L'Autogestion L'État et la Révolution (Supplément Noir et Rouge no.41)
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L'AUTOCESTIO
SOMMAIRE :
L'AUTOGESTION, L'ETAT ET LA REVOLUTION p. 3
ITALIE p, 5
— Les occupations d'usines en septembre 1920
— La polémique sur les conseils
"— La contribution des anarchistes
ESPAGNE p. 8
— La collectivisation dans les usines et les campagnes
— Les collectivités anarchistes espagnoles
L'AUTOGESTION EN YOUGOSLAVIE
L'AUTOGESTION EN ALGERIE p. 28
p. 20
Comme nous l'avons fait pour une brochure consacrée à l'Espagne,
Informations et Correspondance Ouvrières et Noir et Rouge présentent
aujourd'hui deux textes, l'un consacré à la « (jrève généralisée en
France : mai-juin 68 », l'autre à un expvosé historique et critique de
l'autogestion.
Informations et Correspondance Ouvrières et Noir et Rouge présentent
aujourd'hui deux textes, l'un consacré à la « (jrève généralisée en
France : mai-juin 68 », l'autre à un expvosé historique et critique de
l'autogestion.
« L'autogestion » est en train de devenir un vhème aussi galvaudé
que le « socialisme », le « communisme » et le reste. Ces mots gar-
dent pourtant toute leur valeur car les expériences passées et ^celles
que nous venons de vivre permettent de montrer c ue la lutte de classe
a pour aboutissement naturel l'organisation de la production par les
producteurs eux-mêmes.
que le « socialisme », le « communisme » et le reste. Ces mots gar-
dent pourtant toute leur valeur car les expériences passées et ^celles
que nous venons de vivre permettent de montrer c ue la lutte de classe
a pour aboutissement naturel l'organisation de la production par les
producteurs eux-mêmes.
L'Autogestion, l'Etat et la Révolution
Lorsque Séguy, patron de la C.G.T., déclarait
en mai 1968 : « L'autogestion, c'est une formule
creuse » (le slogan sera repris par tout les bu-
reaucrates) tout le monde peut voir qu'il a été
obligé de prendre position sur une question dont
il aurait préféré ne pas parler. Il est obligé,
parce que l'autogestion est, si on peut dire,
dans l'air.
en mai 1968 : « L'autogestion, c'est une formule
creuse » (le slogan sera repris par tout les bu-
reaucrates) tout le monde peut voir qu'il a été
obligé de prendre position sur une question dont
il aurait préféré ne pas parler. Il est obligé,
parce que l'autogestion est, si on peut dire,
dans l'air.
Les étudiants révolutionnaires, en démarrant
le combat, ont lié l'action directe (barricades et
.occupation des facultés) à la revendication d'une
prise directe sur leur travail (des occupations
on passe à la demande d'autogestion des fa-
cultés par ceux qui y travaillent). En faisant
cela, ils reprenaient les tactiques et le mot
d'ordre qu'avaient eu les travailleurs voilà pas
mal d'année, et qui avaient été oubliés par
beaucoup.
le combat, ont lié l'action directe (barricades et
.occupation des facultés) à la revendication d'une
prise directe sur leur travail (des occupations
on passe à la demande d'autogestion des fa-
cultés par ceux qui y travaillent). En faisant
cela, ils reprenaient les tactiques et le mot
d'ordre qu'avaient eu les travailleurs voilà pas
mal d'année, et qui avaient été oubliés par
beaucoup.
Mais le mouvement de démocratie directe s'est
prolongé chez les travailleurs aussi, même s'il
a été moins net : Pour l'action directe, c'est assez
net ; « Le pouvoir est dans la rue... A bas l'Etat
policier » n'était pas crié que par des étudiants
(Pompidou répondait : « II n'appartient pas à la
rue de dicter la conduite de l'Etat »). Les occupa-
tions de boîtes ont été faites au départ contre la
volonté de l'appareil syndical, et elles ont souvent
été organisées par l'intermédiaire d'un comité
unitaire de boîte (regroupant syndiqués et « in-
organisés »).
prolongé chez les travailleurs aussi, même s'il
a été moins net : Pour l'action directe, c'est assez
net ; « Le pouvoir est dans la rue... A bas l'Etat
policier » n'était pas crié que par des étudiants
(Pompidou répondait : « II n'appartient pas à la
rue de dicter la conduite de l'Etat »). Les occupa-
tions de boîtes ont été faites au départ contre la
volonté de l'appareil syndical, et elles ont souvent
été organisées par l'intermédiaire d'un comité
unitaire de boîte (regroupant syndiqués et « in-
organisés »).
Cela est assez général ; mais il y a des faits
isolés aussi importants qui font de la grève, une
arme active, et non passive : dans l'imprimerie,
des linos font sauter certains titres de l'Aurore
et sabotent la mise en page ; des rotativistes
refusent de tirer La Nation, le journal de l'U.N.R.;
à la S.N.E.C.M.A. (aviation), la cantine de la
boîte continue à marcher sous la responsabilité
du comité ; le même comité fournit aux grévistes,
en échange de chèques, de l'argent liquide pris
sur la caisse de la boîte ; les agriculteurs de
Marmande, devant la mévente de leurs patates,
les envoient à leur frais à Paris, gare Saint-La-
zare, pour être distribuées gratis à tous les gré-
vistes qui se présenteront.
isolés aussi importants qui font de la grève, une
arme active, et non passive : dans l'imprimerie,
des linos font sauter certains titres de l'Aurore
et sabotent la mise en page ; des rotativistes
refusent de tirer La Nation, le journal de l'U.N.R.;
à la S.N.E.C.M.A. (aviation), la cantine de la
boîte continue à marcher sous la responsabilité
du comité ; le même comité fournit aux grévistes,
en échange de chèques, de l'argent liquide pris
sur la caisse de la boîte ; les agriculteurs de
Marmande, devant la mévente de leurs patates,
les envoient à leur frais à Paris, gare Saint-La-
zare, pour être distribuées gratis à tous les gré-
vistes qui se présenteront.
Ainsi, l'ampleur et la dureté de la grève, qui
désorganise l'économie capitaliste sur laquelle
tous vivaient, oblige certains travailleurs à s'or-
ganiser, par solidarité, sur des bases différentes.
En le faisant, on voit qu'ils s'attaquent : à la
presse telle qu'elle existe, c'est-à-dire contrôlée
par la classe dirigeante ; à l'organisation des
boîtes, dirigées par des membres de la classe
dirigeante ; à la distribution des produits ali-
mentaires, faussée au profit de la classe diri-
geante.
désorganise l'économie capitaliste sur laquelle
tous vivaient, oblige certains travailleurs à s'or-
ganiser, par solidarité, sur des bases différentes.
En le faisant, on voit qu'ils s'attaquent : à la
presse telle qu'elle existe, c'est-à-dire contrôlée
par la classe dirigeante ; à l'organisation des
boîtes, dirigées par des membres de la classe
dirigeante ; à la distribution des produits ali-
mentaires, faussée au profit de la classe diri-
geante.
Ce phénomène de dépassement de la simple
occupation d'usine, vers une organisation de la
vie économique en partant de la base, c'est l'Au-
togestion. Les travailleurs montrent ainsi qu'ils
occupation d'usine, vers une organisation de la
vie économique en partant de la base, c'est l'Au-
togestion. Les travailleurs montrent ainsi qu'ils
sont capables de renplacer le système capita-
liste qu'eux seuJs font marcher.
liste qu'eux seuJs font marcher.
Certes, ce ne sont que des faits isolés. Mais
dans beaucoup de boîtes, la discussion sur le
lieu de travail, c'est déjà de l'autogestion. Dans
les assurances, un tract disant que, comme les
étudiants, les travailleurs de la boîîe avaient dé-
cidé de la gérer eux-mêmes par un conseil, avec
salaire égal pour tous, a connu un succès énor-
me, et pas seulemer.t chez les plus mal payés,
maïs aussi dans des catégories assez spéciali-
sées.
dans beaucoup de boîtes, la discussion sur le
lieu de travail, c'est déjà de l'autogestion. Dans
les assurances, un tract disant que, comme les
étudiants, les travailleurs de la boîîe avaient dé-
cidé de la gérer eux-mêmes par un conseil, avec
salaire égal pour tous, a connu un succès énor-
me, et pas seulemer.t chez les plus mal payés,
maïs aussi dans des catégories assez spéciali-
sées.
Une hirondelle ne fait pas le printemps, mais
quelques-unes l'anncncent. Malgré tout, les tra-
vailleurs ne se sejitont pas encore, même dans
une forte minorité, rrême chez les militants révo-
lutionnaires, capables de prendre en main l'éco-
nomie et de îa réorganiser par la base, gérant
les usines en conse 1s, déléguant des représen-
tants révocables dcns des comités régionaux,
nationaux, internationaux, pour planifier produc-
tion et distribution 3n fonction des intérêts de
tous, et non plus en fonction du bénéfice plus
ou moins intéressant que peut faire tel ou tel
capitaliste dans tel ou tel secteur.
quelques-unes l'anncncent. Malgré tout, les tra-
vailleurs ne se sejitont pas encore, même dans
une forte minorité, rrême chez les militants révo-
lutionnaires, capables de prendre en main l'éco-
nomie et de îa réorganiser par la base, gérant
les usines en conse 1s, déléguant des représen-
tants révocables dcns des comités régionaux,
nationaux, internationaux, pour planifier produc-
tion et distribution 3n fonction des intérêts de
tous, et non plus en fonction du bénéfice plus
ou moins intéressant que peut faire tel ou tel
capitaliste dans tel ou tel secteur.
Ce sentiment d'impuissance e.st normal. Il est
déjà ébranlé. Il disparaîtra à mesure que se ré-
vélera l'incapacité di; la classe dirigeante à faire
face à la crise économique dans laquelle en-
trent tous les pays industrialisés.
déjà ébranlé. Il disparaîtra à mesure que se ré-
vélera l'incapacité di; la classe dirigeante à faire
face à la crise économique dans laquelle en-
trent tous les pays industrialisés.
Si le mouvement de révolte à eu, en France
pour le moment, es caractère de démocratie
directe, c'est justement parce qu'il y a de plus
en plus une méfie tnce envers les appareils.
Même ceux qui voteront pour elle sentent bien
que l'opposition parlementaire de gauche, en
changeant le gouvernement, ne changera pas
grand chose ; Pourquoi?
pour le moment, es caractère de démocratie
directe, c'est justement parce qu'il y a de plus
en plus une méfie tnce envers les appareils.
Même ceux qui voteront pour elle sentent bien
que l'opposition parlementaire de gauche, en
changeant le gouvernement, ne changera pas
grand chose ; Pourquoi?
Avant la grève, u:i spectre hantait l'Europe (et
aussi l'Amérique dv Nord et l'U.R.S.S.), le chô-
mage : en avril, 1963, en France, sur 15 millions
de salariés on coriptait officiellement 460.000
travailleurs qui avaient perdu leur emploi et
n'en retrouvaient pas. Maïs les économistes gou-
vernementaux avouaient qu'il fallait ajouter tous
les jeunes qui ne trouvaient pas de travail en
sortant du. service :nilijaire, les femmes qui ne
trouvaient pas de travail, les travailleurs étran-
gers qu'on renvoie :hez eux ou qui végètent en
nombre indéterminé dans les bidonvilles ; on
refuse de donner ks chiffres.
aussi l'Amérique dv Nord et l'U.R.S.S.), le chô-
mage : en avril, 1963, en France, sur 15 millions
de salariés on coriptait officiellement 460.000
travailleurs qui avaient perdu leur emploi et
n'en retrouvaient pas. Maïs les économistes gou-
vernementaux avouaient qu'il fallait ajouter tous
les jeunes qui ne trouvaient pas de travail en
sortant du. service :nilijaire, les femmes qui ne
trouvaient pas de travail, les travailleurs étran-
gers qu'on renvoie :hez eux ou qui végètent en
nombre indéterminé dans les bidonvilles ; on
refuse de donner ks chiffres.
Les économistes bourgeois s'inquiètent. Les
chômeurs sont trop nombreux, et on prévoit que
leur nombre va coninuer à augmenter régulière-
ment dans les anrées suivantes. Et cela sans
qu'on puisse arrêter le mouvement par le moyen
qu'en employait ju;;qu'ici, l'augmentation de la
production (avec augmentation de la consom-
mation artificielle). En effet, maintenant, avec
chômeurs sont trop nombreux, et on prévoit que
leur nombre va coninuer à augmenter régulière-
ment dans les anrées suivantes. Et cela sans
qu'on puisse arrêter le mouvement par le moyen
qu'en employait ju;;qu'ici, l'augmentation de la
production (avec augmentation de la consom-
mation artificielle). En effet, maintenant, avec
étroite entre eux que les comités de gestion
pourront envisager les problèmes à l'échelle
nationale. Du prochain congrès de l'autogestion
industrielle doit nécessairement sortir un or-
ganisme permanent. »
pourront envisager les problèmes à l'échelle
nationale. Du prochain congrès de l'autogestion
industrielle doit nécessairement sortir un or-
ganisme permanent. »
Un tract signé « Comité de défense des acquis
de la Révolution socialiste » circulant à Alger
dans les jours suivant le 19 juin déclarait :
de la Révolution socialiste » circulant à Alger
dans les jours suivant le 19 juin déclarait :
« On ne peut prétendre construire le socialis-
me en maintenant les privilèges d'une minorité
de bourgeois et de bureaucrates qui tirent leur
opulence de la misère du peuple. Pour réaliser le
socialisme, il faut développer l'autogestion, don-
ner la terre à ceux qui la travaillent, il faut chas-
ser tous les patrons, supprimer tous les privilè-
ges (...). Ouvriers, paysans, pauvres, djounouds,
fonctionnaires :
me en maintenant les privilèges d'une minorité
de bourgeois et de bureaucrates qui tirent leur
opulence de la misère du peuple. Pour réaliser le
socialisme, il faut développer l'autogestion, don-
ner la terre à ceux qui la travaillent, il faut chas-
ser tous les patrons, supprimer tous les privilè-
ges (...). Ouvriers, paysans, pauvres, djounouds,
fonctionnaires :
— organisez le contrôle ouvrier de la produc-
tion capitaliste.
tion capitaliste.
— Empêchez toute atteinte aux Décrets de
mars.
mars.
— Emparez-vous des terres de féodaux et dis-
tribuez-les. »
tribuez-les. »
(Cité par Prioré, « Lutte des classes et syndi-
calisme en Algérie », automne 65).
calisme en Algérie », automne 65).
Mais la critique d'ensemble la plus dure parce
que globale fut celle d'un délégué au con-
grès général des travailleurs de la terre :
que globale fut celle d'un délégué au con-
grès général des travailleurs de la terre :
« Frères, 63 comités de gestion m'ont chargé
de dire que nous sommes encore colonisés par
les bourgeois. »
de dire que nous sommes encore colonisés par
les bourgeois. »
Qui sont ces bourgeois ? Laissons de côté la
petite bourgeoisie pour nous occuper des gros.
Les chiffres sont rares à leur sujet. Chaliand esti-
me que 25.000 gros propriétaires possèdent plus
de 50 ha. Une brochure de l'ORP (La Révolution
socialiste triomphera en Algérie, p. 22) donne
8.500 gros propriétaires de plus de 100 ha pour
2.800.000 ha. Avant l'indépendance il y avait
8.499 propriétaires musulmans (plus de 100 ha)
qui tenaient 1.688.800 ha.
petite bourgeoisie pour nous occuper des gros.
Les chiffres sont rares à leur sujet. Chaliand esti-
me que 25.000 gros propriétaires possèdent plus
de 50 ha. Une brochure de l'ORP (La Révolution
socialiste triomphera en Algérie, p. 22) donne
8.500 gros propriétaires de plus de 100 ha pour
2.800.000 ha. Avant l'indépendance il y avait
8.499 propriétaires musulmans (plus de 100 ha)
qui tenaient 1.688.800 ha.
Dans l'industrie, 7.000 à 8.000 entreprises algé-
riennes emploient une maint-d'œuvre salariée,
extra-familiale (là-dessus il y en a évidemment
de plus ou moins grandes). Le chiffre de 8.000 fa-
milles (sur 10.5 millions d'habitants en 1964) ac-
caparant l'appareil d'Etat et l'armée, avancé par
l'ORP dans sa brochure doit être assez près de la
vérité. D'après la même source ces familles absor-
beraient 35-40 p. 100 du revenu national. Le
chiffre paraît énorme. Pourtant, quand on
voit à la fois la faiblesse du revenu national
(on en enlève évidemment les bénéfices ex-
portés par les capitalistes étrangers), la fai-
blesse de la consommation des paysans et des
chômeurs, et le gaspillage inouï de l'actuelle
classe dirigeante, on se demande si ce chiffre
n'est pas exact (l'armée dépenserait à elle seule
1/3 du budget).
riennes emploient une maint-d'œuvre salariée,
extra-familiale (là-dessus il y en a évidemment
de plus ou moins grandes). Le chiffre de 8.000 fa-
milles (sur 10.5 millions d'habitants en 1964) ac-
caparant l'appareil d'Etat et l'armée, avancé par
l'ORP dans sa brochure doit être assez près de la
vérité. D'après la même source ces familles absor-
beraient 35-40 p. 100 du revenu national. Le
chiffre paraît énorme. Pourtant, quand on
voit à la fois la faiblesse du revenu national
(on en enlève évidemment les bénéfices ex-
portés par les capitalistes étrangers), la fai-
blesse de la consommation des paysans et des
chômeurs, et le gaspillage inouï de l'actuelle
classe dirigeante, on se demande si ce chiffre
n'est pas exact (l'armée dépenserait à elle seule
1/3 du budget).
Il expliquerait que les seuls investissements
en ce moment soient ou directement faits par
l'étranger (cf. U.S.A. pour la SONATRACH) ou
pour l'armée. Pour le reste, les sommes pro-
posées par les budgets disparaissent mysté-
rieusement. Il y a des classes dirigeantes qui
investissement. En Algérie même pas.
en ce moment soient ou directement faits par
l'étranger (cf. U.S.A. pour la SONATRACH) ou
pour l'armée. Pour le reste, les sommes pro-
posées par les budgets disparaissent mysté-
rieusement. Il y a des classes dirigeantes qui
investissement. En Algérie même pas.
Comparons ces chiffres avec ceux donnés par
Chaliand pour l'appareil d'Etat au 1er avril
Chaliand pour l'appareil d'Etat au 1er avril
1963. Il comptait 70.000 personnes dont :
a) 13.729 fonctionnaires français au titre de
la coopératior; ;
la coopératior; ;
b) 22.182 ccdres algériens promus des écoles
d'administratk'n coloniale ;
d'administratk'n coloniale ;
c) 34.097 cadres FLN.
Mais pour la répartition, on avait :
1) cadres d'élaboration et de décision : 43 %
catégories A et B contre 57 % FLN ;
catégories A et B contre 57 % FLN ;
2) cadres do gestion : 77 % catégories A, B,
contre 23 % IT-N ;
contre 23 % IT-N ;
3 cadres subalternes : 15 % catégories A, B,
contre 85 % ]?LN.
contre 85 % ]?LN.
Le pouvoir ie décision et d'exécution apparte-
nait donc à qi.elques FLN, entourés de beaucoup
de bureaucrates professionnels.
nait donc à qi.elques FLN, entourés de beaucoup
de bureaucrates professionnels.
D'ailleurs, l'étiquette FLN est loin de signi-
fier ne serait-ce qu'une vague option révolu-
tionnaire, puîsqu'aux dires des officiels eux-
mêmes, le parti FLN n'existe pas vraiment en-
core. Les FLN des cadres subalternes sont
donc des gers qui sont entrés au parti pour
avoir un poste de gratte-papier.
fier ne serait-ce qu'une vague option révolu-
tionnaire, puîsqu'aux dires des officiels eux-
mêmes, le parti FLN n'existe pas vraiment en-
core. Les FLN des cadres subalternes sont
donc des gers qui sont entrés au parti pour
avoir un poste de gratte-papier.
Pour l'ensemble de la classe dirigeante, Cha-
liand arrivait à 50.000 individus. En tenant
compte des doubles et triples emplois, cela doit
aller et correspondre aux 8.000 familles, si la fa-
mille est envisagée au sens large qu'elle a en
Algérie (et rrême en France chez les diri-
geants !).
liand arrivait à 50.000 individus. En tenant
compte des doubles et triples emplois, cela doit
aller et correspondre aux 8.000 familles, si la fa-
mille est envisagée au sens large qu'elle a en
Algérie (et rrême en France chez les diri-
geants !).
Or, cette classe n'a pas changé, de Ben Bella
à Boumédienne, contrairement à ce que cer-
tains théoriciens voudraient faire croire.
à Boumédienne, contrairement à ce que cer-
tains théoriciens voudraient faire croire.
Un leader trDtskyste, « Abdelkrim » Pablo, pré-
sente ainsi les positions de l'ORP :
sente ainsi les positions de l'ORP :
« D'un très intéressant document programma-
tique de l'OR? qui circule actuellement en Al-
gérie parmi IBS cadres, on dégage clairement
l'impression qae le haut niveau idéologique de
sa direction lui épargnera des erreurs fatales.. >>
tique de l'OR? qui circule actuellement en Al-
gérie parmi IBS cadres, on dégage clairement
l'impression qae le haut niveau idéologique de
sa direction lui épargnera des erreurs fatales.. >>
« La ligne générale des révolutionnaires so-
cialistes vise donc à faire reprendre sa marche
en avant à la Révolution algérienne, menacée de
confiscation, de stagnation, de recul, par des
castes bureaucratiques. Elle vise à défendre
les acquis aussi bien de la Révolution socia-
liste que de la Révolution nationale et démo-
cratique. Avant le 19 juin... le pouvoir, malgré
ses faiblesses, appliquait jusqu'à un certain
point une orientation conforme à ces deux ob-
jectifs.
cialistes vise donc à faire reprendre sa marche
en avant à la Révolution algérienne, menacée de
confiscation, de stagnation, de recul, par des
castes bureaucratiques. Elle vise à défendre
les acquis aussi bien de la Révolution socia-
liste que de la Révolution nationale et démo-
cratique. Avant le 19 juin... le pouvoir, malgré
ses faiblesses, appliquait jusqu'à un certain
point une orientation conforme à ces deux ob-
jectifs.
C'est pourquoi les révolutionnaires socialis-
tes dans leur; majorité soutenaient encore ce
pouvoir d'Etat qui était combattu au contraire
ouvertement par Ja bourgeoisie réactionnaire
liée à la réaction extérieure. »
tes dans leur; majorité soutenaient encore ce
pouvoir d'Etat qui était combattu au contraire
ouvertement par Ja bourgeoisie réactionnaire
liée à la réaction extérieure. »
Ainsi, avanl le coup d'Etat de Boumédienne,,
l'Etat était pktôt révolutionnaire, après le coup
d'Etat, la situation était retournée, l'Etat deve-
nait bourgeois ; la position que devaient pren-
dre les « révolutionnaires socialistes » était
claire : avant le coup d'Etat, ils avaient soute-
nu (au besoin « critiquement ») le nouvel Etat
algérien. Aprbs le coup d'Etat, ils passaient
dans l'opposi: ion. Malheureusement, cette op-
position entre la ligne de l'Etat algérien de Ben
Bella et celui de Boumédienne ne tient pas de-
bout.
l'Etat était pktôt révolutionnaire, après le coup
d'Etat, la situation était retournée, l'Etat deve-
nait bourgeois ; la position que devaient pren-
dre les « révolutionnaires socialistes » était
claire : avant le coup d'Etat, ils avaient soute-
nu (au besoin « critiquement ») le nouvel Etat
algérien. Aprbs le coup d'Etat, ils passaient
dans l'opposi: ion. Malheureusement, cette op-
position entre la ligne de l'Etat algérien de Ben
Bella et celui de Boumédienne ne tient pas de-
bout.
«•m
Italie
LES OCCUPATIONS D'USINES DE SEPTEMBRE 1920
Voyons tout d'abord le panorama que pré-
sente le pays. La fin de la guerre a appauvri la
nation, la droite tente d'utiliser les anciens com-
battants contre, la gauche qui encourage les reven-
dications révolutionnaires : imiter la Russie qui
est en train de détruire le capitalisme.
sente le pays. La fin de la guerre a appauvri la
nation, la droite tente d'utiliser les anciens com-
battants contre, la gauche qui encourage les reven-
dications révolutionnaires : imiter la Russie qui
est en train de détruire le capitalisme.
Depuis mai 1919 environ les syndicalistes,
certains marxistes (Gramsci) et les anarchistes
discutent et répandent l'idée des conseils d'usine.
certains marxistes (Gramsci) et les anarchistes
discutent et répandent l'idée des conseils d'usine.
..Au mois de mars 1920 de nombreuses usines
sont occupées à Milan, à Turin, les paysans
prennent les terres des grands propriétaires au
sud. Mais le parti socialiste et le syndicat qu'il
domine et qui regroupe la plupart des travail-
leurs, ne font rien, le. mouvement isolé est vain-
cu, les usines et les terres sont rendues par la
police à leurs propriétaires.
sont occupées à Milan, à Turin, les paysans
prennent les terres des grands propriétaires au
sud. Mais le parti socialiste et le syndicat qu'il
domine et qui regroupe la plupart des travail-
leurs, ne font rien, le. mouvement isolé est vain-
cu, les usines et les terres sont rendues par la
police à leurs propriétaires.
En août les grèves se multiplient, et les pa-
trons d'usines se décident au lock-out, à fermer
les usines. Spontanément les ouvriers empê-
chent ce- mouvement en occupant les usines.
Plus d'un demi-million de travailleurs sont dans
les lieux de travail.
trons d'usines se décident au lock-out, à fermer
les usines. Spontanément les ouvriers empê-
chent ce- mouvement en occupant les usines.
Plus d'un demi-million de travailleurs sont dans
les lieux de travail.
Un témoin décrit : « Les patrons et leurs
représentants furent mis à la porte ; certains
partirent spontanément, après avoir nommé un
conseil officiel d'administration parmi les ou-
vriers. Des techniciens firent cause commune
avec les travailleurs et restèrent à leur poste.
Mais beaucoup préférèrent s'en aller avec les
patrons, ou furent chassés car leur fonction
allait de pair avec celle de patron ou action-
naire. »
représentants furent mis à la porte ; certains
partirent spontanément, après avoir nommé un
conseil officiel d'administration parmi les ou-
vriers. Des techniciens firent cause commune
avec les travailleurs et restèrent à leur poste.
Mais beaucoup préférèrent s'en aller avec les
patrons, ou furent chassés car leur fonction
allait de pair avec celle de patron ou action-
naire. »
« Dans chaque usine, des décisions furent
prises pour pouvoir continuer la production in-
dépendamment de la direction patronale. Des
conseils d'usines se constituèrent, là où il n'y
en avait pas encore, et prirent la direction tech-
nique des établissements. Certains ouvriers plus
capables prirent le poste des employés absents;
les équipes et le travail furent organisés. »
prises pour pouvoir continuer la production in-
dépendamment de la direction patronale. Des
conseils d'usines se constituèrent, là où il n'y
en avait pas encore, et prirent la direction tech-
nique des établissements. Certains ouvriers plus
capables prirent le poste des employés absents;
les équipes et le travail furent organisés. »
« Les ouvriers s'armèrent. Ils transportèrent
dans les ateliers les réserves d'armes et de mu-
nitions d'usines de guerre occupées. Des armes
furent achetées. Certains ateliers en fabriquè-
rent. En quelques jours toutes ces usines étaient
devenues autant de forteresse, petites ou gran-
des. Quand une équipe travaillait, l'autre veil-
lait avec fil de fer barbelé, sentinelles, etc. La
nuit, la surveillance était encore plus intense,
avec le renfort des ouvriers qui ne travaillaient
pas et des éléments révolutionnaires. »
dans les ateliers les réserves d'armes et de mu-
nitions d'usines de guerre occupées. Des armes
furent achetées. Certains ateliers en fabriquè-
rent. En quelques jours toutes ces usines étaient
devenues autant de forteresse, petites ou gran-
des. Quand une équipe travaillait, l'autre veil-
lait avec fil de fer barbelé, sentinelles, etc. La
nuit, la surveillance était encore plus intense,
avec le renfort des ouvriers qui ne travaillaient
pas et des éléments révolutionnaires. »
« Dans les grandes villes, il y avait égale-
ment des organes embryonnaires de liaison en-
tre les usines, mais à dire vrai bien insuffisants.
Les liaisons entre les usines des différentes pro-
vinces étaient encore plus insuffisantes, et au
mieux faites par la presse et des envoyés ».
ment des organes embryonnaires de liaison en-
tre les usines, mais à dire vrai bien insuffisants.
Les liaisons entre les usines des différentes pro-
vinces étaient encore plus insuffisantes, et au
mieux faites par la presse et des envoyés ».
« On tenta également de continuer les ser-
vices d'échange et de vente de produits et de
fournitures de matières premières. On réussit en
certains endroits, mais sur une petite échelle mal-
gré, l'aide des cheminots et des ouvriers du
vices d'échange et de vente de produits et de
fournitures de matières premières. On réussit en
certains endroits, mais sur une petite échelle mal-
gré, l'aide des cheminots et des ouvriers du
transport. On vit que c'était là le point faible
qui empêchait le: prolongation du mouvement
et le limitait aux seules industries de la métal-
lurgie. » (1).
qui empêchait le: prolongation du mouvement
et le limitait aux seules industries de la métal-
lurgie. » (1).
Tandis que les ouvriers s'organisaient et pré-
paraient une nouvelle société, le parti socialiste
et son syndicat de masse (2) se réunissaient. Le
10 septembre le solution insurrectionnelle et
révolutionnaire é ait écartée. Le 15, le Premier
ministre annonçait la création d'une commission
paritaire d'étude (3) afin de préparer un projet
de loi sur « Tint srvention des ouvriers dans le
contrôle technique et financier et dans l'adminis-
tration des entreprises. » (4).
paraient une nouvelle société, le parti socialiste
et son syndicat de masse (2) se réunissaient. Le
10 septembre le solution insurrectionnelle et
révolutionnaire é ait écartée. Le 15, le Premier
ministre annonçait la création d'une commission
paritaire d'étude (3) afin de préparer un projet
de loi sur « Tint srvention des ouvriers dans le
contrôle technique et financier et dans l'adminis-
tration des entreprises. » (4).
Les anarchistes écrivaient : <« Travailleurs, une
occasion plus favorable que celle-ci — pour ten-
ter d'obtenir la libération définitive — ne s'est
jamais présentée jusqu'à présent, et nous ne pou-
vons savoir si et quand elle se représentera : ne
la laissez pas passer en vain ! Aujourd'hui vous
êtes la force, et l'impuissance du gouvernement
contre votre volo:ité est évidente. »
occasion plus favorable que celle-ci — pour ten-
ter d'obtenir la libération définitive — ne s'est
jamais présentée jusqu'à présent, et nous ne pou-
vons savoir si et quand elle se représentera : ne
la laissez pas passer en vain ! Aujourd'hui vous
êtes la force, et l'impuissance du gouvernement
contre votre volo:ité est évidente. »
« Osez encore, osez plus : et la victoire ne
pourra manquer ! » (5).
pourra manquer ! » (5).
Cependant les patrons et l'état-major syndical
arrivaient à un accord, la base devait se pronon-
cer par vote secrst. La discipline syndicale étant
grande, le résultat ne faisait pas de doute. « Ou-
vriers ! Avant d'abandonner les établissementss,
réfléchissez bien à tout, SAUVEZ TOUT. Dehors,
la police vous a:tend. Ne vous rendez-pas avec
armes et bagages. Les saboteurs de la révolution
seraient trop contents » (6).
arrivaient à un accord, la base devait se pronon-
cer par vote secrst. La discipline syndicale étant
grande, le résultat ne faisait pas de doute. « Ou-
vriers ! Avant d'abandonner les établissementss,
réfléchissez bien à tout, SAUVEZ TOUT. Dehors,
la police vous a:tend. Ne vous rendez-pas avec
armes et bagages. Les saboteurs de la révolution
seraient trop contents » (6).
Le 23 et le 24 le vote avait lieu, le 25 les ou-
vriers sortaient, Iss patrons reprenaient leurs usi-
nes. Deux ans plus tard, Mussolini prenait le pou-
voir, la plupart ces membres de l'état-major syn-
dical devinrent députés fascistes.
vriers sortaient, Iss patrons reprenaient leurs usi-
nes. Deux ans plus tard, Mussolini prenait le pou-
voir, la plupart ces membres de l'état-major syn-
dical devinrent députés fascistes.
En dépit des diiauts relevés par le témoin (ab-
sence de liaison et de distribution véritables) les
conseils d'usines avaient montré deux choses ;
a) le caractère révolutionnaire des occupations et
la fable de la cogestion ; b) le caractère pratique
des occupations : la production et la distribution
continuaient.
sence de liaison et de distribution véritables) les
conseils d'usines avaient montré deux choses ;
a) le caractère révolutionnaire des occupations et
la fable de la cogestion ; b) le caractère pratique
des occupations : la production et la distribution
continuaient.
LA POLEMIQUE SUR LES CONSEILS
Le mouvement des conseils trouva sa route
barrée par deux forces de l'ordre ; les groupes
de la grande industrie, et les hiérarchies syn-
dicales. Autant les premiers que les seconds
tendaient à conserver une structure déterminée
de la société italienne : les Olivetti, les Agnellî,
et les Pirelli eitendaient conserver leurs mo-
barrée par deux forces de l'ordre ; les groupes
de la grande industrie, et les hiérarchies syn-
dicales. Autant les premiers que les seconds
tendaient à conserver une structure déterminée
de la société italienne : les Olivetti, les Agnellî,
et les Pirelli eitendaient conserver leurs mo-
(1) FaObri Luiiïi, tiré de « Umanità Nova » nu-
méro spécial de septembre 1954.
méro spécial de septembre 1954.
(2) H s'appell: C.G.L. Confederazione Générale
del Lavoro).
del Lavoro).
(3) et (4) Nous n'imitons pas Pompidou, voir
Leonetti « Mouvsments ouvriers et socialistes Ita-
lie » p. 140.
Leonetti « Mouvsments ouvriers et socialistes Ita-
lie » p. 140.
(5) « Umanità Nova » éditorial du 8 septembre.
(6) Idem 20 sertembre.
nopoles, leur prestige, et leur hégémonie à
l'intérieur et en dehors de l'usine ; les Colom-
bino, les D'Aragona, les Baldesi entendaient pré-
server l'équilibre, grâce à leur médiation, ins-
tauré dans les rapports de travail, et le droit
exclusif de représenter les travailleurs auprès
de leur ennemi de classe et de l'Etat.
l'intérieur et en dehors de l'usine ; les Colom-
bino, les D'Aragona, les Baldesi entendaient pré-
server l'équilibre, grâce à leur médiation, ins-
tauré dans les rapports de travail, et le droit
exclusif de représenter les travailleurs auprès
de leur ennemi de classe et de l'Etat.
Le mouvement rompit avec cette situation, et
frappa au cœur plus gu'au portefeuille l'or-
ganisation capitaliste, en enlevant toute auto-
rité aux organisations syndicales, en les rem-
plaçant par une forme d'organisation ouvrière
plus adéquate au mouvement révolutionnaire.
frappa au cœur plus gu'au portefeuille l'or-
ganisation capitaliste, en enlevant toute auto-
rité aux organisations syndicales, en les rem-
plaçant par une forme d'organisation ouvrière
plus adéquate au mouvement révolutionnaire.
Nous verrons plus loin combien fut enragée
la résistance des entrepreneurs piérnontais ;
mais non moins âpre fut le ressentiment des
cercles confédéraux syndicaux, effrayés de voir
leurs positions reculer dans 1e Piémont.
la résistance des entrepreneurs piérnontais ;
mais non moins âpre fut le ressentiment des
cercles confédéraux syndicaux, effrayés de voir
leurs positions reculer dans 1e Piémont.
Sur « Battaglie Sindicali », organe de la confé
dération générale du travail (C.G.L.), le mouve-
ment des conseils fut soumis a de violentes at
laques et fut dénoncé comme un réveil, et une
soudain éruption d' « anarchisme ». C'était alors
une méthode assez répandue, dans tout le camp
social-réformiste européen, d'accuser d' « anar-
chisme » tous les mouvements révolutionnaires,
du Spartacus en Allemagne, jusqu'au Bolchevi-
que en Russie :
dération générale du travail (C.G.L.), le mouve-
ment des conseils fut soumis a de violentes at
laques et fut dénoncé comme un réveil, et une
soudain éruption d' « anarchisme ». C'était alors
une méthode assez répandue, dans tout le camp
social-réformiste européen, d'accuser d' « anar-
chisme » tous les mouvements révolutionnaires,
du Spartacus en Allemagne, jusqu'au Bolchevi-
que en Russie :
Même le groupe de 1' « Ordine nuovo » et avec
lui toute la section turinoise du parti socialiste,
fut l'objet de dures attaques dans ce sens, non
à cause de la présence dans le mouvement des
conseils d'anarchistes déclarés, mais à cause de
son énergique défense pour le droit de tous les
travailleurs, syndiqués ou non, à participer aux
conseils.
lui toute la section turinoise du parti socialiste,
fut l'objet de dures attaques dans ce sens, non
à cause de la présence dans le mouvement des
conseils d'anarchistes déclarés, mais à cause de
son énergique défense pour le droit de tous les
travailleurs, syndiqués ou non, à participer aux
conseils.
L' « Ordine nuovo » répond à ces critiques, en
démasquant les fonctionnaires syndicaux, qui
ne cherchent qu'a avoir des gens « qui ont une
carte », des moutons et non des militants ou-
vriers décidés à défendre et à affirmer concrète-
ment dans l'usine, les droits de leur classe.
Cette polémique à l'intérieur du parti socialiste
s'approfondit jusqu'au congrès de Livourne qui
dévia la querelle sur la question formelle de
l'adhésion à l'internationale de Moscou.
démasquant les fonctionnaires syndicaux, qui
ne cherchent qu'a avoir des gens « qui ont une
carte », des moutons et non des militants ou-
vriers décidés à défendre et à affirmer concrète-
ment dans l'usine, les droits de leur classe.
Cette polémique à l'intérieur du parti socialiste
s'approfondit jusqu'au congrès de Livourne qui
dévia la querelle sur la question formelle de
l'adhésion à l'internationale de Moscou.
Plus riche, au contraire, fut la polémique à l'in-
térieur même du mouvement des conseils ; entre
les groupes qui comme 1' « Ordine nuovo » de
Turin et « le soviet » de Naples se dirigeaient
vers la fondation du parti communiste italien, et
ceux qui se rassemblaient autour de l'USI (syndi-
caliste révolutionnaire) et de TUAI (Union anar-
chiste italienne) le débat fut riche et fécond.
térieur même du mouvement des conseils ; entre
les groupes qui comme 1' « Ordine nuovo » de
Turin et « le soviet » de Naples se dirigeaient
vers la fondation du parti communiste italien, et
ceux qui se rassemblaient autour de l'USI (syndi-
caliste révolutionnaire) et de TUAI (Union anar-
chiste italienne) le débat fut riche et fécond.
Commençons par 1' « Ordine nuovo » ;
Dans la première série du journal qui va du
1er mai 1919 jusqu'à la fin de 1920, on peut sen-
tir deux périodes, qui correspondent à deux in-
fluences : celle de Tasca d'abord, puis celle
de Gramsci. Tasca bien qu'au début, farouche
défenseur des conseils, était un esprit confus
et imprécis, si bien qu'en un laps de temps
relativement court, il changea souvent de cou-
rant (rappelons qu'il passa ensuite à la social-
démocratie sous le nom de Lerroux. Une polémi-
que avec l'anarchiste Garino l'amena à écrire
1er mai 1919 jusqu'à la fin de 1920, on peut sen-
tir deux périodes, qui correspondent à deux in-
fluences : celle de Tasca d'abord, puis celle
de Gramsci. Tasca bien qu'au début, farouche
défenseur des conseils, était un esprit confus
et imprécis, si bien qu'en un laps de temps
relativement court, il changea souvent de cou-
rant (rappelons qu'il passa ensuite à la social-
démocratie sous le nom de Lerroux. Une polémi-
que avec l'anarchiste Garino l'amena à écrire
un article dans « l'Ordine nuovo » où il défen-
dait la thèse selon laquelle le syndicat devait
d'abord défendre les intérêts de l'ouvrier com-
me salarié (pour Garino, il devait développer
une conscier.ce de producteur chez l'ouvrier),
mais où surtout transparaissait l'idée que le con-
seil devait s'insérer dans les cadre syndicaux et
être subordonné à eux.
dait la thèse selon laquelle le syndicat devait
d'abord défendre les intérêts de l'ouvrier com-
me salarié (pour Garino, il devait développer
une conscier.ce de producteur chez l'ouvrier),
mais où surtout transparaissait l'idée que le con-
seil devait s'insérer dans les cadre syndicaux et
être subordonné à eux.
Gramsci dans le numéro suivant, répond que
le conseil d'usine est le début historique du pro-
cessus qui conduit à la fondation de l'Etat ou-
vrier, mais qi'il doit être autonome. Il se place
ainsi entre Garino et Tasca ; ce dernier lève
alors le ton et proclame sa foi dans la dicta-
ture du proie: ariat, son opposition à la démocra-
tie ouvrière ; le conseil doit être l'instrument du
parti ; il traite Gramsci de « syndicaliste » et
« d'anarchiste » !
le conseil d'usine est le début historique du pro-
cessus qui conduit à la fondation de l'Etat ou-
vrier, mais qi'il doit être autonome. Il se place
ainsi entre Garino et Tasca ; ce dernier lève
alors le ton et proclame sa foi dans la dicta-
ture du proie: ariat, son opposition à la démocra-
tie ouvrière ; le conseil doit être l'instrument du
parti ; il traite Gramsci de « syndicaliste » et
« d'anarchiste » !
Tasca s'élo:gne alors du journal et c'est la pé-
riode « grams:ci » du journal.
riode « grams:ci » du journal.
Il nous faut aussi mettre l'accent sur les in-
terventions do Bordhiga dans le journal de Na-
ples le « Soviet », celui-ci a soulevé le problème
du pouvoir politique, qui intervient et qui brise,
toute tentative d'édification du socialisme par le
bas comme les conseils, lorsque ceux-ci ne sont
pas immédiat sment et graduellemeni incorporés
par l'ordre bDurgeois.
terventions do Bordhiga dans le journal de Na-
ples le « Soviet », celui-ci a soulevé le problème
du pouvoir politique, qui intervient et qui brise,
toute tentative d'édification du socialisme par le
bas comme les conseils, lorsque ceux-ci ne sont
pas immédiat sment et graduellemeni incorporés
par l'ordre bDurgeois.
L'objection était juste, mais Bordhiga, prison-
nier de vieilles formules, ne parvenait pas a ré-
soudre le problème du pouvoir, sinon dans le
sens de sa ccnquête du moins dans celui de sa
destruction; c est pourquoi il ne pouvait saisir
la fonction irr médiatement positive des conseils
dans le cours de la destruction de l'Etat, opérée
par le mouve Tient politique de la classe.
nier de vieilles formules, ne parvenait pas a ré-
soudre le problème du pouvoir, sinon dans le
sens de sa ccnquête du moins dans celui de sa
destruction; c est pourquoi il ne pouvait saisir
la fonction irr médiatement positive des conseils
dans le cours de la destruction de l'Etat, opérée
par le mouve Tient politique de la classe.
LA CONTRIBUTION DES ANARCHISTES
La contribution des anarchistes à l'élaboration
de la théorie ces conseils peut se résumer à deux
apports essentiels.
de la théorie ces conseils peut se résumer à deux
apports essentiels.
a) c'est seulament dans le cours d'une période
révolutionnaire que les conseils d'usine peuvent
avoir une véritable efficacité, et se constituer en
moyens valables pour la lutte des classes et non
pour la collaboration de classes. En période con-
tre révolutionnaire les conseils finissent par
être limités par l'organisation capitaliste car
celle-ci n'est pas toujours opposée à la coges-
tion morale ce la part des travailleurs. C'est
pourquoi avar.cer l'idée des conseils dans une
période conti e-révolutionnaire signifie porter
gravement préjudice à la formule même des
conseils d'uske comme mot d'ordre révolution-
naire ;
révolutionnaire que les conseils d'usine peuvent
avoir une véritable efficacité, et se constituer en
moyens valables pour la lutte des classes et non
pour la collaboration de classes. En période con-
tre révolutionnaire les conseils finissent par
être limités par l'organisation capitaliste car
celle-ci n'est pas toujours opposée à la coges-
tion morale ce la part des travailleurs. C'est
pourquoi avar.cer l'idée des conseils dans une
période conti e-révolutionnaire signifie porter
gravement préjudice à la formule même des
conseils d'uske comme mot d'ordre révolution-
naire ;
b) les conseils ne résolvent qu'à moitié le pro-
blème de l'Etai : ils vident celui-ci de ses fonc-
tions sociales, mais ils ne l'éliminent pas; ils vi-
dent l'appareil étatique de son contenu sans le dé-
truire. Mais pu .sque l'on ne peut vaincre l'Etat en
l'ignorant, parce qu'à chaque instant il peut faire
sentir sa présence en mettant en mouvement son
mécanisme de représaille et de sanction, il con-
vient de détruze aussi ce mécanisme. Les con-
blème de l'Etai : ils vident celui-ci de ses fonc-
tions sociales, mais ils ne l'éliminent pas; ils vi-
dent l'appareil étatique de son contenu sans le dé-
truire. Mais pu .sque l'on ne peut vaincre l'Etat en
l'ignorant, parce qu'à chaque instant il peut faire
sentir sa présence en mettant en mouvement son
mécanisme de représaille et de sanction, il con-
vient de détruze aussi ce mécanisme. Les con-
seïls ne peuvent accomplir cette opération, et
pour cela, il faut l'intervention d'une force poli-
tique organisée, le mouvement spécifique de la
classe qui mène à bien une telle mission. C'est
seulement ainsi que l'on peut éviter que le bour-
geois, chassé par la porte dans ses vêtements
d'impressario ne rentre par la fenêtre déguisé
en « flic ».
pour cela, il faut l'intervention d'une force poli-
tique organisée, le mouvement spécifique de la
classe qui mène à bien une telle mission. C'est
seulement ainsi que l'on peut éviter que le bour-
geois, chassé par la porte dans ses vêtements
d'impressario ne rentre par la fenêtre déguisé
en « flic ».
Ceci montre que la question soulevée dans la
querelle entre 1' « Ordine nuovo » et le « Soviet ••>
peut être résolue; ceux de 1' « Ordine nuovo » sous
estimaient le problème de l'E{at dans ce sens
qu'ils avaient tendance à ne pas s'en occuper ;
ceux du « Soviet » le surestimaient car ils vou-
laient s'en emparer, tandis que les anarchistes
1-3 plaçaient au centre de leurs préoccupations
pour réaliser sa liquidation, en terrain politique.
querelle entre 1' « Ordine nuovo » et le « Soviet ••>
peut être résolue; ceux de 1' « Ordine nuovo » sous
estimaient le problème de l'E{at dans ce sens
qu'ils avaient tendance à ne pas s'en occuper ;
ceux du « Soviet » le surestimaient car ils vou-
laient s'en emparer, tandis que les anarchistes
1-3 plaçaient au centre de leurs préoccupations
pour réaliser sa liquidation, en terrain politique.
Les occasions de discuter ces thèses furent
nombreuses ; la première fut offerte par le con-
grès national de l'Union syndicale italienne
(U.S.I.) qui se tint à Parme en décembre 1919.
Les conseils avaient donné leur adhésion à
cette union et avaient envoyé un représentant
(l'ouvrier de Turin Matta). On y parla pour et
contre les conseils, mais pas toujours avec une
connaissance suffisante du sujet. Cependant, à
l'issue des débats une importante résolution fut
approuvée, qui condensait les observations po-
sitives des débats.
nombreuses ; la première fut offerte par le con-
grès national de l'Union syndicale italienne
(U.S.I.) qui se tint à Parme en décembre 1919.
Les conseils avaient donné leur adhésion à
cette union et avaient envoyé un représentant
(l'ouvrier de Turin Matta). On y parla pour et
contre les conseils, mais pas toujours avec une
connaissance suffisante du sujet. Cependant, à
l'issue des débats une importante résolution fut
approuvée, qui condensait les observations po-
sitives des débats.
Avant de lire cette résolution il nous faut don-
ner quelques précisions en ce qui concerne
ner quelques précisions en ce qui concerne
l'U.S.L
On a souvent dit et cru que l'U.S.L était
« anarchiste », peut être parce que le nouveau
secrétaire Borghi était déjà connu comme un
militant anarchiste et ne pouvait se dire anar-
chiste pour le simple fait qu'il ne venait pas
d'une sélection idéologique mais d'un re-
crutement ouvrier sur la base du métier. Cela
n'empêche pas que lorsque ce syndicat se pla-
çait en dehors de la conquête de l'Etat, repous-
sait toute participation aux organismes de dis-
cussion avec le patronat, et se refusait à la con-
quête parlementaire, pour pratiquer sa tacti-
que de l'action directe ce syndicat était consi-
déré et se considérait lui-même inspiré des viel-
les idées de la première internationale, c'est-à-
dire d'inspiration anarchiste.
« anarchiste », peut être parce que le nouveau
secrétaire Borghi était déjà connu comme un
militant anarchiste et ne pouvait se dire anar-
chiste pour le simple fait qu'il ne venait pas
d'une sélection idéologique mais d'un re-
crutement ouvrier sur la base du métier. Cela
n'empêche pas que lorsque ce syndicat se pla-
çait en dehors de la conquête de l'Etat, repous-
sait toute participation aux organismes de dis-
cussion avec le patronat, et se refusait à la con-
quête parlementaire, pour pratiquer sa tacti-
que de l'action directe ce syndicat était consi-
déré et se considérait lui-même inspiré des viel-
les idées de la première internationale, c'est-à-
dire d'inspiration anarchiste.
CONGRES DE L'U.S.I. A PARMES
Décembre 1919 - résolution finale.
Décembre 1919 - résolution finale.
<* Le congrès salue chaque pas en avant du
prolétariat et des forces politiques vers la con-
ception pure du socialisme niant toute capacité
de démolition et de reconstruction à l'insti-
tution historique, typique de la démocratie
bourgeoise, qui est le parlement, cœur de l'Etat ;
prolétariat et des forces politiques vers la con-
ception pure du socialisme niant toute capacité
de démolition et de reconstruction à l'insti-
tution historique, typique de la démocratie
bourgeoise, qui est le parlement, cœur de l'Etat ;
« Considère la conception dite des « Soviets »
pour la reconstruction sociale comme antithéti-
que de l'Etat et déclare que toute superposition
à l'autonome et libre fonctionnement des so-
viets de toute la classe productrice, unie dang
l'action défensive contre la menace de la réac-
tion et par les nécessités administratives de la
future gestion sociale, est considéré par le pro-
pour la reconstruction sociale comme antithéti-
que de l'Etat et déclare que toute superposition
à l'autonome et libre fonctionnement des so-
viets de toute la classe productrice, unie dang
l'action défensive contre la menace de la réac-
tion et par les nécessités administratives de la
future gestion sociale, est considéré par le pro-
létariat comme un attentat au développement
de la révolution et la réalisation de l'égalité
dans la liberté ;
de la révolution et la réalisation de l'égalité
dans la liberté ;
« Déclare poui ces raisons, toute sa sympa-
thie et son encouragement a cette initiative du
prolétariat, que sont les conseils d'usine, qui
tendent à transférer dans la masse ouvrière
toutes les facullés d'initiative révolutionnaire
et de reconstruction de la vie sociale, en met-
tant cependant tien en garde les travailleurs
contre toutes les possibles déviations vers une
solution réformiste contre la nature révolution-
naire d'une telle initiative, contrairement aussi
aux intentions de la meilleure partie du prolé-
tariat ;
thie et son encouragement a cette initiative du
prolétariat, que sont les conseils d'usine, qui
tendent à transférer dans la masse ouvrière
toutes les facullés d'initiative révolutionnaire
et de reconstruction de la vie sociale, en met-
tant cependant tien en garde les travailleurs
contre toutes les possibles déviations vers une
solution réformiste contre la nature révolution-
naire d'une telle initiative, contrairement aussi
aux intentions de la meilleure partie du prolé-
tariat ;
« Invite cette meilleure partie du prolétariat
à considérer les iécessités de préparer des for-
ces d'attaque, révolutionnaire, sans lesquelles il
ne serait jamais possible que le prolétariat as-
sume la gestion sociale ».
