TempIe, Paris-11"
Impr. BERESNIAK, 18-20, rue du Fg-da^TempIe, Paris-11"
CST A CFOT
SOUTENEZ
JULES».
GREVISTES
Category
Title
Cahiers de mai
Issue
no.1
Date
15/06/1968
Keywords
Publication information
no.1