à considérer les iécessités de préparer des for-
ces d'attaque, révolutionnaire, sans lesquelles il
ne serait jamais possible que le prolétariat as-
sume la gestion sociale ».
Le congrès explicita ensuite dans ces termes,
les dangers de déviation contenus dans l'expé-
rience des conse 1s d'usine :
les dangers de déviation contenus dans l'expé-
rience des conse 1s d'usine :
« Les conseils d'usine pourraient dégénérer
en de simples commissions internes pour le bon
fonctionnement do l'atelier, pour l'augmentation
d'une manière bourgeoise de la production, pour
régler les différents internes, etc.
en de simples commissions internes pour le bon
fonctionnement do l'atelier, pour l'augmentation
d'une manière bourgeoise de la production, pour
régler les différents internes, etc.
« II serait possible d'invertir la logique du
processus révolutionnaire, et croire que l'antici-
pation de la forme de la future gestion sociale
suffise à faire tomber le régime haï ;
processus révolutionnaire, et croire que l'antici-
pation de la forme de la future gestion sociale
suffise à faire tomber le régime haï ;
« On pourrait cublier que l'usine est propriété
du patron parce qu'il y a l'Etat (le gendarme)
qui la défend ;
du patron parce qu'il y a l'Etat (le gendarme)
qui la défend ;
« II ns faudra! pas tomber dans l'erreur qui
consiste à croire que la question de forme ré-
soudra la question de la substance de la valeur
idéale d'un mouvsment déterminé. »
consiste à croire que la question de forme ré-
soudra la question de la substance de la valeur
idéale d'un mouvsment déterminé. »
Une discussion oncore plus approfondie eut lieu
lors de la préparation du congrès de l'Union
Anarchiste Italienne qui se tint à Bologne les
1, 2, 3, 4 juillet 1920. A ce congrès fut approuvée
une résolution do:it voici le. texte :
lors de la préparation du congrès de l'Union
Anarchiste Italienne qui se tint à Bologne les
1, 2, 3, 4 juillet 1920. A ce congrès fut approuvée
une résolution do:it voici le. texte :
« Le congrès, tenant compte que les conseils
d'usine et de sec ion ont leur principale impor-
tance dans la mesure ou l'on prévoit une révolu-
tion dans un avenir proche, et pourront être alors
des organes technique pour l'expropriation et
pour la nécessaire continuation immédiate de
la production, mais que en continuant à exister
dans la société actuelle ils subiraient l'influence
modératrice et ac;omodante de cette dernière ,
d'usine et de sec ion ont leur principale impor-
tance dans la mesure ou l'on prévoit une révolu-
tion dans un avenir proche, et pourront être alors
des organes technique pour l'expropriation et
pour la nécessaire continuation immédiate de
la production, mais que en continuant à exister
dans la société actuelle ils subiraient l'influence
modératrice et ac;omodante de cette dernière ,
« Retient les conseils d'usine, organes aptes a
encadrer en vue de la révolution tous les pro-
ducteurs manuels et intellectuels, sur le lieu mê-
me du travail et en vue de réaliser les princi-
pes anarchistes-communistes ; organes absolu-
ment anti-étatique 5 et possibles noyaux de la fu-
ture gestion de la production industrielle et agri-
cole ;
encadrer en vue de la révolution tous les pro-
ducteurs manuels et intellectuels, sur le lieu mê-
me du travail et en vue de réaliser les princi-
pes anarchistes-communistes ; organes absolu-
ment anti-étatique 5 et possibles noyaux de la fu-
ture gestion de la production industrielle et agri-
cole ;
« Les retients, en outre, comme aptes à déve-
lopper chez l'ouvrier salarié la conscience de
producteur et comme utiles aux fin de la révolu-
tion en favorisan; la transformation du mécon-
tentement des classes ouvrières et paysannes en
une volonté clairo d'expropriation ;
lopper chez l'ouvrier salarié la conscience de
producteur et comme utiles aux fin de la révolu-
tion en favorisan; la transformation du mécon-
tentement des classes ouvrières et paysannes en
une volonté clairo d'expropriation ;
« De la invite les camarades à appuyer la
formation des conseils d'usine et à participer ac-
tivement à leur développement pour les mainte-
nir, soit dans leur structure organique, s°it dans
leur fonctionnement, sur ces directives en com-
battant toute tendance de déviation collaboratio-
niste et en sorte que tous les travailleurs de
chaque usine, organisés ou non, participent à leur
formation ».
formation des conseils d'usine et à participer ac-
tivement à leur développement pour les mainte-
nir, soit dans leur structure organique, s°it dans
leur fonctionnement, sur ces directives en com-
battant toute tendance de déviation collaboratio-
niste et en sorte que tous les travailleurs de
chaque usine, organisés ou non, participent à leur
formation ».
Une seconde motion fut votée sur les « soviets ••-,
répétant des principes identiques sur l'impos-
sibilité historique et politique de faire des expé-
répétant des principes identiques sur l'impos-
sibilité historique et politique de faire des expé-
riences liberté :ires en période de contre-révolu-
tion.
tion.
Le 27 mars 1920, 1' « Ordine nuovo » lança
un appel des anarchistes aux ouvriers et aux
paysans pour un congrès national des conseils.
Cet appel fut contre-signe par la rédaction du
journal, par le comité exécutif de la section socia-
liste de Turin, par le comité d'étude des con-
seils d'usine turinois et par le groupe liber-
taire de la même ville.
un appel des anarchistes aux ouvriers et aux
paysans pour un congrès national des conseils.
Cet appel fut contre-signe par la rédaction du
journal, par le comité exécutif de la section socia-
liste de Turin, par le comité d'étude des con-
seils d'usine turinois et par le groupe liber-
taire de la même ville.
Mais le cor .grès ne se tint jamais car d'au-
tres événements pressaient...
tres événements pressaient...
LA COLLECTIVISATION DANS LES USINES ET LES CAMPAGNES 1935-39
II ne faut pas attacher d'importance au mot
« collectivisation » en Espagne, il désigne du-
rant la guerre civile l'autogestion. Les camara-
des espagnols — presque essentiellement les
anarchistes — avaient une connaissance déjà
longue et approfondie des problèmes de l'or-
ganisation révolutionnaire.
« collectivisation » en Espagne, il désigne du-
rant la guerre civile l'autogestion. Les camara-
des espagnols — presque essentiellement les
anarchistes — avaient une connaissance déjà
longue et approfondie des problèmes de l'or-
ganisation révolutionnaire.
C'est pourquoi dès que le coup d'Etat militaire
fut vaincu, la révolution et la guerre pour libérer
les villes occupées furent menées de front. Le
20 juillet 1936, les militaires étant battus de-
puis quelques heures, 1e syndicat anarchiste
C.N.T. (Confédération Nationale du Travail)
donne l'ordre par radio de reprise du travail
aux travailleurs de l'alimentation. Le 22, l'or-
gane de la C.N.T. « Solidaridad Obrera » de-
mandait aux sections de chaudronniers et de
souffleurs de s'emparer des centres de produc-
tion» pour le blindage des camions et autres
travaux nécessaires ».
fut vaincu, la révolution et la guerre pour libérer
les villes occupées furent menées de front. Le
20 juillet 1936, les militaires étant battus de-
puis quelques heures, 1e syndicat anarchiste
C.N.T. (Confédération Nationale du Travail)
donne l'ordre par radio de reprise du travail
aux travailleurs de l'alimentation. Le 22, l'or-
gane de la C.N.T. « Solidaridad Obrera » de-
mandait aux sections de chaudronniers et de
souffleurs de s'emparer des centres de produc-
tion» pour le blindage des camions et autres
travaux nécessaires ».
Dans la plupart des cas, cependant, les mi-
litants avaient spontanément collectivisé les
usines et les terres. Différentes mesures d'ordre
économique et social furent prises.
litants avaient spontanément collectivisé les
usines et les terres. Différentes mesures d'ordre
économique et social furent prises.
Les chemins de fer qui n'étaient pas nationa-
lisés mais divisés entre plusieurs compagnies
furent unifiés. Dans l'industrie du bois, tous les
ateliers furent réunis dans une même section,
ceux qui étaient trop petits furent rattachés à
d'autres. Du fait de la guerre, les matières pre-
mières manquèrent dans certaines industries (le
textile notamment) et les pièces de rechange
également ; mais les mines, l'industrie chimi-
que et du verre se développèrent. L'exportation
des oranges, qui commence en septembre fut
organisée par la C.N.T. et le syndicat socialiste
U.G.T. (Union Générale des Travailleurs). Au
lieu que différents exportateurs vendent les
oranges sur les marchés européens, il y eut un
organisme qui pu ainsi contrôler les prix, et
les devises rapportées permirent de renforcer
l'effort de guerre.
lisés mais divisés entre plusieurs compagnies
furent unifiés. Dans l'industrie du bois, tous les
ateliers furent réunis dans une même section,
ceux qui étaient trop petits furent rattachés à
d'autres. Du fait de la guerre, les matières pre-
mières manquèrent dans certaines industries (le
textile notamment) et les pièces de rechange
également ; mais les mines, l'industrie chimi-
que et du verre se développèrent. L'exportation
des oranges, qui commence en septembre fut
organisée par la C.N.T. et le syndicat socialiste
U.G.T. (Union Générale des Travailleurs). Au
lieu que différents exportateurs vendent les
oranges sur les marchés européens, il y eut un
organisme qui pu ainsi contrôler les prix, et
les devises rapportées permirent de renforcer
l'effort de guerre.
Dans les usines, la journée de travail fut en
général réduite : quarante heures dans les
général réduite : quarante heures dans les
tramways (dais l'industrie de guerre, la pro-
duction était ininterrompue). Les salaires furent
égaux ou très peu différents : avant dans les
chemins de fer un sous-directeur touchait 340
pesetas par mois et un cheminot 143, après le 19
juillet 1936 le salaire minimum fut de 300 et le
maximum de ïOO par mois. Mais l'égalité de sa-
laire entre les hommes et les femmes fut très
rare. La solidarité fut développée : réemploi des
ouvriers mis en chômage par le patronat ; haus-
se des retraites soixante-dix au lieu de trente-
cinq aux brasseries Darnrn de Barcelone ; aide
technique et financière au collectivités agricoles.
La culfure ne fut pas oubliée : création de bi-
bliothèque et d'écoles.
duction était ininterrompue). Les salaires furent
égaux ou très peu différents : avant dans les
chemins de fer un sous-directeur touchait 340
pesetas par mois et un cheminot 143, après le 19
juillet 1936 le salaire minimum fut de 300 et le
maximum de ïOO par mois. Mais l'égalité de sa-
laire entre les hommes et les femmes fut très
rare. La solidarité fut développée : réemploi des
ouvriers mis en chômage par le patronat ; haus-
se des retraites soixante-dix au lieu de trente-
cinq aux brasseries Darnrn de Barcelone ; aide
technique et financière au collectivités agricoles.
La culfure ne fut pas oubliée : création de bi-
bliothèque et d'écoles.
Dans les collectivités paysannes, les salaires,
les allocations pour les enfants et les retraites
furent créées, mais pas d'égalité hommes et
femmes. La sclidarité se manifesta par l'envoi
gratuit de vivras au front. Des bibliothèques et
des écoles furent aussi fondées. Des médecins
et des vétérinaires furent engagés. L'irrigation
et l'aviculture furent développées.
les allocations pour les enfants et les retraites
furent créées, mais pas d'égalité hommes et
femmes. La sclidarité se manifesta par l'envoi
gratuit de vivras au front. Des bibliothèques et
des écoles furent aussi fondées. Des médecins
et des vétérinaires furent engagés. L'irrigation
et l'aviculture furent développées.
Cette autogestion ne se limita pas à des vil-
lages ou à des usines, dont on pourrait multi-
plier les exemples (1). Elle tenta de s'organiser
nationalement, des congrès, des fédérations fu-
rent décidés et faits.
lages ou à des usines, dont on pourrait multi-
plier les exemples (1). Elle tenta de s'organiser
nationalement, des congrès, des fédérations fu-
rent décidés et faits.
Mois un maldise aussi important que la guerre
contre le capitclisme (2) menaçait et bientôt atta-
quait l'autogestion. La banque d'Espagne était
toujours aux nains de la bourgeoisie républi-
caine. Par respect des alliances, les anarchistes
et les partisars de l'autogestions, qui étaient
aussi parfois sccialistes et marxistes anti-moscou-
taires, n'obligèrent pas par la force la bour-
geoisie à acr. eter des armes avec l'or de
la banque.
contre le capitclisme (2) menaçait et bientôt atta-
quait l'autogestion. La banque d'Espagne était
toujours aux nains de la bourgeoisie républi-
caine. Par respect des alliances, les anarchistes
et les partisars de l'autogestions, qui étaient
aussi parfois sccialistes et marxistes anti-moscou-
taires, n'obligèrent pas par la force la bour-
geoisie à acr. eter des armes avec l'or de
la banque.
(1) Voir Levai « Né Franco né Stalin » Milan 1952.
Noir et Bouge <: Collectivités anarchistes en Espa-
gne révolutionn lire ». « Collectivisations ».
Noir et Bouge <: Collectivités anarchistes en Espa-
gne révolutionn lire ». « Collectivisations ».
(2) Le putsch était bien préparé : dès le 11 juil-
let tous les fonds de la Transmediterranea de Bar-
celone furent retirés.
let tous les fonds de la Transmediterranea de Bar-
celone furent retirés.
8
L'U.R.S.S. proposa son aide qu'elle ne four-
nit qu'à ses partisans, peu nombreux, et aux
gens qu'elle contrôlait, c'est-à-dire la bourgeoi-
sie, qui voulait récupérer les usines et les terres.
L'or espagnol passa en Russie (où il est encore)
et l'autogestion fut attaquée. L'épisode marquant
fut les journées de mai 1937 à Barcelone où les
communistes et la bourgeoisie attaquèrent le cen-
tral téléphonique tenu par les anarchistes (3), plu-
sieurs milliers de morts et de blessés.
nit qu'à ses partisans, peu nombreux, et aux
gens qu'elle contrôlait, c'est-à-dire la bourgeoi-
sie, qui voulait récupérer les usines et les terres.
L'or espagnol passa en Russie (où il est encore)
et l'autogestion fut attaquée. L'épisode marquant
fut les journées de mai 1937 à Barcelone où les
communistes et la bourgeoisie attaquèrent le cen-
tral téléphonique tenu par les anarchistes (3), plu-
sieurs milliers de morts et de blessés.
La division des travailleurs provoquée par îa
Russie (4) et le respect de la bourgeoisie entraî-
nèrent la défaite et la mort de l'autogestion.
Russie (4) et le respect de la bourgeoisie entraî-
nèrent la défaite et la mort de l'autogestion.
LES COLLECTIVITES ANARCHISTES
ESPAGNOLES
Gaston Levai
Nous traduisons de l'édition italienne : « Né
Franco, né Stalin, le collectività anarchiche spa-
gnole nella lotta contre Franco e la reazione
staîiniana », Instituto Editoriale Itcliano, Milano -
320 p. (1952).
Franco, né Stalin, le collectività anarchiche spa-
gnole nella lotta contre Franco e la reazione
staîiniana », Instituto Editoriale Itcliano, Milano -
320 p. (1952).
Des nombreux exemples, presque tous traduits,
nous avons choisi :
nous avons choisi :
— Organisation syndicale sanitaire,
— Hospitalet,
— Levant,
— Conclusions et commentaires :
— l'attaque des collectivités,
— l'intelligence populaire,
— principes ef enseignements de la révolu-
tion espagnole.
tion espagnole.
Dans le texte, le présent correspond à la pé-
riode de guerre 1938-1939, l'imparfait à avant
1936, les conclusions et commentaires sont pos-
térieurs à 1939.
riode de guerre 1938-1939, l'imparfait à avant
1936, les conclusions et commentaires sont pos-
térieurs à 1939.
ORGANISATION SYNDICALE SANITAIRE
Ce fut une des plus grandes réalisations de
la révolution socialiste libertaire. Nous en par-
lerons brièvement. Pour pouvoir apprécier con-
venablement l'effort des camarades, il faut sa-
voir que le syndicat unique s'étendant à toute
la Catalogne, fut fondé après le 19 juillet 1936.
la révolution socialiste libertaire. Nous en par-
lerons brièvement. Pour pouvoir apprécier con-
venablement l'effort des camarades, il faut sa-
voir que le syndicat unique s'étendant à toute
la Catalogne, fut fondé après le 19 juillet 1936.
Il y avait auparavant quelques médecins
affiliés à la C.N.T. et constituant une section du
Syndicat des professions libérales. En outre, à
part, il existait un groupe d'infirmiers et de
préparateurs en pharmacie.
affiliés à la C.N.T. et constituant une section du
Syndicat des professions libérales. En outre, à
part, il existait un groupe d'infirmiers et de
préparateurs en pharmacie.
La révolution put compter sur un certain nom-
bre de médecins pour lesquels la médecine ne
signifiait pas un moyen d'exploitation de leurs
semblables mais une mission.
bre de médecins pour lesquels la médecine ne
signifiait pas un moyen d'exploitation de leurs
semblables mais une mission.
Au début de septembre 1936, le syndicat uni-
que sanitaire fut constitué. Obéissant à la ten-
dance de réunion dans un seul organisme des
diverses catégories d'hommes qui assurent une
même tâche, ils s'occupèrent d'un même service
que sanitaire fut constitué. Obéissant à la ten-
dance de réunion dans un seul organisme des
diverses catégories d'hommes qui assurent une
même tâche, ils s'occupèrent d'un même service
(3) Pompidou a utilisé la même teotique en fai-
sant intervenir les C.R.S. pour s'emparer de cer-
tains secteurs des P.T.T.
sant intervenir les C.R.S. pour s'emparer de cer-
tains secteurs des P.T.T.
(4) « Quant à la Catalogne la liquidation des élé-
ments trotskystes et anarcho-syndicalistes a com-
mencé, elle sera conduite avec la même énergie qu'en
TJ.B.S.S. » Pravda 17 décembre 1936.
ments trotskystes et anarcho-syndicalistes a com-
mencé, elle sera conduite avec la même énergie qu'en
TJ.B.S.S. » Pravda 17 décembre 1936.
et réformèrent toutes les sections en vue d'une
activité générale.
activité générale.
Les effectifs augmentèrent avec une rapidité
surprenante. En fait, vers la fin de février 1937,
on me donna la li;;te suivante :
surprenante. En fait, vers la fin de février 1937,
on me donna la li;;te suivante :
— 1020 médecins,
— 3206 infirmiers.,
— 133 dentistes
— 330 sages-femmes,
— 203 « practicantes » (médecin n'ayant pas
pu achever ses diplômes).
— 180 pharmaciens,
— 663 préparateurs en pharmacie*,
— 153 Lerborisies,
— 335 préparateurs en matériel sanitaire,
— 71 radiologues,
— 10 auxiliaires sanitaires,
— 220 vétérinaires.
Nous ajoutons les masseurs ,dont nous n'avons
pas la statistique. Cinq mois après la révolu-
tion, le nombre tctal des inscrits tournait au-
tour de 8.000.
pas la statistique. Cinq mois après la révolu-
tion, le nombre tctal des inscrits tournait au-
tour de 8.000.
Avant, l'U.G.T. a, elle aussi, organisé un
syndicat sanitaire, mais très inférieur au nô-
tre numériquement puisqu'elle avait un maxi-
mum de 100 méd3cins.
syndicat sanitaire, mais très inférieur au nô-
tre numériquement puisqu'elle avait un maxi-
mum de 100 méd3cins.
Le syndicat unique ne s'est pas contenté
d'organiser. Le d§sir de créer naquit avec
d'autant plus de force que les médecins
n'avaient rien fait jusqu'à la veille de la ré-
volution. Souvent, ils sont les constructeurs les
plus audacieux. 'parmi les révolutionnaires.
Nous pourrions citîr plusieurs exemples de ce
phénomène paradoxal.
d'organiser. Le d§sir de créer naquit avec
d'autant plus de force que les médecins
n'avaient rien fait jusqu'à la veille de la ré-
volution. Souvent, ils sont les constructeurs les
plus audacieux. 'parmi les révolutionnaires.
Nous pourrions citîr plusieurs exemples de ce
phénomène paradoxal.
Guidé par certai.is militants qui avaient mon-
tré une valeur admirable, le syndicat prit en
mains avec audace, la réorganisation de la bran-
che médicale. Elle en avait bien besoin. En
Espagne, 25.000 enfants, âgés de moins de 12
mois, mourraient chaque année. Dans le. 5=
district de Barcelone, la mortalité infantile était
deux fois plus forte que celle enregistrée dans
le quatrième. Le piemier est un quartier ouvrier,
le second de privilégiés. La mortalité infantile
en Espagne était ïne des plus élevée d'Europe.
Pourtant l'Espagne est un pays sain au climat
généralement sec. De tels faits ne s'expliquent
que par la misère, le manque d'hygiène, et de
soins. Sachant cela, sachant qu'il y avait une
foule de médecins qui ne demandaient qu'à tra-
vailler et profiter de la désorganisation du gou-
vernement, nos oimarades jetèrent les bases
d'une nouvelle organisation sanitaire.
tré une valeur admirable, le syndicat prit en
mains avec audace, la réorganisation de la bran-
che médicale. Elle en avait bien besoin. En
Espagne, 25.000 enfants, âgés de moins de 12
mois, mourraient chaque année. Dans le. 5=
district de Barcelone, la mortalité infantile était
deux fois plus forte que celle enregistrée dans
le quatrième. Le piemier est un quartier ouvrier,
le second de privilégiés. La mortalité infantile
en Espagne était ïne des plus élevée d'Europe.
Pourtant l'Espagne est un pays sain au climat
généralement sec. De tels faits ne s'expliquent
que par la misère, le manque d'hygiène, et de
soins. Sachant cela, sachant qu'il y avait une
foule de médecins qui ne demandaient qu'à tra-
vailler et profiter de la désorganisation du gou-
vernement, nos oimarades jetèrent les bases
d'une nouvelle organisation sanitaire.
Il ne m'a pas été possible de suivre pas à pas
le processus de l'œuvre réalisée. Je me limiterai
donc à résumer l'œuvre en elle-même et à dire
à quel degré de développement elle était arri-
vée au moment d; mon entrevue avec nos ca-
marades à la tête des sections du syndicat.
le processus de l'œuvre réalisée. Je me limiterai
donc à résumer l'œuvre en elle-même et à dire
à quel degré de développement elle était arri-
vée au moment d; mon entrevue avec nos ca-
marades à la tête des sections du syndicat.
L'organisation de la branche médicale s'étend
à toute la Catalogae. Il s'est constitué un grand
appareil dont les parties sont géographiquement
articulées selon le;; diverses activités, en accord
avec un plan d'ensemble. La Catalogne fut di-
visée en 9 zones : Barcelone, Tarragone, Lerida,
à toute la Catalogae. Il s'est constitué un grand
appareil dont les parties sont géographiquement
articulées selon le;; diverses activités, en accord
avec un plan d'ensemble. La Catalogne fut di-
visée en 9 zones : Barcelone, Tarragone, Lerida,
Reus, Bergheda, Ripoll, Hautes-Pyrénées. Ce sont
les centres autour desquels sont groupés à leur
tour les petites villes et les villages.
les centres autour desquels sont groupés à leur
tour les petites villes et les villages.
Le nombre des petites villes étant de 27, on
a au total 36 centres sanitaires, distribués dans
toute la Catalogne, coordonnant leurs efforts afin
que pas un village, pas une fraction, par un pay-
san isolé dans la montagne, pas une femme,
pas un enfant, ne manquent de soins médicaux.
Chacune des neuf zones a un centre syndical dont
le Comité central contrôle et dirige les services
sanitaires. A leur tour les comités des environs
s'adressent à Barcelone.
a au total 36 centres sanitaires, distribués dans
toute la Catalogne, coordonnant leurs efforts afin
que pas un village, pas une fraction, par un pay-
san isolé dans la montagne, pas une femme,
pas un enfant, ne manquent de soins médicaux.
Chacune des neuf zones a un centre syndical dont
le Comité central contrôle et dirige les services
sanitaires. A leur tour les comités des environs
s'adressent à Barcelone.
Les sections de catégories sont autonomes au
sein du syndicat. Mais cette autonomie n'est pas
synonyme d'isolement. Une fois par semaine, le
Comité central de Barcelone, nommé par le Con
grès, se réunit avec un délégué de chaque sec-
tion. Aussi bien du point de vue technique que
géographique, les activités répondent à un plan
général.
sein du syndicat. Mais cette autonomie n'est pas
synonyme d'isolement. Une fois par semaine, le
Comité central de Barcelone, nommé par le Con
grès, se réunit avec un délégué de chaque sec-
tion. Aussi bien du point de vue technique que
géographique, les activités répondent à un plan
général.
La population reçut immédiatement le bénéfice
des initiatives du syndicat. Celui-ci dirige et
contrôle tous les hôpitaux et cliniques. Dans
Barcelone il fonda 6 hôpitaux : l'hôpital prolé-
taire, celui du peuple, l'hôpital Pompéia, 2
hôpitaux militaires, et le pavillon de Romania.
En outre, 8 nouveaux sanatoriums s'ouvrirent
en Catalogne : le Sana Maritime de Cada-
fell, le Sana de la Florida, le Pavillon Modèle
de Valdidrera, le Sana de la Bonnanova, le Sana
des Très Torres, l'hospice de Montserrat, de Ter-
ramar, à Sitges, et le Sana de San Andréa.
des initiatives du syndicat. Celui-ci dirige et
contrôle tous les hôpitaux et cliniques. Dans
Barcelone il fonda 6 hôpitaux : l'hôpital prolé-
taire, celui du peuple, l'hôpital Pompéia, 2
hôpitaux militaires, et le pavillon de Romania.
En outre, 8 nouveaux sanatoriums s'ouvrirent
en Catalogne : le Sana Maritime de Cada-
fell, le Sana de la Florida, le Pavillon Modèle
de Valdidrera, le Sana de la Bonnanova, le Sana
des Très Torres, l'hospice de Montserrat, de Ter-
ramar, à Sitges, et le Sana de San Andréa.
Les sanatoriums furent installés le plus sou-
vent dans de beaux édifices, dans de somp-
tueuses résidences aristocratiques, et dans des
auberges de luxe, construites en montagne,
parmi les pins.
vent dans de beaux édifices, dans de somp-
tueuses résidences aristocratiques, et dans des
auberges de luxe, construites en montagne,
parmi les pins.
Ce n'était pas chose facile que d'organiser
les hôpitaux. On devait improviser des instal-
lations pour satisfaire le désir de procurer
rapidement au peuple les moyens d'être soi-
gné. Pour cela, aux débuts de 1937, on cons-
truisit de nouveaux pavillons à l'hôpital gé-
néral. L'un d'eux fut destiné aux soins de la
tuberculose osseuse et à l'orthopédie. Son or-
ganisation était telle qu'on doit la considérer
comme une des meilleures du monde dans
cette branche.
les hôpitaux. On devait improviser des instal-
lations pour satisfaire le désir de procurer
rapidement au peuple les moyens d'être soi-
gné. Pour cela, aux débuts de 1937, on cons-
truisit de nouveaux pavillons à l'hôpital gé-
néral. L'un d'eux fut destiné aux soins de la
tuberculose osseuse et à l'orthopédie. Son or-
ganisation était telle qu'on doit la considérer
comme une des meilleures du monde dans
cette branche.
Dans toutes les localités d'une certaine im-
portance furent créées des polycliniques. Elles
ont toutes les spécialités de la médecine et sont
dotées de tout le matériel sanitaire adéquat.
Elles ont été construites dans le but d'éviter
l'agglomération des infirmes et des blessés
dans les petites villes, ce qui cause souvent par
les difficultés de transport, des souffrances
et une mortalité évïtables.
portance furent créées des polycliniques. Elles
ont toutes les spécialités de la médecine et sont
dotées de tout le matériel sanitaire adéquat.
Elles ont été construites dans le but d'éviter
l'agglomération des infirmes et des blessés
dans les petites villes, ce qui cause souvent par
les difficultés de transport, des souffrances
et une mortalité évïtables.
Dans chaque localité, se sont établis des mé-
decins inscrits au Syndicat.
decins inscrits au Syndicat.
En Catalogne, comme dans tout le reste de.
l'Espagne, et dans le monde entier, il y avait un
nombre excessif de médecins. Le sociologue sait
bien combien cette pléthore était artificielle et
due à l'organisation capitaliste, étatiste, et indi-
l'Espagne, et dans le monde entier, il y avait un
nombre excessif de médecins. Le sociologue sait
bien combien cette pléthore était artificielle et
due à l'organisation capitaliste, étatiste, et indi-
vidualiste de la médecine. Maintenant, au
contraire, dans le nouveau système d'organisa-
tion, personne n'est de trop ; même les médecins
font défaut. Quand les habitants d'un pays en
demande un, le Syndicat s'informe d'abord des
conditions sar.itaires de la localité, fait une sta-
tistique des maladies et des accidents qui y sont
le plus fréquent, et dans la liste des médecins
qui peuvent être transférés il choisit celui qui, par
sa spécialité, répond le mieux aux besoins du
lieu. Celui qui refuse d'y aller doit fournir des
raisons très sérieuses. Dans le cas contraire, il
court le risquo de ne plus exercer.
contraire, dans le nouveau système d'organisa-
tion, personne n'est de trop ; même les médecins
font défaut. Quand les habitants d'un pays en
demande un, le Syndicat s'informe d'abord des
conditions sar.itaires de la localité, fait une sta-
tistique des maladies et des accidents qui y sont
le plus fréquent, et dans la liste des médecins
qui peuvent être transférés il choisit celui qui, par
sa spécialité, répond le mieux aux besoins du
lieu. Celui qui refuse d'y aller doit fournir des
raisons très sérieuses. Dans le cas contraire, il
court le risquo de ne plus exercer.
Les frais de; hôpitaux sont payes par la muni-
cipalité et la Généralité ; les frais des polyclini-
ques qui sont construites, par les syndicats ou-
vriers et les municipalités. La santé ne peut tou-
tefois encore ^tre socialisée intégralement : mais
la majeure partie des cliniques de dentistes de
Catalogne est entre les mains du Syndicat. Tous
les hôpitaux, l<;s sanatoriums et les cliniques sont
contrôlés par ui. On tend à supprimer l'exercice
indépendant c.e la médecine et à lui substituer
une organisât! sn sociale. Le médecin privé existe
encore ; mais les abus si fréquents dans cette
profession ont é{é supprimés. Le coût des opéra-
tions certainement plus avantageux pour lui, est
maintenant contrôlé. Les ouvriers payent le syn-
dicat qui délivre l'argent au chirurgien et prend
note de tout. Dans les nouvelles cliniques, on
opère gratuitement et même les extractions de
dents sont gratuites. Le nombre des malades
admis dans Ifs asiles d'aliénés est plus grand
qu'avant.
cipalité et la Généralité ; les frais des polyclini-
ques qui sont construites, par les syndicats ou-
vriers et les municipalités. La santé ne peut tou-
tefois encore ^tre socialisée intégralement : mais
la majeure partie des cliniques de dentistes de
Catalogne est entre les mains du Syndicat. Tous
les hôpitaux, l<;s sanatoriums et les cliniques sont
contrôlés par ui. On tend à supprimer l'exercice
indépendant c.e la médecine et à lui substituer
une organisât! sn sociale. Le médecin privé existe
encore ; mais les abus si fréquents dans cette
profession ont é{é supprimés. Le coût des opéra-
tions certainement plus avantageux pour lui, est
maintenant contrôlé. Les ouvriers payent le syn-
dicat qui délivre l'argent au chirurgien et prend
note de tout. Dans les nouvelles cliniques, on
opère gratuitement et même les extractions de
dents sont gratuites. Le nombre des malades
admis dans Ifs asiles d'aliénés est plus grand
qu'avant.
Dans cette Drganisation naissante, quelle est
donc la situât: on du médecin ? Au cas où nous
l'interrogerions, les réponses seraient nom-
breuses et contradictoires. Il y a deux catégo-
ries distinctes : les vieux et les jeunes. Parmi
les vieux, les plus privilégiés ne sont pas très
satisfaits du changement ; au contraire, les
moins favorisés laissent faire ou coopèrent vo-
lontiers à la nouvelle organisation.
donc la situât: on du médecin ? Au cas où nous
l'interrogerions, les réponses seraient nom-
breuses et contradictoires. Il y a deux catégo-
ries distinctes : les vieux et les jeunes. Parmi
les vieux, les plus privilégiés ne sont pas très
satisfaits du changement ; au contraire, les
moins favorisés laissent faire ou coopèrent vo-
lontiers à la nouvelle organisation.
Les jeunes ont adhéré avec enthousiasme.
Pour la major: té d'entre eux, l'avenir aurait été
une énigme, i.ne source d'inquiétudes. Pendant
des années, ils auraient dû travailler gratuite-
ment dans les hôpitaux, dans les sanatoriums.
Le médecin oificiel rétribué n'allait presque ja-
mais dans les clinîaues. Un médecin plus jeune
travaillait pour lui attendant sa mort pour pren-
dre sa place et encaisser ses honoraires. A son
tour ce médecin avait un secrétaire médical de
nomination récente, lequel attendait la mort
des deux autres pour prendre leur place.
Pour la major: té d'entre eux, l'avenir aurait été
une énigme, i.ne source d'inquiétudes. Pendant
des années, ils auraient dû travailler gratuite-
ment dans les hôpitaux, dans les sanatoriums.
Le médecin oificiel rétribué n'allait presque ja-
mais dans les clinîaues. Un médecin plus jeune
travaillait pour lui attendant sa mort pour pren-
dre sa place et encaisser ses honoraires. A son
tour ce médecin avait un secrétaire médical de
nomination récente, lequel attendait la mort
des deux autres pour prendre leur place.
Maintenant, tous les médecins des hôpitaux
reçoivent 500 pesetas par mois pour trois heu-
res de travail par jour. Ils font en plus un tra-
vail privé. Sachant qu'un bon ouvrier manuel
gagne de 35C à 400 pesetas par mois, pour
7 heures de :ravail par jour, le lecteur peut
faire de lui-rrême les conclusions.
reçoivent 500 pesetas par mois pour trois heu-
res de travail par jour. Ils font en plus un tra-
vail privé. Sachant qu'un bon ouvrier manuel
gagne de 35C à 400 pesetas par mois, pour
7 heures de :ravail par jour, le lecteur peut
faire de lui-rrême les conclusions.
Ce nivellement permet de disposer d'argent
pour payer toutes les dépenses. Il n'y a plus
de médecins qui touchent des émoluments énor-
pour payer toutes les dépenses. Il n'y a plus
de médecins qui touchent des émoluments énor-
10
mes, tandis que d'autres meurent de faim. Dans
un établissement public, aucun ne peut avoir
deux appointements. Plus de la moitié des mé-
decins, leur travail rémunéré accompli, tra-
vaillent ensuite gratuitement. Et ils le font avec
plaisir. Aucune contrainte n'est nécessaire.
un établissement public, aucun ne peut avoir
deux appointements. Plus de la moitié des mé-
decins, leur travail rémunéré accompli, tra-
vaillent ensuite gratuitement. Et ils le font avec
plaisir. Aucune contrainte n'est nécessaire.
« L'œuvre la plus belle », me disait le secré-
taire de la section des médecins, un basque au
dévouement infatigable, est la révolution mo-
rale accomplie dans ce travail ; chacun accom-
plit son devoir avec honnêteté. Le médecin re-
nommé qui est envoyé une fois par semaine
dans un dispensaire n'y manque jamais. Le
personnage important qui parcourait les salles
d'hôpital, suivi par une demi-douzaine de collè-
gues inférieurs à lui hiérarchiquement, l'un te-
nant la cuvette, l'autre la serviette, le troisième
ouvrant la porte et 1s reste, faisant une escorte
d'honneur, humbles devant une si grande auto-
rité (pas toujours conquise par la valeur) n'existe
plus.
taire de la section des médecins, un basque au
dévouement infatigable, est la révolution mo-
rale accomplie dans ce travail ; chacun accom-
plit son devoir avec honnêteté. Le médecin re-
nommé qui est envoyé une fois par semaine
dans un dispensaire n'y manque jamais. Le
personnage important qui parcourait les salles
d'hôpital, suivi par une demi-douzaine de collè-
gues inférieurs à lui hiérarchiquement, l'un te-
nant la cuvette, l'autre la serviette, le troisième
ouvrant la porte et 1s reste, faisant une escorte
d'honneur, humbles devant une si grande auto-
rité (pas toujours conquise par la valeur) n'existe
plus.
« II y a maintenant des camarades de tra-
vail égaux qui s'estiment et se. respectent réci-
proquement ».
vail égaux qui s'estiment et se. respectent réci-
proquement ».
HOPITALET
C'est un faubourg de Barcelone, composé de
trois quartiers et ayant 50.000 habitants. L'in-
dustrie y prédomine. Aux abords s'est déve-
loppée une collectivisation intensive, si fré-
quente dans les environs des grandes villes.
trois quartiers et ayant 50.000 habitants. L'in-
dustrie y prédomine. Aux abords s'est déve-
loppée une collectivisation intensive, si fré-
quente dans les environs des grandes villes.
L'industrie textile était la plus importante.
Toutefois, la métallurgie n'était pas négligea-
ble : elle, comprenait plusieurs fonderies ; elle
comptait deux hauts fourneaux importants et,
en outre, plusieurs ateliers de mécaniques. Il
y avait aussi l'industrie du bois, l'industrie chi-
mique, etc...
Toutefois, la métallurgie n'était pas négligea-
ble : elle, comprenait plusieurs fonderies ; elle
comptait deux hauts fourneaux importants et,
en outre, plusieurs ateliers de mécaniques. Il
y avait aussi l'industrie du bois, l'industrie chi-
mique, etc...
Vu qu'il s'agissait d'un noyau de formation
assez récente, le mouvement social aussi se
devinait récent. Il remontait à la guerre 1914-18.
assez récente, le mouvement social aussi se
devinait récent. Il remontait à la guerre 1914-18.
La C.N.T. et la F.A.I. avaient dans cette am-
biance une influence prépondérante : 8.000
travailleurs étaient dans leur file depuis le dé-
but. Maintenant, il y en a 12.000. L'U.G.T. en
comptait seulement, 1.000.
biance une influence prépondérante : 8.000
travailleurs étaient dans leur file depuis le dé-
but. Maintenant, il y en a 12.000. L'U.G.T. en
comptait seulement, 1.000.
En juillet la lutte et l'ardeur belliqueuse du-
rèrent de cinq à six jours, galvanisant tout le
pays. Une fois cette période terminée, la C.N.T.
donna l'ordre de retourner au travail par éche-
lons, selon les industries. Elle assumait par ces
premiers pas, la responsabilité de la vie. éco-
nomique, abandonnée par les patrons, tout
comme par le gouvernement lui-même.
rèrent de cinq à six jours, galvanisant tout le
pays. Une fois cette période terminée, la C.N.T.
donna l'ordre de retourner au travail par éche-
lons, selon les industries. Elle assumait par ces
premiers pas, la responsabilité de la vie. éco-
nomique, abandonnée par les patrons, tout
comme par le gouvernement lui-même.
Tandis que le travail reprenait, une partie
des forces populaires était mobilisée et durant
trois ou quatre semaines, elle se maintînt en
alerte, derrière les barricades, et dans les rues,
exerçant en outre la surveillance des routes
menant à Barcelone, afin de préserver la ville
de toute attaque. C'est dans cette ferveur révo-
lutionnaire que commença la socialisation.
des forces populaires était mobilisée et durant
trois ou quatre semaines, elle se maintînt en
alerte, derrière les barricades, et dans les rues,
exerçant en outre la surveillance des routes
menant à Barcelone, afin de préserver la ville
de toute attaque. C'est dans cette ferveur révo-
lutionnaire que commença la socialisation.
Chose rare, cette socialisation commença dans
les campagnes. Ce furent les journaliers qui
en prirent l'initiative. Ils étaient en minorité, par
rapport aux propriétaires qui les engageaient
les campagnes. Ce furent les journaliers qui
en prirent l'initiative. Ils étaient en minorité, par
rapport aux propriétaires qui les engageaient
de temps en temps pour les travaux. Mais les
propriétaire se mirent à s'occuper de tout et pro-
voquèrent une réaction de la base. Les légumes
étaient menacés de destruction par manque de
soin. Et Hospitalet commençait à avoir faim.
25 % de sa population se trouvait complètement
inoccupée par suite de la crise et une partie de
ceux qui travaillaient ne pouvait le faire que
trois jours par semaine.
propriétaire se mirent à s'occuper de tout et pro-
voquèrent une réaction de la base. Les légumes
étaient menacés de destruction par manque de
soin. Et Hospitalet commençait à avoir faim.
25 % de sa population se trouvait complètement
inoccupée par suite de la crise et une partie de
ceux qui travaillaient ne pouvait le faire que
trois jours par semaine.
Les ouvriers agricoles comprirent que cette
situation, déjà préoccupante se serait vite ag-
gravée si les prodi.its des vergers étaient per-
dus et ils décidèrent de les sauver. Ils convo-
quèrent les propriétaires et dans une Assemblée
les uns et les autres décidèrent de socialiser
immédiatement le travail de la terre.
situation, déjà préoccupante se serait vite ag-
gravée si les prodi.its des vergers étaient per-
dus et ils décidèrent de les sauver. Ils convo-
quèrent les propriétaires et dans une Assemblée
les uns et les autres décidèrent de socialiser
immédiatement le travail de la terre.
On créa alors la Collectivité des paysans où
tous adhèrent. En tête figuraient toujours la
C.N.T. et la F.A.I.
tous adhèrent. En tête figuraient toujours la
C.N.T. et la F.A.I.
Alors, à la petite propriété cultivée par le pro-
priétaire et le jourralier embauché pour la pé-
riode de travail, se substitua la grande étendue
travaillée selon un ;}lan général. Le travail aug-
menta donc en intensité et en extension. Même
les terres considéré =s jusqu'alors stériles furent
utilisées.
priétaire et le jourralier embauché pour la pé-
riode de travail, se substitua la grande étendue
travaillée selon un ;}lan général. Le travail aug-
menta donc en intensité et en extension. Même
les terres considéré =s jusqu'alors stériles furent
utilisées.
Mais le moyen d'ochange était encore l'argent.
Son manque consti ua une grande difficulté. Il
empêchait l'achat d=s outils de travail, des ani-
maux, et la technisation de l'agriculture. Il im-
posait d'importants sacrifices, tels que la renon-
ciation aux 15 % d'augmentation décrétée par le
gouvernement régional, et à la journée de tra-
vail de 6 heures. Los paysans de la Collectivité
perfectionnèrent pourtant leur organisation et
vivaient de leurs propres ressources qui, sans
doute, seront plus grandes quand la vente de
leurs produits sera possible.
Son manque consti ua une grande difficulté. Il
empêchait l'achat d=s outils de travail, des ani-
maux, et la technisation de l'agriculture. Il im-
posait d'importants sacrifices, tels que la renon-
ciation aux 15 % d'augmentation décrétée par le
gouvernement régional, et à la journée de tra-
vail de 6 heures. Los paysans de la Collectivité
perfectionnèrent pourtant leur organisation et
vivaient de leurs propres ressources qui, sans
doute, seront plus grandes quand la vente de
leurs produits sera possible.
Les industries passèrent par les étapes con-
nues dans la première phase de la révolution.
On commença par 1s contrôle des usines, spécia-
lement de celles en activités. Les ouvriers nom-
mèrent dans chaque entreprise des comités ayant
la mission de veille ir sur toute la production et
sur l'administration patronale.
nues dans la première phase de la révolution.
On commença par 1s contrôle des usines, spécia-
lement de celles en activités. Les ouvriers nom-
mèrent dans chaque entreprise des comités ayant
la mission de veille ir sur toute la production et
sur l'administration patronale.
Les entreprises pauvres, ayant des dettes —
nombreuses dans cette période de crise — furent
immédiatement coll =c{ivisées. Le patron fut éli-
miné comme tel, et assimilé aux producteurs.
nombreuses dans cette période de crise — furent
immédiatement coll =c{ivisées. Le patron fut éli-
miné comme tel, et assimilé aux producteurs.
Les comités dirigèrent eux-mêmes la produc-
tion, suivant la ligne d'une économie particula-
riste, tracée par le Décret sur la Collectivisation.
La C.N.T. et la F.A.!. créèrent immédiatement les
conseils d'intensification de la production qui
obligèrent les pâtre ns à prendre la main-d'œu-
vre inoccupée. Presque tous les sans-travail fu-
rent ainsi engagés. Cette mesure fut fatalement
anti-économique : le manque de matière pre-
mière dans l'industrie textile — la plus impor-
tante — et de marchés devaient nécessairement
conduire à un abaissement de la production, dis-
proportionné par rcpport à la main-d'œuvre oc-
cupée.
tion, suivant la ligne d'une économie particula-
riste, tracée par le Décret sur la Collectivisation.
La C.N.T. et la F.A.!. créèrent immédiatement les
conseils d'intensification de la production qui
obligèrent les pâtre ns à prendre la main-d'œu-
vre inoccupée. Presque tous les sans-travail fu-
rent ainsi engagés. Cette mesure fut fatalement
anti-économique : le manque de matière pre-
mière dans l'industrie textile — la plus impor-
tante — et de marchés devaient nécessairement
conduire à un abaissement de la production, dis-
proportionné par rcpport à la main-d'œuvre oc-
cupée.
Pour porter remècie à la misère existante, il fut
créé, sur l'initiative^ de la C.N.T., des commis-
sions de ravitaillement pour le peuple : leur
tâche était de procirer de l'alimentation à ceux
créé, sur l'initiative^ de la C.N.T., des commis-
sions de ravitaillement pour le peuple : leur
tâche était de procirer de l'alimentation à ceux
11
qui ne travaillaient pas et à ceux qui travail-
laient. La situation économique ne pouvant se
normaliser rapidement et des familles très nom-
breuses ne percevant pas de salaires suffisants
pour vivre, ces commissions continuèrent long-
temps à jouer leur rôle de secours social.
laient. La situation économique ne pouvant se
normaliser rapidement et des familles très nom-
breuses ne percevant pas de salaires suffisants
pour vivre, ces commissions continuèrent long-
temps à jouer leur rôle de secours social.
On s'aperçut vite du danger inhérent à l'ad-
ministration particulariste des entreprises ; en-
tre autres, la concurrence et le manque de soli-
darité auraient pu provoquer des heurts et des
luttes incompatibles avec l'esprit socialiste et
libertaire. La C.N.T. locale lança alors le moi
d'ordre « Socialisons les industries ».
ministration particulariste des entreprises ; en-
tre autres, la concurrence et le manque de soli-
darité auraient pu provoquer des heurts et des
luttes incompatibles avec l'esprit socialiste et
libertaire. La C.N.T. locale lança alors le moi
d'ordre « Socialisons les industries ».
L'idée se réalisa rapidement. D'abord les coif-
feurs, puis les spectacles, l'industrie du bois, l'in-
dustrie de construction, l'alimentation, et les
transports. Je trouvais l'industrie métallurgique
en pleine activité réorganisatrice et celle des
textiles seulement partiellement collectivisée. De
même dans toute la Catalogne. Les industries
chimiques étaient encore aux comités de con-
trôle. La nouvelle structure trouvait des obsta-
cles dans le manque de matières premières et
dans le manque de travail qui s'ensuivait. D'au-
tre part, les résistances de l'U.G.T. obligèrent à
marquer le pas.
feurs, puis les spectacles, l'industrie du bois, l'in-
dustrie de construction, l'alimentation, et les
transports. Je trouvais l'industrie métallurgique
en pleine activité réorganisatrice et celle des
textiles seulement partiellement collectivisée. De
même dans toute la Catalogne. Les industries
chimiques étaient encore aux comités de con-
trôle. La nouvelle structure trouvait des obsta-
cles dans le manque de matières premières et
dans le manque de travail qui s'ensuivait. D'au-
tre part, les résistances de l'U.G.T. obligèrent à
marquer le pas.
Des industries actives et passives existant donc,
la nécessité de stabiliser le salaire unique pour
tous s'imposa vite. Il fuj même envisagé la créa-
tion d'une caisse commune inspirée de la solida-
rité inter-industrielle, de laquelle tous les ouvriers
sans exception tiraient des lessources égales.
Cela ne put être réalisé. La solidarité financière
se pratiquait seulement dans quelques branches.
la nécessité de stabiliser le salaire unique pour
tous s'imposa vite. Il fuj même envisagé la créa-
tion d'une caisse commune inspirée de la solida-
rité inter-industrielle, de laquelle tous les ouvriers
sans exception tiraient des lessources égales.
Cela ne put être réalisé. La solidarité financière
se pratiquait seulement dans quelques branches.
Quand les différentes branches avaient une pro-
duction notablement excédentaire, on en don-
nait communication à la Commission centrale
administrative laquelle voyait comment et dans
quelles mesures aider les branches déficitaires,
auxquelles elle, distribuait les sommes néces-
saires à l'achat de matières premières et de di-
vers éléments de production. Quand les sommes
à délivrer étaient importantes, les délégués de
toutes les branches, réunis en congrès, exami-
naient les conditions économiques et techniques
de l'aide. L'examen fait e.t les observations, indi-
cations et critiques étant entendues, on accordait
l'argent demandé, ou bien la nécessité d'éliminer
la cause du déficit de l'industrie considérée se
révélait.
duction notablement excédentaire, on en don-
nait communication à la Commission centrale
administrative laquelle voyait comment et dans
quelles mesures aider les branches déficitaires,
auxquelles elle, distribuait les sommes néces-
saires à l'achat de matières premières et de di-
vers éléments de production. Quand les sommes
à délivrer étaient importantes, les délégués de
toutes les branches, réunis en congrès, exami-
naient les conditions économiques et techniques
de l'aide. L'examen fait e.t les observations, indi-
cations et critiques étant entendues, on accordait
l'argent demandé, ou bien la nécessité d'éliminer
la cause du déficit de l'industrie considérée se
révélait.
Cette initiative de solidarité fut, peu après,
intégrée dans l'institution du salaire familial. A
cette fin, un recensement spécial avait été fait,
et on avait dressé de minutieuses statistiques.
intégrée dans l'institution du salaire familial. A
cette fin, un recensement spécial avait été fait,
et on avait dressé de minutieuses statistiques.
Les préoccupations de la vie économique
n'étaient pas seules à assaillir nos camarades.
La culture avait toujours été vive dans leurs
aspirations. Après Fancisco Ferrer, les syndicats
ouvriers anarchistes avaient maintenu en Espa-
gne, de 50 à 100 écoles rationalistes dans les-
quelles se. donnait un enseignement indépendant
de tout dogme, tant politique que religieux et
même social. Les camarades de Hospitalet af-
frontèrent immédiatement ce problème. Il y avait
8.000 e.nfants dont 4.000 seulement pouvaient ac-
céder aux écoles. Les autres restaient dans les
n'étaient pas seules à assaillir nos camarades.
La culture avait toujours été vive dans leurs
aspirations. Après Fancisco Ferrer, les syndicats
ouvriers anarchistes avaient maintenu en Espa-
gne, de 50 à 100 écoles rationalistes dans les-
quelles se. donnait un enseignement indépendant
de tout dogme, tant politique que religieux et
même social. Les camarades de Hospitalet af-
frontèrent immédiatement ce problème. Il y avait
8.000 e.nfants dont 4.000 seulement pouvaient ac-
céder aux écoles. Les autres restaient dans les
rues par manque d'école ou par suite de la mi-
sère des f ami .les.
sère des f ami .les.
La C.N.T. et la F.A.I. ne voulaient pas seule-
ment résoudre ce grave problème. Elles auraient
pu le faire, mais elles préférèrent unir leurs ef-
forts à ceux des autres fractions chez lesquel-
les elles espéraient trouver un écho favorable.
Les militants de l'U.G.T. et ceux de la Gauche
catalane se réunirent donc, et on leur présenta
les projets de réforme de l'enseignement qui, du
fait de leur objectivité, furent acceptés. Les trois
fractions se rr.irent au travail ensemble.
ment résoudre ce grave problème. Elles auraient
pu le faire, mais elles préférèrent unir leurs ef-
forts à ceux des autres fractions chez lesquel-
les elles espéraient trouver un écho favorable.
Les militants de l'U.G.T. et ceux de la Gauche
catalane se réunirent donc, et on leur présenta
les projets de réforme de l'enseignement qui, du
fait de leur objectivité, furent acceptés. Les trois
fractions se rr.irent au travail ensemble.
En six moi:> de révolution, parmi mille diffi-
cultés, le problème de la guerre, et celui de la
reconstruction il était difficile de progresser ra-
pidement. Malgré cela, le miracle s'accomplit.
On adapta viie de nombreux édifices et aujour-
d'hui 6.500 enfants assistent aux classes dans
des salles plus vastes, plus hygiéniques et lumi-
neuses que cslles qui existaient jusqu'alors. Le
personnel enseignant a été amélioré, avec l'éli-
mination de tous les vieux maîtres au cerveau
racorni, liés à l'esprit de l'enseignement clérical.
On suivait librement les tendances pédagogi-
ques modernes. Une fois par semaine, les maî-
tres se réunissaient pour exposer et discuter les
résultats de leurs efforts.
cultés, le problème de la guerre, et celui de la
reconstruction il était difficile de progresser ra-
pidement. Malgré cela, le miracle s'accomplit.
On adapta viie de nombreux édifices et aujour-
d'hui 6.500 enfants assistent aux classes dans
des salles plus vastes, plus hygiéniques et lumi-
neuses que cslles qui existaient jusqu'alors. Le
personnel enseignant a été amélioré, avec l'éli-
mination de tous les vieux maîtres au cerveau
racorni, liés à l'esprit de l'enseignement clérical.
On suivait librement les tendances pédagogi-
ques modernes. Une fois par semaine, les maî-
tres se réunissaient pour exposer et discuter les
résultats de leurs efforts.
Les enfants étaient l'objet d'autres attentions.
Je vis qu'il avait été construit un immense édi-
fice où les patents pouvaient les laisser pour va-
quer à leurs Dccupatïons. Tous les jeudis, dans
tous les cinénas de la ville, on donnait des
spectacles poxr enfants avec des films choisis
et des programmes habilement conçus. Dans les
usines, où le travail des femmes était néces-
saire, on pré Dorait des crèches. J'ai assisté à
l'inauguration de la première. On avait déjà
presque entièrement construit une maternité
pour les femnees du peuple qui, jusqu'alors,
avaient accourhé dans des conditions épouvan-
tablement ar.ti-hygiéniques. Un gynécologue
compétent dirigeait la construction de cet éta-
blissement.
Je vis qu'il avait été construit un immense édi-
fice où les patents pouvaient les laisser pour va-
quer à leurs Dccupatïons. Tous les jeudis, dans
tous les cinénas de la ville, on donnait des
spectacles poxr enfants avec des films choisis
et des programmes habilement conçus. Dans les
usines, où le travail des femmes était néces-
saire, on pré Dorait des crèches. J'ai assisté à
l'inauguration de la première. On avait déjà
presque entièrement construit une maternité
pour les femnees du peuple qui, jusqu'alors,
avaient accourhé dans des conditions épouvan-
tablement ar.ti-hygiéniques. Un gynécologue
compétent dirigeait la construction de cet éta-
blissement.
Puisque nous parlons d'hygiène, notons qu'il
ne manquait pas de dispositions rigoureuses
selon lesquelles tous les travailleurs et leurs fa-
milles devaient recevoir dans les cliniques, les
dispensaires, des consultations et les soins, aux-
quels ils avais :nt droit, par des médecins spécia-
lisés. Toujours sous l'égide de la C.N.T. et la
F.A.I. tous purent être dûment assistés.
ne manquait pas de dispositions rigoureuses
selon lesquelles tous les travailleurs et leurs fa-
milles devaient recevoir dans les cliniques, les
dispensaires, des consultations et les soins, aux-
quels ils avais :nt droit, par des médecins spécia-
lisés. Toujours sous l'égide de la C.N.T. et la
F.A.I. tous purent être dûment assistés.
Mais cela r.'était qu'une solution provisoire ;
on cvait construit un hôpital provincial de gran-
des dimensions.
on cvait construit un hôpital provincial de gran-
des dimensions.
Parallèlement à cette activité syndicale, il en
existait une outre, municipale. L'esprit commu-
nal est très marqué dans les conceptions de nos
camarades d'Hospitalet. Ils auraient pu s'empa-
rer complètement de la situation. Mais par soli-
darité et loyauté anti-fasciste, ils ne le voulurent
pas. Ils invitaient l'U.G.T. et le parti de la Gau-
che Catalane à constituer ensemble le conseil
municipal.
existait une outre, municipale. L'esprit commu-
nal est très marqué dans les conceptions de nos
camarades d'Hospitalet. Ils auraient pu s'empa-
rer complètement de la situation. Mais par soli-
darité et loyauté anti-fasciste, ils ne le voulurent
pas. Ils invitaient l'U.G.T. et le parti de la Gau-
che Catalane à constituer ensemble le conseil
municipal.
On nomme en tout 22 conseillers dont 8 s'ac-
quittaient de charges effectives. Le maire de la
ville est un militant anarchiste.
quittaient de charges effectives. Le maire de la
ville est un militant anarchiste.
12
Les deux autres fractions ont eu peur de l'au-
dace révolutionnaire des nôtres et elles se sont
retirées ensuite de la mairie. Nos comarades ont
toujours attendu qu'ils reviennent, et entre temps,
ils ont continué sans faiblesse leur travail.
dace révolutionnaire des nôtres et elles se sont
retirées ensuite de la mairie. Nos comarades ont
toujours attendu qu'ils reviennent, et entre temps,
ils ont continué sans faiblesse leur travail.
Ils avaient l'esprit administratif. Ils avaient
déjà délimité les fonctions incombant aux syn-
dicats et celles incombant à la commune. La
tendance à considérer les intérêts du groupe
dans le cadre des intérêts généraux dominait
toujours. Et comme il n'existait pas de syndi-
cat isolé, puisque chacun devait faire les comp-
tes pour de nouvelles œuvres avec l'assentiment
des autres, les syndicats ne prédominaient pas,
même là où les problèmes à résoudre revêtaient
un caractère général. C'est la mairie qui était
alors compétente. Enseignement, travaux pu-
blics, santé, assistance sociale, etc. étaient des
organismes reliés à la mairie. Pour la ratifica-
tion de leur travail, nos camarades faisaient
appel à l'opinion publique.
déjà délimité les fonctions incombant aux syn-
dicats et celles incombant à la commune. La
tendance à considérer les intérêts du groupe
dans le cadre des intérêts généraux dominait
toujours. Et comme il n'existait pas de syndi-
cat isolé, puisque chacun devait faire les comp-
tes pour de nouvelles œuvres avec l'assentiment
des autres, les syndicats ne prédominaient pas,
même là où les problèmes à résoudre revêtaient
un caractère général. C'est la mairie qui était
alors compétente. Enseignement, travaux pu-
blics, santé, assistance sociale, etc. étaient des
organismes reliés à la mairie. Pour la ratifica-
tion de leur travail, nos camarades faisaient
appel à l'opinion publique.
Ils rendaient donc compte du travail fait, en
convoquant la population dans de vastes assem-
blées de quartiers, assemblées qui se déroulaient
dans les plus grandes salles existantes. Ils ex-
posaient ce qu'ils avaient fait, et ce qu'ils se
proposaient de faire. Et le peuple manifestait son
opinion. Par conséquent, il ne se faisait pas de
politique de parti, à portes closes. Il ne se pre-
nait pas de décisions à l'insu de la population.
Le contact avec elle était toujours maintenu, les
normes libertaires étant appliquées de la meil-
leure façon possible.
convoquant la population dans de vastes assem-
blées de quartiers, assemblées qui se déroulaient
dans les plus grandes salles existantes. Ils ex-
posaient ce qu'ils avaient fait, et ce qu'ils se
proposaient de faire. Et le peuple manifestait son
opinion. Par conséquent, il ne se faisait pas de
politique de parti, à portes closes. Il ne se pre-
nait pas de décisions à l'insu de la population.
Le contact avec elle était toujours maintenu, les
normes libertaires étant appliquées de la meil-
leure façon possible.
LEVANT
La Fédération Régionale du Levant, constituée
par nos camarades de la C.N.Ï. qui a servi de
base à la constitution de la Fédération parallèle
des collectivités agraires, englobait cinq provin-
ces : Castellon de la Plana, Valence, Alicante,
Murcie et Albacète. L'importance de l'agriculture
pour les quatre premières — toutes méditerra-
néennes — parmi les plus riches de l'Espagne,
et celle de la population — presque 3.300.000
habitants — donnent un grand relief aux réali-
tions sociales qui y ont été effectuées. A no-
tre avis, c'est dans le Levant — grâce à ses
richesses naturelles et à l'esprit créateur de
nos camarades — que l'œuvre des collectivités
agraires a été la plus vaste et la mieux réa-
lisée.
par nos camarades de la C.N.Ï. qui a servi de
base à la constitution de la Fédération parallèle
des collectivités agraires, englobait cinq provin-
ces : Castellon de la Plana, Valence, Alicante,
Murcie et Albacète. L'importance de l'agriculture
pour les quatre premières — toutes méditerra-
néennes — parmi les plus riches de l'Espagne,
et celle de la population — presque 3.300.000
habitants — donnent un grand relief aux réali-
tions sociales qui y ont été effectuées. A no-
tre avis, c'est dans le Levant — grâce à ses
richesses naturelles et à l'esprit créateur de
nos camarades — que l'œuvre des collectivités
agraires a été la plus vaste et la mieux réa-
lisée.
(...) Des cinq provinces, c'est dans celle de
Valence que le mouvement a été le plus déve-
"oppé.
Valence que le mouvement a été le plus déve-
"oppé.
Cela s'explique en premier lieu par sa grande
importance : 1.650.000 habitants au moment de
la révolution. Puis, par ordre décroissant, ve-
nait la province de Murcie, avec 622.000 habi-
tants ; Alicante avec 470.000 ; Castellon de la
Plana avec 312.000 ; e.nfin Albacète qui en com-
prenait 238.000. Le nombre des collectivités
était en proportion de celui des habitants. Mais
c'est dans la province de Valence que les so-
cialisations ont pris depuis le début un ryth-
me plus décisif et accéléré.
importance : 1.650.000 habitants au moment de
la révolution. Puis, par ordre décroissant, ve-
nait la province de Murcie, avec 622.000 habi-
tants ; Alicante avec 470.000 ; Castellon de la
Plana avec 312.000 ; e.nfin Albacète qui en com-
prenait 238.000. Le nombre des collectivités
était en proportion de celui des habitants. Mais
c'est dans la province de Valence que les so-
cialisations ont pris depuis le début un ryth-
me plus décisif et accéléré.
Ce n'est pas ur.e surprise pour quiconque
connaît l'histoire sociale de cette région. De-
puis 1870, le mouvoment libertaire y a toujours
eu, dans les campe :gnes, des militants obstinés;
et tandis que dans la ville de Valence, à cer-
taines époques, il était complètement éteint, dans
les campagnes, il :i'est jamais mort : les pay-
sans tenaient toujours haut, le flambeau. Et
c'est à ces militants; souvent pejits propriétaires,
qu'on fit appel pou: le faire renaître, vers 1918,
dans la ville conquise par le républicanisme,
seul élément — alors — d'opposition à la mo-
narchie.
connaît l'histoire sociale de cette région. De-
puis 1870, le mouvoment libertaire y a toujours
eu, dans les campe :gnes, des militants obstinés;
et tandis que dans la ville de Valence, à cer-
taines époques, il était complètement éteint, dans
les campagnes, il :i'est jamais mort : les pay-
sans tenaient toujours haut, le flambeau. Et
c'est à ces militants; souvent pejits propriétaires,
qu'on fit appel pou: le faire renaître, vers 1918,
dans la ville conquise par le républicanisme,
seul élément — alors — d'opposition à la mo-
narchie.
Pour ces hommes, la révolution n'était pas
seulement la lutte sur les barricades ; elle a
toujours apparu comme prise de possession de
la terre et organisation du socialisme liber-
taire.
seulement la lutte sur les barricades ; elle a
toujours apparu comme prise de possession de
la terre et organisation du socialisme liber-
taire.
(...) Au congrès ce la Fédération des Paysans
du Levant, 21-23 novembre 1937, on comptait
430 collectivités crganisées. Cinq mois plus
tard, on en comptait cinq cents. Pour faire ap-
précier ces chiffres, signalons que les 5 pro-
vinces totalisaient, de la plus grande ville au
plus petit village, 1.172 municipalités. C'est
donc dans 43 % dos localités de la région agri-
cole la plus riche c'Espagne, où, dans la « huer-
ta» de Valence, la iensité de la population est la
plus élevée du monde — 450 hab. au km2, que
sont apparues, er 20 mois, 500 collectivités
agraires.
du Levant, 21-23 novembre 1937, on comptait
430 collectivités crganisées. Cinq mois plus
tard, on en comptait cinq cents. Pour faire ap-
précier ces chiffres, signalons que les 5 pro-
vinces totalisaient, de la plus grande ville au
plus petit village, 1.172 municipalités. C'est
donc dans 43 % dos localités de la région agri-
cole la plus riche c'Espagne, où, dans la « huer-
ta» de Valence, la iensité de la population est la
plus élevée du monde — 450 hab. au km2, que
sont apparues, er 20 mois, 500 collectivités
agraires.
En général, de telles collectivités n'ont pas
le même caractère que celles d'Aragon. Dans
cette région, la prédominance plus ou moins
exclusive des trovpes de la C.N.T. et de la
F.A.I. ont empêché longtemps la police, l'admi-
nistration de l'Etat et les partis politiques s'ap-
puyant sur l'autorité gouvernementale, de faire
obstacle à leur développement. Dans le Levant,
comme du reste dans toutes les autres régions
d'Espagne, les autc rites sont restées à leur poste
avec les Gardes d'Assaut, les carabiniers et les
troupes commandées par des officiers qui
n'avaient pas du tout l'esprit révolutionnaire.
le même caractère que celles d'Aragon. Dans
cette région, la prédominance plus ou moins
exclusive des trovpes de la C.N.T. et de la
F.A.I. ont empêché longtemps la police, l'admi-
nistration de l'Etat et les partis politiques s'ap-
puyant sur l'autorité gouvernementale, de faire
obstacle à leur développement. Dans le Levant,
comme du reste dans toutes les autres régions
d'Espagne, les autc rites sont restées à leur poste
avec les Gardes d'Assaut, les carabiniers et les
troupes commandées par des officiers qui
n'avaient pas du tout l'esprit révolutionnaire.
Il était donc di:ficile de collectiviser depuis
le début, avec la même rapidité obstinée qu'en
Aragon. D'autre pc:rt, dans la région du Levant,
l'importance des villages qui souvent ressem-
blent à de petites villes, rendait difficile aussi
l'adhésion unanimo de la population ; les divi-
sions politiques et sociales y étaient plus net-
tement marquées, L;s différentes tendances mieux
organisées.
le début, avec la même rapidité obstinée qu'en
Aragon. D'autre pc:rt, dans la région du Levant,
l'importance des villages qui souvent ressem-
blent à de petites villes, rendait difficile aussi
l'adhésion unanimo de la population ; les divi-
sions politiques et sociales y étaient plus net-
tement marquées, L;s différentes tendances mieux
organisées.
Presque toujours, dans le Levant, les collecti-
vités sont nées sur l'initiative des syndicats des
paysans du lieu ; mais elles ne tardèrent pas
à constituer une organisation autonome. On
maintint seulemen: un contact externe avec le
syndicat qui constituait la jonction nécessaire
entre collectivistes, et individualistes. En fait,
ces derniers appra tarent leurs produits pour les
échanger contre autre chose. Ainsi, en prati-
que, leur isolatior nisme se diluait entièrement
dans l'œuvre médiatrice du syndicat, lequel
s'était désormais organisé sur une structure ré-
pondant au nouve-ru but. Dans son sein avaient
été créées des commissions — pour le riz, les
vités sont nées sur l'initiative des syndicats des
paysans du lieu ; mais elles ne tardèrent pas
à constituer une organisation autonome. On
maintint seulemen: un contact externe avec le
syndicat qui constituait la jonction nécessaire
entre collectivistes, et individualistes. En fait,
ces derniers appra tarent leurs produits pour les
échanger contre autre chose. Ainsi, en prati-
que, leur isolatior nisme se diluait entièrement
dans l'œuvre médiatrice du syndicat, lequel
s'était désormais organisé sur une structure ré-
pondant au nouve-ru but. Dans son sein avaient
été créées des commissions — pour le riz, les
13
oranges, l'horticulture. La collectivité elle-même
avait son magasin et ses commissions. Plus tard,
cet inutile dédoublement fut supprimé. Les ma-
gasins furent unifiés ; les commissions furent
composées de collectivistes et d'individualistes
inscrits au syndicat. D'autres en créèrent de mix-
tes ; comme par exemple celle pour l'achat des
machines, des semences, des engrais, des in-
secticides, des produits vétérinaires, etc. Ils uti-
lisèrent les mêmes camions. La solidarité s'éten-
dit. Et l'esprit collectiviste attirait toujours plus
les récalcitrants.
avait son magasin et ses commissions. Plus tard,
cet inutile dédoublement fut supprimé. Les ma-
gasins furent unifiés ; les commissions furent
composées de collectivistes et d'individualistes
inscrits au syndicat. D'autres en créèrent de mix-
tes ; comme par exemple celle pour l'achat des
machines, des semences, des engrais, des in-
secticides, des produits vétérinaires, etc. Ils uti-
lisèrent les mêmes camions. La solidarité s'éten-
dit. Et l'esprit collectiviste attirait toujours plus
les récalcitrants.
L'organisation de base étant donc double. Elle
embrassait intelligemment tout ce qu'il était pos-
sible d'embrasser. Elle permettait même, grâce
au syndicat, de continuer à pénétrer dans les
couches populaires susceptibles d'être influen-
cées.
embrassait intelligemment tout ce qu'il était pos-
sible d'embrasser. Elle permettait même, grâce
au syndicat, de continuer à pénétrer dans les
couches populaires susceptibles d'être influen-
cées.
Rapidement, cette organisation tendit à uni-
fier et rationaliser tout. Le rationnement et le
salaire familial furent établis par cantons, les
villages les plus riches aidèrent les plus pau-
vres à travers les comités cantonaux intermé-
diaires. Dans chaque centre cantonal, fut consti-
tué un noyau de techniciens composé de comp-
tables, d'un expert en agriculture, d'un vétéri-
naire, d'une spécialiste de la lutte contre les ma-
ladies des plantes, d'un ingénieur, d'un archi-
tecte et d'un expert des questions commerciales.
L'organisation permettait de distribuer et d'uti-
liser également les éléments nécessaires au bon
fonctionnement de l'activité.
Chaque collectivité avait un vétérinaire.
La plus grande partie des ingénieurs et des
vétérinaires adhérait au syndicat de la C.N.T. On
y comptait aussi un grand nombre de techni-
ciens de l'agriculture. Les spécialistes dans la
culture de la vigne et dans la fabrication du
vin y étaient tous, sauf six. Les ingénieurs et
les vétérinaires employés par les autres entre-
prises et non par la collectivité, travaillaient
aussi pour celle-ci et même de façon désinté-
ressée, s'appliquant à l'élaboration de plans, et
à la réalisation de projets. L'esprit créateur de
la révolution avait conquis les esprits progres-
sistes.
fier et rationaliser tout. Le rationnement et le
salaire familial furent établis par cantons, les
villages les plus riches aidèrent les plus pau-
vres à travers les comités cantonaux intermé-
diaires. Dans chaque centre cantonal, fut consti-
tué un noyau de techniciens composé de comp-
tables, d'un expert en agriculture, d'un vétéri-
naire, d'une spécialiste de la lutte contre les ma-
ladies des plantes, d'un ingénieur, d'un archi-
tecte et d'un expert des questions commerciales.
L'organisation permettait de distribuer et d'uti-
liser également les éléments nécessaires au bon
fonctionnement de l'activité.
Chaque collectivité avait un vétérinaire.
La plus grande partie des ingénieurs et des
vétérinaires adhérait au syndicat de la C.N.T. On
y comptait aussi un grand nombre de techni-
ciens de l'agriculture. Les spécialistes dans la
culture de la vigne et dans la fabrication du
vin y étaient tous, sauf six. Les ingénieurs et
les vétérinaires employés par les autres entre-
prises et non par la collectivité, travaillaient
aussi pour celle-ci et même de façon désinté-
ressée, s'appliquant à l'élaboration de plans, et
à la réalisation de projets. L'esprit créateur de
la révolution avait conquis les esprits progres-
sistes.
Les agronomes proposaient les entreprises né-
cessaires et possibles : planification de l'agri-
culture, transplantation des cultures que la pro-
priété individuelle ne permettait pas toujours
d'adapter aux conditions géologiques et clima-
tiques plus favorables. Le vétérinaire organisait
scientifique l'élevage. Eventuellement, il consul-
tait l'agronome sur les ressources dont il pou-
vait disposer. Et avec les commissions paysan-
nes, ce dernier adaptait les cultures dans la me-
sure du possible.
cessaires et possibles : planification de l'agri-
culture, transplantation des cultures que la pro-
priété individuelle ne permettait pas toujours
d'adapter aux conditions géologiques et clima-
tiques plus favorables. Le vétérinaire organisait
scientifique l'élevage. Eventuellement, il consul-
tait l'agronome sur les ressources dont il pou-
vait disposer. Et avec les commissions paysan-
nes, ce dernier adaptait les cultures dans la me-
sure du possible.
Mais le vétérinaire consultait aussi l'architecte
et l'ingénieur pour la construction des porche-
ries, étables, écuries, et poulaillers collectifs. Le
travail se planifiait spontanément. On planifiait
à la base et depuis la base, selon les principes
libertaires.
et l'ingénieur pour la construction des porche-
ries, étables, écuries, et poulaillers collectifs. Le
travail se planifiait spontanément. On planifiait
à la base et depuis la base, selon les principes
libertaires.
Grâce aux ingénieurs, il avait été construit un
grand nombre de canaux et de puits artésiens
qui ont- permis soit de mieux irriguer les terres,
qui l'étaient peu, soit de transformer celles qui
grand nombre de canaux et de puits artésiens
qui ont- permis soit de mieux irriguer les terres,
qui l'étaient peu, soit de transformer celles qui
étaient sèches. Au moyen de pompes aspirantes
on avait procédé à la prise et à la distribution
de l'eau. Ce n'était pas une nouveauté technique,
mais ce l'étaii en fait pour beaucoup de villages
de cette régio i. La nature du sol, très poreuse, et
la rareté des précipitations atmosphériques —
400 mm en moyenne — avaient toujours rendu
très difficile cette extraction de l'eau qu'il fallait
aller cherchai à 50, 100 ou 200 mètres de pro-
fondeur. Dans la région de Murcie et de Carta-
gène, furent peut-être faits les plus grands ef-
forts. Aux alentours de Villajoyosa, la construc-
tion d'un bai rage permit d'irriguer un million
d'amandiers qui jusqu'alors avaient souffert de
sécheresse.
on avait procédé à la prise et à la distribution
de l'eau. Ce n'était pas une nouveauté technique,
mais ce l'étaii en fait pour beaucoup de villages
de cette régio i. La nature du sol, très poreuse, et
la rareté des précipitations atmosphériques —
400 mm en moyenne — avaient toujours rendu
très difficile cette extraction de l'eau qu'il fallait
aller cherchai à 50, 100 ou 200 mètres de pro-
fondeur. Dans la région de Murcie et de Carta-
gène, furent peut-être faits les plus grands ef-
forts. Aux alentours de Villajoyosa, la construc-
tion d'un bai rage permit d'irriguer un million
d'amandiers qui jusqu'alors avaient souffert de
sécheresse.
Les architectes ne s'occupaient pas seulement
de constructions pour les animaux. Parcourant la
région, ils domèrent des conseils sur les habi-
tations humaines quant à l'architecture, aux ma-
tériaux, aux :ondations, à la situation, à l'hy-
giène, etc. ; toutes choses auxquelles s'opposait
jusqu'ici et trop souvent les intérêts des uns et
l'ignorance d«rs autres. Le voisinage des villa-
ges, beaucoup moins disséminés qu'en Aragon,
facilitait cette solidarité active. Le travail était
même intercommunal. Un noyau se constituait
pour combattre les maladies des plantes pour
donner le soi ire, pour tailler les arbres, pour
travailler dans les champs et les vergers de plus
de localités. Un autre se consacrait à la réfec-
tion ou à la construction des routes. Tout cela
facilitait la synchronisation des efforts et leur
nécessaire rationalisation sur un plan général.
de constructions pour les animaux. Parcourant la
région, ils domèrent des conseils sur les habi-
tations humaines quant à l'architecture, aux ma-
tériaux, aux :ondations, à la situation, à l'hy-
giène, etc. ; toutes choses auxquelles s'opposait
jusqu'ici et trop souvent les intérêts des uns et
l'ignorance d«rs autres. Le voisinage des villa-
ges, beaucoup moins disséminés qu'en Aragon,
facilitait cette solidarité active. Le travail était
même intercommunal. Un noyau se constituait
pour combattre les maladies des plantes pour
donner le soi ire, pour tailler les arbres, pour
travailler dans les champs et les vergers de plus
de localités. Un autre se consacrait à la réfec-
tion ou à la construction des routes. Tout cela
facilitait la synchronisation des efforts et leur
nécessaire rationalisation sur un plan général.
Les 500 collectivités et sections de la région du
Levant étaient subdivisées en 54 fédérations can-
tonales qui se rassemblaient en 5 fédérations pro-
vinciales, lesquelles débouchaient sur le Comité
régional qui embrassait le tout.
Levant étaient subdivisées en 54 fédérations can-
tonales qui se rassemblaient en 5 fédérations pro-
vinciales, lesquelles débouchaient sur le Comité
régional qui embrassait le tout.
Ce comité nammé par des congrès annuels et
responsable dovant eux — paysans en chemise
et sabots — s; composait de 26 sections techni-
ques : culture des fruits en général, agrumes,
vignes, oliveraies, horticulture, riz, bétail ovin
et caprin, pcrcin et bovin venaient ensuite
les sections industrielles : vinification, fabri-
cation d'alcools, de liqueurs, de conserves,
d'huile, de sucre, de fruits, d'essences et parfums
ainsi que d'autres produits dérivés ; de plus on
lança les sections de produits divers, d'importa-
tion-exportation, de machineries, transports, en-
grais ; de là, la section de construction orientant
et stimulant le: construction locale d'édifices de
toute espèce ; enfin la section d'hygiène et d'en-
seignement1.
responsable dovant eux — paysans en chemise
et sabots — s; composait de 26 sections techni-
ques : culture des fruits en général, agrumes,
vignes, oliveraies, horticulture, riz, bétail ovin
et caprin, pcrcin et bovin venaient ensuite
les sections industrielles : vinification, fabri-
cation d'alcools, de liqueurs, de conserves,
d'huile, de sucre, de fruits, d'essences et parfums
ainsi que d'autres produits dérivés ; de plus on
lança les sections de produits divers, d'importa-
tion-exportation, de machineries, transports, en-
grais ; de là, la section de construction orientant
et stimulant le: construction locale d'édifices de
toute espèce ; enfin la section d'hygiène et d'en-
seignement1.
On comprendra mieux maintenant la porjée et
la méthode ds cette organisation. Malheureuse-
ment, nous ne pouvons décrire l'œuvre dans ses
particularités, lisons pourtant, parce qu'on peut
en mesurer l'importance, que la moitié de la
production d'oranges — presque quatre millions
de quintaux — était aux mains de la Fédération
paysanne du Levant et que 70 % de la récolte
totale était transportée et vendue par son orga-
nisation commerciale — grâce à ses magasins
de dépôt, à ses camions, à ses bateaux — et à
sa section d'e::portations qui au début de 1938
avait établi en France des sections de vente (à
la méthode ds cette organisation. Malheureuse-
ment, nous ne pouvons décrire l'œuvre dans ses
particularités, lisons pourtant, parce qu'on peut
en mesurer l'importance, que la moitié de la
production d'oranges — presque quatre millions
de quintaux — était aux mains de la Fédération
paysanne du Levant et que 70 % de la récolte
totale était transportée et vendue par son orga-
nisation commerciale — grâce à ses magasins
de dépôt, à ses camions, à ses bateaux — et à
sa section d'e::portations qui au début de 1938
avait établi en France des sections de vente (à
14
Marseille, Perpignan, Bordeaux, Sète, Cherbourg
et Paris).
et Paris).
La même chose existait1 pour le liz — 30.000
hectares dans la seule province de Valence sur
47.000 dans toute l'Espagne — et pour les légu-
mes frais — la « huerte » de Valence et les jar-
dins de Murcie donnaient deux ou trois récoltes
par an.
hectares dans la seule province de Valence sur
47.000 dans toute l'Espagne — et pour les légu-
mes frais — la « huerte » de Valence et les jar-
dins de Murcie donnaient deux ou trois récoltes
par an.
L'organisation permettait encore d'autres réa-
lisations et une méthode de travail sans laquelle
ces réalisations n'auraient pu être faites, soit
par manque de moyens, soit par insuffisance de
rendement que la multiplicité des efforts aurait
rendu trop coûteuse en matériel employé et en
énergie dépensée.
lisations et une méthode de travail sans laquelle
ces réalisations n'auraient pu être faites, soit
par manque de moyens, soit par insuffisance de
rendement que la multiplicité des efforts aurait
rendu trop coûteuse en matériel employé et en
énergie dépensée.
Quand par exemple les collectivités d'une
localité croyaient utile de créer une fabrique de
liqueurs, de sucres de fruits, de conserves, etc.
elles communiquaient l'idée à la section corres-
pondante du Comité central à Valence. Celui-ci
examinait la proposition et, suivant le cas, invi-
tait une délégation des proposants. Si — suivant
les matières premières utilisables — il existait
déjà assez de fabriques, on répondait négative-
ment en expliquant la raison. Si l'installation
convenait, on acceptait la proposition. Mais
l'œuvre n:aurait incombé qu'aux collectivités
locales proposantes. Par l'intermédiaire du Co-
mité régional, toutes les 500 collectivités auraient
contribué à l'effort. En général, on cherchait à
éliminer tout déséquilibre entre production et
distribution.
localité croyaient utile de créer une fabrique de
liqueurs, de sucres de fruits, de conserves, etc.
elles communiquaient l'idée à la section corres-
pondante du Comité central à Valence. Celui-ci
examinait la proposition et, suivant le cas, invi-
tait une délégation des proposants. Si — suivant
les matières premières utilisables — il existait
déjà assez de fabriques, on répondait négative-
ment en expliquant la raison. Si l'installation
convenait, on acceptait la proposition. Mais
l'œuvre n:aurait incombé qu'aux collectivités
locales proposantes. Par l'intermédiaire du Co-
mité régional, toutes les 500 collectivités auraient
contribué à l'effort. En général, on cherchait à
éliminer tout déséquilibre entre production et
distribution.
Jusqu'alors, il s'était perdu une immense quan-
tité de fruits qui pourrissaient sur place, man-
quant de marchés nationaux et internationaux.
Cela arrivait surtout pour les oranges consom-
mées intégralement à l'état naturel et qui sur le
marché anglais, se heurtaient à la concurrence
de la Palestine et de l'Afrique du Sud, ce qui
obligeait à baisser le prix et à diminuer la pro-
duction.
tité de fruits qui pourrissaient sur place, man-
quant de marchés nationaux et internationaux.
Cela arrivait surtout pour les oranges consom-
mées intégralement à l'état naturel et qui sur le
marché anglais, se heurtaient à la concurrence
de la Palestine et de l'Afrique du Sud, ce qui
obligeait à baisser le prix et à diminuer la pro-
duction.
La fermeture d'une grande partie des marchés
d'Europe, celle du marché intérieur occupé, coupé
par les troupes de Franco, et les obstacles op-
posés à l'œuvre de socialisation par le gouver-
nement, aggravèrent le problème. Et cela ne fut
pas seulement un mal pour les oranges, mais
pour les pommes de terre et les tomates. Une
fois de plus l'initiative des collectivités apparut
nécessaire.
d'Europe, celle du marché intérieur occupé, coupé
par les troupes de Franco, et les obstacles op-
posés à l'œuvre de socialisation par le gouver-
nement, aggravèrent le problème. Et cela ne fut
pas seulement un mal pour les oranges, mais
pour les pommes de terre et les tomates. Une
fois de plus l'initiative des collectivités apparut
nécessaire.
Celles-ci organisèrent des séchoirs pour pom-
mes de terre, tomates et oranges. On commença
ainsi à utiliser ces légumes secs durant toute
l'année. Pour les oranges, on en obtenait : de
l'essence extraite des écorces en plus grande
quantité qu'avant, du miel d'orange fait avec du
sucre préparé le cas échéant, de la pulpe pour
la conservation du sang des abattoirs dans le
but d'en faire un aliment nouveau pour les vo-
lailles, du vin d'orange dont en extrayait de
l'alcool pour les cures médicinales.
mes de terre, tomates et oranges. On commença
ainsi à utiliser ces légumes secs durant toute
l'année. Pour les oranges, on en obtenait : de
l'essence extraite des écorces en plus grande
quantité qu'avant, du miel d'orange fait avec du
sucre préparé le cas échéant, de la pulpe pour
la conservation du sang des abattoirs dans le
but d'en faire un aliment nouveau pour les vo-
lailles, du vin d'orange dont en extrayait de
l'alcool pour les cures médicinales.
Des fabriques de concentrés plus importantes
furent organisées à Olive et à Burriana. Les fa-
briques de conserves de légumes, dont les prin-
cipaux centres étaient à Murcie, Alfasar, Cas-
tellon et Paterna, étaient aussi aux mains de. la
Fédération. Le paysan qui contribue lui-même à
furent organisées à Olive et à Burriana. Les fa-
briques de conserves de légumes, dont les prin-
cipaux centres étaient à Murcie, Alfasar, Cas-
tellon et Paterna, étaient aussi aux mains de. la
Fédération. Le paysan qui contribue lui-même à
l'industrialisation de ses produits nous semble
un fait nouveau qui mérite d'être souligné.
un fait nouveau qui mérite d'être souligné.
Nous avons dit que le siège des Fédérations
cantonales était le plus souve.nt choisi près des
voies ferrées ou ces routes, ce qui facilitait le
transports des marchandises. Les collectivités de
chaque canton y envoyaient l'excédent de leurs
produits. Ceux-ci é aient comptabilisés, classifiés,
emmagasinés et les chiffres correspondant
envoyés aux différentes sections du Comité ré-
gional de Valence, de façon que la Fédération
savait toujours exactement de quelle réserve elle
pouvait disposer p^ur les échanges, les exporta-
tions et les distributions.
cantonales était le plus souve.nt choisi près des
voies ferrées ou ces routes, ce qui facilitait le
transports des marchandises. Les collectivités de
chaque canton y envoyaient l'excédent de leurs
produits. Ceux-ci é aient comptabilisés, classifiés,
emmagasinés et les chiffres correspondant
envoyés aux différentes sections du Comité ré-
gional de Valence, de façon que la Fédération
savait toujours exactement de quelle réserve elle
pouvait disposer p^ur les échanges, les exporta-
tions et les distributions.
L'esprit créateur se montrait aussi dans l'in-
tensification de l'élsvage des animaux de basse-
cour. Les poulaillers, les clapiers, les parcs, se
multipliaient journellement. Des races nouvelles,
inconnues du simple paysan, de lapins, et de
poules se répande ient de plus en plus et les
collectivités qui avaient fait les premiers pas,
aidaient les autres Enfui, les efforts d'organisa-
tion et de justice 'économique, n'étaient pas les
seuls motifs d'action. Chaque collectivité a créé
une ou deux écoles, avec la même promptitude
avec laquelle on avait organisé les premiers pou-
laillers. Le salaire familial et la nouvelle morale
permettaient d'envoyer tous le.s enfants à l'école.
Dans la nouvelle juridiction, les collectivités du
Levant, comme celles d'Aragon, de Castille,
d'Andalousie, d'Esl rémadure avaient donné, dès
les premiers tempi;, le coup de grâce à l'anal-
phabétisme. Et n'oublions pas que dans les cam-
pagnes espagnoles se trouvaient 70 % de gens
incultes.
tensification de l'élsvage des animaux de basse-
cour. Les poulaillers, les clapiers, les parcs, se
multipliaient journellement. Des races nouvelles,
inconnues du simple paysan, de lapins, et de
poules se répande ient de plus en plus et les
collectivités qui avaient fait les premiers pas,
aidaient les autres Enfui, les efforts d'organisa-
tion et de justice 'économique, n'étaient pas les
seuls motifs d'action. Chaque collectivité a créé
une ou deux écoles, avec la même promptitude
avec laquelle on avait organisé les premiers pou-
laillers. Le salaire familial et la nouvelle morale
permettaient d'envoyer tous le.s enfants à l'école.
Dans la nouvelle juridiction, les collectivités du
Levant, comme celles d'Aragon, de Castille,
d'Andalousie, d'Esl rémadure avaient donné, dès
les premiers tempi;, le coup de grâce à l'anal-
phabétisme. Et n'oublions pas que dans les cam-
pagnes espagnoles se trouvaient 70 % de gens
incultes.
Pour compléter cet effort et dans un bu{ prati-
que immédiat, il ci voit été ouvert une école de
secrétaires et de comptables, à laquelle plus de
100 élèves furent envoyés par la collectivité.
Cela à la fin de 1937.
que immédiat, il ci voit été ouvert une école de
secrétaires et de comptables, à laquelle plus de
100 élèves furent envoyés par la collectivité.
Cela à la fin de 1937.
La dernière création est l'Université de Mon-
cada. Œuvre de la Fédération régionale du
Levant, celle-ci l'c mise à la disposition de la
Fédération nationale des paysans d'Espagne.
On y enseigne l'élevage des bestiaux, des ani-
maux de basse-coi ir, les soins à donner aux ani-
maux, les méthodes de sélection, les caractéris-
tiques des races, l'agriculture, la sylviculture,
etc. Il y avait 300 élèves envoyés par les collec-
tivités. Il y en aurait eu davantage s'il y avait
eu assez de professeurs et d'édifices. Ceux-ci
étaient installés ertre les orangers, au milieu des
champs.
cada. Œuvre de la Fédération régionale du
Levant, celle-ci l'c mise à la disposition de la
Fédération nationale des paysans d'Espagne.
On y enseigne l'élevage des bestiaux, des ani-
maux de basse-coi ir, les soins à donner aux ani-
maux, les méthodes de sélection, les caractéris-
tiques des races, l'agriculture, la sylviculture,
etc. Il y avait 300 élèves envoyés par les collec-
tivités. Il y en aurait eu davantage s'il y avait
eu assez de professeurs et d'édifices. Ceux-ci
étaient installés ertre les orangers, au milieu des
champs.
Enfin, signalons que l'esprit de solidarité des
collectivités de Valence est aussi grand que
celles d'Aragon. Elles ont accueilli un grand
nombre de réfugiis, surtout des femmes et en-
fants, de Castille. Elles ravitaillaient gratuite-
ment Madrid, une partie du front du Centre et le
sud du front aragcnais. Les collectivités de Benio-
pa. Olive, leresa, Tabernas de Villadigua, Beînai-
ro et Simat - canton de Gandia - donnèrent dans
les six premiers n.ois de guerre, 187 camions de
vivres. Peu après la chute de Malaga, un simple
coup de téléphoné fit parvenir, toujours gratuite-
ment, sept camiors de ravitaillement à Alméria,
centre de réfugiés affamés. Multipliez cette pro-
collectivités de Valence est aussi grand que
celles d'Aragon. Elles ont accueilli un grand
nombre de réfugiis, surtout des femmes et en-
fants, de Castille. Elles ravitaillaient gratuite-
ment Madrid, une partie du front du Centre et le
sud du front aragcnais. Les collectivités de Benio-
pa. Olive, leresa, Tabernas de Villadigua, Beînai-
ro et Simat - canton de Gandia - donnèrent dans
les six premiers n.ois de guerre, 187 camions de
vivres. Peu après la chute de Malaga, un simple
coup de téléphoné fit parvenir, toujours gratuite-
ment, sept camiors de ravitaillement à Alméria,
centre de réfugiés affamés. Multipliez cette pro-
15
portion par toutes les collectivités du Levant
aussi généreuses que le soleil qui semble les ins-
pirer, et vous aurez un nouvel aspect de leurs
œuvres sociales.
aussi généreuses que le soleil qui semble les ins-
pirer, et vous aurez un nouvel aspect de leurs
œuvres sociales.
CONCLUSIONS ET COMMENTAIRES
L'attaque des collectivités
En juin 1937, le communiste Uribe, ministre de
l'agriculture, publia un décret par lequel il léga-
lisait les Collectivités sur tout le territoire espa-
gnol quelles que fussent les circonstances où
elles étaient nées.
l'agriculture, publia un décret par lequel il léga-
lisait les Collectivités sur tout le territoire espa-
gnol quelles que fussent les circonstances où
elles étaient nées.
Qui connaît la campagne rageuse que cet
homme avait soulevée contre les réalisations des
paysans révolutionnaires trouvera cette volte-
face surprenante. Durant des mois, il avait pro-
noncé des discours, retransmis par radio, inci-
tant les payons à ne pas entrer dans les collecti-
vités, encourageant les petits propriétaires à les
combattre. Il avait toujours parlé comme minis-
tre, de façon à ce que les conservateurs et les
réactionnaires des campagnes se sentent ap-
puyés par le gouvernement dans leur instinctive
tendance à choisir l'ancien système plutôt que
le nouveau monde en formation.
homme avait soulevée contre les réalisations des
paysans révolutionnaires trouvera cette volte-
face surprenante. Durant des mois, il avait pro-
noncé des discours, retransmis par radio, inci-
tant les payons à ne pas entrer dans les collecti-
vités, encourageant les petits propriétaires à les
combattre. Il avait toujours parlé comme minis-
tre, de façon à ce que les conservateurs et les
réactionnaires des campagnes se sentent ap-
puyés par le gouvernement dans leur instinctive
tendance à choisir l'ancien système plutôt que
le nouveau monde en formation.
(...) Dans de {elles conditions, la législation des
collectivités surprendra énormément. Immédiate-
ment, des équipes de jeunes communistes se
constituèrent pour aller, en Catalogne e.t au Le-
vant, aider les paysans pour la récolte. La presse
stalinienne remplissait ses colonnes d'informa-
tions, de communiqués, de clichés traitant de
cette collaboration des « brigades de chocs » et
de l'agriculture.
collectivités surprendra énormément. Immédiate-
ment, des équipes de jeunes communistes se
constituèrent pour aller, en Catalogne e.t au Le-
vant, aider les paysans pour la récolte. La presse
stalinienne remplissait ses colonnes d'informa-
tions, de communiqués, de clichés traitant de
cette collaboration des « brigades de chocs » et
de l'agriculture.
Ceux qui connaissent les hommes qui donnent
de telles directives ne peuvent se faire d'illu-
sions sur leurs buts. Essayer, tout simplement, de
pénétrer dans les organisations agraires pour
s'en emparer et les détruire.
de telles directives ne peuvent se faire d'illu-
sions sur leurs buts. Essayer, tout simplement, de
pénétrer dans les organisations agraires pour
s'en emparer et les détruire.
Au milieu du mois de juin, l'attaque commen-
çait en Aragon sur une grande échelle et avec
des méthodes jusqu'ici inconnues. La moisson
approchait. Fusils en mains, les gardes de fi-
nance, qui obéissaient à l'inspiration commu-
niste, arrêtèrent sur les grandes routes les ca-
mions chargés de vivre et les amenèrent dans
leurs quartiers. Un peu plus tard, les mêmes
gardiens affluèrent dans les Collectivités et, au
nom de l'Etat-Major qui avait ses quartiers à
Barbastro, exigèrent qu'elles leur donnent leurs
grandes quantités de blé.
çait en Aragon sur une grande échelle et avec
des méthodes jusqu'ici inconnues. La moisson
approchait. Fusils en mains, les gardes de fi-
nance, qui obéissaient à l'inspiration commu-
niste, arrêtèrent sur les grandes routes les ca-
mions chargés de vivre et les amenèrent dans
leurs quartiers. Un peu plus tard, les mêmes
gardiens affluèrent dans les Collectivités et, au
nom de l'Etat-Major qui avait ses quartiers à
Barbastro, exigèrent qu'elles leur donnent leurs
grandes quantités de blé.
(...) Ensuite vint l'attaque ouverte. Le comman-
dant Lister en fut chargé. Ses troupes s'étaient
retirées de plus de; 50 km lors de la bataille de
Belchite, au mois d'août de la même année. Il
serait trop long d'exposer en détails les épiso-
des. Le résultat final fut que 30 % des collecti-
vités furent complètement détruites. A Alcolea,
le Conseil municipal, qui dirigeait la collectivité,
fut arrêté ; les hôtes de la Maison des Vieux,
dont on a parlé dans ce livre, jetés à la rue. A
Mas de las Matos, à Mouzon, à Barbastro, un
peu partout, il y eut des arrestations. On sacca-
gea partout. Les magasins des coopératives, les
dépôts de blé furent dévalisés ; les meubles ré-
dant Lister en fut chargé. Ses troupes s'étaient
retirées de plus de; 50 km lors de la bataille de
Belchite, au mois d'août de la même année. Il
serait trop long d'exposer en détails les épiso-
des. Le résultat final fut que 30 % des collecti-
vités furent complètement détruites. A Alcolea,
le Conseil municipal, qui dirigeait la collectivité,
fut arrêté ; les hôtes de la Maison des Vieux,
dont on a parlé dans ce livre, jetés à la rue. A
Mas de las Matos, à Mouzon, à Barbastro, un
peu partout, il y eut des arrestations. On sacca-
gea partout. Les magasins des coopératives, les
dépôts de blé furent dévalisés ; les meubles ré-
duits en morceaux. Le gouverneur de l'Aragon,
qui fut mande té par le Gouvernement central
après la dissolution du Conseil de l'Aragon — ce
qui paraît être le mot d'ordre pour l'attaque à
main armée contre les collectivités — protesta.
Il fut envoyé au diable.
qui fut mande té par le Gouvernement central
après la dissolution du Conseil de l'Aragon — ce
qui paraît être le mot d'ordre pour l'attaque à
main armée contre les collectivités — protesta.
Il fut envoyé au diable.
Le 22 octobre, au Congrès national des pay-
sans, la délégation du Comité régional d'Ara-
gon présente un rapport dont voici le résumé:
sans, la délégation du Comité régional d'Ara-
gon présente un rapport dont voici le résumé:
« Plus de 630 organisateurs de Collectivités
ont été arrêtés Le gouvernement a nommé des
comités de gestion qui s'emparèrent des maga-
sins de vivres et distribuèrent leur contenu au
hasard. Les terres, les animaux de trait et les
instruments de travail, furent rendus aux fa-
milles, ou à de;> fascistes que la Révolution avait
épargnés.
ont été arrêtés Le gouvernement a nommé des
comités de gestion qui s'emparèrent des maga-
sins de vivres et distribuèrent leur contenu au
hasard. Les terres, les animaux de trait et les
instruments de travail, furent rendus aux fa-
milles, ou à de;> fascistes que la Révolution avait
épargnés.
« Les récoltes furent distribuées de: la même
façon. Les aninaux élevés par les collectivités
subirent le mène sort. Un grand nombre de por-
cheries collectives, d'établies, de laiteries, ont été
détruites. Dans certaines communes, comme Bor-
dou et Calaccite ; on prîf même les semences et
les paysans en manquent maintenant pour tra-
vailler les terres ».
façon. Les aninaux élevés par les collectivités
subirent le mène sort. Un grand nombre de por-
cheries collectives, d'établies, de laiteries, ont été
détruites. Dans certaines communes, comme Bor-
dou et Calaccite ; on prîf même les semences et
les paysans en manquent maintenant pour tra-
vailler les terres ».
L'intelligence populaire
Je signale un fait curieux : le fiasco du som-
met : des tête» dirigeantes des « hommes-gui-
des ». Je ne perle pas seulement des politiciens,
des chefs socialistes, et communistes. Je parle
aussi des militants anarchistes notoires, de ceux
qui sont nommés en langage courant, des lea-
ders.
met : des tête» dirigeantes des « hommes-gui-
des ». Je ne perle pas seulement des politiciens,
des chefs socialistes, et communistes. Je parle
aussi des militants anarchistes notoires, de ceux
qui sont nommés en langage courant, des lea-
ders.
L'anarchisme espagnol en avait. Le plus ca-
pable, Vincenzo Orobon Fernandez, mourut peu
avant, le 19 juillet. Il avait amplifié et appro-
fondi ses prob. èmes politiques et économiques,
et était un sociologue, au sens vrai du terme.
D'autres étaient des hommes cultivés, d'excel-
lents agitateurs, des orateurs parfois remarqua-
bles, de bons journalistes et écrivains. Fédérica
Moniseny était une des femmes les plus intelli-
gentes qui aieni pris part à l'activité intellectuelle
du pays.
pable, Vincenzo Orobon Fernandez, mourut peu
avant, le 19 juillet. Il avait amplifié et appro-
fondi ses prob. èmes politiques et économiques,
et était un sociologue, au sens vrai du terme.
D'autres étaient des hommes cultivés, d'excel-
lents agitateurs, des orateurs parfois remarqua-
bles, de bons journalistes et écrivains. Fédérica
Moniseny était une des femmes les plus intelli-
gentes qui aieni pris part à l'activité intellectuelle
du pays.
Mais ces mil:tants n'ont joué aucun rôle dans
l'œuvre que j'ai décrite dans ce livre. Depuis le
début, ils furent absorbés par des charges offi-
cielles qu'ils arceptèrent malgré leur tradition-
nelle répugnance pour les fonctions gouvernan-
tes. L'unité antifasciste leur suggérait cette at-
titude. Il fallai: faire taire les principes, faire
des concession; transitoires. Cela les empêchait
de continuer le ir rôle de guides. Il restaient en
marge de cett3 grande entreprise reconstruc-
tive, dans laquelle le prolétariat trouvera pour
l'avenir des enseignements précieux.
l'œuvre que j'ai décrite dans ce livre. Depuis le
début, ils furent absorbés par des charges offi-
cielles qu'ils arceptèrent malgré leur tradition-
nelle répugnance pour les fonctions gouvernan-
tes. L'unité antifasciste leur suggérait cette at-
titude. Il fallai: faire taire les principes, faire
des concession; transitoires. Cela les empêchait
de continuer le ir rôle de guides. Il restaient en
marge de cett3 grande entreprise reconstruc-
tive, dans laquelle le prolétariat trouvera pour
l'avenir des enseignements précieux.
Certes, il leur aurait été possible d'apporter
quelquefois dei; conseils utiles, d'exposer des
normes généra es d'action et de coordination.
Ils ne le fireri t pas. La raison ? C'est qu'ils
furent surtout ies démolisseurs. La lutte con-
tre l'Etat et la société capitaliste les avait
imprégnés d'esprit tactique politique, auquel
ils subordonnai* int toute leur culture et leur pres-
tige personnel. Aucun militant •— sauf Noja
quelquefois dei; conseils utiles, d'exposer des
normes généra es d'action et de coordination.
Ils ne le fireri t pas. La raison ? C'est qu'ils
furent surtout ies démolisseurs. La lutte con-
tre l'Etat et la société capitaliste les avait
imprégnés d'esprit tactique politique, auquel
ils subordonnai* int toute leur culture et leur pres-
tige personnel. Aucun militant •— sauf Noja
16
Ruiz et, dans les derniers temps Santillan —
n'était compétent pour résoudre les problè-
mes économiques de la Révolution. Il ne s'im-
provise pas une mentalité constructive, ca-
pable de discerner les contradictions d'une réa-
lité morcelée e.t de les harmoniser dans une vi-
sion d'ensemble.
n'était compétent pour résoudre les problè-
mes économiques de la Révolution. Il ne s'im-
provise pas une mentalité constructive, ca-
pable de discerner les contradictions d'une réa-
lité morcelée e.t de les harmoniser dans une vi-
sion d'ensemble.
Cependant, tout homme intelligent qui eut
conservé son agilité mentale aurait pu aider
l'œuvre commune. Mais il n'en fut rien. Même
certains intellectuels qui restaient en marge des
charges officielles demeurèrent étrangers à l'œu-
vre de transformation radicale de la société.
conservé son agilité mentale aurait pu aider
l'œuvre commune. Mais il n'en fut rien. Même
certains intellectuels qui restaient en marge des
charges officielles demeurèrent étrangers à l'œu-
vre de transformation radicale de la société.
Comment fut donc possible, malgré tout, la
réussite ? J'ai réfléchi deux mois, pour trouver
une réponse claire, satisfaisante. Je. sais mainte-
nant que la raison de cet heureux résultat est
vraiment l'intelligence positive du peuple. Elle a
été notre force secrète.
réussite ? J'ai réfléchi deux mois, pour trouver
une réponse claire, satisfaisante. Je. sais mainte-
nant que la raison de cet heureux résultat est
vraiment l'intelligence positive du peuple. Elle a
été notre force secrète.
Durant des dizaines d'années, les journaux,
revues, opuscules anarchistes avaient modelé
des militants individuelement, actifs et capables
d'initiative. Ils ne s'étaient pas habitués à atten-
dre d'en haut les directives d'action. Ils avaient
toujours pensé et agi par eux-mêmes, parfois
bien, parfois mal. Lisant le journal, la revue,
l'opuscule, le livre, chacun formait et complétait
sa personnalité. Il ne s'était jamais offert à eux
un dogme ou une ligne d'action uniforme et sûre.
La problématique des faits réels et la critique
des systèmes économiques et politiques avaient
toujours induit à la réflexion dans laquelle mû-
rissaient peu à peu des idées claires de révo-
lution.
revues, opuscules anarchistes avaient modelé
des militants individuelement, actifs et capables
d'initiative. Ils ne s'étaient pas habitués à atten-
dre d'en haut les directives d'action. Ils avaient
toujours pensé et agi par eux-mêmes, parfois
bien, parfois mal. Lisant le journal, la revue,
l'opuscule, le livre, chacun formait et complétait
sa personnalité. Il ne s'était jamais offert à eux
un dogme ou une ligne d'action uniforme et sûre.
La problématique des faits réels et la critique
des systèmes économiques et politiques avaient
toujours induit à la réflexion dans laquelle mû-
rissaient peu à peu des idées claires de révo-
lution.
Depuis déjà longtemps les problèmes de la
reconstruction sociale étaient à l'ordre du jour.
Une partie des militants les plus renommés dé-
daignaient les études publiées par Isaac Puente,
Besnard, Santillan. Orobon Fernandez, Noja Ruiz,
Levai. Mais beaucoup d'ouvriers plus sensés et
peut-être au fond plus intelligents les lisaient avi-
dement. Des 70.000 lecteurs de la revue libertaire
« Etudes », une bonne partie suivait les tra-
vaux qui se publiaient sur ces thèmes. On dé-
battait dans de minutieuses analyses, des pro-
blèmes qu'une révolution ouvre toujours dans
le domaine alimentaire, combustible ou agri-
cole.
reconstruction sociale étaient à l'ordre du jour.
Une partie des militants les plus renommés dé-
daignaient les études publiées par Isaac Puente,
Besnard, Santillan. Orobon Fernandez, Noja Ruiz,
Levai. Mais beaucoup d'ouvriers plus sensés et
peut-être au fond plus intelligents les lisaient avi-
dement. Des 70.000 lecteurs de la revue libertaire
« Etudes », une bonne partie suivait les tra-
vaux qui se publiaient sur ces thèmes. On dé-
battait dans de minutieuses analyses, des pro-
blèmes qu'une révolution ouvre toujours dans
le domaine alimentaire, combustible ou agri-
cole.
C'est aussi l'œuvre de beaucoup de sections
syndicales. Et quand en mai 36, au congrès de
Saragosse, un des militants les plus renommés
qui avait toujours témoigné d'une olympienne
indifférence envers ces question — il fut plus
tard aussi bon ministre que mauvais organisa-
teur (1) — fit sur le communisme libertaire un
exposé où se révélait l'inconsistance de sa
pensée, les ouvriers et les paysans venus de
toutes les provinces manifestèrent leur réserve,
parce qu'ils comprenaient bien que la vie so-
ciale devait se concevoir et s'organiser de fa-
çon plus méthodique.
syndicales. Et quand en mai 36, au congrès de
Saragosse, un des militants les plus renommés
qui avait toujours témoigné d'une olympienne
indifférence envers ces question — il fut plus
tard aussi bon ministre que mauvais organisa-
teur (1) — fit sur le communisme libertaire un
exposé où se révélait l'inconsistance de sa
pensée, les ouvriers et les paysans venus de
toutes les provinces manifestèrent leur réserve,
parce qu'ils comprenaient bien que la vie so-
ciale devait se concevoir et s'organiser de fa-
çon plus méthodique.
De toutes ces activités, de la lutte permanente
qui exigeait des hommes pleins de volonté d'ac-
tion, naquit cette capacité du peuple qui a per-
mis de réaliser l'œuvre merveilleuse des Collec-
tivités agraires et des organisations industrielles.
qui exigeait des hommes pleins de volonté d'ac-
tion, naquit cette capacité du peuple qui a per-
mis de réaliser l'œuvre merveilleuse des Collec-
tivités agraires et des organisations industrielles.
(I) Garcia Oliver (note du traducteur).
Capacité du pouple, donc. C'est-à-dire, intelli-
gence, plus volorté, voilà le secret.
gence, plus volorté, voilà le secret.
Les plus humbles journaliers ne doivent pas
être oubliés. J'en ai connu beaucoup parmi les
membres des corr ités syndicaux qui avaient, très
souvent, une conception assez juste des contin-
gences d'une révolution et de l'organisation éco-
nomique. Ils parlaient avec compétence des ma-
tières premières, des achats à l'extérieur, des
nécessités de peifectionnement ou d'élimination
de telle ou {elle branche d'industrie, de la dé-
fense armée et do bien d'autres choses.
être oubliés. J'en ai connu beaucoup parmi les
membres des corr ités syndicaux qui avaient, très
souvent, une conception assez juste des contin-
gences d'une révolution et de l'organisation éco-
nomique. Ils parlaient avec compétence des ma-
tières premières, des achats à l'extérieur, des
nécessités de peifectionnement ou d'élimination
de telle ou {elle branche d'industrie, de la dé-
fense armée et do bien d'autres choses.
La prompte réaction contre les Comités de
contrôle qui, dans, les grandes villes, menaçaient
de se transforme:: en une nouvelle bureaucratie
parasitaire, la décision rapide de se défendre
contre les attaquas des 18 et 19 juillet, la sortie
de chefs militaires improvisés qui ont sous le.urs
ordres des milite ires de profession (les Durruti,
les Ortiz, les Mer 3, les Ascaso) sont des faits qui,
tous, confirment non jugement.
contrôle qui, dans, les grandes villes, menaçaient
de se transforme:: en une nouvelle bureaucratie
parasitaire, la décision rapide de se défendre
contre les attaquas des 18 et 19 juillet, la sortie
de chefs militaires improvisés qui ont sous le.urs
ordres des milite ires de profession (les Durruti,
les Ortiz, les Mer 3, les Ascaso) sont des faits qui,
tous, confirment non jugement.
Quand je fis na première visite, qui n'était
pas celle d'un tcuriste, au front d'Aragon, mon
attention fut attirée par la physionomie de nom-
breux jeunes qui se trouvaient dans les tran-
chées. Regards clairs, heureux, fermes, front lu-
mineux où brilla .t la pensée. Je revins à Barce-
lone en voiture, voyageant avec un camarade,
le conseiller économique de la région, qui allait
à Valence faire auprès du gouvernement cen-
tral, une tentative désespérée pour sauver sa
compagne, détenue par les fascistes à Sara-
gosse.
pas celle d'un tcuriste, au front d'Aragon, mon
attention fut attirée par la physionomie de nom-
breux jeunes qui se trouvaient dans les tran-
chées. Regards clairs, heureux, fermes, front lu-
mineux où brilla .t la pensée. Je revins à Barce-
lone en voiture, voyageant avec un camarade,
le conseiller économique de la région, qui allait
à Valence faire auprès du gouvernement cen-
tral, une tentative désespérée pour sauver sa
compagne, détenue par les fascistes à Sara-
gosse.
C'était un homme simple dans son aspect ex-
térieur et dans son comportement moral — mais
d'une trempe remarquable. Quoique tourmenté
par le. sort de sa compagne, il me donna de con-
tinuelles explications sur les nouvelles terres
qu'il fallait cultiver, sur les mines de fer, de
charbon, de maiganèse qu'on pourrait ouvrir,
sur les canaux qu'on devait construire, sur les
échanges avec lu Catalogne et les relations en-
tre les paysans collectivistes et ceux qui étaient
restés individuel istes.
térieur et dans son comportement moral — mais
d'une trempe remarquable. Quoique tourmenté
par le. sort de sa compagne, il me donna de con-
tinuelles explications sur les nouvelles terres
qu'il fallait cultiver, sur les mines de fer, de
charbon, de maiganèse qu'on pourrait ouvrir,
sur les canaux qu'on devait construire, sur les
échanges avec lu Catalogne et les relations en-
tre les paysans collectivistes et ceux qui étaient
restés individuel istes.
Nous avons parlé aussi d'électrification. Il
m'exposa un plan de réseau unique, alimenté par
toutes les forces hydrauliques et distribué à éga-
lité dans toutes .es régions socialisées pour évi-
ter les concentrations industrielles e{ les spé-
cialisations agrcires excessives et souvent in-
justes. Je fus surpris de sa connaissance sérieuse
et profonde de l'économie espagnole. Je voulus
savoir quelque, chose de lui. C'était un ouvrier
vitrier qui avait seulement 32 ans. Beaucoup de
ministres de l'Ec momie et de l'Agriculture de la
République, de la Monarchie, en savaient moins
que lui...
m'exposa un plan de réseau unique, alimenté par
toutes les forces hydrauliques et distribué à éga-
lité dans toutes .es régions socialisées pour évi-
ter les concentrations industrielles e{ les spé-
cialisations agrcires excessives et souvent in-
justes. Je fus surpris de sa connaissance sérieuse
et profonde de l'économie espagnole. Je voulus
savoir quelque, chose de lui. C'était un ouvrier
vitrier qui avait seulement 32 ans. Beaucoup de
ministres de l'Ec momie et de l'Agriculture de la
République, de la Monarchie, en savaient moins
que lui...
(...) La révolution s'est déroulée dans des cir-
constances extrêmement compliquées. On a dû
se battre contre les attaques de l'extérieur et de
l'intérieur. Appl.quer les principes anarchistes
demandait des efforts centuplés. Malgré cela,
ils ont été applicTiés dans de nombreux endroits.
Les organisate.ui s ont su s'adapter à tout. Leur
technique est parvenue presque toujours au but.
Pour chaque problème il a été trouvé une solu-
tion. Je le répète : cela fut possible parce que
constances extrêmement compliquées. On a dû
se battre contre les attaques de l'extérieur et de
l'intérieur. Appl.quer les principes anarchistes
demandait des efforts centuplés. Malgré cela,
ils ont été applicTiés dans de nombreux endroits.
Les organisate.ui s ont su s'adapter à tout. Leur
technique est parvenue presque toujours au but.
Pour chaque problème il a été trouvé une solu-
tion. Je le répète : cela fut possible parce que
17
nous avions avec nous l'intelligence populaire,
l'intelligence de base. C'est elle qui travaille,
oriente et crée. C'est elle qui trouve la voie
et qui répond aux mille nécessités de la vie
et de la révolution. Son activité, multiple et
multiforme, a été merveilleuse. Elle a orga-
nisé les milices et vaincu le fascisme dans la
première étape de la guerre. Elle a travaillé
sans attendre, à la fabrication de chars d'as-
saut, de fusils et d'obus.
l'intelligence de base. C'est elle qui travaille,
oriente et crée. C'est elle qui trouve la voie
et qui répond aux mille nécessités de la vie
et de la révolution. Son activité, multiple et
multiforme, a été merveilleuse. Elle a orga-
nisé les milices et vaincu le fascisme dans la
première étape de la guerre. Elle a travaillé
sans attendre, à la fabrication de chars d'as-
saut, de fusils et d'obus.
L'initiative est venue du peuple, surtout du
peuple influencé par les anarchistes.
peuple influencé par les anarchistes.
Prenons les collectivités d'Aragon. On y trouve
parmi ses organisateurs, seulement deux avo-
cats, à Alcorisa. Ce n'étaient pas des intellec-
tuels au sens exact du mot. Mais ce qu'ils fi-
rent avec les autres camarades paysans et
ouvriers fut bien fait, sans être meilleur que ce
qui fut fait à Esplus, à Binafar, à Calanda, et
dans d'autres collectivités.
parmi ses organisateurs, seulement deux avo-
cats, à Alcorisa. Ce n'étaient pas des intellec-
tuels au sens exact du mot. Mais ce qu'ils fi-
rent avec les autres camarades paysans et
ouvriers fut bien fait, sans être meilleur que ce
qui fut fait à Esplus, à Binafar, à Calanda, et
dans d'autres collectivités.
Ce qui surprenait, en parlant avec ces pay-
sans, c'était de constater qu'ils étaient en grande
partie analphabètes. Mais ils avaient la foi, le
sens commun et pratique, l'esprit de sacrifice, la
volonté de construire un monde nouveau. Je n'ai
pas la. moindre intention de faire une démagogi-
que apologie de l'ignorance. Ce qu'il y avait dans
ces hommes était une mentalité, un cœur, un
esprit, que ne donne pas l'instruction ; que même
l'éducation officielle souvent étouffe. La culture
spirituelle n'est pas toujours livresque ; moins
encore académique. Elle peut naître des choses,
et en tel cas, elle est plus dynamique. Indubita-
blement, les grandes intelligences s'attachent
à ces créations, les coordonnent, indiquant les
directives générales de la reconstruction so-
ciale, mettant en garde telle région d'activité
industrielle contre telle ou telle erreur, complé-
tant une activité par une autre, harmonisant
l'ensemble, stimulant ici, corrigeant là, aidant
beaucoup. En Espagne, elles nous ont manqué,
malheureusement. Ce n'était pas pour le travail
de nos intellectuels, plus littéraires que socio-
logues, plus agitateurs qu'orientateurs que l'en-
nemi aurait pu s'illuminer. Et les paysans, liber-
taires ou non, d'Aragon, du Levant, de Castille,
Estrémadure, d'Andalousie, les travailleurs de
Catalogne, qui avaient compris cela, se mirent
à la tâche seuls.
sans, c'était de constater qu'ils étaient en grande
partie analphabètes. Mais ils avaient la foi, le
sens commun et pratique, l'esprit de sacrifice, la
volonté de construire un monde nouveau. Je n'ai
pas la. moindre intention de faire une démagogi-
que apologie de l'ignorance. Ce qu'il y avait dans
ces hommes était une mentalité, un cœur, un
esprit, que ne donne pas l'instruction ; que même
l'éducation officielle souvent étouffe. La culture
spirituelle n'est pas toujours livresque ; moins
encore académique. Elle peut naître des choses,
et en tel cas, elle est plus dynamique. Indubita-
blement, les grandes intelligences s'attachent
à ces créations, les coordonnent, indiquant les
directives générales de la reconstruction so-
ciale, mettant en garde telle région d'activité
industrielle contre telle ou telle erreur, complé-
tant une activité par une autre, harmonisant
l'ensemble, stimulant ici, corrigeant là, aidant
beaucoup. En Espagne, elles nous ont manqué,
malheureusement. Ce n'était pas pour le travail
de nos intellectuels, plus littéraires que socio-
logues, plus agitateurs qu'orientateurs que l'en-
nemi aurait pu s'illuminer. Et les paysans, liber-
taires ou non, d'Aragon, du Levant, de Castille,
Estrémadure, d'Andalousie, les travailleurs de
Catalogne, qui avaient compris cela, se mirent
à la tâche seuls.
Les auteurs de l'organisation syndicale de la
santé en Catalogne n'étaient pas non plus des
intellectuels. Un médecin basque, à la volonté
de fer, et quelques camarades infirmiers ont
fait presque tout. Dans d'autres régions, des
professionnels de talent ont animé ce mouve-
ment et l'ont aidé. Mais encore une fois, l'ini-
tiative venait de la base.
santé en Catalogne n'étaient pas non plus des
intellectuels. Un médecin basque, à la volonté
de fer, et quelques camarades infirmiers ont
fait presque tout. Dans d'autres régions, des
professionnels de talent ont animé ce mouve-
ment et l'ont aidé. Mais encore une fois, l'ini-
tiative venait de la base.
Toute l'industrie de Alcoy, si bien organisée,
était gérée par des ouvriers. De même celles
d'Elda et de Castellon. Presque toujours, on
chercherait en vain, à côté des discours politi-
ques ou d'agitation, plus ou moins brillants,
prononcés par des intellectuels, une orientation
pratique, une conception concise. Le militant de
base a tout fait, à Carcagente, à Elda, à Gra-
nollers, à Binefer, à Jativa, dans le transport
terrestre, dans le transport maritime, dans les
était gérée par des ouvriers. De même celles
d'Elda et de Castellon. Presque toujours, on
chercherait en vain, à côté des discours politi-
ques ou d'agitation, plus ou moins brillants,
prononcés par des intellectuels, une orientation
pratique, une conception concise. Le militant de
base a tout fait, à Carcagente, à Elda, à Gra-
nollers, à Binefer, à Jativa, dans le transport
terrestre, dans le transport maritime, dans les
correctivites ce la Castille, ou dans la semi-
socialisation de Ripolls et de Puigierda.
socialisation de Ripolls et de Puigierda.
Quant aux gouvernants, ils ont été aussi in-
capables dans; l'organisation de l'économie que
dans celle de la guerre.
capables dans; l'organisation de l'économie que
dans celle de la guerre.
PRINCIPES ET ENSEIGNEMENTS
DE LA REVOLUTION ESPAGNOLE
DE LA REVOLUTION ESPAGNOLE
Tout ce qu. par témoignage direct ou indi-
rect a été exposé dans ce livre, aide à la com-
préhension dss enseignements suivants que
j'ai formulés sn synthèse comme sujet de mé-
ditation :
rect a été exposé dans ce livre, aide à la com-
préhension dss enseignements suivants que
j'ai formulés sn synthèse comme sujet de mé-
ditation :
1) Le principe juridique des collectivités était
entièrement « nouveau ». Ce n'était ni le syn-
dicat, ni la mairie au sens traditionnel du mot
et non plus 12 commune du Moyen-Age. Tou-
tefois, elles étaient plus proches de l'esprit com-
munal que de. l'esprit syndical. Les Collectivités
auraient pu souvent s'appeler Communautés,
comme c'est le cas pour celle de Binefar et cons-
tituaient vrairrent un tout dans lequel les grou-
pes professionnels et corporatifs, les services pu-
blics, les échar.ges, les fonctions municipales, res-
taient subordc innés, dépendant de l'ensemble,
tout en jouissant de l'autonomie dans leur struc-
ture, dans lear fonctionnement interne, dans
l'application da leurs buts particuliers.
entièrement « nouveau ». Ce n'était ni le syn-
dicat, ni la mairie au sens traditionnel du mot
et non plus 12 commune du Moyen-Age. Tou-
tefois, elles étaient plus proches de l'esprit com-
munal que de. l'esprit syndical. Les Collectivités
auraient pu souvent s'appeler Communautés,
comme c'est le cas pour celle de Binefar et cons-
tituaient vrairrent un tout dans lequel les grou-
pes professionnels et corporatifs, les services pu-
blics, les échar.ges, les fonctions municipales, res-
taient subordc innés, dépendant de l'ensemble,
tout en jouissant de l'autonomie dans leur struc-
ture, dans lear fonctionnement interne, dans
l'application da leurs buts particuliers.
2) Malgré leur dénomination, les Collecti-
vités étaient pratiquement des organisations
libertaires corr munistes, qui appliquaient la rè-
gle : « De chacun selon ses forces, à chacun
selon ses besoins », soit par la quantité de
ressources malérielles assurées à chacun là où
l'argent était aboli, soit au moyen du salaire fa-
milial là où l'cxgent était maintenu. La méthode
technique différait, mais le principe moral et les
résultats pratiques étaient les mêmes.
vités étaient pratiquement des organisations
libertaires corr munistes, qui appliquaient la rè-
gle : « De chacun selon ses forces, à chacun
selon ses besoins », soit par la quantité de
ressources malérielles assurées à chacun là où
l'argent était aboli, soit au moyen du salaire fa-
milial là où l'cxgent était maintenu. La méthode
technique différait, mais le principe moral et les
résultats pratiques étaient les mêmes.
Cette pratique était en effet sans exception
dans les Collectivités agraires; peu fréquente
au contraire dans les collectivisations et socia-
lisations indus :rielles, la vie de la ville étant
plus complexe et moins profond le sentiment
de la sociabilité.
dans les Collectivités agraires; peu fréquente
au contraire dans les collectivisations et socia-
lisations indus :rielles, la vie de la ville étant
plus complexe et moins profond le sentiment
de la sociabilité.
3) La solidarité portée au degré extrême était
la règle génère :le des Collectivités agraires. Non
seulement le droit de tous à la vie était assuré,
mais dans les iédérations mères s'établissait tou-
jours plus le principe de l'appui mutuel avec le
fonds commun iont jouissaient les pays moins fa-
vorisés, par la nature. A Castellon, on établit dans
ce but la Caisse de compensation. Dans le do-
maine industriel cette pratique semble avoir com-
mencé à Hospi:alet, dans les chemins de fer ca-
talans, et plus tard elle fui appliquée à Alcoy.
Elle aurait été plus générale si l'arbitrage avec les
autres partis n avait pas empêché de socialiser
ouvertement dès les premiers jours.
la règle génère :le des Collectivités agraires. Non
seulement le droit de tous à la vie était assuré,
mais dans les iédérations mères s'établissait tou-
jours plus le principe de l'appui mutuel avec le
fonds commun iont jouissaient les pays moins fa-
vorisés, par la nature. A Castellon, on établit dans
ce but la Caisse de compensation. Dans le do-
maine industriel cette pratique semble avoir com-
mencé à Hospi:alet, dans les chemins de fer ca-
talans, et plus tard elle fui appliquée à Alcoy.
Elle aurait été plus générale si l'arbitrage avec les
autres partis n avait pas empêché de socialiser
ouvertement dès les premiers jours.
4) Une conquête d'énorme importance a été : le
droit de la femme à la vie, quelques fussent ses
fonctions sociales. Dans la moitié des Collecti-
vités agraires 1(; salaire qui lui était attribué était
inférieur à celui de l'homme, dans l'autre moitié
équivalent ; la différence s'expliquait en tenant
compte que la femme célibataire vit rarement
seule.
droit de la femme à la vie, quelques fussent ses
fonctions sociales. Dans la moitié des Collecti-
vités agraires 1(; salaire qui lui était attribué était
inférieur à celui de l'homme, dans l'autre moitié
équivalent ; la différence s'expliquait en tenant
compte que la femme célibataire vit rarement
seule.
18
5) De même les enfants ont vu leur droit re-
connu spontanément : non comme une aumône
accordée par l'Etat, mais bien comme l'exercice
d'un droit que nul ne pensait à nier. En même
temps, les écoles leur ont été ouvertes jusqu'à 14
ou 15 ans : seule, façon d'éviter que les parents
ne les envoient travailler avant l'âge, et pour ren-
dre l'instruction réellement générale.
connu spontanément : non comme une aumône
accordée par l'Etat, mais bien comme l'exercice
d'un droit que nul ne pensait à nier. En même
temps, les écoles leur ont été ouvertes jusqu'à 14
ou 15 ans : seule, façon d'éviter que les parents
ne les envoient travailler avant l'âge, et pour ren-
dre l'instruction réellement générale.
6) Dans toutes les Collectivités agraires d'Ara-
gon, de Catalogne, du Levant, de Castille, d'Anda-
lousie et d'Estrémadure, il y a eu pour règle
spontanée de constituer des groupes de tra-
vailleurs presque toujours fixés dans des zo-
nes précises et qui se partageaient les cultu-
res ou les terres. Egalement spontanée à été
la réunion de.s délégués élus par ces groupes
avec le délégué local de l'agriculture dans le
but d'orienter le travail général.
gon, de Catalogne, du Levant, de Castille, d'Anda-
lousie et d'Estrémadure, il y a eu pour règle
spontanée de constituer des groupes de tra-
vailleurs presque toujours fixés dans des zo-
nes précises et qui se partageaient les cultu-
res ou les terres. Egalement spontanée à été
la réunion de.s délégués élus par ces groupes
avec le délégué local de l'agriculture dans le
but d'orienter le travail général.
7) En plus de ces réunions et d'autres ana-
logues, des groupes spécialisés, avaient lieu
des réunions de la Collectivité entière sous
forme spontanée également — assemblées
hebdomadaires ou bi-mensuelles ou mensuelles.
On s'y prononçait sur l'activité des conseillers
nommés par elles — sur les cas spéciaux et
les difficultés imprévues. Tous les habitants,
hommes et .femmes, et qu'ils fussent ou non
producteurs de biens de consommation, interve-
naient et déterminaient les accords pris. Sou-
vent même les « individualistes » pouvaient se
prononcer et voter.
logues, des groupes spécialisés, avaient lieu
des réunions de la Collectivité entière sous
forme spontanée également — assemblées
hebdomadaires ou bi-mensuelles ou mensuelles.
On s'y prononçait sur l'activité des conseillers
nommés par elles — sur les cas spéciaux et
les difficultés imprévues. Tous les habitants,
hommes et .femmes, et qu'ils fussent ou non
producteurs de biens de consommation, interve-
naient et déterminaient les accords pris. Sou-
vent même les « individualistes » pouvaient se
prononcer et voter.
8) Dans la collectivisation de la terre, les mo-
difications les plus importantes ont été : l'aug-
mentation rapide du machinisme et de l'irriga-
tion, l'extension de la polyculture, la plantation
d'arbres de. toutes espèces. Dans l'élevage des
bestiaux : la sélection et la multiplication des
espèces, leur adaptation aux conditions du mi-
lieu, du climat, de l'alimentation, etc. et la
construction sur une vaste échelle, d'étables, de
porcheries et de bergeries collectives.
difications les plus importantes ont été : l'aug-
mentation rapide du machinisme et de l'irriga-
tion, l'extension de la polyculture, la plantation
d'arbres de. toutes espèces. Dans l'élevage des
bestiaux : la sélection et la multiplication des
espèces, leur adaptation aux conditions du mi-
lieu, du climat, de l'alimentation, etc. et la
construction sur une vaste échelle, d'étables, de
porcheries et de bergeries collectives.
9) On étendait continuellement l'harmonie dans
la production et la coordination des échanges,
de même que l'unité dans le système de répar-
tition. L'unification communale se complétait
avec l'unification régionale, d'où la Fédération
nationale était élue.
la production et la coordination des échanges,
de même que l'unité dans le système de répar-
tition. L'unification communale se complétait
avec l'unification régionale, d'où la Fédération
nationale était élue.
A la base, la « Commune » organisait l'échan-
ge. Exceptionnellement la commune isolée la
pratiquait, mais sur autorisation de la Fédé-
ration qui prenait note de.s échanges et pou-
vait les interrompre s'ils causaient un préju-
dice à l'économie générale. Cela arriva pour
une collectivité isolée de Castille mais qui ne
vendait pas le blé pour son compte mais en-
voyait le. client à l'office du blé à Madrid.
ge. Exceptionnellement la commune isolée la
pratiquait, mais sur autorisation de la Fédé-
ration qui prenait note de.s échanges et pou-
vait les interrompre s'ils causaient un préju-
dice à l'économie générale. Cela arriva pour
une collectivité isolée de Castille mais qui ne
vendait pas le blé pour son compte mais en-
voyait le. client à l'office du blé à Madrid.
En Aragon, la Fédération des Collectivités,
fondée en janvier 37, et dont la résidence cen-
trale se trouvait à Caspe, commença à coor-
donner les échanges entre toutes les communes
de la région, ainsi qu'appliquer l'appui mutuel.
fondée en janvier 37, et dont la résidence cen-
trale se trouvait à Caspe, commença à coor-
donner les échanges entre toutes les communes
de la région, ainsi qu'appliquer l'appui mutuel.
La tendance à l'unité s'était faite plus claire
avec l'adoption d'une carte de « producteur »
unique, et d'une carte de « consommateur » éga-
lement unique, qui impliquait la suppression de
toutes les monnaies, locales ou non, suivant la
résolution prise au Congrès constitutif de fé-
vrier 37.
avec l'adoption d'une carte de « producteur »
unique, et d'une carte de « consommateur » éga-
lement unique, qui impliquait la suppression de
toutes les monnaies, locales ou non, suivant la
résolution prise au Congrès constitutif de fé-
vrier 37.
' ^ coordination des échanges avec les au-
tres régions et de la vente à l'extérieur s'amé-
liorait toujours davantage. Dans le cas de béné-
fices dus aux différences de change, ou à l'ob-
tention de prix supérieurs aux prix de base
déjà excédentaires. II Fédération régionale les
employait pour aider les Collectivités les plus
pauvres. La solidarité dépassait le circuit com-
munal.
tres régions et de la vente à l'extérieur s'amé-
liorait toujours davantage. Dans le cas de béné-
fices dus aux différences de change, ou à l'ob-
tention de prix supérieurs aux prix de base
déjà excédentaires. II Fédération régionale les
employait pour aider les Collectivités les plus
pauvres. La solidarité dépassait le circuit com-
munal.
10) La concentraticn industrielle tendait à se
généraliser dans (oites les communes, dans
toutes les villes. Les petites usines, les ateliers
anti-économiques disparurent. Le travail se ra-
tionalisa avec un objectif et une forme haute-
ment sociale aussi bien dans les industries
d'Alcoy que dans celles d'Hospitalet, dans les
transports urbains de, Barcelone que dans les
collectivités d'Arago:i.
généraliser dans (oites les communes, dans
toutes les villes. Les petites usines, les ateliers
anti-économiques disparurent. Le travail se ra-
tionalisa avec un objectif et une forme haute-
ment sociale aussi bien dans les industries
d'Alcoy que dans celles d'Hospitalet, dans les
transports urbains de, Barcelone que dans les
collectivités d'Arago:i.
11) La socialisation commençait souvent avec
la répartition (à Sec orbe, Granollers, différents
villages d'Aragon). Eans certains cas, nos cama-
rades arrachèrent à Ja municipalité des réformes
immédiates (municip disations des loyers, de la
médecine à Elda, Benicarlo, Castellon, Alca-
gniz, Caspe, etc.).
la répartition (à Sec orbe, Granollers, différents
villages d'Aragon). Eans certains cas, nos cama-
rades arrachèrent à Ja municipalité des réformes
immédiates (municip disations des loyers, de la
médecine à Elda, Benicarlo, Castellon, Alca-
gniz, Caspe, etc.).
12) L'enseignement progressa avec une rapi-
dité jusqu'alors inconnue. L'immense majorité
des collectivités et des municipalités plus ou
moins socialistes a construit une ou plusieurs
écoles. Chacune des Collectivités de la Fédé-
ration du Levant avait son école au début de
1938.
dité jusqu'alors inconnue. L'immense majorité
des collectivités et des municipalités plus ou
moins socialistes a construit une ou plusieurs
écoles. Chacune des Collectivités de la Fédé-
ration du Levant avait son école au début de
1938.
13) Le nombre dos collectivisations augmen-
tait continuellement Le mouvement, né avec
plus d'élan en Aragon, avait gagné dans les
campagnes une parlie de la Catalogne, prenant
un élan extraordinaire, surtout dans le Levant,
et ensuite dans la Gastilîe, dont les réalisations
ont été, selon des témoins responsables, peut-
être supérieures à celles du Levant et de l'Ara-
gon. L'Estrémadure et la partie de l'Andalousie
que les fascistes tardèrent à conquérir — spé-
cialement la province de Jean — ont elles aussi
leurs Collectivités. Chaque région ayant les
caractéristiques propres à son agriculture et à
son organisation locale.
tait continuellement Le mouvement, né avec
plus d'élan en Aragon, avait gagné dans les
campagnes une parlie de la Catalogne, prenant
un élan extraordinaire, surtout dans le Levant,
et ensuite dans la Gastilîe, dont les réalisations
ont été, selon des témoins responsables, peut-
être supérieures à celles du Levant et de l'Ara-
gon. L'Estrémadure et la partie de l'Andalousie
que les fascistes tardèrent à conquérir — spé-
cialement la province de Jean — ont elles aussi
leurs Collectivités. Chaque région ayant les
caractéristiques propres à son agriculture et à
son organisation locale.
14) Dans mes enquêtes, j'ai rencontré seule-
ment deux insuccès ; celui de Baltana, et celui
d'Ainsa, au nord de l'Aragon. Le développement
du mouvement et les adhésions qu'il recevait
peut s'exprimer pai ces faits : en février 37 la
région d'Angues avait 36 collectivités (chiffre
communiqué au Congrès de Caspe). Elle en
avait 57 en juin de la même année. Nous man-
quons de chiffres exacts sur le. nombre de col-
lectivités créées dcms toute l'Espagne. Me ba-
sant sur les statistiques incomplètes du Congrès
de février en Aracon, et sur les notes recueil-
lies durant mon séjour prolongé dans cette ré-
gion, je peux affirmer qu'il y en avait au moins
400. Celles du Levant étaient 500 en 1938.
Nous devons y ajouter celles des autres régions.
ment deux insuccès ; celui de Baltana, et celui
d'Ainsa, au nord de l'Aragon. Le développement
du mouvement et les adhésions qu'il recevait
peut s'exprimer pai ces faits : en février 37 la
région d'Angues avait 36 collectivités (chiffre
communiqué au Congrès de Caspe). Elle en
avait 57 en juin de la même année. Nous man-
quons de chiffres exacts sur le. nombre de col-
lectivités créées dcms toute l'Espagne. Me ba-
sant sur les statistiques incomplètes du Congrès
de février en Aracon, et sur les notes recueil-
lies durant mon séjour prolongé dans cette ré-
gion, je peux affirmer qu'il y en avait au moins
400. Celles du Levant étaient 500 en 1938.
Nous devons y ajouter celles des autres régions.
15) Les collectivités se sont complétées en cer-
tains lieux avec d'ctutres formes de socialisation.
Le commerce se sccialise après mon passage à
Carcagente. Alcoy vit surgir une coopérative de
consommation qui complétait l'organisation syn-
tains lieux avec d'ctutres formes de socialisation.
Le commerce se sccialise après mon passage à
Carcagente. Alcoy vit surgir une coopérative de
consommation qui complétait l'organisation syn-
19
dïcctle de. la. production. D'autres collectivités
s'agrandirent : Tomarite, Alcolea, Rubiebas de
Mora, Calanda, Pina, etc.
s'agrandirent : Tomarite, Alcolea, Rubiebas de
Mora, Calanda, Pina, etc.
16) Les collectivités n'ont pas été l'œuvre ex-
clusive du mouvement libertaire. Bien qu'elles
appliquèrent des principes juridiques nettement
anarchistes elles étaient souvent la création
spontanée de personnes éloignées de ce mou-
vement (« libertaires » sans le savoir). La plus
grande partie des Collectivités de C'astille et
d'Estrémadure ont été l'œuvre de paysans ca-
tholiques et socialistes, inspirés ou non par la
propagande de militants anarchistes isolés.
clusive du mouvement libertaire. Bien qu'elles
appliquèrent des principes juridiques nettement
anarchistes elles étaient souvent la création
spontanée de personnes éloignées de ce mou-
vement (« libertaires » sans le savoir). La plus
grande partie des Collectivités de C'astille et
d'Estrémadure ont été l'œuvre de paysans ca-
tholiques et socialistes, inspirés ou non par la
propagande de militants anarchistes isolés.
Malgré l'opposition officielle de leur organi-
sation, beaucoup de membres de. l'U.G.T. sont en-
trés dans les Collectivités ou les ont organisées ;
et aussi des républicains sincèrement désireux
de réaliser la liberté et la justice.
sation, beaucoup de membres de. l'U.G.T. sont en-
trés dans les Collectivités ou les ont organisées ;
et aussi des républicains sincèrement désireux
de réaliser la liberté et la justice.
17) Les petits propriétaires étaient respectés.
Les cartes de consommateurs faites aussi pour
eux, le compte-courant qui leur était ouvert, les
résolutions prises à leur égard l'attestent. On
les empêchait seulement d'avoir plus de terres
qu'ils n'en pouvaient cultiver, et d'exercer le
commerce individuel. L'adhésion aux Collecti-
vités était volontaire ; les « individualistes » y
adhéraient setilement quand ils étaient per-
suadés des résultats meilleurs du travail en
commun.
Les cartes de consommateurs faites aussi pour
eux, le compte-courant qui leur était ouvert, les
résolutions prises à leur égard l'attestent. On
les empêchait seulement d'avoir plus de terres
qu'ils n'en pouvaient cultiver, et d'exercer le
commerce individuel. L'adhésion aux Collecti-
vités était volontaire ; les « individualistes » y
adhéraient setilement quand ils étaient per-
suadés des résultats meilleurs du travail en
commun.
18) Les principaux obstacles aux Collectivités
furent :
furent :
a) la coexistence de couches conservatrices,
des partis e} des organisations qui les représen-
taient : républicains de toutes tendances, so-
cialistes de droite et de gauche (Largo Cabal-
lero et Prieto), communistes staliniens, souvent
poumistes (avant d'être expulsé par le Gouver-
nement de la Généralité, le P.O.U.M. ne fut pas
réellement un parti révolutionnaire. Il le devint
quand il se trouva contraint à l'opposition. En
juin 37 encore, un manifeste distribué par la
section aragonaise du P.O.U.M. attaquait les Col-
des partis e} des organisations qui les représen-
taient : républicains de toutes tendances, so-
cialistes de droite et de gauche (Largo Cabal-
lero et Prieto), communistes staliniens, souvent
poumistes (avant d'être expulsé par le Gouver-
nement de la Généralité, le P.O.U.M. ne fut pas
réellement un parti révolutionnaire. Il le devint
quand il se trouva contraint à l'opposition. En
juin 37 encore, un manifeste distribué par la
section aragonaise du P.O.U.M. attaquait les Col-
lectivités). L'U.G.T. (Union Générale des Tra-
vailleurs) constituait l'instrument principal uti-
lisé par ces différents politiciens.
vailleurs) constituait l'instrument principal uti-
lisé par ces différents politiciens.
b) l'opposition de certains petits propriétaires
(paysans, catclans et pyrénéens).
(paysans, catclans et pyrénéens).
c) La craints;, manifestée même par quelques
membres des Collectivités, que, la guerre termi-
née, le gouvernement ne détruise ces organisa-
tions. Cette peur fit hésiter même beaucoup de
ceux qui n'étaient pas réellement réactionr
noires et des petits propriétaires qui, sans
cela, se serai mt décidés à adhérer aux Col-
lectivités.
membres des Collectivités, que, la guerre termi-
née, le gouvernement ne détruise ces organisa-
tions. Cette peur fit hésiter même beaucoup de
ceux qui n'étaient pas réellement réactionr
noires et des petits propriétaires qui, sans
cela, se serai mt décidés à adhérer aux Col-
lectivités.
d) la lutte active contre les collectivités,
qui n'était pets l'action évidemment destruc-
trice des troupes de. Franco là où elles arri-
vaient. Cette lutte contre les Collectivités a
été conduite à mains armée en Castille par les
troupes comm mistes. Dans la région de Va-
lence, il y eut même de vrais combats dans
lesquels intervinrent les chars d'assaut. Dans
la province d<î Huesca, la brigade Karl-Marx
a persécuté le;î collectivités. La brigade Maria-
Companys a :ait de même dans la province
de Teruel (mois les deux ont fuit toujours le
combat contre les fascistes). La première a été
toujours inactr'e, pendant que nos troupes lut-
taient pour prendre Huesca ou d'autres posi-
tions importar.tes. Les troupes marxistes se
réservaient pour l'arrière-garde. La deuxième
abandonna sais lutte Vinel del Rio et d'au-
tres commune; ; de la région carbonifère de
Utriglios. Les soldats qui s'enfuirent en che-
mise devant une petite attaque que d'autres
forces continrent sans difficultés furent en-
suite des combattants intrépides contre les
paysans désarmés des Collectivités).
qui n'était pets l'action évidemment destruc-
trice des troupes de. Franco là où elles arri-
vaient. Cette lutte contre les Collectivités a
été conduite à mains armée en Castille par les
troupes comm mistes. Dans la région de Va-
lence, il y eut même de vrais combats dans
lesquels intervinrent les chars d'assaut. Dans
la province d<î Huesca, la brigade Karl-Marx
a persécuté le;î collectivités. La brigade Maria-
Companys a :ait de même dans la province
de Teruel (mois les deux ont fuit toujours le
combat contre les fascistes). La première a été
toujours inactr'e, pendant que nos troupes lut-
taient pour prendre Huesca ou d'autres posi-
tions importar.tes. Les troupes marxistes se
réservaient pour l'arrière-garde. La deuxième
abandonna sais lutte Vinel del Rio et d'au-
tres commune; ; de la région carbonifère de
Utriglios. Les soldats qui s'enfuirent en che-
mise devant une petite attaque que d'autres
forces continrent sans difficultés furent en-
suite des combattants intrépides contre les
paysans désarmés des Collectivités).
19) Dans l'csuvre de création, de transfor-
mation et de socialisation qui a été réalisée,
le paysan a montré une conscience sociale
très supérieure à celle de l'ouvrier des villes.
mation et de socialisation qui a été réalisée,
le paysan a montré une conscience sociale
très supérieure à celle de l'ouvrier des villes.
Gaston Levai (traduit de l'italien)
L'Autogestion en Yougoslavie
*** ***
ï. — Présentation
L'expérience yougoslave d'autogestion a un
caractère très particulier ; elle a été instaurée
par une loi, promulguée par un gouvernement
dirigé par le parti communiste. La loi essen-
tielle est de 1950, complétée par celle, de jan-
vrier 1953, inscrite dans la nouvelle Constitution
du 7 avril 1963, modifiée par la loi de juillet
1965...
caractère très particulier ; elle a été instaurée
par une loi, promulguée par un gouvernement
dirigé par le parti communiste. La loi essen-
tielle est de 1950, complétée par celle, de jan-
vrier 1953, inscrite dans la nouvelle Constitution
du 7 avril 1963, modifiée par la loi de juillet
1965...
Cette originalité pose immédiatement le
problème des causes qui ont provoqué cette
autogestion ; il y a trois explications : une
théorique, une pragmatique, une politique. On
sait que chaque expérience marxiste doit trou-
ver sa justification dans les textes de Marx,
Engels et Lénine. Mais précisément sur ce
problème des causes qui ont provoqué cette
autogestion ; il y a trois explications : une
théorique, une pragmatique, une politique. On
sait que chaque expérience marxiste doit trou-
ver sa justification dans les textes de Marx,
Engels et Lénine. Mais précisément sur ce
point, les mar cistes trouvent difficilement des
appuis théoriques dans leurs classiques ; la
théorie marxiste a toujours envisagé l'écono-
mie comme ur.e gestion étatique, l'autogestion
n'est pas pré vie (ou bien d'une manière en-
core plus vagie et plus abstraite, que leurs
prévisions sur !e dépérissement de l'Etat). Mais
le sujet du texte présent n'est pas de démon-
trer cette contradiction. Pour la Yougoslavie,
le professeur Lasserre écrit :
appuis théoriques dans leurs classiques ; la
théorie marxiste a toujours envisagé l'écono-
mie comme ur.e gestion étatique, l'autogestion
n'est pas pré vie (ou bien d'une manière en-
core plus vagie et plus abstraite, que leurs
prévisions sur !e dépérissement de l'Etat). Mais
le sujet du texte présent n'est pas de démon-
trer cette contradiction. Pour la Yougoslavie,
le professeur Lasserre écrit :
« Les dirigée :nts et les théoriciens du socia-
lisme yougoslave déclarent avoir été inspirés
dans une certaine mesure par le socialisme
d'association e : notamment Proudhon, par le
syndicalisme révolutionnaire français d'avant
1914 ; par la première phase de la révolution
de Lénine. » (Archives Internationales de So-
lisme yougoslave déclarent avoir été inspirés
dans une certaine mesure par le socialisme
d'association e : notamment Proudhon, par le
syndicalisme révolutionnaire français d'avant
1914 ; par la première phase de la révolution
de Lénine. » (Archives Internationales de So-
20
ciologie de la Coopération, numéro 14, p. 104).
Nous avons certains doutes quant à leurs con-
naissances et leurs préférences pour le. « so-
cialisme d'association » et Proudhon, car Prou-
dhon est très peu étudié et peu connu en You-
goslavie. Le « syndicalisme révolutionnaire
français » d'avant 1914 était d'inspiration
anarcho-syndicaliste, conception que les com-
munistes yougoslaves refusent systématique-
ment ; la première phase de la révolution de
Lénine n'est pas une conception théorique
mais une attitude purement tactique et déma-
gogique qui a uniquement permis au parti
d'accaparer le pouvoir... »
Nous avons certains doutes quant à leurs con-
naissances et leurs préférences pour le. « so-
cialisme d'association » et Proudhon, car Prou-
dhon est très peu étudié et peu connu en You-
goslavie. Le « syndicalisme révolutionnaire
français » d'avant 1914 était d'inspiration
anarcho-syndicaliste, conception que les com-
munistes yougoslaves refusent systématique-
ment ; la première phase de la révolution de
Lénine n'est pas une conception théorique
mais une attitude purement tactique et déma-
gogique qui a uniquement permis au parti
d'accaparer le pouvoir... »
II nous semble que le professeur Lasserre
est lui aussi très peu convaincu de la source
théorique de l'autogestion e.n Yougoslavie, car
il propose tout de suite une deuxième hypo-
thèse. Ce sont des considérations purement
empiriques qui l'ont conditionnée.
est lui aussi très peu convaincu de la source
théorique de l'autogestion e.n Yougoslavie, car
il propose tout de suite une deuxième hypo-
thèse. Ce sont des considérations purement
empiriques qui l'ont conditionnée.
« ... ils (les théoriciens yougoslaves) pré-
sentent les réalisations yougoslaves comme
étant surtout 1s résultat de raisons empiriques:
le désir des travailleurs, les résultats néfastes
de la première période, la nécessité de se libé-
rer de ïétatisme économique, les encourage-
ments venus des faits eux-mêmes lorsqu'on se
fui engagé dans cette voie (...). Le socialisme
ne peut naître que de l'initiative des masses.
Il implique le dépérissement de l'Etat. Nous
retrouvons ici une vieille idée saint-simonienne,
qui a été aussi anarchiste, proudhonienne,
anarcho-syndicaliste. Marx l'avait reprise pour
en faire le terme final de l'évolution du collec-
tivisme. Mais elle a été oubliée par le com-
munisme russe qui lui tourne le dos. » (G. Las-
serre, même source).
sentent les réalisations yougoslaves comme
étant surtout 1s résultat de raisons empiriques:
le désir des travailleurs, les résultats néfastes
de la première période, la nécessité de se libé-
rer de ïétatisme économique, les encourage-
ments venus des faits eux-mêmes lorsqu'on se
fui engagé dans cette voie (...). Le socialisme
ne peut naître que de l'initiative des masses.
Il implique le dépérissement de l'Etat. Nous
retrouvons ici une vieille idée saint-simonienne,
qui a été aussi anarchiste, proudhonienne,
anarcho-syndicaliste. Marx l'avait reprise pour
en faire le terme final de l'évolution du collec-
tivisme. Mais elle a été oubliée par le com-
munisme russe qui lui tourne le dos. » (G. Las-
serre, même source).
La raison empirique, c'est donc l'échec de
l'économie de gestion étatique. Nous pensons
que c'est une raison plus sérieuse que la rai-
son théorique précédente. Mais il nous semble
aussi qu'elle est insuffisante — la même éco-
nomie sur les mêmes principes, avec les mê-
mes résultats néfastes, est toujours en vigueur,
et depuis de. longues années, dans toutes les
démocraties populaires ainsi qu'en Russie
même et, malgré tout, ces principes économi-
ques continuent d'être appliqués. L'échec est
camouflé à l'extérieur par la propagande, à
l'intérieur par la violence et le silence. Bien
sûr, si les hommes au pouvoir avaient le
moindre sens de réalisme, et la plus petite
sensibilité aux désirs des travailleurs, il y a
longtemps qu'ils auraient dû abandonner leur
système d'exploitation et d'oppression... mais
les communistes yougoslaves sont-ils plus sen-
sibles que les autres communistes ? La résis-
tance antifasciste les a-t-elle rapprochés du
peuple ?
l'économie de gestion étatique. Nous pensons
que c'est une raison plus sérieuse que la rai-
son théorique précédente. Mais il nous semble
aussi qu'elle est insuffisante — la même éco-
nomie sur les mêmes principes, avec les mê-
mes résultats néfastes, est toujours en vigueur,
et depuis de. longues années, dans toutes les
démocraties populaires ainsi qu'en Russie
même et, malgré tout, ces principes économi-
ques continuent d'être appliqués. L'échec est
camouflé à l'extérieur par la propagande, à
l'intérieur par la violence et le silence. Bien
sûr, si les hommes au pouvoir avaient le
moindre sens de réalisme, et la plus petite
sensibilité aux désirs des travailleurs, il y a
longtemps qu'ils auraient dû abandonner leur
système d'exploitation et d'oppression... mais
les communistes yougoslaves sont-ils plus sen-
sibles que les autres communistes ? La résis-
tance antifasciste les a-t-elle rapprochés du
peuple ?
Nous pensons que le fait déterminant est
d'un autre ordre — tout simplement une raison
politique. Tito nous donne lui-même la clé du
problème :
d'un autre ordre — tout simplement une raison
politique. Tito nous donne lui-même la clé du
problème :
« Le danger des déformations bureaucrati-
ques n'a paru clairement et ne prit tout son
sens qu'au moment de notre conflit avec la
pression stalinienne et notre résistance à cette
ques n'a paru clairement et ne prit tout son
sens qu'au moment de notre conflit avec la
pression stalinienne et notre résistance à cette
pression. L'hégém Dnisme se révéla comme
l'effet extérieur du bureauciatisme, et les élé-
ments foureaufcrrc tiques intérieurs apparurent
comme l'appui aofif du Jbureaucratisme dans
Je péril qu'il faisait peser sur les acquisitions
de la Révolution » (Tito : Quarante années de
lutte du Parti communiste yougoslave, 19
avril 1959, p. 22).
l'effet extérieur du bureauciatisme, et les élé-
ments foureaufcrrc tiques intérieurs apparurent
comme l'appui aofif du Jbureaucratisme dans
Je péril qu'il faisait peser sur les acquisitions
de la Révolution » (Tito : Quarante années de
lutte du Parti communiste yougoslave, 19
avril 1959, p. 22).
Il est donc évident que le nouveau tournant
de l'économie yougoslave commencé en
1949-50 avec la créajion des conseils ouvriers,
correspondait à ui désir d'obtenir l'appui des
masses yougoslaves dans le conflit de la di-
rection titiste ave<: le stalinisme et les appuis
intérieurs de celu:-ci. C'est-à-dire que, s'il y a
eu une concession de la part des dirigeants,
c'était pour une question vitale : conserver le
pouvoir (et leur propre vie, car, à l'époque, les
discussions idéologiques se terminaient en fu-
sillades). Mais les dirigeants yougoslaves fu-
rent suffisamment prévoyants pour sauver, en
même temps que l;ur vie, leurs privilèges. Ainsi,
le phénomène po. itique devient également un
phénomène de classe, l'appareil du parti con-
serve sa position de dirigeant, même dans la
nouvelle structure. Le nouvelle classe au pouvoir
ne perd rien dans cette opération, bien au con-
traire, elle gagne sur un plan intérieur une
certaine stabilité, et sur le plan extérieur un nou-
veau pre.stige et... une nouvelle aide économi-
que. Ce n'est pas un simple hasard si Djïlas,
membre influent dï la nouvelle classe, a fait la
critique de sa propre classe ; c'est le même phé-
nomène dialectique qui obligera l'économie you-
goslave à jouer constamment un équilibre subtil
entre la phraséologie et la réalité, entre les pro-
messes et les contraintes, etc.
de l'économie yougoslave commencé en
1949-50 avec la créajion des conseils ouvriers,
correspondait à ui désir d'obtenir l'appui des
masses yougoslaves dans le conflit de la di-
rection titiste ave<: le stalinisme et les appuis
intérieurs de celu:-ci. C'est-à-dire que, s'il y a
eu une concession de la part des dirigeants,
c'était pour une question vitale : conserver le
pouvoir (et leur propre vie, car, à l'époque, les
discussions idéologiques se terminaient en fu-
sillades). Mais les dirigeants yougoslaves fu-
rent suffisamment prévoyants pour sauver, en
même temps que l;ur vie, leurs privilèges. Ainsi,
le phénomène po. itique devient également un
phénomène de classe, l'appareil du parti con-
serve sa position de dirigeant, même dans la
nouvelle structure. Le nouvelle classe au pouvoir
ne perd rien dans cette opération, bien au con-
traire, elle gagne sur un plan intérieur une
certaine stabilité, et sur le plan extérieur un nou-
veau pre.stige et... une nouvelle aide économi-
que. Ce n'est pas un simple hasard si Djïlas,
membre influent dï la nouvelle classe, a fait la
critique de sa propre classe ; c'est le même phé-
nomène dialectique qui obligera l'économie you-
goslave à jouer constamment un équilibre subtil
entre la phraséologie et la réalité, entre les pro-
messes et les contraintes, etc.
Les causes de. l'autogestion en Yougoslavie
déterminent les possibilités de développement de
l'autogestion elle-même, et surtout, les étroites
limites imposées u ce développement détermi-
nent aussi foutes ses ambiguïtés, toutes ses con-
tradictions, et un certain nombre de ses fai-
blesses.
déterminent les possibilités de développement de
l'autogestion elle-même, et surtout, les étroites
limites imposées u ce développement détermi-
nent aussi foutes ses ambiguïtés, toutes ses con-
tradictions, et un certain nombre de ses fai-
blesses.
LE FONCTIONNEMENT
DE L'AUTOGESTION
DE L'AUTOGESTION
I. — DANS L'ENTF EPRISE INDUSTRIELLE
L'originalité de l'entreprise industrielle réside
dans le fait que l'autogestion ouvrière est com-
plétée par une gestion communale. Le troisième
facteur, l'Etat, s'effarce, du moins théoriquement,
d'être plus discret, plus effacé, maïs pourtant il
est toujours présen; par sa planification, son cen-
tralisme, ses impôts, ses décrets. L'équilibre,
et plus so_uvent le déséquilibre, tient à ces trois
facteurs. Le Conseil communal intervient dans la
nomination du directeur, il supervise le bilan an-
nuel de chaque entreprise., participe au partage
des bénéfices. Il participe aussi d'une façon plus
indirecte, à beaucoup d'autres points : le plan
d'investissement, 1<: choix de la production, les
œuvres sociales, etc. La commune est donc le
premier « organe de contrôle » de l'entreprise,
ou plutôt de cogestion.
dans le fait que l'autogestion ouvrière est com-
plétée par une gestion communale. Le troisième
facteur, l'Etat, s'effarce, du moins théoriquement,
d'être plus discret, plus effacé, maïs pourtant il
est toujours présen; par sa planification, son cen-
tralisme, ses impôts, ses décrets. L'équilibre,
et plus so_uvent le déséquilibre, tient à ces trois
facteurs. Le Conseil communal intervient dans la
nomination du directeur, il supervise le bilan an-
nuel de chaque entreprise., participe au partage
des bénéfices. Il participe aussi d'une façon plus
indirecte, à beaucoup d'autres points : le plan
d'investissement, 1<: choix de la production, les
œuvres sociales, etc. La commune est donc le
premier « organe de contrôle » de l'entreprise,
ou plutôt de cogestion.
21
Mais ce n'est pas le seul. De nombreuses
autres formations contrôlent chaque entreprise
et l'ensemble des entreprises : les Conseils des
Producteurs qui existent aux différents niveaux,
de la commune jusqu'au niveau fédéral (la
Yougoslavie est une République fédérative) où
le Conseil fédéral des producteurs, quelque
chose comme une chambre économique, a rem-
placé le Conseil des nationalités ; Jes Cham-
bres de Commerce sont plutôt destinées à une
collaboration et coordination ; la Planification
centrale qui existe toujours mais qui se veut
souple, plus indicative qu'impérative (elle pla-
nifie en effet en gros, en laissant les détails
aux six républiques, aux districts et aux com-
munes) ; le Fonds National d'Investissement
qui prête les fonds nécessaires à la création
des entreprises, et fait des avances pour leur
amélioration ; il y a aussi les impôts sur la
vente et l'achat, la politique des prix, Jes phé-
nomènes de marché, Je conrrôJe des échanges
intérieurs, etc.
autres formations contrôlent chaque entreprise
et l'ensemble des entreprises : les Conseils des
Producteurs qui existent aux différents niveaux,
de la commune jusqu'au niveau fédéral (la
Yougoslavie est une République fédérative) où
le Conseil fédéral des producteurs, quelque
chose comme une chambre économique, a rem-
placé le Conseil des nationalités ; Jes Cham-
bres de Commerce sont plutôt destinées à une
collaboration et coordination ; la Planification
centrale qui existe toujours mais qui se veut
souple, plus indicative qu'impérative (elle pla-
nifie en effet en gros, en laissant les détails
aux six républiques, aux districts et aux com-
munes) ; le Fonds National d'Investissement
qui prête les fonds nécessaires à la création
des entreprises, et fait des avances pour leur
amélioration ; il y a aussi les impôts sur la
vente et l'achat, la politique des prix, Jes phé-
nomènes de marché, Je conrrôJe des échanges
intérieurs, etc.
Tous ces organismes sont destinés à con-
trôler et contrebalancer « les abus d'autono-
mie et de libéralisme », à sauvegarder « les
intérêts de la communauté entière menacés par
les intérêts particuliers ». Ainsi, les entreprises,
tout en étant libres et autogérées, sont surveil-
lées par toute, la société : localement par la
commune, sur un plan plus général par tout un
système très complexe de contrôle et de tu-
telle. Et nous rencontrons partout cet esprit de
méfiance et de paternalisme vis-à-vis de.s ou-
vriers ; tout en proclamant leur capacité de
gestion, leurs vertus, etc., le parti et le pouvoir
multiplient les réserves, ne. cachent pas leurs
méfiance, créent toujours des garde-fous, com-
me si la classe ouvrière était un enfant à qui
on a donné un beau jouet, mais qui doit rester
toujours enfant.
trôler et contrebalancer « les abus d'autono-
mie et de libéralisme », à sauvegarder « les
intérêts de la communauté entière menacés par
les intérêts particuliers ». Ainsi, les entreprises,
tout en étant libres et autogérées, sont surveil-
lées par toute, la société : localement par la
commune, sur un plan plus général par tout un
système très complexe de contrôle et de tu-
telle. Et nous rencontrons partout cet esprit de
méfiance et de paternalisme vis-à-vis de.s ou-
vriers ; tout en proclamant leur capacité de
gestion, leurs vertus, etc., le parti et le pouvoir
multiplient les réserves, ne. cachent pas leurs
méfiance, créent toujours des garde-fous, com-
me si la classe ouvrière était un enfant à qui
on a donné un beau jouet, mais qui doit rester
toujours enfant.
Les organes de la gestion ouvrière au niveau,
de l'entreprise sont de quatre ordres : le collec-
tif ouvrier (l'ensemble du personnel) ; le conseil
ouvrier (dans l'entreprise de moins de trente
travailleurs, le collectif remplace le conseil) ;
le comité de gestion (ces deux derniers sont élus
pour un temps limité et responsables devant le
collectif) ; et enfin. Je directeur. De plus, il
existe bien entendu : un comité d'entreprise pour
le domaine social, un syndicat et le parti (la
Ligue des communistes).
de l'entreprise sont de quatre ordres : le collec-
tif ouvrier (l'ensemble du personnel) ; le conseil
ouvrier (dans l'entreprise de moins de trente
travailleurs, le collectif remplace le conseil) ;
le comité de gestion (ces deux derniers sont élus
pour un temps limité et responsables devant le
collectif) ; et enfin. Je directeur. De plus, il
existe bien entendu : un comité d'entreprise pour
le domaine social, un syndicat et le parti (la
Ligue des communistes).
L'organisme le. plus original. Je conseil ou-
vrier, compte de 15 à 120 membres (le plus
souvent entre 15 et 60). Ils sont élus par le
collectif des ouvriers pour un an (depuis 1957,
on accepte jusqu'à deux ans) ; un membre
peut être réélu une fois seulement (il y a aussi
quelques dérogations) ; les trois quarts des
membres doivent appartenir à l'activité princi-
pale de l'entreprise (pour essayer d'éviter la
prépondérance des cadres techniques) ; les
élections étaient au début contrôlées par les
syndicats, ensuite par une commission électo-
rale élue par l'organisme sortant ; il y a une
liste électorale présentée par le syndicat, mais
d'autres peuvent être également proposées à
vrier, compte de 15 à 120 membres (le plus
souvent entre 15 et 60). Ils sont élus par le
collectif des ouvriers pour un an (depuis 1957,
on accepte jusqu'à deux ans) ; un membre
peut être réélu une fois seulement (il y a aussi
quelques dérogations) ; les trois quarts des
membres doivent appartenir à l'activité princi-
pale de l'entreprise (pour essayer d'éviter la
prépondérance des cadres techniques) ; les
élections étaient au début contrôlées par les
syndicats, ensuite par une commission électo-
rale élue par l'organisme sortant ; il y a une
liste électorale présentée par le syndicat, mais
d'autres peuvent être également proposées à
condition qu'il y ait un certain nombre de si-
gnataires qui la proposent.
gnataires qui la proposent.
Le directeur qui a la responsabilité techni-
que de la gestion, qui peut embaucher et licen-
cier les ouvriers, participe obligatoirement aux
réunions du Conseil ouvrier, et partage le vrai
pouvoir avec le conseil de gestion. En cas de
conflits, ceux-ci sont portés devant une Com-
mission des Conflits. Avant la période d'auto-
gestion, le cirecteur était nommé directement
par le Ministère comme un fonctionnaire d'Etat
responsable iniquement devant l'Etat ; ensuite,
sa nomination s'est faite à l'échelon au-dessous,
par le Conssil économique ; actuellement, il
est nommé ;onjointement par le Conseil ou-
vrier et le Ce >mité populaire de la commune. Sa
position est souvent très délicate, et les abus de
confiance fréquents. Le Comité de gestion peut
demander sa révocation (563 cas en 1956, 200
cas en 1958).
que de la gestion, qui peut embaucher et licen-
cier les ouvriers, participe obligatoirement aux
réunions du Conseil ouvrier, et partage le vrai
pouvoir avec le conseil de gestion. En cas de
conflits, ceux-ci sont portés devant une Com-
mission des Conflits. Avant la période d'auto-
gestion, le cirecteur était nommé directement
par le Ministère comme un fonctionnaire d'Etat
responsable iniquement devant l'Etat ; ensuite,
sa nomination s'est faite à l'échelon au-dessous,
par le Conssil économique ; actuellement, il
est nommé ;onjointement par le Conseil ou-
vrier et le Ce >mité populaire de la commune. Sa
position est souvent très délicate, et les abus de
confiance fréquents. Le Comité de gestion peut
demander sa révocation (563 cas en 1956, 200
cas en 1958).
Il y a quelques années, il y avait 11.000
conseils ouvriers, comptant près de 220.000 mem-
bres (170.800 ouvriers et 50.000 employés). Près
de 50 p. 100 sont des femmes et des jeunes
gens ; on compte plus de 1 million de person-
nes qui sont passées par les organes d'autoges-
tion ouvrière. Pour 1964, il y avait dans le sec-
teur socialisé 3.668.000 emplois, dont 1.362.000
dans l'industrie manufacturière, 376.000 dans la
construction, et 346.000 dans l'agriculture (en
1961, dans !e secteur privé, l'agriculture en
comptait 4.551.000, chiffre qui diminue progres-
sivement). Le gain moyen mensuel des ouvriers
dans l'industrie en 1963 a été de 28.000 dinars,
les calories de la nourriture par habitant étaient
de 3.116. De 1953 à 1963, 1.600.000 travailleurs
ont été intégrés dans la production, ce qui re-
vient à dire que le nombre des travailleurs em-
ployés dans îes secteurs socialites a doublé (Etu-
des Economie nés, OCDE, mai 1965). 95 p. 100 de
la production industrielle sonï dans le secteur so-
cialiste.
conseils ouvriers, comptant près de 220.000 mem-
bres (170.800 ouvriers et 50.000 employés). Près
de 50 p. 100 sont des femmes et des jeunes
gens ; on compte plus de 1 million de person-
nes qui sont passées par les organes d'autoges-
tion ouvrière. Pour 1964, il y avait dans le sec-
teur socialisé 3.668.000 emplois, dont 1.362.000
dans l'industrie manufacturière, 376.000 dans la
construction, et 346.000 dans l'agriculture (en
1961, dans !e secteur privé, l'agriculture en
comptait 4.551.000, chiffre qui diminue progres-
sivement). Le gain moyen mensuel des ouvriers
dans l'industrie en 1963 a été de 28.000 dinars,
les calories de la nourriture par habitant étaient
de 3.116. De 1953 à 1963, 1.600.000 travailleurs
ont été intégrés dans la production, ce qui re-
vient à dire que le nombre des travailleurs em-
ployés dans îes secteurs socialites a doublé (Etu-
des Economie nés, OCDE, mai 1965). 95 p. 100 de
la production industrielle sonï dans le secteur so-
cialiste.
Depuis 1953, et surtout 59-60, « la décentra-
lisation interr.e des entreprises » est encore plus
poussée : le;; grande.s entreprises sont subdivi-
sées en plus petites unités autonomes, appelées
« unités économiques » ou « communautés de
travail des producteurs » (ainsi, les chemins de
fer sont subdivisés en 160 unités) ; chaque unité
a son conseil d'ouvriers, possédant uniquement
un pouvoir consultatif ; certaines unités touchent
pour leur travail une rémunération globale qui
est ensuite répartie entre ses membres.
lisation interr.e des entreprises » est encore plus
poussée : le;; grande.s entreprises sont subdivi-
sées en plus petites unités autonomes, appelées
« unités économiques » ou « communautés de
travail des producteurs » (ainsi, les chemins de
fer sont subdivisés en 160 unités) ; chaque unité
a son conseil d'ouvriers, possédant uniquement
un pouvoir consultatif ; certaines unités touchent
pour leur travail une rémunération globale qui
est ensuite répartie entre ses membres.
Le. régime des bénéfices, des salaires et des
prix — prob ème le plus délicat — a été éta-
bli après plusieurs tâtonnements ; même ac-
tuellement, il ne semble pas définitif. Au dé-
but de la période d'autogestion, le système
des salaires était : salaire minimum par ca-
tégorie, avec le droit pour les entreprises de
diitribuer certaines parts de leur profit ; en-
suite, l'entreprise a eu le droit de fixer le ba-
rème des salaires applicables à l'intérieur de
l'entreprise, mais la masse globale à distri-
buer était fitée dans un rapport déterminé ;
dans une troisième phase, ce rapport déter-
prix — prob ème le plus délicat — a été éta-
bli après plusieurs tâtonnements ; même ac-
tuellement, il ne semble pas définitif. Au dé-
but de la période d'autogestion, le système
des salaires était : salaire minimum par ca-
tégorie, avec le droit pour les entreprises de
diitribuer certaines parts de leur profit ; en-
suite, l'entreprise a eu le droit de fixer le ba-
rème des salaires applicables à l'intérieur de
l'entreprise, mais la masse globale à distri-
buer était fitée dans un rapport déterminé ;
dans une troisième phase, ce rapport déter-
22
miné a cessé d'être obligatoire, pour l'entre-
prise, c'est-à-dire que le revenu net de l'en-
treprise est entièrement à la disposition de
l'entreprise. Revenu net, cela signifie le revenu
global duquel on déduit divers chapitres : les
frais matériels de production y compris les amor-
tissements et les intérêts des capitaux, l'impôt
foncier, l'impôt sur le chiffre d'affaire, les cotisa-
tions collectives, etc. De ce revenu net, une par-
tie va aux différents fonds de l'entreprise (fonds
de réserve, de roulement, etc.), une partie à la
commune et le reste est le revenu personnel des
travailleurs. Pour en avoir une idée, en 1962 on
considérait généralement que 25 p. 100 du re-
venu allaient aux organes centraux, 35 p. 100 à la
commune, 40 p. 100 à l'entreprise (pour 1959,
Paul Zorkine avait publié d'autres chiffres). En
allant plus loin dans l'analyse, on remarque
qu'un minimum légal de salaire est imposé, mais
non un maximum légal ; que le bilan et le pro-
jet des répartitions sont soumis au Conseil des
Producteurs de la commune qui peut inviter l'en-
treprise à modifier son projet. La rémunération
pour chaque poste de travail a passé aussi par
plusieurs étapes : au début, on recherchait le
« barème tarifaire » pour chaque poste de tra-
vail, établi par un règlement discuté et modifié
périodiquement par le corps des ouvriers, com-
plété à la fin de l'année par une répartition du
surplus ; ensuite, on a essayé de faire une rému-
nération par unité de produit (quelque chose
comme le salaire aux pièces collectif, à partir
des revenus reçus par unité de marchandises
vendues précédemment) ; on a introduit par la
suite des prévisions pour le. montant total des
frais de production (pour intéresser à faire des
économies dans la production) ; enfin, la rému-
nération a suivi aussi la subdivision de l'entre-
prise en unités autonomes de travail. Ainsi, théo-
riquement, le gain de chaque travailleur cor-
respond à trois choses : le résultat obtenu par
l'ouvrier lui-même, par son équipe de travail et
par l'entreprise elle-même. Sur ce schéma de
fonctionnement ont fonctionné en 1962, 11.000
entreprises, avec 212.000 membres de conseils
ouvriers, et 68.000 membres de comités de ges-
tion.
prise, c'est-à-dire que le revenu net de l'en-
treprise est entièrement à la disposition de
l'entreprise. Revenu net, cela signifie le revenu
global duquel on déduit divers chapitres : les
frais matériels de production y compris les amor-
tissements et les intérêts des capitaux, l'impôt
foncier, l'impôt sur le chiffre d'affaire, les cotisa-
tions collectives, etc. De ce revenu net, une par-
tie va aux différents fonds de l'entreprise (fonds
de réserve, de roulement, etc.), une partie à la
commune et le reste est le revenu personnel des
travailleurs. Pour en avoir une idée, en 1962 on
considérait généralement que 25 p. 100 du re-
venu allaient aux organes centraux, 35 p. 100 à la
commune, 40 p. 100 à l'entreprise (pour 1959,
Paul Zorkine avait publié d'autres chiffres). En
allant plus loin dans l'analyse, on remarque
qu'un minimum légal de salaire est imposé, mais
non un maximum légal ; que le bilan et le pro-
jet des répartitions sont soumis au Conseil des
Producteurs de la commune qui peut inviter l'en-
treprise à modifier son projet. La rémunération
pour chaque poste de travail a passé aussi par
plusieurs étapes : au début, on recherchait le
« barème tarifaire » pour chaque poste de tra-
vail, établi par un règlement discuté et modifié
périodiquement par le corps des ouvriers, com-
plété à la fin de l'année par une répartition du
surplus ; ensuite, on a essayé de faire une rému-
nération par unité de produit (quelque chose
comme le salaire aux pièces collectif, à partir
des revenus reçus par unité de marchandises
vendues précédemment) ; on a introduit par la
suite des prévisions pour le. montant total des
frais de production (pour intéresser à faire des
économies dans la production) ; enfin, la rému-
nération a suivi aussi la subdivision de l'entre-
prise en unités autonomes de travail. Ainsi, théo-
riquement, le gain de chaque travailleur cor-
respond à trois choses : le résultat obtenu par
l'ouvrier lui-même, par son équipe de travail et
par l'entreprise elle-même. Sur ce schéma de
fonctionnement ont fonctionné en 1962, 11.000
entreprises, avec 212.000 membres de conseils
ouvriers, et 68.000 membres de comités de ges-
tion.
IL -- L'AGRICULTURE
L'agriculture continue d'occuper la majorité
de la population. Si, avant la guerre, elle com-
prenait 75 % de la population, en 1953 c'étaient
61 p. 100, en 1962 51 p. 100 (à signaler que la
population en 1960 était de 60 p. 100 supérieure
à celle d'avant-guerre et que la population aug-
mente par année de 7 p. 100).
de la population. Si, avant la guerre, elle com-
prenait 75 % de la population, en 1953 c'étaient
61 p. 100, en 1962 51 p. 100 (à signaler que la
population en 1960 était de 60 p. 100 supérieure
à celle d'avant-guerre et que la population aug-
mente par année de 7 p. 100).
Il faut souligner que si le pouvoir joue le
paternalisme et se méfie au fond de la classe
ouvrière, il a encore moins confiance dans la
masse paysanne. Ainsi, dans le Conseil des Pro-
ducteurs (nous avons vu que c'est la Chambre
Economique Fédérale), l'agriculture, avec 68 p.
100 de la population du pays a 32 p. 100 de
députés, tandis que l'industrie et les mines, avec
18 p. 100 de population active, ont 42 p. 100 de
députés (en 1962).
paternalisme et se méfie au fond de la classe
ouvrière, il a encore moins confiance dans la
masse paysanne. Ainsi, dans le Conseil des Pro-
ducteurs (nous avons vu que c'est la Chambre
Economique Fédérale), l'agriculture, avec 68 p.
100 de la population du pays a 32 p. 100 de
députés, tandis que l'industrie et les mines, avec
18 p. 100 de population active, ont 42 p. 100 de
députés (en 1962).
Avant la guerre, .1 y avait en Yougoslavie
environ 2 millions d'exploitations paysannes
(avec 5,4 hectares en moyenne), très petites et
très paupérisées. La première réforme agraire
(23 août 1945) a touché 1.600.000 hectares en-
viron (la moitié distribuée à 316.000 familles
paysannes dont 70.0(10 n'avaient pas de terres,
l'autre moitié réservée à l'exploitation collec-
tive) ; il faut donc noîer qu'il ne s'agit pas d'une
nationalisation comrr e en Russie, mais plutôt
d'un partage et d'une socialisation. La deuxième
réforme (1953) a toucb.é encore 227.000 hectares,
mais donnés uniquement aux exploitations collec-
tives. A titre de comparaison : la première natio-
nalisation dans l'industrie date de décembre 1846
(uniquement 42 secte ors industriels) ; la deuxiè-
me date de 1948, ellî a fait de l'Etat le maître
de toute l'industrie. Ces banques, des mines, du
commerce en gros et demi-gros.
environ 2 millions d'exploitations paysannes
(avec 5,4 hectares en moyenne), très petites et
très paupérisées. La première réforme agraire
(23 août 1945) a touché 1.600.000 hectares en-
viron (la moitié distribuée à 316.000 familles
paysannes dont 70.0(10 n'avaient pas de terres,
l'autre moitié réservée à l'exploitation collec-
tive) ; il faut donc noîer qu'il ne s'agit pas d'une
nationalisation comrr e en Russie, mais plutôt
d'un partage et d'une socialisation. La deuxième
réforme (1953) a toucb.é encore 227.000 hectares,
mais donnés uniquement aux exploitations collec-
tives. A titre de comparaison : la première natio-
nalisation dans l'industrie date de décembre 1846
(uniquement 42 secte ors industriels) ; la deuxiè-
me date de 1948, ellî a fait de l'Etat le maître
de toute l'industrie. Ces banques, des mines, du
commerce en gros et demi-gros.
Dès le début, l'exploitation collective a été de
deux types : Je don-.aine d'Etat type sovkhoze
(avec travailleurs salariés), et le type coopératives
de travail (qui étaient elles-mêmes divisées en
quatre variantes). Le période 1949-52 a été la
période de la collée tivisation, le plus souvent
forcée; ainsi, en 195 D il y avait 7.000 collecti-
vités agricoles avec 2 millions de membres
dc'est-à-dire 20 p. 130 de familles rurales) ;
il faut dire aussi eue cette expérience s'est
soldée par un échec évident sur le plan de la
productivité, de la participation effective, du
cheptel, etc. Cet écaec ajouté aux difficultés
d'après guerre a entraîné une véritable fa-
mine. Le décret de 1353 a autorisé les paysans
à quitter les collectivités : de 7.000, leur nom-
bre est tombé à 116 en 1962. En même temps,
une nouvelle organisation a été instaurée.
deux types : Je don-.aine d'Etat type sovkhoze
(avec travailleurs salariés), et le type coopératives
de travail (qui étaient elles-mêmes divisées en
quatre variantes). Le période 1949-52 a été la
période de la collée tivisation, le plus souvent
forcée; ainsi, en 195 D il y avait 7.000 collecti-
vités agricoles avec 2 millions de membres
dc'est-à-dire 20 p. 130 de familles rurales) ;
il faut dire aussi eue cette expérience s'est
soldée par un échec évident sur le plan de la
productivité, de la participation effective, du
cheptel, etc. Cet écaec ajouté aux difficultés
d'après guerre a entraîné une véritable fa-
mine. Le décret de 1353 a autorisé les paysans
à quitter les collectivités : de 7.000, leur nom-
bre est tombé à 116 en 1962. En même temps,
une nouvelle organisation a été instaurée.
Actuellement, la s: tuation se présente ainsi :
un secteur privé ave: 2.335.395 exploitations et
11.190.000 hectares (avec 4,7 ha en moyenne
avant-guerre 5,4) et un secteur collectivisé qui
en 1960 ne comprenait qu'environ 6.000 exploi-
tations et moins de 1/10 de la superficie de
terre cultivable (la surface agraire totale est
d'environ 15.000.000 d'hectares, surface culti-
vée environ 10.000.1100, pour une population
agraire de 10.000.OOC aussi). Le secteur collec-
tivisé présente trois formes :
un secteur privé ave: 2.335.395 exploitations et
11.190.000 hectares (avec 4,7 ha en moyenne
avant-guerre 5,4) et un secteur collectivisé qui
en 1960 ne comprenait qu'environ 6.000 exploi-
tations et moins de 1/10 de la superficie de
terre cultivable (la surface agraire totale est
d'environ 15.000.000 d'hectares, surface culti-
vée environ 10.000.1100, pour une population
agraire de 10.000.OOC aussi). Le secteur collec-
tivisé présente trois formes :
1) Coopératives générales. — Ce sont les
anciennes coopératives de consommation (avant
guerre, il y avait 11.309 coopératives agraires,
avec 1.609.176 membres) qui ont étendu leur
activité au domaine de la production en effec-
tuant des travaux peur le compte des paysans
du village. Ces coopératives ne possèdent donc
pas obligatoirement c.e terres. Ainsi, toujours en
1960, il y avait 4.805 exploitations, dont unique-
ment 2.500 possédaient 430.000 hectares (les co-
opératives générales sxploitaient 1.500.000 hecta-
res qui appartenaient aux paysans propriétaires).
Entre les paysans e: les coopératives existent
plusieurs formes de :ontrat : contrat de fourni-
ture de produits et ce travail (labour, semaille,
engrais, etc.) facturé par les paysans ; contrat
de coproduction, le paysan loue sa terre et en
même temps participa à certains travaux, 60 p.
100 du bénéfice appartient ensuite au paysan et
anciennes coopératives de consommation (avant
guerre, il y avait 11.309 coopératives agraires,
avec 1.609.176 membres) qui ont étendu leur
activité au domaine de la production en effec-
tuant des travaux peur le compte des paysans
du village. Ces coopératives ne possèdent donc
pas obligatoirement c.e terres. Ainsi, toujours en
1960, il y avait 4.805 exploitations, dont unique-
ment 2.500 possédaient 430.000 hectares (les co-
opératives générales sxploitaient 1.500.000 hecta-
res qui appartenaient aux paysans propriétaires).
Entre les paysans e: les coopératives existent
plusieurs formes de :ontrat : contrat de fourni-
ture de produits et ce travail (labour, semaille,
engrais, etc.) facturé par les paysans ; contrat
de coproduction, le paysan loue sa terre et en
même temps participa à certains travaux, 60 p.
100 du bénéfice appartient ensuite au paysan et
23
40 p. 100 aux coopératives (après avoir enlevé la
rente de la terre et le prix du travail du pay-
san) ; contrat de location de la terre (donc sans
participation au travail), etc. Les coopératives
font aussi crédit aux exploitants privés pour
acheter du matériel. L'originalité de cette expé-
rience réside dans son double aspect : des sala-
riés participant au travail e{ des membres liés
par des contrats limités. Les coopératives sont
gérées par une assemblée générale qui élit un
conseil coopératif qui de son côté nomme un
comité de direction de neuf membres.
rente de la terre et le prix du travail du pay-
san) ; contrat de location de la terre (donc sans
participation au travail), etc. Les coopératives
font aussi crédit aux exploitants privés pour
acheter du matériel. L'originalité de cette expé-
rience réside dans son double aspect : des sala-
riés participant au travail e{ des membres liés
par des contrats limités. Les coopératives sont
gérées par une assemblée générale qui élit un
conseil coopératif qui de son côté nomme un
comité de direction de neuf membres.
2) Fermes sociales. — Plutôt fermes d'Etat de
type sovkhoze classique avec un salariat (en
1880, 157 exploitations de ce type, avec 672.000
hectares, 116 en 1962).
type sovkhoze classique avec un salariat (en
1880, 157 exploitations de ce type, avec 672.000
hectares, 116 en 1962).
3) Coopératives de production, type
— Avant 1953, c'était le type de gestion le plus
fréquent, avec les fermes d'Etat ; après le dé-
cret autorisant les paysans à quitter les coopéra-
tives, leur nombre a énormément diminué, actuel-
lement leur nombre augmente (378 en 1960,
avec 205.266 hectares).
— Avant 1953, c'était le type de gestion le plus
fréquent, avec les fermes d'Etat ; après le dé-
cret autorisant les paysans à quitter les coopéra-
tives, leur nombre a énormément diminué, actuel-
lement leur nombre augmente (378 en 1960,
avec 205.266 hectares).
Le secteur collectivisé, bien qu'il n'exploite
que 10 p. 100 de la terre cultivable, produit
près, de 50 p. 100 du surplus commercialisé
(par exemple, 85 p. 100 du blé, 65 p. 100 du
maïs, 100 p. 100 des cultures industrielles).
Comme pour l'industrie, les unités agraires
sont contrôlées par la commune qui donne
l'autorisation de fonder une coopérative, prête
les terres communales, contrôle l'activité. Le
deuxième échelon est l'union des coopératives
de l'arrondissement.
que 10 p. 100 de la terre cultivable, produit
près, de 50 p. 100 du surplus commercialisé
(par exemple, 85 p. 100 du blé, 65 p. 100 du
maïs, 100 p. 100 des cultures industrielles).
Comme pour l'industrie, les unités agraires
sont contrôlées par la commune qui donne
l'autorisation de fonder une coopérative, prête
les terres communales, contrôle l'activité. Le
deuxième échelon est l'union des coopératives
de l'arrondissement.
Les résultats de la gestion dans l'agriculture
sont très insuffisants. La production est très fai-
ble, à peine 21 p. 100 de plus qu'avant guerre,
ce qui, vu l'augmentation de la population, est
largement déficitaire et nécessite des importa-
tions (70 à 80 p. 100 de la balance des paie-
ments). Le problème est encore plus complexe
si l'on a en vue le fait que le niveau de la
production de l'agriculture privée est à peu près
semblable à celui de 1930-39, c'est-à-dire que
d'une part l'augmentation de la production est
uniquement due au secteur collectivisé, et d'autre
part que vingt ans après le changement de régi-
me le paysannat dans son immense majorité
est resté dans une situation très insuffisante.
Cela tient, semble-t-il, à l'incompréhension fon-
damentale du marxisme des problèmes paysans.
Le paysannat n'est envisagé que comme sour-
ce de main-d'œuvre et base pour l'industria-
lisation : les partis communistes au pouvoir
ne savent jamais comment s'y prendre avec
la masse paysanne. En Yougoslavie, après
avoir essayé la contrainte et la violence (qui
n'ont rien donné sauf une famine), le pouvoir
veut par une socialisation graduelle, une inté-
gration progressive, la contagiosité des exem-
ples de modernisation technique, relever le
niveau de vie du paysan et le faire participer
à la vie économique. Mais les résultats ne sont
jusqu'à présent guère encourageants.
sont très insuffisants. La production est très fai-
ble, à peine 21 p. 100 de plus qu'avant guerre,
ce qui, vu l'augmentation de la population, est
largement déficitaire et nécessite des importa-
tions (70 à 80 p. 100 de la balance des paie-
ments). Le problème est encore plus complexe
si l'on a en vue le fait que le niveau de la
production de l'agriculture privée est à peu près
semblable à celui de 1930-39, c'est-à-dire que
d'une part l'augmentation de la production est
uniquement due au secteur collectivisé, et d'autre
part que vingt ans après le changement de régi-
me le paysannat dans son immense majorité
est resté dans une situation très insuffisante.
Cela tient, semble-t-il, à l'incompréhension fon-
damentale du marxisme des problèmes paysans.
Le paysannat n'est envisagé que comme sour-
ce de main-d'œuvre et base pour l'industria-
lisation : les partis communistes au pouvoir
ne savent jamais comment s'y prendre avec
la masse paysanne. En Yougoslavie, après
avoir essayé la contrainte et la violence (qui
n'ont rien donné sauf une famine), le pouvoir
veut par une socialisation graduelle, une inté-
gration progressive, la contagiosité des exem-
ples de modernisation technique, relever le
niveau de vie du paysan et le faire participer
à la vie économique. Mais les résultats ne sont
jusqu'à présent guère encourageants.
Mais le problème dépasse l'exemple yougo-
slave : quand il n'y a pas de limite intérieure
slave : quand il n'y a pas de limite intérieure
à la propriété (en Yougoslavie, seule la limite
maxima est fixée à 10 hectares pour la pro-
priété privœ), il existe des propriétés trop
petites dont la rentabilité est très insuffisante,
sans surplus avec en même temps un indice
démographique très grand et une psycho-
logie paysanne très particulière. Le problème
semble inso.uble. Même une collectivisatîon se-
rait « une collectivisation de la misère ». Et
pourtant en Espagne les collectivités agricoles,
qui n'étaienl pas dans de meilleures conditions,
ont démenti é leur vitalité. Les kibboutzim en
Israël aussi. Il faut donc un choc social pour sor-
tir la masss paysanne de son apathie. Il faut
aussi cesser de considérer les paysans comme
une force rétrograde et de second ordre.
maxima est fixée à 10 hectares pour la pro-
priété privœ), il existe des propriétés trop
petites dont la rentabilité est très insuffisante,
sans surplus avec en même temps un indice
démographique très grand et une psycho-
logie paysanne très particulière. Le problème
semble inso.uble. Même une collectivisatîon se-
rait « une collectivisation de la misère ». Et
pourtant en Espagne les collectivités agricoles,
qui n'étaienl pas dans de meilleures conditions,
ont démenti é leur vitalité. Les kibboutzim en
Israël aussi. Il faut donc un choc social pour sor-
tir la masss paysanne de son apathie. Il faut
aussi cesser de considérer les paysans comme
une force rétrograde et de second ordre.
III.
LA GESTION SOCIALE
II existe in troisième secteur de l'économie
yougoslave, qui, lui, échappe complètement aux
principes de l'autogestion, c'est le secteur dit de
« gestion sociale ». C'est une innovation plus ré-
cente (depuis 1955), son domaine correspond en
gros à celui des nationalisations dans les pays
capitalistes, c.à.d. les services d'intérêt géné-
ral, les services publics, les capitaux, les ban-
ques (les chomins de fer et les P.T.T. sont pour-
tant sous le régime d'autogestion — les comités
des directions des organes fédéraux sont compo-
sés des représentants des conseils ouvriers).
yougoslave, qui, lui, échappe complètement aux
principes de l'autogestion, c'est le secteur dit de
« gestion sociale ». C'est une innovation plus ré-
cente (depuis 1955), son domaine correspond en
gros à celui des nationalisations dans les pays
capitalistes, c.à.d. les services d'intérêt géné-
ral, les services publics, les capitaux, les ban-
ques (les chomins de fer et les P.T.T. sont pour-
tant sous le régime d'autogestion — les comités
des directions des organes fédéraux sont compo-
sés des représentants des conseils ouvriers).
Cette « gestion sociale » prend elle aussi dif-
férentes formes :
férentes formes :
— soit la gestion par les représentants des
pouvoirs puilics, avec une certaine participation
plutôt symbslique des conseils ouvriers (par
exemple, la Lanque Nationale fédérale de Yougo-
slavie est dirigée par un Conseil de 21 membres,
14 sont nommés directement par le Conseil Exé-
cutif fédéral, et 7 par le Conseil ouvrier — mê-
me chose peur la radiodiffusion) ;
pouvoirs puilics, avec une certaine participation
plutôt symbslique des conseils ouvriers (par
exemple, la Lanque Nationale fédérale de Yougo-
slavie est dirigée par un Conseil de 21 membres,
14 sont nommés directement par le Conseil Exé-
cutif fédéral, et 7 par le Conseil ouvrier — mê-
me chose peur la radiodiffusion) ;
— soit la gestion par des personnalités com-
pétentes techniquement, également désignées,
avec une petite participation des Conseils ou-
vriers (les maisons d'édition, les théâtres, les
bibliothèques, les institutions sanitaires, protec-
tion sociale) ;
pétentes techniquement, également désignées,
avec une petite participation des Conseils ou-
vriers (les maisons d'édition, les théâtres, les
bibliothèques, les institutions sanitaires, protec-
tion sociale) ;
— soit par des représentants désignés par les
consommateurs et les usagers, c.à.d. gestion in-
directe réalisée par les divers groupements qui
représentent ^es intérêts des usagers (ainsi, l'Ins-
titut fédéral d'Assurance qui est dirigé par un
Comité de 20 membres dont 14 sont nommés par
le Conseil Exécutif fédéral — mais sur proposi-
tion des chambres économiques, de l'Union Gé-
nérale des Coopérateurs, de la Conférence per-
manente des villes — et 6 par le Collectif ou-
vrier ;
consommateurs et les usagers, c.à.d. gestion in-
directe réalisée par les divers groupements qui
représentent ^es intérêts des usagers (ainsi, l'Ins-
titut fédéral d'Assurance qui est dirigé par un
Comité de 20 membres dont 14 sont nommés par
le Conseil Exécutif fédéral — mais sur proposi-
tion des chambres économiques, de l'Union Gé-
nérale des Coopérateurs, de la Conférence per-
manente des villes — et 6 par le Collectif ou-
vrier ;
— soit une gestion plus directe par des Con-
seils élus dirsctement par les consommateurs et
les usagers 'leur travail est surtout consultatif
et leur fonction gratuite) ;
seils élus dirsctement par les consommateurs et
les usagers 'leur travail est surtout consultatif
et leur fonction gratuite) ;
— enfin une gestion encore plus directe —
assemblées qui élisent directement les organes de
gestion, qui discutent même le budget (par exem-
ple, les Conseils d'immeubles d'habitation, les
instituts de sécurité sociale d'arrondissement).
assemblées qui élisent directement les organes de
gestion, qui discutent même le budget (par exem-
ple, les Conseils d'immeubles d'habitation, les
instituts de sécurité sociale d'arrondissement).
24
Nous voyons que dans cette forme de gestion
dite « sociale » on tâche de faire participer da-
vantage les consommateurs et les usagers gué
les producteurs.
dite « sociale » on tâche de faire participer da-
vantage les consommateurs et les usagers gué
les producteurs.
Les économistes yougoslaves déclarent qu'ils
n'ont pas trouvé la forme vraiment satisfaisante
dans ce domaine.
n'ont pas trouvé la forme vraiment satisfaisante
dans ce domaine.
IV. -- AUTOGESTION COMMUNALE
La loi constitutionnelle du 13-1-1953 dans son
article 4 dit : « la propriété sociale des moyens
de production, l'autogestion des producteurs
dans l'industrie et le « self government » du peu-
ple travailleur dans la commune, la ville et l'ar-
rondissement — sont les bases de l'organisation
sociale et politique du pays ».
article 4 dit : « la propriété sociale des moyens
de production, l'autogestion des producteurs
dans l'industrie et le « self government » du peu-
ple travailleur dans la commune, la ville et l'ar-
rondissement — sont les bases de l'organisation
sociale et politique du pays ».
En même temps que la découverte de l'auto-
gestion, le pouvoir a donc essayé de retrouver
les « Comités populaires de la libération » qui
durant la guerre ont administré les zones libé-
rées, et qui dans le schéma de la décentralisa-
tion rapprochaient le pouvoir des masses. Mais
là aussi, se sont manifestées les mêmes ambi-
guïtés, les mêmes insuffisances.
gestion, le pouvoir a donc essayé de retrouver
les « Comités populaires de la libération » qui
durant la guerre ont administré les zones libé-
rées, et qui dans le schéma de la décentralisa-
tion rapprochaient le pouvoir des masses. Mais
là aussi, se sont manifestées les mêmes ambi-
guïtés, les mêmes insuffisances.
Le comité populaire est formé de deux con-
seils, le conseil communal de 15 à 20 mem-
bres, et le conseil des producteurs 15 à 20
membres aussi, élus tous deux pour quatre
ans ; un conseil des citoyens formé de mem-
bres du comité populaire et de citoyens com-
pétents, pour former des commissions (par
exemple, de santé, d'enseignement, d'agricul-
ture, etc.) ; le secrétaire communal est un fonc-
tionnaire qui dépend directement du président
du comité populaire ; ce dernier est élu par
les membres du comité populaire, mais il n'est
pas rééligible. Pour les questions difficiles, on a
recours aux mécanismes de « démocratie di-
recte » : réunions d'électeurs, référendum, etc.
Nous avons déjà vu que la commune n'est pas
seulement une unité administrative et sociale,
mais aussi économique. Elle participe directe-
ment à la vie économique des entreprises de la
commune (choix du directeur, partage des béné-
fices, bilan annuel, éventail des salaires, etc.).
Elle a sa propre vie économique par la gérance
des fonds des investissements, des fonds de loge-
ments, des fonds routiers.
seils, le conseil communal de 15 à 20 mem-
bres, et le conseil des producteurs 15 à 20
membres aussi, élus tous deux pour quatre
ans ; un conseil des citoyens formé de mem-
bres du comité populaire et de citoyens com-
pétents, pour former des commissions (par
exemple, de santé, d'enseignement, d'agricul-
ture, etc.) ; le secrétaire communal est un fonc-
tionnaire qui dépend directement du président
du comité populaire ; ce dernier est élu par
les membres du comité populaire, mais il n'est
pas rééligible. Pour les questions difficiles, on a
recours aux mécanismes de « démocratie di-
recte » : réunions d'électeurs, référendum, etc.
Nous avons déjà vu que la commune n'est pas
seulement une unité administrative et sociale,
mais aussi économique. Elle participe directe-
ment à la vie économique des entreprises de la
commune (choix du directeur, partage des béné-
fices, bilan annuel, éventail des salaires, etc.).
Elle a sa propre vie économique par la gérance
des fonds des investissements, des fonds de loge-
ments, des fonds routiers.
CRITIQUE DE L'EXPERIENCE
Wous préférons poser quelques pic/blêmes, les
laisser en discussion ef comme hypothèses au
lieu de faire des affirmations catégoriques. Cette
précaution s'impose par l'évolution de l'expé-
rience d'autogestion elle-même, qui, bien qu'elle
existe depuis 15 ans en Yougoslavie, semble tou-
jours instable ; elle s'impose aussi parce que
l'expérience yougoslave, bien qu'elle soit inté-
ressante en elle-même n'est qu'un exemple plus
général : une tentative supplémentaire de ges-
tion en dehors du capitalisme libéral, étatique
et des régimes totalitaires. Enfin, nous étudions
l'exemple yougoslave de loin et certaines erreurs
d'optique ou d'interprétation sont toujours possi-
bles.
laisser en discussion ef comme hypothèses au
lieu de faire des affirmations catégoriques. Cette
précaution s'impose par l'évolution de l'expé-
rience d'autogestion elle-même, qui, bien qu'elle
existe depuis 15 ans en Yougoslavie, semble tou-
jours instable ; elle s'impose aussi parce que
l'expérience yougoslave, bien qu'elle soit inté-
ressante en elle-même n'est qu'un exemple plus
général : une tentative supplémentaire de ges-
tion en dehors du capitalisme libéral, étatique
et des régimes totalitaires. Enfin, nous étudions
l'exemple yougoslave de loin et certaines erreurs
d'optique ou d'interprétation sont toujours possi-
bles.
Il y a des difficultés d'un autre ordre, soit en
entrant dans la mythologie de l'autogestion telle
qu'elle existe, en essayant de la défendre « coûte
que coûte » et de la donner en modèle aux au-
tres pays ; soit en la condamnant en bloc parce
que, comme dit Gusrin, elle « n'entre pas dans le
schéma idéal pré\u par le communisme liber-
taire ». Il y a aussi le fait que, en dehors
même de l'approbc:tion ou la condamnation glo-
bale d'un phénon.ène, certains côtés du mê-
me problème peuvent présenter un intérêt et
mériter d'être discutés. Ainsi, si notre juge-
ment global de l'expérience yougoslave est
très réservé, sinon très méfiant, nous réapprou-
vons ici les conclusions faites par Zorkine en
1959 :
entrant dans la mythologie de l'autogestion telle
qu'elle existe, en essayant de la défendre « coûte
que coûte » et de la donner en modèle aux au-
tres pays ; soit en la condamnant en bloc parce
que, comme dit Gusrin, elle « n'entre pas dans le
schéma idéal pré\u par le communisme liber-
taire ». Il y a aussi le fait que, en dehors
même de l'approbc:tion ou la condamnation glo-
bale d'un phénon.ène, certains côtés du mê-
me problème peuvent présenter un intérêt et
mériter d'être discutés. Ainsi, si notre juge-
ment global de l'expérience yougoslave est
très réservé, sinon très méfiant, nous réapprou-
vons ici les conclusions faites par Zorkine en
1959 :
« Chaque fois que l'on avait essayé de faire
coexister les deux (Etat-Conseil ouvrier) ce ne fut
jamais l'Etat qui « dépérit », mais au contraire
c'est lui qui absorta les conseils. » Ce jugement
global se rapprocha aussi de celui de Djilas (La
Nouvelle Classe, F Ion) :
coexister les deux (Etat-Conseil ouvrier) ce ne fut
jamais l'Etat qui « dépérit », mais au contraire
c'est lui qui absorta les conseils. » Ce jugement
global se rapprocha aussi de celui de Djilas (La
Nouvelle Classe, F Ion) :
« Tout l'effort yougoslave d'administration di-
recte n'a été pou:' le régime qu'une soupape
de sécurité ; à travers les mailles de la fiscalité
et de l'emprunt forcé, s'est trouvé retenu le solde
bénéficiaire que les travailleurs croyaient pou-
voir se distribuer il ne leur est resté que les
miettes de la table, et quelques illusions de
moins. Sans liberté universelle, la gestion ou-
vrière elle-même ns peut être libre ; il est clair
que dans une société asservie, rien ne peut
être décidé libremsnt par personne. Les « dé-
centralisateurs » csntralisés ont toujours, d'une
façon ou d'une autre, fait payer au-dessus de
sa valeur l'indépendance qu'ils étaient suppo-
sés accorder. »
recte n'a été pou:' le régime qu'une soupape
de sécurité ; à travers les mailles de la fiscalité
et de l'emprunt forcé, s'est trouvé retenu le solde
bénéficiaire que les travailleurs croyaient pou-
voir se distribuer il ne leur est resté que les
miettes de la table, et quelques illusions de
moins. Sans liberté universelle, la gestion ou-
vrière elle-même ns peut être libre ; il est clair
que dans une société asservie, rien ne peut
être décidé libremsnt par personne. Les « dé-
centralisateurs » csntralisés ont toujours, d'une
façon ou d'une autre, fait payer au-dessus de
sa valeur l'indépendance qu'ils étaient suppo-
sés accorder. »
Mais en dehors même de ce jugement glo-
bal, cette expérionce pose énormément de
problèmes qu'il faat essayer d'aborder le plus
franchement possible, car les mêmes problè-
mes se sont déjà posés dans d'autres expérien-
ces et se posent sûrement de nouveau. La réa-
lité montre que es n'est pas en écartant les
problèmes par un raisonnement qu'on les éli-
mine.
bal, cette expérionce pose énormément de
problèmes qu'il faat essayer d'aborder le plus
franchement possible, car les mêmes problè-
mes se sont déjà posés dans d'autres expérien-
ces et se posent sûrement de nouveau. La réa-
lité montre que es n'est pas en écartant les
problèmes par un raisonnement qu'on les éli-
mine.
Les crifigues enfers J'aufogesfion sont nom-
breuses, et s'inspirent de points de vue diffé-
rents. Les plus intéressantes sont peut-être celles
que se font eux-irêmes les Yougoslaves, com-
me par exemple lo discours de Tito à Split le
6 mai 1S62 (on peut le trouver dans les Archi-
ves Internationales de Sociologie, 1963, n° 13,
pages 140-155). A.exandre Vesselinovic a pu-
blié dans la revue Syndicats Yougoslaves (nov.
54) un article intitulé Déviations dans lequel il
identifie au moins dix types de déviations :
la « ligne des experts » (la position dominante
de l'appareil administratif dans l'entreprise), le
« primitivisme » (par exemple, en traitant tous
les employés de bureaucrates), « anarchie »
(sous-estimation des facteurs conscients d'orga-
nisation dans l'entreprise), la bureaucratie des
organes d'autogestion, les privilèges, le particu-
larisme des entreprises et des communes, le
centralisme de la commune, l'antagonisme de
concurrence par campétition déloyale, les con-
breuses, et s'inspirent de points de vue diffé-
rents. Les plus intéressantes sont peut-être celles
que se font eux-irêmes les Yougoslaves, com-
me par exemple lo discours de Tito à Split le
6 mai 1S62 (on peut le trouver dans les Archi-
ves Internationales de Sociologie, 1963, n° 13,
pages 140-155). A.exandre Vesselinovic a pu-
blié dans la revue Syndicats Yougoslaves (nov.
54) un article intitulé Déviations dans lequel il
identifie au moins dix types de déviations :
la « ligne des experts » (la position dominante
de l'appareil administratif dans l'entreprise), le
« primitivisme » (par exemple, en traitant tous
les employés de bureaucrates), « anarchie »
(sous-estimation des facteurs conscients d'orga-
nisation dans l'entreprise), la bureaucratie des
organes d'autogestion, les privilèges, le particu-
larisme des entreprises et des communes, le
centralisme de la commune, l'antagonisme de
concurrence par campétition déloyale, les con-
25
ceptions de petits propriétaires, le parallélisme
(entre les organes d'autodirection et les organi-
sations sociales).
(entre les organes d'autodirection et les organi-
sations sociales).
Cet auteur ajoute encore :
« Comme chaque acquisition de la Révolution,
l'autogestion ouvrière est l'objet des attaques de
l'ancien système. Quelquefois ces attaques
sont conscientes, raisonnées. Mais le plus sou-
vent le passé lutte avec la force des concep-
tions, des habitudes et des rapports invétérés.
Il lutte et tire de son côté en arrière. »
l'autogestion ouvrière est l'objet des attaques de
l'ancien système. Quelquefois ces attaques
sont conscientes, raisonnées. Mais le plus sou-
vent le passé lutte avec la force des concep-
tions, des habitudes et des rapports invétérés.
Il lutte et tire de son côté en arrière. »
(in Meister, p. 306)
Mais toutes ces « déviations » se résument
en réalité en deux points essentiels :
en réalité en deux points essentiels :
« En même temps, nous devons être conscients
que dans cette situation, il faut soutenir une
lutte sur deux fronts : contre les tendances du
bureaucratisme et contre les tendances de
l'anarchisme spontané. »
que dans cette situation, il faut soutenir une
lutte sur deux fronts : contre les tendances du
bureaucratisme et contre les tendances de
l'anarchisme spontané. »
(E. Kardelj, in Meister, p. 306)
LA TENDANCE A L'AUTARCIE
ET L'EGOISME OUVRIER
ET L'EGOISME OUVRIER
Un peu plus haut, nous avons discouté les rai-
sons de l'instauration de l'autogestion en Yougo-
slavie (échec de la gestion « administrative »,
et avant tout la nécessité pour le régime d'avoir
un appui populaire). Cette création par décision
gouvernementale pèse toujours sur le caractère
et le fonctionnement de l'autogestion. A la créa-
tion, aussi bien que maintenant, l'adhésion et
l'enthousiasme populaire ont toujours manqué ;
au contraire, les masses n'ont pu dépasser la
méfiance, le sentiment qu'on « joue » avec elles,
qu'il ne s'agit que d'une démagogie de propa-
gande provisoire et sans lendemain. Dans ces
conditions, le réflexe le plus courant est de
« profiter de la situation » puisque l'on ne sait
pas ce que sera demain. Cette hypothèse est ag-
gravée par les constants changements, les in-
nombrables nouveaux décrets qui tombent d'en
haut et donnent à l'expérience une marche en
zig-zag. De plus, le parti et le pouvoir ont tou-
jours affirmé leur rôle dirigeant, et ont toujours
gardé les moyens essentiels : la décision, le plan,
les banques, le prélèvement du bénéfice, l'ingé-
rence directe ou indirecte, l'arbitraire. L'auto-
gestion se résume ainsi le plus souvent réelle-
ment non pas en une gestion autonome, même
pas en une cogestion, mais tout simplement en
une gérance ; et l'on sait bien la mentalité d'un
gérant vis-à-vis de son patron — il tâche par
tous les moyens légaux et illégaux d'accroître
ses propres bénéfices.
sons de l'instauration de l'autogestion en Yougo-
slavie (échec de la gestion « administrative »,
et avant tout la nécessité pour le régime d'avoir
un appui populaire). Cette création par décision
gouvernementale pèse toujours sur le caractère
et le fonctionnement de l'autogestion. A la créa-
tion, aussi bien que maintenant, l'adhésion et
l'enthousiasme populaire ont toujours manqué ;
au contraire, les masses n'ont pu dépasser la
méfiance, le sentiment qu'on « joue » avec elles,
qu'il ne s'agit que d'une démagogie de propa-
gande provisoire et sans lendemain. Dans ces
conditions, le réflexe le plus courant est de
« profiter de la situation » puisque l'on ne sait
pas ce que sera demain. Cette hypothèse est ag-
gravée par les constants changements, les in-
nombrables nouveaux décrets qui tombent d'en
haut et donnent à l'expérience une marche en
zig-zag. De plus, le parti et le pouvoir ont tou-
jours affirmé leur rôle dirigeant, et ont toujours
gardé les moyens essentiels : la décision, le plan,
les banques, le prélèvement du bénéfice, l'ingé-
rence directe ou indirecte, l'arbitraire. L'auto-
gestion se résume ainsi le plus souvent réelle-
ment non pas en une gestion autonome, même
pas en une cogestion, mais tout simplement en
une gérance ; et l'on sait bien la mentalité d'un
gérant vis-à-vis de son patron — il tâche par
tous les moyens légaux et illégaux d'accroître
ses propres bénéfices.
Kardelj justifie ainsi le droit à l'ingérence :
« Sans ce droit d'ingérence il est impossible
d'assurer l'unité du système, ainsi qu'un fonc-
tionnement uniforme des services publics.
d'assurer l'unité du système, ainsi qu'un fonc-
tionnement uniforme des services publics.
« C'est du système des inspections plus ou
moins liées sur le plan vertical — système en
dehors duquel un mécanisme administratif dé-
centralisé serait inconcevable — qu'une atten-
tion particulière a été consacrée dans cet ordre
d'idées. »
moins liées sur le plan vertical — système en
dehors duquel un mécanisme administratif dé-
centralisé serait inconcevable — qu'une atten-
tion particulière a été consacrée dans cet ordre
d'idées. »
(Kardelj : « Notre administration d'Etat dans
la situation nouvelle » dans « le Nouveau Droit
yougoslave » 1956 — in Meister.)
la situation nouvelle » dans « le Nouveau Droit
yougoslave » 1956 — in Meister.)
Kardelj dsclare aussi :
« II est vrai que dernièrement et surtout au
cours de l'<xanée passée, nous avons par nos
prescriptions;, économiques et autres, amoindri à
un tel point l'action des conseils ouvriers et des
communes que leur autonomie, dans certains
secteurs, est tombée au-dessous du minimum
admissible. Motre intervention, en certain cas re-
vêt une tendance à revenir purement et simple-
ment à une gestion bureaucratique. Il est vrai
que la base financière de la gestion autonome
de nos conseils ouvriers et de nos communes
est trop étroite. C'est la cause principale de notre
retard dans le développement de nos conseils
ouvriers. Ne us prenons à nos entreprises et à
nos commur.es une telle part de leurs revenus
que les entrsprises sont ramenées à la stagna-
tion technique. »
cours de l'<xanée passée, nous avons par nos
prescriptions;, économiques et autres, amoindri à
un tel point l'action des conseils ouvriers et des
communes que leur autonomie, dans certains
secteurs, est tombée au-dessous du minimum
admissible. Motre intervention, en certain cas re-
vêt une tendance à revenir purement et simple-
ment à une gestion bureaucratique. Il est vrai
que la base financière de la gestion autonome
de nos conseils ouvriers et de nos communes
est trop étroite. C'est la cause principale de notre
retard dans le développement de nos conseils
ouvriers. Ne us prenons à nos entreprises et à
nos commur.es une telle part de leurs revenus
que les entrsprises sont ramenées à la stagna-
tion technique. »
(Kardelj, in Meister, p. 321)
Avec ces contradictions, les ouvriers ont sou-
vent l'impreusion qu'on joue avec eux comme
un chat ave; les souris, et qu'en définitive les
souris seron; toujours mangées (j'ai habité en
Yougoslavie en 1950-51 à l'époque des premiers
décrets d'autogestion, et ces impressions étaient
sensibles paimi les ouvriers).
vent l'impreusion qu'on joue avec eux comme
un chat ave; les souris, et qu'en définitive les
souris seron; toujours mangées (j'ai habité en
Yougoslavie en 1950-51 à l'époque des premiers
décrets d'autogestion, et ces impressions étaient
sensibles paimi les ouvriers).
En dehors des phénomènes plutôt psychologi-
ques (mais ^ui sont très importants dans les
expériences cie ce genre), il y a une insuffisance
essentielle dcns le fonctionnement même de l'au-
togestion yougoslave. L'entreprise industrielle est
plus ou moin;; intégrée dans la commune mais là
s'arrête la coordination venant de la base. Les
conseils d'ouvriers n'ont pas le droit de former
leur propre confédération de producteurs. Les
producteurs ont leurs représentants dans les
Conseils d'arrondissement, des républiques et
dans la Chambre économique de la fédération,
mais ce ne sont que des représentant à titre con-
sultatif et symbolique, sans un vrai pouvoir de
participation et de décision. Ils ont aussi leurs
congrès, comme celui de Belgrade en 1957, mais
qui ne fait eue voter des résolutions avec les
« souhaits » des travailleurs. Dans la Ligue des
communistes, comme par exemple dans le con-
grès de décembre 1964, certains intérêts des Con-
seils ouvriers étaient exprimés, mais les décisions
et l'orientatio:i échappent toujours aux produc-
teurs eux-mêmes. Elles continuent d'appartenir
en fin de compte au pouvoir central, voire
même au pouvoir personnel. Il y a évidemment
aussi les syndicats, mais leur rôle est de loin
secondaire.
ques (mais ^ui sont très importants dans les
expériences cie ce genre), il y a une insuffisance
essentielle dcns le fonctionnement même de l'au-
togestion yougoslave. L'entreprise industrielle est
plus ou moin;; intégrée dans la commune mais là
s'arrête la coordination venant de la base. Les
conseils d'ouvriers n'ont pas le droit de former
leur propre confédération de producteurs. Les
producteurs ont leurs représentants dans les
Conseils d'arrondissement, des républiques et
dans la Chambre économique de la fédération,
mais ce ne sont que des représentant à titre con-
sultatif et symbolique, sans un vrai pouvoir de
participation et de décision. Ils ont aussi leurs
congrès, comme celui de Belgrade en 1957, mais
qui ne fait eue voter des résolutions avec les
« souhaits » des travailleurs. Dans la Ligue des
communistes, comme par exemple dans le con-
grès de décembre 1964, certains intérêts des Con-
seils ouvriers étaient exprimés, mais les décisions
et l'orientatio:i échappent toujours aux produc-
teurs eux-mêmes. Elles continuent d'appartenir
en fin de compte au pouvoir central, voire
même au pouvoir personnel. Il y a évidemment
aussi les syndicats, mais leur rôle est de loin
secondaire.
Il manque l'essentiel : les forces productives
sont subordonnées, irresponsables sur le plan
général. Elles restent obligatoirement isolées, il
leur manque une vision d'ensemble et la solida-
rité de classe. Sans responsabilité effective, sans
solidarité, on ne peu} créer une économie col-
lective. Il ne s'agit pas uniquement des organes
intermédiaires entre le pouvoir central et l'auto-
gestion, mais d'une véritable autogestion sur un
plan collectif.
sont subordonnées, irresponsables sur le plan
général. Elles restent obligatoirement isolées, il
leur manque une vision d'ensemble et la solida-
rité de classe. Sans responsabilité effective, sans
solidarité, on ne peu} créer une économie col-
lective. Il ne s'agit pas uniquement des organes
intermédiaires entre le pouvoir central et l'auto-
gestion, mais d'une véritable autogestion sur un
plan collectif.
Nous avon;; vu une expérience semblable
dans l'expérience de l'Espagne révolutionnaire.
Malgré des conditions objectives meilleures (il
s'agissait d'un 3 collectivisation après une guerre
révolutionnaire), malgré un phénomène subjectif
dans l'expérience de l'Espagne révolutionnaire.
Malgré des conditions objectives meilleures (il
s'agissait d'un 3 collectivisation après une guerre
révolutionnaire), malgré un phénomène subjectif
26
meilleur aussi (la C.N.Ï. et l'U.G.T. avaient pu
faire une formation syndicale très poussée et
large), les conseils ouvriers créés dès le commen-
cement en Catalogne n'ont pu échapper au mê-
me danger :
faire une formation syndicale très poussée et
large), les conseils ouvriers créés dès le commen-
cement en Catalogne n'ont pu échapper au mê-
me danger :
— « A Barcelone, et dans presque toutes les
villes, dans les centres industriels de Catalogne,
chaque usine fabriquait et vendaij ses produits
pour son propre compte ; chacun cherchait des
clients et les disputait à l'usine rivale. Un néo-
capitalisme ouvrier était né. (...) Dans le com-
merce, le même néo-capitalisme se manifestait
sur une échelle beaucoup plus grande. (...) Au
contraire dans les usines et entreprises qui
étaient aux mains des syndicats, la production
augmenta, ou du moins il n'y eut pas de défi-
cit. Dans la mesure des ressources disponibles,
le rendement était toujours supérieur. De plus,
il n'y eut pas l'immoralité des salaires deux ou
trois fois supérieurs selon les matières premières
disponibles et le don commercial. »
villes, dans les centres industriels de Catalogne,
chaque usine fabriquait et vendaij ses produits
pour son propre compte ; chacun cherchait des
clients et les disputait à l'usine rivale. Un néo-
capitalisme ouvrier était né. (...) Dans le com-
merce, le même néo-capitalisme se manifestait
sur une échelle beaucoup plus grande. (...) Au
contraire dans les usines et entreprises qui
étaient aux mains des syndicats, la production
augmenta, ou du moins il n'y eut pas de défi-
cit. Dans la mesure des ressources disponibles,
le rendement était toujours supérieur. De plus,
il n'y eut pas l'immoralité des salaires deux ou
trois fois supérieurs selon les matières premières
disponibles et le don commercial. »
(G. LEVAL : Les syndicats dans la Bévolution
espagnole, traduit de l'italien, éd. Il Libeitaiio,
Milan 1948, pp. 32-41).
espagnole, traduit de l'italien, éd. Il Libeitaiio,
Milan 1948, pp. 32-41).
Cette tendance des entreprises est tout le con-
traire d'un fédéralisme. Il ne s'agit pour elles que
d'acquérir te plus possible de bénéfices au dé-
triment des autres conseils d'usines, s'il le faut.
C'est la réapparition du profit et de l'arrivisme
capitalistes, avec cette différence qu'il n'y a plus
un propriétaire, mais des dizaines, avec une ra-
pacité identique.
traire d'un fédéralisme. Il ne s'agit pour elles que
d'acquérir te plus possible de bénéfices au dé-
triment des autres conseils d'usines, s'il le faut.
C'est la réapparition du profit et de l'arrivisme
capitalistes, avec cette différence qu'il n'y a plus
un propriétaire, mais des dizaines, avec une ra-
pacité identique.
Cette situation a pu être dépassée dès que les
syndicats ont pris en main la situation économi-
que et on créé des fédérations par branches de
production .Les difficultés n'ont pas été réso-
lues immédiatement (car il y en avait beaucoup
d'un autre ordre) mais du moins cette plaie a été
supprimée.
syndicats ont pris en main la situation économi-
que et on créé des fédérations par branches de
production .Les difficultés n'ont pas été réso-
lues immédiatement (car il y en avait beaucoup
d'un autre ordre) mais du moins cette plaie a été
supprimée.
Dans l'expérience des kibboutzim en Israël, on
a aussi vu apparaître un égoïsme (qui mène tou-
jours à l'exploitation des autres) mais il s'agis-
sait et il s'agit de l'attitude des kibboutzim vis-à-
vis des salariés saisonniers. Il n'y a pas l'isole-
ment des kibboutzim, car les différents kibbout-
zim sont organisés par leurs fédérations. En
Yougoslavie, cela manque, c'est même interdit.
Et ensuite on se demande pourquoi l'esprit de
particularisme, d'égoïsme, etc., est si fort dans
les entreprises.
a aussi vu apparaître un égoïsme (qui mène tou-
jours à l'exploitation des autres) mais il s'agis-
sait et il s'agit de l'attitude des kibboutzim vis-à-
vis des salariés saisonniers. Il n'y a pas l'isole-
ment des kibboutzim, car les différents kibbout-
zim sont organisés par leurs fédérations. En
Yougoslavie, cela manque, c'est même interdit.
Et ensuite on se demande pourquoi l'esprit de
particularisme, d'égoïsme, etc., est si fort dans
les entreprises.
Guy Desobre déplore aussi (dans « Docu-
ments Socialistes » n° 1) le « manque de liai-
son » qu'il considère comme une « insuffisance
des conseils ouvriers ». Il pense que ce manque
de coordination entre les conseils ouvriers les
empêche d'exercer un contrôle sur les dirigeants
politiques. Mais ce sont précisément les diri-
geants politiques qui ne supportent aucune con-
currence ni aucun contrôle. C'est pour maintenir
ce totalitarisme idéologique et politique qu'ils
préfèrent laisser les conseils ouvriers dans cette
forme imparfaite et insuffisante.
ments Socialistes » n° 1) le « manque de liai-
son » qu'il considère comme une « insuffisance
des conseils ouvriers ». Il pense que ce manque
de coordination entre les conseils ouvriers les
empêche d'exercer un contrôle sur les dirigeants
politiques. Mais ce sont précisément les diri-
geants politiques qui ne supportent aucune con-
currence ni aucun contrôle. C'est pour maintenir
ce totalitarisme idéologique et politique qu'ils
préfèrent laisser les conseils ouvriers dans cette
forme imparfaite et insuffisante.
Pour nous, la nécessité de cette fédération se
pose dès maintenant, sans elle les entreprises
isolées aboutiront à une nouvelle inégalité et à
des absurdités.
pose dès maintenant, sans elle les entreprises
isolées aboutiront à une nouvelle inégalité et à
des absurdités.
En Yougoslavie, la question est, semble-t-il,
plus compliquée, car la classe ouvrière, disent
plus compliquée, car la classe ouvrière, disent
certains Yougoslaves, dans un pays sous-déve-
loppé, n'est pas à la « hauteur » de sa fâche. La
Yougoslavie a en eff 3t encore les caractères d'un
pays sous-développe : la masse paysanne pré-
domine par le nombre, la classe ouvrière est
d'une origine paysanne trop récente, il y a une
surpopulation surtout dans la campagne avec un
exode massif vers .es villes, le rendement in-
dustriel et agricole est encore trop bas, le ni-
veau de vie encore trop insuffisant. Mais cela
suffit-il à condamner pour encore de nombreu-
ses années la classe ! ouvrière à un rôle de sou-
mission et d'exécution ? Sur le plan historique, ce
n'est pas la classe ouvrière des pays hautement
industrialisés qui a réalisé l'idéal communau-
taire, ce sont au contraire les ouvriers et les pay-
sans de la Russie, de l'Espagne, etc., qui s'en
sont rapprochés le plus.
loppé, n'est pas à la « hauteur » de sa fâche. La
Yougoslavie a en eff 3t encore les caractères d'un
pays sous-développe : la masse paysanne pré-
domine par le nombre, la classe ouvrière est
d'une origine paysanne trop récente, il y a une
surpopulation surtout dans la campagne avec un
exode massif vers .es villes, le rendement in-
dustriel et agricole est encore trop bas, le ni-
veau de vie encore trop insuffisant. Mais cela
suffit-il à condamner pour encore de nombreu-
ses années la classe ! ouvrière à un rôle de sou-
mission et d'exécution ? Sur le plan historique, ce
n'est pas la classe ouvrière des pays hautement
industrialisés qui a réalisé l'idéal communau-
taire, ce sont au contraire les ouvriers et les pay-
sans de la Russie, de l'Espagne, etc., qui s'en
sont rapprochés le plus.
En même temps jue le problème général, il
existe beaucoup d3 problèmes plutôt techni-
ques qui sont égclement importants pour le
fonctionnement de l'autogestion. Nous ne pou-
vons ici qu'en énumérer quelques-uns : la sti-
mulation de la production, l'éventail des sa-
laires, la planificai ion, l'usure de l'idéal col-
lectif dans la société de consommation, la co-
existence du secteur autogéré avec l'appareil
étatique, la coexistsnce avec les secteurs pri-
vés...
existe beaucoup d3 problèmes plutôt techni-
ques qui sont égclement importants pour le
fonctionnement de l'autogestion. Nous ne pou-
vons ici qu'en énumérer quelques-uns : la sti-
mulation de la production, l'éventail des sa-
laires, la planificai ion, l'usure de l'idéal col-
lectif dans la société de consommation, la co-
existence du secteur autogéré avec l'appareil
étatique, la coexistsnce avec les secteurs pri-
vés...
CONCLUSIONS
Nous avons mentionné les bases théoriques
qui sont très minces, les origines de l'auto-
gestion yougoslave (qui donnent à toute cette
expérience des limiles très étroites et une lourde
hypothèque), ainsi que le fonctionnement, les
difficultés et les insuffisances manifestées de-
puis 15 ans ; nou> avons aussi fait quelques
critiques et souligns les hésitations, le pragma-
tisme, les forces multiples et divergentes qui
donnent à cette expérience une marche en zig
zag et une grande incertitude.
qui sont très minces, les origines de l'auto-
gestion yougoslave (qui donnent à toute cette
expérience des limiles très étroites et une lourde
hypothèque), ainsi que le fonctionnement, les
difficultés et les insuffisances manifestées de-
puis 15 ans ; nou> avons aussi fait quelques
critiques et souligns les hésitations, le pragma-
tisme, les forces multiples et divergentes qui
donnent à cette expérience une marche en zig
zag et une grande incertitude.
Il est donc difficile de faire des pronostics.
Mais même en tort qu'expérience actuelle, les
conseils ouvriers ot l'autogestion yougoslaves
ne peuvent pas nDUS servir d'exemple ; bien
qu'on ait envie sentimentalement de se solida-
riser et de les défendre (surtout quand ils sont
menacés), on ne pout pas s'identifier avec cette
expérience, ni en faire la défense incondition-
nelle ; nous ne faisons pas seulement des cri-
tiques et des réserves, mais nous n'acceptons
pas le principe d'un parti politique qui doit
avoir le rôle dirigeant, prépondérant, omniscient
et omniprésent ; 1<3 forces productrices doivent
être considérées non seulement en tant que
moyen et rapport de production, mais aussi et
avant tout comme une force sociale, capable
d'organiser la société sur des bases plus justes
et plus solides que la violence ou l'arbitraire.
Mais même en tort qu'expérience actuelle, les
conseils ouvriers ot l'autogestion yougoslaves
ne peuvent pas nDUS servir d'exemple ; bien
qu'on ait envie sentimentalement de se solida-
riser et de les défendre (surtout quand ils sont
menacés), on ne pout pas s'identifier avec cette
expérience, ni en faire la défense incondition-
nelle ; nous ne faisons pas seulement des cri-
tiques et des réserves, mais nous n'acceptons
pas le principe d'un parti politique qui doit
avoir le rôle dirigeant, prépondérant, omniscient
et omniprésent ; 1<3 forces productrices doivent
être considérées non seulement en tant que
moyen et rapport de production, mais aussi et
avant tout comme une force sociale, capable
d'organiser la société sur des bases plus justes
et plus solides que la violence ou l'arbitraire.
Ce n'est pas le :as en Yougoslavie. Une pre-
mière contradictior. surgit ainsi : la suprastruc-
ture politique et idéologique prime l'infrastruc-
ture économique et productrice, et fausse
le rôle de chacun s et leur rapport entre elles.
Une deuxième contradiction dans le schéma
marxiste est également évidente ; Marx a dé-
mière contradictior. surgit ainsi : la suprastruc-
ture politique et idéologique prime l'infrastruc-
ture économique et productrice, et fausse
le rôle de chacun s et leur rapport entre elles.
Une deuxième contradiction dans le schéma
marxiste est également évidente ; Marx a dé-
27
fini dans « le Capital » la classe capitaliste
comme celle « qui possède le monopole des
moyens de production sociaux et de l'argent »
en appliquant ainsi les principes marxistes,
l'économie des pays dits socialistes doit se
définir comme une économie capitaliste, et la
classe au pouvoir non seulement comme une
bureaucratie, une déformation, mais comme
une classe capitaliste parce, que seule classe
qui possède le monopole des moyens de pro-
duction, de l'argent, du pouvoir de décision
et de coercition... Les Yougoslaves ont es-
sayé de résoudre cette deuxième contradic-
tion mais conservent la première ; c'est pour-
quoi leur économie est déchirée entre les
besoins et la nostalgie d'une classe politique et
technocratique privilégiée d'une part, et les
échappements exagérés d'un particularisme lo-
cal et régional d'autre part.
comme celle « qui possède le monopole des
moyens de production sociaux et de l'argent »
en appliquant ainsi les principes marxistes,
l'économie des pays dits socialistes doit se
définir comme une économie capitaliste, et la
classe au pouvoir non seulement comme une
bureaucratie, une déformation, mais comme
une classe capitaliste parce, que seule classe
qui possède le monopole des moyens de pro-
duction, de l'argent, du pouvoir de décision
et de coercition... Les Yougoslaves ont es-
sayé de résoudre cette deuxième contradic-
tion mais conservent la première ; c'est pour-
quoi leur économie est déchirée entre les
besoins et la nostalgie d'une classe politique et
technocratique privilégiée d'une part, et les
échappements exagérés d'un particularisme lo-
cal et régional d'autre part.
Si l'expérience yougoslave, dans la pratique,
n'est pa suffisamment convaincante, parce que
forcément limitée et insuffisante, historique-
ment elle est d'une grande importance. Elle té-
moigne d'une part de l'échec de la gestion
purement administrative, bureaucratique, éta-
tique et dictatoriale, et de la recherche d'une
autre solution dans laquelle les masses pro-
ductrices seront engagées d'une manière plus
libre, plus responsable et plus directe. Même
si cette solution n'est pas encore trouvée, mê-
me si elle est imparfaite, elle ouvre des pers-
pectives qui dépasseront sûrement l'expérience
n'est pa suffisamment convaincante, parce que
forcément limitée et insuffisante, historique-
ment elle est d'une grande importance. Elle té-
moigne d'une part de l'échec de la gestion
purement administrative, bureaucratique, éta-
tique et dictatoriale, et de la recherche d'une
autre solution dans laquelle les masses pro-
ductrices seront engagées d'une manière plus
libre, plus responsable et plus directe. Même
si cette solution n'est pas encore trouvée, mê-
me si elle est imparfaite, elle ouvre des pers-
pectives qui dépasseront sûrement l'expérience
L'Autogestion en Algérie
Le lor novembre 1954, quelques bandes d'hom-
mes mal armés et mal équipés donnaient le si-
gnal de l'insurrection sur le territoire de trois
« départements français ». Huit ans après, Ben
Bella, l'un des neufs chefs historiques qui dé-
clenchèrent la rébellion, présidait aux destinées
d'un Etat en principe totalement souverain.
mes mal armés et mal équipés donnaient le si-
gnal de l'insurrection sur le territoire de trois
« départements français ». Huit ans après, Ben
Bella, l'un des neufs chefs historiques qui dé-
clenchèrent la rébellion, présidait aux destinées
d'un Etat en principe totalement souverain.
Mais l'indépendance avait été suivie d'une
grave crise politique, provoquée par la dés-
union des dirigeants du G.P.R.A., désunion en
partie masquée et contenue durant la guerre,
et qui éclata au grand jour après le référen-
dum d'autodéjermination. Ben Bella, installé en
Oranie, forme le groupe de Tlemcen, en op-
position au gouvernement Ben Khedda, qui est
lui-même une coalition d'éléments très divers.
L'absence de tradition constitutionnelle permet
à chaque clan de réclamer la représentation
exclusive du pays, c'est-à-dire le monopole
d'Etat. Le groupe de Tlemcen forme, un « bu-
reau politique du F.L.N. » de sa propre initia-
tive, et, soutenu par l'A.N.P. d'armée formée en
Tunisie et au Maroc, commandée par Boumé-
dienne) prend le pouvoir en août, malgré une
assez vive opposition des Willayas de l'intérieur.
Des élections, le 20 septembre, amènent une rela-
tive stabilité, avec la constitution d'une as-
semblée et d'un gouvernement ; le Pouvoir
est légitimé. Et on peut penser que, dans la
mesure où Boumédîenne était déjà là, c'est,
jusqu'à aujourd'hui, le même pouvoir qui con-
grave crise politique, provoquée par la dés-
union des dirigeants du G.P.R.A., désunion en
partie masquée et contenue durant la guerre,
et qui éclata au grand jour après le référen-
dum d'autodéjermination. Ben Bella, installé en
Oranie, forme le groupe de Tlemcen, en op-
position au gouvernement Ben Khedda, qui est
lui-même une coalition d'éléments très divers.
L'absence de tradition constitutionnelle permet
à chaque clan de réclamer la représentation
exclusive du pays, c'est-à-dire le monopole
d'Etat. Le groupe de Tlemcen forme, un « bu-
reau politique du F.L.N. » de sa propre initia-
tive, et, soutenu par l'A.N.P. d'armée formée en
Tunisie et au Maroc, commandée par Boumé-
dienne) prend le pouvoir en août, malgré une
assez vive opposition des Willayas de l'intérieur.
Des élections, le 20 septembre, amènent une rela-
tive stabilité, avec la constitution d'une as-
semblée et d'un gouvernement ; le Pouvoir
est légitimé. Et on peut penser que, dans la
mesure où Boumédîenne était déjà là, c'est,
jusqu'à aujourd'hui, le même pouvoir qui con-
de départ '3lle-même. Il nous semble que ce pro-
cessus est déjà en cours — dans les pays dits
socialistes, l'exemple yougoslave en tant que
courage politique, et aussi comme recherche
économique, a ouvert une brèche dans l'édifice
dogmatique! et scolastique stalinien ; les ou-
vriers du grand Budapest qui avaient repris le
slogan des. Conseils ouvriers (en le poussant
même plus loin), ont été écrasés par les chars,
mais même' maintenant, dans les pays satellites
les plus sialiniens, le parti se sent obligé de
faire un brouillard de démagogie sur une cer-
taine participation et autonomie de base...
L'exemple yougoslave est étudié avec intérêt
encore pluii ouvert par les pays nouvellement
indépendants politiquement et en voie de dé-
veloppemer.t économique : les Algériens, les
Marocains (Ben Barka a passé de longs mois
en Yougoslavie !)... Ainsi, l'humanité marche
en avant, im tâtonnant, en cherchant, par des
demi-succès et par des échecs, en gardant un
souvenir piofond de ses blessures mais aussi
un sens toujours vif d'espoir et de justice...
cessus est déjà en cours — dans les pays dits
socialistes, l'exemple yougoslave en tant que
courage politique, et aussi comme recherche
économique, a ouvert une brèche dans l'édifice
dogmatique! et scolastique stalinien ; les ou-
vriers du grand Budapest qui avaient repris le
slogan des. Conseils ouvriers (en le poussant
même plus loin), ont été écrasés par les chars,
mais même' maintenant, dans les pays satellites
les plus sialiniens, le parti se sent obligé de
faire un brouillard de démagogie sur une cer-
taine participation et autonomie de base...
L'exemple yougoslave est étudié avec intérêt
encore pluii ouvert par les pays nouvellement
indépendants politiquement et en voie de dé-
veloppemer.t économique : les Algériens, les
Marocains (Ben Barka a passé de longs mois
en Yougoslavie !)... Ainsi, l'humanité marche
en avant, im tâtonnant, en cherchant, par des
demi-succès et par des échecs, en gardant un
souvenir piofond de ses blessures mais aussi
un sens toujours vif d'espoir et de justice...
Le jour où des aspirations populaires, dé-
sir de justice et refus d'exploitation, rencon-
treront une conscience aussi aiguë de la réa-
lité économique et sociale ainsi que des exem-
ples et des leçons de gestions collectives pas-
sées et présentes — ce jour, les masses accom-
pliront peut-être un nouveau pas en avant.
sir de justice et refus d'exploitation, rencon-
treront une conscience aussi aiguë de la réa-
lité économique et sociale ainsi que des exem-
ples et des leçons de gestions collectives pas-
sées et présentes — ce jour, les masses accom-
pliront peut-être un nouveau pas en avant.
(Texte publié dans la revue « Noir et Rouge »,
Wos 31, 32, ,?3, février 1986.)
Wos 31, 32, ,?3, février 1986.)
tinue, sïmplsment « épuré » d'éléments désor-
mais inutiles ou encombrants.
mais inutiles ou encombrants.
Ces Jrois mois de. troubles politiques ren-
forcent la confusion économique née de la
désagrégation rapide des structures colonia-
les. C'est v.n rappel banal que de dire que
l'économie nigérienne reposait tout entière sur
la fait coloiial : l'Algérie n'était qu'un mar-
ché pour les produits de la métropole, et une
source de riatières premières ; tous les roua-
ges de l'éccnomie étaient aux mains des Euro-
péens. Juillet 1962 et la crise de l'été provo-
quent leur départ massif, l'économie, algé-
rienne ou es qu'il en reste après des années
de guerre, est laissée désorientée par rapport
au nouvel état politique, sans techniciens, sans
cadres. Dan;; les campagnes, le vide est quasi
total, les domaines agricoles sont « vacants » ;
dans les villes la situation est un peu moins
mauvaise, m jlgré les destructions de l'O.A.S. qui
ont ajouté à la crise, et les usines conservent
pour la plupart une partie au moins de leurs
cadres.
forcent la confusion économique née de la
désagrégation rapide des structures colonia-
les. C'est v.n rappel banal que de dire que
l'économie nigérienne reposait tout entière sur
la fait coloiial : l'Algérie n'était qu'un mar-
ché pour les produits de la métropole, et une
source de riatières premières ; tous les roua-
ges de l'éccnomie étaient aux mains des Euro-
péens. Juillet 1962 et la crise de l'été provo-
quent leur départ massif, l'économie, algé-
rienne ou es qu'il en reste après des années
de guerre, est laissée désorientée par rapport
au nouvel état politique, sans techniciens, sans
cadres. Dan;; les campagnes, le vide est quasi
total, les domaines agricoles sont « vacants » ;
dans les villes la situation est un peu moins
mauvaise, m jlgré les destructions de l'O.A.S. qui
ont ajouté à la crise, et les usines conservent
pour la plupart une partie au moins de leurs
cadres.
Dans l'administration, et surtout dans l'ad-
ministration régionale, le désordre est com-
plet : pas ce préfets, pas d'assemblées régio-
nales (comms les conseils généraux, et les dé-
légations sp 3ciales). Par contre, l'armée fran-
çaise reste sncore ainsi qu'un exécutif provi-
soire, aussi français. C'est dans ce. vide éco-
nomique et administratif de l'été 1962, et com-
plètement à l'écart de la crise politique et
ministration régionale, le désordre est com-
plet : pas ce préfets, pas d'assemblées régio-
nales (comms les conseils généraux, et les dé-
légations sp 3ciales). Par contre, l'armée fran-
çaise reste sncore ainsi qu'un exécutif provi-
soire, aussi français. C'est dans ce. vide éco-
nomique et administratif de l'été 1962, et com-
plètement à l'écart de la crise politique et
28
des préoccupations des différents groupes que
naît l'autogestion.
naît l'autogestion.
Avait-elle été prévue, par les cadres du mou-
vement de libération ?
vement de libération ?
— Le Programme de Tripoli (juin 1962) s'oc-
cupe peu des structures industrielles, en égard
à la prédominance agraire du pays ; il pré-
conise par contre ce qu'il appelle une « révo-
lution agraire ». La possibilité de fermes pilo-
tes d'Etat est envisagée, à la gestion et aux
bénéfices desquelles participeraient les ou-
vriers qui y seraient employés. On peut voir
là, si on veut, un embryon bien vague et bien
ambigu de l'idée d'autogestion. Et le projet de
programme présenté au C.N.R.A. par la Fédéra-
tion de France du F.L.N. (mai 1962) demandait
seulement une « collectivisajion des grands
moyens de production ».
cupe peu des structures industrielles, en égard
à la prédominance agraire du pays ; il pré-
conise par contre ce qu'il appelle une « révo-
lution agraire ». La possibilité de fermes pilo-
tes d'Etat est envisagée, à la gestion et aux
bénéfices desquelles participeraient les ou-
vriers qui y seraient employés. On peut voir
là, si on veut, un embryon bien vague et bien
ambigu de l'idée d'autogestion. Et le projet de
programme présenté au C.N.R.A. par la Fédéra-
tion de France du F.L.N. (mai 1962) demandait
seulement une « collectivisajion des grands
moyens de production ».
En fait, dès le départ des colons, qui aban-
donnent la terre en sabotant parfois un matériel
qu'ils ne pouvaient emporter, les fellahs ont
d'eux-mêmes pris en main la culture, pour assu-
rer la rentrée de la récolte. Et il a bien fallu que
joue un minimum d'organisation, une commu-
nauté et une solidarité de base.
donnent la terre en sabotant parfois un matériel
qu'ils ne pouvaient emporter, les fellahs ont
d'eux-mêmes pris en main la culture, pour assu-
rer la rentrée de la récolte. Et il a bien fallu que
joue un minimum d'organisation, une commu-
nauté et une solidarité de base.
« Nous serions trop indulgents envers nous-
mêmes si "nous prétendions que cette prise en
main avait été concertée, préparée depuis plus
ou moins longtemps. Elle fut plutôt spontanée :
la terre était là, il fallait la travailler... (les tra-
valleurs) ont-ils été à la hauteur de leurs ambi-
tions ? Le problème n'est pas là ; qui dans les
circonstances aurait fait mieux ? » et Hévoltzfion
et Travail ajoute cette ironique allusion à l'ab-
sence d'initiative d'un gouvernement : « Qui
d'ailleurs pouvait opposer une quelconque alter-
native à l'action spontanée, à la création sur le
tas des travailleurs ? Personne. Ou plutôt si :
L'exécutif provisoire créa un Bureau à la pro-
tection et à la gestion des biens vacants, et lança
un appel aux colons de revenir ! ». (Révolution
et Travail, journal de l'U.G.T.A.).
mêmes si "nous prétendions que cette prise en
main avait été concertée, préparée depuis plus
ou moins longtemps. Elle fut plutôt spontanée :
la terre était là, il fallait la travailler... (les tra-
valleurs) ont-ils été à la hauteur de leurs ambi-
tions ? Le problème n'est pas là ; qui dans les
circonstances aurait fait mieux ? » et Hévoltzfion
et Travail ajoute cette ironique allusion à l'ab-
sence d'initiative d'un gouvernement : « Qui
d'ailleurs pouvait opposer une quelconque alter-
native à l'action spontanée, à la création sur le
tas des travailleurs ? Personne. Ou plutôt si :
L'exécutif provisoire créa un Bureau à la pro-
tection et à la gestion des biens vacants, et lança
un appel aux colons de revenir ! ». (Révolution
et Travail, journal de l'U.G.T.A.).
Pendant ce temps, les incidents se multiplient
entre paysans et responsables officiels : terres
occupées, meules et granges de gros propriétai-
res incendiées. Les fellahs paraissent peu se
soucier du « respect des biens » exigé par une
Ordonnance du 24 août.
entre paysans et responsables officiels : terres
occupées, meules et granges de gros propriétai-
res incendiées. Les fellahs paraissent peu se
soucier du « respect des biens » exigé par une
Ordonnance du 24 août.
Le 5 octobre, Ben Bella, devenu président de
la république algérienne, prononce un discours
où il annonce la « campagne des labours » : les
terres abandonnées pendant la guerre vont être
livrées aux fellahs, qui assureront in extremis
les labours ; les fellahs seront contrôlés par des
commissions nommées par les préfets ; mais les
fellahs forment leurs propres comités. Et le 22
octobre, une ordonnance reconnaît les comités
de gestion pour l'agriculture ; le 23 novembre
les comités des entreprises industrielles, d'ail-
leurs moins nombreux, sont reconnus à leur tour.
la république algérienne, prononce un discours
où il annonce la « campagne des labours » : les
terres abandonnées pendant la guerre vont être
livrées aux fellahs, qui assureront in extremis
les labours ; les fellahs seront contrôlés par des
commissions nommées par les préfets ; mais les
fellahs forment leurs propres comités. Et le 22
octobre, une ordonnance reconnaît les comités
de gestion pour l'agriculture ; le 23 novembre
les comités des entreprises industrielles, d'ail-
leurs moins nombreux, sont reconnus à leur tour.
L'U.G.T.A. (Union générale des travailleurs Al-
gériens) se développe, et ses nettes prises de po-
sition en faveur du « secteur socialiste » et de
l'autogestion amènent le gouvernement à choisir
l'autogestion, semble-t-il, comme un moindre
mal. L'Etat algérien, alors en pleine pagaille,
était bien incapable d'assurer la gestion des biens
vacants. C'est ce vide, ce désordre politique qui
gériens) se développe, et ses nettes prises de po-
sition en faveur du « secteur socialiste » et de
l'autogestion amènent le gouvernement à choisir
l'autogestion, semble-t-il, comme un moindre
mal. L'Etat algérien, alors en pleine pagaille,
était bien incapable d'assurer la gestion des biens
vacants. C'est ce vide, ce désordre politique qui
a justement permis à « l'action spontanée des
masses laborieuses » de se développer sans trop
d'obstacles.
masses laborieuses » de se développer sans trop
d'obstacles.
Et le gouvernement, mis devant le fait accom-
pli, entérine, puis réglemente ; c'est l'objet des
décrets des 22 et 28 mars 1963 qui donnent un
cadre et des tuteurs à l'autogestion. Avec la con-
sécration officielle vient le contrôle de l'Etat.
pli, entérine, puis réglemente ; c'est l'objet des
décrets des 22 et 28 mars 1963 qui donnent un
cadre et des tuteurs à l'autogestion. Avec la con-
sécration officielle vient le contrôle de l'Etat.
Ces décrets ne cannent pas du tout une image
totale du fonctionnement (même théorique) de
l'autogestion. Ils nu s'intéressent qu'à l'entreprise
autogérée ; l'autog =stion est pourtant plus qu'une
simple collection d'entreprise autogérées. Toute-
fois, rien dans ces décrets sur les liens pouvant
exister entre entreprises, du point de vue de la
planification générale, ou du point de vue du fi-
nancement ; comrre si, lorsqu'on expliquait l'au-
togestion au travailleur algérien, on la rédui-
sait à sa participation à l'entreprise.
totale du fonctionnement (même théorique) de
l'autogestion. Ils nu s'intéressent qu'à l'entreprise
autogérée ; l'autog =stion est pourtant plus qu'une
simple collection d'entreprise autogérées. Toute-
fois, rien dans ces décrets sur les liens pouvant
exister entre entreprises, du point de vue de la
planification générale, ou du point de vue du fi-
nancement ; comrre si, lorsqu'on expliquait l'au-
togestion au travailleur algérien, on la rédui-
sait à sa participation à l'entreprise.
L'entreprise autDgérée algérienne comprend
plusieurs rouages, par lesquels doit s'exprimer
la volonté des trc veilleurs de l'entreprise. Qui
contrôle ces rouages, d'après la structure qu'on
lui a donnée ? et quelle est la compétence du
rouage en question, quels pouvoirs lui accorde-t-
on ? Partons de la oase (c'est bien le moins qu'on
lui doit).
plusieurs rouages, par lesquels doit s'exprimer
la volonté des trc veilleurs de l'entreprise. Qui
contrôle ces rouages, d'après la structure qu'on
lui a donnée ? et quelle est la compétence du
rouage en question, quels pouvoirs lui accorde-t-
on ? Partons de la oase (c'est bien le moins qu'on
lui doit).
L'Assemblée générale des travailleurs : Le
principe est celui d'un contrôle direct et total
des travailleurs, a un détail près : seuls les
travailleurs permanents de l'entreprise ont voix
au chapitre, il est donc important de savoir qui
esi travailleur permanent (en dehors même du
caractère discutab.e de cette règle). Cette ques-
tion n'est malheureusement pas de la compé-
tence de l'Assemblée, et c'est plus loin que nous
verrons qui décida de la qualité de « travail-
leur permanent ». La compétence de l'Assem-
blée est en princ.pe grande, mais se ramène
techniquement à peu de choses : approuver les
comptes, le règlement intérieur, le plan de pro-
duction de l'entreprise. En fait, les travailleurs
sont invités à passer la main à l'organisme su-
périeur et à dire oui de temps à autre.
principe est celui d'un contrôle direct et total
des travailleurs, a un détail près : seuls les
travailleurs permanents de l'entreprise ont voix
au chapitre, il est donc important de savoir qui
esi travailleur permanent (en dehors même du
caractère discutab.e de cette règle). Cette ques-
tion n'est malheureusement pas de la compé-
tence de l'Assemblée, et c'est plus loin que nous
verrons qui décida de la qualité de « travail-
leur permanent ». La compétence de l'Assem-
blée est en princ.pe grande, mais se ramène
techniquement à peu de choses : approuver les
comptes, le règlement intérieur, le plan de pro-
duction de l'entreprise. En fait, les travailleurs
sont invités à passer la main à l'organisme su-
périeur et à dire oui de temps à autre.
Le Conseil des travailleurs : n'existe pas dans
les petites entreprise ; de. 10 à 100 personnes,
il se réunit tous las mois.
les petites entreprise ; de. 10 à 100 personnes,
il se réunit tous las mois.
Le comité de gestion : 3 à 11 membres élus
par le Conseil. Eux aussi élus pour trois ans,
avec renouvellent ;n t par tiers tous les ans ;
conséquences praliques : l'Assemblée générale
désirant changer 1s personnel de ce Comité de-
vra d'abord mettrî de.ux ans pour changer la
majorité du Conssil ; cela fait, les nouveaux
élus au Conseil mettront deux ans pour chan-
ger la majorité du Comité, trois ans pour en
changer la totalité ; en tout, quatre à cinq ans
avant que le centrale de la base s'exerce.
par le Conseil. Eux aussi élus pour trois ans,
avec renouvellent ;n t par tiers tous les ans ;
conséquences praliques : l'Assemblée générale
désirant changer 1s personnel de ce Comité de-
vra d'abord mettrî de.ux ans pour changer la
majorité du Conssil ; cela fait, les nouveaux
élus au Conseil mettront deux ans pour chan-
ger la majorité du Comité, trois ans pour en
changer la totalité ; en tout, quatre à cinq ans
avant que le centrale de la base s'exerce.
Le rôle du Comité est plus important que
celui du Conseil : c'est lui qui élabore le plan
de production et lo règlement d'organisation du
travail, qui prend toutes les décisions relatives
à l'équipement de l'entreprise et à la commer-
cialisation de la production. Décisions limitées:
le Plan de l'entreprise respecte le Plan géné-
ral de Production (ce. qui en un sens se com-
prend) et la commercialisation est soumise aux
décisions du circuit d'achat ; l'équipement est
celui du Conseil : c'est lui qui élabore le plan
de production et lo règlement d'organisation du
travail, qui prend toutes les décisions relatives
à l'équipement de l'entreprise et à la commer-
cialisation de la production. Décisions limitées:
le Plan de l'entreprise respecte le Plan géné-
ral de Production (ce. qui en un sens se com-
prend) et la commercialisation est soumise aux
décisions du circuit d'achat ; l'équipement est
29
soumis concrètement au bon vouloir des cir-
cuits financiers, et nous le verrons, tout cela
échappe au contrôle des travailleurs.
cuits financiers, et nous le verrons, tout cela
échappe au contrôle des travailleurs.
Enfin, les deux sommets de l'entreprise auto-
gérée, le Président et le Directeur. Le Président,
élu tous les ans par le Comité de Gestion, re-
présente ce comité : ainsi c'est lui qui contre-
signe tous les procès-verbaux des réunions de
l'Assemblée, du Conseil et du Comité de Ges-
tion, c'est lui qui représente, l'entreprise auprès
des tiers, ou en justice. Tout ce travail pourrait
être fait « collégialement », nous dirions par un
collectif, ou même directement par le Comité de
gestion dont le nombre de membres n'est pas
considérable.
gérée, le Président et le Directeur. Le Président,
élu tous les ans par le Comité de Gestion, re-
présente ce comité : ainsi c'est lui qui contre-
signe tous les procès-verbaux des réunions de
l'Assemblée, du Conseil et du Comité de Ges-
tion, c'est lui qui représente, l'entreprise auprès
des tiers, ou en justice. Tout ce travail pourrait
être fait « collégialement », nous dirions par un
collectif, ou même directement par le Comité de
gestion dont le nombre de membres n'est pas
considérable.
Le Directeur « représente l'Etat au sein de
l'entreprise » (il est nommé et révoqué par
l'O.N.R.A., office national de la réforme agraire,
donc sous contrôle total et permanent du gou-
vernement). Aussi, on n'a pas lésiné sur ses
pouvoirs : c'est d'abord « Je Pouvoir exécutif »,
« il assure sous l'autorité du Président la
marche de l'entreprise » en appliquant les dé-
cisions prises par le Comité ou le Conseil. Mais
il n'est pas que cela ; il est aussi secrétaire des
frais organes des travailleurs (Assemblée gé-
nérale. Conseil des travailleurs. Comité de Ges-
tion !), et donne leur forme écrite et définitive
aux décisions prises, qu'il est par ailleurs
chargé d'exécuter. Lui les rédige, le Président
les signe. Il est aussi membre de droit du plus
important de ces organes, le Comité de Ges-
tion, où il décide si les décisions prises sont
conformes aux lois, aux règlements, etc. Notam-
ment c'est lui qui décide que le Plan est ou n'est
pas conforme au Plan National. Ce n'est pas
tout : en matière financière, ce n'est pas le
Président qui représente l'entreprise, mais lui;
il signe, il détient les espèces, il établit la
comptabilité. Sous réserve de plaintes éven-
tuelles de travailleurs (mais non de leur con-
trôle, puisqu'il ne dépend que du gouverne-
ment), toute la gestion financière technique
est entre ses mains. Enfin, les articles 5 et 14
lui confient la délivrance des cartes de mem-
bres permanents, donc le pouvoir de contrô-
ler en partie l'Assemblée. Et lorsque le Direc-
recteur estime que des travailleurs ne sont pas,
selon ses critères, des travailleurs permanents
(exemple : des travailleurs non munis de car-
tes par ses soins), « il oppose son veto », for-
mule large qui peut signifier qu'une réunion
sera interrompue, ou qu'une décision prise sera
annulée au moins dans l'immédiat. Inversement,
« en cas de carence du Conseil, le Directeur peut
se substituer à lui ».
l'entreprise » (il est nommé et révoqué par
l'O.N.R.A., office national de la réforme agraire,
donc sous contrôle total et permanent du gou-
vernement). Aussi, on n'a pas lésiné sur ses
pouvoirs : c'est d'abord « Je Pouvoir exécutif »,
« il assure sous l'autorité du Président la
marche de l'entreprise » en appliquant les dé-
cisions prises par le Comité ou le Conseil. Mais
il n'est pas que cela ; il est aussi secrétaire des
frais organes des travailleurs (Assemblée gé-
nérale. Conseil des travailleurs. Comité de Ges-
tion !), et donne leur forme écrite et définitive
aux décisions prises, qu'il est par ailleurs
chargé d'exécuter. Lui les rédige, le Président
les signe. Il est aussi membre de droit du plus
important de ces organes, le Comité de Ges-
tion, où il décide si les décisions prises sont
conformes aux lois, aux règlements, etc. Notam-
ment c'est lui qui décide que le Plan est ou n'est
pas conforme au Plan National. Ce n'est pas
tout : en matière financière, ce n'est pas le
Président qui représente l'entreprise, mais lui;
il signe, il détient les espèces, il établit la
comptabilité. Sous réserve de plaintes éven-
tuelles de travailleurs (mais non de leur con-
trôle, puisqu'il ne dépend que du gouverne-
ment), toute la gestion financière technique
est entre ses mains. Enfin, les articles 5 et 14
lui confient la délivrance des cartes de mem-
bres permanents, donc le pouvoir de contrô-
ler en partie l'Assemblée. Et lorsque le Direc-
recteur estime que des travailleurs ne sont pas,
selon ses critères, des travailleurs permanents
(exemple : des travailleurs non munis de car-
tes par ses soins), « il oppose son veto », for-
mule large qui peut signifier qu'une réunion
sera interrompue, ou qu'une décision prise sera
annulée au moins dans l'immédiat. Inversement,
« en cas de carence du Conseil, le Directeur peut
se substituer à lui ».
On peut dire, du point de vue du contrôle, que
l'organisation de l'entreprise autogérée est à
l'image d'une pyramide assez pointue, et com-
me aurait dit Lapalisse, plus elle est pointue,
plus le sommet est éloigné de la base. De toutes
façons, le Directeur, que les statuts essaient vai-
nement de présenter comme un simple agent
technique d'exécution, et qui a en droit de larges
pouvoirs de décisions et en fait la possibilité de
les accaparer presque tous, tout en partageant
le sommet avec le Président, n'est même pas
élu indirectement par les travailleurs comme lui.
l'organisation de l'entreprise autogérée est à
l'image d'une pyramide assez pointue, et com-
me aurait dit Lapalisse, plus elle est pointue,
plus le sommet est éloigné de la base. De toutes
façons, le Directeur, que les statuts essaient vai-
nement de présenter comme un simple agent
technique d'exécution, et qui a en droit de larges
pouvoirs de décisions et en fait la possibilité de
les accaparer presque tous, tout en partageant
le sommet avec le Président, n'est même pas
élu indirectement par les travailleurs comme lui.
-a point ae vue de la capacité des organismes,
plus on s'élève dans les rouages, plus les pou-
voirs s'élargissent. Mais, même si cela est déjà
gênant, ce n'ost pas le plus grave : Une autoges-
tion limitée à l'entreprise, à moins qu'il s'agisse
du départ d'un mouvement des travailleurs eux-
mêmes, lisqu ï de devenir une parodie de l'auto-
gestion. Or, :out ce qui dépasse un peu le ni-
veau de l'ent: reprise échappe totalement aux tra-
vailleurs : sur le plan de la coordination de la
production glabaîe, et sur celui de la coordina-
tion financiers, du soutien financier.
plus on s'élève dans les rouages, plus les pou-
voirs s'élargissent. Mais, même si cela est déjà
gênant, ce n'ost pas le plus grave : Une autoges-
tion limitée à l'entreprise, à moins qu'il s'agisse
du départ d'un mouvement des travailleurs eux-
mêmes, lisqu ï de devenir une parodie de l'auto-
gestion. Or, :out ce qui dépasse un peu le ni-
veau de l'ent: reprise échappe totalement aux tra-
vailleurs : sur le plan de la coordination de la
production glabaîe, et sur celui de la coordina-
tion financiers, du soutien financier.
Là où le lisn de coordination est le plus im-
périeux, c'est au niveau de l'établissement d'une
planification générale et du découpage du plan
par secteur e par entreprise. Mais qu'entend-on
par planificat: on ? Autrement dit, qui va se char-
ger de cette planification ? Les travailleurs, par
l'intermédiaire de fédérations régionales ou tech-
niques ? Non, en Algérie la réponse est autre :
« Nous voulons organiser les rapports inter-indus-
triels dans u:i contexte national. Cette institu-
tion prendra des formes d'organisation diffé-
rentes, le principe étant que le rôle de l'Etat
doit y être prépondérant » (exposé de Bou-
maza, 11-12-63).
périeux, c'est au niveau de l'établissement d'une
planification générale et du découpage du plan
par secteur e par entreprise. Mais qu'entend-on
par planificat: on ? Autrement dit, qui va se char-
ger de cette planification ? Les travailleurs, par
l'intermédiaire de fédérations régionales ou tech-
niques ? Non, en Algérie la réponse est autre :
« Nous voulons organiser les rapports inter-indus-
triels dans u:i contexte national. Cette institu-
tion prendra des formes d'organisation diffé-
rentes, le principe étant que le rôle de l'Etat
doit y être prépondérant » (exposé de Bou-
maza, 11-12-63).
Le gouvernement se charge de la coordina-
tion, qu'il délègue à une série d'organismes
variés, et môme hétéroclites. Ces organismes
sont tous contrôlés par lui et peuplés d'adver-
saires convaû icus de l'autogestion. Aussi, étu-
dier la coordination sur le plan national des
entreprises ai.togérées revient bien souvent à
étudier le plein de sabotage de l'autogestion.
Ce sabotage est évident dès le départ, à la
fois en ce qti concerne la coordination géné-
rale, c'est-à-dire le plan, et aussi la commer-
cialisation et le financement.
tion, qu'il délègue à une série d'organismes
variés, et môme hétéroclites. Ces organismes
sont tous contrôlés par lui et peuplés d'adver-
saires convaû icus de l'autogestion. Aussi, étu-
dier la coordination sur le plan national des
entreprises ai.togérées revient bien souvent à
étudier le plein de sabotage de l'autogestion.
Ce sabotage est évident dès le départ, à la
fois en ce qti concerne la coordination géné-
rale, c'est-à-dire le plan, et aussi la commer-
cialisation et le financement.
Le Conseil Communal d'Animation de l'Au-
togestion réunit « les présidents des Comités
de Gestion, .es autorités administratives de
la commune et les représentants de l'O.N.R.A.
(office nationcil de la réforme agraire) » et
doit « animer, coordonner et contrôler les
directeurs » : la composition du Conseil met
en lumière l'importance des représentants de
l'Etat, sans aucune participation directe des
travailleurs d= la commune, puisque leurs
seuls représen :an{s, les présidents, peuvent ne
pas être contrôlés par eux (voir plus haut le
mode d'élection). Sur le simple plan local les
travailleurs sont déjà hors-circuit. De toutes fa-
çons, ces conseils n'ont pas existé :
togestion réunit « les présidents des Comités
de Gestion, .es autorités administratives de
la commune et les représentants de l'O.N.R.A.
(office nationcil de la réforme agraire) » et
doit « animer, coordonner et contrôler les
directeurs » : la composition du Conseil met
en lumière l'importance des représentants de
l'Etat, sans aucune participation directe des
travailleurs d= la commune, puisque leurs
seuls représen :an{s, les présidents, peuvent ne
pas être contrôlés par eux (voir plus haut le
mode d'élection). Sur le simple plan local les
travailleurs sont déjà hors-circuit. De toutes fa-
çons, ces conseils n'ont pas existé :
Cette coordination à l'échelon local est coif-
fée par une coordination à l'échelon national,
sous la tutelle des ministères. Dans l'agriculture,
principal secteur de l'économie algérienne, l'or-
ganisme tout-puissant est FO.N.R.A. C'est une
filiale du ministère de l'Agriculture, créée en
1963 pour coordonner l'autogestion agricole. En
fait, cet office tient dans ses mains la vie des
entreprises, puisqu'il dispose des C.C.R.A. (cen-
tres coopératifs de la réforme agraire) qui four-
nissent crédits, matériels, engrais, semences. Ce
sont tout simp.ement d'anciens organismes de
l'ère coloniale, les S.A.P. (sociétés agricoles de
prévoyance) rei Baptisées au goût du jour.
fée par une coordination à l'échelon national,
sous la tutelle des ministères. Dans l'agriculture,
principal secteur de l'économie algérienne, l'or-
ganisme tout-puissant est FO.N.R.A. C'est une
filiale du ministère de l'Agriculture, créée en
1963 pour coordonner l'autogestion agricole. En
fait, cet office tient dans ses mains la vie des
entreprises, puisqu'il dispose des C.C.R.A. (cen-
tres coopératifs de la réforme agraire) qui four-
nissent crédits, matériels, engrais, semences. Ce
sont tout simp.ement d'anciens organismes de
l'ère coloniale, les S.A.P. (sociétés agricoles de
prévoyance) rei Baptisées au goût du jour.
Plus intéressantes sont les Unions nationales
30
d'entreprises ; en voici un exemple : L'U.R.I.B.A.
(union régionale des industries du bois de l'Algé-
rois) se présente sous la forme d'une associa-
tion d'entreprises, à trois niveaux : l'usine, cellule
productive de base, le Complexe qui rassemble
plusieurs usines dans une branche de production
(comme le Complexe du mobilier, celui des em-
ballages, etc.), enfin l'Union, qui est l'organe su-
prême de gestion, met à la disposition des com-
plexes divers services, techniques, commerciaux,
approvisionnement, bureaux d'étude, recherches
de marchés, etc., juridiques et financiers, qu'une
seule entreprise ne pourrait pas se payer. Ces
unions se heurtent à des difficultés dues à l'ab-
sence de textes précis et plus complets, à l'atti-
tude de l'organisme de tutelle (ministère de l'In-
dustrie) et au manque de liquidités (d'après le
Bulletin de l'autogestion, n° 3).
(union régionale des industries du bois de l'Algé-
rois) se présente sous la forme d'une associa-
tion d'entreprises, à trois niveaux : l'usine, cellule
productive de base, le Complexe qui rassemble
plusieurs usines dans une branche de production
(comme le Complexe du mobilier, celui des em-
ballages, etc.), enfin l'Union, qui est l'organe su-
prême de gestion, met à la disposition des com-
plexes divers services, techniques, commerciaux,
approvisionnement, bureaux d'étude, recherches
de marchés, etc., juridiques et financiers, qu'une
seule entreprise ne pourrait pas se payer. Ces
unions se heurtent à des difficultés dues à l'ab-
sence de textes précis et plus complets, à l'atti-
tude de l'organisme de tutelle (ministère de l'In-
dustrie) et au manque de liquidités (d'après le
Bulletin de l'autogestion, n° 3).
La « coordination » des entreprises est donc
plus une communauté de dépendance envers
l'Etat qu'un résultat de débais et de contacts
à l'échelle régionale. Quant à la participation
des travailleurs à cette coordination, e.lle n'est
même pas évoquée par les textes. Si les travail-
leurs ne participent pas à cette coordination
gestionnaire, peuvent-ils participer par le biais
des entreprises à la coordination productive ?
L'Etat a-t-il quelque chose à proposer, au moins
les grandes lignes de la production souhaitable
à l'échelle nationale ?
plus une communauté de dépendance envers
l'Etat qu'un résultat de débais et de contacts
à l'échelle régionale. Quant à la participation
des travailleurs à cette coordination, e.lle n'est
même pas évoquée par les textes. Si les travail-
leurs ne participent pas à cette coordination
gestionnaire, peuvent-ils participer par le biais
des entreprises à la coordination productive ?
L'Etat a-t-il quelque chose à proposer, au moins
les grandes lignes de la production souhaitable
à l'échelle nationale ?
En manière de planification le néant est com-
plet : dans son exposé sur la politique écono-
mique du gouvernement, Boumaza ne présente
aucun plan, n'en parle même pas, ne fait que
tenter d'équilibrer un budget ne prévoyant que
des dépenses d'équipement fondées sur des pro-
grammes anciens dont le Plan de Constantine de
De Gaulle ; il ne manque pourtant pas de se
féliciter de « la socialisation croissante de
l'économie algérienne ». On comprend après
cela que les travailleurs n'aient pas à discuter
de la coordination de la production puisqu'il
n'y en a pas. Maïs alors le veto du Directeur
de l'entreprise autogérée qui devait en principe
sauvegarder la ligne générale de l'économie
dans l'entreprise, ou bien ne sert à rien, ou
n'est qu'un moyen de dirigisme. Enfin l'écono-
mie algérienne reste une économie de marché,
et ce fait est une. source de difficultés considé-
rables pour l'autogestion, puisqu'il conditionne
et sa commercialisation et son financement.
plet : dans son exposé sur la politique écono-
mique du gouvernement, Boumaza ne présente
aucun plan, n'en parle même pas, ne fait que
tenter d'équilibrer un budget ne prévoyant que
des dépenses d'équipement fondées sur des pro-
grammes anciens dont le Plan de Constantine de
De Gaulle ; il ne manque pourtant pas de se
féliciter de « la socialisation croissante de
l'économie algérienne ». On comprend après
cela que les travailleurs n'aient pas à discuter
de la coordination de la production puisqu'il
n'y en a pas. Maïs alors le veto du Directeur
de l'entreprise autogérée qui devait en principe
sauvegarder la ligne générale de l'économie
dans l'entreprise, ou bien ne sert à rien, ou
n'est qu'un moyen de dirigisme. Enfin l'écono-
mie algérienne reste une économie de marché,
et ce fait est une. source de difficultés considé-
rables pour l'autogestion, puisqu'il conditionne
et sa commercialisation et son financement.
Lor commercialisation échappe aux travail-
leurs. On peut distinguer la commercialisation
à l'intérieur du pays et à l'extérieur : à l'inté-
rieur elle dépend des C.O.R.A. (coopératives
de la réforme agraire), émanations du ministère.
Pour l'extérieur, elle dépend de l'O.N.A.C.O. (of-
fice national de commercialisation) qui a le mo-
nopole de l'importation pour l'agriculture.
leurs. On peut distinguer la commercialisation
à l'intérieur du pays et à l'extérieur : à l'inté-
rieur elle dépend des C.O.R.A. (coopératives
de la réforme agraire), émanations du ministère.
Pour l'extérieur, elle dépend de l'O.N.A.C.O. (of-
fice national de commercialisation) qui a le mo-
nopole de l'importation pour l'agriculture.
Les pris du marché et la concurrence du sec-
teur privé obligent les Comités de Gestion à se
conduire en capitalistes dans leurs transactions
courantes. Les entreprises autogérées ne bénéfi-
cient d'aucun privilège dans les marchés de
l'Etat, ce qui est pour le moins étonnant dans un
pays socialiste. Les Comités de Gestion sont
écartés de la commercialisation, et il n'y a pas
d'organisme à l'échelon régional qui la contrôle.
teur privé obligent les Comités de Gestion à se
conduire en capitalistes dans leurs transactions
courantes. Les entreprises autogérées ne bénéfi-
cient d'aucun privilège dans les marchés de
l'Etat, ce qui est pour le moins étonnant dans un
pays socialiste. Les Comités de Gestion sont
écartés de la commercialisation, et il n'y a pas
d'organisme à l'échelon régional qui la contrôle.
Le résultat es; qus ies Comités ne peuvent faire
aucune prévision sur les revenus de l'entreprise:
« Nous, paysans et ouvriers de. l'autogestion,
sommes convaincus que nous ne pourrons nous
en sortir et aller de l'avant que si les C.O.R.A.
et l'O.N.A.C.O. sont entre nos mains, comme
l'est déjà la production... Nous ne pouvons ré-
soudre le problème que si chaque C.O.R.A. est
entre les mains sxclusives des travailleurs, et
est contrôlée en permanence par les Conseils
communaux » (B'illetin de. l'Autogestion, n° 2).
aucune prévision sur les revenus de l'entreprise:
« Nous, paysans et ouvriers de. l'autogestion,
sommes convaincus que nous ne pourrons nous
en sortir et aller de l'avant que si les C.O.R.A.
et l'O.N.A.C.O. sont entre nos mains, comme
l'est déjà la production... Nous ne pouvons ré-
soudre le problème que si chaque C.O.R.A. est
entre les mains sxclusives des travailleurs, et
est contrôlée en permanence par les Conseils
communaux » (B'illetin de. l'Autogestion, n° 2).
Comme les entreprises privées, et pour les
mêmes raisons, Jes entreprises autogérées ont
besoin d'un finar cément extérieur ; non seule-
ment dans les eus où elles se créent (il iaut
constituer un stock, acheter un terrain, des bâ-
timents, des machines), mais aussi, quand elles
ont redémarré, il a fallu reconstituer le stock,
réparer les machines, etc. Elles ont aussi besoin
d'argent quand islles se développent : avant
que les investissements rapportent, il faut em-
prunter, soit emprunter le travail supplémen-
taire nécessaire, î.i l'argent a été supprimé, soit
acheter ce travai! avec l'argent emprunté. Il y
a enfin le cas eu une entreprise momentané-
ment gênée dans sa trésorerie peut avoir besoin
d'un prêt à court terme pour se « dépanner ».
Ce rôle de prêteui aux entreprises peut être rem-
pli par des caisses fédérales directement contrô-
lées par les entreprises autogérées. Ou bien, en
système semi-capitaliste, par des banques ; c'est
cette dernière soh.tion qui a été choisie en Algé-
rie (Décrets de ju.n 1964).
mêmes raisons, Jes entreprises autogérées ont
besoin d'un finar cément extérieur ; non seule-
ment dans les eus où elles se créent (il iaut
constituer un stock, acheter un terrain, des bâ-
timents, des machines), mais aussi, quand elles
ont redémarré, il a fallu reconstituer le stock,
réparer les machines, etc. Elles ont aussi besoin
d'argent quand islles se développent : avant
que les investissements rapportent, il faut em-
prunter, soit emprunter le travail supplémen-
taire nécessaire, î.i l'argent a été supprimé, soit
acheter ce travai! avec l'argent emprunté. Il y
a enfin le cas eu une entreprise momentané-
ment gênée dans sa trésorerie peut avoir besoin
d'un prêt à court terme pour se « dépanner ».
Ce rôle de prêteui aux entreprises peut être rem-
pli par des caisses fédérales directement contrô-
lées par les entreprises autogérées. Ou bien, en
système semi-capitaliste, par des banques ; c'est
cette dernière soh.tion qui a été choisie en Algé-
rie (Décrets de ju.n 1964).
Nous avons parlé de système semi-capitaliste
(entreprises autogérées + banques). Si on con-
sidère les banque;! d'Etat comme des institutions
socialistes quand l'Etat est socialiste, notre ex-
pression était fausse. Mais l'Etat, quelle que soit
sont étiquette, es; l'expression collective de la
classe dirigeante ; une banque d'Etat est une
banque capitaliste qui, à la différence des ban-
ques privées, est contrôlée par les capitalistes
en tant que collectivité, au lieu d'être laissée à
quelques-uns d'entre eux ; peu importe que le
capital soit entre leurs mains parce qu'ils sont
propriétaires, ou parce qu'ils sont l'Etat.
(entreprises autogérées + banques). Si on con-
sidère les banque;! d'Etat comme des institutions
socialistes quand l'Etat est socialiste, notre ex-
pression était fausse. Mais l'Etat, quelle que soit
sont étiquette, es; l'expression collective de la
classe dirigeante ; une banque d'Etat est une
banque capitaliste qui, à la différence des ban-
ques privées, est contrôlée par les capitalistes
en tant que collectivité, au lieu d'être laissée à
quelques-uns d'entre eux ; peu importe que le
capital soit entre leurs mains parce qu'ils sont
propriétaires, ou parce qu'ils sont l'Etat.
Quoi qu'il en soit, le système algérien avait
une qualité : il i.'y avait pas besoin de créer
quelque chose car ces banques existaient déjà,
alors que si les 'Sntreprises autogérées avaient
eu leur propres ccisses, il aurait fallu trouver un
personnel qualifié des comptables, ce qui n'est
pas facile. Mais il avait à nos yeux un grand dé-
faut, il n'était pas; socialiste, loin de là, il met-
tait les caisses et le mécanisme financier du sec-
teur autogéré dans les mains de ses ennemis
nés.
une qualité : il i.'y avait pas besoin de créer
quelque chose car ces banques existaient déjà,
alors que si les 'Sntreprises autogérées avaient
eu leur propres ccisses, il aurait fallu trouver un
personnel qualifié des comptables, ce qui n'est
pas facile. Mais il avait à nos yeux un grand dé-
faut, il n'était pas; socialiste, loin de là, il met-
tait les caisses et le mécanisme financier du sec-
teur autogéré dans les mains de ses ennemis
nés.
Une banque de l'autogestion avait d'ailleurs
déjà été demandée par le premier congrès du
secteur industriel autogéré en mars 1964 ; elle
pourrait correspondre à un désir des travailleurs
d'avoir « leur banque ». Et on imagine bien que
cette banque n'ait de banque que le nom et le
rôle technique, mais qu'elle soit une espèce, de
caisse fédérale, passant par telle ou telle moda-
lité, sous le contrôle effectif des travailleurs de
l'autogestion.
déjà été demandée par le premier congrès du
secteur industriel autogéré en mars 1964 ; elle
pourrait correspondre à un désir des travailleurs
d'avoir « leur banque ». Et on imagine bien que
cette banque n'ait de banque que le nom et le
rôle technique, mais qu'elle soit une espèce, de
caisse fédérale, passant par telle ou telle moda-
lité, sous le contrôle effectif des travailleurs de
l'autogestion.
En réalité, il n'a été nulle part question d'un
31
statut de ce genre, et le problème, pourtant capi-
tal, du contrôle de la banque n'a même pas été
posé.
tal, du contrôle de la banque n'a même pas été
posé.
L'autogestion en Algérie (ef sans doute dans
tous les pays sous-développés) ne. posait pas
seulement le problème de la révolution, mais en
même temps celui du décollage économique* Le
marasme du tiers-monde est lié à son pillage éco-
nomique, par les classes dirigeantes locales, au-
trement dit le néo-colonialisme. Actuellement
en Algérie, c'est la K France » relayée par
F « Amérique ». Le gouvernement américain
distribue de temps en temps du blé aux affa-
més. Et en échange, il contrôle les secteurs in-
téressants de l'économie algérienne, ainsi la
Sonatrach, créée en 1964, qui a la haute main
sur les questions pétrolières (le gouvernement
russe envoie des avions Mig à Boumedienne,
en échange il bénéficie d'influence politique,
et dans l'armée). Effectivement, les fellahs sub-
sistèrent surtout grâce au blé américain : au
mois de mai 1967 on apprenait que les U.S.A.
fournissaient deux millions de quintaux de blé
à Boumedienne.
tous les pays sous-développés) ne. posait pas
seulement le problème de la révolution, mais en
même temps celui du décollage économique* Le
marasme du tiers-monde est lié à son pillage éco-
nomique, par les classes dirigeantes locales, au-
trement dit le néo-colonialisme. Actuellement
en Algérie, c'est la K France » relayée par
F « Amérique ». Le gouvernement américain
distribue de temps en temps du blé aux affa-
més. Et en échange, il contrôle les secteurs in-
téressants de l'économie algérienne, ainsi la
Sonatrach, créée en 1964, qui a la haute main
sur les questions pétrolières (le gouvernement
russe envoie des avions Mig à Boumedienne,
en échange il bénéficie d'influence politique,
et dans l'armée). Effectivement, les fellahs sub-
sistèrent surtout grâce au blé américain : au
mois de mai 1967 on apprenait que les U.S.A.
fournissaient deux millions de quintaux de blé
à Boumedienne.
Contrairement à ce que répètent les bourgeois
bien informés, le Tiers-Monde est riche, même si
les gins y meurent de faim. Le problème est
le mode d'exploitation de ses matières pre-
mières, par l'édification d'une industrie. Mais
pour investir dans une industrie il faut accu-
muler un capital, la grande question des pays
sous-développés est : comment se fera l'accu-
mulation du capital ? Par l'appel à la « cha-
rité » des grandes nations, par la trique ou par
l'élan collectif ? Peut-on dégager d'une écono-
mie agraire, un capital suffisant ?
bien informés, le Tiers-Monde est riche, même si
les gins y meurent de faim. Le problème est
le mode d'exploitation de ses matières pre-
mières, par l'édification d'une industrie. Mais
pour investir dans une industrie il faut accu-
muler un capital, la grande question des pays
sous-développés est : comment se fera l'accu-
mulation du capital ? Par l'appel à la « cha-
rité » des grandes nations, par la trique ou par
l'élan collectif ? Peut-on dégager d'une écono-
mie agraire, un capital suffisant ?
En fait, il n'y a pas trois possibilités, il n'y en
a que deux, car les classes dirigeantes des pays
du Tiers Monde étant trop faibles pour tenir la
situation en main, font appel aux grandes na-
tions. La charité va avec la trique, et Boume-
dienne et sa classe ne sont que les courtiers de
Johnson (ou à un moindre degré de Brejnev) exi-
geant une part du gâteau — et ils appliquent
aux travailleurs la loi d'airain — le minimum
pour que marchent les seuls secteurs qui les in-
téressent ; pour le reste, la faim.
a que deux, car les classes dirigeantes des pays
du Tiers Monde étant trop faibles pour tenir la
situation en main, font appel aux grandes na-
tions. La charité va avec la trique, et Boume-
dienne et sa classe ne sont que les courtiers de
Johnson (ou à un moindre degré de Brejnev) exi-
geant une part du gâteau — et ils appliquent
aux travailleurs la loi d'airain — le minimum
pour que marchent les seuls secteurs qui les in-
téressent ; pour le reste, la faim.
Le seul moyen pour en sortir aurait été que les
travailleurs accumulent eux-mêmes le capital. Un
projet de réorganisation de la Kabylie le cons-
tatait : « ...un taux optimum d'accumulation de
capital) qui doit être le but recherché, ne peut
résulter de la contrainte subie par les travail-
leurs. Celle-ci entraînerait une dépolitisation-.,
un esprit d'irresponsabilité sociale généralisée ».
travailleurs accumulent eux-mêmes le capital. Un
projet de réorganisation de la Kabylie le cons-
tatait : « ...un taux optimum d'accumulation de
capital) qui doit être le but recherché, ne peut
résulter de la contrainte subie par les travail-
leurs. Celle-ci entraînerait une dépolitisation-.,
un esprit d'irresponsabilité sociale généralisée ».
L'autogestion était économiquement la seule
issue. Pas le paradis socialiste pour demain, mais
les travailleurs autogérés qui doublaient la
production et la livraient intacte alors qu'ils
n'étaient pas payés depuis trois mois et qu'ils
travaillaient le ventre creux, montraient à quel
degré d'héroïsme quotidien peuvent en arriver
des gens qui espèrent enfin être libérés du sa-
lariat.
issue. Pas le paradis socialiste pour demain, mais
les travailleurs autogérés qui doublaient la
production et la livraient intacte alors qu'ils
n'étaient pas payés depuis trois mois et qu'ils
travaillaient le ventre creux, montraient à quel
degré d'héroïsme quotidien peuvent en arriver
des gens qui espèrent enfin être libérés du sa-
lariat.
En Algérie, le choix était donc ou l'autoges-
tion agricole ou le blé américain. Les travail-
leurs avaient choisi l'autogestion — le blé amé-
ricain, c'est Boumedienne, l'armée pléthorique,
tion agricole ou le blé américain. Les travail-
leurs avaient choisi l'autogestion — le blé amé-
ricain, c'est Boumedienne, l'armée pléthorique,
les nouveauj capitalistes. Mais les « réalistes »
bourgeois profèrent présenter l'autogestion com-
me une fantaisie idéologique sans intérêt et
sans influence sur le développement économi-
que. Dégagement d'une plus-value agraire
pour renforcar un secteur industriel autogéré
étendu dès 1s début au maximum, cette politi-
que était dore une nécessité. Or, dès le départ,
il en va différemment. D'abord l'autogestion
n'est qu'une partie du « Secteur socialiste » de
l'économie, qiï n'est lui-même qu'un des trois
secteurs économiques de l'Algérie.
bourgeois profèrent présenter l'autogestion com-
me une fantaisie idéologique sans intérêt et
sans influence sur le développement économi-
que. Dégagement d'une plus-value agraire
pour renforcar un secteur industriel autogéré
étendu dès 1s début au maximum, cette politi-
que était dore une nécessité. Or, dès le départ,
il en va différemment. D'abord l'autogestion
n'est qu'une partie du « Secteur socialiste » de
l'économie, qiï n'est lui-même qu'un des trois
secteurs économiques de l'Algérie.
A l'intérieur du secteur socialiste l'autoges-
tion coexiste, non pacifiquement, avec un sec-
teur nationalisé et certains offices e.n « ges-
tion directe » (gestion de l'Etat, bien sûr). Prise
dans l'économie entière, l'autogestion se heurte,
au sens propre, à un secteur mixte et à un
secteur privé. L'importance du secteur privé va
expliquer bien des déboires de l'autogestion,
surtout lorsqu'on sait qu'aucune priorité n'existe
pour elle.
tion coexiste, non pacifiquement, avec un sec-
teur nationalisé et certains offices e.n « ges-
tion directe » (gestion de l'Etat, bien sûr). Prise
dans l'économie entière, l'autogestion se heurte,
au sens propre, à un secteur mixte et à un
secteur privé. L'importance du secteur privé va
expliquer bien des déboires de l'autogestion,
surtout lorsqu'on sait qu'aucune priorité n'existe
pour elle.
L'économie mixte (Etat-privé) englobe la pres-
que totalité eu secteur moderne de l'industrie,
avec une grande proportion de capitaux privés
étrangers (exemple de société mixte : la CAMEL.
C'est une société mixte, avec des capitaux anglo-
français, qui liquéfie le méthane dans l'impor-
tant complexe d'Arzew pour l'exporter). Quant
au secteur privé, il comprend à la fois des en-
treprises industrielles et des propriétés foncières
individuelles.
que totalité eu secteur moderne de l'industrie,
avec une grande proportion de capitaux privés
étrangers (exemple de société mixte : la CAMEL.
C'est une société mixte, avec des capitaux anglo-
français, qui liquéfie le méthane dans l'impor-
tant complexe d'Arzew pour l'exporter). Quant
au secteur privé, il comprend à la fois des en-
treprises industrielles et des propriétés foncières
individuelles.
Dans l'industrie l'autogestion est nettement mi-
noritaire. Alors; que le secteur privé emploie 92 %
des travailleurs, l'autogestion emploie à peine
les 8 % restants soit 15.000 travailleurs. Sur
450 entreprises autogérées en 1964 il y avait
seulement 4 à 6 % d'entreprises importantes
plusieurs cen aines d'ouvriers), faisant partie
du secteur industriel de base : essentiellement
ACILOR (métallurgie), VAN (verrerie), et 3
autres. 30 % concernaient le bâtiment (trop dé-
veloppé par rapport aux besoins), 20 % s'occu-
paient de transformer les produits agricoles. Le
reste, soit 45 % était composé d'unités à faibles
production, voisines de simples ateliers.
noritaire. Alors; que le secteur privé emploie 92 %
des travailleurs, l'autogestion emploie à peine
les 8 % restants soit 15.000 travailleurs. Sur
450 entreprises autogérées en 1964 il y avait
seulement 4 à 6 % d'entreprises importantes
plusieurs cen aines d'ouvriers), faisant partie
du secteur industriel de base : essentiellement
ACILOR (métallurgie), VAN (verrerie), et 3
autres. 30 % concernaient le bâtiment (trop dé-
veloppé par rapport aux besoins), 20 % s'occu-
paient de transformer les produits agricoles. Le
reste, soit 45 % était composé d'unités à faibles
production, voisines de simples ateliers.
Car, ce qui frappe dans ces exemples d'auto-
gestion industrielle c'est qu'il s'agit presque
toujours de patites entreprises dans des sec-
teurs économie pies de peu d'importance : ali
mentation boulangeries, limonaderies, bouche-
ries, biscuiteries, quincaillerie mécanique, quel-
ques minoteries, petites entreprises, fournitures
de bâtiment, papeteries, tout cela tourne au-
tour de 100 à 200 personnes au plus. Les quel-
ques grandes entreprises qui font partie du
« secteur soiculiste » ne sont pas autogérées
mais gérées pur 1' « Etat algérien » c'est-à-dire
plus prosaïquement par les clans politiques
qui se partagent le pouvoir.
gestion industrielle c'est qu'il s'agit presque
toujours de patites entreprises dans des sec-
teurs économie pies de peu d'importance : ali
mentation boulangeries, limonaderies, bouche-
ries, biscuiteries, quincaillerie mécanique, quel-
ques minoteries, petites entreprises, fournitures
de bâtiment, papeteries, tout cela tourne au-
tour de 100 à 200 personnes au plus. Les quel-
ques grandes entreprises qui font partie du
« secteur soiculiste » ne sont pas autogérées
mais gérées pur 1' « Etat algérien » c'est-à-dire
plus prosaïquement par les clans politiques
qui se partagent le pouvoir.
Pourtant la combativité et la conscience sem-
blent être plus vives que dans le secteur agri-
cole. Il y a pout-être plus de véritables entre-
prises autogéré 33 dans le secteur industriel que
dans l'agricultr re et symétriquement le gouver-
nement n'a jariais insisté pour former des co-
mités de gestion dans l'industrie, au contraire.
blent être plus vives que dans le secteur agri-
cole. Il y a pout-être plus de véritables entre-
prises autogéré 33 dans le secteur industriel que
dans l'agricultr re et symétriquement le gouver-
nement n'a jariais insisté pour former des co-
mités de gestion dans l'industrie, au contraire.
Le développement tend à se faire à l'intérieuî
32
du secteur autogéré par une union d'entrepri-
ses de même nature, permettant une concentra-
tion et une rationalisation, et par la recherche
de débouchés économiques.
ses de même nature, permettant une concentra-
tion et une rationalisation, et par la recherche
de débouchés économiques.
A l'extérieur du secteur autogéré, on entrevoit
à la faveur d'articles de « Révolution et Tra-
vail » ou ailleurs, des tentatives pour obtenir
l'autogestion. Soit dans les entreprises privées,
soit dans certaines entreprises nationalisées et
particulièrement mal gérées.
à la faveur d'articles de « Révolution et Tra-
vail » ou ailleurs, des tentatives pour obtenir
l'autogestion. Soit dans les entreprises privées,
soit dans certaines entreprises nationalisées et
particulièrement mal gérées.
C'est seulement dans l'agriculture que le sec-
teur socialiste l'emporte, par la richesse des ter-
res et la technique d'exploitation plus que par la
superficie des terres cultivées. L'autogestion re-
présente 9/10 du vignoble, 1/4 des cultures ma-
raîchères et 5/6 des agrumes (chiffres cités par
Teillac).
teur socialiste l'emporte, par la richesse des ter-
res et la technique d'exploitation plus que par la
superficie des terres cultivées. L'autogestion re-
présente 9/10 du vignoble, 1/4 des cultures ma-
raîchères et 5/6 des agrumes (chiffres cités par
Teillac).
La majorité des bonnes terres de plaine appar-
tenait aux Européens et à quelques très riches Al-
gériens, et était exploitée pour la plus grande
partie de sa surface sur de grands domaine.s avec
des méthodes modernes. Les fellahs étaient re-
poussés sur les bords des montagnes, les pla-
teaux, les terres sablonneuses, bref toutes les
mauvaises terres à faible rendement. Ils les
exploitaient par petits lopins. « II y avait d'un
côté la forêt avec le garde champêtre et de l'au-
côté la terre du colon. Nous, on était sur le
roc » (réponse d'un fellah à l'enquête de Rév.
et Trav. : « Pourquoi la Révolution ?, 29 oct.
1965). La différence a été accentuée par les
modes d'exploitation modernes. Les grands do-
maines exigeaient peu de travailleurs, les bon-
nes terres étaient peu peuplées. Les mauvaises
étaient surpeuplées. Un domaine comme celui
du Keroulis, par exemple, de 2.300 hectares
n'employait que 43 ouvriers au mois, 400 ou-
vriers journaliers et 1.200 saisonniers seulement
pour la vendange. Et dans l'arrondissement
d'Aïn Temouchent, où se trouve Keroulis, on
comptait en 1963 8.000 travailleurs permanents
pour 20 à 25.000 occasionnels (Launay, Paysans
Algériens, p. 62). Pour l'Algérie tout entière,
438.483 petits fellahs ayant moins de 10 hecta-
res dont un quart moins de 1 hectare !
tenait aux Européens et à quelques très riches Al-
gériens, et était exploitée pour la plus grande
partie de sa surface sur de grands domaine.s avec
des méthodes modernes. Les fellahs étaient re-
poussés sur les bords des montagnes, les pla-
teaux, les terres sablonneuses, bref toutes les
mauvaises terres à faible rendement. Ils les
exploitaient par petits lopins. « II y avait d'un
côté la forêt avec le garde champêtre et de l'au-
côté la terre du colon. Nous, on était sur le
roc » (réponse d'un fellah à l'enquête de Rév.
et Trav. : « Pourquoi la Révolution ?, 29 oct.
1965). La différence a été accentuée par les
modes d'exploitation modernes. Les grands do-
maines exigeaient peu de travailleurs, les bon-
nes terres étaient peu peuplées. Les mauvaises
étaient surpeuplées. Un domaine comme celui
du Keroulis, par exemple, de 2.300 hectares
n'employait que 43 ouvriers au mois, 400 ou-
vriers journaliers et 1.200 saisonniers seulement
pour la vendange. Et dans l'arrondissement
d'Aïn Temouchent, où se trouve Keroulis, on
comptait en 1963 8.000 travailleurs permanents
pour 20 à 25.000 occasionnels (Launay, Paysans
Algériens, p. 62). Pour l'Algérie tout entière,
438.483 petits fellahs ayant moins de 10 hecta-
res dont un quart moins de 1 hectare !
Or, rien n'a changé du point de vue de la
répartition démographique : 200.000 travailleurs
autogérés vivotent sur les grands domaines
dont la production est livrée à l'Etat (ils sont
peu ou pas payés, mais ils mangent un peu),
450.000 saisonniers grattent des miettes à la
porte des domaines autogérés, 450.000 fellahs
ayant moins de 10 hectares sont toujours sur
les cailloux et la forêt dont ils sont censés ti-
rer leur nourriture, ce qui est, vu leur nom-
bre, matériellement impossible même avec de
meilleures structures sociales, même avec un
bon matériel. Tous ces affamés continuent à re-
garder les gros domaines (plus ou moins auto-
gérés). Certains partent en ville : ils grossis-
sent le nombre des chômeurs (1 million) puis-
qu'il n'y a pas de travail en ville. Tout cela
est justifié par une notion abstraite de « ren-
tabilité », abstraite donc réactionnaire. Certains
comités de gestion ont essayé, par le biais de
la titularisation des saisonniers, de grossir le
nombre des consommateurs. Le gouvernement
répartition démographique : 200.000 travailleurs
autogérés vivotent sur les grands domaines
dont la production est livrée à l'Etat (ils sont
peu ou pas payés, mais ils mangent un peu),
450.000 saisonniers grattent des miettes à la
porte des domaines autogérés, 450.000 fellahs
ayant moins de 10 hectares sont toujours sur
les cailloux et la forêt dont ils sont censés ti-
rer leur nourriture, ce qui est, vu leur nom-
bre, matériellement impossible même avec de
meilleures structures sociales, même avec un
bon matériel. Tous ces affamés continuent à re-
garder les gros domaines (plus ou moins auto-
gérés). Certains partent en ville : ils grossis-
sent le nombre des chômeurs (1 million) puis-
qu'il n'y a pas de travail en ville. Tout cela
est justifié par une notion abstraite de « ren-
tabilité », abstraite donc réactionnaire. Certains
comités de gestion ont essayé, par le biais de
la titularisation des saisonniers, de grossir le
nombre des consommateurs. Le gouvernement
a réussi à enraysr le mouvement là où il exis-
tait. Ainsi politiquement le fossé se creuse en-
tre les travailleurs autogérés et les fellahs. Un
correspondant du bulletin du PRS (10 nov. 1966)
en donne un exemple pour la Kabylie. Il rap-
pelle l'état des -erres : déjà pauvres, champs
en friche, couche arable endommagée par les
bombardements, arbres brûlés au napalm,
cheptel décimé...
tait. Ainsi politiquement le fossé se creuse en-
tre les travailleurs autogérés et les fellahs. Un
correspondant du bulletin du PRS (10 nov. 1966)
en donne un exemple pour la Kabylie. Il rap-
pelle l'état des -erres : déjà pauvres, champs
en friche, couche arable endommagée par les
bombardements, arbres brûlés au napalm,
cheptel décimé...
« Quant aux ouvriers des fermes autogérées,
ils sont pris entre deux feux : un pouvoir qui
les sabote et les fellahs qui les haïssent ; et
parlais les ouvriers permanents gardent leurs
récoltes fusil en main (exemple : ferme auto-
gérée de Hausse nvillers à 70 km d'Alger, sur
la route de Tizi Ouzou). »
ils sont pris entre deux feux : un pouvoir qui
les sabote et les fellahs qui les haïssent ; et
parlais les ouvriers permanents gardent leurs
récoltes fusil en main (exemple : ferme auto-
gérée de Hausse nvillers à 70 km d'Alger, sur
la route de Tizi Ouzou). »
Ainsi des miséreux à peine ou pas du tout
payés, mais qui arrivent à manger un peu par
des prélèvements furtifs sur les « récoltes so-
cialistes » empêchent d'autre.s miséreux, ceux-
là complètement affamés, de se jeter sur les
mêmes récoltes pour les consommer.
payés, mais qui arrivent à manger un peu par
des prélèvements furtifs sur les « récoltes so-
cialistes » empêchent d'autre.s miséreux, ceux-
là complètement affamés, de se jeter sur les
mêmes récoltes pour les consommer.
La solution économique n'est évidemment
pas de faire venu tout le monde sur le domaine
autogéré (surtout que la production de vin ne
peut servir ici à la consommation). Elle n'est
pas non plus dons une sage réforme agraire
réservée aux fellahs (d'ailleurs pratiquement
impossible, 1e mcl est trop grand). Elle est, ou
elle était, dans une réintégration des mauvai-
ses terres dans le circuit économique de l'auto-
gestion, avec é-videmment une réorganisation
aussi de la production des « mauvaises terres»;
une terre n'est pas forcément mauvaise pour
tout, quand on a beaucoup de main-d'œuvre
inemployée. Cela ne pouvait se faire que par
des modes d'organisation collectifs volontaires
qui pouvaient êtie impulsés par les domaines
autogérés, mais il aurait fallu immédiatement
libérer une part de la production autogérée
pour la consomrr atîon en ne réservant que le
strict nécessaire aux investissements. Il aurait
fallu compter soi: par sou, tenir compte de }a
consommation et penser d'abord en termes col-
lectivistes (cf. Rapport de la commission pour
le développement de la grande Kabylie. 20 mai
1961, annulé par le comité central du F.L.N.).
pas de faire venu tout le monde sur le domaine
autogéré (surtout que la production de vin ne
peut servir ici à la consommation). Elle n'est
pas non plus dons une sage réforme agraire
réservée aux fellahs (d'ailleurs pratiquement
impossible, 1e mcl est trop grand). Elle est, ou
elle était, dans une réintégration des mauvai-
ses terres dans le circuit économique de l'auto-
gestion, avec é-videmment une réorganisation
aussi de la production des « mauvaises terres»;
une terre n'est pas forcément mauvaise pour
tout, quand on a beaucoup de main-d'œuvre
inemployée. Cela ne pouvait se faire que par
des modes d'organisation collectifs volontaires
qui pouvaient êtie impulsés par les domaines
autogérés, mais il aurait fallu immédiatement
libérer une part de la production autogérée
pour la consomrr atîon en ne réservant que le
strict nécessaire aux investissements. Il aurait
fallu compter soi: par sou, tenir compte de }a
consommation et penser d'abord en termes col-
lectivistes (cf. Rapport de la commission pour
le développement de la grande Kabylie. 20 mai
1961, annulé par le comité central du F.L.N.).
Mais la classe dirigeante pense d'abord à
elle-même, elle gaspille l'argent, et les inves-
tissements qui se font sont : ou étrangers, et
dans ce cas ils sont grandioses mais superfi-
ciels et ne permettent pas un démarrage éco-
nomique collectif (pétrole) •— ou bien ce sont
des investissements « folkloriques » sans pers-
pectives (afeliers de poteries ou de meubles
berbères en Kabylie — on produit du pittores-
que pour les maîtres). L'imprévoyance de nou-
veaux riches grisls par leur succès qui carac-
térise la nouvelle classe dirigeante algérienne
se retrouve en ce qui concerne non les modes
de production, mois la production elle-même.
elle-même, elle gaspille l'argent, et les inves-
tissements qui se font sont : ou étrangers, et
dans ce cas ils sont grandioses mais superfi-
ciels et ne permettent pas un démarrage éco-
nomique collectif (pétrole) •— ou bien ce sont
des investissements « folkloriques » sans pers-
pectives (afeliers de poteries ou de meubles
berbères en Kabylie — on produit du pittores-
que pour les maîtres). L'imprévoyance de nou-
veaux riches grisls par leur succès qui carac-
térise la nouvelle classe dirigeante algérienne
se retrouve en ce qui concerne non les modes
de production, mois la production elle-même.
360.000 hectares de vignes (dont 330.000 dans
le secteur autogéré) donnent près de la moitié
de la production végétale algérienne (13 mil-
lions d'hectolitres par an). Production inutile à
la consommation intérieure (à cause des pré-
jugés religieux, et de toute façon, on ne se
nourrit pas d'abord de vin). Si on arrive à l'ex-
le secteur autogéré) donnent près de la moitié
de la production végétale algérienne (13 mil-
lions d'hectolitres par an). Production inutile à
la consommation intérieure (à cause des pré-
jugés religieux, et de toute façon, on ne se
nourrit pas d'abord de vin). Si on arrive à l'ex-
33
porter, elle esj d'un bon rapport (elle rapporte
50 pour cent des devises du nouvel Etat algé-
rien).
50 pour cent des devises du nouvel Etat algé-
rien).
Mais si la bourgeoisie française acceptait de
freiner la production en France, pour faire ren-
trer celle des gros colons, elle allait se faire
tirer l'oreille pour consentir la même préféren-
ce en faveur de ses concurrents algériens. D'au-
tant plus que même dans les pays gros con-
sommateurs, la consommation de vin est par-
tout en baisse, lente mais régulière. Comme les
domaines autogérés ne sont pas équipés pour
garder le vin, la majeure partie de l'effort de
production du secteur clé de l'économie algé-
rienne sera perdue.
freiner la production en France, pour faire ren-
trer celle des gros colons, elle allait se faire
tirer l'oreille pour consentir la même préféren-
ce en faveur de ses concurrents algériens. D'au-
tant plus que même dans les pays gros con-
sommateurs, la consommation de vin est par-
tout en baisse, lente mais régulière. Comme les
domaines autogérés ne sont pas équipés pour
garder le vin, la majeure partie de l'effort de
production du secteur clé de l'économie algé-
rienne sera perdue.
La place même attribuée à l'autogestion agri-
cole, la plus importante, dans l'agriculture al-
gérienne, était donc une position fausse. Il fal-
lait unifier la condition des paysans ou voir se
creuser un fossé entre l'autogestion et les petits
fellahs, une minorité e.t une majorité.
cole, la plus importante, dans l'agriculture al-
gérienne, était donc une position fausse. Il fal-
lait unifier la condition des paysans ou voir se
creuser un fossé entre l'autogestion et les petits
fellahs, une minorité e.t une majorité.
Pour illustrer ce bilan, prenons quelques exem-
ples, d'abord dans l'agriculture, ensuite dans
l'industrie.
ples, d'abord dans l'agriculture, ensuite dans
l'industrie.
D'abord celui du domaine « Zaïr Houari »
situé à une trentaine de km à l'Ouest d'Oran, au.
bord "de la plaqe « les Andalouses », commune
d'El Ançor, donc dans la région côtière, la plus
favorisée en Algérie ; 1.756 ha, domaine moyen
pour la colonisation. A cet avantage géographi-
que s'ajoute la diversité des cultures : vigne,
céréales, cultures maraîchères, arbres fruitiers,
horticulture, tout cela irrigable grâce à une
source qui appartient au domaine.
situé à une trentaine de km à l'Ouest d'Oran, au.
bord "de la plaqe « les Andalouses », commune
d'El Ançor, donc dans la région côtière, la plus
favorisée en Algérie ; 1.756 ha, domaine moyen
pour la colonisation. A cet avantage géographi-
que s'ajoute la diversité des cultures : vigne,
céréales, cultures maraîchères, arbres fruitiers,
horticulture, tout cela irrigable grâce à une
source qui appartient au domaine.
Le domaine est donc autogéré depuis le lpr
octobre 1963. Le nombre des travailleurs est de
60 permanents et de 45 à 150 saisonniers, selon
les campagnes de cultures. On voit là encore
que la majorité des ouvriers n'est pas représen-
tée à l'Assemblée et aux autres organismes d'au-
togestion, situation commune, à tous les saison-
niers de l'autogestion agricole. Comment fonc-
tiennent les rouages de l'autogetion ? « Les tra-
vailleurs élisent le Président en Assemblée, ce
Président, un ouvrier, élu pour un an, distri-
bue le travail. L'Etat nomme un chargé de ges-
tion, qui se charge de l'administration. L'ouvrier
touche un salaire journalier de 8 F, le chauffeur
de 13 F, le jardinier de 22 F, le Président de
20 F. Le Chargé de gestion a un salaire mensuel
de 500 F (soit 20 F par jour). Les ouvriers tra-
vaillaient et habitaient au domaine avant l'indé-
pendance. Le Chargé de gestion est un techni-
cien agricole formé par les Français, il n'est pas
du village, mais du département. Il est très aimé
et écouté des ouvriers. L'ex-Président a été as-
sassiné un soir d'orage. L'actuel Président est
complètement invisible. Il roule en 404. Il est
rarement au domaine ».
octobre 1963. Le nombre des travailleurs est de
60 permanents et de 45 à 150 saisonniers, selon
les campagnes de cultures. On voit là encore
que la majorité des ouvriers n'est pas représen-
tée à l'Assemblée et aux autres organismes d'au-
togestion, situation commune, à tous les saison-
niers de l'autogestion agricole. Comment fonc-
tiennent les rouages de l'autogetion ? « Les tra-
vailleurs élisent le Président en Assemblée, ce
Président, un ouvrier, élu pour un an, distri-
bue le travail. L'Etat nomme un chargé de ges-
tion, qui se charge de l'administration. L'ouvrier
touche un salaire journalier de 8 F, le chauffeur
de 13 F, le jardinier de 22 F, le Président de
20 F. Le Chargé de gestion a un salaire mensuel
de 500 F (soit 20 F par jour). Les ouvriers tra-
vaillaient et habitaient au domaine avant l'indé-
pendance. Le Chargé de gestion est un techni-
cien agricole formé par les Français, il n'est pas
du village, mais du département. Il est très aimé
et écouté des ouvriers. L'ex-Président a été as-
sassiné un soir d'orage. L'actuel Président est
complètement invisible. Il roule en 404. Il est
rarement au domaine ».
Voici quelques déclarations recueillies par R.
et T. auprès d'un travailleur depuis toujours au
domaine (70 ans) : « Nous avons la liberté et
l'autogestion... nous travaillons pour nous », et
plus loin : « Maintenant tout est à nous. Le
bureau nous est ouvert toute la journée. Nous
y tenons nos réunions, nous recevons des ex-
plications et donnons nos conseils sur les tra-
vaux à entreprendre, labours, sulfate, taille, se-
et T. auprès d'un travailleur depuis toujours au
domaine (70 ans) : « Nous avons la liberté et
l'autogestion... nous travaillons pour nous », et
plus loin : « Maintenant tout est à nous. Le
bureau nous est ouvert toute la journée. Nous
y tenons nos réunions, nous recevons des ex-
plications et donnons nos conseils sur les tra-
vaux à entreprendre, labours, sulfate, taille, se-
mences, etc.., et on nous écoute, et on en tient
compte. » (Eév. et Trav. 29-4-65).
compte. » (Eév. et Trav. 29-4-65).
Un indice intéressant peut être le climat des
rapports Chargé de gestion-ouvriers ; ces rap-
ports étaient bons et le Chargé de gestion sem-
ble un ouvrier parmi d'autres (on a vu que
son salaire n'était guère élevé). Par contre,
dans la mên.e région, on voit certains Chargés
de gestion se comporter en patrons d'entreprise,
le Chargé de gestion étant le seul à parler cou-
ramment français, c'est surtout avec lui que
nous pouvioi.s parler longuement. Sur le plan
des structure:;, il confirme (ce qu'avait dit Rév.
et Trav. 3 mois auparavant) : « Les suggestions
des ouvriers sont soumises à l'Assemblée des
travailleurs qui a lieu régulièrement en pré-
sence du Comté. » Ce qu'il nous dit du fonc-
tionnement du domaine est moins encoura-
geant : le, domaine possède certes ses propres
spécialistes (Hév. et Trav. l'avait fièrement sou-
ligné), mécai.iciens, soudeurs... mais l'approvi-
sionnement en pièces de rechange est de plus
en plus difficile. Les succursales des maisons
de matériel agricole ne les vendent que si on
les paie rapidement, or le domaine est toujours
à court de «disponibilités. « Pourtant, c'est le
quatrième do naine où je suis affecté, dit-il, et
c'est le prem.er qui a sa comptabilité en équi-
libre. » Les trois autres étaient des domaines à
monoculture, vigne ou céréales.
rapports Chargé de gestion-ouvriers ; ces rap-
ports étaient bons et le Chargé de gestion sem-
ble un ouvrier parmi d'autres (on a vu que
son salaire n'était guère élevé). Par contre,
dans la mên.e région, on voit certains Chargés
de gestion se comporter en patrons d'entreprise,
le Chargé de gestion étant le seul à parler cou-
ramment français, c'est surtout avec lui que
nous pouvioi.s parler longuement. Sur le plan
des structure:;, il confirme (ce qu'avait dit Rév.
et Trav. 3 mois auparavant) : « Les suggestions
des ouvriers sont soumises à l'Assemblée des
travailleurs qui a lieu régulièrement en pré-
sence du Comté. » Ce qu'il nous dit du fonc-
tionnement du domaine est moins encoura-
geant : le, domaine possède certes ses propres
spécialistes (Hév. et Trav. l'avait fièrement sou-
ligné), mécai.iciens, soudeurs... mais l'approvi-
sionnement en pièces de rechange est de plus
en plus difficile. Les succursales des maisons
de matériel agricole ne les vendent que si on
les paie rapidement, or le domaine est toujours
à court de «disponibilités. « Pourtant, c'est le
quatrième do naine où je suis affecté, dit-il, et
c'est le prem.er qui a sa comptabilité en équi-
libre. » Les trois autres étaient des domaines à
monoculture, vigne ou céréales.
D'où viennent les difficultés? De la commer-
cialisation, et l'on retrouve les maux communs
à toutes les sntreprïses autogérées en Algérie.
Nous apprenons ainsi qu'une partie du vin
de l'année pj écédente est encore stockée sous
les hangars, st les procédés de stockage étant
rudimentaires, il y aura sûrement des pertes.
Et le vin n'est pas seul en cause ; un manda-
taire privé prrjpose un jour d'acheter un lot de
tomates pour 12 millions de Francs. Après
consultation du commissaire de l'O.N.R.A. à
Oran (qui supervise toute opération du Comité
avec l'extérieur), il ne peut que refuser et en-
voyer le lot, suivant le processus normal, à la
C.O.R.A. d'Oran (qui s'appelle Légum-C'oop).
Au bout d'un mois, on apprend que la vente
du lot rapporta au Comité 2 millions d'A.F. On
peut se demander ce qu'est devenue la diffé-
rence entre 1'.', et 2 millions. Il n'est pas éton-
nant après cela d'apprendre qu'un domaine
pourtant riche, où les ouvriers travaillent dur,
et bénéficiant de conditions favorables assez
rares en Algérie peut tout juste boucler son
budget, et qu<; son Chargé de gestion se pro-
nonce pour un retour à la libre entreprise.
cialisation, et l'on retrouve les maux communs
à toutes les sntreprïses autogérées en Algérie.
Nous apprenons ainsi qu'une partie du vin
de l'année pj écédente est encore stockée sous
les hangars, st les procédés de stockage étant
rudimentaires, il y aura sûrement des pertes.
Et le vin n'est pas seul en cause ; un manda-
taire privé prrjpose un jour d'acheter un lot de
tomates pour 12 millions de Francs. Après
consultation du commissaire de l'O.N.R.A. à
Oran (qui supervise toute opération du Comité
avec l'extérieur), il ne peut que refuser et en-
voyer le lot, suivant le processus normal, à la
C.O.R.A. d'Oran (qui s'appelle Légum-C'oop).
Au bout d'un mois, on apprend que la vente
du lot rapporta au Comité 2 millions d'A.F. On
peut se demander ce qu'est devenue la diffé-
rence entre 1'.', et 2 millions. Il n'est pas éton-
nant après cela d'apprendre qu'un domaine
pourtant riche, où les ouvriers travaillent dur,
et bénéficiant de conditions favorables assez
rares en Algérie peut tout juste boucler son
budget, et qu<; son Chargé de gestion se pro-
nonce pour un retour à la libre entreprise.
Quelles son! les conditions de travail? Les
ouvriers sont payés irrégulièrement, en géné-
ral, et ils ne îiont pas tous logés au domaine ;
il faut tenir cnmpte de plusieurs faits : les di-
manches et jcurs de fêtes ne sont pas payés,
la sécurité sociale ef les allocations familiales
n'existent pas (Rév. et Trav. signale que les
travailleurs ont créé une caisse mutuelle, dans
laquelle ils \ ersent selon ce qu'ils peuvent
entre I DA et 5 DA par mois, ce qui permet de
venir en aide à chacun en cas de coup dur ou
de maladie). Les avantages en nature, dont
font état ceux qui parlent de l'autogestion, sont
ouvriers sont payés irrégulièrement, en géné-
ral, et ils ne îiont pas tous logés au domaine ;
il faut tenir cnmpte de plusieurs faits : les di-
manches et jcurs de fêtes ne sont pas payés,
la sécurité sociale ef les allocations familiales
n'existent pas (Rév. et Trav. signale que les
travailleurs ont créé une caisse mutuelle, dans
laquelle ils \ ersent selon ce qu'ils peuvent
entre I DA et 5 DA par mois, ce qui permet de
venir en aide à chacun en cas de coup dur ou
de maladie). Les avantages en nature, dont
font état ceux qui parlent de l'autogestion, sont
34
pure illusion, car les produits du domaine con-
sommés sur place par les travailleurs leurs sont
vendus, en avances sur leur salaire. Mais sur-
tout, sauf pour les enfants, l'effort d'éducation
est inexistant. Le Conseil communal d'animation
de l'autogestion n'existe pas, les travailleurs,
pour la plupart analphabètes, sont laissés à
leur sort : pas d'alphabétisation, encore moins
de cours de perfectionnement. Tous sont à
l'U.G.T.A., et pourtant, quand on leur demande
ce qu'ils pensent du Bulletin intérieur de l'Auto-
gestion, ils nous répondent : « Qu'est-ce que
c'est? »
sommés sur place par les travailleurs leurs sont
vendus, en avances sur leur salaire. Mais sur-
tout, sauf pour les enfants, l'effort d'éducation
est inexistant. Le Conseil communal d'animation
de l'autogestion n'existe pas, les travailleurs,
pour la plupart analphabètes, sont laissés à
leur sort : pas d'alphabétisation, encore moins
de cours de perfectionnement. Tous sont à
l'U.G.T.A., et pourtant, quand on leur demande
ce qu'ils pensent du Bulletin intérieur de l'Auto-
gestion, ils nous répondent : « Qu'est-ce que
c'est? »
Pour conclure, un domaine où l'on retrouve
les difficultés habituelles, mais où ces diffi-
cultés sont à peu près compensées par des
conditions géographiques et techniques assez
rares en Algérie ; cela donne un budget en
équilibre, un fonctionnement suffisamment ré-
gulier pour qu'ils suscite des convoitises, et
c'est pourquoi, depuis deux mois, le domaine est
passé sous le contrôle de l'Armée, l'A.N.P.,
une fois baptisé Coopérative agricole d'An-
ciens moudjahidines, comme beaucoup d'au-
tres ces derniers temps. Le Chargé de gestion
a été muté, le Comité de Gestion dissout.
les difficultés habituelles, mais où ces diffi-
cultés sont à peu près compensées par des
conditions géographiques et techniques assez
rares en Algérie ; cela donne un budget en
équilibre, un fonctionnement suffisamment ré-
gulier pour qu'ils suscite des convoitises, et
c'est pourquoi, depuis deux mois, le domaine est
passé sous le contrôle de l'Armée, l'A.N.P.,
une fois baptisé Coopérative agricole d'An-
ciens moudjahidines, comme beaucoup d'au-
tres ces derniers temps. Le Chargé de gestion
a été muté, le Comité de Gestion dissout.
1) L'entreprise « Laïmeche Ali » à Tizi-Bached
La commune de Tizi-Rached se trouve en
Kabylie, dans une région très combative pen-
dant la guerre, et de ce fait très durement tou-
chée (morts, destructions, « regroupements »
par l'armée française). C'est là qu'est organi-
sée, avant ^'indépendance, la coopérative Laï-
mèche Ali qui fournit du matériel de construc-
tion pour le bâtiment.
Kabylie, dans une région très combative pen-
dant la guerre, et de ce fait très durement tou-
chée (morts, destructions, « regroupements »
par l'armée française). C'est là qu'est organi-
sée, avant ^'indépendance, la coopérative Laï-
mèche Ali qui fournit du matériel de construc-
tion pour le bâtiment.
Au départ, en 1962, 50 artisans ont apporté
chacun 10.000 A.F. En 1963, le parti leur ac-
corde une aide en matériel et en crédit. La mu-
nicipalité donne les bâtiments de l'ancienne
S.A.S. (bureaux de l'armée française pendant
la guerre) qui sont transformés en ateliers, ma-
gasins, réfectoires, bureaux. Une banque prête
6 millions d'A.F., tandis qu'un emprunt sous-
crit auprès de la population rapporte 2,5 mil-
lions d'A.F. (l'importance de cet emprunt près
d'une population ruinée s'explique par le désir
de sortir du marasme, et par le fait qu'il y a
eu des réunions d'information). En septembre
1963, de nouveaux ateliers ont été construits
(menuiserie, électricité, forge, soudure, serru-
rerie, plomberie). L'entreprise produit des bri-
ques, des parpaings, montants de portes et fe-
nêtres, ferronneries, etc., emploie 240 ouvriers,
et peut désormais produire tous les matériaux
nécessaires à la construction. En 1964 elle a
acheté du matériel moderne et emploie 406
ouvriers.
chacun 10.000 A.F. En 1963, le parti leur ac-
corde une aide en matériel et en crédit. La mu-
nicipalité donne les bâtiments de l'ancienne
S.A.S. (bureaux de l'armée française pendant
la guerre) qui sont transformés en ateliers, ma-
gasins, réfectoires, bureaux. Une banque prête
6 millions d'A.F., tandis qu'un emprunt sous-
crit auprès de la population rapporte 2,5 mil-
lions d'A.F. (l'importance de cet emprunt près
d'une population ruinée s'explique par le désir
de sortir du marasme, et par le fait qu'il y a
eu des réunions d'information). En septembre
1963, de nouveaux ateliers ont été construits
(menuiserie, électricité, forge, soudure, serru-
rerie, plomberie). L'entreprise produit des bri-
ques, des parpaings, montants de portes et fe-
nêtres, ferronneries, etc., emploie 240 ouvriers,
et peut désormais produire tous les matériaux
nécessaires à la construction. En 1964 elle a
acheté du matériel moderne et emploie 406
ouvriers.
Organisation : les membres de l'assemblée
générale des ouvriers élisent un comité de
gestion ; sont membres de l'A.G. les artisans
ayant adhéré et les manœuvres au bout de
six mois. Le comité de gestion comprend de
9 à 13 membres, est élu pour un an et doit
diriger l'entreprise ; il se réunit après le travail.
Le comité emploie un comptable, et des ingé-
atesïs pokmeîs, payés un million par mois à
générale des ouvriers élisent un comité de
gestion ; sont membres de l'A.G. les artisans
ayant adhéré et les manœuvres au bout de
six mois. Le comité de gestion comprend de
9 à 13 membres, est élu pour un an et doit
diriger l'entreprise ; il se réunit après le travail.
Le comité emploie un comptable, et des ingé-
atesïs pokmeîs, payés un million par mois à
leur ambassade. les horaires de travail sont
6 h à 12 h et 14 h à 17 h, avec une heure don-
née à la coopérât .ve.
6 h à 12 h et 14 h à 17 h, avec une heure don-
née à la coopérât .ve.
Répartition des avantages sociaux : les sa-
laires (fixés par la comité de gestion) varient
entre 25.000 et 45.0 DO AF par mois. Les ouvriers
sont nourris midi et soir ou logés. Après le bi-
lan, il est envisacé une augmentation de sa-
laire, et une embauche supplémentaire. Les
travailleurs ont demandé et obtenu des cours
d'alphabétisation dispensés par un moniteur
français (2 heures par jour). Enfin, le comité se
charge d'envoyer des jeunes à l'école de F.P.
du bâtiment, ou à l'école d'infirmiers.
laires (fixés par la comité de gestion) varient
entre 25.000 et 45.0 DO AF par mois. Les ouvriers
sont nourris midi et soir ou logés. Après le bi-
lan, il est envisacé une augmentation de sa-
laire, et une embauche supplémentaire. Les
travailleurs ont demandé et obtenu des cours
d'alphabétisation dispensés par un moniteur
français (2 heures par jour). Enfin, le comité se
charge d'envoyer des jeunes à l'école de F.P.
du bâtiment, ou à l'école d'infirmiers.
L'entreprise a eu de graves difficultés finan-
cières, car au débu 1964 le comptable est parti
à l'étranger en emportant la caisse, chose cou-
rante à cette époqae. Du point de vue de l'or-
ganisation, un président du C.G. a déjà été dé-
mis de ses foncticns par l'A.G. car il voulait
réduire le nombre des membres et utiliser les
manœuvres comme > main-d'œuvre salariée. Ce-
pendant, cela n'en .pêche par les ouvriers (cer-
tains avaient travaillé en France et milité dans
la C.G.T., et forment maintenant les paysans
kabyles) d'avoir de nouveaux projets : une fa-
brique de carreaux, la construction d'une cité
pour les travailleurs venant de loin. Ces projets
en accompagnent d'autres à l'échelle de la
commune : une huilerie-savonnerie, une auberge
de jeunesse, de rouvelles routes et un hôpi-
tal dont la gestion comporterait des représen-
tants de la commi.ne, de l'entreprise Laïmèche
Ali de la coopérative agricole et du personnel
hospitalier.
cières, car au débu 1964 le comptable est parti
à l'étranger en emportant la caisse, chose cou-
rante à cette époqae. Du point de vue de l'or-
ganisation, un président du C.G. a déjà été dé-
mis de ses foncticns par l'A.G. car il voulait
réduire le nombre des membres et utiliser les
manœuvres comme > main-d'œuvre salariée. Ce-
pendant, cela n'en .pêche par les ouvriers (cer-
tains avaient travaillé en France et milité dans
la C.G.T., et forment maintenant les paysans
kabyles) d'avoir de nouveaux projets : une fa-
brique de carreaux, la construction d'une cité
pour les travailleurs venant de loin. Ces projets
en accompagnent d'autres à l'échelle de la
commune : une huilerie-savonnerie, une auberge
de jeunesse, de rouvelles routes et un hôpi-
tal dont la gestion comporterait des représen-
tants de la commi.ne, de l'entreprise Laïmèche
Ali de la coopérative agricole et du personnel
hospitalier.
2) SIATEM (Algéiois) : Entreprise d'aliments
pour le bétail
pour le bétail
(« Révolution et Travail », 17 mars 1966.) 50
à 100 ouvriers — départ très dur (décembre 63)
il a fallu 3 mois c.e travail bénévole pour net-
toyer les machines — fabrique des aliments
pour le bétail à base de pulpe de caroubes,
mais la graine permet de fabriquer un produit
de remplacement (le la matière plastique pour
les films ou mémo de l'insuline. La société a
étendu sa production à des éleveuses pour la
volaille, des broyeurs, des silos. Elle dispose
de quatre magasirs de vente.
à 100 ouvriers — départ très dur (décembre 63)
il a fallu 3 mois c.e travail bénévole pour net-
toyer les machines — fabrique des aliments
pour le bétail à base de pulpe de caroubes,
mais la graine permet de fabriquer un produit
de remplacement (le la matière plastique pour
les films ou mémo de l'insuline. La société a
étendu sa production à des éleveuses pour la
volaille, des broyeurs, des silos. Elle dispose
de quatre magasirs de vente.
— en 1 an elle traite 16.000 quintaux de ca-
roubes vendus + 200 tonnes de graines ven-
dues à une société suisse,
roubes vendus + 200 tonnes de graines ven-
dues à une société suisse,
— perspectives augmenter les exportations
qui semblent très passibles et mêmes souhaitées,
couvrir les besoins du secteur agricole autogéré
en aliments composés et coordonner la produc-
tion avec deux au res moulins autogérés (Tam-
zali à Alger çt Tiar à Mostaganem) ce qui
permettrait de mètre sur pied une entreprise
très viable.
qui semblent très passibles et mêmes souhaitées,
couvrir les besoins du secteur agricole autogéré
en aliments composés et coordonner la produc-
tion avec deux au res moulins autogérés (Tam-
zali à Alger çt Tiar à Mostaganem) ce qui
permettrait de mètre sur pied une entreprise
très viable.
3) Huileries modernes (ex-Tamzali, Algérois).
Autre exemple c.e sabotage par le renforce-
ment de l'industrie privée au détriment du
secteur autogéré. Celui des célèbres huileries
Tamzali maintenait Huileries modernes.
Autre exemple c.e sabotage par le renforce-
ment de l'industrie privée au détriment du
secteur autogéré. Celui des célèbres huileries
Tamzali maintenait Huileries modernes.
170 ouvriers — - capacités de production
4.000 à 5.000 kg < l'huile raffinée toutes les 24
4.000 à 5.000 kg < l'huile raffinée toutes les 24
35
heures. Matériel ultra-moderne : alimente les
grossistes de la région de l'Est et Sud Cons-
tantinois, le Sud Algérien, l'Algérois et aussi
l'armée, l'A.N.P. On comprend que sa mise
en autogestion fasse comme on dit « mal au
ventre de certains ». Mais les Huileries Mo-
dernes ne fabriquent que de l'huile et pas les
produits dérivés : savons et savonnettes. Par
contre les concurrents privés (Lesieur notam-
ment) fabriquent huile et savons. D'où un chan-
tage facile auprès des grossistes : s'ils veu-
lent acheter le savon, il faut qu'ils prennent
l'huile avec.
grossistes de la région de l'Est et Sud Cons-
tantinois, le Sud Algérien, l'Algérois et aussi
l'armée, l'A.N.P. On comprend que sa mise
en autogestion fasse comme on dit « mal au
ventre de certains ». Mais les Huileries Mo-
dernes ne fabriquent que de l'huile et pas les
produits dérivés : savons et savonnettes. Par
contre les concurrents privés (Lesieur notam-
ment) fabriquent huile et savons. D'où un chan-
tage facile auprès des grossistes : s'ils veu-
lent acheter le savon, il faut qu'ils prennent
l'huile avec.
La riposte était facile à trouver : le comité
de gestion des Huileries modernes a demandé
l'agrément d'installation d'une savonnerie.
Mais le projet est sans réponse depuis deux
ans, et Lesieur qui importait ses savons, a
obtenu le même agrément pour l'installation
d'une savonnerie (« Révolution et Travail »,
du 24 mars 1966).
de gestion des Huileries modernes a demandé
l'agrément d'installation d'une savonnerie.
Mais le projet est sans réponse depuis deux
ans, et Lesieur qui importait ses savons, a
obtenu le même agrément pour l'installation
d'une savonnerie (« Révolution et Travail »,
du 24 mars 1966).
Voilà donc un des cas où une entreprise
autogérée qui ,du point de vue économique
est viable, se heurte à une concurrence pri-
vée qui a partie liée avec das organismes
gouvernementaux.
autogérée qui ,du point de vue économique
est viable, se heurte à une concurrence pri-
vée qui a partie liée avec das organismes
gouvernementaux.
4) Papeteries et carfonneries.
Aux papeteries et cartonneries modernes
d'El Harrach — autogérées depuis 1963, ou-
tillage moderne abandonné sur place par la
direction — les ouvriers spécialisés qui ont
démarré l'usine « ont eu la sagesse » de faire
des commandes de pièces de rechange à
l'avance. 109 ouvriers. Production décembre
1S63 : 300 tonnes ; fin 19S4 : 6.700 tonnes ; fin
janvier 1965 : 7.410 tonnes. Deux détails inté-
ressants :
d'El Harrach — autogérées depuis 1963, ou-
tillage moderne abandonné sur place par la
direction — les ouvriers spécialisés qui ont
démarré l'usine « ont eu la sagesse » de faire
des commandes de pièces de rechange à
l'avance. 109 ouvriers. Production décembre
1S63 : 300 tonnes ; fin 19S4 : 6.700 tonnes ; fin
janvier 1965 : 7.410 tonnes. Deux détails inté-
ressants :
— en 19S5 « un président du comité de ges-
tion jugé peu valable à l'expérience fut écarté »
(la suite apprend qu'il ne fait plus partie du
comité) ;
tion jugé peu valable à l'expérience fut écarté »
(la suite apprend qu'il ne fait plus partie du
comité) ;
— toujours en 1965 les travailleurs se per-
mettent même le luxe de venir en aide à d'au-
tres comités de gestion en difficulté... (500.000
D.A. en tout, c'est-à-dire 50 millions d'anciens
francs.
mettent même le luxe de venir en aide à d'au-
tres comités de gestion en difficulté... (500.000
D.A. en tout, c'est-à-dire 50 millions d'anciens
francs.
Outre ces dépenses ils ont versé, en 1964,
370.000 D.A. au Fonds national d'investisse-
ments (Révolution et Travail », n° 107,, 10 mars
1936). Les travailleurs de.s papeteries d'El Har-
rach ont l'air de ne pas respecter outre me-
sure les décrets de mars puisqu'ils ont versé
plus pour la solidarité avec d'autres autoges-
îionnaîres qu'au Fonds national d'équilibre
de l'emploi. On les comprend : au moins ils
savent où esj passé l'argent.
370.000 D.A. au Fonds national d'investisse-
ments (Révolution et Travail », n° 107,, 10 mars
1936). Les travailleurs de.s papeteries d'El Har-
rach ont l'air de ne pas respecter outre me-
sure les décrets de mars puisqu'ils ont versé
plus pour la solidarité avec d'autres autoges-
îionnaîres qu'au Fonds national d'équilibre
de l'emploi. On les comprend : au moins ils
savent où esj passé l'argent.
5) S.A.T-A.C. (Société algériose de transports
automobiles en commun)
automobiles en commun)
4 octobre 1963 : nationalisation et élection
d'un comité de gestion de l'entreprise de trans-
ports en commun Safac - Transports Colonel
Lofti. (« Révolution et Travail », n° 93, 17-6-65).
d'un comité de gestion de l'entreprise de trans-
ports en commun Safac - Transports Colonel
Lofti. (« Révolution et Travail », n° 93, 17-6-65).
Les T.C.L. exploitent 3.000 km de lignes (35
lignes régulières reliant Alger à l'intérieur du
pays), et disposent de 137 véhicules, dont 32
achetés par le comité de gestion. L'entreprise
lignes régulières reliant Alger à l'intérieur du
pays), et disposent de 137 véhicules, dont 32
achetés par le comité de gestion. L'entreprise
présente un bénéfice net de 540.000 D.A. Aussi
le ministre des transports Zaïbek déclare :
« Vous venez de prouver que l'autogestion est
une réussite, ayez toujours confiance en elle ».
le ministre des transports Zaïbek déclare :
« Vous venez de prouver que l'autogestion est
une réussite, ayez toujours confiance en elle ».
LES TRAVAILLEURS
ET LA CLASSE DIRIGEANTE
ET LA CLASSE DIRIGEANTE
Nous avons comparé les comptes rendus de
quatre congiès .Les précongrès des travailleurs
de la terre c.e Blida, de Tiarej, d'Alger (Algérie
dans « le Monde », nov.décembre 1964, citant
« Révolution et Travail ») et le Congrès général
de la Fédéiation des travailleurs de la terre
(compte rendu dans « l'Algérie caporalisée » de
D. Guérin).
quatre congiès .Les précongrès des travailleurs
de la terre c.e Blida, de Tiarej, d'Alger (Algérie
dans « le Monde », nov.décembre 1964, citant
« Révolution et Travail ») et le Congrès général
de la Fédéiation des travailleurs de la terre
(compte rendu dans « l'Algérie caporalisée » de
D. Guérin).
Résumons les critiques faites par les travail-
leurs, elles montrent leur niveau de conscience.
leurs, elles montrent leur niveau de conscience.
D'abord les critiques sur le parachutage :
celui des pseudo-présidents de comités de ges-
tions, celui de pseudo-délégués à ces congrès
même, gui embauchent sur une critique de la
commercialisation bureaucratique par les SAP
(voir plus haat) et sur une critique de la tutelle
incapable exercée par l'Office National de la
Réforme Agraire.
celui des pseudo-présidents de comités de ges-
tions, celui de pseudo-délégués à ces congrès
même, gui embauchent sur une critique de la
commercialisation bureaucratique par les SAP
(voir plus haat) et sur une critique de la tutelle
incapable exercée par l'Office National de la
Réforme Agraire.
« Les fonctionnaires de l'ONRA nous vien-
nent en 404 est nous disent qu'il n'y a plus d'ar-
gent pour employer les ouvriers chômeurs-
Frères, je suis délégué du pauvre ouvrier, je
ne suis pas iélégué du ministère de l'Agricul-
ture. Cette fédération doit être la fédération des
ouvriers de .a terre, et non la fédération du
ministère de l'Agriculture. » « L'ouvrier est per-
sécuté par .a SAP. Nous travaillons mieux
qu'eux, de l'aube jusqu'à 9 h du soir, et nous
réussissons le socialisme qu'ils veulent dé-
truire. » « II ïaut que l'ONRA et les chargés de
gestion mette nt fin à leurs interventions dans
les affaires das ouvriers. »>
nent en 404 est nous disent qu'il n'y a plus d'ar-
gent pour employer les ouvriers chômeurs-
Frères, je suis délégué du pauvre ouvrier, je
ne suis pas iélégué du ministère de l'Agricul-
ture. Cette fédération doit être la fédération des
ouvriers de .a terre, et non la fédération du
ministère de l'Agriculture. » « L'ouvrier est per-
sécuté par .a SAP. Nous travaillons mieux
qu'eux, de l'aube jusqu'à 9 h du soir, et nous
réussissons le socialisme qu'ils veulent dé-
truire. » « II ïaut que l'ONRA et les chargés de
gestion mette nt fin à leurs interventions dans
les affaires das ouvriers. »>
Mais la critique s'élargit :
Des mesures sont proposées qui montrent que
certains délégués ont vu le danger de coupure
de l'autogestion et de la paysannerie pauvre :
« titularisation des ouvriers saisonniers après
six mois de jrésence (pour éviter les « saison-
niers à vie > sans droits d'autogestionnaire).
« Aider les pcuvres paysans de 5 ha. » « Créer
des Unions paysannes et des coopératives de
consommation ce qui permettrait d'éliminer les
spéculateurs. Alliance des ouvriers des villes et
des campagnes pour lutter contre les « nou-
veaux . colons ».
certains délégués ont vu le danger de coupure
de l'autogestion et de la paysannerie pauvre :
« titularisation des ouvriers saisonniers après
six mois de jrésence (pour éviter les « saison-
niers à vie > sans droits d'autogestionnaire).
« Aider les pcuvres paysans de 5 ha. » « Créer
des Unions paysannes et des coopératives de
consommation ce qui permettrait d'éliminer les
spéculateurs. Alliance des ouvriers des villes et
des campagnes pour lutter contre les « nou-
veaux . colons ».
Et le problème du pouvoir : « Le point im-
portant, frères c'est qu'il faut installer un con-
frôle strict sur fous, de l'ouvrier jusqu'à Ben
Bella. » Nous voulons un syndicat révolution-
naire et fort q Ji impose nos propres décisions. »
(Interview : « Révolution Africaine », 7 août
1985.)
portant, frères c'est qu'il faut installer un con-
frôle strict sur fous, de l'ouvrier jusqu'à Ben
Bella. » Nous voulons un syndicat révolution-
naire et fort q Ji impose nos propres décisions. »
(Interview : « Révolution Africaine », 7 août
1985.)
Le problème de la planification fédéraliste a
été vite vu, et dès mars-avril 1964, un éditorial
de Révolution et Travail déclarait :
été vite vu, et dès mars-avril 1964, un éditorial
de Révolution et Travail déclarait :
« A l'heure actuelle chaque unité de produc-
tion vit ses problèmes particuliers ; les perspec-
tives d'une solidarité agissante d'où doit se dé-
gager une act. on positive concertée restent par
conséquent limitées — or, c'est, par la liaison
tion vit ses problèmes particuliers ; les perspec-
tives d'une solidarité agissante d'où doit se dé-
gager une act. on positive concertée restent par
conséquent limitées — or, c'est, par la liaison
38
l'introduction très nette de l'automatisation, la
production augmente avec de moins en moins
de travailleurs. Evidemment l'automatisation
crée des emplois, mais beaucoup moins que
ceux qu'elle supprime.
production augmente avec de moins en moins
de travailleurs. Evidemment l'automatisation
crée des emplois, mais beaucoup moins que
ceux qu'elle supprime.
La solution du problème paraît claire : puis-
qu'avec, disons une heure de travail, on fa-
brique beaucoup plus vite le même objet, on
peut soit maintenir les temps de travail, en
employant moins de monde, soit employer plus
de monde, mais abaisser considérablement les
temps de travail.
qu'avec, disons une heure de travail, on fa-
brique beaucoup plus vite le même objet, on
peut soit maintenir les temps de travail, en
employant moins de monde, soit employer plus
de monde, mais abaisser considérablement les
temps de travail.
Mais cette solution se heurte, à moyen terme,
à une série de difficultés concrètes: l'automatisa-
tion est introduite en fonction des bénéfices et
pas des besoins (problème des industries de
guerre) la « main d'oeuvre » devrait être plus
qualifiée (il faut donc investir dans l'Education,
et même une éducation généralisée, et perma-
nente, donc quelque chose qui n'a rien à voir
avec l'éducation actuelle, faite pour avoir deg
diplômes). Il y aura de toutes façons des distor-
sions (on parle de « reconversions ») il faudrait
aider les « reconvertis ».
à une série de difficultés concrètes: l'automatisa-
tion est introduite en fonction des bénéfices et
pas des besoins (problème des industries de
guerre) la « main d'oeuvre » devrait être plus
qualifiée (il faut donc investir dans l'Education,
et même une éducation généralisée, et perma-
nente, donc quelque chose qui n'a rien à voir
avec l'éducation actuelle, faite pour avoir deg
diplômes). Il y aura de toutes façons des distor-
sions (on parle de « reconversions ») il faudrait
aider les « reconvertis ».
Donc un gigantesque effort de planification,
faite pour Jes besoins de tous, et non pour don-
ner un peu plus de bénéfice et de puissance à
tel ou tel clan financier. Donc aussi des écono-
mies réalisées par la suppression de secteurs im-
productifs (guerre, publicité).
faite pour Jes besoins de tous, et non pour don-
ner un peu plus de bénéfice et de puissance à
tel ou tel clan financier. Donc aussi des écono-
mies réalisées par la suppression de secteurs im-
productifs (guerre, publicité).
Mais pourquoi une classe dirigeante réalise-
rait-elle un tel effort ? La guerre militaire ou
économique est toujours son mot d'ordre et sa
raison d'être (concurrence, sélection...), elle joue
des disparités économiques, elle vit sur le mal-
heur. Tant que ce n'est pas la catastrophe éco-
nomique complète, tant qu'elle a des flics pour
faire taire les oppositions, elle continuera à
gouverner à la petite semaine : elle vit bien
comme ça, pourquoi changer ? Même elle le vou-
drait, elle ne le pourrait qu'en se supprimant com-
me classe, en renonçant à ses privilèges, en se
sacrifiant pour la prospérité de tous. Elle y rêve
parfois (les patrons chrétiens !) elle ne le fait
jamais.
rait-elle un tel effort ? La guerre militaire ou
économique est toujours son mot d'ordre et sa
raison d'être (concurrence, sélection...), elle joue
des disparités économiques, elle vit sur le mal-
heur. Tant que ce n'est pas la catastrophe éco-
nomique complète, tant qu'elle a des flics pour
faire taire les oppositions, elle continuera à
gouverner à la petite semaine : elle vit bien
comme ça, pourquoi changer ? Même elle le vou-
drait, elle ne le pourrait qu'en se supprimant com-
me classe, en renonçant à ses privilèges, en se
sacrifiant pour la prospérité de tous. Elle y rêve
parfois (les patrons chrétiens !) elle ne le fait
jamais.
Les mesures que prendront les plus intelligents
de ses membres seront donc des mesures de con-
servation : probablement un relatif abaisse-
ment du temps de travail, une organisation
de la pauvreté décente (Chirac, ministre de
l'emploi disant : « Etre chômeur n'a rien
de honteux »), la création de tout un secteur
d'emplois tertiaires bidons, c'est-à-dire inutiles
pour la collectivité, et, pour faire passer les pi-
lules, le renforcement de tout un appareil ré-
pressif (les proies pourront s'engager dans l'ar-
mée et chez les flics, les petits-bourgeois se-
ront engagés comme sociologues, public-rela-
tions, hôtesses, autrement dit mettre de l'huile
dans les rouages).
de ses membres seront donc des mesures de con-
servation : probablement un relatif abaisse-
ment du temps de travail, une organisation
de la pauvreté décente (Chirac, ministre de
l'emploi disant : « Etre chômeur n'a rien
de honteux »), la création de tout un secteur
d'emplois tertiaires bidons, c'est-à-dire inutiles
pour la collectivité, et, pour faire passer les pi-
lules, le renforcement de tout un appareil ré-
pressif (les proies pourront s'engager dans l'ar-
mée et chez les flics, les petits-bourgeois se-
ront engagés comme sociologues, public-rela-
tions, hôtesses, autrement dit mettre de l'huile
dans les rouages).
Autrement dit, un tiers mesures plus ou
moins réelles, un tiers baratin et propagande
et un tiers triquo. Et comme nous protesterons
de plus en plus Ces nécessités de la trique pren-
dront le pas sur les autres, même si le gou-
vernement est clé gauche, « démocratique »
et tout et tout.
moins réelles, un tiers baratin et propagande
et un tiers triquo. Et comme nous protesterons
de plus en plus Ces nécessités de la trique pren-
dront le pas sur les autres, même si le gou-
vernement est clé gauche, « démocratique »
et tout et tout.
Nous pensons que l'avancement de la crise
va montrer de l'ius en plus l'incapacité de la
classe dirigeante, donc conduire de plus en plus
les travailleurs <t penser que « l'émancipation
des travailleurs sera l'œuvre des travailleurs
eux-mêmes » c'est-à-dire, à moins de jouer sur
les mots, que les travailleurs doivent pouvoir
avoir une prise directe sur leur vie à tous les
moments, que c'est de la base que doivent
partir les mots d'ordre à la base que doit
avoir lieu la discussion. C'est la base qui
devra prendre le contrôle, par l'instauration
de conseils, coriités, (le nom importe peu)
dans les usines et leur armement. C'est là-
dessus que pourra se construire l'édifice social.
Mais parallèlement à ce. mouvement des travail-
leurs, l'Etat et la classe dirigeante vont dévelop-
per la répression (le déclenchement d'une guerre
mondiale pour « en sortir » n'étant pas exclu).
va montrer de l'ius en plus l'incapacité de la
classe dirigeante, donc conduire de plus en plus
les travailleurs <t penser que « l'émancipation
des travailleurs sera l'œuvre des travailleurs
eux-mêmes » c'est-à-dire, à moins de jouer sur
les mots, que les travailleurs doivent pouvoir
avoir une prise directe sur leur vie à tous les
moments, que c'est de la base que doivent
partir les mots d'ordre à la base que doit
avoir lieu la discussion. C'est la base qui
devra prendre le contrôle, par l'instauration
de conseils, coriités, (le nom importe peu)
dans les usines et leur armement. C'est là-
dessus que pourra se construire l'édifice social.
Mais parallèlement à ce. mouvement des travail-
leurs, l'Etat et la classe dirigeante vont dévelop-
per la répression (le déclenchement d'une guerre
mondiale pour « en sortir » n'étant pas exclu).
C'est donc une course de vitesse, parfois brus-
que, parfois très lente, mais inexorable. Les re-
tards pris ne se rattraperont pas facilement. Ce
retard, la classe dirigeante va essayer de nous
le faire prendre par sa propagande, par des sa-
tisfactions superficielles, par des institutions
trompe-l'œil. Elle nous offrira même au besoin,
une révolution d«! théâtre. Elle pourrait bien nous
offrir une autogestion de pacotille, une cogestion
(on a le droit de pleurer avec le patron si la
boîte ne marche pas, on peut donner son avis
sur la couleur da papier dans les WC, on peut
organiser son travail pour produire avec plus
d'obéissance.) Il y aura évidemment des gars
pour s'en contenter.
que, parfois très lente, mais inexorable. Les re-
tards pris ne se rattraperont pas facilement. Ce
retard, la classe dirigeante va essayer de nous
le faire prendre par sa propagande, par des sa-
tisfactions superficielles, par des institutions
trompe-l'œil. Elle nous offrira même au besoin,
une révolution d«! théâtre. Elle pourrait bien nous
offrir une autogestion de pacotille, une cogestion
(on a le droit de pleurer avec le patron si la
boîte ne marche pas, on peut donner son avis
sur la couleur da papier dans les WC, on peut
organiser son travail pour produire avec plus
d'obéissance.) Il y aura évidemment des gars
pour s'en contenter.
Or, l'autogestion a déjà existé, elle a déjà
tenté de vivre. Il est utile de savoir comment
elle a combattu, et aussi comment elle a été
détournée, sabotée, vaincue. Ainsi, pour beau-
coup, l'autogestion ne sera plus le « mot creux »
que certains voudraient, mais une expérience
réapprise, et un<! arme pour vivre.
tenté de vivre. Il est utile de savoir comment
elle a combattu, et aussi comment elle a été
détournée, sabotée, vaincue. Ainsi, pour beau-
coup, l'autogestion ne sera plus le « mot creux »
que certains voudraient, mais une expérience
réapprise, et un<! arme pour vivre.
Nous voulons exposer brièvement en les adap-
tant à la situation française, en montrant en
quoi ils sont différents, quelles leçons on peut
en tirer, quelques exemples d'autogestion don-
nés par l'histoire des travailleurs.
tant à la situation française, en montrant en
quoi ils sont différents, quelles leçons on peut
en tirer, quelques exemples d'autogestion don-
nés par l'histoire des travailleurs.
Il ne s'agit pc s de recettes toutes faites mais
d'exemples d'orc anisations de travailleurs. Nous
estimons en effe: que chaque moment historique
a ses particularités et donc ses solutions spéci-
fiques, à condition de connaître le mouvement
ouvrier international et les différentes tactiques
qu'il a adoptées. Pas de dictature de comité cen-
tral, c'est à tous de penser en révolutionnaire.
d'exemples d'orc anisations de travailleurs. Nous
estimons en effe: que chaque moment historique
a ses particularités et donc ses solutions spéci-
fiques, à condition de connaître le mouvement
ouvrier international et les différentes tactiques
qu'il a adoptées. Pas de dictature de comité cen-
tral, c'est à tous de penser en révolutionnaire.
37
Voici deux citations particulièrement signi-
ficatives :
ficatives :
« L'A.N.P. est l'instrument essentiel de cet
Etat (...). Nous pourrons donc dire en cette deu-
xième année d'indépendance que notre armée
est à la hauteur de notre peuple, à la mesure
de nos espérances et nous ne l'avons jamais
considérée comme un danger pour nos amis...
Nous faisons nôtre l'adage qui dit : Une révo-
lution sans parti, c'est un troupeau sans ber-
ger. » (Discours de Ben Bella, 1-11-64).
Etat (...). Nous pourrons donc dire en cette deu-
xième année d'indépendance que notre armée
est à la hauteur de notre peuple, à la mesure
de nos espérances et nous ne l'avons jamais
considérée comme un danger pour nos amis...
Nous faisons nôtre l'adage qui dit : Une révo-
lution sans parti, c'est un troupeau sans ber-
ger. » (Discours de Ben Bella, 1-11-64).
« Aujourd'hui l'ANP est unifié : cette unité
la renforce et la rend capable de venir à bout
de toutes les difficultés qui restent à surmonter
et surtout de toute force rétrograde qui se dres-
serait sur le chemin de la Révolution (...). Nos
casernes sont des ruches d'efforts, de discipline
et d'épanouissement... » (Déclaration à « El
Djeich » du ministre Boumedienne, même date.)
la renforce et la rend capable de venir à bout
de toutes les difficultés qui restent à surmonter
et surtout de toute force rétrograde qui se dres-
serait sur le chemin de la Révolution (...). Nos
casernes sont des ruches d'efforts, de discipline
et d'épanouissement... » (Déclaration à « El
Djeich » du ministre Boumedienne, même date.)
A travers les métaphores agraires des leaders
la même ligne politique esi dégagée, celle d'un
« socialisme des casernes ». Le refus de voir
l'unité de la répression par le développement
de l'Etat algérien amène des organisations com-
me l'ORP à des jugements pratiques de ce genre:
« Un certain nombre de mesures positives ont
sté prises par le nouveau pouvoir dans le do-
maine économique et social, sur le plan de la
lutte anti-impérialiste et sur le plan des liber-
tés démocratiques. » Elle note que les rela-
tions U.R.S.S.-Algérie étaient maintenues et que
le pouvoir « évoluait à gauche ». En conclusion,
elle « appelle à une solution démocratique et
pacifique à la situation créée par le 19 juin »
par des « formes de luttes légales » (La Révo-
lution Socialiste, revue théorique du parti
d'avant-garde OHP, 1967, numéro 1k
la même ligne politique esi dégagée, celle d'un
« socialisme des casernes ». Le refus de voir
l'unité de la répression par le développement
de l'Etat algérien amène des organisations com-
me l'ORP à des jugements pratiques de ce genre:
« Un certain nombre de mesures positives ont
sté prises par le nouveau pouvoir dans le do-
maine économique et social, sur le plan de la
lutte anti-impérialiste et sur le plan des liber-
tés démocratiques. » Elle note que les rela-
tions U.R.S.S.-Algérie étaient maintenues et que
le pouvoir « évoluait à gauche ». En conclusion,
elle « appelle à une solution démocratique et
pacifique à la situation créée par le 19 juin »
par des « formes de luttes légales » (La Révo-
lution Socialiste, revue théorique du parti
d'avant-garde OHP, 1967, numéro 1k
Le sabotage de l'autogestion devient plus évi-
dsnt, avec beaucoup d'autres choses, et il faut
être bien aveugle pour ne pas voir que de 1962
à 1968, c'est le même Etat algérien qui se ren-
force, composé du même personnel technique,
dirigé par les mêmes couches sociales.
dsnt, avec beaucoup d'autres choses, et il faut
être bien aveugle pour ne pas voir que de 1962
à 1968, c'est le même Etat algérien qui se ren-
force, composé du même personnel technique,
dirigé par les mêmes couches sociales.
« Du point de vue économique, le.s mesures
d'intérêt national prises par le régime sont loin
d'être négligeables (...). S'il {allait caractériser
le bilan du nouveau régime par une formule,
nous dirions aue J!a colonel Boumedienne est en
train de construire l'Etat », avoue Chaliand (Par-
tisans, juil.-sept. 1966 avant de se demander
candidement : « II s'agit maintenant se savoir
quel usage sera fait des structures mises en
place. »
d'intérêt national prises par le régime sont loin
d'être négligeables (...). S'il {allait caractériser
le bilan du nouveau régime par une formule,
nous dirions aue J!a colonel Boumedienne est en
train de construire l'Etat », avoue Chaliand (Par-
tisans, juil.-sept. 1966 avant de se demander
candidement : « II s'agit maintenant se savoir
quel usage sera fait des structures mises en
place. »
Ainsi on en est arrivé à la conclusion : « Quel
est le pouvoir exercé par ceux qui produisent ?
Aucun, pas même dans le secteur autogéré »
(rapport de l'U.G.T.A., mai 1966). Est-ce à dire
qu'il n'y a rien eu, que l'autogestion était juste
un mot dans les discours officiels, « à l'imitation
des Yougoslaves ? » Mais pourquoi imiter les
Yougoslaves, jouer avec le feu; c'est un thème
dangereux crue l'autogestion.
est le pouvoir exercé par ceux qui produisent ?
Aucun, pas même dans le secteur autogéré »
(rapport de l'U.G.T.A., mai 1966). Est-ce à dire
qu'il n'y a rien eu, que l'autogestion était juste
un mot dans les discours officiels, « à l'imitation
des Yougoslaves ? » Mais pourquoi imiter les
Yougoslaves, jouer avec le feu; c'est un thème
dangereux crue l'autogestion.
Il y a eu une lutte pour l'autogestion, avec
des réalisations concrètes. Tous le monde est
d'accord pour admettre qu'elle est née spontané-
ment d'une nécessité économique. Et le soin
qu'on a mis à l'officialiser, à l'étouffer, puis à la
des réalisations concrètes. Tous le monde est
d'accord pour admettre qu'elle est née spontané-
ment d'une nécessité économique. Et le soin
qu'on a mis à l'officialiser, à l'étouffer, puis à la
réprimer, rnoïtre l'importance que lui ont atta-
ché ses ennemis. Et ses ennemis, du début à la
fin, ont été ceux que les travailleurs algériens
ont violemmsnt dénoncés sous l'étiquette de
« bureaucrate îs », l'Etat algérien.
ché ses ennemis. Et ses ennemis, du début à la
fin, ont été ceux que les travailleurs algériens
ont violemmsnt dénoncés sous l'étiquette de
« bureaucrate îs », l'Etat algérien.
Certes, le secteur autogéré n'a pas été par-
tout un succès économique, l'autogestion soule-
vait des difficultés techniques que nous avons
soulignées diemin faisant. Mais, paradoxale-
ment, les propres maux qu'on redoudait de voir
si l'autogesticn s'étendait sans contrôle étatique,
c'est-à-dire k: désorganisation économique, le
pillage individuel, le féodalisme, c'est l'Etat al-
gérien lui-même qui les étale aux yeux de tous
a mesure qu'il se renforce. La plupart des Algé-
riens actuellement sont écœurés par leur Etat.
Seules l'arméi; et la police (surtout la Sûreté na-
tionale), sont nombreuses et bien équipées, et,
en face d'elles, la population est saignée par
une guerre de huit ans. Là encore, le capitalisme
français a fai: beaucoup pour l'Etat algérien.
tout un succès économique, l'autogestion soule-
vait des difficultés techniques que nous avons
soulignées diemin faisant. Mais, paradoxale-
ment, les propres maux qu'on redoudait de voir
si l'autogesticn s'étendait sans contrôle étatique,
c'est-à-dire k: désorganisation économique, le
pillage individuel, le féodalisme, c'est l'Etat al-
gérien lui-même qui les étale aux yeux de tous
a mesure qu'il se renforce. La plupart des Algé-
riens actuellement sont écœurés par leur Etat.
Seules l'arméi; et la police (surtout la Sûreté na-
tionale), sont nombreuses et bien équipées, et,
en face d'elles, la population est saignée par
une guerre de huit ans. Là encore, le capitalisme
français a fai: beaucoup pour l'Etat algérien.
Il y a aussi les endormeurs de toutes espèces
qui ont correctement fait leur travail confusion-
niste. Il y a eu confusion idéologique dans le
FLN avant l'ir.dépendance, mais moins qu'on ne
le dit généralement ; la charte d'Alger disait :
« Le principe essentiel de la période de transi-
tion est que las mêmes moyens ne peuvent être
mis indifféremment au service de n'importe
quelle fin. On ne peut développer une société
nouvelle à pcriir de méthodes et de structures
qui font partie du développement capitaliste. Or,
le principe de la scission de la société en sphères
dirigeantes qui encadrent et les masses qui exé-
cutent est le principe même de la société capi-
taliste. » A pttrtir de là, on pouvait aller loin ;
mais combien approuvaient vraiment ce passage
de la charte d'Alger ? Et surtout parmi ceux-
là, beaucoup snt encore cru que l'Etat pourrait
être conservé à côté de la nouvelle société en
développemen, l'autogestion, et que celle-ci,
sans le combe ttre directement, pourrait le vider
peu à peu de son contenu autoritaire. Ils ont
donc accepté sans protester que l'Etat naissant
légalise l'autc gestion, lui accorde des « sec-
teurs » où elle était « dans son droit ». En
échange, l'Etat naissant pouvait se consolider
sans troubles graves.
qui ont correctement fait leur travail confusion-
niste. Il y a eu confusion idéologique dans le
FLN avant l'ir.dépendance, mais moins qu'on ne
le dit généralement ; la charte d'Alger disait :
« Le principe essentiel de la période de transi-
tion est que las mêmes moyens ne peuvent être
mis indifféremment au service de n'importe
quelle fin. On ne peut développer une société
nouvelle à pcriir de méthodes et de structures
qui font partie du développement capitaliste. Or,
le principe de la scission de la société en sphères
dirigeantes qui encadrent et les masses qui exé-
cutent est le principe même de la société capi-
taliste. » A pttrtir de là, on pouvait aller loin ;
mais combien approuvaient vraiment ce passage
de la charte d'Alger ? Et surtout parmi ceux-
là, beaucoup snt encore cru que l'Etat pourrait
être conservé à côté de la nouvelle société en
développemen, l'autogestion, et que celle-ci,
sans le combe ttre directement, pourrait le vider
peu à peu de son contenu autoritaire. Ils ont
donc accepté sans protester que l'Etat naissant
légalise l'autc gestion, lui accorde des « sec-
teurs » où elle était « dans son droit ». En
échange, l'Etat naissant pouvait se consolider
sans troubles graves.
Mais peut-oi consolider, conserver un sec-
teur autogéré sans attaquer tout ce qui n'est
pas autogéré \ La tactique des « bastions du
socialisme » est une tactique défensive, elle ne
vaut rien ; l'autogestion ne se met pas en con-
serve, pas plu 5 que l'anarchisme, ils y pourris-
sent. L'autogestion ne pouvait que s'étendre ou
dépérir, elle n3 pouvait s'étendre qu'en affron-
tant l'Etat. Le plus tôt possible aurait été le
mieux, car dès qu'un Etat se crée, il ne cesse
de se renforcer. Le travail de groupes révolu-
tionnaires étail, par la diffusion d'informations
réelles, d'accélérer la prise de conscience col-
lective de cetto idée : il n'y a pas les « mau-
vais » bureaucrates et les « bons » fonction-
naires d'Etat, il n'y a pas de coexistence paci-
fique possible avec l'Etat ; sa vie est la mort
de l'Autogestion.
teur autogéré sans attaquer tout ce qui n'est
pas autogéré \ La tactique des « bastions du
socialisme » est une tactique défensive, elle ne
vaut rien ; l'autogestion ne se met pas en con-
serve, pas plu 5 que l'anarchisme, ils y pourris-
sent. L'autogestion ne pouvait que s'étendre ou
dépérir, elle n3 pouvait s'étendre qu'en affron-
tant l'Etat. Le plus tôt possible aurait été le
mieux, car dès qu'un Etat se crée, il ne cesse
de se renforcer. Le travail de groupes révolu-
tionnaires étail, par la diffusion d'informations
réelles, d'accélérer la prise de conscience col-
lective de cetto idée : il n'y a pas les « mau-
vais » bureaucrates et les « bons » fonction-
naires d'Etat, il n'y a pas de coexistence paci-
fique possible avec l'Etat ; sa vie est la mort
de l'Autogestion.
(Textes publiés dans la revue « Noir et Rou-
ge » numéro 34, 36 et 38 en 1986 et 1967.)
ge » numéro 34, 36 et 38 en 1986 et 1967.)
38
I C. O.
SOMMAIRE DU SUPPLEMENT I
î. Il s'est passé quelque chose .......... 3
II. La société capitaliste ................ 6
III. Le mouvement étudiant ............ 10
IV. Le mouvement ouvrier ................ 17
V. Participation et réformes de structures . . 25
VI. L'organisation de la production et de la
distribution par les producteurs eux-
mêmes .............................. 31
distribution par les producteurs eux-
mêmes .............................. 31
Annexes :
Cinq thèses sur la lutte de classe ....... 35
Ce que nous sommes, ce que nous voulons 37
fiOSR ET ROUGE, Cahiers d'études anarchistes-communistes. Le directeur de la publication : Pascale CLARIS. Corres-
pondance : LAGANT, B.P. 113, Paris 18e (ne pas mentionner « Noir et Rouge »). Versements: Pascale CLARIS.
C.C.P. 20.020-93 Paris.
pondance : LAGANT, B.P. 113, Paris 18e (ne pas mentionner « Noir et Rouge »). Versements: Pascale CLARIS.
C.C.P. 20.020-93 Paris.
Category
Title
L'Autogestion L'État et la Révolution (Supplément Noir et Rouge no.41)
Date
05/1968